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Question écrite n° 6-2351

de Benjamin Dalle (CD&V) du 4 février 2019

au ministre de la Sécurité et de l'Intérieur

Conseil d'État - Section du contentieux administratif - Délai de traitement d'un litige - Situation de l'Auditorat

juridiction administrative

Chronologie

4/2/2019Envoi question (Fin du délai de réponse: 7/3/2019)
8/4/2019Réponse

Question n° 6-2351 du 4 février 2019 : (Question posée en néerlandais)

Le délai moyen de traitement d'un litige par le Conseil d'État néerlandais est de cinq mois. Au Conseil d'État belge, section du contentieux administratif, le délai de traitement est variable, mais s'étale souvent sur plusieurs années.

Ces quinze dernières années, d'importants efforts ont été fournis en vue de réduire le délai de traitement. La charge de travail a également été réduite grâce à la création de juridictions administratives spécialisées au niveau fédéral (comme le Conseil du contentieux des étrangers) et au niveau des entités fédérées, en particulier en Flandre.

Au niveau du siège du Conseil d'État, on travaille aujourd'hui plutôt efficacement et les délais de traitement sont limités.

Toutefois, on constate souvent d'importants retards au niveau de l'Auditorat du Conseil d'État. Conformément à l'article 24 des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973, le rapport de l'auditorat doit être rédigé avant que d'autres étapes de la procédure puissent être franchies. Dans la pratique, on constate que le rapport de l'auditorat prend du temps et que dans certains cas, le traitement par l'Auditorat peut durer jusqu'à quatre ans.

De plus, d'aucuns reprochent parfois la qualité variable des rapports de l'auditorat, en fonction de l'auditeur qui traite le rapport. Un autre problème résulte de l'application de l'article 24, alinéa 2, des lois coordonnées sur le Conseil d'État qui prévoit que l'Auditorat peut se limiter à l'examen du moyen de fond qui permet la solution du litige. En théorie, cela est utile mais si les rapports de l'auditorat sont de moins bonne qualité, cela peut entraîner des retards car il faut tout recommencer (arrêt de réouverture des débats, nouveau rapport de l'auditorat, nouveaux derniers mémoires, nouvelle ordonnance d'audience, nouvelle audience).

Si par le passé, le rapport de l'auditorat était généralement suivi, il semble que ce soit moins souvent le cas aujourd'hui.

Ces questions concernent les compétences du Sénat étant donné qu'il s'agit d'une matière visée à l'article 78, 4°, de la Constitution (les lois sur le Conseil d'État et sur les juridictions administratives fédérales). En outre, le fonctionnement du Conseil d'État influence considérablement le fonctionnement des juridictions administratives et les décisions administratives des Communautés et des Régions.

C'est pourquoi je soumets les questions suivantes au ministre :

1) Êtes-vous au courant des problèmes qui se posent au niveau de l'Auditorat du Conseil d'État, section du contentieux administratif, en ce qui concerne le délai de traitement et la qualité variable des rapports de l'auditorat ? Quelle est l'origine de ces problèmes ?

2) Quel est aujourd'hui le délai moyen de traitement d'un recours en annulation auprès du Conseil d'État, section du contentieux administratif, et quelle partie est-elle assurée par l'Auditorat ?

3) Comment le délai moyen de traitement (voir question 2)) a-t-il évolué au cours de ces quinze dernières années ?

4) Dans quel pourcentage de cas, le rapport de l'auditorat est-il suivi et comment ce pourcentage a-t-il évolué au cours de ces quinze dernières années ?

5) Des mesures sont-elles prévues pour remédier au problème mentionné à la question 1) ?

Réponse reçue le 8 avril 2019 :

Avant de répondre concrètement aux différentes questions, il convient de souligner que le Conseil d'État statue non seulement sur les litiges administratifs comme la plus haute juridiction administrative et ce, en résumé, soit comme juge en annulation, soit comme juge de cassation, c'est la section du contentieux administratif – mais il fournit un avis motivé aux Parlements et gouvernements sur les propositions et (avant) projets de normes législatifs et d'arrêtés réglementaires – c'est la section législation.

