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Question écrite n° 6-1029

de Christie Morreale (PS) du 29 septembre 2016

au ministre des Classes moyennes, des Indépendants, des PME, de l'Agriculture, et de l'Intégration sociale

Agriculteurs - Maladies professionnelles - Parkinson - Reconnaissance - Enquêtes sanitaires - Indices harmonisés des risques des produits phytopharmaceutiques

exploitant agricole
pesticide
maladie professionnelle
maladie du système nerveux
santé publique
risque sanitaire
substance dangereuse

Chronologie

29/9/2016Envoi question (Fin du délai de réponse: 3/11/2016)
28/10/2016Réponse

Question n° 6-1029 du 29 septembre 2016 : (Question posée en français)

Il y a plus de quatre ans, la France reconnaissait la maladie de Parkinson comme une maladie professionnelle agricole. En effet, le décret n° 2012-665 du 4 mai 2012 révisant et complétant les tableaux des maladies professionnelles en agriculture annexés au livre VII du Code rural et de la pêche maritime indique que les agriculteurs ou les travailleurs agricoles souffrent d'une maladie professionnelle lorsqu'ils sont exposés habituellement aux pesticides lors de la manipulation ou l'emploi de ces produits, par contact ou par inhalation, par contact avec les cultures, les surfaces, les animaux traités ou lors de l'entretien des machines destinées à l'application des pesticides, et qu'ils ont la maladie de Parkinson.

L'ensemble de ces questions relèvent de la compétence du Sénat dans la mesure où elles concernent une matière fédérale qui a une influence sur les compétences des entités fédérées en matière de santé publique, de bien-être, d'emploi, d'économie, de gestion et de protection de l'environnement, …

1) Qu'en est-il chez nous ? Quelles sont les maladies professionnelles agricoles reconnues ?

2) Au vu des connaissances actuelles et de ce que font nos pays voisins, n'est-ce pas là un minimum que de prévoir des enquêtes sanitaires systématiques auprès de nos agriculteurs ?

3) Disposez-vous d'indices harmonisés des risques des produits phytopharmaceutiques, comme le prévoit d'ailleurs le Programme fédéral de réduction des pesticides pour la période 2013-2017, en son point 10.5 ?

4) Enfin, quels sont les éléments qui empêchent encore la reconnaissance de cette maladie comme maladie professionnelle des agriculteurs en Belgique, allant ainsi, à contre-courant de ce que le monde scientifique, dans sa majorité, soutient ?

Réponse reçue le 28 octobre 2016 :

La reconnaissance des maladies professionnelles agricoles liées à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques est une compétence de mes collègues Kris Peeters et Maggie De Block, respectivement ministres de l’Emploi et de la Santé publique.

Etant donné mes compétences en matière de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, je peux cependant vous apporter les précisions suivantes.

Parmi les voisins européens que vous évoquez, seule la France a reconnu la maladie de Parkinson comme une maladie professionnelle agricole.

Le Programme fédéral de réduction des pesticides pour la période 2013-2017 prévoit effectivement le calcul d’indices harmonisés de risques des produits phytopharmaceutiques dès que la méthode harmonisée de calcul sera établie au niveau européen et publiée à l’annexe I de la Directive 2009/128 instaurant un cadre d’action communautaire pour parvenir à une utilisation des pesticides compatible avec le développement durable. A ce jour, aucune méthode harmonisée n’est disponible et par conséquent, les indices harmonisés ne peuvent être calculés pour l’instant.

Du point de vue scientifique, certains chercheurs ont suggéré en 2013, après une revue complète de la documentation publiée, que l’exposition aux « pesticides » augmenterait de 1.3-1.8 x le risque de contracter la maladie de Parkinson. Ils indiquent toutefois que les études publiées sont trop hétérogènes, ce qui signifie qu’elles sont trop différentes pour être comparées adéquatement. Malgré la qualité insuffisante de la documentation, ils indiquent que la thèse de l’exposition environnementale aux pesticides et autres solvants toxiques comme cause du Parkinson pourrait être fondée. Néanmoins, s’il est vrai que la France prévoit dans son tableau toxicologique la maladie de Parkinson comme maladie potentielle, cela ne résulte pas pour autant de la découverte d’un lien causal entre exposition aux produits phytopharmaceutiques et la maladie de Parkinson comme c’est par exemple le cas avec les risques long-terme liés à l’amiante ou le benzène. Les produits phytopharmaceutiques pour lesquels un mécanisme plausible pourrait établir un lien entre la molécule et une maladie, tels que le rotenone ou le paraquat, ont été interdits depuis plus de dix ans dans l’Union Européenne. Et si un autre produit devait être identifié comme tel, il serait également interdit de mise sur le marché en vertu des réglementations en vigueur. De nos jours, on n’a par contre toujours pas identifié de substances pouvant être associées à la maladie de Parkinson.

Je ne suis donc pas sûr, comme vous le suggérez, que la majorité du monde scientifique est convaincu du lien causal évoqué. Le consensus est plutôt que tant au niveau de la population générale qu’au niveau des études expérimentales, les connaissances doivent être approfondies. Veuillez trouver ci-après deux références qui illustrent cette position.

Pezzoli G, Cereda E. Exposure to pesticides or solvents and risk of Parkinson disease. Neurology. 2013 May 28;80(22):2035-2041, 2013

Tanner C et al., Rotenone, Paraquat, and Parkinson’s Disease, Environmental Health Perspectives volume 119 (6 ), 2011.

En ce qui me concerne, je tiens à ce que le principe de précaution et l’extrême vigilance soient de mise en la matière.