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Question écrite n° 7-848

de Stephanie D'Hose (Open Vld) du 18 novembre 2020

au vice-premier ministre et ministre de la Justice, chargé de la Mer du Nord

Violence homophobe et transphobe - Zone de police de Gand - Plaintes - Chiffres - Point de contact Homophobie et Transphobie - Nombre de signalements - Communauté LGBTQIA+ - Discrimination - Approche - Vol - Aggravation de la peine

minorité sexuelle
violence
lutte contre la discrimination
statistique officielle
sensibilisation du public
droit pénal
circonstance aggravante
vol
discrimination fondée sur l'orientation sexuelle

Chronologie

18/11/2020Envoi question (Fin du délai de réponse: 17/12/2020)
10/5/2021Réponse

Aussi posée à : question écrite 7-847

Question n° 7-848 du 18 novembre 2020 : (Question posée en néerlandais)

Un cas regrettable de violence homophobe s'est à nouveau produit le 20 septembre 2020. Un couple qui voulait profiter de l'été indien sur le Graslei à Gand a été importuné à plusieurs reprises, à l'aller comme au retour, par de petits groupes d'hommes. Chacun ou chacune devrait pouvoir marcher dans la rue à sa guise et il est navrant de constater que la violence homophobe existe toujours.

Par ailleurs, le nombre réel de cas de violence homophobe ou transphobe est difficile à estimer. Le «dark number», c'est-à-dire le nombre de cas de violence qui ne sont pas déclarés, demeure encore assez élevé. Se rendre à la police pour déposer plainte est une épreuve trop dure pour bon nombre de victimes. Le point de contact Homophobie et Transphobie dans la zone de police de Gand lutte contre ce problème. Il simplifie le premier pas qui précède le dépôt de la plainte, avec le soutien d'un membre de la cellule policière consacrée à l'aide aux victimes. On peut également s'adresser au point de contact pour poser librement des questions concernant le harcèlement, les injures, la discrimination et les délits à caractère homophobe ou transphobe, par exemple.

Les sentiments de haine à l'égard d'autres personnes dégénèrent souvent rapidement en violence verbale et non verbale et en dégradations. La plupart du temps, l'auteur ne connaît même pas la victime et vise surtout le groupe dans son ensemble auquel elle appartient. L'auteur veut ainsi faire passer le message que ce groupe spécifique n'a pas, selon lui, sa place dans la société. Lorsqu'un délit est motivé par la haine, le mépris ou l'hostilité vis-à-vis de l'origine, de l'orientation sexuelle, du handicap ou d'un autre critère protégé, des circonstances aggravantes sont retenues (et des peines plus lourdes sont infligées). Dans ce cas, on parle d'un crime de haine.

La présente question concerne une compétence transversale (l'égalité des chances), qui est partagée avec les Communautés. Je me réfère au décret du 10 juillet 2008 portant le cadre de la politique flamande de l'égalité des chances et de traitement, qui crée un cadre pour la mise en œuvre fonctionnelle et transversale de cette politique, ainsi qu'au décret relatif à la création du Centre interfédéral pour l'égalité des chances.

Je souhaiterais poser les questions suivantes :

1) Combien de plaintes pour violence homophobe ou transphobe ont-elles été déposées spécifiquement dans la zone de police de Gand en 2018, 2019 et 2020 ? Pouvez-vous fournir un relevé mensuel ? Quelles étaient les plaintes les plus fréquentes ?

2) Je souhaiterais obtenir une comparaison des chiffres de plaintes entre les années 2019 et 2020 en Belgique et par zone de police. Constate-t-on une tendance à la hausse ou à la baisse ? Les plaintes ont-elles donné lieu à des condamnations ?

3) Allez-vous organiser une campagne supplémentaire pour lutter contre la violence homophobe et transphobe en hausse dans la ville de Gand, au cas où les chiffres gantois seraient disproportionnellement élevés par rapport à ceux d'autres villes ? Dans l'affirmative, de quelle manière et avec quels acteurs ? Dans la négative, pour quelle raison ?

4) Combien de signalements le point de contact Homophobie et Transphobie de la zone de police de Gand a-t-il reçus durant les dix premiers mois de 2020 ? Quels étaient les signalements les plus fréquents ? Combien de signalements ont-ils fait l'objet d'un suivi ?

5) Veillerez-vous à accentuer la lutte contre les discriminations à l'encontre de la communauté LGBTQIA+, comme c'est le cas aux Pays-Bas ?

