5-2476/3

5-2476/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2013-2014

12 FÉVRIER 2014


Proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances et le Code judiciaire, en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires

Proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances

Proposition de loi modifiant diverses dispositions de la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances et modifiant le Code judiciaire en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires

Proposition de loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances, relative à la création d'un Registre national des décisions judiciaires

Proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES ET DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES PAR

MME ARENA


I. INTRODUCTION

Le Service des créances alimentaires (ci-après SECAL) a été institué par la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances, dans le but de remédier au problème des créances alimentaires impayées et de favoriser l'exécution des décisions judiciaires.

En ce qui concerne la pension alimentaire due aux enfants, le SECAL octroie des avances au créancier d'aliments lorsque le débiteur d'aliments s'est soustrait à l'obligation de paiement en tout ou en partie, pour deux termes consécutifs ou non, au cours des douze mois qui précèdent la demande. Le montant de chacune des avances est égal à celui de la pension alimentaire indexé, avec un maximum de 175 euros par mois et par créancier d'aliments.

L'obligation alimentaire doit avoir été fixée dans une décision judiciaire exécutoire ou un acte authentique. Le SECAL octroie son intervention si le créancier d'aliments est domicilié en Belgique.

En outre, il est précisé que le créancier d'aliments ne peut avoir droit à une avance que si ses ressources mensuelles ne sont pas supérieures au montant visé à l'article 1409, § 1er, alinéa 1er, du Code judiciaire, en ce qui concerne les plafonds en matière de saisie sur salaire. Le plafond de ressources est lié à l'article 1409, § 1er, alinéa 1er, du Code judiciaire qui fixe les limites de saisissabilité du salaire. Ce plafond est donc fixé à 1300 euros, majoré d'un montant par enfant à charge.

Lorsqu'un créancier d'aliments fait appel au SECAL, ce dernier agit pour le compte et au nom du créancier d'aliments. Lorsque ce service a payé des avances sur pensions alimentaires, il est subrogé de plein droit au créancier d'aliments, à concurrence du montant des avances, pour la perception et le recouvrement de la créance alimentaire.

Une commission d'évaluation SECAL, qui publie tous les ans un rapport d'évaluation, a été instituée au sein du service public fédéral (SPF) Finances, conformément à l'article 29 de la loi du 21 février 2003. Ces rapports ont établi qu'une correction de la loi s'imposait.

L'accord de gouvernement fédéral du 1er décembre 2011 énonce ce qui suit: « Pour venir en aide aux familles confrontées à la défaillance du débiteur d'aliments, le gouvernement entend améliorer l'action du Fonds de créances alimentaires (SECAL), notamment en optimisant les récupérations des avances auprès du parent débiteur et en informant encore mieux la population sur les services proposés par le SECAL. »

Différents parlementaires estimaient qu'une modification législative était nécessaire. Aussi différentes propositions de loi ont-elles été déposées tant à la Chambre des représentants qu'au Sénat.

Au Sénat, les propositions de loi en question étaient les suivantes:

A. proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances (de M. Bert Anciaux et consorts), nº 5-1359/1;

B. proposition de loi modifiant diverses dispositions de la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances et modifiant le Code judiciaire en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires (de Mme Cindy Franssen et consorts), nº 5-1439/1;

C. proposition de loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances, relative à la création d'un Registre national des décisions judiciaires (de Mmes Zakia Khattabi et Mieke Vogels); nº 5-1515/1,

D. proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances (de Mmes Zakia Khattabi et Mieke Vogels), nº 5-1556/1.

Après une première discussion en commission le 26 février 2013, il a été décidé d'examiner conjointement les propositions de loi et d'organiser une audition:

— du professeur Jozef Pacolet et de M. Frederic Dewispelaere, HIVA-KULeuven à propos de leur projet de recherche pour le compte du SPF Finances « L'impact budgétaire de l'octroi d'avances par le Service des créances alimentaires SECAL »;

— de M. Tom Boelaert, administrateur de recouvrement non fiscal auprès du SECAL, SPF Finances;

— de Mme Geneviève Pihard, Commission d'évaluation SECAL;

— de Mme Christine Dekoninck, secrétaire générale du département des CPAS, AVCB-VSGB;

— de Mme Marie-Thérèse Coenen, représentante de la Plate-forme créances alimentaires.

Ces auditions ont eu lieu le 27 mars 2013. Leur compte rendu figure dans la partie III du présent rapport.

Après ces auditions, une période de réflexion a été prévue et a conduit au dépôt de la proposition de loi « modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances et le Code judiciaire, en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires » (de Mme Cindy Franssen et M. Bert Anciaux), nº 5-2476/1.

La proposition de loi nº 5-2476/1 a été jointe à la discussion des propositions de loi susmentionnées et la commission a décidé, le 5 février 2014, de poursuivre la discussion sur la base de cette proposition de consensus.

La représentante du ministre des Finances, chargé de la Fonction publique, a, lors de cette réunion, promis le soutien du ministre à la proposition de loi nº 5-2476/1.

Lors de la réunion du 12 février 2014, la discussion a été clôturée et la proposition de loi nº 5-2476 a été adoptée.

La retranscription des discussions des 5 et 12 février 2014 fait l'objet de la partie IV. du présent rapport.

II. EXPOSÉS INTRODUCTIFS

A. Proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances (de M. Bert Anciaux et consorts), nº 5-1359/1

Les rapports annuels du Service des créances alimentaires montrent qu'un certain nombre de problèmes se posent et qu'il faut leur apporter une solution. La proposition de loi vise:

1° à relever le plafond de revenus, actuellement très bas, pour pouvoir prétendre à une avance sur la pension alimentaire pour un enfant. Le plafond de revenus dans le chef du parent non débiteur d'aliments a été fixé, pour 2011, au montant net de 1 300 euros par mois, augmenté de 62 euros net par enfant à charge. La proposition de loi prévoit de porter à 1 800 euros le plafond de revenus pour pouvoir recourir au système d'avances du SECAL et ce, quel que soit le nombre d'enfants à charge. Ce montant a été fixé sur la base d'études réalisées par le « Centrum voor Sociaal Beleid » de l'Université d'Anvers: voir les développements de la proposition de loi, doc. Sénat, nº 5-1359/1, p. 2;

2° à mettre un terme au système qui oblige le créancier d'aliments à céder 5 % du montant auquel il/elle a droit au profit du SECAL. En effet, le créancier d'aliments est, en l'occurrence, la partie la plus faible, et la faute incombe entièrement à la partie adverse qui refuse d'exécuter une décision judiciaire. Il n'est pas logique, de surcroît, que, lorsque le créancier d'aliments passe malgré tout par un huissier plutôt que par le SECAL, l'huissier facture tous les frais au débiteur d'aliments, contrairement au SECAL.

