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Question écrite n° 4-3131

de Margriet Hermans (Open Vld) du 27 février 2009

à la vice-première ministre et ministre des Affaires sociales et de la Santé publique

Syndrome de fatigue chronique- Encéphalomyélite myalgique

physiologie du travail
maladie chronique
maladie du système nerveux
thérapeutique
soins de santé
Conseil supérieur de la santé
Institut national d'assurance maladie-invalidité
Centre fédéral d'expertise des soins de santé
centre médical
assurance maladie

Chronologie

27/2/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 2/4/2009)
28/5/2009Réponse

Question n° 4-3131 du 27 février 2009 : (Question posée en néerlandais)

La fatigue chronique est une affection fréquemment rencontrée en médecine. Près de deux pour cent de la population en souffrirait. Chez la majorité des personnes atteintes, cette fatigue est due à des problèmes organiques, des affections psychiques (dépression, angoisses, troubles psychosomatiques, etc.) ou à une combinaison de facteurs psychologiques, sociaux et physiques. Le syndrome de fatigue chronique (SFC) n'est admis que chez les patients dont la fatigue chronique n'a pas de causes tangibles. On utilise de nos jours de plus en plus la dénomination EM/SFC. L'EM ou encéphalomyélite myalgique désigne littéralement l'inflammation de la moelle épinière et des muscles. L'utilisation d'une définition correcte du syndrome revêt une importance capitale dès lors que le diagnostic, le traitement et la fixation du degré d'invalidité en dépendent. Le diagnostic de l'EM/SFC ne peut être établi que par élimination d'autres maladies. Pour les affections dont la science ne cerne pas l'apparition et les causes avec certitude, dont les symptômes sont variables et peu spécifiques et pour lesquelles il n'existe aucun test diagnostique simple, il est préférable de recourir à la définition de cas. Il s'agit d'une description de l'affection basée sur le consensus. Les premières institutions à s'y être risquées sont les Centres for Disease Control (CDC) américains. Les critères, connus sous le nom de critères de Fukuda, sont les suivants :

1. Au moins six mois de fatigue récurrente ou persistante pour laquelle on n'a constaté aucune explication d'ordre physique et qui est nouvelle, ne s'atténue guère avec le repos, n'est pas la conséquence d'un effort et limite sérieusement le fonctionnement de la personne.

2. En combinaison avec au moins quatre des symptômes suivants, persistants ou récurrents à intervalles réguliers durant six mois et non présents avant l'apparition de la fatigue : maux de gorge, sensibilité des ganglions du cou et de l'aisselle, maux de tête, douleurs musculaires, douleurs articulaires, altération autorapportée de la mémoire et de la faculté de concentration, sommeil non réparateur et sentiment d'épuisement après un effort.

3. Les critères d'exclusion sont les suivants : autre affection ou maladie expliquant (probablement) la fatigue, comme par exemple, une obésité avec un IMC supérieur à 40, l'anorexie ou boulimie nerveuse, la démence et un grave surpoids.

En 2003, une équipe d'éminents scientifiques, travaillant principalement au Canada et aux États-Unis, a élaboré d'autres critères pour le diagnostic de l'EM/SFC. Ces critères canadiens sont les suivants :

1. Présence de : fatigue, douleurs, malaise après effort, troubles du sommeil.

2. En outre, au moins deux symptômes cognitifs : troubles de la mémoire, de la concentration, confusion.

3. Un ou deux symptômes dans deux des catégories suivantes : plaintes immunologiques telles que réactions allergiques, ganglions sensibles, maux de gorge et intolérances alimentaires, troubles du système nerveux autonome tels que palpitations, syncope, troubles gastriques, ou plaintes neuroendocriniennes telles qu'instabilité thermostatique.

4. Les symptômes doivent se manifester la première fois lors d'une crise aiguë, persister au moins six mois et s'aggraver après un effort.