La question écrite concerne uniquement la section du contentieux administratif. Bien entendu, la très grande charge de travail de la section législation (voir à ce sujet, Conseil d'État, Rapport d'activités 2016-2017, partie II) a également une influence sur le fonctionnement de la section du contentieux administratif, du moins en ce qui concerne l'auditorat. Ainsi, en 2016-2017, 2 039 demandes d'articles ont été introduites, avec au total 39 738 articles ; 2 033 de ces demandes d'avis ou 99,70 % ont été introduites avec mention d'un délai d'urgence (1 881 ou 92 % demandes d'avis en trente jours, 122 ou 6 % demandes d'avis en cinq jours et trente jours ou 1,47 % demandes d'avis en soixante jours). La réelle charge de travail est notamment via les chambres réunies et l'assemblée générale encore plus élevée. Alors que l'article 76, § 1er, dernier alinéa, des lois coordonnées sur le Conseil d'État (ci-après loi CdE) détermine que vingt-quatre auditeurs – sur un total de quatre-vingts auditeurs – sont désignés prioritairement à la section législation, des auditeurs actifs dans la section du contentieux administratif doivent régulièrement être affectés à la section législation. Ainsi, la section néerlandophone de l'auditorat travaillait régulièrement avec treize et quatorze auditeurs et, via l'assistance d'un auditeur de la section du contentieux administratif, en 2016-2017 et majoritairement en 2017-2018 avec treize auditeurs (malgré la suppression progressive et la disparition complète, depuis le 1er août 2017 du dénommé retard temporaire visé à l'article 123 loi CdE). Depuis presque un an, deux auditeurs francophones remplacent plus qu'à mi-temps un auditeur législation qui a été nommé au Conseil d'État et il n'a plus été remplacé lors de son départ à la suite de la résorption du retard précité.

En ce qui concerne la section du contentieux administratif, il faut souligner que celui-ci statue comme juge en annulation (et sauf l'hypothèse d'un conflit d'attribution à la Cour de Cassation) en première et dernière instance. C’est-à-dire sans possibilité de recours. Dans ce cadre, le Conseil d'État prend également connaissance des requêtes de suspension, souvent en nécessité d'extrême urgence. En outre, la section du contentieux administratif a des compétences comme juge et dans un certain nombre de matières comme juge avec compétence de pleine juridiction dans le sens de l'article 16 loi CdE (par exemple dans les matières électorales). En 2014, d'importantes nouvelles compétences ont été attribuées comme l'indemnité réparatrice (article 11bis) et l'extension de la possibilité de maintien des conséquences aux actes individuels (article 14ter). Bien que certaines de ces compétences visent à terme à réduire le nombre de procédures – en ce compris pour les cours et tribunaux – elles mènent parfois à une prolongation des procédures intentées auprès du Conseil d'État.

La dénommé « double enquête » cela veut dire que la plupart des affaires sont d'abord examinées par l'auditorat et ensuite par la chambre compétente, justifie notamment l'absence d'une possibilité générale de recours qui existe presque toujours auprès des cours et tribunaux (ou auprès des juridictions administratives, le pourvoi en cassation auprès du Conseil d'État).

Cette double enquête permet également notamment qu'avant que l'affaire soit examinée par la chambre compétente, le dossier est complété le cas échéant, que la partie défenderesse et les éventuels tiers-intéressés soient désignés, que les faits, exceptions et moyens soient résumés et que les exceptions et moyens évoqués soient examinés et évalués par un auditeur. Ce dernier rejette le cas échéant d'office les exceptions ou moyens. Ensuite, les parties ont l'opportunité de réagir par écrit au rapport de l'auditeur. À la séance, l'auditeur donne ensuite son avis.