L'auteur principal de la proposition de loi à l'examen est conscient de l'impact budgétaire que celle-ci risque d'avoir. À cet égard, l'intervenant renvoie à l'étude que le professeur Pacolet et M. De Wispelaere (HIVA-KULeuven, « L'impact budgétaire de l'octroi d'avances par le Service des créances alimentaires SECAL ») ont consacrée récemment à cette problématique: si l'on portait le plafond de revenus à 1 800 euros, cela impliquerait pour l'année 2012 qu'il faudrait venir en aide à 71 % des familles confrontées à des défauts de paiement, ce qui provoquerait une hausse de 40 % du budget nécessaire pour le versement des avances. Il passerait ainsi de 20 à 28 millions d'euros. L'intervenant est toutefois convaincu que le fait de venir en aide aux familles les plus vulnérables, à savoir les personnes isolées avec enfants, justifie cette majoration — relativement limitée — du budget. L'intervenant déclare qu'il adhère à l'idée formulée dans la proposition de loi nº 5-1439/1 de Mme Franssen et consorts, qui prévoit de mettre à la disposition du SECAL des outils juridiques supplémentaires en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires.

B. Proposition de loi modifiant diverses dispositions de la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances et modifiant le Code judiciaire en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires (de Mme Cindy Franssen et consorts), nº 5-1439/1

Les créances alimentaires occupent une place particulière dans notre société.

L'égalité des créanciers constitue un des principes de base du règlement collectif de dettes. Toutefois, les dettes alimentaires diffèrent fondamentalement des autres créances, ce qui justifie une distinction entre ces catégories de dettes. Appliquer des règles identiques à une situation différente est tout aussi injuste et discriminatoire que d'appliquer des règles différentes à une situation identique.

Dans le cas du créancier d'aliments — sauf dans l'hypothèse d'une pension alimentaire conventionnelle — le tribunal lui a octroyé préalablement une pension alimentaire parce qu'il a estimé, sur la base de données objectives, que ce dernier se trouvait dans un état de besoin. Le créancier d'aliments dépend principalement de la pension alimentaire pour assurer sa subsistance, ce qui le distingue d'autres créanciers tels qu'un opérateur téléphonique, une société de crédit, un bailleur, le fisc, etc. La situation financière de ces derniers est plus confortable que celle du créancier d'aliments, dont les finances sont davantage mises à mal par le défaut de paiement. Dans de nombreux cas, le créancier d'aliments devra même recourir à l'aide sociale pour pouvoir garder la tête hors de l'eau financièrement.

Les dettes alimentaires se distinguent des autres dettes en ce qu'elles sont étroitement liées à la solidarité familiale. La famille et le ménage sont les pierres angulaires de notre société et constituent un modèle de vie commune qui n'est certainement pas dépassé en 2012. Il s'impose néanmoins de redonner souffle à ces valeurs et à ces normes familiales. Dans une société qui évolue toujours plus vite, les individus ont plus que jamais besoin de la sécurité et de la stabilité que la famille est en mesure de leur offrir. Mais si la solidarité familiale implique des droits, elle implique aussi des devoirs familiaux qu'il faut respecter. La pension alimentaire, qui est une forme de solidarité familiale, figure au nombre de ces devoirs. En l'espèce, il incombe au législateur d'indiquer clairement que le non-respect de cette obligation familiale est inacceptable pour la société. Le législateur a toujours accordé une grande importance au paiement des pensions alimentaires, au point de qualifier le non-paiement d'infraction pénale. Il s'agit donc d'une obligation qui touche à l'ordre public.

En outre, en ratifiant la Convention relative aux droits de l'enfant, la Belgique s'est formellement engagée, en tant qu'État contractant, à prendre toutes les mesures appropriées afin de garantir le recouvrement de la pension alimentaire de l'enfant auprès de ses parents ou des autres personnes qui en sont financièrement responsables, tant sur son territoire qu'à l'étranger. L'auteure estime que le recouvrement au profit de l'enfant n'est pas suffisamment garanti en cas de règlement collectif de dettes, d'autant plus que le juge a la possibilité de remettre les arriérés de dettes alimentaires.

La pratique actuelle, qui consiste à traiter les dettes alimentaires comme des dettes chirographaires ordinaires, est également en contradiction avec la ratio legis des règles prévues à l'article 1412 du Code judiciaire en matière de saisie sur salaire et de créance alimentaire. Cet article prévoit que les limitations en matière de saisie ne sont pas applicables lorsque la saisie est opérée en raison d'obligations alimentaires. En effet, la totalité du revenu est saisissable ou susceptible de délégation lorsqu'il s'agit d'une créance alimentaire. Or, le règlement collectif de dettes vide pour ainsi dire ces règles de leur substance, les voies d'exécution individuelles étant en effet suspendues. Il n'est pas logique de prévoir que le revenu du débiteur d'aliments soit intégralement saisissable et que cette règle ne soit plus applicable dans le cadre d'un règlement collectif de dettes. L'exclusion totale des dettes alimentaires du règlement collectif de dettes serait sans doute une mesure excessive et pourrait avoir pour effet de réduire les chances de réussite dudit règlement. En revanche, l'introduction, dans la loi hypothécaire, d'un privilège général sur les biens meubles permettrait de répondre non seulement à la nécessité de conférer une place particulière aux dettes alimentaires en cas d'insolvabilité financière (tant en cas de faillite que dans le cadre d'un règlement collectif de dettes) mais aussi à l'intérêt légitime de la société de maintenir les chances de réussite d'un règlement collectif de dettes.

Du point de vue rationnel, le droit de l'enfant à une pension alimentaire doit être dissocié du droit du père/ de la mère d'entretenir des contacts avec lui, mais, sur le plan émotionnel, ces droits sont souvent liés. Il va de soi que les situations dans lesquelles l'un des partenaires empêche l'autre de voir les enfants, soit pour faire pression sur lui dans le but d'obtenir une pension alimentaire plus élevée ou d'autres concessions financières, soit pour se venger de lui, sont inacceptables. Les auteurs de la présente proposition de loi condamnent donc avec la plus grande fermeté les agissements de certains partenaires qui privent l'autre de voir les enfants, sauf s'il y a un motif légitime de le faire, comme celui de garantir la sécurité de ceux-ci.

Pour les motifs précités, il est nécessaire:

1. de faire en sorte que le plafond des ressources nettes à ne pas dépasser pour avoir droit à l'intervention du SECAL soit porté à un niveau plus réaliste, afin de supprimer le piège à l'emploi injustifié auxquels sont actuellement confrontés les parents isolés qui exercent une activité professionnelle;

2. de veiller à ce que les créanciers alimentaires ne soient pas abandonnés à leur sort en cas de règlement collectif de dettes. Le juge ne pourra plus non plus — tout comme c'est le cas dans le droit des faillites lorsque le tribunal prononce l'excusabilité du failli — remettre les arriérés de pensions alimentaires dans le cadre d'un plan de règlement judiciaire ou d'une remise de dettes totale. Il est inséré dans la loi hypothécaire un privilège général sur les biens meubles pour ce qui concerne les dettes alimentaires. Ce privilège occupe un rang favorable pour le créancier d'aliments et se limite à 5 000 euros afin de ne pas hypothéquer excessivement les chances de réussite d'un plan de règlement amiable;

3. de rendre les perceptions effectuées par le SECAL plus efficaces afin d'améliorer la viabilité financière de celui-ci et de responsabiliser les débiteurs d'aliments. Les recommandations formulées dans le rapport annuel de la commission d'évaluation peuvent servir de base de réflexion à cet égard.