Il apparaît clairement que les critères de Fukuda considèrent la fatigue comme un critère obligatoire mais ne classent le malaise après l'effort que parmi les critères mineurs. Au contraire, la définition clinique canadienne prévoit très clairement que, pour satisfaire aux critères, le patient doit avoir une aggravation de ses symptômes après avoir fourni un effort. Il doit également être affecté par des troubles neurologiques, neurocognitifs, neuroendocriniens, dysautonomes et immunitaires. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) reconnaît elle aussi l'EM/SFC en tant qu'affection neurologique accompagnée d'anomalies immunologiques et endocrinologiques.

En Belgique, on utilise toutefois les critères de Fukuda des Centers For Disease Control américains. On accorde surtout de l'importance à la prise en compte des plaintes subjectives, ce qui ne permet pas de différencier suffisamment les patients atteints de l'EM/SFC de ceux qui souffrent simplement de fatigue chronique. Dans la pratique médicale belge, on considère ainsi l'EM/SFC comme une notion fourre-tout regroupant diverses affections (psychiques) associées à une fatigue chronique dont le patient se plaint. Comme les autorités belges refusent obstinément de reconnaître l'EM/SFC comme une affection physique, les patients ne bénéficient que d'un traitement psychosomatique consistant en une thérapie d'exercices graduelle et une thérapie cognitivocomportementale. C'est curieux puisque 4000 études scientifiques ont déjà démontré l'inutilité de cette approche et que la thérapie d'exercices graduelle est même considérée comme dangereuse. En 2006, l'Inami a dressé le bilan des résultats des centres de référence pour l'EM/SFC. Il en ressort que les résultats sont limités. L'aspect positif mis en évidence par l'étude est que la majorité des patients se plaignent moins souvent de fatigue. Aucune amélioration n'a toutefois été observée en ce qui concerne la reprise du travail, la capacité à l'effort et la qualité de vie. En décembre, le Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE) et le Conseil supérieur de la santé (CSS) ont publié un rapport faisant le bilan du fonctionnement des centres d'expertise. Les résultats des traitements étaient décevants puisque l'on n'a pu trouver aucune preuve scientifique de l'intérêt de procéder au diagnostic et au traitement dans ces centres. Il apparaissait par ailleurs que les centres n'étaient pas parvenus à mettre en place une organisation des soins en collaboration avec les acteurs de première ligne, alors que cela faisait partie de leurs objectifs. La constatation la plus préoccupante est qu'à peine 40 pour cent des patients traités ont fait part d'une amélioration des symptômes mais d'une absence de guérison. Chez 35 pour cent des patients traités, on a même observé une dégradation de leur état à l'issue du traitement. La poursuite du financement de ce projet a donc été sérieusement remise en question.

Une deuxième lettre ouverte a été adressée à la ministre le 27 novembre 2008 à la suite des réponses qu'elle avait apportées à la première lettre ouverte. Ces lettres signalent les nombreux problèmes évoqués ci-dessus. Dans sa réponse, la ministre admet l'existence de ces problèmes et la nécessité de revoir la politique. Elle n'avait à l'époque toutefois pas encore pris de décision sur l'éventuelle réaffectation de moyens aux centres de référence pour l'EM/SFC. Elle confirme également qu'elle-même, le KCE et le CSS reconnaissent la composante biologique de l'EM/SFC et la souffrance qui accompagne cette maladie.

Je souhaiterais dès lors poser à la ministre les questions suivantes :

- Quelle a été la décision de la ministre concernant l'éventuel refinancement des centres de référence pour l'EM/SFC, lesquels ont fait l'objet de plusieurs évaluations négatives de la part d'organismes publics ?

- Sur la base de quels critères la ministre a-t-elle pris cette décision ?

- Dans quelle mesure tiendra-t-elle compte de l'EM/SFC dans sa politique actuelle et future ?

- Comment explique-t-elle que d'autres pays, comme la Canada, la Norvège, l'Espagne et les États-Unis, ont adopté une approche biomédicale de l'EM/SFC et créent des centres biomédicaux où n'intervient aucun psychiatre ?

- Dans quelle mesure les pouvoirs publics belges soutiennent-ils la recherche sur les causes psychosociales de l'EM/SFC, d'une part, et sur les causes biomédicales de la maladie, d'autre part ?

