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Question écrite n° 6-1875

de Martine Taelman (Open Vld) du 24 mai 2018

au ministre de la Justice

Déchets des laboratoires de stupéfiants - Rejets dans la nature - Statistiques - Répression - Qualification du délit - Collaboration avec les Régions

stupéfiant
statistique officielle
déchet dangereux
déchet chimique
délit environnemental
trafic de stupéfiants
décharge sauvage

Chronologie

24/5/2018Envoi question (Fin du délai de réponse: 28/6/2018)
14/9/2018Rappel
18/11/2018Réponse

Aussi posée à : question écrite 6-1874

Question n° 6-1875 du 24 mai 2018 : (Question posée en néerlandais)

La fabrication de drogue et plus particulièrement le rejet de résidus de ces processus de production peuvent représenter une catastrophe (écologique) pour l'homme et la nature. On rencontre de plus en plus souvent dans l'environnement des résidus de drogues synthétiques, par exemple, provenant du processus de fabrication clandestine de drogue. Il s'agit de grandes quantités de substances chimiques et de produits toxiques. Les déchets proviennent souvent de laboratoires illégaux qui produisent du cannabis et de l'ecstasy et déversent les résidus quelque part. Ces laboratoires font courir un grand risque à l'environnement et à la santé puisque les ingrédients de telles drogues peuvent être extrêmement nocifs pour l'homme et l'environnement.

Le phénomène se répand ces derniers temps en Belgique et dans les pays voisins, comme vous l'avez indiqué précédemment, en réponse à ma question écrite n° 6-899. Ces trois dernières années, 48 procès-verbaux ont été établis pour déversement illicite de drogues.

L'année dernière aux Pays-Bas, il a fallu intervenir non moins de 206 fois pour enlever les déchets de stupéfiants déversés illégalement. Récemment, une station d'épuration des eaux a même été mise à l'arrêt, parce que des résidus de stupéfiants avaient été jetés dans les égouts.

Un aspect important du problème des rejets de drogue consiste dans les coûts de la collecte, de l'enlèvement, du stockage, du traitement et de l'incinération des déchets chimiques déversés, sans parler des assainissements des sols éventuellement nécessaires. En Belgique, l'enlèvement est réalisé par une société reconnue de traitement des déchets, SGS, pour un coût oscillant entre 1.000 et 41.000 euros, d'après une étude. Bien que, au dire de la plupart des experts, il appartienne souvent à la Justice de supporter ces coûts, cela donne lieu à des discussions entre le parquet et la commune.

Il conviendrait peut-être de créer une sorte de pot commun destiné à couvrir les frais pour que ceux-ci ne soient pas toujours supportés par les mêmes instances.

La Justice tarderait en outre à payer les factures d'enlèvement à la société SGS. Elle accuserait actuellement un retard de paiement d'un an.

En ce qui concerne les déchets de drogue, il est primordial de faire respecter la loi. Ces déchets sont l'indice de la présence de laboratoires de stupéfiants et donc d'une criminalité organisée. Il faut développer une approche coordonnée pour imposer le respect de la loi et pour assurer l'enlèvement des déchets car le dommage causé à l'homme et à l'environnement peut être considérable. Le rejet de déchets de drogue peut être qualifié de fait environnemental et enregistré comme tel par les services de police judiciaire mais il peut aussi être considéré comme une infraction à la législation sur les drogues.

Caractère transversal de la question: il s'agit en partie d'une matière régionale. C'est la Région qui est chargée de la surveillance de l'environnement. La Région flamande s'est ainsi dotée du décret du 30 avril 2009 modifiant le décret du 5 avril 1995 contenant des dispositions générales concernant la politique de l'environnement et modifiant diverses dispositions en matière de maintien de l'environnement. C'est au pouvoir fédéral qu'il appartient d'imposer le respect des règles en matière de drogue. La Région et l'autorité fédérale doivent conclure des accords pour réprimer et poursuivre le rejet de déchets de drogue.

Mes questions sont les suivantes :

1) Quelle qualification le rejet illégal de résidus provenant de laboratoires de stupéfiants reçoit-il ? Ce geste est-il considéré comme un délit environnemental, auquel cas c'est la Région qui intervient, ou s'agit-il plutôt d'un délit au regard de la législation sur les drogues, auquel cas c'est l'autorité fédérale qui doit agir ? Pouvez-vous développer votre réponse ? Existe-t-il des accords pratiques à ce sujet et, si oui, pouvez-vous en expliquer le contenu ?

