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Question écrite n° 7-1127

de Peter Van Rompuy (CD&V) du 3 mars 2021

au vice-premier ministre et ministre des Finances, chargé de la Coordination de la lutte contre la fraude

Service public fédéral (SPF) Finances - Nouvelles connaissances comportementales - Application - Évaluation - Collaboration avec les Régions - Nouveaux projets éventuels

ministère
collecte de l'impôt
administration fiscale

Chronologie

3/3/2021Envoi question (Fin du délai de réponse: 1/4/2021)
14/4/2021Réponse

Question n° 7-1127 du 3 mars 2021 : (Question posée en néerlandais)

Justification du caractère transversal de la question écrite: comme l'autorité fédérale, l'autorité flamande dispose d'une cellule stratégique pour l'application des connaissances comportementales. Les deux autorités peuvent se renforcer mutuellement dans le cadre d'une perception efficace des impôts.

Le Service public fédéral (SPF) Finances intègre des nouvelles connaissances comportementales dans son fonctionnement. À cet égard, je me réfère à ma question écrite n° 6-2279 du 24 janvier 2019.

Après les résultats positifs d'un projet pilote appliquant les théories comportementales à la lettre de rappel dans le cadre de l'impôt des personnes physiques pour l'exercice d'imposition 2015, un projet suivant a été mis en place pour l'exercice d'imposition 2016. Au total, les nouvelles interventions pour l'exercice d'imposition 2016 ont accéléré le paiement d'un arriéré d'impôt des personnes physiques de 25 millions d'euros, avec 3 millions d'euros de recettes supplémentaires et 1,4 million d'euros de frais de recouvrement épargnés.

Dans le cadre d'une intervention plus en amont dans la «tax compliance» («la dette qui est payée ne doit plus être demandée»), un nouveau projet a été défini via un «Randomised Controlled Trial», avec des interventions liées au comportement sur l'avertissement-extrait de rôle à l'impôt des personnes physiques. Ce projet a été lancé en novembre 2017 et visait à inciter, en utilisant les théories comportementales, les contribuables dont l'avertissement-extrait de rôle présentait un solde positif (article à payer) à effectuer le paiement avant l'échéance. Un nombre accru de paiements complets et dans les délais diminue la charge de travail administratif en ce qui concerne le suivi et les poursuites éventuelles des redevables et évite à ces derniers d'éventuels intérêts de retard et frais de poursuite.

Dans ce cadre, une nouvelle unité, qui s'occupera spécifiquement de la «Tax Compliance» et du rôle que les théories comportementales peuvent y jouer, a été mise en place au sein de l'administration générale de la Perception et du Recouvrement. Des contacts ont aussi déjà été pris avec la cellule stratégique pour l'application des théories comportementales du gouvernement flamand en vue d'échanger les expériences et les connaissances.

J'aimerais obtenir les nouveaux résultats de l'application des théories comportementales.

1) Quels projets liés à l'application de nouvelles théories comportementales ont été lancés depuis la lettre de rappel dans le cadre de l'impôt des personnes physiques pour l'exercice d'imposition 2016? Quels résultats ont été obtenus concrètement?

2) La nouvelle unité consacrée aux théories comportementales est-elle opérationnelle?

a) Quelle est la mission concrète de cette unité?

b) Comment le ministre évalue-t-il son fonctionnement?

c) Combien de personnes compte cette unité et quelle est leur expertise?

3) Une collaboration est-elle menée avec les autorités flamandes (ou d'autres Régions) en vue d'échanger les expériences et les connaissances concernant l'application de nouvelles théories comportementales? Comment le ministre évalue-t-il ce mode de fonctionnement?

4) Quelles applications de nouveaux projets le ministre prévoit-il encore?

5) A-t-il connaissance d'une application plus large de nouvelles théories comportementales dans le fonctionnement des services publics fédéraux (en dehors du SPF Finances)?

Réponse reçue le 14 avril 2021 :

1) Après les résultats positifs de notre projet pilote qui applique les théories comportementales à la lettre de rappel pour l’impôt des personnes physiques de l’exercice d’imposition 2015 – auquel la question fait référence, nous y avons donné suite avec la lettre de rappel à l’impôt des personnes physiques de l’exercice d’imposition 2016. Au total, les nouvelles interventions ont accéléré le paiement de 25 millions d’euros d’impôt des personnes physiques, avec 3 millions d’euros de recettes supplémentaires et 1,4 million d’euros de frais de recouvrement épargnés par comparaison au groupe de contrôle (mesuré après quatorze jours ouvrables).

