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Question écrite n° 7-997

de Latifa Gahouchi (PS) du 8 février 2021

à la secrétaire d'État à l'Égalité des genres, à l'Égalité des chances et à la Diversité, adjointe au ministre de la Mobilité

Plan de relance et de résilience - Dimension de genre (Covid-19)

relance économique
investissement de l'UE
égalité homme-femme
profession de la santé
intégration des questions d'égalité entre les hommes et les femmes

Chronologie

8/2/2021Envoi question (Fin du délai de réponse: 11/3/2021)
6/12/2022Réponse

Aussi posée à : question écrite 7-995
Aussi posée à : question écrite 7-996

Question n° 7-997 du 8 février 2021 : (Question posée en français)

Le 11 janvier 2021, le gouvernement fédéral et les gouvernements des Communautés et Régions concluaient un accord sur une première version du «Plan de relance et de résilience» et la répartition des subsides européens.

Le 29 janvier 2021 ensuite, sur proposition de l'honorable premier ministre et de l'honorable secrétaire d'État pour la Relance, le gouvernement fédéral s'est accordé sur l'épure de projets sélectionnés dans le cadre de la «Facilité pour la Reprise et la Résilience» (FFR) mise en place par l'Union européenne.

C'est ainsi que la Belgique bénéficiera de 5,9 milliards d'euros pour relancer son économie, en misant principalement sur la durabilité et la digitalisation. Il s'agit d'argent que l'Europe entend consacrer à la relance des activités dans les vingt-sept États membres, tous touchés par un fort ralentissement économique suite à l'épidémie de coronavirus.

Le plan d'investissement proposé se veut ambitieux, cohérent et ciblé sur des différents axes structurants: un axe Climat-Durabilité & Mobilité, un axe Productivité & Inclusion et un axe Digital.

L'objectif de ce plan est de relancer l'économie et de rendre notre pays plus prospère, plus résilient, plus vert sur le long-terme. Ce qui nécessite des investissements massifs.

Les projets des entités fédérées seront intégrés dans le plan de relance global pour la Belgique, ce plan sera ensuite présenté à la Commission européenne.

Dans le cadre de nos travaux au Comité d'avis pour l'égalité des chances entre les femmes et les hommes que je préside, nous travaillons actuellement sur l'impact de la crise de la Covid-19 sur les femmes. Dans la mesure où l'égalité entre les femmes et les hommes relève également des compétences des Communautés et des Régions cette question prend tout son sens au sein de la Haute Assemblée.

Les expert(e)s déjà auditionnés par le Comité d'avis sont unanimes: l'efficacité de la relance économique passe aussi par l'égalité entre les femme et les hommes.

Or, lorsque l'on regarde les trois axes structurants du plan de relance, on voit que les investissements se font dans les secteurs où les femmes sont très peu représentées ou quasi absentes (numérique, énergie, construction, domaines employant seulement 20 % de femmes).

1) Alors que les femmes ont été et sont toujours en premier plan durant cette crise de la Covid-19, comment faire pour qu'elles reçoivent leur juste part des plans de relance? Un tel débat a-t-il eu lieu au sein du gouvernement à l'instar de ce qu'ont fait l'Allemagne et l'Italie?

2) Ne pensez-vous pas qu'il conviendrait de prévoir une dimension genrée dans le plan de relance?

3) En outre, n'est-il pas nécessaire à l'avenir de mettre sur pied un groupe de travail d'experts en égalité entre les femmes et les hommes afin d'analyser l'impact sur le genre de chaque mesure? La législation «gender mainstreaming» et «gender budgeting» est en effet trop souvent mal ou pas appliquée.

4) Enfin, ne pensez-vous pas qu'il est grand temps aujourd'hui de prévoir une revalorisation substantielle des métiers de soins qui sont principalement exercés par les femmes et qui sont pourtant fondamentaux pour notre société, la pandémie de Covid-19 l'ayant suffisamment mis en lumière?

Réponse reçue le 6 décembre 2022 :

Dans le cadre du Plan de relance européen, la Commission européenne a explicitement demandé aux États membres que les plans nationaux de relance contribuent à renforcer l’égalité entre hommes et femmes en y intégrant la dimension de genre.

Au niveau belge, l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes a été chargé d’analyser le contenu du projet de plan sous l’angle du genre et son analyse a été intégrée au Plan national de reprise et de résilience belge (PNRR) remis à la Commission européenne au mois d’avril 2021. Dans le cadre de son analyse, l’Institut a notamment établi une classification des différents projets selon leur contribution (1re catégorie), leur contribution potentielle (2e catégorie) ou leur non-contribution (3e catégorie) au renforcement de l’égalité des femmes et des hommes.

Pour qu’un projet de la seconde catégorie contribue à renforcer l’égalité des femmes et des hommes dans la société, ces projets doivent faire l’objet d’une intégration de la dimension de genre (c’est-à-dire qu’ils doivent être établis en tenant compte des inégalités qui existent entre hommes et femmes dans le domaine où ils vont être menés) ou d’actions spécifiques en faveur de l’égalité hommes-femmes.

