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Question écrite n° 5-8500

de Karl Vanlouwe (N-VA) du 14 mars 2013

à la ministre de la Justice

Le fonctionnement de la Computer Emergency Response Team

criminalité informatique
protection des données
statistique officielle

Chronologie

14/3/2013Envoi question
16/4/2013Réponse

Requalification de : demande d'explications 5-2922

Question n° 5-8500 du 14 mars 2013 : (Question posée en néerlandais)

La veille du sommet européen du 22 mars 2011, la Commission européenne et le Service européen pour l'action extérieure (SEAE) ont été touchés pour une cyberattaque, jugée particulièrement grave car elle visait spécialement des directions générales et des fonctionnaires de la Commission européenne.

Dès 2009, la Direction de la Sécurité de la Commission avait établi un plan d'action contre les cyberattaques. Les États membre y étaient priés de créer à l'horizon 2012 une Computer Emergency Response Team capable de détecter les logiciels malveillants. En Belgique, la Computer Emergency Response Team (CERT) est active depuis 2010 et on s'affaire actuellement à la rendre progressivement opérationnel.

Afin de protéger les systèmes informatiques, il faudrait désigner dans chaque département de l'administration fédérale un conseiller à la coordination de la sécurité informatique. Cette désignation prendrait la forme d'une réorganisation interne, avec l'appui du Service public fédéral Technologie de l'information et de la communication (Fedict).

La CERT remplit sa mission en collaboration et en concertation avec d'autres instances, tels l'IBPT, les Computer Crime Units, le Service public fédéral (SPF) Justice et la Défense. La collaboration entre ces acteurs devait cependant encore être formalisée lors d'un tour de table précédent. Un groupe de travail pour la gestion des incidents serait en train d'élaborer une proposition réglant la coopération entre les divers intervenants fédéraux.

Début avril 2011, le ministre de l'époque a signé avec ses homologues néerlandais et luxembourgeois un accord par lequel les CERT des trois pays aspirent à développer le Honeyspider Network. Ce réseau peut scanner une multitude de pages web et y détecter des programmes malveillants. Les CERT du Benelux veulent élaborer de concert un projet pilote.

Le Comité R a publié le 24 août 2011 un rapport sévère à l'égard de la politique fédérale en matière de protection informatique. Il affirme que l'absence d'action fédérale globale en ce domaine rend notre pays particulièrement vulnérable aux attaques contre ses systèmes et ses réseaux d'information vitaux.

Aujourd'hui, plusieurs instances fédérales se préoccupent de sécuriser les systèmes informatiques : l’Autorité nationale de sécurité (ANS), Fedict, le fournisseur d'internet fédéral BelNET et l’Institut belge des services postaux et des télécommunications (IBPT). Toutefois, selon le rapport, aucune d'entre elles ne dispose d'un panorama complet de l'infrastructure critique des systèmes informatiques.

Le Comité R s'inquiète aussi de la gestion du personnel des services de renseignement et de l'insuffisance des moyens qui permettraient d'engager du personnel qualifié.

Enfin, le Comité R observe que la législation belge ne permet de neutraliser des systèmes hostiles étrangers qu'en cas de cyberattaque sur les systèmes de la Défense. Si les attaques visent d'autres SPF ou d'autres infrastructures critiques nationales, on ne peut réagir qu'a posteriori et défensivement, sans pouvoir neutraliser l'assaillant.

Voici mes questions à la ministre :

1) Depuis sa création, combien d'incidents cybercriminels la CERT a-t-elle signalés à son département ?

- Je souhaite une ventilation des incidents selon les catégories normaux - sérieux - majeurs, avec quelques exemples pour chacune.

- Combien d'incidents font-ils actuellement l'objet d'une enquête ?

- Combien d'entre eux ont-ils nécessité une enquête interdépartementale ?

- Pour combien d'entre eux l'enquête ne peut-elle pas se poursuivre ? Combien d'incidents a-t-on classés en raison d'une mauvaise transmission de l'information ?

