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28 MAI 1997
Procédure d'évocation
La commission a examiné le projet de loi, adopté par la Chambre des représentants par 80 voix contre 58, au cours de ses réunions des 13, 22 et 28 mai 1997.
Il est renvoyé au rapport de la Commission des Affaires sociales de la Chambre des représentants (doc. Chambre 925/12 96/97, pp. 3-9).
Un membre signale que l'État de droit est fondé entre autres sur une bonne administration. Le bon fonctionnement des administrations dépend dans une large mesure de la qualité de la législation. Or, cela pose un grave problème dans notre pays. La qualité déplorable du travail législatif donne lieu à des modifications et des corrections apportées par des lois successives qui accroissent l'insécurité juridique. L'administration n'est plus capable de maîtriser la situation et elle s'en trouve entièrement paralysée.
Il n'est pas étonnant que le Gouvernement fasse fi des objections motivées d'ordre formel qui ont été avancées par les partis de l'opposition lors de l'examen des lois-cadres. Il est cependant moins normal qu'il fasse de même avec les observations du Conseil d'État.
Par souci de clarté, le Conseil d'État a ainsi conseillé au Gouvernement de numéroter les arrêtés royaux. Le Gouvernement, qui attache manifestement plus d'importance à son image qu'au droit du citoyen à disposer d'une législation transparente, n'a pas donné suite à cette observation.
L'article 6 de la loi en projet montre le résultat d'une telle attitude. Il contient, en effet, une énumération d'intitulés très longs que seuls les spécialistes pourront comprendre. En attribuant un numéro aux arrêtés royaux susvisés, on réduirait les risques de confusion à un minimum et on pourrait les reconnaître immédiatement.
L'intitulé même de la loi en projet prête à confusion. Les articles 12, 13 et 14 du projet de loi n'ont plus rien à voir avec la confirmation d'arrêtés de pouvoirs spéciaux. Il s'agit de simples corrections que l'on apporte à des dispositions adoptées antérieurement.
Dans l'intérêt du justiciable, l'intervenant demande que le Gouvernement tienne compte au moins des observations formulées par le Conseil d'État.
La ministre répond que les articles 12, 13 et 14 relèvent de la compétence du ministre de la Santé publique et des Pensions.
Elle admet qu'il n'est pas facile de se retrouver dans les différentes réglementations, et ce en particulier pour les néophytes. Il s'agit pour la plus grande part d'un problème propre au droit social et à la manière dont il est élaboré.
Intitulé
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent un amendement (nº 77) tendant à compléter l'intitulé par les mots « et portant certaines dispositions en matière de pensions ».
Un des auteurs de l'amendement se réfère à ce qu'il a dit lors de la discussion générale. La loi en projet ne vise pas seulement à confirmer des arrêtés de pouvoirs spéciaux, elle contient également des dispositions autonomes qui n'ont rien à voir avec le contenu des arrêtés royaux. Il est inhabituel de mélanger les deux types de dispositions dans un même arrêté royal. Du point de vue légistique, il y a dès lors lieu, soit d'adapter l'intitulé, soit de regrouper les dispositions autonomes dans un texte distinct.
Les auteurs de l'amendement ont opté pour la solution la plus simple, laquelle consiste à compléter l'intitulé.
L'amendement nº 77 est rejeté par 7 voix contre 3.
Article 6
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent un amendement (nº 3) qui vise à compléter le 1º de cet article. L'un des auteurs explique l'amendement de la manière suivante : l'article 6, 1º, vise à porter confirmation de l'arrêté royal qui prévoit, d'une part, de prolonger la norme de croissance et, d'autre part, d'habiliter le Roi à déterminer chaque année quelles dépenses exceptionnelles ne relèvent pas de l'application de la norme de croissance. Le Roi s'attribue donc la possibilité illimitée de déroger chaque année à la norme de croissance, fût-ce pour des dépenses exceptionnelles, dont la nature n'est toutefois précisée ni dans le texte même, ni dans le rapport au Roi. Il appartiendra donc au Roi de juger lui-même en toute autonomie de ce caractère exceptionnel. L'amendement vise à ne pas permettre au Roi de déroger à la norme de croissance.
Non seulement le Conseil d'État a estimé dans son avis que l'article 10, 5º, de la loi sur les pouvoirs spéciaux dans le domaine social n'attribue pas au Roi un pouvoir aussi étendu de dérogation à la norme de croissance, mais le groupe de l'intervenante s'oppose également pour des raisons politiques à cette exception à la norme de croissance.
L'intervenante souhaite que la ministre des Affaires sociales indique comment l'on financera un éventuel dépassement de 1,5 % de la norme. En outre, la membre souhaite savoir ce que la ministre entend par des facteurs « exogènes » qui pourraient entraîner le dépassement de la norme de 1,5 % (voir le rapport de la Commission des Affaires sociales de la Chambre, doc. Chambre, 1996-1997, nº 925/12, p. 11).
La ministre des Affaires sociales rappelle qu'en tout cas, la conclusion d'accords nouveaux entre les partenaires sociaux ne peut pas être une circonstance imprévue éventuelle. Si un accord social est conclu entre les syndicats et les représentants des hôpitaux, avec la garantie du Gouvernement fédéral, l'on ne peut pas argumenter qu'il s'agit là d'une circonstance imprévue (l'accord social de 1991 a été totalement respecté, à deux points près : le remplacement direct des infirmiers en cas de maladie et l'intégration totale du forfait par institution dans la journée d'hospitalisation pour l'hôpital).
Le coût de cet accord social s'est élevé à environ 30 milliards. Dans ce cadre, des révisions globales des barèmes sont également exclues.
Par ailleurs, l'on peut bel et bien considérer comme des circonstances imprévues l'exécution d'un protocole d'accord entre les communautés, les régions et les autorités fédérales concernant l'accueil des personnes âgées. L'on a décidé de convertir 25 000 lits de maisons de repos ordinaires en lits de maisons de repos et de soins dans le cadre des places existantes. En effet, les personnes âgées qui arrivent dans une maison de repos nécessitent en général plus de soins que par le passé parce qu'en moyenne, elles prennent à un âge plus avancé la décision d'aller vivre en maison de repos. Cette conversion pourrait coûter 1 milliard de francs supplémentaires, en fonction du nombre de lits qui deviendront des lits auxquels le forfait M.R.S. est applicable. Une telle mesure a un caractère imprévu parce que l'I.N.A.M.I. connaît le nombre des personnes âgées qui vivent dans les maisons de repos, mais pas leur degré de dépendance. Parallèlement à cette conversion, l'on modifiera également l'échelle de Katz, qui est devenue un instrument d'évaluation dépassé.
Malgré les observations du Conseil d'État, il est inévitable de devoir prolonger la norme de croissance de 1,5 %, si l'on veut que la Belgique soit en 1997 dans le groupe de tête des pays qui participeront à l'U.M.E. Pour l'après 1997, le Gouvernement se concertera avec les partenaires sociaux et le Parlement, étant entendu qu'il n'y aura pas de marge pour des dépenses supplémentaires.
