Questions et Réponses

Sénat de Belgique

SESSION DE 1996-1997


Bulletin 1-37

28 JANVIER 1997

Questions posées par les Sénateurs et réponses données par les Ministres

(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais


Ministre de la Défense nationale

Question nº 62 de M. Destexhe du 25 novembre 1996 (Fr.) :
Pensions de réparation.

La loi du 1er août 1985 portant des mesures fiscales traite du problème de l'aide aux victimes d'actes intentionnels de violence. L'article 42 de cette même loi stipule qu'une indemnité spéciale pour dommages moraux sera versée aux personnes qui sont contraintes de quitter leur service pour inaptitude physique.

1. Pouvez-vous me donner le montant de cette indemnité et les conditions d'octroi de celle-ci ?

2. Qui est chargé de verser cette indemnité ?

3. En cas de décès de la personne qui doit recevoir cette indemnité, la loi précise qu'elle sera donnée à ses ayants droit qui sont le conjoint ou, à défaut, les membres de la famille à charge de la victime (art. 42, § 2, alinéa 2) :

­ Qu'entendez-vous par « personne à charge de la victime » ? Suffisait-il de vivre sous son toit ou faut-il des liens de sang entre la victime et cette personne ?

­ En cas de remariage, si la seconde épouse a un enfant issu de son premier mariage, celui-ci est-il considéré comme personne à charge ? En cas de réponse positive, y a-t-il une différence entre l'indemnité octroyée à cet enfant et les propres enfants de la victime devenus orphelins ?


Réponse : L'honorable membre est prié de trouver ci-après la réponse à ses questions.

I. L'indemnité spéciale pour dommages moraux est octroyée à la victime ou à ses ayants droit, dès que les conditions fixées par l'article 42 de la loi du 1er août 1985 sont réunies.

Les conditions d'octroi sont les suivantes :

1. Le dommage doit résulter, soit de faits constitutifs d'actes intentionnels de violence, soit d'explosion d'engins de guerre ou d'engins piégés, pour autant que ces faits ou cette explosion soient survenus :

a) en temps de paix;

b) lors de l'exécution d'une mission de police, de protection, de secours ou de déminage;

c) postérieurement au 1er juillet 1979.

2. En ce qui concerne le ministère de la Défense nationale, les victime du fait constitutif d'acte intentionnel de violence ou de l'explosion d'engins de guerre ou d'engins piégés peuvent être les membres du personnel des forces armées ou les agents civils du département, qu'ils soient statutaires ou contractuels.

3. Le dommage occasionné aux victimes à la suite du fait constitutif d'acte intentionnel de violence ou de l'explosion, doit consister :

­ soit dans le décès de ces victimes;

­ soit dans l'obligation qui en résulte pour elles de quitter définitivement le service pour inaptitude physique.

4. Il doit exister un lien de causalité entre le dommage et le fait constitutif d'acte intentionnel de violence ou d'explosion d'engins de guerre ou d'engins piégés lors de l'exécution d'une mission de police, de protection, de secours ou de déminage; pour déterminer ce lien, il y a lieu de se référer au droit commun et à la jurisprudence des cours et tribunaux en cette matière.

Le montant de l'indemnité spéciale est fixé à 750 000 francs à 100 % et est lié aux fluctuations de l'indice des prix à la consommation conformément aux règles applicables aux traitements du personnel des ministères.

Le montant de l'indemnité est calculé eu égard à l'indice des prix en vigueur le jour auquel est prise la décision ministérielle (en cas de recours à la procédure administrative préalable) ou la décision judiciaire, en cas d'action en justice.

Le montant actuel de l'indemnité spéciale s'élève à 2 510 025 francs.

II. Étant donné que les indemnités « attentats » constituent un droit dans le chef de la victime et/ou de ses ayants droit, pour autant qu'ils réunissent les conditions fixées par l'article 42, les cours et tribunaux de l'ordre judiciaire sont compétents pour se prononcer sur ce droit.

