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Question écrite n° 5-10875

de Cindy Franssen (CD&V) du 15 janvier 2014

à la secrétaire d'État à l'Asile et la Migration, à l'Intégration sociale et à la Lutte contre la pauvreté, adjointe à la ministre de la Justice

le projet « Housing First »

sans-abri
pauvreté
droit au logement

Chronologie

15/1/2014Envoi question
20/1/2014Réponse

Requalification de : demande d'explications 5-4042

Question n° 5-10875 du 15 janvier 2014 : (Question posée en néerlandais)

Le 25 septembre 2013, la secrétaire d'État a annoncé l'introduction du projet « Housing First » en Belgique. Ce projet, venu des États-Unis, offre un logement individuel, éventuellement doublé d'un accompagnement de longue durée, à des personnes qui sont des sans-abri chroniques et sont confrontées à des problèmes d'addiction ou à des troubles psychiatriques. Actuellement, une personne ne peut souvent signer un contrat de bail qui si elle a un travail, ce qui crée des cercles vicieux. Dans ce projet, les sans-abri doivent être en mesure de payer leur loyer eux-mêmes ; en pratique, ils devront pour ce faire souvent obtenir le revenu d'intégration.

Housing First s'appuie sur huit principes :

- Le logement est un droit humain fondamental ;

- Tous les occupants d'un logement Housing First ont droit au respect, à la chaleur et à la compassion ;

- Les participants s'engagent à collaborer avec l'occupant d'un logement Housing First aussi longtemps que nécessaire ;

- Les logements sont répartis dans des appartements indépendants ;

- Logement et services sont séparés ;

- Les occupants ont la liberté de choix et le droit à l'autodétermination ;

- Le projet est orienté sur l'insertion ;

- Le projet vise à réduire les nuisances.

Le projet exclut cependant :

- Que l'on demande à l'occupant d'un logement Housing First de suivre une préparation ou une thérapie ou une cure de désintoxication ;

- Que l'on demande au préalable à l'occupant d'un logement Housing First d'entreprendre des démarches pour se préparer à l'accès au logement ;

- Que l'on offre un logement temporaire ;

- Que l'on offre un logement communautaire (sauf si le client le souhaite) ;

- Que des locataires soient expulsés pour d'autres motifs que ceux qui figurent dans le contrat de bail.

C'est en 1992 déjà qu'Housing First a été lancé à New York. Depuis lors, cinq villes européennes expérimentent le projet : Amsterdam, Copenhague, Lisbonne, Glasgow et Budapest. Les constatations faites par ces cinq villes européennes ont permis de dégager certains points forts et points faibles du projet. Tout d'abord, les chiffres prouvent que les occupants d'un logement Housing First parviennent à conserver leur logement. On note en outre un effet positif sur l'assuétude et la santé mentale. Avoir son logement donne en effet un sentiment de liberté individuelle, réduit le stress, apporte la stabilité et la régularité et assure une vie privée. Les nuisances que l'on redoutait pour le voisinage sont également limitées.

Les résultats sont cependant moins positifs en ce qui concerne les activités en journée : peu d'occupants seulement ont un travail fixe. Beaucoup se sentent toujours seuls et restent confrontés à des difficultés financières, en raison surtout du revenu faible que perçoivent les occupants d'un logement Housing First.

Il reste donc plusieurs défis à relever :

- Il est difficile de trouver des logements pour Housing First, surtout des appartements dispersés ;

- La solitude et des activités en journée restent des priorités ;

- La relation entre l'occupant et le travailleur social est différente dans le cadre de Housing First que dans le secteur ordinaire de l'aide sociale ;

- Il faut non seulement trouver des moyens financiers pour lancer les projets mais aussi pour les faire perdurer.

Avec le gouvernement fédéral, la secrétaire d'État s'engage également dans le Plan fédéral de lutte contre la pauvreté, comme objectif opérationnel 4, à s'inspirer de l’approche Housing First : « Action 76. La Secrétaire d’État à l’Intégration sociale et à la Lutte contre la Pauvreté appliquera le principe du « Housing First » dans au moins cinq grandes villes du pays (deux en Flandre, deux en Wallonie et une à Bruxelles), avec une attention spécifique pour son concept global. Une harmonisation sera organisée dans ce cadre avec les régions, qui sont compétentes pour le logement et qui ont déjà développé des instruments intéressants, et ce en vue de conférer un maximum de pouvoir au projet » (page 38). Le projet est prévu au budget de 2013, 172.000 euros étant budgétés pour chacune des villes. En outre, la Loterie nationale offre un montant de 860.000 euros pour 2013 et 2014.