Ainsi, cette double enquête favorise la contradiction du débat et permet à la chambre compétente de statuer sur la base d'un dossier complet et sur la base d'une solution étayée par un magistrat indépendant.

L'article 24, deuxième alinéa, loi CdE, stipule que le rapport de l'auditorat peut se limiter le cas échéant au moyen de non-recevoir ou au moyen de fond qui permet la solution du litige, dans quel cas la chambre compétente se prononce par voie d'arrêt sur la conclusion du rapport.

L'exigence d'un jugement par arrêt a été insérée à l'article 24, deuxième alinéa, par la loi du 4 août 1996. Selon les travaux préparatoires de cette loi, il apparaît souvent que, lorsque l'auditeur se limitait, en application de cet article 24, deuxième alinéa (du moins première phrase) à l'examen de la recevabilité ou d'un quelconque moyen qui permet selon lui la solution du litige, le conseiller-rapporteur a demandé à l'auditeur à disposition d'examiner les autres moyens. Cette possibilité n'a pas été jugée favorable par le législateur pour la résorption rapide de l'arriéré judiciaire et n'est pas toujours dans l'intérêt des parties. En exigeant en outre que la chambre compétente doive se prononcer par arrêt, et non par disposition sur les conclusions du rapport, le législateur a voulu garantir que chacune des parties, et en particulier la partie requérante, puisse se prononcer, dans son dernier mémoire sur le choix de l'auditeur (doc. Sénat, n° 1-321/1 – 1995-1996, p. 8, et n° 1-321/6 – 1995-1996, p. 13-14). Pour des raisons d'efficacité, l'article 24, alinéa 3, des lois sur le Conseil d'État, inséré par la loi du 15 septembre 2016 stipule que s'il apparaît, après application de l'alinéa 2, que les conclusions du rapport ne permettent pas de résoudre le litige, dans son arrêt, la chambre peut charger l'auditorat, selon le cas, de l'examen d'un ou plusieurs moyens ou exceptions qu'elle précise, ou de l'examen ultérieur du recours assorti d'une mesure d'instruction qu'elle ordonne dans son arrêt.

Vu la composition spécifique et les compétences du Conseil d'État, une comparaison avec d'autres juridictions administrations n'est pas évidente du moins.

En ce qui concerne le Conseil d'État néerlandais, auquel il est fait référence dans la question et où il n'y a pas d'auditorat, il faut notamment mentionner que les compétences ne sont pas les mêmes que celles du Conseil d'État belge et que la section du contentieux administratif statue dans de nombreux cas en appel. Cela signifie que l'affaire est plutôt examinée par un ou plusieurs magistrats indépendants. Dans ces cas, il y a en réalité une double enquête mais sans impact sur le délai de traitement au sein du Conseil d'État (néerlandais). Le cadre du personnel du Conseil d'État néerlandais est différent de celui de l'institution belge.

Une éventuelle comparaison avec le Conseil d'État français n'est pas possible également car ce dernier décide principalement comme instance en cassation-juge.

Dans le cadre d'une éventuelle comparaison du délai de traitement avec celui d'autres juridictions administratives supérieures, il faut tenir compte dans de nombreux cas du délai de traitement auprès du premier juge et et de l'éventuel juge d'appel.

Et si une comparaison est faite avec le délai de traitement d'autres juridictions administratives internes ou juridictions de première instance de l'ordre judiciaire, il y a lieu de toujours tenir compte du total des délais de traitement de première instance-appel-instance en cassation.

Il ne ressort pas de votre question sur lequel le point de départ repose qu'il y a une qualité variable des rapports d'auditorat, ni sur lequel le point de départ repose qu'il y a des problèmes sur le plan de la durée du traitement.