En 2017, ces initiatives se sont poursuivies avec l’essai de nouvelles connaissances comportementales sur l’avertissement-extrait de rôle de l’impôt des personnes physiques et les taxes additionnelles. L’objectif était d’encourager les contribuables à payer le montant dû plus tôt, avant la date d’échéance. Un nombre accru de paiements effectués dans les délais et dans leur intégralité réduit la charge administrative liée au suivi et aux éventuelles poursuites des contribuables par le service public fédéral (SPF) Finances, tout en évitant aux contribuables de payer des intérêts et des frais de poursuites.

Les résultats positifs significatifs proviennent des essais aléatoires contrôlés («Randomised-Controlled Trials») sur différentes versions de l’avertissement-extrait de rôle (AER). Grâce à l’application des connaissances comportementales à cet AER, nous avons observé une augmentation relative et significative de 1,61 % du nombre de paiements à la date d’échéance. Pour les 1 094 623 articles concernés par l’impôt des personnes physiques, cela signifie un total de 9 927 articles supplémentaires avec paiement intégral à la date d’échéance. En termes de paiements, l’excédent total de 26 042 502 euros payés à l’échéance pour les lettres révisées par rapport à la lettre d’origine, contribue à accélérer la perception de l’impôt. Ces articles peuvent être clôturés en interne et ne créent donc pas de charge de travail supplémentaire dans le processus de perception (et de recouvrement) au sein du SPF Finances. En outre, cela permet à ce groupe de contribuables d’éviter d’autres intérêts de retard et d’éventuels frais de recouvrement.

À partir de l’exercice d’imposition 2018, la lettre testée avec succès, avec l’application des connaissances comportementales, a été déployée pour l’ensemble des avertissements-extraits de rôle de l’impôt des personnes physiques et taxes additionnelles avec un solde positif. Cette action s’inscrit dans la stratégie «Evidence-based policy making», basée sur les connaissances comportementales, de l’administration générale de la Perception et du Recouvrement (test – learn – adapt).

En outre, une expérience comportementale a été mise en place en faveur des contribuables ayant des problèmes de paiement sur le long terme. Par le biais des informations comportementales issues de leur avertissement-extrait de rôle de l’impôt des personnes physiques et taxes additionnelles, ces contribuables ont été encouragés, s’ils le souhaitaient, à demander un plan de paiement au SPF Finances à temps (= avant la date d’échéance) pour payer leur impôt sur le revenu des personnes physiques; une mesure de soutien qui est mieux adaptée à ce groupe cible spécifique.

Là encore, des résultats positifs significatifs ont été obtenus grâce à l’application des connaissances comportementales. Le groupe cible, qui a reçu le message spécifique et personnalisé comprenant l’option de demander un plan de paiement, a clairement demandé plus de plans de paiement avant l’échéance. Nous constatons une augmentation relative de pas moins de 15 %. Au final, ce sont 3 114 plans de paiement supplémentaires qui ont été accordés grâce aux nouvelles interventions comportementales, et donc autant de dossiers qui seraient restés impayés à la date d’échéance sans l’application comportementale, et qui auraient donc potentiellement donné lieu à de nouveaux rappels et à des procédures de poursuites (frais supplémentaires inclus). Là encore, une situation gagnant-gagnant pour le contribuable et l’administration fiscale.

2) Le succès de cette nouvelle approche, fondée sur l’application des connaissances comportementales aux processus de perception et de recouvrement, a entraîné la création d’un nouveau service axé sur les interventions comportementales dans le contexte de la Tax Compliance. En septembre 2018, le service «Tax Compliance et Analyse comportementale» a été créé au sein du pilier Perception de l’administration générale de la Perception et du Recouvrement.

a) Ce nouveau service, axé sur les interventions comportementales dans le contexte de la Tax Compliance, utilise les dernières connaissances issues des sciences comportementales pour encourager les contribuables à améliorer leur Tax Compliance. L’objectif est de modifier le comportement des contribuables afin d’éviter autant que possible les dettes fiscales et d’augmenter le paiement correct et en temps voulu des dettes fiscales et non fiscales.