Afin d'accélérer et de faciliter la procédure d'octroi, l'arrêté royal du 23 janvier 1987 a toutefois organisé une procédure administrative facultative à laquelle les intéressés peuvent recourir, préalablement à une éventuelle action en justice. C'est alors le ministre de la Défense nationale qui statue en premier lieu sur les demandes d'octroi des indemnités « attentats ».

En cas de décision défavorable du ministre, une action en justice est évidemment toujours possible.

III. En cas de décès de la victime et si celle-ci était célibataire, veuve, divorcée ou séparée de corps, ses ayants droit sont les membres de la famille à charge de la victime au moment du décès de celle-ci par ordre prioritaire des catégories, c'est-à-dire :

­ 1re catégorie : les enfants dont la filiation à l'égard de la victime est établie, ou les enfants adoptés par elle, ainsi que leurs descendants par représentation;

­ 2e catégorie : ses père et mère;

­ 3e catégorie : ses frères et soeurs;

­ 4e catégorie : tout autre membre de la famille qui justifie avoir assuré l'éducation et l'entretien de la victime, pendant au moins cinq ans avant sa majorité. Par « famille », il y a lieu d'entendre l'ensemble des personnes liées par un lien de parenté ou d'alliance.

Les ayants droit énumérés ci-dessus établissent qu'ils étaient à charge de la victime lorsqu'ils apportent la preuve qu'ils profitaient directement des rémunérations de la victime au moment du décès de cette dernière.

Sont présumés remplir cette condition ceux qui habitaient avec la victime ou chez qui la victime avait son foyer.

Cette présomption peut être renversée, mais c'est alors à l'administration qu'il appartient d'apporter la preuve que ces ayants droit ne profitaient pas directement des rémunérations de la victime.

En cas de pluralité d'ayants droit appartenant à la même catégorie, l'indemnité spéciale est attribuée par parts égales à chacun d'eux.

En cas de remariage de la victime, l'enfant issu du premier mariage du conjoint n'a pas droit à l'indemnité spéciale car cet enfant n'est ni un enfant légitime de la victime, ni un enfant (naturel) reconnu ou un enfant adopté par la victime. Ce droit ne pourrait s'ouvrir que dans des cas particuliers dont la preuve doit être apportée (par exemple lorsqu'un enfant aurait été reconnu par la victime après une procédure de désaveu de paternité ou lorsque cet enfant aurait été adopté par la victime).

IV. Indépendamment de l'indemnité spéciale une indemnité particulière peut en outre être accordée à tout enfant à charge de la victime, égale à 10 % du montant de l'indemnité spéciale.

Les conditions d'octroi de cette indemnité particulière sont les mêmes que celles pour l'octroi de l'indemnité spéciale (voir point I, 1 à 4).

A droit à l'indemnité particulière, toute personne qui a, à l'égard de la victime ou de son conjoint, la qualité d'enfant légitime, d'enfant naturel reconnu ou d'enfant adopté, pour autant qu'elle soit à charge de la victime.

Compte tenu de la référence faite par l'article 42, § 3, à l'article 6 de la loi du 12 janvier 1970, il y a lieu d'admettre que la notion « à charge de la victime » doit être comprise comme suit :

L'enfant qui, au moment du décès de la victime ou au moment où la victime est contrainte de quitter définitivement le service pour inaptitude physique :

­ soit, n'a pas vingt et un ans accomplis;

­ soit, est encore bénéficiaire d'allocations familiales, lorsqu'il a dépassé cet âge;

­ soit, et toujours lorsqu'il a dépassé cet âge, est appelé ou rappelé sous les armes en exécution des obligations imposées par les lois sur la milice, lorsque cette situation a fait précisément cesser son droit de bénéficiaire d'allocations familiales.

Dans le cas où il est satisfait aux conditions requises, l'indemnité particulière peut donc également être octroyée à l'enfant issu du premier mariage du conjoint.