Le coauteur de l'amendement souhaiterait que la ministre lui explique comment elle sanctionnera le dépassement de la norme de 1,5 %.
La ministre répond qu'il faudra prendre des mesures de correction, telles qu'elles ont été prévues pour les maisons de repos.
Le membre fait remarquer à la ministre que, vu l'avis négatif du Conseil d'État concernant le pouvoir du Roi de déroger à la norme de 1,5 %, le risque existe que les personnes sanctionnées contestent juridiquement la décision de la ministre et que, par conséquent, le Gouvernement fédéral ne puisse pas appliquer les sanctions.
La ministre réplique que les personnes concernées du secteur ont pris l'habitude de contester les décisions des autorités : parfois avec succès, parfois sans.
Elle cite à cet égard l'exemple concret des mesures prises en biologie clinique que plusieurs ont contestées, mais dans le cadre desquelles le Gouvernement fédéral a malgré tout obtenu, moyennant des adaptations juridiques, qu'aucun remboursement ne devrait être effectué. Le temps décidera si des mesures de correction s'avèrent ou non nécessaires.
Elle souligne en outre qu'il appartient aux pouvoirs publics de veiller à ne pas introduire d'avance dans le système un point certain de contestation lorsqu'elles élaborent une réglementation. L'avis du Conseil d'État était en tout cas suffisamment clair sur ce point, avec pour conséquence que des contestations sont quasiment inévitables.
L'intervenante fait en outre remarquer que des membres de la majorité ont également formulé des observations sur cette procédure en Commission des Affaires sociales de la Chambre : ainsi M. Jan Lenssens (CVP) a-t-il par exemple déclaré que pour lui, on atteint ici la limite du tolérable en ce qui concerne les délégations que le législateur peut accorder au pouvoir exécutif (doc. Chambre, 1996-1997, nº 925/12, p. 10). La compétence du Parlement en cette matière est en tout cas complètement vidée de son sens.
La ministre souligne qu'« atteindre » la limite n'est pas synonyme de « dépasser » la limite.
Elle est par ailleurs consciente que la norme de 1,5 % devra être réexaminée à terme. Ce sera en tout cas nécessaire en raison du vieillissement de la population dans les trois secteurs les plus préoccupants : les hôpitaux, les médicaments et les soins aux personnes âgées.
L'intervenante s'en tient à son point de vue selon lequel le Gouvernement fédéral pratique la politique de l'autruche en cette matière.
L'amendement nº 3 est rejeté par 7 voix contre 4.
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent ensuite un amendement (nº 4) visant à supprimer le 2º du présent article. Ils justifient cet amendement comme suit :
L'article 6, 2º, confirme l'instauration d'une intervention forfaitaire de 500 francs par admission dans un hôpital pour des prestations techniques médicales spéciales, et ce indépendamment de l'exécution ou non de cette prestation au cours de l'hospitalisation. Ce montant forfaitaire peut être cumulé avec la participation du bénéficiaire au coût d'une ou plusieurs prestations.
En d'autres termes, il est possible que le patient doive payer deux fois pour une seule et même prestation technique parce que de la sorte, un patient admis dans un hôpital pour cette prestation technique est assimilé à un patient ambulatoire.
L'amendement propose de supprimer ce forfait. Il est par conséquent proposé de supprimer l'article 6, 2º.
La ministre souligne qu'il ne s'agit pas d'un double paiement : il s'agit uniquement d'un alignement sur ce qui existe déjà dans le secteur ambulatoire. Elle attire en outre l'attention sur le fait que ce forfait compte comme ticket modérateur pour la prise en considération de la franchise sociale et fiscale.
L'amendement nº 4 est rejeté par 7 voix contre 4.
MM. Hazette et Destexhe proposent par amendement (nº 66) d'adapter l'article 6, 3º, en fonction de l'observation du Conseil d'État; celui-ci recommande en effet de ne pas fonder cet arrêté royal sur le 1º de l'article 3, § 1er , de la loi du 26 juillet 1996 visant à réaliser les conditions budgétaires de la participation de la Belgique à l'U.E.M. européenne, car le présent arrêté royal vise à produire de nouvelles recettes alors que le point 1º concerne les dépenses de l'État.
La ministre propose de laisser le texte du projet de loi inchangé.
L'amendement nº 66 est rejeté par 7 voix contre 4.
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent un amendement (nº 5) visant à supprimer le 3º de cet article. Un des auteurs de l'amendement le justifie de la façon suivante :
L'arrêté de pouvoirs spéciaux à confirmer prévoit la création d'une cellule administrative provisoire auprès de l'I.N.A.M.I., cellule chargée de préparer le transfert des services et du personnel du Fonds national de retraite des ouvriers mineurs à l'institut précité. Le cadre de cette cellule serait composé d'un administrateur général et d'un conseiller général.
Cet arrêté de pouvoirs spéciaux, qui sert en fait à caser un certain nombre de personnes liées à des partis politiques, soulève en outre des questions dans le chef du Conseil d'État.
Un différend oppose en effet le Gouvernement fédéral au Conseil d'État en ce qui concerne la question de savoir qui peut être nommé dans la cellule administrative provisoire (et définitive) créée au sein de l'I.N.A.M.I.
Le Conseil d'État estime qu'il ne peut s'agir que de l'ancien personnel du Fonds national de retraite des ouvriers mineurs et des caisses de prévoyance. Le Gouvernement fédéral estime quant à lui que d'autres personnes peuvent également être nommées.
Le Conseil d'État a formulé l'observation suivante : « Sauf en ce qui concerne l'appartenance linguistique, le projet lui-même ne contient aucune précision relative aux conditions dans lesquelles les candidats peuvent être nommés à l'une des fonctions, visées dans le projet, d'administrateur général et de conseiller général. Il ne pourra toutefois en résulter que l'application de l'arrêté en projet puisse se faire en ignorant la prescription de l'article 14, alinéa 2, de la loi précitée du 26 juillet 1996, selon laquelle les membres du personnel de la cellule administrative provisoire seront repris d'office dans la cellule administrative visée à l'article 135 de la loi du 29 avril 1996 portant des dispositions sociales, et l'exigence, inscrite dans cette dernière disposition législative, que la cellule administrative (définitive) soit composée exclusivement du personnel de l'administration centrale du Fonds national de retraite des ouvriers mineurs et des caisses de prévoyance.
Il résulte, en effet, de la combinaison des dispositions législatives précitées que les fonctions visées dans le projet ne pourront être occupées que par les membres du personnel mentionnés ci-dessus. »
Enfin, l'intervenante s'interroge sur l'urgence de cette mesure et sur la nécessité de recourir à un arrêté de pouvoirs spéciaux.
La ministre esquisse brièvement l'état de la question en ce qui concerne le Fonds national de retraite des ouvriers mineurs : actuellement, ce fonds examine encore quelque 1 000 dossiers. Deux problèmes se posent : d'une part, celui des pensions, d'autre part, celui de l'invalidité.
