3-114

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 2 JUNI 2005 - OCHTENDVERGADERING

(Vervolg)

Vraag om uitleg van de heer Christian Brotcorne aan de vice-eerste minister en minister van Justitie over «de inwerkingtreding van de wet van 14 juni 2004 betreffende de onvatbaarheid voor beslag en de onoverdraagbaarheid van de bedragen waarvan sprake is in de artikelen 1409, 1409bis en 1410 van het Gerechtelijk Wetboek» (nr. 3-855)

De voorzitter. - De heer Christian Dupont, minister van Ambtenarenzaken, Maatschappelijke Integratie, Grootstedenbeleid en Gelijke Kansen, antwoordt namens mevrouw Laurette Onkelinx, vice-eerste minister en minister van Justitie.

M. Christian Brotcorne (CDH). - Les articles 1409 à 1412bis du Code judiciaire excluent, partiellement ou totalement, certains revenus du champ de l'exécution forcée. Il s'agit, notamment, des revenus perçus en exécution d'un contrat de travail, de revenus de remplacement, de certaines pensions alimentaires et des prestations sociales telles que les allocations familiales ou les allocations au profit des handicapés.

La protection offerte par le Code judiciaire est efficace lorsqu'on tente de saisir des revenus auprès de l'employeur ou du débiteur, mais elle disparaît dès que les montants en cause sont versés sur un compte bancaire. En effet, par l'effet de la novation, la rémunération du travailleur ou le revenu de remplacement changent alors de nature et peuvent être saisis. Par ailleurs, une fois versées sur un compte, les sommes protégées ne sont plus déterminables, car elles se confondent avec les revenus non protégés.

Ainsi, un créancier ne peut saisir qu'une partie du salaire de son débiteur en cas de versement de la main à la main par l'employeur, mais il peut saisir l'entièreté du montant s'il attend que la rémunération soit versée sur le compte bancaire du débiteur.

Afin de remédier à cette situation, la loi du 14 juin 2004 a étendu les règles d'insaisissabilité et d'incessibilité des sommes protégées par le Code judiciaire lorsque ces sommes sont versées sur un compte bancaire.

En vertu de l'article 5 de la loi du 14 juin 2004, l'entrée en vigueur de celle-ci est prévue à une date fixée par le Roi et, au plus tard, le premier jour du douzième mois suivant le mois au cours duquel elle aura été publiée au Moniteur belge.

Je souhaiterais savoir si une date a déjà été fixée par le Roi. Si oui, laquelle ? Si non, quels sont les obstacles à la fixation de cette date ? Nous voudrions en effet donner une efficacité réelle à cette législation et protéger les débiteurs en cas de dépôt bancaire.

Les difficultés sont-elles d'ordre technique ? Ont-elle un rapport avec les problèmes inhérents à la mise en oeuvre d'un système informatique performant et accepté par les systèmes informatiques des acteurs concernés, donc notamment du monde bancaire ?

Bref, où en est-on ?

M. Christian Dupont, ministre de la Fonction publique, de l'Intégration sociale, de la Politique des grandes villes et de l'Égalité des chances. - Aucune date d'entrée en vigueur n'a encore été fixée par le Roi.

En effet, si sur le plan informatique, un type de code a pu être établi en concertation avec l'Association belge des banques, la loi pose de nombreux problèmes d'application pratique.

Lors de l'élaboration de l'avant-projet d'arrêté royal et après consultation de plusieurs institutions et acteurs concernés, divers problèmes d'ordre technique et juridique sont apparus, à tel point qu'il est actuellement impossible de donner à la loi une exécution efficace.

Elle générerait au contraire une réelle insécurité juridique, outre le fait qu'elle priverait, dans certaines hypothèses, les bénéficiaires de la loi de la protection qu'elle a pour but de leur octroyer.

Or, il est essentiel de s'assurer que les mesures techniques, qui seront traduites dans un arrêté d'exécution, pourront être appliquées sans difficultés par les personnes concrètement visées par celles-ci. Ce sont en effet elles qui, en définitive, garantiront le succès et l'effectivité de la loi et, partant, une protection maximale des bénéficiaires des revenus protégés.

Il s'agit, notamment, des secrétariats sociaux, des syndicats, d'institutions de sécurité sociale, d'administrations, qu'elles soient fédérales, communautaires ou régionales, mais aussi provinciales ou communales. De nombreux employeurs devront également appliquer eux-mêmes cette réglementation, sans l'intervention d'un secrétariat social.

Il est par ailleurs nécessaire de laisser aux personnes concernées le temps d'adapter leurs modes de fonctionnement, et en particulier leurs programmes informatiques, pour leur permettre de faire face à la réforme.

Dès lors, il est prévu de postposer l'entrée en vigueur de la loi, par le biais d'une loi portant des dispositions diverses urgentes qui sera soumise au parlement dans les prochains jours.

Afin d'assurer la sécurité juridique, il est prévu de faire entrer en vigueur la modification en projet à la date du 1er juillet 2005, date à laquelle la loi entrerait en vigueur, conformément à son article 5 dans sa rédaction actuelle.

Dans l'intervalle, afin de permettre de trouver une solution à ces problèmes, qui ne remettent pas en cause les principes fondamentaux contenus dans la loi, le Conseil national du travail sera consulté. De par sa composition, il semble en effet l'organe le mieux à même de proposer des solutions aux difficultés techniques actuelles.

Sur la base des réponses que fournira le Conseil national du travail, la loi sera éventuellement adaptée ; les mesures d'exécution pourront alors être prises afin de concrétiser pleinement la volonté du législateur.

M. Christian Brotcorne (CDH). - Cette réponse est étonnante, voire inquiétante. Voilà donc un texte législatif, voté par le parlement il y a pratiquement un an, et à propos duquel on nous dit que la mise en oeuvre est techniquement impossible, malgré l'objectif social évident.

À plusieurs reprises, j'ai souligné en commission et dans cet hémicycle que nous avions trop souvent tendance à confier des pouvoirs au roi et à ne pas aller jusqu'au bout de nos possibilités de législateur. La preuve est encore faite aujourd'hui. La réponse de Mme Onkelinx m'inquiète, car elle ne prévoit pas d'autre solution que de postposer la loi, voire de la modifier, alors qu'elle n'est pas encore entrée en vigueur.

C'est assez dramatique, surtout pour les victimes de cette technique. En effet, la rémunération est protégée mais cesse de l'être dès qu'elle arrive sur un compte bancaire. La tendance va de plus en plus vers une exécution sur le compte bancaire, ce qui contraint les personnes concernées à demander le paiement de leurs rémunérations en espèces, avec toutes les problèmes que cela entraîne puisque l'on développe de plus en plus les systèmes informatiques de paiement, à l'aide de cartes, etc.

Je ne peux qu'engager Mme la ministre à « mettre le turbo » pour trouver une solution, même si je comprends que l'exercice n'est pas aisé sur le plan technique.

M. Christian Dupont, ministre de la Fonction publique, de l'Intégration sociale, de la Politique des grandes villes et de l'Égalité des chances. - Nous partageons tous le souhait de M. Brotcorne de voir cette législation entrer en vigueur dans les meilleurs délais, et de résoudre les difficultés techniques existantes.