C. Proposition de loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances, relative à la création d'un Registre national des décisions judiciaires (de Mmes Zakia Khattabi et Mieke Vogels), nº 5-1515/1

Cette proposition de loi complète la proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances (de Mme Muriel Gerkens et consorts, nº 53-491/1), qui a été déposée à la Chambre des représentants et qui concerne les plafonds de revenus des créanciers d'aliments.

La proposition de loi nº 5-1515/1 modifie le Code d'instruction criminelle et la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances, dans le but d'améliorer ce service pour les citoyens qui en ont le plus besoin. Cette proposition de loi a pour objectif la création d'un registre national des décisions judiciaires et des actes authentiques en matière de pensions alimentaires.

Un tel registre est nécessaire pour simplifier le travail administratif du SECAL et pour uniformiser les méthodes de travail lors de la constitution et du suivi des dossiers traités par le SECAL. Dans son rapport annuel 2010, la commission d'évaluation du SECAL recommande d'ailleurs la création d'un tel registre.

D. Proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances (de Mmes Zakia Khattabi et Mieke Vogels), nº 5-1556/1

Cette proposition de loi a pour but de supprimer le plafond de revenus, prévu à l'article 4, § 1er, de la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances, afin de permettre l'accès aux avances pour toute personne à qui un jugement a accordé le droit à une pension alimentaire destinée à l'éducation des enfants, tel que le prévoyait initialement la loi du 21 février 2003.

E. Proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances et le Code judiciaire, en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires (de Mme Cindy Franssen et M. Bert Anciaux), nº 5-2476/1

Une proposition de consensus a été préparée sur la base des réactions et des observations de fond formulées au cours de l'audition organisée par la commission. Elle reprend les éléments de base des propositions déposées précédemment.

La proposition de consensus a été signée par tous les partis de la majorité. Elle vise, d'une part, à rendre le fonctionnement du SECAL plus efficace, ce qui permettra de recouvrer davantage de moyens et d'améliorer son financement, et, d'autre part, à étendre le champ d'application du SECAL afin qu'un plus grand nombre de personnes puissent y faire appel.

La nouvelle proposition prévoit en outre les modifications suivantes:

1. la majoration de la contribution du débiteur d'aliments est calculée exactement et est fixée à 13 % au lieu des 10 % actuels. L'étude de HIVA-KULeuven a servi de base pour calculer exactement de combien il faut augmenter la contribution du débiteur d'aliments afin de pouvoir supprimer la contribution de 5 % du créancier d'aliment;

2. le demandeur ne doit plus joindre un avertissement-extrait de rôle de l'impôt sur le revenu. En tant que service du SPF Finances, le SECAL a la possibilité de demander lui-même les informations concernant l'avertissement-extrait de rôle. C'est pourquoi l'obligation de joindre l'avertissement-extrait de rôle le plus récent à la demande est supprimée, ce qui constitue une simplification administrative évidente;

3. le SECAL peut récupérer les sommes payées indûment, à concurrence de 10 % de chaque paiement ultérieur qui sera effectué en faveur du créancier d'aliments, ou à concurrence de 100 % si le créancier d'aliments les a obtenues à la suite d'une déclaration ou d'un acte frauduleux. Cela générera une recette supplémentaire limitée pour le SECAL;

4. le privilège sur les biens meubles prévu dans la loi hypothécaire en ce qui concerne les dettes alimentaires a été porté à 15 000 euros. Ce privilège est censé augmenter les chances de recouvrement tant pour le créancier d'aliments que pour le SECAL lorsqu'une situation de concours se présente entre créanciers. Il est ressorti de l'audition que la dette alimentaire moyenne s'élève à 15 000 euros, ce qui explique la majoration en question;

5. une majoration supplémentaire est accordée pour un enfant handicapé à charge en ce qui concerne le plafond de revenus d'application pour le recours au SECAL. Il est apparu au cours de l'audition que l'on ne tient actuellement pas compte de la charge financière que représente un enfant handicapé. La commission d'évaluation du SECAL a reconnu que de nombreuses plaintes sont déposées en la matière;

6. diverses petites adaptations visant à favoriser le recouvrement par le SECAL et quelques adaptations légistiques;

7. une mise en œuvre réaliste est prévue de manière à ce que le SECAL puisse prendre les mesures préparatoires nécessaires.

III. COMPTE RENDU DE L'AUDITION DU 27 MARS 2013

Audition:

1. du professeur J. Pacolet et de M. Frederic De Wispelaere, HIVA-KULeuven;

2. de M. Tom Boelaert, administrateur Recouvrement non fiscal du service SECAL, SPF Finances;

3. de Mme Geneviève Pihard, commission d'Évaluation SECAL;

4. de Mme Christine Dekoninck, secrétaire du département des CPAS, AVCB-VSGB;

5. de Mme Marie-Thérèse Coenen, représentante de la Plate-forme créances alimentaires.

A. EXPOSÉS INTRODUCTIFS

1. Exposé introductif du professeur J. Pacolet et de M. Frederic De Wispelaere, HIVA-KULeuven — voir ppt en annexe

M. Pacolet explique que le SPF Finances a demandé à l'HIVA de réaliser une étude sur l'impact budgétaire de l'octroi des avances par le Fonds de créances alimentaires (SECAL).

La mission d'étude consistait à élaborer une feuille de calcul permettant de chiffrer l'impact budgétaire des éventuelles modifications de la législation comme l'élargissement du groupe cible, le relèvement du plafond de revenus et du montant. Il s'agissait aussi d'évaluer les possibilités de récupération auprès du débiteur d'aliments.

En 2011, on disposait encore de très peu d'informations à ce sujet. Et l'intervenant de citer à l'appui l'extrait suivant: « La problématique des pensions alimentaires impayées est particulièrement peu explorée en Belgique. Les statistiques dans ce domaine sont lacunaires. Les dernières enquêtes partielles remontent aux années 80. Il est donc impossible de connaître ne fût-ce que le nombre de créances alimentaires impayées et le nombre de débiteurs ou de familles concernés. De même, toutes les données sur les profils des familles, les débiteurs, le montant des pensions impayées, la durée des arriérés, les délais de retard, les voies d'évitement, ..., ne sont pas connues » (Vassart, 2011, Fondation Roi Baudouin, p. 29). L'étude de l'HIVA devrait permettre de remédier pour une large part à ce manque d'informations.

Le groupe cible du SECAL se compose d'enfants issus de familles séparées, qui ont droit à une pension alimentaire avec arriérés. En 2010, le SECAL a octroyé des avances à 12 671 enfants dans ce groupe cible (voir présentation transparent nº 5, annexe). C'est dans ce groupe que les pouvoirs publics envisagent de procéder à des glissements afin de faire en sorte que davantage d'enfants puissent bénéficier des services du SECAL. Les chiffres généraux relatifs au SECAL figurent sur le transparent nº 6 de la présentation (voir annexe).