Ayant été interpellée à ce sujet à la Chambre des représentants, la ministre a répondu que ledit fonds est important surtout pour les régions de Liège, de Hasselt et de Charleroi. L'ensemble du personnel employé dans les bureaux régionaux reste sur place afin de pouvoir traiter des dossiers des ouvriers mineurs en restant près d'eux; de cette façon, le seuil reste suffisamment bas pour que les ouvriers mineurs puissent s'informer quant à l'état de leur compte individuel. L'on a également calculé qu'il n'y aura quasi plus de dossier à examiner aux alentours de 2005-2010. C'est dans cette perspective que l'on a décidé de dissoudre le Fonds national de retraite des ouvriers mineurs et de confier ses activités aux deux grands parastataux qui étant donné la technicité des deux dossiers sont les plus aptes à s'en occuper. Il sera créé, au sein de l'I.N.A.M.I., une cellule d'accueil chargée de régler tous les problèmes relatifs à l'invalidité et, au sein de l'O.N.S.S., une cellule d'accueil chargée d'examiner les dossiers relatifs aux pensions. Les deux cellules seront gérées par un administrateur général, assisté par un conseiller général. L'on transférera également auxdites cellules le personnel actuel du fonds, qui sera mis à leur disposition. L'on a cependant prévu que le comité de gestion actuel du Fonds national de retraite des ouvriers mineurs sera maintenu au cours de la phase transitoire.
Contrairement à ce que prétendent les auteurs de l'amendement, l'on ne nommera pas de nouveaux fonctionnaires à de nouveaux postes ou grades.
La ministre précise toutefois que l'on mettra à la tête de la cellule d'accueil qui fonctionnera au sein de l'I.N.A.M.I. un fonctionnaire de l'I.N.A.M.I., eu égard aux connaissances que l'on y a accumulées à propos des dossiers d'invalidité. Ce fonctionnaire ne bénéficiera d'aucune promotion et il conservera son grade actuel. En outre, le cadre prévu est temporaire.
La ministre souligne enfin qu'il n'y a plus que 309 dossiers d'ouvriers mineurs actifs ou invalides. Il s'agit surtout de mineurs limbourgeois. Le patrimoine du Fonds national de retraite des ouvriers mineurs sera transmis à l'I.N.A.M.I. L'on pourra procéder à la réalisation de ce patrimoine et le produit de cette réalisation sera versé à la gestion globale.
Le coauteur de l'amendement estime que les explications de la ministre montrent qu'il est en fait superflu de maintenir en vie une cellule administrative comptant des fonctionnaires dirigeants, alors qu'il n'y a plus que quelque 1 000 dossiers à gérer et que ce nombre est en train de fondre rapidement. L'intervenant estime que toute cellule d'accueil, même temporaire, serait superflue. Il trouve par ailleurs que la parole de la ministre n'est pas une garantie suffisante en l'absence de toute réglementation légale spécifique.
La ministre répète que l'on ne procèdera pas à de nouvelles nominations pour pourvoir aux postes dirigeants des deux cellules d'accueil : ceux qui les occuperont ont déjà le grade qui sera celui de leurs fonctions au sein desdites cellules, à savoir celle d'administrateur général et celle de conseiller général.
Le commissaire rappelle que le Conseil d'État a émis un avis négatif. Cela signifie une fois de plus que les personnes qui estimeront avoir été lésées au moment des désignations aux postes à pourvoir au sein des cellules d'accueil et qui ne faisaient pas partie du personnel du Fonds national de retraite des ouvriers mineurs pourront attaquer ces désignations devant le Conseil d'État, auquel cas l'administration risquera à nouveau de devoir consacrer plus d'énergie à trancher des conflits éventuels qu'à mener une politique en matière d'assurance-maladie.
La ministre déclare ne pas s'attendre à des contestations, puisque, pour autant qu'elle sache, plus aucun intéressé ne travaille au Fonds national de retraite des ouvriers mineurs.
L'amendement nº 5 est rejeté par 7 voix contre 4.
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent un amendement (nº 6) visant à supprimer l'article 6, 4º, pour les raisons suivantes : l'arrêté de pouvoirs spéciaux en question vise à autoriser le Roi, jusqu'au 31 août 1997, à modifier la nomenclature des médicaments sans tenir compte de la procédure prévue à cet effet et la nomenclature des préparations magistrales sans tenir compte des critères d'enregistrement.
Les auteurs ne sont pas convaincus que lesdites mesures permettront de réaliser des économies. Ils s'attendent, au contraire, pour ce qui est de la suppression du remboursement d'un grand nombre de préparations magistrales, à voir se développer un phénomène de substitution. Il s'ensuivra que les préparations magistrales seront remplacées par des produits pharmaceutiques coûtant plus cher, ce qui se traduira, pour l'assurance-maladie, non pas par une économie, mais par une dépense supplémentaire.
La ministre des Affaires sociales souligne que le premier projet d'arrêté royal relatif aux préparations magistrales, qui visait à développer un certain parallélisme par rapport au système de remboursement des spécialités médicamenteuses qui sont déjà remboursées depuis 1992 a été revu de manière fondamentale à la lumière du rapport scientifique de M. De Volder, et ce particulièrement dans trois domaines.
Sur la base de données scientifiques fournies par des spécialistes, l'on a décidé de prévoir à nouveau un remboursement en ce qui concerne une série d'affections, comme l'ostéoporose chez les femmes au moment de la ménopause, une série d'affections cutanées, comme le psoriasis, et une série de poudres à base de talc qui sont utilisées en pédiatrie. L'on a décidé, en outre, en concertation avec le secteur, l'A.P.B. et l'industrie pharmaceutique, que toutes les préparations magistrales de produits de base qui font déjà l'objet d'un remboursement en tant que spécialité (par exemple, un médicament contre les ulcères de l'estomac, appelé Tagamet, et une série de pommades anti-allergiques et anti-mycosiques), feront également l'objet d'un remboursement à l'avenir.
L'industrie pharmaceutique a toutefois demandé pour éviter le développement d'une concurrence aux dépens du secteur que l'on définisse des critères de qualité et fixe des dosages.
Les pharmaciens ont accepté également de réduire leurs honoraires pour les préparations magistrales en fonction du nombre de gélules ou de pilules/suppositoires à préparer : à partir de la préparation de 20 gélules, pilules ou suppositoires, ils appliqueront un tarif dégressif. De cette manière, pas mal de préparations magistrales continueront d'être remboursées pour le patient.
Il reste toutefois un problème pour l'aide aux toxicomanes : actuellement, on ajoute un produit à la méthadone pour qu'elle ne soit pas injectable. L'injection de méthadone comporte en effet un risque de surdose. Cette préparation doit encore être incluse dans la liste des préparations magistrales à rembourser.
