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Question écrite n° 5-2682

de Fabienne Winckel (PS) du 8 juillet 2011

à la vice-première ministre et ministre de l'Emploi et de l'Égalité des chances, chargée de la Politique de migration et d'asile

Travailleurs engagés sous contrat de remplacement à durée indéterminée - Préavis

contrat de travail
travail temporaire

Chronologie

8/7/2011Envoi question
12/9/2011Réponse

Question n° 5-2682 du 8 juillet 2011 : (Question posée en français)

Le contrat de remplacement est autorisé en cas d'absence pour maladie, repos d'accouchement, vacances, crédit-temps, …, mais est interdit si le salarié est absent pour causes économiques, en chômage intempéries, suite à une grève ou un lock-out. La suspension du contrat du travailleur remplacé doit être totale et non partielle excepté lors d'une réduction temporaire des prestations dans le cadre d'un crédit-temps à temps partiel. Ce type de contrat est donc utilisé pour remplacer un travailleur, sous contrat avec l'employeur, qui est temporairement absent pour maladie, accident, vacances, congé sans solde, détention préventive, …

La durée d'un contrat de remplacement ne peut pas dépasser deux ans. En cas de dépassement de la période de deux ans, le contrat est soumis aux mêmes conditions que les contrats conclus pour une durée indéterminée.

Le contrat de remplacement peut être conclu à durée déterminée ou à durée indéterminée.

Le travailleur remplaçant ne doit pas nécessairement exercer la même fonction que le travailleur qu'il remplace. De même, le régime de travail ne doit pas être nécessairement identique. Le remplaçant doit toutefois avoir dans l'entreprise les mêmes conditions de travail et de rémunération que s'il était employé à durée indéterminée à cette fonction dans l'entreprise.

Si le contrat de remplacement est à durée indéterminée, et que le remplacement est terminé parce que le travailleur remplacé reprend normalement son activité, le contrat peut avoir prévu dès le départ la durée du préavis ou même prévoir qu'il n'y a pas de préavis et que le contrat prend fin immédiatement au retour du remplacé. Si rien n'est prévu dans le contrat, ce sont les règles ordinaires de préavis qui s'appliquent.

Lorsque le contrat de remplacement est conclu pour une durée déterminée, il prend fin automatiquement sans préavis, ni indemnité. Dans ce cas, si le travailleur remplacé reprend le travail avant la date prévue et que la période d'essai est terminée et en l'absence de faute grave, l'employeur devra verser une indemnité correspondant à la rémunération à échoir jusqu'au terme prévu.

Il semble donc que quelque soit son choix, il est peu probable que l'employeur ait à payer un préavis. Même si le contrat de remplacement est un contrat particulier, il semble anormal que la loi ne prévoie pas de préavis ou d'indemnité de préavis lorsque le travailleur remplaçant a été engagé pour une durée indéterminée. Il semble donc logique que ce travailleur compte sur une certaine longévité du contrat.

Dès lors, ne serait-il pas correct de prévoir un préavis ou d'indemnité de préavis d'une durée d'un mois minimum pour les travailleurs engagés sous contrat de remplacement à durée indéterminée ? Le remplaçant ne devrait-il pas effectuer les mêmes tâches et les mêmes horaires que le travailleur remplacé ? Pourquoi cette liberté ? Quelles sont les raisons pour lesquelles le contrat à temps partiel de remplacement est interdit ?

Réponse reçue le 12 septembre 2011 :

1. Tout d’abord, il me paraît utile de rappeler que les contrats de remplacement sont, en principe, toujours conclus pour une durée indéterminée (Doc. Parl., Sénat, 1997-98, n° 258/2, p. 139; Tribunal du travail de Bruxelles, 6 octobre 1993, J.T.T., 1994, p. 219).

2. Concernant la rupture moyennant octroi d’un délai de préavis d’un contrat de travail de remplacement, l’article 11ter, § 1er, alinéa 1er, de la loi du 3 juillet 1978 relative aux contrats de travail dispose notamment que « Celui qui remplace un travailleur dont l’exécution du contrat est suspendue (…) peut être engagé dans des conditions qui dérogent aux règles prévues par la présente loi en ce qui concerne (…) le délai de préavis ». Cette disposition permet, le cas échéant, de prévoir des délais de préavis inférieurs aux délais ordinaires, voire de n’octroyer aucun délai en cas de rupture.

La portée de ce régime dérogatoire est doublement limitée. D’une part, l’instauration du régime dérogatoire est conditionnée par un accord des parties au contrat de travail de remplacement. En effet, nulle part la loi ne prévoit que le contrat de remplacement est rompu de plein droit par la fin du remplacement (P. Crahay, « Le contrat de travail de remplacement », in Le droit pénal social et les contrats de travail spéciaux, CUP, Bruxelles, Larcier, 1997, p. 733). D’autre part, seule une cessation du contrat de remplacement, dont la cause est la fin du remplacement, peut être soumise à l’application du régime dérogatoire éventuellement prévu par les parties. En d’autres termes, celui-ci ne peut jouer si la fin du contrat de travail de remplacement trouve son origine dans un événement étranger à la fin du remplacement (P. Crahay, o. c., p. 732; C. trav. Anvers, 6 avril 1989, Chron. D.S., 1993, p. 331; C. trav. Liege, 12 mars 1990, Chron. D.S., 1990, p. 383; C. trav. Gand, 12 mars 1999, JTT, 1999, p. 341; Tribunal du travail Namur, 23 octobre 1989, JTT, 1990, p. 46).

Si le cadre strict décrit ci-avant n’est pas suivi, le régime dérogatoire ne s’applique pas. Le contrat de travail de remplacement ne peut alors être rompu moyennant préavis qu’en respectant les délais normaux prévus par la loi relative aux contrats de travail. Les garde-fous déjà existants paraissent suffisants.

3. L’on pourrait légitimement penser que le travailleur remplaçant est engagé pour exécuter les tâches incombant au travailleur remplacé. Il n’est toutefois pas interdit que l’employeur modifie la nature du travail confié au salarié remplaçant, en fonction de l’évolution des besoins de l’entreprise. A cet égard, le degré de précision de la clause du contrat de travail de remplacement, relative à la nature du travail du remplaçant, sera déterminant. Plus le libellé de cette clause sera large, plus le pouvoir de l’employeur d’agencer la nature de la fonction du remplaçant (ius variandi) sera grande. A l’inverse, plus ce libellé sera précis, plus le pouvoir de l’employeur sera réduit.

J’ajoute qu’en toute hypothèse, la durée du travail du travailleur remplaçant doit être relativement similaire à celle du travailleur remplacé, dont l’identité doit être clairement mentionnée dans le contrat de travail de remplacement (Art. 11ter, § 1er, alinéa 2, de la loi du 3 juillet 1978, précitée).

4. Il est enfin parfaitement légal de conclure un contrat de travail de remplacement à temps partiel. Cette problématique doit être distinguée de l’exigence posée par la Cour de cassation, selon laquelle la conclusion d’un contrat de travail de remplacement n’est, sauf dérogation légale (voir art. 104 de la loi du 22 janvier 1985 de redressement contenant des dispositions sociales – interruption de carrière), admise que si l’exécution du contrat de travail du travailleur remplacé est suspendue totalement (Cass., 23 mars 1981, J.T.T., 1982, p. 121).

A titre d’illustration, un contrat de travail de remplacement à temps partiel peut être conclu si l’exécution du contrat de travail du travailleur remplacé, occupé dans le cadre d’un régime à temps partiel, est totalement suspendue.