2) Disposez-vous de statistiques annuelles relatives à la découverte de rejets illégaux de déchets de drogue ou de résidus de laboratoires de stupéfiants ? Où ces rejets sont-ils constatés (dans quelles provinces et quel est le nombre annuel de faits) et peut-on véritablement parler d'une augmentation, comme aux Pays-Bas ? Pouvez-vous donner des explications détaillées ?

3) Combien de procès-verbaux a-t-on dressés et combien de poursuites a-t-on engagées au cours des trois dernières années pour rejet illégal de déchets de drogue ?

4) Des responsables de rejets de déchets de drogue ont-ils déjà été condamnés ? Quelles peines a-t-on prononcées ? La législation est-elle suffisamment efficace ou doit-elle être renforcée, le phénomène étant relativement récent mais pouvant causer des dommages importants aux personnes et à l'environnement ?

5) Quels efforts complémentaires ont-ils été consentis en matière de détection, d’approche administrative et de structuration de la collaboration entre les partenaires fédéraux, régionaux et locaux dans le cadre de l'exécution du Plan national de sécurité 2016-2019 ?

6) Dans combien de dossiers a-t-on pu, jusqu'à présent, récupérer auprès des responsables les coûts du rejet illégal de déchets de drogue et en particulier de l'enlèvement de ces déchets ? Subsiste-t-il des obstacles administratifs ou autres ? Pouvez-vous donner des explications détaillées eu égard aux coûts élevés que l'enlèvement des déchets entraîne pour les autorités locales entre autres ?

7) Des accords ont-ils été conclus en ce qui concerne la qualification du rejet des déchets de drogue, étant donné que cet acte est parfois qualifié de délit environnemental et parfois d'infraction à la loi sur l'environnement ? Une telle qualification est importante en vue d'un enregistrement systématique des faits dans les bases de données des services de police. Cela constitue en effet un indicateur de la présence de laboratoires de drogue dans certaines régions. Pouvez-vous expliquer si cela vous paraît opportun ?

8) Observe-t-on une augmentation des laboratoires de drogues ? Pouvez-vous fournir des chiffres détaillés du nombre de laboratoires de drogues découverts au cours des trois dernières années et de leur capacité de production ?

9) Observe-t-on une augmentation - comme aux Pays-Bas - du nombre de laboratoires de drogues mobiles ? Pouvez-vous fournir des données chiffrées ?

Réponse reçue le 18 novembre 2018 :

1) & 7) La problématique du rejet clandestin de laboratoires de stupéfiants et des déchets de stupéfiants est connue des services judiciaires. Il n’est toutefois pas toujours possible d’établir d’emblée le lien entre les produits découverts (déchets) et la production de stupéfiants. Parfois, cela n’est possible qu’après l’analyse des produits découverts et, parfois, le lien ne peut être établi avec certitude.

En outre, le pollueur n’est pas non plus toujours le producteur de stupéfiants, mais, par exemple, le propriétaire d’un terrain où l’on a découvert les déchets et qui a déplacé les déchets.

Il en résulte que les faits sont souvent qualifiés ab initio de délits environnementaux et ce n’est parfois que plus tard (voire jamais) que le lien peut être établi avec certitude avec des infractions liées aux stupéfiants.

La problématique a déjà été examinée par le réseau d’expertise stupéfiants du Collège des procureurs généraux et une vision de la problématique a été formulée. Il n’existe pour l’instant aucune directive formelle.

La problématique est en effet également étroitement liée à celle des frais de justice, qui font l’objet d’une nouvelle loi en préparation. L’arrêté d’exécution de cette nouvelle loi tentera de préciser dans quelle mesure les coûts du nettoyage des déchets découverts susceptibles d’être mis en lien avec un laboratoire de production de stupéfiants peuvent s’inscrire dans les frais de justice.

Sur la base de la nouvelle loi et de l’arrêté d’exécution, des directives uniformes seront alors rédigées, après concertation entre le service public fédéral (SPF) Justice (service des Frais de justice), le ministère public, l’Union flamande des villes et communes et l’autorité régionale. Une première concertation a déjà eu lieu.

2) à 6) Pour les données chiffrées, il convient de renvoyer au ministre de la Sécurité et de l'Intérieur, auquel cette question a également été posée.

La banque de données du Collège des procureurs généraux ne permet pas de donner des chiffres spécifiques en matière de poursuites pour le rejet illégal de déchets de stupéfiants, à distinguer d'autres affaires de déversement illégal de déchets. On ne peut non plus fournir de chiffres spécifiques du nombre de dossiers dans lesquels les coûts d’enlèvement et d’assainissement des déchets de stupéfiants sont récupérés auprès des auteurs.

8) & 9) Pour ces points, il est également renvoyé au ministre de la Sécurité et de l'Intérieur.