Votre quatrième question donne l'impression que le point de départ que la qualité des rapports d'auditorat varie repose sur le nombre de cas où le « rapport d'auditorat » n'est pas suivi. On entend probablement que l'avis de l'auditeur lors de la séance est à présent son avis définitif et qu'il ne correspond pas toujours avec la conclusion du rapport. Ainsi, la jurisprudence du Conseil ou de la chambre saisie peut entre-temps être modifiée ou il faut tenir compte de l'impact de la nouvelle jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, de la Cour européenne des droits de l'homme ou de la Cour constitutionnelle. De nouveaux faits ou arguments peuvent être introduits auxquels il faille encore tenir compte.

Dans cette optique, il est opportun de mentionner les chiffres demandés dans les questions 2),3) et 4) et ensuite d'aborder les questions 1) et 5) ensemble.

Donner une comparaison des chiffres sur le délai de traitement et le délai de traitement moyen pour les quinze dernières années judiciaires ne semble pas opportun. Ces chiffres en sont en effet pas suffisamment représentatif vu les compétences modifiées du Conseil d'État par la création du Conseil du contentieux des étrangers. D'où le choix pour les chiffres des cinq dernières années judiciaires.

Ci-après, le délai de traitement moyen global (inscription au rôle jusqu'à l'arrêt), le délai de traitement moyen au greffe (essentiellement le temps pour l'échange des mémoires), le délai de traitement moyen à l'auditorat (essentiellement l'examen du dossier en état et la rédaction du rapport) et le délai de traitement moyen aux chambres (essentiellement la fixation, l'organisation et la séance, la délibération et la rédaction de l'arrêté) sont données des pures recours en annulation.

Ce sont les recours en annulation où l'auditorat, après l'échange des mémoires, rédigé un rapport au fond en application de l'article 12 du règlement général de procédure et où la chambre saisie prononce un arrêt définitif au fond après l'échange des derniers mémoires. Il a été choisi de donner les chiffres en ce qui concerne les recours étant donné que c'est une procédure de base pour le Conseil d'État.

Pour les cinq dernières années judiciaires, ce délai de traitement moyen s'élève à :

Durée moyenne en jours et mois pour un[1] pur recours en annulation


2013-2014

2014-2015

2015-2016

2016-2017

2017-2018

L'institution dans l'ensemble

742,60 j.

24,41 m.

774,77 j.

25,47 m.

803,92 j.

26,43 m.

728,14 j.

23,94 m.

743,54 j.

24,44 m.

Greffe

254,76 j.

8,37 m.

272,10 j.

8,94 m.

259,59 j.

8,53 m.

242,61 j.

7,97 m.

249,82 j.

8,21 m.

Auditorat

319,94 j.

10,52 m.

324,62 j.

10,67 m.

324,10 j.

10,65 m.

297,27 j.

9,77 m.

307,84 j.

10,12 m.

Chambres

167,90 j.

5,52 m.

178,05 j.

5,85 m.

220,23 j.

7,24 m.

188,26 j.

6,19 m.

185,88 j.

6,11 m.

Cela donne le graphique global suivant pour l'institution dans son ensemble :

et le graphique suivant par corps :

Outre ces purs recours en annulation, certains recours en annulation sont souvent résolus plus rapidement, par exemple « dans des débats succincts » (article 93 du règlement général de procédure) ou après renonciation (article 59 du règlement général de procédure) par l'auditorat et la chambre saisie. En outre, l'auditorat et les chambres doivent examiner également d'autres affaires, souvent par priorité de passage.

Ainsi, les procédures en cas de nécessité d'extrême urgence sont traitées en quelques jours. Pour les marchés publics, le litige est ainsi souvent résolu de facto de manière définitive dans les trois à quatre semaines après l'introduction de la requête.

En outre, il y a les procédures en cassation plus rapides et les procédures accélérées dans certaines affaires, notamment les FSMA et les affaires électorales.

En outre, il y a les affaires de suspension simple.