Pour la réalisation de cette étude, un grand nombre d'informations ont été puisées dans la banque de données du SECAL. Les chercheurs se sont basés sur dix mille dossiers « ouverts » et ont réalisé une radioscopie en septembre 2011. Les dossiers clôturés n'ont pas été pris en compte. Cette procédure a permis de rassembler des informations sur le débiteur d'aliments et sur le créancier d'aliments. Mais il subsiste des lacunes en termes de données. Ainsi, le revenu du débiteur d'aliments et celui du demandeur pour lequel seule une procédure de recouvrement est ouverte n'est pas connu. En outre, le revenu du demandeur est enregistré simplement sur la base du formulaire de demande, mais pas sur la base du revenu actuel réel vérifié à la lumière d'informations administratives. Cette donnée est certes contrôlée tous les six mois, mais l'une des recommandations de l'étude est quand même de la conserver dans la banque de données intégrée de manière qu'elle puisse être utilisée pour des simulations de besoins budgétaires.

Les dossiers peuvent être classés en trois catégories: il y a les dossiers ouverts qui donnent lieu actuellement au versement d'une avance, les dossiers ouverts qui ne donnent plus lieu au versement d'une avance et les dossiers ouverts qui n'ont jamais donné lieu au versement d'une avance mais qui concernent exclusivement une procédure de recouvrement. Les chiffres précis pour chaque groupe figurent sur le transparent nº 9 de la présentation (voir annexe). Pour ce qui est des arriérés, ces dossiers représentent un montant total cumulé de 209 925 306 euros, avec un montant moyen de 15 720 euros par dossier.

Le transparent nº 10 de la présentation montre la situation en septembre 2011 en ce qui concerne la perte de revenus par défaut de paiement dans les dossiers en cours donnant lieu à l'octroi d'avances (voir annexe). Il est à noter que dans la plupart des cas, les familles concernées comptent un ou deux enfants. Ce graphique montre aussi le pourcentage que l'avance du SECAL représente par rapport au revenu global des familles concernées; on note ainsi un pourcentage moyen de 15,9 % pour des familles comptant un seul enfant et un pourcentage de 24,3 % pour les familles avec deux enfants, soit des pourcentages relativement élevés, qui montrent qu'on est ici en présence de familles à bas revenus.

Le transparent nº 11 de la présentation (annexe) montre le profil de base du demandeur et celui du débiteur d'aliments. Les demandeurs sont le plus souvent des femmes de quarante ans en moyenne et les débiteurs d'aliments sont généralement des hommes qui ont deux ans de plus en moyenne. Quelque 10 % des débiteurs d'aliments résident à l'étranger.

Le profil de revenus (voir transparent nº 12 de la présentation — annexe) montre qu'en dépit de l'existence d'un plafond de revenus de 1 370 euros, la majorité des demandeurs sont issus du groupe dont les revenus se situent entre 500 et 999 euros par mois et du groupe dont les revenus oscillent entre 1 000 et 1 300 euros par mois.

L'áge des enfants créanciers d'aliments se situe entre huit et vingt ans en moyenne (voir transparent nº 13 de la présentation — annexe).

M. De Wispelaere explique que l'on a utilisé l'enquête SILC. C'est une enquête sur les revenus et les conditions de vie, qui donne une bonne idée de la situation générale en Belgique en matière de revenus, de précarité et de pauvreté. Cette enquête importante est réalisée chaque année en Belgique auprès de quelque six mille ménages. L'avantage de cette enquête est qu'elle repose sur des questions concrètes: « Recevez-vous une pension alimentaire ? », « Combien devez-vous payer ? », « Combien devez-vous recevoir ? », « Quel montant payez-vous ou recevez-vous effectivement ? ». Signalons aussi qu'une question spécifique était posée aux répondants dans le but de savoir si ceux-ci font appel aux services du SECAL.

On a utilisé les données de l'enquête SILC afin de se faire une idée du nombre de créanciers d'aliments. Il est apparu que 4,6 % des ménages belges reçoivent une pension alimentaire. Il existe toutefois des différences substantielles entre les différents groupes de ménages, et les chercheurs ont fait le choix de cibler l'enquête sur les familles monoparentales et les couples avec enfants. À l'examen, il apparaît que 46 % des créanciers d'aliments sont des familles monoparentales (voir transparent nº 15 de la présentation — annexe).

On a pu aussi déterminer aisément le pourcentage de familles bénéficiaires d'une pension alimentaire confrontées à un défaut de paiement en comparant les réponses à des questions relatives aux montants qui devraient normalement être perçus et aux montants qui sont effectivement reçus. Il convient toutefois de signaler qu'il n'a pas été tenu compte de la définition que le SECAL donne du défaut de paiement, à savoir une absence de paiement pendant deux termes au cours des douze derniers mois. La conclusion est qu'environ un ménage avec enfants bénéficiaires d'une pension alimentaire sur huit est confronté à un défaut de paiement (voir transparent nº 16 de la présentation — annexe).

Les résultats obtenus pour la population examinée ont été extrapolés à la population totale de manière à pouvoir procéder à une estimation des chiffres absolus (voir transparent nº 17 de la présentation — annexe).

Les chercheurs ont également déterminé le taux de couverture en fonction des revenus; le transparent nº 18 de la présentation (voir annexe) montre qu'il existe des écarts importants suivant le nombre d'enfants. Pour l'année 2009, on constate qu'environ 70 % des ménages comptant un seul enfant se situe en dessous des plafonds de revenus du SECAL et que ce pourcentage diminue à mesure que le nombre d'enfants à charge augmente. La comparaison entre les couples avec enfants et les familles monoparentales montre que le taux de couverture est plus élevé pour les familles monoparentales (voir transparent nº 19 de la présentation — annexe).

Il ressort de la comparaison entre les familles monoparentales avec enfants et les couples avec enfants que le taux de couverture est sensiblement plus élevé pour les familles monoparentales que pour les familles avec enfants. C'est un élément important étant donné que l'un des objectifs du SECAL est de lutter de manière effective contre la pauvreté.

En utilisant l'enquête EU-SILC, les chercheurs ont pu déterminer ce risque de pauvreté. Il s'est avéré que les familles monoparentales bénéficiaires d'une pension alimentaire présentent un risque de pauvreté de 23 % alors que celui-ci est de 43 % pour les familles monoparentales non bénéficiaires d'une pension alimentaire (voir transparent nº 20 de la présentation — annexe). On peut se demander à cet égard si le fait de ne pas être bénéficiaire d'une pension alimentaire ne représente pas un problème plus important que le non-paiement de la pension.

On constate une différence similaire pour les couples avec enfants (voir transparent nº 21 de la présentation — annexe).