En outre, des contacts sont également établis avec des experts comportementaux nationaux et étrangers du secteur public afin d’échanger des connaissances et de se tenir au courant des dernières avancées dans ce domaine. Ainsi, le SPF Finances joue un rôle de pionnier dans les réseaux d’expertise sur les «Behavioural Insights» au sein, entre autres, de l’Organisation pour la coopération et le développement économiques (OCDE), du Joint Research Centre de la Commission européenne (CE) et de l’Organisation intra-européenne des administrations fiscales (IOTA).

b) L’application des connaissances comportementales et du «nudging» a démontré à plusieurs reprises sa valeur ajoutée et contribue donc également à influencer le comportement des contribuables de manière positive. Les connaissances comportementales sont de plus en plus utilisées pour renforcer les instruments et les processus politiques afin qu’ils atteignent réellement les effets escomptés.

Le SPF Finances a utilisé cette approche innovante dans le cadre de sa mission de soutien et d’aide aux contribuables à remplir leurs obligations fiscales. Il est reconnu tant au niveau national qu’international pour son approche réussie et ses résultats en termes de compréhension du comportement.

Les résultats mentionnés ci-dessus profitent à la fois aux contribuables (la prévention des dettes implique une réduction des frais de rappel, des frais de recouvrement et des intérêts de retard) et à l’administration fiscale (réduction de la charge de travail pour les rappels, le suivi et le recouvrement). Le SPF Finances continuera donc à travailler de cette manière à l’avenir.

c) Le service se compose actuellement d’un expert en sciences sociales ayant une expérience pratique des expériences comportementales et de l’application des connaissances comportementales dans le contexte d’une meilleure Tax Compliance. Une expansion de ce service est envisagée, de préférence via un recrutement ciblé compte tenu du profil spécifique du service.

3) Le service «Tax Compliance et Analyse comportementale» est en contact étroit avec plusieurs services publics et organismes publics travaillant sur les connaissances comportementales. Il existe également un échange fréquent de connaissances et d’expériences avec le service «Behavioral Insights» du département de la Chancellerie et des Affaires étrangères du gouvernement flamand (Vlaamse Overheid).

Nous avons également prodigué des conseils à de nombreux autres services publics fédéraux, tels que le SPF Emploi, Travail et Concertation sociale, le SPF Intérieur, la Chancellerie, le SPF Santé publique et le SPF Sécurité sociale. Pour Bruxelles, il y a eu des contacts avec Bruxelles Fiscalité et Actiris. Pour la Wallonie, nous avons eu un contact avec le Service public de Wallonie Fiscalité.

Compte tenu de la spécificité de l’expertise, il est en outre encouragé que les organisations gouvernementales travaillant avec des connaissances comportementales échangent leurs connaissances et leurs expériences. Les partenariats avec le secteur universitaire sont également opportuns, étant donné l’expertise scientifique qui revêt une grande importance dans la mise en œuvre et l’expérimentation des interventions comportementales.

4) Comme la communication et les services aux contribuables, aux citoyens et aux entreprises seront de plus en plus numériques à l’avenir, il est également très important d’utiliser les connaissances comportementales dans le contenu et la forme de la communication digitale et des e-services.

La plateforme MyMinfin connaît un succès croissant d’année en année et sera bientôt le canal numéro un pour la communication des données du dossier fiscal du contribuable. La déclaration d’impôt, le paiement, le règlement des litiges et les autres services connexes seront proposés par voie électronique, ce qui rendra les processus existants plus simples, plus rapides et plus sûrs. Les connaissances comportementales peuvent aider le contribuable à s’orienter plus facilement sur cette plateforme et à prendre les mesures appropriées, en fonction de son profil et de son statut fiscal.

5) Dans d’autres domaines politiques et visant d’autres problèmes, différentes initiatives comportementales ont été lancées au sein du gouvernement fédéral ces dernières années. Ainsi, le SPF Sécurité sociale a mis en place une expérience comportementale concernant le fait que des patients ayant un rendez-vous médical ne s’y présentent pas et le service des Prestations de l’Institut national d'assurance maladie-invalidité (INAMI) a demandé des informations au SPF Finances afin de travailler avec des connaissances comportementales sur la problématique de l’incapacité de travail.

En outre, un projet comportemental est en préparation à la direction générale «Humanisation du travail» du SPF Emploi, Travail et Concertation sociale dans le domaine du bien-être. Ici aussi, les connaissances et l’expérience du service «Tax Compliance et Analyse comportementale» du SPF Finances seront utilisées comme source d’inspiration pour le démarrage du projet.