- Les tribunaux ont-ils déjà prononcé des condamnations ? Dans quels dossiers ?

2) Selon les normes de l'Union européenne, les SPF, les services du parlement fédéral et le gouvernement sont-ils adéquatement protégés contre les cyberattaques ? Quelles normes de sécurité observe-t-on et pourquoi ?

3) Existe-t-il un « Disaster Recovery Plan » en guise de position de repli si les systèmes critiques de notre pays étaient victimes d'une cyberattaque ?

4) Le département de la ministre a-t-il déjà désigné un conseiller à la coordination de la sécurité informatique ? Quelle est sa mission et à qui fait-il rapport ?

5) Comment le SPF Justice coordonne-t-il la direction du projet de cyberdéfense ? Depuis que le SPF assume la direction, combien de fois une concertation interdépartementale a-t-elle été organisée ? Respecte-t-on encore les délais prévus ?

6) Comment se passe la collaboration en matière de cyberdéfense avec l'Intérieur, la Défense, Fedict, l'Économie, la Politique scientifique et les Affaires étrangères ? L'a-t-on formalisée pour que la CERT et le SPF Justice puissent réagir en temps utile à un incident ?

7) Quels sont les secteurs prioritaires du projet de cyberdéfense et quels acteurs s'occupent-ils de quels secteurs ?

8) Que peut faire le gouvernement pour réduire la vulnérabilité de notre pays ? Met-on en œuvre une stratégie coordonnée de cyberdéfense?

9) Quel rôle le Comité ministériel du renseignement et de la sécurité joue-t-il dans la coordination du rôle des services de renseignement dans le projet de cyberdéfense ?

10) Le Comité R s'inquiète de la gestion du personnel des services de renseignement et de l'insuffisance des moyens qui permettraient d'engager du personnel qualifié. Le département de la Justice est-il confronté au même problème ?

11) Le département de la ministre partage-t-il le souci d'augmenter les possibilités de neutraliser les cyberattaques, au lieu de ne pouvoir réagir qu'a posteriori et défensivement ?

12) Combien de fois des documents du SPF Justice ont-ils été volés à la suite d'une cyberattaque ? Quand cela s'est-il produit, de quels documents s 'agissait-il et quel était leur niveau de sensibilité ? Quelles mesures a-t-on prises ?

13) Quelles infrastructures, identifiées par le SPF Justice comme critiques et sensibles, sont-elles privilégiées en matière de cyberdéfense ?

14) Comment se passe la collaboration avec les CERT des Pays-Bas et du Grand-Duché de Luxembourg dans le cadre du Honeyspider Network ? Quelle sera la durée du projet et combien coûtera-t-il ? Combien de personnes y affecte-t-on ? La collaboration est-elle conduite par le SPF Justice ou par le SPF compétent pour la CERT ?

Réponse reçue le 16 avril 2013 :

1) Statistiques de septembre 2009 à octobre 2011 inclus :

En ce qui concerne l'année 2012 et en particulier les incidents constatés par le Computer Emergency Response Team (CERT) pour le Service public fédéral (SPF) Justice, je peux vous communiquer les informations suivantes :

Pour des données plus détaillées, je vous renvoie à la rubrique statistiques dans les rapports d’activités du CERT.

2) Je ne peux naturellement pas me prononcer sur les autres départements. Pour le SPF Justice, deux aspects sont importants dans ce contexte. Internet Access Street est une infrastructure basée sur des technologies state of the art qui est surveillée en permanence par un fournisseur dans le cadre d'un contrat assorti d'une obligation de résultat. En matière de normes de sécurité, le service d'encadrement ICT et le SPF ont opté pour le cadre ISO 2700x, parce qu'il s'agit d'un cadre normatif reconnu sur le plan international en matière de protection d'informations. La protection du réseau interne de la Justice est une des tâches essentielles du service d’encadrement ICT du SPF Justice. Les ordinateurs bénéficient d'une protection maximale dans les limites des possibilités technologiques existantes. Des investissements considérables sont également consentis dans des mesures supplémentaires de manière à ce qu'il y ait différents niveaux de défense.