L'arrêté royal confirmé par l'article 6, 4º, du projet de loi veut également faire en sorte qu'un certain nombre de médicaments puissent être homologués plus vite que ce n'est le cas actuellement. Un remède efficace dans le traitement de la sclérose en plaques pourra ainsi être remboursé prochainement. Par ailleurs, des diminutions de prix sont prévues pour certains médicaments, comme par exemple pour les ulcères, les antidépresseurs, ... Ces médicaments pourront en outre être prescrits par le médecin généraliste pendant trois mois sans devoir effectuer d'abord des examens coûteux.
En résumé, les mesures ont pour effet d'adapter l'arrêté royal initial relatif aux préparations magistrales, qui n'était pas équitable à l'égard des patients.
L'amendement nº 6 est rejeté par 7 voix contre 3 et 1 abstention.
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent ensuite un amendement (nº 7) tendant à supprimer l'article 6, 6º et 7º. L'un des auteurs le justifie comme suit : les arrêtés à confirmer prévoient une réduction linéaire de 2 ou 3 % d'un certain nombre d'honoraires, de prix et de forfaits.
Ces mesures linéaires témoignent d'une manière de légiférer selon le mode « essais et erreurs » : elles ont pour effet de toucher aussi bien ceux qui sont restés dans les limites du budget prévu que ceux qui ont largement dépassé ce budget.
En prenant des mesures linéaires, le Gouvernement met lui-même en péril le processus de responsabilisation qu'il veut engager dans le monde médical. En effet, quelle catégorie professionnelle sera encore disposée à proposer elle-même des mesures d'économie lorsque le dépassement du budget par d'autres se traduit par la prise de sanctions linéaires qui touchent tout le monde ?
En outre, certaines mesures ne font que déplacer les problèmes financiers :
la mesure de crise consistant à réduire de 2 % les forfaits O, A, B, C, C + et CD pour les maisons de repos et les M.R.S. fait reporter les conséquences financières sur les personnes âgées ou les C.P.A.S.;
la réduction linéaire des forfaits aura pour conséquence que les M.R.P.A. et les M.R.S. demanderont une augmentation du prix de la journée au Ministère des Affaires économiques. Cette augmentation une fois accordée, c'est évidemment le patient qui en supportera les répercussions financières. Le patient qui ne sera pas en mesure de faire face à cette augmentation de prix se tournera vers le C.P.A.S., lequel se verra à son tour dans l'obligation de récupérer ces dépenses soit à charge des membres de la famille, soit à charge de la collectivité.
La mesure a donc un double effet négatif. Elle doit être remplacée par une mesure qui ne pénalise que ceux qui n'ont pas respecté le budget.
La ministre réplique qu'à partir du 1er avril 1997, la mesure linéaire vis-à-vis des centres de revalidation et du secteur psychiatrique, en ce compris les programmes pour les toxicomanes, a été levée. La mesure a été levée aussi vis-à-vis des dentistes qui ont accepté de sacrifier l'indexation de 1 % pour une couverture meilleure de certaines prestations qui n'étaient pas remboursées.
En ce qui concerne les infirmières à domicile, la mesure est levée à partir du 1er mai 1997. Une nouvelle nomenclature sera publiée le 1er juin 1997.
Les kinésithérapeutes préparent une nouvelle nomenclature; dès la publication de cette nomenclature, la mesure linéaire sera levée.
Quant aux maisons de repos et aux maisons de repos et de soins, il a été demandé de faire des propositions concrètes permettant de mieux déterminer l'enveloppe et d'établir une nouvelle échelle de dépendance.
Restent les négociations avec les hôpitaux et les médecins hospitaliers.
Donc, entre le moment de la publication de l'arrêté royal et la discussion du présent projet de loi, une série de secteurs ont déjà vu lever les mesures linéaires.
Pour ce qui est du prix dans les maisons de repos, celui-ci a été bloqué par le ministre des Affaires économiques et le Service d'inspection contrôle sur place si des suppléments pour toutes sortes de prestations ne sont pas mis à charge des patients.
L'intervenant a souligné à juste titre que pour certains C.P.A.S. et certaines communes, il peut y avoir report sur l'autorité. Il est donc important que dans le secteur des maisons de repos comme dans le secteur hospitalier , des mesures structurelles puissent être mises en place.
L'intervenant remarque que la ministre n'a pas réfuté ses critiques. Ceux qui sont restés dans les limites de leur budget sont également pénalisés, en pouvant toutefois choisir entre une réduction linéaire et une réduction sélective. Ils ne tomberont plus dans le même piège la prochaine fois.
En ce qui concerne le prix de la journée, l'intervenant fait les remarques suivantes. Si l'on refuse d'augmenter le prix de la journée, soit certains services seront facturés séparément, soit la qualité des services diminuera, notamment parce que le personnel aura été réduit.
La ministre lui répond que le secteur des maisons de repos est bien conscient de l'intérêt qu'ont les établissements en question à maintenir leur personnel, parce qu'ils peuvent de cette façon bénéficier de la conversion de R.M.P.A. en M.R.S.
En ce qui concerne le secteur « commercial » (70 % de l'offre à Bruxelles), des discussions sont également en cours.
L'amendement nº 7 est rejeté par 7 voix contre 2.
La commission examine ensuite les amendements nºs 67 et 68, déposés par MM. Hazette et Destexhe, qui visent à compléter respectivement le 6º et le 7º de l'article 6.
Les deux amendements sont rejetés par 7 voix contre 1 et 1 abstention.
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent un amendement (nº 8) visant à supprimer l'8º de l'article 6.
Un des auteurs de l'amendement remarque qu'une fois de plus, le Gouvernement ne se conforme pas à la logique du système. Généralement, le montant du ticket modérateur dépendait du montant des honoraires; à une augmentation des honoraires correspondait une augmentation des tickets modérateurs. Maintenant que l'on assiste à la situation inverse, le ticket modérateur est bloqué de façon nominale et le taux des honoraires à payer par le patient est augmenté. Aussi ces patients ne voient-ils pas pourquoi ils devraient encore consentir des efforts pour maintenir le budget dans des limites raisonnables, puisqu'ils sont constamment pénalisés et ne bénéficient jamais d'une mesure qui pourrait être à leur avantage.
La ministre convient que la réduction des honoraires n'a pas de conséquences pour le patient. Elle rappelle cependant ce qui s'est passé dans certains établissements, où l'on a instauré une « troisième colonne » et où la réduction linéaire est imputée au patient de façon à ce que le médecin continue à toucher le même montant nominal. Tel n'était bien entendu pas le but de la mesure.
L'auteur de l'amendement répond que c'est précisément sur ce point que portent ses critiques. Les solutions recherchées, qui se basent sur une approche budgétaire très restreinte, manquent en effet de cohérence. L'on ne cherche pas à instaurer un système cohérent au sein de l'assurance-maladie qui aboutirait, à terme, et de façon spontanée, à une certaine limitation.
D'une façon ou d'une autre, le patient se voit imposer des charges supplémentaires, sans avoir l'assurance que la situation s'améliorera. Ce n'est pas de cette manière que l'on peut assainir le système. Il faut que tous les acteurs en arrivent à une plus grande responsabilisation.
