SÉNAT DE BELGIQUE
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Session 2012-2013
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20 mars 2013
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SÉNAT Question écrite n° 5-8560

de Guido De Padt (Open Vld)

au secrétaire d'État à la Lutte contre la fraude sociale et fiscale, adjoint au premier ministre
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Fraude au niveau des sièges sociaux - Adresses fictives de sociétés - Mesures - Poursuites - Radiations - Banque-Carrefour des Entreprises - Moniteur belge
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Banque-Carrefour des Entreprises
fraude
poursuite judiciaire
statistique officielle
huissier
siège social
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20/3/2013Envoi question
11/7/2013Réponse
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SÉNAT Question écrite n° 5-8560 du 20 mars 2013 : (Question posée en néerlandais)

Il n'est pas rare de constater que le siège social de certaines entreprises est établi à l'adresse de particuliers qui ne se doutent de rien.

Les huissiers de justice et agents de quartier peuvent sans aucun doute jouer un rôle important dans la détection de ces (boîtes aux lettres) sociétés.

En outre, conformément à l'article 29 du Code d'instruction criminelle, toute autorité constituée, tout fonctionnaire ou officier public, qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquerra la connaissance d'un crime ou d'un délit, sera tenu d'en donner avis sur-le-champ au procureur du Roi près le tribunal dans le ressort duquel ce crime ou délit aura été commis ou dans lequel l'inculpé pourrait être trouvé, et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.

La problématique des adresses fictives de sociétés a été abordée le 13 juillet 2011 en commission de la Justice. Le secrétaire d'État (de l'époque) à la Lutte contre la fraude sociale et fiscale, adjoint au premier ministre et secrétaire d'État adjoint au ministre de la Justice de l'époque, s'est référé à ce sujet à une étude réalisée par le Collège pour la lutte contre la fraude fiscale et sociale relative aux éventuelles dispositions légales visant à prévenir l'abus d'adresses fictives.

Le Plan d'action 2012-2013 du Collège pour la lutte contre la fraude fiscale et sociale stipule : « En cas de constatation d’un “siège fictif” – par analogie à la radiation d’office existant déjà pour les personnes physiques – une radiation d’office des personnes morales avec siège “fictif” devrait être instaurée. Le SPF Économie a élaboré une procédure permettant à ses inspecteurs de procéder, après contrôle, à la radiation accélérée d’un siège dans la BCE. On devrait élargir cette mesure en procédant également, en cas de constatation d’un siège fictif d’une société, à la radiation du numéro d’entreprise ».

Selon la loi du 16 janvier 2003 portant création d'une Banque-Carrefour des Entreprises, modernisation du registre de commerce, création de guichets-entreprises agréés et portant diverses dispositions, tous les intéressés, tant les personnes physiques que les personnes morales, peuvent demander, auprès du service de gestion, la rectification de toute mention incorrecte dans une inscription ou dans une modification dans la Banque-Carrefour des Entreprises ainsi que la radiation des inscriptions ou modifications acceptées en violation de cette loi ou de ses arrêtés d'exécution.

La pratique montre que des sociétés dont le siège social est « supprimé » sont reprises dans la BCE alors que cette radiation n'a pas été publiée dans les Annexes du Moniteur belge.

Je souhaiterais par conséquent poser les questions suivantes au Secrétaire d'État à la Lutte contre la fraude sociale et fiscale :

1) Quel est le bilan des mesures relatives au « siège d'une entreprise » qui ont déjà été prises en vue de prévenir et/ou de combattre l'abus d'adresses fictives ?

2) A combien de radiations du siège social d'une société a-t-on déjà procédé ces trois dernières années via le service de gestion de la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE) et par le biais de quelles instances (police, huissiers de justice, parquet, ...) ? Le service de gestion a-t-il mis en œuvre la procédure en question ?