Le tableau synthétique figurant sur le transparent nº 22 de la présentation en annexe montre que 16 % environ des ménages avec enfants bénéficiaires d'une pension alimentaire vivent sous le seuil de pauvreté; ce pourcentage s'élève à 15 % pour les ménages avec enfants non bénéficiaires d'une pension alimentaire.

16,4 % des ménages avec enfants confrontés à un défaut de paiement se situent sous le seuil de pauvreté (voir transparent nº 23 de la présentation en annexe). Le risque varie en fonction du nombre d'enfants à charge et il culmine pour les familles ayant un seul enfant à charge.

Le tableau suivant, qui figure sur le transparent nº 24 de la présentation en annexe, montre que toutes les personnes qui se situent sous le seuil de pauvreté peuvent prétendre aussi à une intervention du SECAL. Ce mécanisme d'intervention est bien plus qu'un simple régime d'assistance aux pauvres: on constate en effet que les personnes qui se situent au-dessus du seuil de pauvreté entrent elles aussi en considération pour une intervention du SECAL (43 %).

Les déclarations fiscales des intéressés ont également été examinées (voir transparent nº 25 — annexe). Dans la majorité des cas, les demandeurs sont des allocataires sociaux (50,2 %) et les débiteurs des salariés (51 %).

L'intervenant donne ensuite un aperçu des types de dossiers, ventilés sur la base du revenu imposable net, des déciles suivant toutes les déclarations, des demandeurs (cf. transparent nº 26 — annexe). Le profil diffère clairement selon que le demandeur a un dossier d'avances ouvert ou clôturé, ou qu'il n'en a aucun. Quiconque a un dossier d'avances ouvert ou clôturé doit en tout cas se trouver au-dessous du plafond de revenus fixé par le SECAL. Les personnes concernées se retrouvent de ce fait dans les tranches de revenus les plus basses. Ce n'est pas le cas des dossiers sans demande d'avances. De plus, les débiteurs se situent principalement dans les trois premiers déciles de revenus. Autrement dit, ils présentent un profil assez proche de celui des demandeurs, en l'occurrence caractérisé par de faibles revenus.

Le SECAL ne peut pas effectuer de recouvrements auprès de bénéficiaires du revenu d'intégration ou de personnes percevant un revenu inférieur au revenu d'intégration. Une simulation basée sur les déclarations fiscales montre que les revenus d'environ 37 % des débiteurs sont inférieurs au revenu d'intégration, ce qui empêche le SECAL d'effectuer des recouvrements auprès d'eux. Ils représentent en l'occurrence 43 % du montant total à recouvrer. Autrement dit, cela limite considérablement le SECAL dans ses possibilités de recouvrement (voir transparent nº 27 — annexe).

Une comparaison entre les bons débiteurs et ceux qui ont des dossiers ouverts laisse apparaître des profils différents: les bons débiteurs sont surtout des travailleurs salariés; les débiteurs en dossiers ouverts le sont aussi, mais dans une moindre mesure, puisqu'une forte proportion d'entre eux bénéficie d'allocations (voir transparent nº 28 — annexe).

Les données du transparent nº 29 (voir annexe) montrent aussi clairement que des différences apparaissent également selon le revenu disponible. Dans les dossiers ouverts, on constate un pic pour la catégorie de revenus de 500 à 999 euros par mois; la plupart des bons débiteurs disposent d'un revenu de 1 000 à 1 299 euros par mois.

Le professeur Pacolet poursuit la présentation et souligne que les données qui précèdent ont toutes été examinées pour donner au législateur une réponse à la question de savoir quelles seraient les implications d'un déplacement des plafonds de revenus.

Le groupe actuel créancier d'aliments (7 500 familles avec enfants) qui se situe au-dessous des plafonds de revenus fixés par le SECAL ne représente qu'une fraction du total approximatif de 200 000 ménages créanciers d'aliments, dont 180 000 familles avec enfants. En fin de compte, seuls 24 000 ménages créanciers d'aliments sont confrontés à des défauts de paiement. Parmi ceux-ci, un peu plus de 12 000 se situent au-dessous des plafonds de revenus fixés par le SECAL (cf. transparent nº 30 — annexe).

Quelles seraient les implications si l'on cherchait à faire en sorte que ce groupe d'environ 24 000 ménages confrontés à des défauts de paiement tombe également au-dessous des plafonds de revenus fixés par le SECAL ?

Le transparent nº 31 (annexe) donne un aperçu du degré de couverture estimé pour trois catégories: les familles demeurant sous le plafond SECAL actuel, les familles disposant de revenus compris entre le plafond SECAL et 1 800 euros, et les familles percevant des revenus supérieurs à 1 800 euros. Parmi les familles avec enfants qui sont confrontées à un défaut de paiement, près de 52 % demeurent sous le plafond SECAL actuel et environ 20 % se situent entre le plafond SECAL et 1 800 euros; autrement dit, en relevant le plafond du SECAL pour le porter à 1 800 euros, l'on pourrait atteindre 71 % des familles concernées.

Le transparent nº 32 (annexe) donne une estimation du recours à des avances du SECAL par des familles avec enfants confrontées à un défaut de paiement, en fonction du nombre d'enfants à charge. Ce tableau permet de conclure que seulement 12 936 des 18 758 enfants créanciers d'aliments perçoivent effectivement une avance. Cela représente une couverture de 69 %. Il s'agit d'un assez bon résultat. En tant qu'acteur extérieur, le professeur Pacolet a l'impression que la notoriété du SECAL évolue dans le bon sens.

Le professeur Pacolet fait ensuite un tour d'horizon schématique des propositions de loi qui ont été déposées (transparent nº 34 — annexe). Concernant la proposition de loi nº 5-1439/1 de Mme Franssen et consorts, l'intervenant plaide pour que son texte soit interprété de telle manière qu'une majoration par enfant à charge vienne s'ajouter au rehaussement du plafond de revenus à 1 800 euros. Pour le moment, cette majoration est de 62 euros par mois par enfant à charge. L'intervenant indique que l'étude du HIVA n'a pas examiné si ces 62 euros par mois par enfant sont effectivement un montant pertinent. Si l'on souhaite réaliser cet exercice, il convient d'y intégrer aussi d'autres données, comme les allocations familiales par exemple.

Le professeur Pacolet présente ensuite une simulation dans laquelle le montant forfaitaire actuel de 175 euros serait porté, par exemple, à 200 euros ou dans laquelle les plafonds seraient supprimés (cf. transparent nº 35 — annexe). La simulation montre qu'aujourd'hui 80,7 % des rentes alimentaires sont inférieures au plafond de 175 euros. Si on rehausse le plafond à 200 euros, on obtient 6,5 % de rentes alimentaires supplémentaires, et si on supprime les plafonds, on obtient encore 13 % de plus. L'impact budgétaire des augmentations est indiqué sur le transparent nº 35: le coût actuel par bénéficiaire est de 128 euros; il serait de 132 euros (= augmentation de 3,1 %) en cas de majoration à 200 euros par mois et de 140 euros (= augmentation de 9,4 %) si une augmentation non plafonnée était prévue.