6) Ajouterez-vous le caractère homophobe ou transphobe comme circonstance aggravante d'un vol (crime de haine), à l'instar de ce que voudrait faire votre homologue néerlandais (dans article 311 du Code pénal néerlandais) ?

Actuellement, le Code pénal néerlandais prévoit les circonstances aggravantes suivantes dans le cadre d'un vol :

– le vol de bétail dans une prairie ;

– le vol commis à l'occasion d'un incendie, d'une explosion, d'une inondation, du naufrage ou de l'échouement d'un navire, d'un accident ferroviaire, d'une émeute, d'une révolte ou d'une guerre ;

– le vol commis durant la période destinée au repos nocturne dans une habitation ou un terrain clos sur lequel se trouve une habitation, par une personne qui s'y trouve à l'insu ou contre le gré de l'ayant droit ;

– le vol commis par une réunion de deux personnes ou plus ;

– le vol pour lequel l'auteur s'est ouvert l'accès au lieu du délit ou a atteint le bien à dérober en ayant recours à l'effraction, le bris ou l'escalade, de fausses clefs, un faux ordre ou un faux uniforme ;

– le vol visant à préparer ou faciliter un délit terroriste.

Lorsqu'il est question d'un crime de haine, le juge peut (et doit parfois) infliger une peine plus lourde. En ajoutant le vol aux délits dont le crime de haine constitue une circonstance aggravante, on apportera un plus grand réconfort aux victimes que si le coupable est puni en vertu du droit pénal commun. Aux Pays-Bas, le ministre de la Justice et de la Sécurité est favorable à des peines plus lourdes en cas de violence discriminatoire.

Réponse reçue le 10 mai 2021 :

1) La Police Fédérale est en mesure de fournir des données chiffrées issues de la Banque de données nationale générale (BNG). Il s’agit d’une base de données policières dans laquelle sont enregistrés les faits sur base de procès-verbaux résultant des missions de police judiciaire et administrative.

Cette base de données permet de réaliser des comptages sur différentes variables statistiques telles que le nombre de faits enregistrés, les modus operandi, les objets liés à l’infraction, les moyens de transport utilisés, les destinations de lieu, etc. Il est possible, sur la base des procès-verbaux, de réaliser des rapports sur le nombre de faits enregistrés en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie).

Le tableau 1 reprend le nombre de faits enregistrés dans la BNG, sur base des procès-verbaux, en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie) au niveau national.

Pour l'année 2018 et 2019, seuls les chiffres par année sont disponibles et non par mois. Pour l'année 2020, seul le premier trimestre est déjà disponible. Ce tableau montre qu'au cours de l'année 2018, 173 infractions ont été enregistrées. Au cours de l'année 2019, il y avait 164 faits enregistrés, contre 22 au cours du premier semestre de 2020.

Tableau 1: nombre de faits enregistrés en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie) au niveau national

 

2016

2017

2018

2019

TRIM 1 2020

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie)

187

187

173

164

22

Source: Police fédérale

Le tableau 2 montre le nombre de faits enregistrés concernant la discrimination sur base de l'orientation sexuelle (homophobie) au niveau de la zone de police de Gand. Au cours de l'année 2018, il y avait 14 faits enregistrés, au cours de l'année 2019, il y en avait 6 et aucun fait enregistré au premier semestre de 2020.

Les données sont extraites de la base de données telle qu'elle a été clôturée le 31 juillet 2020.

Tableau 2: nombre de faits enregistrés en matière de discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie) au niveau de la ZP Gent

 

2016

2017

2018

2019

TRIM 1 2020

Discrimination fondée sur l’orientation sexuelle (homophobie),

8

13

14

6

0

Source: Police fédérale

2) La comparaison de ces chiffres montre qu'il y a eu plus de faits enregistrés en 2018 qu’en 2019. Il n'est pas encore possible de comparer ces chiffres pour 2020. Il n'y a pas non plus de chiffres disponibles pour chaque zone de police. Il s'agit d'infractions constatées par la police à la loi du 10 mai tendant à lutter contre certaines formes de discrimination. Cette loi punit les discriminations fondées sur l'âge, l'orientation sexuelle, l'état civil, la naissance, la fortune, la religion ou la philosophie de vie, les opinions politiques, la langue, l'état de santé actuel ou futur, le handicap, une caractéristique physique ou génétique ou l'origine sociale. Dans ce cas, il s'agit d'une discrimination fondée sur l'orientation sexuelle.