Le tableau suivant donne les chiffres des arrêts prononcés dans les débats succincts, dans les requêtes de suspension et dans les requêtes de suspension en cas de nécessité d'extrême urgence et les dénommés arrêts de procédure en application de l'article 11/2 (pas de poursuite après la suspension ordonnée), de l'article 11/3 (pas de poursuite après le rejet de la suspension), de l'article 14bis (pas de mémoire en réplique ou de mémoire ampliatif), de l'article 14quater (pas de poursuite après le rapport d'auditorat qui décide du rejet) et de l'article 14quinquies (pas de poursuite après le rapport d'auditorat qui décide l'annulation) du règlement général de procédure :

Nombre d'arrêts prononcés


2013-2014

2014-2015

2015-2016

2016-2017

2017-2018

Débats succincts

434

448

449

377

375

Suspension simple

427

356

322

323

309

Suspension nécessité d'extrême urgence

493

519

515

472

658[1]

11/2, 11/3, 14bis, 14quater et 14quinquies

470

446

447

437

338

Il est remarqué que dans les affaires qui devant les chambres mènent à une procédure-arrêt en application de l'article 14quater ou l'article 14quinquies du règlement général de procédure, l'auditorat a dû examiner l'affaire entièrement et un rapport au fond a été rédigé en application de l'article 12 du règlement général de procédure. En dehors de ces procédure-arrêts en application de l'article 14quater ou de l'article 14quinquies, il y a des affaires ou l'auditorat a dû examiner entièrement l'affaire et où un rapport a été rédigé au fond en application de l'article 12, mais que la Chambre saisie peut résoudre via une de facto procédure-arrêt parce qu'il y a eu une renonciation après ce rapport ou que la décision contestée a été retirée.

Tout ceci influence évidemment le délai de traitement des recours en annulation ordinaires.

Le délai de traitement est en outre influencé par les incidents de procédure, comme les requêtes de récusation ou les procédures en faux ou par une procédure préjudicielle devant la Cour européenne de Justice ou la Cour constitutionnelle avec généralement une enquête complémentaire par l'auditorat.

Ce qui est déterminant pour la constatation ou le point de vue de l'auditeur dans l'arrêt qui est suivi ou non, ce n'est pas la conclusion du rapport, mais la conclusion de l'avis lors de la séance.

Le nombre d'avis entièrement différent dans les purs recours en annulation s'élevait globalement au cours des cinq dernières années judiciaires : 608 avis différents sur les 11 932 avis qualifiés (c'est-à-dire comparés avec tous les arrêts prononcés au fond simplement sur la base d'un rapport rédigé en application de l'article 12 du règlement général de procédure et qui ne mentionnaient pas seulement « sur avis ») ou 5,1 %.

Ce chiffre a évolué au cours des cinq dernières années judiciaires comme suit :

A. Qualité

Il ressort de la réponse à la question 4) que le nombre d'avis différent est proportionnellement bas et n'augmente pas de manière structurelle.

L'indication d'un « avis conforme » ou d'un « avis différent » n'est en soi par un caractère déterminant pour mesurer la qualité d'un rapport, avis ou arrêt. Dans tous les cas, il n'y a pas d'augmentation structurelle du nombre d'avis différents.

Il ressort de contacts officiels réguliers que le Conseil d'État a avec les représentants des barreaux que dans les cas, ce n'est pas la qualité des rapports de l'auditorat qui est remise en question.

B. Délai de traitement

En ce qui concerne le délai de traitement, il ressort des réponses aux questions 2) et 3) que le délai de traitement global moyen d'un pur recours en annulation au cours des cinq dernières années judiciaires s'élevait à environ 758,59 jours ou 24,9 mois dont 255,77 jours ou 8,4 mois au greffe, 314,75 jours ou 10,3 mois à l'auditorat et 188,06 jours ou 6,18 mois auprès des chambres.

Il n'y a pas non plus d'augmentation structurelle.