Un autre point est celui de savoir si le plafond de revenus doit être rehaussé et, dans l'affirmative, à quelle hauteur. Il ressort du transparent nº 36 (annexe) que le groupe qui éprouve le plus de difficultés est celui des ménages avec enfants confrontés à un défaut de paiement et dont les revenus nets sont situés entre 1 000 et 1 362 euros par mois. Dans les groupes de revenus inférieurs, la couverture est quasiment parfaite.

Dans le tableau repris sur le transparent nº 37 (annexe) figure un aperçu des ménages et des enfants faisant partie de ceux-ci confrontés à un défaut de paiement, ainsi que le nombre de bénéficiaires éventuels en cas de modification du plafond SECAL, en fonction du nombre d'enfants à charge. Aujourd'hui, sur les quelque 23 000 enfants qui sont confrontés à un défaut de paiement, 7 500 bénéficient d'une avance payée par le SECAL.

Si le taux de couverture était de 100 %, étant entendu qu'il n'est pas tout à fait certain que les intéressés puissent effectivement faire valoir des droits, le nombre d'enfants qui entreraient en considération pour une avance SECAL passerait de 7 500 à 12 000, ce qui correspond à une augmentation de 65 %.

Si le plafond SECAL était rehaussé à 1 800 euros, le groupe-cible croîtrait de 57 %.

D'après le professeur Pacolet, le rehaussement du plafond de revenus fixé par le SECAL peut probablement avoir pour effet que l'on atteindra de cette manière un groupe-cible mieux informé qui trouvera plus rapidement le chemin du SECAL. Ce n'est toutefois pas sûr, puisque les intéressés peuvent tout aussi bien revendiquer leurs droits autrement (avocat, huissier de justice).

Concernant l'estimation de l'impact budgétaire en cas de modification des plafonds (cf. transparent nº 38 — annexe), le professeur Pacolet précise que le budget annuel actuel du SECAL s'élève à environ 19,9 millions d'euros. Si l'on atteignait une couverture de 100 % dans la limite des plafonds actuels du SECAL, son budget devrait être de 29,4 millions d'euros. Si l'on rehaussait le plafond du SECAL de 1 300 à 1 800 euros, son budget actuel devrait croître de 11 millions d'euros, ce qui porterait le budget annuel total du SECAL à 40,9 millions d'euros. Si l'on n'appliquait plus de plafond de revenus, le SECAL devrait disposer d'un budget annuel de 64,4 millions d'euros.

Des évaluations ont révélé que les possibilités de récupération sont limitées pour le SECAL (cf. transparent nº 39 — annexe). « On ne tond pas un œuf. » La situation financière du débiteur d'aliments ne diffère pratiquement pas de celle du créancier d'aliments. Plus d'un tiers des débiteurs d'aliments sont eux aussi dépendants d'un revenu d'intégration. On peut déduire du graphique sur le transparent nº 39 que plus les revenus des intéressés sont élevés, plus il est probable de récupérer entièrement les avances, ce qui pourrait signifier, en d'autres termes, que, si le plafond de revenus du SECAL était rehaussé à 1 800 euros, la situation financière de l'ex-partenaire du créancier d'aliments serait peut-être elle aussi meilleure, ce qui offre de meilleures perspectives pour la récupération des avances.

Le professeur Pacolet renvoie au transparent nº 40 (annexe) pour une conclusion résumant l'étude du HIVA.

2. Exposé introductif de M. Boelaert, administrateur recouvrement non fiscal — Service des créances alimentaires (SECAL)

Le Service des créances alimentaires (SECAL) est chargé de deux táches importantes.

La première est le recouvrement de pensions alimentaires pour des enfants et des (ex-)partenaires. Il s'agit aussi bien de pensions alimentaires en cours que d'arriérés éventuels.

Le recouvrement n'est possible qu'à partir du moment où deux conditions essentielles sont remplies:

— premièrement, il faut que le débiteur d'aliments n'ait pas payé ou n'ait payé que partiellement au cours des douze mois qui précèdent la demande;

— deuxièmement, le créancier d'aliments doit disposer d'un titre exécutoire. Cette condition est prévue parce qu'il y a parfois des problèmes à ce niveau.

La deuxième táche du SECAL consiste en l'octroi d'avances en faveur des enfants.

On note ici une distinction entre le recouvrement, qui est opéré en faveur des enfants et des (ex-)partenaires, et l'octroi d'avances, dont les seuls bénéficiaires sont les enfants. Le montant de l'avance équivaut au montant de la pension alimentaire, plafonné à un maximum de 175 euros par enfant et par mois. La principale condition à remplir par le créancier d'aliments pour pouvoir bénéficier d'une avance est de ne pas dépasser un certain plafond de revenus. Ses ressources personnelles mensuelles ne peuvent pas être supérieures à 1 373 euros + 65 euros par enfant à charge (montants en vigueur en 2013). Les enfants qui sont pris en compte comme étant à charge pour ce plafond ne doivent pas nécessairement être des enfants pour lesquels des avances sont demandées. Tel peut être le cas, par exemple, avec une famille recomposée dans laquelle le nouveau partenaire a lui aussi des enfants. Si l'on a également ces enfants à charge, ceux-ci sont pris en compte lors de la détermination du plafond de revenus.

Le SECAL fait partie du SPF Finances et non du SPF Économie et il est encore, pour le moment, un service de l'administration générale de la documentation patrimoniale, qui est quant à elle subdivisée en cinq administrations, dont l'administration du recouvrement non fiscal. Il y a donc une cellule SECAL dans vingt-sept bureaux des Domaines. À la suite de la réorganisation du SPF Finances, le SECAL et l'ensemble de l'Administration du recouvrement non fiscal seront transférés vers l'administration générale Perception et Recouvrement, c'est-à-dire le service de recouvrement fiscal. Par conséquent, tous les recouvrements, tant fiscaux que non fiscaux, seront à l'avenir effectués par une seule administration.

M. Boelaert s'attarde ensuite sur les moyens avec lesquels le SECAL fonctionne. Il se compose d'environ cent unités physiques, ce qui équivaut à 88,80 équivalents temps plein. Le SPF Finances prend en charge la totalité des frais de fonctionnement, c'est-à-dire, entre autres, les frais de personnel, les frais relatifs aux TIC et les coûts logistiques.

Une des questions-clés, selon l'intervenant, est de savoir ce qu'il advient des avances. Jusqu'à l'année passée, celles-ci étaient financées par un fonds budgétaire qui était alimenté par la récupération des avances payées et la contribution aux frais de fonctionnement. Mais force a été de constater que les dépenses proprement dites étaient supérieures aux rentrées, ce qui n'est pas acceptable pour un fonds budgétaire. Face à cette situation, qui a duré plusieurs années (jusqu'en 2011), la commission d'évaluation a proposé de remplacer ce fonds budgétaire par un article ordinaire dans le budget des dépenses.

