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Question écrite n° 5-9013

de Bert Anciaux (sp.a) du 13 mai 2013

à la ministre de la Justice

La proposition de remplacer les amendes routières par des formations

infraction au code de la route
amende
sécurité routière
enseignement de la conduite
peine de substitution

Chronologie

13/5/2013Envoi question
18/6/2013Réponse

Requalification de : demande d'explications 5-3333

Question n° 5-9013 du 13 mai 2013 : (Question posée en néerlandais)

Pour l'organisation VAB, active dans la mobilité, l'application d'amendes semble vraiment avoir atteint ses limites. Les parquets infligent de plus en plus d'amendes, lesquelles, qu'elles soient ou non payées, n'ont qu'un effet très limité sur la sécurité routière. Le nombre d'accidents liés à la surconsommation d'alcool, à une vitesse excessive et aux autres infractions bien connues reste d'un niveau inquiétant, insupportable et surtout intolérable. L'analyse du VAB est pertinente et peut-être les solutions qu'il préconise le sont-elles également. Le VAB propose en effet d'obliger ce type de contrevenants à suivre une formation à partir de la seconde infraction. Il part de l'hypothèse qu'une telle formation a un effet plus durable et est donc plus adéquate pour provoquer le changement de comportement espéré. Si elle paraît certes optimiste quant à ses effets pédagogiques, cette piste mérite l'avantage du doute, d'autant plus que la stratégie qui consiste à infliger des amendes de plus en plus nombreuses et de plus en plus sévères ne donne manifestement pas de résultats suffisants.

Mon analyse en la matière est qu'il faut retenir les deux solutions. Les amendes sont indispensables mais doivent peut-être aller de pair avec une obligation de suivre une formation.

La ministre partage-t-elle l'analyse selon laquelle on est encore loin de parvenir à combattre suffisamment l'insécurité sur les routes, même en imposant des amendes de plus en plus nombreuses et de plus en plus élevées ? Reconnaît-elle qu'il est urgent, en plus des amendes, d'adopter une autre attitude afin de lutter plus adéquatement et plus efficacement contre ce problème ?

Comment la ministre évalue-t-elle la proposition du VAB d'obliger les auteurs d'infractions graves à suivre, dès le second constat, une formation spécifique axée sur un changement de comportement dans la circulation ? La ministre connaît-elle des exemples d'autres pays de l'Union européenne utilisant ce système ou un système semblable ? Dans l'affirmative, quels en sont les résultats ? Comment se fait-il que l'on n'ait pas utilisé plus tôt d'autres instruments à l'encontre des contrevenants incorrigibles ? Quelles sont les instances qui ont une part de responsabilité à cet égard ?

La ministre peut-elle adhérer à ma proposition qui consiste à ne pas substituer les formations aux amendes mais à les imposer en plus des amendes ?

La ministre juge-t-elle le défi suffisamment important pour développer à cet égard un plan d'action novateur, audacieux, cohérent et, espérons-le, performant ? Dans l'affirmative, quels accents compte-t-elle y imprimer et quelles méthodes privilégie-t-elle ? Dans la négative, comment la ministre conçoit-elle la lutte future contre la trop grande insécurité routière dans notre pays ?

Réponse reçue le 18 juin 2013 :

Exemples qui nous viennent d'Europe : différentes formes et différents contextes

En Europe, des cours de sensibilisation destinés aux auteurs d'infractions graves au code de la route ont été mis sur pied dans les pays germanophones, avec l'Autriche et l'Allemagne en tête. Entre-temps, ce type de mesure existe désormais dans presque tous les pays européens. L'application de ce type de mesure diffère toutefois d'un pays à l'autre. En Autriche et en Allemagne, les cours sont dispensés principalement sur une base volontaire et contre paiement. En Suède et au Royaume-Uni, des cours de sensibilisation peuvent être proposés comme mesures alternatives. Aux Pays-Bas, un conducteur qui conduit un véhicule sous l'influence de l'alcool peut également se voir imposer un cours obligatoire en plus de sa peine.

Situation en Belgique

En Belgique, les autorités judiciaires ont la possibilité de proposer, à différentes phases de la procédure pénale, un cours de sensibilisation à l'auteur d'une infraction de roulage, notamment dans le cadre de la médiation pénale, de la liberté sous conditions, de la suspension et du sursis probatoires et de la libération conditionnelle. Les cours, qui sont actuellement organisés par Driver Improvement, sont subventionnés par le Service public fédéral (SPF) Justice et sont gratuits pour la personne concernée. Driver Improvement organise toutefois aussi le cours « La vitesse : prenons le temps d'y réfléchir... », lequel est dispensé sur une base volontaire et est payant. Le parquet peut proposer ce cours à des personnes qui ont commis un excès de vitesse grave. A l'issue de sa participation au cours, le contrevenant reçoit une attestation de participation dont le juge peut tenir compte.

La procédure pénale belge offre ainsi la possibilité au contrevenant au code de la route de suivre un cours en lieu et place de poursuites ou de sanction ultérieures ou comme condition à une remise en liberté. Il n'est toutefois pas possible d'imposer le suivi d'un cours comme peine autonome ou comme peine accessoire en plus de l'amende, de la déchéance du droit de conduire ou de la peine d'emprisonnement. En cas de déchéance du droit de conduire, le juge peut toutefois décider que la personne concernée est tenue de réussir un examen de réintégration médical et/ou psychologique pour se voir restituer de son permis de conduire.

Efficacité des cours de sensibilisation

Il ressort des études d'évaluation disponibles que le taux de récidive chez les participants aux mesures de Drivers Improvement est en moyenne 45,5 % inférieur à celui des contrevenants qui n'ont pas suivi de cours de réintégration. Outre la réduction de la récidive, les cours induisent un changement sur le plan de la connaissance, un comportement plus sûr et une prise de conscience accrue des problèmes.

Cours de réintégration en plus de l'amende

La proposition du VAB suggère qu'un contrevenant au code de la route soit contraint de suivre un cours dès la commission d'une deuxième infraction grave. La piste de réflexion tendant à rendre obligatoire le suivi d'un cours en cas de récidive est parfaitement logique. Il ressort d'une étude qu'un cours de réintégration gagne en efficacité lorsqu'il est couplé à la déchéance du droit de conduire ou à la restitution du permis de conduire.

La piste de réflexion du VAB suscite toutefois encore un certain nombre de questions :

En outre, cette réflexion devra être intégrée à terme dans le processus menant à l'instauration du permis à points. Il paraît dès lors souhaitable d'attendre cette étape avant de rendre le cours obligatoire.