- Dans quelle mesure la politique actuelle se focalise-t-elle sur la multidisciplinarité et, par conséquent, sur les sous-groupes de patients présentant cette affection ?

- Pourquoi la Belgique utilise-t-elle pour l'EM/SFC la classification ICD-9 alors que l'OMS utilise depuis des années déjà la classification ICD-10 ?

Réponse reçue le 28 mai 2009 :

En réponse à votre question, je peux vous communiquer que le Comité de l’assurance de l’Institut national d'assurance maladie et invalidité (INAMI) a décidé de prolonger temporairement le financement des centres de référence pour le syndrome de fatigue chronique. Cette prolongation n’est certainement pas une prolongation sans conditions. La réglementation financière des centres a été profondément adaptée depuis le 1er janvier 2009. Différentes conditions sont liées à la prolongation du financement que j’explicite ci-dessous.

Pour prendre cette décision, le Comité de l’assurance s’est basé sur l’avis commun émis fin 2008 par le Conseil supérieur de la Santé et le Centre fédéral d’expertise au sujet de la dispense de soins dans le cadre du syndrome de fatigue chronique (SFC).

Le Comité de l’assurance avait demandé cet avis principalement en raison des différentes conceptions ou approches concernant ce syndrome.

Deux tendances se dégagent généralement en la matière. Selon la première tendance, le syndrome a une origine biomédicale connue et doit dès lors être traité de manière curative, biomédicale. Cette tendance désigne ce syndrome sous le terme « encéphalomyélite myalgique ou syndrome de fatigue chronique » (EM/SFC). La dénomination « encéphalomyélite myalgique » n’est d’ailleurs pas nouvelle. Elle a déjà été utilisée il y a des dizaines d’années pour ce syndrome. Elle est à présent à nouveau utilisée. Ces dernières années, d’autres termes ont également été utilisés pour définir ce syndrome, tels que « Post-Viral Fatigue Syndrome » ou « Chronic Fatigue (and) Immune Dysfunction ». Chacune de ces dénominations renvoie à une autre cause ou nature présumée du syndrome.

Selon l’autre tendance, l’origine et la pathophysiologie du syndrome ne sont pas encore clairement établies en dépit des nombreuses recherches effectuées. Cette tendance, suivie par les centres de référence, utilise le nom « Syndrome de fatigue chronique » (SFC) parce que ce terme ne renvoie pas à une cause spécifique présumée du syndrome. (J’utilise également ce terme car il s’agit du terme utilisé dans le rapport du Conseil supérieur de la Santé et du Centre d’expertise). Cette tendance a une vision biopsychosociale du SFC. Dans votre question, vous semblez réduire cette vision à une méthode d’approche psychosociale unilatérale, ce qui n’est pas correct selon moi. Selon la vision biopsychosociale, les facteurs physique, psychique et social jouent tous un rôle et exercent une influence mutuelle, comme pour la plupart des autres affections chroniques. Les équipes des centres de référence sont d’ailleurs aussi composées de médecins spécialistes en médecine interne et de médecins spécialistes en médecine physique qui examinent les patients sur le plan biomédical et leur proposent un traitement biomédical si nécessaire.

L’objectif thérapeutique de la tendance biopsychosociale consiste à réduire à un minimum les plaintes des patients et à améliorer leur qualité de vie ainsi que leur fonctionnement physique, psychique et social. Cet objectif est atteint principalement grâce à une thérapie comportementale cognitive et une thérapie d’exercices graduelle. Ces formes de traitement ne sont pas curatives. Elles n’entraînent en principe pas de guérison complète mais elles permettent d’améliorer sensiblement la qualité de vie du patient dans les domaines visés. C’est également le point de départ de la convention de financement conclue par l’INAMI en 2002 avec les centres de référence. Il est incorrect de penser que la tendance biopsychosociale part du principe que le SFC est causé par des facteurs purement psychiques et qu’un traitement de ces facteurs, par exemple au moyen d’une thérapie comportementale cognitive, entraînerait la guérison des plaintes. Il est toutefois supposé que certaines conceptions dysfonctionnelles qu’ont les patients de la façon dont ils doivent gérer leurs plaintes par exemple, peuvent entraîner une aggravation de celles-ci. La crainte par exemple que les plaintes physiques soient encore aggravées par des efforts physiques peut engendrer une inactivité qui entraîne à son tour une diminution de la force et de la condition physiques du patient et qui peut contribuer à l’isolement social du patient. L’objectif de la thérapie comportementale cognitive est de modifier ces conceptions dysfonctionnelles et d’entraîner une amélioration de l’état du patient.