Les délits de droit commun (p. ex. coups et blessures volontaires) commis avec un motif homophobe ne sont donc pas pris en compte. Cela peut donc conduire à une image déformée dans les chiffres. Par contre, pour certaines infractions de droit commun (par exemple coups et blessures), si le fait est commis (entre autres) en raison d’une aversion envers l’appartenance ethnique, la religion, le sexe, la nature sexuelle, etc. d’une personne (ce qui est appelé une « motivation discriminatoire »), c’est considéré comme une circonstance aggravante. Ces infractions sont aussi appelées « crimes de haine » (hate crimes). Les codes-faits présents dans la nomenclature policière ne sont toutefois pas assez détaillés pour identifier ces « crimes de haine ». D’autres champs disponibles n’apportent non plus aucune alternative. En conséquence, cela signifie que, à l’heure actuelle, il n’est pas possible d’extraire ces crimes de haine sur base des informations présentes dans la BNG et de fournir une réponse plus détaillée et plus précise à la question en matière de violence à caractère homophobe.

Pour ce qui est de la partie de la question relative aux condamnations, il n’est pas possible de répondre à la question car les statistiques de condamnation se basent uniquement sur la qualification légale. La circonstance aggravante permettant de sanctionner le caractère homophobe (art. 405quater du Code pénal) vise l’orientation sexuelle en général, parmi d’autres motifs discriminatoires, et n’isole pas les différentes orientations sexuelles. La nomenclature des infractions du casier judiciaire central ne peut dès lors pas distinguer les motifs de haine homophobe et transphobe.

Enfin, en ce qui concerne les plaintes déposées en 2019 et 2020, nous ne disposons pas encore de tous les jugements passés en force. En effet, les statistiques de condamnation sont établies par rapport à des jugements qui ne sont plus susceptibles de recours dans les délais ordinaires, parfois après opposition et appel. Au vu des longs délais de procédure, il n’est pas possible de fournir des statistiques exhaustives sur les jugements passés en force de chose jugée pour des plaintes de 2019 et 2020.

3) Cette question ne relève pas de mes compétences, étant donné qu’il s’agit d’une compétence communale qui relève de la ville de Gand.

Au niveau des initiatives locales, il peut tout de même être signalé que la ville de Gand a élaboré un nouveau plan pour plus de diversité et d’inclusion au sein de son personnel, ce qui représente une bonne mesure dans le cadre de la lutte contre l’homophobie, la transphobie et toute forme de discrimination en soi.

De plus, la zone de police de Gand se dit toujours prête à coopérer aux initiatives qui sont prises dans ce domaine.

4) La zone de police de Gand a reçu cinq notifications. En voici le détail.

Pour deux notifications, un PV a été dressé. Il s’agissait de menaces à l’encontre d’une personne et d’un film incitant à la haine et à la discrimination. Pour deux autres notifications, il n’y avait pas d’infraction et aucun PV n’a été dressé. Les intéressés ont toutefois reçu un e-mail avec les explications nécessaires. Pour la cinquième notification, une plainte avait déjà été déposée et l’intéressé a reçu des explications complémentaires sur l’aide, l’attestation de dépôt de plainte et la constitution de partie civile devant le juge d'instruction.

5) Il n’y a pas de place dans notre société pour le racisme, la discrimination et les crimes haineux. Ensemble avec la secrétaire d’État à l’Egalité des genres, à l’Egalité des chances et à la Diversité, la lutte se poursuit.

Il existe une Conférence Interministérielle (CIM) de lutte contre le racisme et, en collaboration avec les communautés, la Justice participe à l’élaboration d’un plan d’action de lutte contre le racisme et la discrimination.

De plus, une réflexion est en cours quant à la manière dont il est possible d’éliminer les poursuites inéquitables de différentes sortes de crimes haineux.

6) Actuellement, les articles 377 bis, 405 quater, 422 quater, 438 bis, 442 ter, 453 bis, 514 bis, 525 bis, 532 bis et 534 quater du Code pénal font spécifiquement référence à l’existence d’une circonstance aggravante « lorsqu’un des mobiles du crime ou du délit est la haine, le mépris ou l’hostilité à l’égard d’une personne en raison de sa prétendue race, de sa couleur de peau, de son ascendance, de son origine nationale ou ethnique, de sa nationalité, [...] de sa conviction religieuse [...] ».

Une réforme du Code pénal est actuellement en cours. Dans ce cadre, la possibilité d’alourdir les peines pour violence homophobe sera certainement examinée.