La secrétaire d'État peut-elle me donner les renseignements suivants ?

1) Des villes ont-elles déjà été sélectionnées pour le projet « Housing First » ? Si oui, lesquelles et où en est le projet ? Si non, quand la sélection sera-t-elle faite et quand les projets seront-ils lancés ?

2) La variante belge de Housing First fonctionnera-t-elle vraiment selon les huit principes susmentionnés ? Si non, quels seront les principes suivis ?

3) De quelle manière les effets négatifs qui ont été observés dans les projets pilotes des cinq villes européennes sont-ils éliminés de la variante belge ? Quelles mesures prend-on pour relever adéquatement les défis au sein du projet ?

4) Dans quelle mesure et de quelle manière les CPAS seront-ils associés au projet ?

5) Quel rôle les organisations locales de lutte contre la pauvreté joueront-elles dans ce projet ?

6) De quelle manière le logement et l'accompagnement seront-ils organisés et coordonnés ?

a) Quel acteur devra-t-il coordonner la recherche de logements et gérer l'infrastructure ?

b) Établira-t-on une collaboration avec les sociétés de logement social ? Si oui, de quelle manière ?

c) Comment la clientèle sera-t-elle sélectionnée ? Qui se charge de la sélection et la coordonne ?

7) La secrétaire d'État a-t-elle déjà discuté de ce projet avec ses collègues du niveau régional (logement) et communautaire (soins) ? Si oui, quand et quelles ont été les conclusions de ces entretiens ?

Réponse reçue le 20 janvier 2014 :

L’honorable membre trouvera ci-après la réponse à ses questions.

Des partenaires, publics et privés, démontrant déjà une expérience d’accompagnement dans le logement et issus des 5 plus grandes villes belges (Anvers, Gand, Bruxelles, Charleroi, Liège) ont élaboré ce projet de manière partenariale.

Une coordinatrice générale assure le développement du projet et sa transversalité. Elle dirige également l’équipe d’évaluation.

Les principes fondamentaux du Housing First mentionnés dans les questions serviront de guides pour ces équipes d’accompagnement. Mais ces équipes adapteront aussi le modèle original à partir de leur propre expérience et des réalités locales spécifiques.

Le projet Housing First Belgium vise les personnes sans-abri les plus fragiles (qui auront le plus souvent des problématiques de santé mentale et/ou d’assuétude). Toutefois, les équipes restent autonomes dans la sélection des personnes sans-abri. Elles bénéficient d’une expérience et d’une place au sein des réseaux de l’action sociale leur permettant d’être en contact quotidien avec des personnes sans-abri susceptibles d’intégrer le programme. Le fonctionnement des équipes d’accompagnement, y compris dans cette phase de sélection du public, fait l’objet du travail descriptif de l’équipe d’évaluation.

Eu égard aux résultats des études précédemment menées en Europe, les porteurs du projet Housing First Belgium portent notamment une attention particulière à :

Chaque initiative dans les 5 villes met en œuvre un comité de pilotage en plus d’un Comité d’accompagnement élargi pour l’ensemble du projet. Les associations de lutte contre la pauvreté sont dûment consultées et associées.

Ces logements proviennent soit du parc locatif public (Gand, Anvers, projet du SMES-B à Bruxelles), privé (Infirmiers de rue à Bruxelles) ou mixte (Charleroi et Liège). La personne relogée signe un contrat de bail et paie elle-même son loyer (à partir de son revenu d’intégration sociale ou d’un autre type de revenu).

La sélection des participants se fait selon les règles propres à chaque opérateur de projet local du point de vue méthodologique et déontologique.

Dans le cadre de la Conférence interministérielle Intégration dans la société, les Régions et communautés seront informés de l’avancement du projet au sein du groupe de travail ‘Sans Abrisme’.