C’est principalement en raison de ces tendances contraires que la cellule stratégique de la ministre des Affaires sociales et les instances de gestion de l’INAMI ont toujours décidé, en ce qui concerne leurs décisions stratégiques en matière de SFC - et plus précisément le financement des centres de référence SFC-, de se faire conseiller par des instances telles que le Conseil supérieur de la Santé et le Centre fédéral d’expertise qui sont en mesure de formuler un avis scientifique objectif à ce sujet. L’objectif est précisément d’éviter que l’une ou l’autre tendance soit favorisée involontairement sur la base d’autres éléments que des éléments scientifiques objectifs.

Pour leur rapport d’avis de 2008, les experts du Centre d’expertise ont réalisé une étude de littérature approfondie. Ils ont tenu compte à cet effet de toutes les études scientifiques publiées sur le SFC, quelle que soit la tendance des chercheurs, qui satisfont à certains standards scientifiques. La méthodologie suivie pour établir un inventaire de ces publications scientifiques est décrite en détail dans le rapport et sur le site Internet du Centre d’expertise. Il ressort de cette description que les experts du Centre d’expertise ont également tenu compte des publications dans lesquelles apparaissaient les termes « encéphalomyélite myalgique » ou «  encéphalopathie myalgique » - diagnostics plus appropriés selon vous – et non celles où apparaissait l’expression « syndrome de fatigue chronique ». Vous mentionnez également que notamment les États-Unis et le Canada auraient opté pour une approche biomédicale. Je souhaite insister à ce sujet sur le fait que le rapport révèle que le Centre d’expertise, dans le cadre de son étude de littérature, a également consulté différentes banques de données de publications scientifiques de ces pays. J’estime que l’objectivité de l’étude du Centre d’expertise ne peut donc pas être remise en question. Je fais également remarquer que, contrairement à ce que vous semblez soutenir, le Conseil supérieur de la Santé et le Centre fédéral d’expertise, n’ont pas réalisé eux-mêmes une nouvelle étude d’évaluation sur le fonctionnement des centres de référence belges. Pour la discussion dans leur rapport sur le fonctionnement des centres, ils se sont basés sur les résultats de l’étude d’évaluation de 2006, réalisée par l’INAMI.

Le rapport sur l’étude du Conseil supérieur de la Santé et du Centre d’expertise, souligne notamment l’absence de consensus sur l’origine du SFC. En ce qui concerne le traitement, la conclusion de l’étude de littérature est que certains traitements biomédicaux par immunoglobulines, antiviraux ou antimicrobiens n’ont pas d’effet favorable ou que l’effet favorable s’est révélé insuffisant. Il ressort en outre de l’étude de littérature que des traitements par immunoglobulines ou par antibiotiques peuvent avoir de graves effets secondaires.

L’étude de littérature du Centre d’expertise confirme cependant, à l’instar d’autres études de littérature internationales similaires réalisées ces dernières années, que la thérapie comportementale cognitive et la thérapie d’exercices graduelle peuvent avoir un effet favorable notamment sur les plaintes, certains domaines de fonctionnement ou la qualité de vie. Le Centre d’expertise réfute également qu’il existerait des preuves scientifiques selon lesquelles la thérapie d’exercices graduelle aggrave le résultat du traitement.

La récente étude de littérature révèle toutefois que la thérapie comportementale et cognitive ou la thérapie d’exercices graduelle n’offrent pas d’amélioration pour tous les patients. Les recherches scientifiques ne démontrent pas non plus qu’une combinaison des deux traitements offre un meilleur résultat. En outre, il n’y a pas suffisamment de preuves que la thérapie comportementale cognitive et la thérapie d’exercices graduelle ont un effet favorable si elles sont dispensées à des groupes de patients plutôt qu’individuellement.

