Médicaments - Médicaments contrefaits et illégaux - Trafic international - Cyberpharmacies - Lutte - Opération européenne Pangea II - Résultats - Autres mesures belges et européennes
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trafic illicite
25/2/2013 | Envoi question |
23/4/2013 | Réponse |
En Belgique, le principe qui régit la vente de médicaments dit que tout médicament doit légalement être délivré personnellement au patient dans la pharmacie.
Il existe cependant une dérogation à cette règle : les pharmacies autorisées en Belgique peuvent, sous des conditions très strictes, offrir en vente par Internet des médicaments à usage humain, non soumis à prescription médicale et certains dispositifs médicaux (par exemple : matériel stérile, pansements, préservatifs ; cf. les informations sur le site http://www.belgopocket.be).
Or, les sites Internet qui proposent des ventes illégales de médicament sont nombreux, selon les indications communiquées sur le site http://www.belgopocket.be, initiative des autorités fédérales ; ce site donne à cet égard de précieux conseils préventifs et cette démarche doit être saluée.
En 2009, la Belgique a participé à une opération européenne de lutte contre la vente par Internet de médicaments contrefaits et illégaux, l'opération Pangea II (cf. le site de l'Agence fédérale des médicaments et des produits de santé http://www.fagg-afmps.be).
Une des conclusions de cette action est qu'une législation pointue est nécessaire d'urgence pour mettre un terme au trafic international.
Il est admis qu'une telle législation ne doit pas être prise uniquement au niveau de notre pays, mais bien plus largement et, au moins, au niveau européen.
Aujourd'hui, selon le ministère français de l'Intérieur, le trafic de médicaments connaît un véritable essor. Une activité criminelle contre laquelle se bat l'Union européenne (cf. " L'Europe unie contre le trafic mortel de faux médicaments ", http://www.interieur.gouv.fr).
Le journal Le Monde rapporte qu'en France, en 2012, l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) s'est inquiété d'une pratique de plus en plus courante : les cyberpharmacies courtiseraient directement les jeunes - qui peuvent faire usage des médicaments comme de drogues - via leurs boîtes de messagerie, forums et autres réseaux sociaux. Toujours selon ce que rapporte le quotidien français, il s'agit d'un "phénomène inquiétant, quand on sait que plus de 50 % des médicaments commandés à des cyberpharmacies illégales sont contrefaits, selon les données de l'Organisation mondiale de la santé (OMS)" (http://www.lemonde.fr, le 29 février 2012).
1) L'honorable ministre peut-elle nous présenter des données statistiques qu'aurait pu livrer l'opération Pangea II et dire si celles-ci font l'objet d'une actualisation ?
2) Quelles sont les mesures envisagées par le gouvernement dans le cadre de cette problématique, et qu'en est-il des positions au niveau du Conseil européen des ministres de la Santé?
J’ai de nombreuses fois exprimé mon inquiétude face à la prolifération de pratiques douteuses sur internet en ce qui concerne la commercialisation de médicaments et de produits de santé. Les informations, publicités et offres en vente à ce sujet sont de plus en plus nombreuses, et requièrent la plus grande prudence. Ainsi, on constate que les spams orientent généralement les internautes vers des sites illégaux de vente de médicaments qui proposent en majorité des médicaments contrefaits ou falsifiés. Il est donc indispensable d’alerter le citoyen sur les risques auxquels il expose sa santé quand il achète des médicaments ou tout autre produit de santé par Internet hors du circuit légal.
1. Du 25 septembre au 2 octobre 2012, une action - Pangea V - coordonnée au niveau international et visant la vente en ligne dans le monde entier de médicaments contrefaits et de médicaments illégaux a de nouveau eu lieu. Cette action a été coordonnée par Interpol, l’Organisation mondiale des douanes (OMD), le Forum permanent sur la criminalité pharmaceutique internationale (PFIPC), le Heads of Medicines Agencies Working Group of Enforcement Officers (HMA WGEO), l’industrie pharmaceutique et les systèmes de paiement électronique.
