Chine - Balance commerciale - Réévaluation du yuan
Chine
devise
balance commerciale
échange commercial
ajustement monétaire
3/9/2010 | Envoi question |
1/2/2011 | Réponse |
On se préoccupe beaucoup aux États-Unis de la forte sous-évaluation de la devise chinoise, responsable d'un énorme déficit commercial des États-Unis vis-à-vis de la Chine.
C'est surtout le Congrès qui insiste pour que le yuan soit réévalué. Notre balance commerciale, et donc l'emploi dans notre pays, bénéficieraient également d'une réévaluation du yuan, que la Chine maintient artificiellement à un cours de moitié trop bas afin de promouvoir ses exportations.
Je souhaiterais une réponse aux questions suivantes :
1. À combien s'élève notre déficit commercial avec la Chine ? Et celui de l'Union européenne ?
2. Qu'a fait le gouvernement pour inciter la Chine à une politique monétaire équilibrée ?
3. La Belgique a-t-elle déjà insisté auprès de l'Union européenne, dont elle exerce actuellement la présidence ?
En réponse aux questions de l’honorable membre, je communique les informations suivantes.
Le tableau qui suit contient les chiffres des échanges de marchandises de la Belgique avec la Chine (sans Hong Kong) pour les années 1999 à 2009. La dernière colonne contient le solde de nos échanges de marchandises avec la Chine. Ce solde a été négatif pour chaque année de la période considérée. Le déficit s’est accru chaque année, pour atteindre près de 10 milliards d’euros en 2008. En 2009, on a connu une baisse remarquable, jusque 6,1 milliards d’euros. Cette baisse du déficit s’explique tant par le recul de nos importations de marchandises en provenance de la Chine, de 13,4 milliards d’euros à 10,5 milliards d’euros, que par l’augmentation de nos exportations de marchandises vers ce pays, de 3,4 milliards d’euros à 4,3 milliards d’euros.
Année |
Exportations de marchandises de la Belgique vers la Chine, valeur en millions d’euros |
Importations de marchandises en Belgique depuis la Chine, valeur en millions d’euros |
Balance commerciale (marchandises), solde en millions d’euros |
1999 |
887,85 |
2 952,29 |
-2 064,44 |
2000 |
1 339,96 |
4 010,63 |
-2 670,67 |
2001 |
1 691,01 |
4 315,67 |
-2 624,66 |
2002 |
2 009,63 |
4 746,62 |
-2 736,99 |
2003 |
2 273,80 |
5 480,81 |
-3 207,01 |
2004 |
2 362,62 |
6 851,23 |
-4 488,61 |
2005 |
2 703,78 |
8 722,00 |
-6 018,21 |
2006 |
2 930,80 |
10 307,86 |
-7 377,06 |
2007 |
3 340,56 |
12 622,74 |
-9 282,18 |
2008 |
3 424,21 |
13 401,58 |
-9 977,38 |
2009 |
4 338,17 |
10 468,75 |
-6 130,58 |
Source: Institut des Comptes nationaux.
Le tableau suivant contient les chiffres correspondants quant aux échanges de marchandises entre l’Union européenne(UE) et la Chine (sans Hong Kong). En 2009, le déficit de la balance des marchandises s’élevait à 133,1 milliards d’euros.
Année |
Exportations de marchandises de l’UE vers la Chine, valeur en millions d’euros |
Importations de marchandises en UE depuis la Chine, valeur en millions d’euros |
Balance commerciale (marchandises), solde en millions d’euros |
1999 |
19 658,89 |
52 596,59 |
-32 937,70 |
2000 |
25 863,45 |
74 631,93 |
-48 768,49 |
2001 |
30 664,77 |
82 000,01 |
-51 335,24 |
2002 |
35 098,99 |
90 147,95 |
-55 048,96 |
2003 |
41 472,86 |
106 219,95 |
-64 747,10 |
2004 |
48 376,22 |
128 691,78 |
-80 315,56 |
2005 |
51 825,40 |
160 327,04 |
-108 501,64 |
2006 |
63 794,04 |
194 932,27 |
-131 138,22 |
2007 |
71 927,81 |
232 663,65 |
-160 735,85 |
2008 |
78 416,40 |
247 933,34 |
-169 516,94 |
2009 |
81 631,02 |
214 755,21 |
-133 124,19 |
Source: Eurostat.
