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Question écrite n° 5-7187

de Bert Anciaux (sp.a) du 23 octobre 2012

au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes

Reconnaissance d'un pays qui a déclaré son indépendance - Modalités - Critères

reconnaissance d'État
indépendance nationale
Écosse
Pays basque
Catalogne

Chronologie

23/10/2012Envoi question
29/11/2012Réponse

Question n° 5-7187 du 23 octobre 2012 : (Question posée en néerlandais)

En Espagne, les régions de la Catalogne et du Pays Basque semblent de plus en plus se préparer à une séparation avec l'Espagne et à se présenter comme des États indépendants en Europe. L'Écosse se dirige peut-être aussi vers une autonomie plus fondamentale, du niveau d'un État. Précédemment, la Tchéquie et la Slovaquie ont aussi décidé de devenir deux pays indépendants avec une reconnaissance internationale générale et une adhésion à l'Union européenne.

Mes questions sont les suivantes.

1) À quels critères un « pays » doit-il répondre pour que la Belgique reconnaisse son indépendance ? Plus concrètement, à partir de quel moment l'Écosse, la Catalogne et le Pays basque acquerraient-ils un statut de nation indépendante ?

2) Qu'advient-il lorsque le pays/la nation dont la région faisait partie n'accepte pas cette indépendance, et si, après les processus démocratiques, l'indépendance proclamée par ces régions n'est pas reconnue, par exemple, par la Grande-Bretagne pour l'Écosse ou par l'Espagne pour la Catalogne ou le Pays basque ? Sur la base de quels critères et considérations la Belgique déterminera-t-elle sa position dans ce cas ?

3) Des accords internationaux ont-ils déjà été conclus à ce sujet ?Quel est le rôle de l'Union européenne en la matière ?

4) S'il n'y a aucune disposition légale précise dans ce domaine, quelle position le gouvernement belge adoptera-t-il ? Un cadre légal plus clair s'impose-t-il ici ?

Réponse reçue le 29 novembre 2012 :

1) Avant que la Belgique ne reconnaisse un pays en tant qu'État, ce dernier doit correspondre à la définition d’ « État » telle qu’admise en droit international public. Le droit international décrit un État comme suit: « une entité, qui dispose d’une population, d’un territoire et d’un gouvernement et qui par ailleurs est souveraine et indépendante, en ce sens où elle n’est subordonnée à aucun autre État ou à aucune autre entité et, simultanément soumise directement au droit international public » .

Dès qu’un État correspond à cette définition, il obtient son droit à l’existence.

2) Aucune obligation de reconnaissance n’existe en droit international. La reconnaissance revêt un caractère discrétionnaire et la décision de reconnaître est essentiellement un acte politique, laissé à l’appréciation subjective des autorités de l'État reconnaissant.

Il faut néanmoins tenir compte de l’influence de la communauté internationale quant à l’effectivité de la reconnaissance d’un nouvel État au niveau international (voyez par exemple le Kosovo, la Palestine, ...)

Une fois prise la décision politique de reconnaître, cette dernière se concrétise par un acte juridique unilatéral à travers lequel un État existant reconnaît un nouvel État en tant que tel. Dès cet instant, les deux sujets de droit international peuvent accomplir tous les actes juridiques possibles.

3) Au niveau européen, les États membres de l’Union européenne (UE) souhaitent évoluer vers une politique étrangère commune. Il existe des mécanismes afin d’agir collectivement en cas de consensus sur le plan de la reconnaissance et des conditions qui y sont liées.

Les lignes directrices de la CE sur la reconnaissance de nouveaux États en Europe orientale et en Union soviétique, ainsi que la déclaration sur la Yougoslavie de la Communauté européenne, ont ainsi été adoptées le 16 décembre 1991 (voir Bull. CE, 12-1991, p. 127-129, n° 1.4.5.-1.4.6.). Pour votre information, ces déclarations figurent en annexe de ma réponse écrite.

Aucune attitude européenne commune n'a été prise lors de l'indépendance du Kosovo en février 2008, qui n'a d'ailleurs pas été reconnu par tous les États membres de l'UE. Par contre, en juillet 2011, lors de l’examen de l'indépendance du Soudan du Sud, l'UE a adopté une attitude commune en faveur de la reconnaissance du Soudan du Sud.

4) La Belgique reconnaît un nouvel État uniquement si celui-ci répond aux critères d’un État tels qu’énoncés au point 1. En cas de positions communes européennes, il en est tenu compte.

Depuis quelques années, la Belgique applique la procédure suivante afin de reconnaître formellement un État: un Arrêté royal est tout d’abord rédigé sur la base de l’article 167 de la Constitution. Dans notre régime constitutionnel, la reconnaissance appartient aux compétences du pouvoir exécutif. C’est en effet le Roi qui gère les relations internationales.

Dès l’Arrêté royal signé par le Chef de l'État, l'État reconnu par la Belgique est informé de cette reconnaissance. Pour ce faire, j’envoie une lettre à mon homologue de l'État reconnu ou une note diplomatique est adressée à cet État.

Enfin, cet Arrêté royal est publié au Moniteur belge.