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Question écrite n° 5-960

de Bert Anciaux (sp.a) du 27 janvier 2011

au vice-premier ministre et ministre des Finances et des Réformes institutionnelles

Solvabilité financière de notre pays - Listes internationales et cotes - Crédibilité - Mesures

solvabilité financière
obligation financière
emprunt public
dette publique
finances publiques

Chronologie

27/1/2011Envoi question
21/2/2011Réponse

Question n° 5-960 du 27 janvier 2011 : (Question posée en néerlandais)

Une pluie de chiffres sur la solvabilité de notre pays envahit les médias et les foyers. Un grand nombre d'organisations privées jouissant manifestement toutes d'un excellent statut évaluent cette solvabilité et font des prévisions menaçantes à l'adresse des investisseurs internationaux. Ces déclarations influencent directement le taux d'intérêt de nos obligations publiques. L'argent que nous devons réunir à l'échelon international est plus cher parce que l'intérêt que nous devons payer augmente. C'est aussi une des principales raisons pour laquelle certains pays risquent de faire faillite.

Ces derniers jours, le bureau spécialisé en études de marché Credit Market Analysis (CMA) a publié une liste de pays qui risquent de faire faillite. Il évalue le risque de défaut de paiement durant les cinq prochaines années. La Grèce et le Vénézuela sont largement en tête avec un risque de plus de 50 %. Pour avancer ces chiffres, le CMA se base principalement sur les primes d'assurance que les gros investisseurs paient comme garantie contre un éventuel défaut de paiement de titres publics. Cette prime a considérablement augmenté, surtout pour la Belgique. C'est pourquoi celle-ci figure pour la première fois sur la liste de pays douteux.

J'aimerais obtenir une réponse aux questions suivantes :

1) Le ministre est-il conscient de la conséquence négative de cette mention ? Que fait-il pour améliorer la crédibilité de notre pays ? A-t-il pu et peut-il faire quelque chose pour prévenir de tels résultats négatifs ? Dans la négative, pour quelles raisons ? Dans l'affirmative, que compte-t-il entreprendre à ce sujet à court terme ?

2) De nombreuses réserves seraient émises sur la méthodologie utilisée par le CMA pour établir sa « liste de faillites ». On en arrive donc à une situation où des entreprises privées utilisent des instruments inquiétants pour dresser des listes qui ont ensuite un impact bien réel sur notre économie et notre société. Le ministre peut-il faire quelque chose contre ces entreprises, comme le CMA, qui s'arrogent elles-mêmes injustement ce pouvoir disproportionnel ? Existe-t-il au sein de l'Union européenne des projets visant à soumettre ces institutions financières à un contrôle renforcé ? Dans la négative, le ministre prendra-t-il une initiative à ce sujet ?

3) Le ministre estime-t-il lui-même qu'il a échoué dans une grande mesure dans sa mission de veiller aux finances du pays ? Comment compte-t-il prendre ses responsabilités politiques à ce sujet ?

Réponse reçue le 21 février 2011 :

1. Je peux informer l’honorable membre que je suis au courant de la liste publiée par Credit Market Analysis et de la place que la Belgique y occupe.

Pour son analyse, cette société se base sur le niveau des Credit Default swaps (CDS) pour la dette de l'État belge. Ces CDS sont des instruments qui permettent de se protéger contre un défaut de paiement de la part d’un émetteur déterminé de titres de dette. Les cotations de ces instruments constituent en fait une prime d’assurance d’où l’on peut déduire le risque sous-jacent de non-paiement « default ». Il existe un marché pour ce type d’instruments mais il est peu transparent et des manipulations ne sont pas à exclure.

La moins bonne place de la Belgique dans l’étude de CMA est donc à attribuer à l’augmentation des spreads CDS. Je veux attirer l’attention de l’honorable membre sur le fait que ces mêmes spreads sont déjà redescendus entretemps pour atteindre 172ct alors qu’il y a quelques semaines, ils plafonnaient à 280ct. Cela révèle bien le caractère relatif de telles cotations.

Ceci étant dit, on peut constater que les spreads CDS sont beaucoup plus élevés que dans le passé : d’une part, ces spreads CDS sont à présent plus élevés pour l’ensemble des pays développés (y compris pour les pays avec un rating AAA), et d’autre part, les spreads de l’ensemble des pays sans triple A ont aussi augmenté par rapport aux CDS des pays avec triple A. Ceci est particulièrement vrai pour l'euro-zone dans laquelle l’incertitude régnant sur la solution définitive pour le soutien de l'euro-zone aux pays en difficultés a généré une volatilité élevée.

Étant donné son niveau relativement élevé d’endettement et la crise politique, la Belgique est confrontée à un spread CDS qui, sur la base de ces problèmes, est compréhensible si on le compare à celui des autres pays. Un budget crédible, axé sur la diminution du degré d’endettement comme prévu dans le programme de stabilité, ainsi que la formation d’un nouveau gouvernement feront sensiblement améliorer ce spread CDS et donc également le classement de la Belgique dans la liste.

En attendant, l’Agence de la Dette a intensifié ses efforts visant à convaincre les investisseurs étrangers de la bonne tenue des fondamentaux de notre pays, notamment par l’organisation d’un nombre de roadshows plus élevé au cours de 2011.

2. Comme je l’ai mentionné, la méthodologie est basée sur des données de marché provenant d’un marché actuellement pas tout-à-fait transparent. L'union européenne est en train de préparer un cadre plus strict pour les opérations de CDS qui générera plus de transparence.

Par ailleurs, il ne me semble pas souhaitable de contrôler ce type de sociétés qui font de la recherche. Cela pourrait effectivement porter atteinte à leur crédibilité. Depuis peu par contre, les agences de rating doivent se soumettre dans l’union européenne à un plus grand nombre de règles.

3. Dans la période où j’ai été ministre des Finances, le degré d’endettement a systématiquement diminué à l’exception des années 2008, où la dette a augmenté à la suite des opérations de sauvetage de certaines institutions financières, et en 2009 où la Belgique, à l’instar d’un grand nombre de pays, a été confrontée à une sévère récession. En 2010, la dette a également augmenté mais dans une mesure beaucoup plus limitée (+1,3 %) ce qui a en même temps représenté le meilleur résultat au sein de l'euro-zone. Cette année, le degré d’endettement pourrait se stabiliser.

Peu voire aucun pays ne peut afficher un tel parcours.