Nous ne pouvons perdre de vue que, alors que l'auditeur travaille seul, la chambre saisie du Conseil d'État siège généralement en recours en annulation et travaille avec trois conseillers et après une première enquête par et un rapport d'un premier magistrat indépendant (l'auditeur) dont l'analyse peut être critiquée par les parties.

Concernant ce délai de traitement global, il y a lieu de souligner également les délais incompressibles pour l'introduction des mémoires (soixante jours pour le mémoire en réponse et soixante jours pour le mémoire en réplique; deux fois trente jours pour les derniers mémoires), et pour l'introduction d'une éventuelle intervention (trente jours) et le mémoire ampliatif par la partie intervenante (en principe soixante jours). Quinze jours sont également nécessaires pour la convocation à l'audience.

En ce qui concerne les délais de traitement, il y a lieu de répéter qu'il s'agit uniquement des purs recours en annulation. Simultanément, l'auditorat, et les chambres, doivent également examiner d'autres affaires, souvent par priorité de passage et via une procédure accélérée et les procédures de nécessité d'extrême urgence sont traités en quelques jours ; concernant les marchés publics, c'est un peu plus long – trois à quatre semaines –, mais le litige est souvent de facto résolu de manière définitive. Cela influence bien entendu le délai de traitement d'autres affaires.

Que le délai de traitement moyen pour les purs recours en annulation auprès de l'auditorat soit plus long qu'auprès des chambres saisies, est la conséquence logique du fait que les auditeurs traitent en premier le dossier et doivent le compléter le cas échéant. Ils doivent pour une grande part faire ce travail seul par manque de soutien suffisant (tant administratif que juridique (voir ci-après).

Il y a lieu de remarquer que dans les affaires qui constituent une série ou dans les affaires liées, l'auditorat ne rédige pas toujours dans toutes les affaires un rapport mais choisit parfois aussi un « dossier pilote » et en attend le résultat pour ensuite rédiger un rapport dans les autres affaires du même type ou les affaires de suivi. C'est légitime mais cela peut influencer le délai de traitement.

Le délai de traitement est également suivi en interne. Si nécessaire, les dossiers sont notamment redistribués à l'intérieur ou entre les sections. Cela se passe parfois au détriment des spécialisations existantes.

Bien qu'il ressorte des chiffres précédents que le délai de traitement des pures recours en annulation reste globalement plutôt stable, il est clair qu'il devient de plus en plus difficile de garantir la qualité et de ne pas augmenter le délai de traitement.

Cela vaut d'autant plus vu le nombre de nouvelles compétences qui ont été attribuées en 2014 au Conseil d'État même si certaines d'entre elles visent à éviter les procès, notamment devant les cours et tribunaux, en matière d'indemnisation et vu la complexité des affaires. En outre, il y a la consultation déjà mentionnée de la section législation.

Face à cela, il est à noter que le nombre d'effectifs qui est lié au retard temporaire visé aux articles 122 à 124 de la loi CdE – il s'agit de six greffiers, de six conseillers et de douze auditeurs est supprimé auprès des sections néerlandophones de l'auditorat depuis le 1er septembre 2015 et a entièrement disparu depuis le 1er août 2017 et a disparu complètement depuis lors auprès des chambres francophones. C'est depuis peu le cas également dans les sections francophones de l'auditorat et cela sera le cas fin 2021 auprès des chambres néerlandophones. Bien que cela soit ramené au cadre de base légal, cela signifie une réduction du nombre effectif de magistrats à dix-huit unités (douze auditeurs et six conseillers).

L'impact de cette réduction se manifeste déjà au sein des sections néerlandophones de l’auditorat où en 2017-2018 le délai de traitement augmente. Le cadre légal ne permet pas de combler en même temps toutes les absences, d'offrir le renfort nécessaire à la section législation afin de pouvoir traiter le grand nombre de demandes d'avis dans les délais demandés et de pouvoir examiner les affaires avec suffisamment de profondeur dans la section du contentieux administratif sans que le délai de traitement n'augmente.