3) Il n'y a actuellement pas d'autorité centrale prônant une approche globale pour la protection d'infrastructures critiques. Dans le cadre de la directive EPCIP (European program for critical infrastructure protection), il convient cependant d'établir dans chaque secteur un plan de sécurité avec des mesures de protection préventives pour les infrastructures critiques identifiées. Cert.be développe actuellement l'infrastructure qui doit permettre une communication réciproque entre certains services publics et infrastructures critiques en cas de cyberattaque de grande envergure.

4) Vous faites sans doute allusion à la Cyber Security Strategy mais pour cela, je dois vous renvoyer aux services de la Chancellerie. L'accord de gouvernement prévoit qu'une cyberstratégie sera élaborée afin de développer la politique fédérale de sécurité des réseaux et systèmes d'information en Belgique. Cela relève de la Plate-forme de concertation sur la sécurité de l'information, en abrégé BELNIS.

5) Les articles 20 et suivants de la « loi Fedict » du 15 août 2012 prévoient que chaque SPF désigne un conseiller en sécurité de l'information. Le statut de cette fonction ou de ce rôle sera précisé dans le projet d’arrêté royal portant exécution de cette loi mais pour cela je dois vous renvoyer à mon collègue le secrétaire d'État Bogaert.

Au sein du SPF Justice, les missions du conseiller sont actuellement déjà en partie assurées par le service Sécurité informatique et la fonction de responsable pour la protection des données visée dans la loi relative à la protection de la vie privée est actuellement confiée à un conseiller général, qui est adjoint bilingue du fonctionnaire dirigeant d'une direction générale.

6) En 2005, le Comité ministériel du renseignement et de la sécurité a créé la Plate-forme de concertation sur la sécurité de l'information (BELNIS). Les différents acteurs se réunissent mensuellement dans le cadre de cette plate-forme. Un des groupes de travail créés par la plate-forme BELNIS établit une carte plus détaillée des responsabilités et processus dans le cadre du traitement d'incidents de sécurité.

Le CERT national est le coordonnateur central pour le traitement d'importantes cyberattaques.

En cas d'incidents, une réunion ad hoc a lieu afin de partager l'information et de coordonner d'éventuelles actions.

7 et 8) BELNIS élabore des recommandations en vue de la création d'une agence nationale pour la sécurité de l'information. Pour de plus amples informations, je dois à nouveau vous renvoyer aux services de la Chancellerie.

9) Le Comité ministériel établit la politique générale du renseignement, détermine les priorités de la Sûreté de l'État et du Service général du renseignement et de la sécurité des Forces armées, et coordonne leurs activités. Le Comité définit en outre la politique en matière de protection des informations sensibles. Le Collège du renseignement et de la sécurité veille à une exécution coordonnée des décisions du Comité ministériel.

10) La plus grande priorité est actuellement donnée à la mise sur pied d'une organisation pour la protection de l'information (avec du personnel) pour le SPF, qui fera directement rapport au président et au comité de direction. En deuxième instance, il faut développer une fonction d'audit indépendante d'ICT. Le recrutement de l'expertise technique requise constituera sans aucun doute une question délicate pour ce faire.

11) Une approche proactive s'impose et doit à notre avis, réalistement, être coordonnée au niveau fédéral. Cela fera sans nul doute partie de la Cyber Security Strategy dont question ci-dessus.

12) Aucun incident ayant eu un tel impact n'est connu.

13) Les applications professionnelles critiques ont été répertoriées précédemment dans le cadre d'une analyse des risques sous l'angle de la continuité professionnelle.

14) Pour ce qui concerne ce point de la question, je ne dispose pas des données nécessaires. CERT.be est la Cyber Emergency Response Team fédérale, créée en 2009, qui est exploitée par Belnet, le réseau de recherche national belge, pour le compte du Service public fédéral Technologie de l'information et de la communication (FEDICT). D'un point de vue administratif, ladite Team ne relève donc pas de la Justice.