Comment le citoyen peut-il encore accorder sa confiance à la politique si l'on ne s'en tient pas à la logique qui sous-tend le système ? Il est exact que le patient ne devra pas payer davantage, mais, selon la logique du système, il aurait dû payer moins.
L'amendement nº 8 est rejeté par 7 voix contre 3.
MM. Hazette et Destexhe déposent un amendement (nº 69) visant à compléter l'8º de cet article. Cet amendement est rejeté par 7 voix contre 1 et 1 abstention.
Article 7
M. Coene et Mme Nelis-Van Liedekerke déposent un amendement (nº 9) visant à supprimer cet article.
Les auteurs s'opposent au fait que le Roi est habilité à fixer et à adapter le montant de l'indemnité d'incapacité primaire.
La ministre explique que cet arrêté royal règle l'alignement pour les nouveaux cas du système de l'incapacité primaire sur celui de l'invalidité.
Pour ce qui est du pouvoir donné au Roi, la ministre renvoie à la réponse donnée lors de la discussion générale. L'économie de la mesure est escomptée à 800 millions de francs.
L'amendement est rejeté par 7 voix contre 2.
Article 8
MM. Hazette et Destexhe déposent un amendement (nº 70) qui vise à compléter cet article.
L'amendement est rejeté par 7 voix contre 2.
Article 10
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene proposent par voie d'amendement (nº 10) de supprimer cet article.
L'auteur de l'amendement estime qu'il n'est pas possible de réduire de moitié le supplément d'âge et de reporter à 18 ans le supplément d'âge qui devait être accordé à 16 ans sans tenir compte des revenus des parents.
En outre, ce sera la jeune génération de parents qui devra subir la restriction, alors que les parents dont le premier enfant a déjà reçu le supplément d'âge le conserveront. C'est donc à la jeune génération que l'on fait supporter le poids de la mesure.
La ministre souligne que le régime belge d'allocations familiales est relativement favorable par rapport aux pays voisins. En France, par exemple, un enfant unique n'a pas droit aux allocations familiales. Aux Pays-Bas, lorsque l'enfant atteint l'âge de 18 ans, il ne bénéficie plus d'allocations familiales. En France, l'âge limite est de 20 ans.
Quant au fait que la charge sera supportée par les jeunes générations, on peut en dire autant pour les femmes qui atteignent maintenant l'âge de la retraite.
Certes, la mesure n'est-elle pas idéale, mais elle est sans doute la moins mauvaise des différentes propositions avancées.
La ministre ajoute que l'administration a fourni un excellent travail. Malgré les adaptations, chaque famille a reçu les allocations en temps utile et sans formalités excessives.
Du reste, une troisième série de mesures apportera encore un certain nombre d'améliorations au régime. Ainsi tiendra-t-on compte davantage des droits de l'enfant.
La concertation se poursuit avec les communautés sur ce point.
Répondant à une question de l'auteur de l'amendement sur le montant des économies que rapportera cette mesure, le ministre déclare que dans un premier temps, elle ne permettra d'économiser que 200 millions. À terme, l'économie sera de 5 milliards.
L'auteur de l'amendement souligne encore que la mesure gouvernementale risque de toucher les catégories les plus pauvres.
La ministre répond qu'à terme, la meilleure solution sera de résoudre le problème par la fiscalité.
L'auteur de l'amendement répète qu'elle a encore plaidé récemment pour que l'on dissocie les allocations familiales du statut social des parents et que l'on cherche une solution par le biais de la fiscalité.
L'amendement est rejeté par 6 voix contre 2.
Article 15
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent des amendements (nºs 14 et 15) qui visent à supprimer les 2º et 3º de cet article.
L'un des auteurs fait remarquer qu'en instaurant une cotisation de solidarité de 7,5 % sur la rémunération des étudiants, on va une fois de plus à l'encontre de la cohérence du système. Celle-ci voudrait que celui qui cotise ait également des droits. Il s'agit donc uniquement de se procurer des ressources supplémentaires et, dans la pratique, la mesure aura pour effet d'augmenter encore le travail au noir des étudiants.
En outre, on frappe les étudiants qui financent eux-mêmes leurs études.
La ministre souligne que les étudiants qui ne travaillent qu'un mois par an conservent leur droit aux allocations familiales. En général, ce ne sont pas ces étudiants-là qui financent eux-mêmes leurs études.
L'amendement nº 14 est rejeté par 7 voix contre 3.
En ce qui concerne l'amendement nº 15 au même article, l'un des auteurs souligne que l'arrêté royal visé au 3º de cet article n'a d'autre but que de procurer des ressources supplémentaires à l'État sans avoir aucun effet positif sur l'économie. Au contraire, ses effets seront négatifs et entraîneront une diminution de l'emploi.
La ministre fait observer que le produit de cette cotisation de solidarité servira au financement alternatif de la sécurité sociale. On pourrait avoir un tout autre débat et reconsidérer la notion même de rémunération. On pourrait estimer que tout ce que le travailleur reçoit est réputé rémunération jusqu'à preuve du contraire.
L'amendement nº 15 est rejeté par 7 voix contre 3.
Cette partie a été introduite par la ministre des Affaires sociales (voir le doc. Chambre 925/12-96/97, pp. 24 à 27).
Article 9
MM. Hazette et Destexhe déposent deux amendements à cet article (nºs 71 et 72). Le premier tend à supprimer l'article, le second est un amendement subsidiaire visant à compléter le 3º de l'article.
Mme Nelis-Van Liedekerke et M. Coene déposent un amendement (nº 19) tendant à supprimer le 3º de cet article.
L'auteur du dernier amendement estime que la mesure prévue fait fi des problèmes structurels qui se posent au niveau du financement de l'assurance-chômage. Pour éviter une augmentation des charges salariales, le Gouvernement choisit d'utiliser les moyens disponibles pour les groupes à risque pour rémunérer les chômeurs temporaires et autres.
L'argument avancé par le Gouvernement, selon lequel un grand nombre de secteurs n'ont pas créé d'institut de formation ou n'utilisent absolument pas la cotisation de 0,20 %, ne justifie pas le fait de réduire celle-ci de moitié. D'après l'intervenante, cette mesure est contraire à la politique d'emploi axée sur les groupes-cibles, que mène le Gouvernement. C'est pourquoi elle a déposé un amendement visant à supprimer le 3º de cet article.
La ministre signale que certains secteurs ont consenti des efforts importants en faveur des groupes à risque, alors que d'autres s'en sont abstenus. On ne peut laisser subsister des réserves dans certains secteurs alors que des besoins énormes se font jour dans d'autres.
Elle espère qu'à l'avenir, les partenaires sociaux utiliseront les possibilités qui leur sont offertes pour donner une formation aux catégories de travailleurs qui en ont le plus besoin.