L’accent a été mis sur trois aspects du commerce illégal sur internet :
le fournisseur du site internet,
le système de paiement électronique,
les services qui s’occupent de la délivrance des produits.
En ce qui concerne la Belgique, les résultats suivants peuvent être présentés :
Onze sites web proposant des anabolisants (= produits stimulants) ont été fermés pour le public belge. Deux autres cas sont encore à l’examen.
Les Douanes ont contrôlé 10 766 envois, ce qui a abouti à quatre-vingt-quatre saisies.
À l’aéroport de Zaventem, septante-cinq colis postaux destinés à des acheteurs belges ont été saisis.
Il s’agissait des produits suivants :
anabolisants : 4 710 unités (comprimés, ampoules)
produits stimulant l’érection : 2 644 comprimés
cartouches de nicotine et des cigarettes électroniques : 960 cartouches + quinze recharges
suppléments alimentaires falsifiés avec sibutramine (un médicament contre l’obésité) : 1 990 capsules
médicaments traditionnels chinois : 2 070 comprimés
aiguilles d’acupuncture : 4 200
médicaments homéopathiques : 500 flacons
DHEA, mélatonine (hormones) : 420 capsules
ephédrine (ayant un effet stimulant) : 500 comprimés
médicaments pour l’estomac, diurétiques (substances qui entraînent une augmentation de la sécrétion urinaire), médicaments antiallergiques, médicaments contre la tension, analgésiques (contre la douleur), etc. 1 740 unités provenant tous d’Inde, de Chine (et Hong-Kong), des États-Unis et de Turquie.
À Bierset, neuf envois en transit ont été saisis. Ils contenaient 1 433 unités d’anabolisants dont une quantité importante d'hormones de croissance et 1 894 unités de médicaments traditionnels chinois. Les envois étaient en transit à destination d’autres pays de l’Union européenne (UE) et provenaient de Chine, du Pakistan et de Turquie.
Au niveau mondial, Pangea V a donné les résultats suivants : cent pays ont participé, ainsi que 193 agences et administrations au sein de ceux-ci. Plus de 19 000 sites web ont été contrôlés et 18 000 ont été fermés (nom de domaine ou système de paiement fermé). Dans nonante centres postaux, 133 000 colis postaux ont été contrôlés et 6 740 ont été saisis. 106 enquêtes judiciaires ont été ouvertes et septante-neuf personnes ont été arrêtées. La quantité de médicaments saisis est de 3 758 000 unités sous forme de comprimés, capsules ou ampoules. La valeur est estimée à 10 millions de dollars
Les conclusions suivantes peuvent être tirées de cette action commune :
La collaboration entre les Douanes, la Police, l’Agence fédérale des médicaments et des produits de santé (AFMPS) et les services postaux offre une image précise en matière de commerce illégal sur internet et de trafic international de substances et de médicaments.
Cette collaboration permet d'affiner les procédures standard établies : l’approche de la criminalité pharmaceutique est rendue plus simple et efficace en termes de transmission des connaissances et de moyens.
Il est urgent d’établir une réglementation précise afin de mettre un frein au trafic en transit.
L’AFMPS est l’organisme le plus à même d’évaluer la nature des substances et produits découverts tels que médicaments, produits de santé, suppléments alimentaires, sous forme ou non d’importation illégale ou régulière, contrefaçons en termes de droits de propriété intellectuelle, etc.
Les produits amaigrissants, les stimulants de l’érection, les substances hormonales et les calmants constituent encore la majeure partie du trafic illégal et des envois postaux.
