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Question écrite n° 4-4254

de Paul Wille (Open Vld) du 2 septembre 2009

à la ministre des PME, des Indépendants, de l'Agriculture et de la Politique scientifique

Déforestation - Coût - Moratoire

forêt tropicale
exploitation forestière
déboisement
protection de l'environnement
Brésil
réchauffement climatique
effet de serre atmosphérique
réduction des émissions de gaz
écosystème
Protocole de Kyoto

Chronologie

2/9/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 1/10/2009)
28/9/2009Réponse

Question n° 4-4254 du 2 septembre 2009 : (Question posée en néerlandais)

Il ressort d'une étude commandée par l'Union européenne que la déforestation présente un coût global plus élevé que la crise financière. De plus, la déforestation est un phénomène constant et non unique. L'étude exprime en termes monétaires les différents “services” rendus par la forêt à l'être humain : assimilation des gaz contribuant à l'effet de serre, offre de bois et de nourriture, rétention d'eau. Si l'on pousse la comparaison plus loin et que les forêts continuent à disparaître au rythme actuel, le coût pour l'humanité représentera entre 1,5 et 3,7 billons (!!) d'euros par an. La crise financière a provoqué une perte estimée d'environ 0,75 billion d'euros.

L'étude a été entamée l'année dernière, sous la présidence allemande. Selon la première partie, terminée en mai, le coût de la déforestation correspondait à 7 % de l'économie annuelle mondiale. Les chercheurs calculent actuellement le coût d'autres écosystèmes en voie de disparition.

Fin juillet, le ministre brésilien de l'Environnement, Carlos Minc, a annoncé une prolongation jusqu'en 2010 du moratoire établi en 2006 à la suite d'une campagne de Greenpeace concernant l'achat de soja par l'Europe. Selon ce moratoire, aucune entreprise ne peut acheter le soja provenant de zones de la forêt amazonienne déboisées après 2006. Les entreprises doivent montrer leur volonté de protéger la forêt tropicale et de garder prise sur le réchauffement climatique. Grâce au moratoire, ces entreprises peuvent garantir qu'elles n'ont pas besoin de détruire la forêt amazonienne pour fabriquer leurs produits. Entre-temps, des acheteurs de viande de boeuf et de cuir, entre autres la firme sportive Nike, se sont concrètement engagés à ne plus acheter de cuir ni de viande provenant de zones déboisées d'Amazonie.

Le contexte étant ainsi brièvement esquissé, j'aimerais poser les questions suivantes à la ministre :

1. Comment réagit-elle à cette étude ?

2. Comment l'État belge garantit-il que les indépendants et les PME ne contribuent pas à la déforestation des forêts tropicales ?

3. Quelles entreprises belges sont-elles, selon la ministre, les principaux acheteurs de viande de boeuf, de cuir et de soja provenant du Brésil ?

4. Nos entreprises peuvent-elles, grâce au moratoire ou à d'autres accords, garantir qu'il ne faut pas détruire la forêt amazonienne pour fabriquer leurs produits ? Dans la négative, la ministre estime-t-elle que des mesures soient prises pour combler cette lacune ?

5. La ministre s'est-elle déjà concertée à ce sujet avec ces entreprises ? Dans l'affirmative, quel en a été le résultat ? Dans la négative, la ministre compte-t-elle le faire ?

6. Quels efforts les entreprises belges fournissent-elles actuellement pour lutter contre la déforestation ?

Réponse reçue le 28 septembre 2009 :

1. Dans son rapport "Economics of climate change" publié en 2006, Nicholas Stern évaluait pour la première fois les conséquences du changement climatique en termes de coûts économiques, et aboutissait à la conclusion que les bénéfices que présenterait une action ferme et précoce au niveau mondial l’emporteraient de loin sur le prix de l’inaction en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Depuis lors, des études similaires se sont multipliées. L’initiative TEEB (The Economics of Ecosystems and Biodiversity) a été lancée en 2007 par l’Allemagne et la Commission européenne. Le rapport intermédiaire publié en mai 2008 évaluait les pertes économiques et l’impact négatif sur le bien-être humain qui résulteraient de la dégradation continue de la biodiversité et des écosystèmes.

Pour mieux protéger nos sociétés et nos économies de telles conséquences, de nouvelles approches méthodologiques ont été développées par la communauté scientifique.

À ce niveau, la Politique scientifique fédérale a lancé récemment un appel à propositions de "clustering" visant à mobiliser le potentiel scientifique belge existant afin de :

- définir une méthodologie d’évaluation des écosystèmes en Belgique : l’un des aspects traités au sein de ce cluster sera précisément l’impact du commerce international sur les biens et les services rendus par les écosystèmes forestiers tropicaux;

- étudier la faisabilité de la mise en place du mécanisme financier REDD (Reduction of greenhouse gases emission trough Deforestation and forest Degradation), prévu dans le cadre des négociations post-Kyoto : des études doivent établir un cadre de référence lié aux changements d’utilisation et d’affectation des terres ainsi qu’au potentiel de soutenabilité d’un tel mécanisme.

2. La Belgique est impliquée dans le Plan d’action FLEGT (Forest Law Enforcement on Governance and Trade) de la Commission européenne visant à l’amélioration de la gouvernance et à l’application des lois concernant l’exploitation des forêts et le commerce des produits de bois. Des actions significatives ont été engagées vers l’instauration de conditions juridiques adéquates, le déploiement d’outils de traçabilité ou la programmation d’une licence FLEGT. Ce sont les départements de la Justice, des Finances, en particulier les Douanes, et de la Coopération au Développement qui sont particulièrement concernés par ces actions. Les certifications FSC (Forest Stewardship Council) relèvent des Services public fédéraux (SPF) Economie et Environnement. Ces certifications attestent d’une gestion forestière responsable, c’est-à-dire qui tienne compte de l’environnement et des impacts sociaux tout en étant économiquement viable. Elles garantissent également la traçabilité des produits (bois, meubles, papier,...).

3. et 4. Il existe deux banques de données pour chercher les entreprises qui peuvent être des fournisseurs ou des acheteurs de bois certifié FSC :

- soit par numéro de certification, type de certificat, pays, nom de compagnie : http://www.fsc-info-org/

- soit par type de produit, espèce d’arbre, pays, province, nom ou type de compagnie : www.certifiedwoodsearch.org

5 et 6. La Politique scientifique fédérale a commandité une étude intitulée "Industry and biodiversity in Belgium" pour brosser un panorama des stratégies utilisées par les entreprises belges dans le cadre de la protection de la biodiversité. Le Conseil fédéral du Développement durable (CFDD) compte organiser un colloque sur cette matière afin de donner suite à une des recommandations de cette étude concernant la mise sur pied d’une consultation plus formalisée avec les secteurs d’activités.