L'auteur de l'amendement réplique que le contrôle exercé sur l'affectation des moyens financiers est manifestement inefficace. Il est étonnant de constater que certains secteurs disposent de réserves importantes, et que l'on a laissé celles-ci en l'état pendant trois ans.
Les amendements nºs 71 et 72 sont rejetés par 7 voix contre 2.
L'amendement nº 19 est rejeté par 6 voix contre 2.
Le ministre signale que l'article 5, § 1er , confirme l'arrêté royal du 23 décembre 1996 portant exécution des articles 15, 16 et 17 de la loi du 26 juillet 1996 portant modernisation de la sécurité sociale et assurant la viabilité des régimes légaux des pensions. Cet arrêté royal est à la base de la modernisation du régime des pensions des travailleurs salariés.
Le § 2 de ce même article est une disposition indépendante qui interdit, rétroactivement, de cumuler une pension et une rémunération complémentaire, versée par l'employeur dans le cadre de la prépension conventionnelle. À partir de 1997, cette matière est réglée par l'arrêté royal précité du 26 juillet 1996.
L'article 11, 1º, confirme l'arrêté royal du 4 décembre 1996 portant des mesures en vue d'adapter la réglementation relative au financement de l'indexation des rentes du régime de la capitalisation.
Cet arrêté royal prévoit que les coûts de l'indexation des rentes pour l'exercice 1997, et qui s'élèvent à 3 milliards de francs, sont imputés au régime de la capitalisation instauré à l'O.N.P.
Le 2º de cet article confirme l'arrêté royal du 16 décembre 1996 modifiant la loi du 30 mars 1994 portant des dispositions sociales. Conformément à cet arrêté royal, l'on procédera dorénavant d'office à une retenue de solidarité sur les capitaux qui sont versés en tant qu'avantages complémentaires à partir du 1er janvier 1997. La retenue a lieu le jour où les capitaux sont versés.
Les articles 12, 13 et 14 contiennent de simples dispositions normatives.
L'article 12 confirme les retenues de solidarité qui ont été effectuées entre le 1er janvier 1995 et le 10 août 1996, pour autant que celles-ci sont conformes aux dispositions des articles 68 à 68quinquies de la loi du 30 mars 1994, telle que remplacée par l'arrêté royal visé à l'article 11, 2º.
L'article 13 concerne également la cotisation de solidarité. L'on tiendra désormais toujours compte, pour la conversion des rentes fictives qui affèrent à des pensions ou des avantages complémentaires payés sous la forme d'un capital, de l'âge de l'intéressé au jour du paiement du capital, même si la pension légale n'a pas encore pris cours à ce moment.
De plus, la partie de la retenue qui correspond à des rentes fictives afférentes aux capitaux versés avant le 1er janvier 1997 ne sera désormais effectuée que pendant une période limitée de 15 ans.
Enfin, l'article 14 complète la base légale existante en ce qui concerne les retenues de solidarité.
Un membre signale qu'il a reçu, comme probablement d'autres commissaires, une lettre d'une organisation de prépensionnés, laquelle demande à être entendue par la commission au sujet des articles qui font actuellement l'objet de la discussion.
Le ministre répond que la commission a bien entendu le droit d'entendre les personnes ou les organisations qu'elle souhaite. Il souligne cependant qu'à la demande des organisations concernées, l'on a créé, au cours de la législature en cours, un comité consultatif, ce qui a permis d'organiser une concertation structurée avec toutes les associations concernées. Les mesures qui sont soumises à l'avis de la commission ont également été débattues au sein de ce comité consultatif. L'organisation qui demande à présent à être une fois de plus entendue par la commission ne représente certainement pas la majorité de ce comité.
L'intervenant réplique que les différents pouvoirs du pays ont, chacun, leurs propres responsabilités et doivent les assumer. En prenant les arrêtés de pouvoirs spéciaux, le Gouvernement a bien entendu consulté un certain nombre d'instances. Lorsque le Parlement est invité à confirmer ces arrêtés, il a également le droit de s'informer de façon aussi complète que possible afin de pouvoir remplir convenablement sa mission. Le Parlement est d'autant plus habilité à le faire maintenant qu'il s'avère que certains intéressés directs estiment ne pas pouvoir adhérer suffisamment aux mesures proposées par le Gouvernement.
Une autre membre pense que l'on doit se demander quelle est la mission du Sénat dans le cadre d'une procédure d'évocation. Un dossier qui aboutit sur la table de la commission dans le cadre de cette procédure a déjà parcouru tout un chemin et a notamment fait l'objet de discussions approfondies à la Chambre des représentants. S'il devait s'avérer que ce dossier présente encore des lacunes, il est logique que l'on essaie de les combler, par exemple en organisant des auditions. Par ailleurs, il ne peut pas entrer dans les intentions du Sénat de recommencer entièrement les travaux de la Chambre et d'entendre toutes les instances qui se sentent, pour l'une ou l'autre raison, lésées par une disposition qui, d'après le rapport de la commission, a fait l'objet d'un examen approfondi à la Chambre.
Si la commission accède à cette demande, elle peut d'ailleurs difficilement ne pas inviter les autres organisations concernées à venir s'expliquer, de sorte que la concertation préalable du Gouvernement et du comité consultatif sera tout simplement à refaire.
L'intervenant précédent ne partage pas ce raisonnement. Dans le cadre de la procédure d'évocation, le Sénat a le droit et le devoir de soumettre les textes dont il se saisit à un examen complet et approfondi. C'est d'autant plus vrai lorsqu'il s'avère que des personnes directement concernées ne peuvent pas s'y retrouver dans les textes adoptés par la Chambre.
Si le ministre a d'ailleurs entendu les intéressés comme il le prétend, où est donc le compte rendu de ces entretiens ?
Un membre déclare que l'argumentation utilisée ici lui pose aussi un problème de principe. Lorsqu'un projet est évoqué, cela signifie précisément qu'au moins quinze membres du Sénat sont d'avis, sur la base du dossier, que la Chambre n'a pas travaillé correctement. Dans cette optique, il est tout de même logique que le Sénat doive pouvoir jouer pleinement son rôle et, s'il le juge souhaitable, entendre des personnes directement concernées.
La présidente met ensuite aux voix la demande de l'organisation d'une audition.
Quatre membres votent pour l'organisation d'une audition; cinq membres votent contre.
C. Discussion des articles
Article 5
M. Coene et Mme Nelis-Van Liedekerke déposent un amendement (nº 1) visant à supprimer le § 1er de cet article.
Un des auteurs souligne qu'en vertu de l'arrêté royal en question, l'égalité de traitement entre hommes et femmes sera réalisée en l'an 2009. D'une manière formelle, cela ne semble pas correspondre à la directive 79/7/C.E.E. qui prescrit que l'égalité entre les deux sexes doit étre réalisée dans un délai raisonnable. On peut toutefois difficilement admettre qu'une période de 30 ans pour la réalisation de l'égalité des droits dans le secteur des pensions soit conforme à l'esprit de cette directive.