3) Parmi les radiations dont il est question ci-dessus, combien ont-elles été suivies d'une intervention du parquet ? Quelles démarches le parquet peut-il effectuer en la matière et quelles sont celles qui ont effectivement été effectuées ?

4) Comment la radiation du siège social d'une personne morale dans la BCE est-elle possible sans publication (automatique) de la modification ou de la radiation dans les Annexes du Moniteur belge ? Comment pourrait-on remédier à cette situation ?

5) Un huissier de justice est-il obligé de consulter la BCE en ce qui concerne la notification à une personne morale ?

Réponse reçue le 11 juillet 2013 :

1. L’avant-projet de loi portant insertion du Livre III « Liberté d’établissement, de prestation de service et obligations générales des entreprises », dans le Code de droit économique et portant insertion des définitions propres au Livre III et des dispositions d’application de la loi propres au Livre III, dans les Livres I et XV du Code de droit économique, introduit au parlement, comporte une série de modifications de lois en la matière.

Tous les services qui disposent d’un accès aux données de la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE) sont tenus, dès qu’ils constatent une donnée incorrecte ou manquante dans la BCE, d’en informer le service de gestion de celle-ci. Si l’entreprise ne remplit pas les formalités nécessaires en vue de la rectification au cours du délai imparti, le service de gestion de la BCE procédera à la radiation d’office des données erronées. Cette radiation sera opérée sur la base d’un jugement, d’un rapport d’enquête ou d’une procès-verbal dressé par un membre de la police locale ou fédérale ou par un fonctionnaire mandaté ; qui constate l’inexactitude de la donnée.

Cela permettra de détecter plus rapidement les adresses fictives et de les radier dans la BCE. A travers la partie « public search » de la BCE, quiconque pourra prendre connaissance du statut éventuellement radié des coordonnées d’une entreprise. Cet élément peut également être pris en compte dans le cadre des projets « datamining » en cours auprès des différents services de contrôle et d’inspection.

2. Pour la période de janvier 2010 à mars 2013, 4 837 adresses de sièges sociaux ont été radiées dans la BCE.

Plaintes reçues par le service Radiation de la BCE :

  • 2011 : 1 436 plaintes

  • 2012 : 2 152 plaintes

  • 2013 (situation au 22 mars) : 606 plaintes

Nombre par catégorie de plaignant: 264 (services de police), 131 (particuliers), 83 (Parquet), 71 (DGCM), 49 (autres) et 8 (centres d’affaires).

3. Le parquet peut poursuivre au pénal les administrateurs de droit et de fait des sociétés en question du chef de faux en écriture, punissable d’une peine de cinq à dix ans, en application des articles 196 et suivants du Code pénal, ainsi que du chef d’insolvabilité frauduleuse, punissable d’une peine d’emprisonnement de un mois à deux ans et/ou d’une amende de 100 à 500.000 euros, en application de l’article 490bis, §1er du Code pénal.

La banque de données statistiques du Collège des procureurs généraux ne contient cependant pas de de données permettant de sélectionner les affaires relatives à des adresses fictives de sociétés, ou en fonction de la radiation d’office de leur siège social dans la Banque-Carrefour des Entreprises (BCE), pas plus que des données permettant de constater les démarches entreprises par le parquet en la matière.

4. Chaque citoyen peut, via le site internet Public Search de la BCE (http://kbopub.economie.fgov.be/kbopub/zoekwoordenform.html?lang=fr), consulter gratuitement les données publiques des entreprises actives. La radiation d’adresses est également visible grâce à cette application.

Des contacts ont eu lieu entre le Service de gestion de la BCE et la Chambre Nationale des Huissiers de Justice (CNHB) afin d’informer les huissiers de justice de l’existence de la procédure de radiation et de la possibilité de consulter les données de la BCE. De son côté, la CNHB a communiqué avec ses membres par circulaire 2012CIR044 quant à la problématique des adresses fictives et à la procédure de radiation de la BCE.