Jusqu’à présent, la plupart des centres de référence ont dispensé la thérapie comportementale cognitive et la thérapie d’exercices graduelle principalement en groupe. C’est notamment le grand nombre de patients qui leur ont été adressés qui a obligé les centres à organiser leurs thérapies de cette façon. Cette situation pourrait expliquer pourquoi les résultats des traitements effectués par les centres étaient sur certains plans moins satisfaisants qu’attendu, comme l’a révélé l’étude d’évaluation de l’INAMI en 2006. Il ne faut pas perdre de vue non plus le fait que cette étude se basait sur les premières années de fonctionnement des centres, c’est-à-dire de 2002 à 2004. Il est normal que les centres aient appris à leurs dépens durant cette période. Et tel a été le cas ici. Aujourd’hui, forts de leur expérience acquise entre-temps, les centres parviennent probablement à mieux sélectionner les patients pour qui le traitement sera potentiellement bénéfique et le contenu des traitements est mieux défini qu’auparavant. Quoi qu’il en soit, le fonctionnement des centres (notamment l’efficacité des programmes thérapeutiques) sera à nouveau évalué, pour autant qu’une décision soit prise pour poursuivre leur financement à plus long terme.

Comme je l’ai dit, le Comité de l’assurance de l’INAMI a provisoirement décidé de ne prolonger le financement des centres que de manière temporaire, et la réglementation financière a été profondément adaptée, compte tenu des recommandations du Conseil supérieur de la Santé et du Centre d’expertise.

Certaines adaptations résident dans le fait que le contenu des programmes thérapeutiques a été adapté afin qu’il soit conforme aux preuves scientifiques dans ce domaine. Cela signifie que tous les patients ne doivent pas suivre à la fois une thérapie comportementale cognitive et une thérapie d’exercices graduelle. Cela permet également de proposer un programme thérapeutique différentié à des sous-groupes de patients qui présentent, par exemple, différentes formulations de leurs plaintes. Le fait de ne pas proposer les deux formes de traitement à chaque patient permet aussi de dispenser chacun des traitements de manière plus individualisée. Comme je l’ai dit, il existe plus de preuves scientifiques en faveur d’un effet positif potentiel de ces traitements, s’ils sont dispensés à des patients individuels que s’ils le sont à des groupes de patients.

D’autres adaptations apportées à la réglementation financière ont trait à l’organisation de la dispense de soins. En effet, il ressort du rapport d’évaluation de l’INAMI, comme vous l’indiquez, que les centres ne sont pas parvenu à mettre en place une organisation de soins en collaboration avec les soins de première ligne. Le Conseil supérieur de la Santé et le Centre d’expertise ont recommandé – je cite – « qu’une organisation des soins mieux structurée pour la prise en charge des patients SFC devrait être mise en place, dans laquelle la première ligne (médecin généraliste, kinésithérapeute, psychologue, …) retrouve un rôle central, en collaboration avec la 2ème ligne la plus proche et un centre de référence ». Ils recommandent en outre que cette organisation de soins structurée soit, dans une première phase, mise en œuvre sous forme d’une expérimentation.

Les experts du Conseil supérieur de la Santé et le Centre d’expertise n’ont donc pas conclu que les centres de références ne joueraient plus un rôle au sein de la nouvelle organisation de soins, mais bien que le traitement doit davantage être dispensé en première et deuxième lignes. D’ailleurs, une autre recommandation précise que les centres de référence, forts de leurs connaissances et de leur expertise en matière de SFC, pourraient jouer un rôle important dans la formation de kinésithérapeutes et de psychothérapeutes de première ligne.