Des études ont en outre montré que le paiement des pensions deviendra un problème à partir de 2004 et qu'il en sera ainsi jusqu'en 2020. Étant donné que les mesures proposées n'atteindront leur vitesse de croisière et ne sortiront leurs pleins effets qu'à partir de 2015, on peut s'attendre à ce que le secteur concerné soit confronté à de sérieux problèmes dans un proche avenir.
Enfin, les mesures prévues dans cet arrêté de pouvoirs spéciaux ne s'accompagnent pas d'interventions dans certains autres régimes de prestations, ce qui peut entraîner de sérieuses difficultés pour les personnes directement concernées.
Ainsi, nombre de conventions collectives de travail en matière de prépensions ne garantissent-elles le paiement d'un supplément par les employeurs que jusqu'à l'âge de 60 ans et non jusqu'au commencement réel de la pension. Des problèmes similaires peuvent se poser dans le secteur des pensions complémentaires.
Le ministre répond que lors de la fixation de la période de transition, on a tenu compte de divers éléments. L'un d'entre eux était le souhait émis par les parlementaires féminins et les organisations féminines d'étendre ce délai au maximum. L'année 2009 peut dès lors être considérée comme un compromis raisonnable qui peut aussi obtenir l'assentiment de la Commission européenne.
En ce qui concerne le financement du régime, abstraction ne peut être faite de la situation budgétaire générale. La meilleure manière de garantir les droits sociaux à l'avenir consiste à assainir les dépenses publiques, domaine dans lequel le Gouvernement actuel a réalisé d'importants progrès.
L'arrêté royal soumis à confirmation garantit l'élargissement des droits en matière d'assurance maladie-invalidité à mesure que l'âge de la pension des femmes recule. Dans le secteur du chômage, une mesure similaire a été prise par simple arrêté royal. Il subsiste, en effet, un problème pour les prépensions, auquel est toutefois lié un élément important de la concertation sociale. Les discussions seront entamées à très brève échéance et le Gouvernement a, dans ce cadre, voulu donner un signal clair aux employeurs. Ainsi l'interdiction de cumul rétroactive, dont il est question à l'article 5, § 2, vise précisément à éviter qu'un dispositif en la matière n'entraîne des dépenses supplémentaires importantes pour le passé.
La période de transition relativement longue permettra aussi aux employeurs de supporter plus facilement le surcoût occasionné par le paiement des suppléments patronaux aux femmes prépensionnées. Enfin, le Gouvernement ne verrait aucune objection à l'élaboration d'un système solidaire, en vertu duquel les secteurs où les femmes actives sont nombreuses (distribution, textile) pourraient compter sur le soutien d'autres secteurs.
L'intervenant précédent réplique que la mise sur un pied d'égalité des hommes et des femmes aurait été réalisée beaucoup plus rapidement si les autorités belges n'avaient pas reporté le problème depuis des décennies. En ce qui concerne le financement du secteur, il souligne que de nombreuses inconnues subsistent, surtout en ce qui concerne les dépenses. Il semblerait, par exemple, que l'extension des droits à des emplois à tiers temps entraînerait un surcoût de 20 milliards.
Il souligne qu'un certain nombre de conventions collectives de travail prévoient le paiement du supplément patronal jusqu'à l'âge effectif de la pension de sorte que, dans ce cas, aucun problème ne se pose. Personnellement, il ne comprend pas pourquoi, pour les autres conventions, il y aurait lieu d'élaborer un système solidaire. En effet, les secteurs qui occupent de nombreux hommes ont aussi dû supporter eux-mêmes les cotisations complémentaires jusqu'à 65 ans.
L'amendement nº 1 est rejeté par 6 voix contre 4.
M. Coene et Mme Nelis-Van Liedekerke déposent ensuite un amendement subsidiaire (nº 2) tendant à compléter l'article 5, § 1er , par les mots « étant entendu que les articles 9 et 11 du même arrêté sont supprimés ».
Un auteur de l'amendement se réfère à l'avis du Conseil d'État dans lequel cette institution affirme que la délégation de pouvoir prévue à cet article est formulée en termes trop généraux. Il trouve dommage que la Belgique n'ait pas de cour constitutionnelle, qui puisse fixer des limites univoques dans ce type de matières. On constate en effet que le Gouvernement peut ignorer purement et simplement les avis du Conseil d'État, puisqu'aucune sanction n'est prévue.
Le ministre répond que l'article 11 de l'arrêté royal ne modifie guère la situation existante. Le Gouvernement peut déjà revaloriser le montant de la pension par simple arrêté royal. La loi en projet ouvre la possibilité d'une revalorisation sélective, par exemple en faveur des pensions plus modestes.
L'article 9 de l'arrêté royal vise à trouver de manière souple, en concertation avec les intéressés, des systèmes permettant de mettre progressivement fin à la carrière professionnelle. Le ministre est disposé à soumettre au Parlement les accords ou projets relatifs à cette question avant de les couler sous forme d'arrêté royal.
L'auteur de l'amendement déclare que comme le Conseil d'État il ne s'oppose pas au contenu des dispositions en question. On peut toutefois atteindre l'objectif visé sans procéder à des délégations de pouvoir inadmissibles à l'exécutif. Puisque le ministre dit être disposé à soumettre ces questions à la Chambre et au Sénat, pourquoi ne peut-il pas le faire par le biais d'un projet de loi ?
L'amendement subsidiaire nº 2 est rejeté par 6 voix contre 4.
Article 11
MM. Hazette et Destexhe déposent un amendement (nº 66) tendant à supprimer cet article.
Ils déposent à titre subsidiaire l'amendement nº 67, qui tend à compléter le 2º de cet article par une disposition qui prévoit l'octroi d'intérêts de retard s'il devait s'avérer que les retenues touchant certaines catégories de pensionnés ont été, soit opérées à tort, soit calculées de manière erronée. Dans son état actuel, l'arrêté royal dispose, en effet, de manière explicite qu'il n'est dû aucun intérêt de retard.
M. Coene et Mme Nelis-Van Liedekerke déposent un amendement (nº 11) tendant à supprimer le 2º de l'article 11.
À titre subsidiaire, ils proposent (amendement nº 12) d'insérer au 2º une dérogation pour les pensions des magistrats.
Un des auteurs de l'amendement nº 66 se réfère à l'avis du Conseil d'État, dans lequel celui-ci dit douter que l'arrêté royal du 4 décembre 1996 puisse être concilié avec l'article 3, § 2, deuxième alinéa, de la loi-cadre budgétaire du 26 juillet 1996.
Le Conseil d'État a également émis une réserve sérieuse au sujet de la conformité de l'arrêté royal du 16 décembre 1996 à la loi et à la Constitution. Pour cet arrêté, le Gouvernement n'a sollicité ni l'avis du C.N.T. ni celui de l'O.N.P. Il porte en outre atteinte à la compétence du Sénat pour ce qui est des pensions des magistrats, lesquelles constituent une matière bicamérale.