Face au retour vers le cadre légal de base avec la diminution y afférente des effectifs, il est à noter d'ailleurs que l'ampleur des pièces de procédure augmente de plus en plus et la complexité moyenne aussi. Simultanément, il y a les nouvelles compétences attribuées – à juste titre – en 2014 et les nouvelles règles de procédure qui mènent dans une phase de transition à de nouvelles questions juridiques et où une jurisprudence constante n'existe pas toujours.

En outre, il y a l'impact de la grande consultation structurelle de la section législation. Le cadre lié au retard temporaire (article 123 des lois sur le Conseil d'État) avait pour objectif de faire face à la charge de travail dans la section législation.

En outre, il y a lieu de tenir compte du fait que le nombre d'attachés administratifs avec la qualification de juriste qui doivent soutenir les auditeurs et les conseillers a diminué progressivement. La raison pour cela est que le trajet d'économie imposé aux services publics fédéraux a également été imposé au Conseil d'État sur l'ensemble de ses crédits en personnel, en ce compris les crédits destinés aux fonctionnaires. Ce trajet d'économie implique que, cumulativement, en 2014, une économie de 4 % devait être réalisée sur les dépenses en personnel et de 2015 à 2019 annuellement une économie de 2 % (total 14 %). Cela a notamment mené à ce que sur les trente emplois statutaires pour attachés administratifs comme inscrits dans le cadre, dix emplois ne sont pas comblés actuellement. Simultanément, le nombre de membres du personnel contractuels avec la qualification de juriste a diminué de dix-huit à sept. Calculé en termes d'équivalent temps plein, le nombre d'attachés-juristes a diminué à 22,7 ETP.

Dans les rapports d'activités 2015-2016 (partie III, D.8) et 2016-2017 (partie III, D.8), les chefs de corps de l'auditorat ont déjà souligné les conséquences de la réduction du nombre de magistrats effectifs et de collaborateurs. En outre, il y a la problématique de la proportion entre le nombre d'auditeurs et de conseillers qui devrait être d'au moins deux sur un. C'est d'ailleurs la proportion que le législateur avait en tête à l'article 76, § 1er, dernier alinéa, loi CdE (vingt-quatre auditeurs section législation à l'égard de douze conseillers législation) et que le législateur a utilisé en 2006 et 2014 aux articles 122 et 123, loi CdE. Dans le cadre légal (article 69, loi CdE), ce rapport est de quatre-vingts auditeurs sur quarante-quatre conseillers ou 1,80. S'il est tenu compte des vingt-quatre auditeurs qui sont désignés prioritairement dans la section législation (article 76, § 1er, dernier alinéa, loi CdE) et des treize conseillers législation, cette proportion dans la section du contentieux administratif est actuellement de cinquante-six sur trente-et-un ou 1,80.

Une révision de l'article 24, alinéa 2, de la loi CdE où l’auditorat doit examiner tous les moyens, ainsi qu'une adaptation de l'article 24, alinéa 3, où la chambre saisie charge systématiquement l'auditeur d'une enquête de tous les moyens, si la chambre saisie ne suit pas la conclusion du rapport, peut, bien que cela puisse avoir un effet « macro-économique » favorable, faire augmenter, dans les limites du cadre existant, le délai de traitement par affaire introduite considérant que la chambre saisie statue ensuite sur tous ces moyens.

Les chefs de corps ont l'intention d'élaborer une série de mesures afin d'améliorer le délai de traitement et le fonctionnement du Conseil.

[1] Ce nombre élevé est la conséquence d'un nombre exceptionnellement élevé de procédures UDN d'étudiants francophones en médecine (à savoir circa 180).

[1] Nombre de jours divisé par 30,42. C'est le nombre de jours moyen par mois durant un an.