Les mesures suivantes ont été prises pour implémenter cette recommandation  :

À terme, le financement des centres de référence pourra uniquement être affecté à l’organisation de soins échelonnée susmentionnée. Les centres de référence y collaborent de manière coordonnée avec les dispensateurs de soins de première ligne et avec les hôpitaux de deuxième ligne avec lesquels ils ont conclu un accord de collaboration. Toutefois, il va de soi que la mise en place d’une telle organisation de soins échelonnée ne se fera pas du jour au lendemain, mais progressivement. Pour sa thérapie d’exercices graduelle, le patient devrait être renvoyé vers une première ligne plus proche. Cette mesure a des effets immédiats.

Vous avez également posé une question à propos du financement de la recherche. Je peux répondre que les Service public fédéral (SPF) Affaires sociales et Santé publique ne sont pas habilités à financer des recherches scientifiques fondamentales. Toutes les recherches scientifiques fondamentales sont concernées, quelle que soit la nature de la manipulation expérimentale ou la tendance des chercheurs.

Une autre de vos questions portait sur le fait que certains pays, comme le Canada, la Norvège, l’Espagne et les États-Unis, seraient passés à une approche biomédicale. Je ne dispose à ce sujet d’aucune information. J’ignore également le fondement de cette affirmation. Dans le cadre de leur étude, le Conseil supérieur de la Santé et le Centre d’expertise ont, sur la base d’une méthodologie déterminée, mené une enquête sur la manière dont la dispensation de soins aux patients atteints du SFC était organisée dans d’autres pays, à savoir l’Angleterre, les Pays-Bas, l’Italie, l’Australie et la Norvège. Dans la plupart de ces pays, il existe des programmes de soins pour les patients souffrant du SFC, dans la dispensation desquels des psychiatres ou des psychologues sont impliqués ou qui comportent aussi en partie une thérapie comportementale cognitive, une thérapie d’exercices graduelle ou une psychothérapie. La Norvège a récemment pris l’initiative de fonder un centre interdisciplinaire pour les patients atteints du SFC, où l’équipe thérapeutique est aussi composée de psychiatres et d’infirmiers psychiatriques et d’organiser des programmes de soins où la thérapie comportementale cognitive et la thérapie d’exercices graduelle sont dispensées à des patients souffrant du SFC. Cette information semble contredire vos propos selon lesquels la Norvège, entre autres, aurait désormais opté pour une approche biomédicale de cette affection ne nécessitant plus l’intervention d’un psychiatre. Je suppose que dans ces pays, tout comme en Belgique, les avis des différents dispensateurs de soins divergent quant à la nature de cette affection et la manière de la traiter.

Enfin, vous posez encore une question au sujet du système de classification des maladies utilisé par les autorités pour classer le syndrome de fatigue chronique. Vous demandez pourquoi ils utilisent la version neuf du International Statistical Classification of Diseases and Related Health Problems (ICD)et non la version dix, qui est plus récente.

Je suppose que votre question porte sur certaines statistiques qui sont réalisées chaque année par le Service indemnités de l’INAMI. Ces statistiques reflètent notamment, par groupe de maladies, le nombre de bénéficiaires atteints du SFC qui bénéficient d’une allocation d’invalidité suite à une incapacité de travail. Jusqu’à présent, ces informations se basent en effet sur la classification ICD-neuf. Le Service indemnités envisage toutefois de changer de système de classification. Un groupe de travail a été créé au sein de ce service pour étudier cette possibilité. Néanmoins, le passage à un autre système de classification posera de nombreux problèmes organisationnels. Il conviendra notamment d’apporter différentes adaptations informatiques. La mise en place de ce nouveau système prendra donc le temps qu’il faudra.

Quoi qu’il en soit, le groupe de maladies dans lequel les patients atteints du SFC sont classés dans le cadre des statistiques visées ne change ni le point de vue adopté par ma cellule stratégique et l’INAMI à propos des patients atteints du SFC, ni la possibilité que ceux-ci ont de bénéficier d’une indemnité en raison de leur incapacité de travail. Cela se vérifie dans le fait que des patients atteints du SFC sont repris dans les statistiques des patients qui perçoivent une indemnité d’invalidité. La réglementation y afférente précise que l’incapacité de travail n’est pas évaluée sur base de la maladie dont souffre le patient, mais sur base de sa capacité fonctionnelle.