2. La lutte contre le commerce illégal de médicaments sur internet repose sur trois grands axes. D’une part une approche législative qui doit régler la vente par internet et prévenir l’infiltration de la chaine régulière de distribution par des médicaments contrefaits. D’autre part une approche privilégiant l’information et la sensibilisation du public, notamment au travers des campagnes développées par l’AFMPS. Enfin, une approche plus répressive exercée sur le terrain par les différentes autorités concernées. L’endroit géographique où est établi le responsable du site internet (Belgique, autre pays de l’Union européenne ou encore en dehors de l’UE) a évidemment un impact sur les mesures que les autorités belges peuvent prendre en la matière. Quoi qu’il en soit, tant au niveau national qu’international, le problème doit être géré de manière coordonnée entre les différentes autorités compétentes concernées que sont les autorités de santé publique, les services des douanes, la justice, la police et le Service public fédéral (SPF) Economie.
Des mesures ont été prises à différents niveaux pour mettre en œuvre les grands axes évoqués ci-avant.
Tout d’abord, sur le plan réglementaire, je citerai :
La législation nationale réglementant strictement la vente via internet des médicaments à usage humain non soumis à prescription médicale par les pharmacies autorisées. Ces dispositions sont reprises à l’article 29 de l’arrêté royal du 21 janvier 2009 portant instructions pour les pharmaciens.
La directive 2001/83/CE du 8 juin 2011 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain, en ce qui concerne la prévention de l’introduction dans la chaîne d’approvisionnement légale de médicaments falsifiés, telle qu’elle a été modifiée par la récente Directive 2011/62. Elle sera transposée en droit belge dans les jours qui viennent.
La Convention Medicrime adoptée par le Comité des ministres du Conseil de l’Europe le 8 décembre 2010 et ouverte à la signature le 28 octobre 2011.
Par ailleurs, des mesures de « sensibilisation des citoyens » ont également été prises. A cette fin, j’ai apporté mon soutien aux deux grandes campagnes d’information qu’a lancées l’AFMPS. La première campagne, intitulée « Médicaments par Internet? Ne surfez pas avec votre santé ! » a été lancée en octobre 2009. L’AFMPS y sensibilisait le grand public aux risques potentiels auxquels il expose sa santé en achetant des médicaments par Internet hors du circuit légal. La seconde campagne média de l’AFMPS, « Un médicament n’est pas un bonbon ! », date de septembre 2011. Un des douze thèmes abordés dans cette campagne concerne tout spécialement les risques liés à l’achat de médicaments par internet.
Sur le plan opérationnel, la collaboration entre les douanes, la police, la justice, le SPF Économie et l’autorité compétente en matière de médicaments constitue la meilleure solution dans le cadre de la lutte contre l’importation illégale de médicaments. Une Unité Spéciale d’Enquête (USE) a été créée au sein de l’autorité belge compétente en matière de médicaments : l’afmps, laquelle a pour mission de lutter contre la criminalité pharmaceutique, entre autre, la vente illégale de médicaments par internet.
Au travers de la Convention internationale Medicrime que je viens de citer, le Conseil de l’Europe a développé un instrument juridique international contraignant dans le domaine du droit pénal. Destinée à protéger la santé publique, la Convention introduit des sanctions pénales et des mesures de prévention et de protection des victimes. Ouverte aux pays du monde entier, la Convention offre également un cadre de coopération internationale et des mesures destinées à améliorer la coordination au niveau national.
Une autre initiative Européenne: Le HMA-WGEO (Head of Medicines Agencies Working Group Enforcement Officers), s’occupe aussi du commerce illicite sur internet. Cette plate-forme multidisciplinaire et multisectorielle regroupant des membres de la police, des douanes et de l’inspection des médicaments constitue un réseau effectif qui aide à lutter contre la criminalité pharmaceutique au-delà des frontières, et qui prévoit également des formations en la matière.
Comme vous le constatez, la lutte contre les médicaments falsifiés et illégaux fait l’objet d’une attention permanente des autorités, belges et étrangères. Une action multiple et coordonnée est nécessaire pour apporter une réponse efficace à ce nouveau défi posé à nos systèmes de santé, dont le patient est la première victime Il s’agit bien entendu d’un dossier auquel je resterai particulièrement attentive.