M. Boelaert illustre ensuite, à l'aide d'un graphique, l'évolution du paiement des avances. Il montre une ligne en hausse continue, qui représente une augmentation annuelle moyenne du budget nécessaire de 7 %. Il réalise une prévision approximative pour 2013: en ajoutant grosso modo 7 % au budget de 2012, il arrive à un montant de 22,8 millions d'euros. Il précise toutefois qu'il s'agit là d'un simple calcul statistique.

M. Boelaert présente ensuite d'autres informations sur le fonctionnement du service. Il précise que le SECAL intervient sur demande et que certains pays sont dotés d'un service équivalent, mais intervenant de manière automatique.

Avant d'aborder le fonctionnement proprement dit du service, l'intervenant souhaite présenter un aperçu du nombre de dossiers. Il mentionne les chiffres les plus récents, qui n'ont pas encore été publiés. Il s'agit de chiffres cumulés. À la fin février, le SECAL traitait environ 47 000 dossiers, dont 33 461 dossiers SECAL et quelque 13 600 anciens dossiers de CPAS.

Une des táches du SECAL consistait également à recouvrer les avances octroyées précédemment par les CPAS. Mais l'intervenant ne parlera que des 33 000 dossiers SECAL, qui lui semblent les plus pertinents en l'espèce. Dans ces 33 000 dossiers, le SECAL intervient pour 57 000 créanciers, dont 54 700 enfants. Le SECAL intervient donc, au total, pour 54 700 enfants.

M. Boelaert précise que dans 78 % des cas, le dossier concerne un ou deux créanciers d'aliments. Il existe certes des dossiers concernant sept ou huit enfants, mais ils sont rares. Il apparaît également que dans 94 % des cas, le demandeur est une femme.

M. Boelaert explique ensuite la procédure.

Il y a deux manières d'introduire une demande:

— soit tout se fait par écrit et la demandeuse complète elle-même le formulaire qu'elle peut trouver par exemple sur le site du SECAL;

— soit la demandeuse se rend au bureau du SECAL, où elle peut se faire aider pour compléter le formulaire.

Le SECAL est doté d'un système automatisé: la demande y est introduite et les données sont ensuite analysées. Lorsque le dossier est complet, le SECAL envoie encore une proposition de mandat, qui est en fait un résumé des données. Ces données sont alors renvoyées à la demandeuse pour vérification.

M. Boelaert souhaite ensuite montrer quelques schémas. Un premier schéma renseigne sur le domicile de la demandeuse par région. On constate que le nombre de demandeuses domiciliées en Flandre et en Wallonie est sensiblement identique (42 à 43 %), contre 15 % à Bruxelles.

L'intervenant donne quelques explications concernant le titre exécutoire. Dans 93 % des cas, un jugement est présenté. Il existe différents titres exécutoires. 93 % d'entre eux sont des jugements, tandis que l'on a rarement recours à un acte notarié ou à un accord exécutoire.

M. Boelaert commente ensuite le fonctionnement de la procédure. Le SECAL envoie le résumé pour contrôle à la demandeuse, qui a trente jours pour renvoyer le mandat signé. Dès que le SECAL reçoit le document en retour, il prévient le débiteur d'aliments qu'une demande a été introduite. Le débiteur dispose alors d'un délai de quinze jours pour réagir, la réaction pouvant être:

— j'ai effectué le paiement;

— j'ai déjà payé certains montants;

— le titre n'est plus d'actualité; il existe un autre jugement qui a revu à la baisse le montant de la pension alimentaire.

Selon M. Boelaert, le problème en l'occurrence est que, dans 92 % des cas, le débiteur ne réagit pas. Cela n'est pas sans conséquences, car il faut recommencer tout le dossier, avec toute la perte de temps que cela implique.

L'intervenant souligne par ailleurs que 93 % des débiteurs sont domiciliés en Belgique.

Il poursuit ensuite le commentaire de la procédure.

Le SECAL a trente jours pour prendre sa décision, laquelle est généralement positive. Une décision négative n'est prise que dans 6 % des cas. La décision est transmise aux deux parties, le créancier et le débiteur. Si la décision est négative ou partiellement négative, le créancier dispose d'un délai d'un mois pour interjeter appel auprès du juge des saisies. L'envoi de la décision au débiteur marque le commencement de la perception et du recouvrement, de même que du paiement des avances. Si le SECAL se charge du paiement des avances, celles-ci sont payées pour une période de six mois. Cette période est renouvelable. Deux mois avant la fin du délai, le créancier d'aliments est averti qu'il doit à nouveau prouver qu'il a encore droit aux avances. Il doit à nouveau produire une preuve de la composition du ménage et du montant de ses revenus. Si toutes les conditions sont remplies, une nouvelle période de six mois prend cours.

M. Boelaert présente ensuite un schéma concernant le nombre de dossiers de paiement d'avances. Au 31 décembre 2012, des avances ont été payées dans le cadre de 8 000 dossiers en faveur de 13 981 enfants, soit environ 28 % des enfants pour lesquels le SECAL intervient. L'envoi de la notification au débiteur d'aliments marque donc le commencement de la phase de perception et de recouvrement. Dans les grandes lignes, cette phase consiste dans l'envoi mensuel d'un avis de paiement actualisé. Reste à savoir, évidemment, si cet avis est effectivement suivi d'un paiement. Si tel est le cas, le paiement en question est imputé suivant des règles bien précises. La règle principale est que le paiement sera d'abord imputé sur les frais et sur les avances payées, c'est-à-dire celles payées par le SECAL mais aussi celles versées naguère par les CPAS. L'argent retourne donc au Trésor s'il s'agit d'un remboursement d'avances, et le solde éventuel est versé au créancier d'aliments.

À défaut de paiement par le débiteur d'aliments, celui-ci fait l'objet d'une enquête de solvabilité. Pour procéder à cette enquête, le SECAL dispose de plusieurs sources d'information:

— les sources d'information du SPF Finances (par exemple, la documentation patrimoniale, qui concerne principalement les biens immobiliers);

— mais aussi — et surtout — le service de recherche en ligne de la Banque-carrefour de la sécurité sociale, appelé « Zachée » dans le jargon de la BCSS. Le SECAL peut y retrouver l'identité du dernier employeur en date et le salaire le plus récent. Le problème des données fiscales est qu'elles se rapportent généralement à la période imposable, ce qui signifie qu'elles remontent à un ou deux ans. Mais gráce au service de recherche en ligne de la Banque-carrefour de la sécurité sociale, le SECAL a accès aux informations les plus récentes, et ce non seulement en ce qui concerne la rémunération mais aussi pour ce qui est du pécule de vacances du débiteur.

Si le débiteur n'est pas solvable, le SECAL ne peut pas rester passif. La loi prévoit spécifiquement, en ses articles 26 et 27, qu'il peut suspendre ou annuler le dossier. Le dossier sera suspendu si le SECAL considère qu'il y a peut-être encore une chance que le débiteur redevienne solvable à l'avenir, ce qui sera le cas si ce dernier retrouve un emploi, par exemple. Par contre, si le SECAL n'entrevoit pas une telle possibilité, il peut annuler purement et simplement le dossier.