Pour faire face au tumulte des marchés financiers, la banque centrale de la Chine avait décidé en juillet 2008 d’à nouveau coupler le yuan au dollar américain. Ce régime a été officiellement abandonné le 19 juin 2010, lorsque la People's Bank of China a annoncé le retour à ce qu’on appelait un régime de taux de change flottant contrôlé " managed floating exchange rate regime”. Ainsi, le taux de change du yuan par rapport au dollar américain sur le marché au comptant "spot exchange rate" est autorisé à fluctuer chaque jour dans une marge de plus ou moins 0,5 pour cent autour d’un cours pivot, fixé chaque jour.
Toutefois, l’Europe et les États-Unis restent très préoccupés par la faible évaluation du yuan. Lors du sommet UE-Chine du 6 octobre 2010, pendant la présidence belge de l’Union européenne, l’Europe - et notamment la Belgique - ont beaucoup insisté pour que le taux de change du yuan soit plus flottant. L’Europa juge en effet qu’elle supporte une part disproportionnée de l’ajustement des taux de change internationaux et que cela pourrait affecter sa reprise économique. Il est clair que la pression internationale sur la Chine aura probablement peu d’effet mais à terme, le taux de change du yuan devrait connaître une appréciation résultant du développement économique interne de la Chine.
D’autre part, il faut remarquer que le taux de change du yuan n’est qu’un élément parmi beaucoup d’autres qui peuvent influencer l’évolution des échanges commerciaux avec la Chine. Il est peu probable qu’une réévaluation sensible du taux de change du yuan par rapport à l’euro et par rapport au dollar américain mène automatiquement à l’élimination des importants déficits des balances commerciales américaine et européenne avec la Chine. À cet égard, citons dans un passé financier récent les Accords du Plaza, signés en 1985. Par ces accords, le Japon et l’Allemagne s’étaient engagés à faire augmenter le taux de change de leur monnaie par rapport au dollar, ce qui s’était effectivement produit. Ceci n’a pourtant pas mené à une réduction draconienne du déficit commercial américain avec le Japon, telle que l’espérait les décideurs à Washington.
En effet, il faut éviter de se concentrer uniquement sur les taux de change, ce qui devient apparent lorsqu’on considère la spécificité des relations économiques entre la Chine et les États-Unis. La situation se caractérise tout d’abord par les excédents d’épargne chinois par rapport aux déficits d’épargne américains. Un afflux massif d’importations chinoises à bas prix a permis aux États-Unis de maintenir le taux d’inflation à un niveau particulièrement bas, ce qui a également permis à la banque centrale américaine de maintenir un taux d’intérêt bas (provoquant indirectement la crise des dettes, en incitant d’une part les ménages américains à signer des prêts bon marché et en dirigeant d’autre part les investisseurs vers le capital à risque, en espérant un rendement supérieur). Entre-temps, les autorités chinoises plaçaient les importants excédents de la balance commerciale dans des fonds américains d’obligations de gouvernement, permettant ainsi au gouvernement des États-Unis de réaliser un financement bon marché de ses importants déficits budgétaires et entraînant en même temps une pression à la baisse sur les taux d’intérêt.
Enfin, il faut signaler qu’il est extrêmement difficile de définir exactement quel est le taux de change « correct » d’une monnaie. La réglementation utilisée par l’Organisation mondiale du commerce (OMC) n’est pas très claire au niveau des taux de change. Il existe une clause avisant les gouvernements des États participants à ne pas contrarier les provisions du GATT – General Agreement on Tariffs and Trade – "frustrate the intent of the provisions" au moyen de leur politique de change "exchange rate action", mais l’on ne sait pas si cette règle est suffisamment concrète pour être appliquée lors d’un débat au sein de l’OMC.