Pour rappel, une politique intègre la dimension de genre quand elle a été établie en tenant compte des éventuelles différences de situation qui existent entre hommes et femmes, de son impact sur ces situations, et qu’elle contribue à réduire ou à éliminer des inégalités entre femmes et hommes.

L’intégration de la dimension de genre dans une politique publique se déroule généralement en quatre phases:

1. analyser la composition genrée des groupes ciblés par les politiques;

2. identifier les différences qui existent entre les situations respectives des femmes et des hommes;

3. déterminer si ces différences sont problématiques en termes d’accès aux ressources ou d’exercice des droits fondamentaux;

4. établir des politiques qui tiennent compte des résultats de l’analyse de genre réalisée et évitent ou corrigent les éventuelles inégalités identifiées.

Lors de cette analyse, l’Institut a également attiré l’attention sur les déséquilibres structurels qui existent entre hommes et femmes sur le marché du travail, et plus particulièrement dans les secteurs économiques directement concernés par le PNRR.

Dans le cadre du Plan fédéral gender mainstreaming adopté au mois de juin 2021 par le gouvernement, le secrétaire d’État pour la Relance et les Investissements stratégiques s’est engagé à intégrer la dimension de genre dans le suivi de la mise en œuvre du Plan national de relance et de résilience (PNRR). La Commission européenne a établi des indicateurs genrés dans le cadre du suivi des plans de relance des différents États membres. Un cadastre des projets du PNRR concernés par ces indicateurs genrés a été établi par le service public fédéral Stratégie et Appui (SPF BOSA) qui est chargé du monitoring de la mise en œuvre du PNRR et de son rapportage à la Commission européenne. L’Institut est en contact régulier avec le cabinet du secrétaire d’État pour que ce monitoring sous l’angle du genre soit le plus complet possible.

Je suis également en contact avec mes collègues du gouvernement fédéral en ce qui concerne l’intégration de la dimension de genre dans les projets dont ils ont la charge, ainsi que pour attirer leur attention sur les déséquilibres structurels qui existent entre hommes et femmes sur le marché du travail, et plus particulièrement dans les secteurs économiques directement concernés par le PNRR.

La crise de la Covid-19 a exacerbé les inégalités existantes. Largement majoritaires dans de nombreux métiers dits essentiels – métiers de la santé et l’aide aux personnes, de la grande distribution, de la petite enfance, du nettoyage, etc. – les travailleuses ont souvent été aux premiers rangs de la lutte contre la pandémie, alors même que ces métiers souffrent de dévalorisation sociétale et financière. Les femmes les plus vulnérables (femmes peu qualifiées, issues de l’immigration, en situation de handicap, mères célibataires, etc.), en particulier, ont été frappées de plein fouet par les conséquences sociales et économiques de la crise sanitaire. Le gouvernement fédéral a donc soutenu ma proposition visant à soutenir ce public spécifique.

J’ai lancé un appel à projet doté de 1 500 000 euro qui vise à favoriser l’inclusion et le maintien durable de femmes, qui sont actuellement en situation de vulnérabilité, sur le marché du travail en tant que salariées ou en tant qu’indépendantes. Cet appel à projet s’inscrit dans le cadre du PNRR et il est financé par le plan de relance NextGenerationEU de l’Union européenne.

Vu le poids croissant du secteur STEM (Science, Technology, Engineering and Mathematics) / TIC (technologies de l’information et de la communication) sur le plan économique, le Conseil des ministres a par ailleurs marqué son accord sur le Plan interfédéral et intersectoriel «Women in Digital» au mois de mars 2021. Ce plan a pour objectif de doter la Belgique d’une stratégie cohérente visant à favoriser la coordination et la synergie entre les différentes initiatives prises en matière de promotion des femmes dans les STEM/ICT à tous les niveaux de pouvoir dans notre pays.

Cette stratégie s’articule autour des cinq objectifs stratégiques suivants:

veiller à ce que davantage de femmes obtiennent leur diplôme dans le secteur du numérique (ICT/STEM);

favoriser l’intégration des femmes dans le monde du travail numérique ou dans le secteur du numérique;

favoriser le maintien des femmes dans le secteur du numérique;

– construire de nouvelles images;

éliminer l’écart de genre dans les groupes cibles spécifiques.

Le plan s’inscrit dans le cadre de «Commitment on women in Digital», une déclaration que la Belgique a signée en 2019, marquant l’intérêt de notre pays à défendre la promotion des femmes dans le secteur numérique (STEM/ICT) au niveau européen.

Le SPF Économie est chargé du monitoring de ce plan pendant cinq ans.

Enfin, parallèlement au suivi et à la mise en œuvre du Plan fédéral gender mainstreaming, un groupe de travail qui rassemble différentes administrations fédérales s’est récemment constitué afin de progresser dans l’évaluation d’impact des politiques publiques. L’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes participe à ces travaux et des initiatives seront prise dans ce cadre pour que l’analyse d’impact de la réglementation (AIR) et plus particulièrement son «volet genre» (test gender) soient à l’avenir mieux intégrés et utilisés dans le cadre du processus de décision.