Le ministre répond que la cotisation de solidarité n'est pas une mesure qui se rapporte aux pensions. Il s'agit d'une mesure parafiscale pour laquelle il n'est pas nécessaire de recueillir l'avis des deux institutions susvisées. Comme il s'agit d'une cotisation ordinaire, la mesure considérée ne modifie pas le statut des magistrats (en matière de pension). Par conséquent, il ne s'agit pas, en l'occurrence, d'une question bicamérale.
Les auteurs constatent que le Conseil d'État ne partage pas l'avis du ministre et ils craignent que l'on n'ouvre de la sorte la voie à un recours devant la Cour d'arbitrage.
Un des auteurs de l'amendement nº 11 souscrit au point de vue du préopinant. Dans ce cas également, le débat ne porte pas sur le contenu de la mesure, mais sur la façon dont le Gouvernement ignore les formes prescrites et fait fi des observations du Conseil d'État. Même si l'on partait du principe que le meilleur moyen de prendre ces mesures est sujet à débat, il faudrait opter malgré tout pour la solution qui offre le plus de garanties. Le Gouvernement choisit toutefois de prendre la voie de la facilité et prend le risque de voir s'y ajouter des contestations à l'avenir.
Outre les objections qu'il a émises au sujet de l'arrêté royal du 16 décembre 1996 quant à la forme, le Conseil d'État a d'ailleurs souligné que ledit arrêté risque de porter atteinte au principe d'égalité et de non-discrimination.
Enfin, le Conseil d'État a signalé que l'article 2 de l'arrêté royal en question intervenait dans une législation qui fait l'objet d'un litige et il déclare que le fait de procurer rétroactivement un fondement légal à cet arrêté ne peut porter préjudice au contrôle qui est exercé par le pouvoir judiciaire quant à l'admissibilité d'une telle intervention.
Comme cela est déjà arrivé dans le passé, ces observations ne semblent guère impressionner le Gouvernement. Il ne faut dès lors pas s'étonner que pareille politique crée une situation où l'administration est paralysée par des litiges avec les justiciables.
Le ministre répond d'abord que l'avis du Conseil d'État est plus nuancé que ne l'affirme l'intervenant. S'il est vrai que le Conseil d'État évoque dans des termes généraux le risque d'une violation du principe d'égalité, il ajoute aussi que cela ne signifie pas pour autant que ce principe constitutionnel soit violé dans les faits. Ensuite, les retenues opérées dans le passé qui sont conformes aux dispositions de l'arrêté royal du 16 décembre 1996 ont effectivement été confirmées par une disposition légale. Enfin, le Gouvernement a justifié la procédure suivie, comme l'avait demandé le Conseil d'État.
L'intervenant précédent signale que le Conseil d'État n'a disposé que de trois jours pour émettre son avis. Il est donc logique que cette institution émette des doutes sérieux quant à une violation éventuelle du principe d'égalité, sans pour autant pouvoir se prononcer de manière définitive à ce sujet.
Concernant le sous-amendement nº 67, le ministre déclare qu'en application des règles prévues par l'arrêté royal, l'on ne peut corriger de manière rétroactive une erreur commise par l'administration que lorsque cette correction est à l'avantage du pensionné. Si l'on constate que l'on a retenu un montant insuffisant, la majoration de la retenue ne vaudra que pour l'avenir. Si, au contraire, l'on constate que les retenues étaient trop élevées, l'on remboursera également au pensionné ce qu'il aura payé par le passé.
Selon lui, c'est là une réglementation équitable. En effet, l'on ne comptabilise pas d'intérêts de retard, mais cela peut aussi jouer à l'avantage comme au détriment du bénéficiaire.
Les amendements nºs 11 et 66, ainsi que les amendements subsidiaires nºs 12 et 67 sont rejetés par 6 voix contre 4.
Article 12
M. Coene et Mme Nelis-Van Liedekerke déposent l'amendement (nº 13), qui vise à supprimer cet article.
L'un des auteurs explique que cet article constitue une ingérence dans un litige en cours. Il fait référence à l'avis du Conseil d'État qui attire l'attention sur la jurisprudence de la Cour d'arbitrage, selon laquelle une disposition législative, adoptée en application d'une disposition d'une loi d'habilitation ou d'une loi de pouvoirs spéciaux prévoyant explicitement la confirmation des arrêtés d'exécution, ne peut être considérée comme ayant pour objet de paralyser le contrôle de légalité par le juge.
Le Conseil d'État estime en outre que le fait de procurer rétroactivement un fondement légal à des mesures d'exécution qui sont contestées ou pourraient l'être ne doit pas nécessairement signifier que le principe constitutionnel d'égalité serait violé. Le Conseil d'État ajoute qu'il ne le serait que dans l'hypothèse où la rétroactivité aurait pour objectif unique ou principal d'influencer dans un sens déterminé l'issue d'une ou de plusieurs procédures judiciaires ou d'empêcher les juridictions de se prononcer sur une question de droit déterminée, sans que des circonstances exceptionnelles puissent raisonnablement justifier cette intervention.
En l'occurrence, le Gouvernement court une fois de plus le risque d'être bientôt confronté à des contestations juridiques, que l'on pourrait parfaitement éviter si l'on tenait compte des remarques du Conseil d'État.
Le ministre répond que la disposition ne vise absolument pas à influencer des litiges en cours, mais qu'au contraire, elle vise à mettre fin à une situation d'insécurité juridique qui existait par le passé. On le fait par un simple article de loi, comme c'est l'habitude. L'on n'utilise la technique des lois-cadres que pour l'avenir.
L'intervenant précédent voit là une preuve supplémentaire de la négligence du Gouvernement. Des dispositions autonomes n'ont pas leur place dans un projet de loi portant confirmation d'arrêtés royaux qui ont été pris en exécution d'une loi-cadre.
L'amendement nº 13 est rejeté par 7 voix contre 4.
Articles 13 et 14
MM. Hazette et Destexhe déposent des amendements (nºs 68 et 69), qui visent à supprimer ces articles.
L'un des auteurs signale que ces articles contiennent une référence explicite à l'article 11, 2º, du projet de loi à l'examen, lequel vise un arrêté royal dont la confirmation ne peut pas être accordée en raison des critiques émises par le Conseil d'État.
Le ministre fait observer qu'il s'agit en l'occurrence de deux mesures qui sont très importantes pour les pensionnés et qui, par ailleurs, ont été insérées dans le présent projet après consultation des organisations concernées.
Un membre réplique qu'en l'occurrence, on confond une fois de plus la forme et le fond. Rien n'aurait empêché le Gouvernement de prendre ces mesures en respectant les principes légaux et constitutionnels qui constituent le fondement de notre système.
Les amendements nºs 68 et 69 sont rejetés par 5 voix contre 4.
La partie du présent projet envoyée à la commission a été adoptée par 7 voix contre 3.
Confiance a été faite à la rapporteuse pour la rédaction du présent rapport.
La Rapporteuse,
Lisette NELIS-VAN LIEDEKERKE. |
La Présidente,
Lydia MAXIMUS. |