S'il s'avère que le débiteur est solvable et qu'il refuse de payer de son plein gré, il devra être contraint de payer. Le SECAL dispose pour ce faire de plusieurs possibilités particulières:

— il peut recourir à la délégation de sommes telle que prévue dans le titre exécutoire;

— le SECAL peut aussi utiliser la contrainte, technique spéciale qui lui permet de créer son propre titre exécutoire. Le recours à la contrainte concernera principalement les frais, car pour la pension alimentaire, le SECAL peut utiliser le titre proprement dit;

— un autre moyen important est la compensation avec restitution d'impôt. M. Boelaert présente ici un dernier schéma, où l'on peut voir l'évolution de la retenue sur la restitution d'impôt. En 2009, le montant des compensations s'élevait à 400 000 euros. On était alors au début de l'application de la compensation automatisée. Ce montant est passé à 1,7 million d'euros en 2010 et à un peu plus de 1,7 million en 2011. En 2013, le SECAL en est déjà à un montant de 556 000 euros pour les deux à trois premiers mois. Il s'agit là d'un moyen performant car il permet aussi d'économiser sur les coûts; il n'y a pas de coûts d'exécution. Il s'agit simplement d'un traitement au sein des différents services des Finances.

3. Exposé introductif de Madame Geneviève Pihard, Commission d'Évaluation SECAL

C'est la loi du 21 février 2003 (loi SECAL) qui crée un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances. Dans la foulée de la création de ce service, l'attention a été portée sur la nécessité d'évaluer le système.

L'article 29 de la loi SECAL prévoit donc que soit instituée une Commission d'évaluation de la loi du 21 février 2003. La Commission est composée de dix membres « fonctionnaires » et de dix membres « conseillers ». Il s'agit plus particulièrement de parlementaires et de représentants de groupements d'intérêts concernés par la problématique du non-paiement des pensions alimentaires.

La mission de la Commission est d'établir un rapport annuel d'évaluation à l'intention du ministre des Finances et du ministre du Budget ainsi que de leur soumettre des avis. Le ministre des Finances est chargé du dépôt devant les Chambres législatives.

Le rapport d'évaluation doit contenir entre autres:

— l'évaluation du fonctionnement et de l'organisation du service;

— l'évaluation de la pertinence et du degré de réalisation des objectifs ainsi que l'efficacité, l'impact et la viabilité de la loi. Il s'agit en l'occurrence de certains aspects de la loi elle-même, comme par exemple, les pourcentages de contribution aux frais de fonctionnement à charge du demandeur ou du débiteur, le montant des avances, les conséquences budgétaires;

— des conclusions, recommandations et avis.

Une évaluation telle que celle prévue requiert une enquête juridique, socio-économique voire sociologique approfondie que la Commission n'est en fait pas elle-même en mesure de réaliser telle quelle.

La Commission peut cependant fonctionner comme une antenne qui reçoit des signaux, les enregistre et les porte à la connaissance de ceux qui sont intéressés par la problématique du non-paiement des pensions alimentaires, que ce soit sous forme de conclusions, de recommandations ou encore d'avis.

Les émetteurs de signaux sont divers. Il peut s'agir:

— des collaborateurs du SECAL;

— des clients (tant les créanciers que les débiteurs d'aliments);

— des professions juridiques (par exemple les avocats);

— des médiateurs de dettes;

— des groupements d'intérêt ou encore, des organismes tels que la Fondation Roi Baudoin; et enfin

— des médias.

De même les signaux émis peuvent être de différents ordres. Ceux qui sont repris dans le rapport d'évaluation sont les suivants:

1) la connaissance de la loi: la loi et le service ne sont pas ou pas suffisamment connus avec pour conséquence que :

— des créanciers d'aliments ne demandent pas l'intervention du service;

— les débiteurs d'aliments ne connaissent pas leurs droits et leurs devoirs;

— les services et/ou les personnes en contact avec des créanciers d'aliments qui ne perçoivent pas leur pension alimentaire ne peuvent diriger ces personnes vers le Service;

2) le plafond de revenus déterminant l'octroi ou non des avances: la plupart des plaintes entendues concernent :

— l'existence même du plafond de revenus;

— le montant du plafond de revenus; ou encore

— le fait que la loi SECAL ne prévoit pas une majoration pour les enfants handicapés comme c'est le cas en matière de législation sociale.

3) le « super privilège »: les dispositions de l'article 1412 du Code judiciaire sont souvent définies comme le « super privilège » en matière de recouvrement de pensions alimentaires mais elles ne jouent que lorsque le débiteur d'aliments bénéficie de revenus comme prévu à l'article 1409 et suivants du Code judiciaire Ceci a pour effet que lorsqu'il y a concurrence avec d'autres créanciers (comme par exemple en cas de vente d'un bien immobilier du débiteur), le créancier d'aliments se trouve au même rang (créancier chirographaire) que les autres créanciers. Cela mène souvent à des situations où il ne reste rien ou presque rien pour le créancier d'aliments;

4) les moyens de pression: il est constaté que la simple menace d'une saisie, sur les revenus ou les ressources par exemple, n'a que peu voire pas d'impact sur les débiteurs qui ne veulent pas payer. Souvent, il s'agit de personnes qui sont déjà sur-endettées;

5) l'extension de l'intervention pour le paiement d'avances aux ex-conjoints ou ex-cohabitants;

6) le revenu d'intégration sociale comme limite au recouvrement: lorsque le créancier agit par lui-même (ou via son avocat ou un huissier de justice), l'article 1412 du Code judiciaire est d'application (les limitations à la saisissabilité du salaire ou de revenus assimilés ne sont pas applicables). Lorsque le SECAL intervient pour le créancier d'aliments, en vertu de l'article 16 de la Loi SECAL, le service ne peut pas procéder au recouvrement:

— si le débiteur d'aliments perçoit le revenu d'intégration sociale ou;

— s'il dispose seulement de ressources d'un montant inférieur ou égal au montant du revenu d'intégration sociale auquel il pourrait prétendre; ou

— si le recouvrement aurait pour effet que le débiteur d'aliments ne disposerait plus que de ressources d'un montant qui serait inférieur au montant du revenu d'intégration sociale auquel il pourrait prétendre.

Les moyens de recouvrement ne sont donc pas les mêmes et cette limitation a pour conséquence que le SECAL obtient moins de résultats que le créancier qui agirait par lui-même.

En résumé, les signaux captés ont en général trait à la qualité, la rapidité, l'efficience et le coût du service.

Sur base de ces points d'attention, la Commission a émis des conclusions, recommandations et avis.

En ce qui concerne le fonctionnement et l'organisation, voici les points relevés dans le rapport d'évaluation:

1) Les cellules juridiques au sein des directions régionales: il est souhaitable qu'elles reçoivent l'assistance de collaborateurs ayant une expérience dans les dossiers SECAL.

2) Les besoins en personnel doivent régulièrement être évalués. Les bureaux donnent en effet de plus en plus de signaux selon lesquels l'effectif en personnel actuel n'est plus suffisant et c'est sur le recouvrement que cela se fait sentir le plus.

3) En ce qui concerne les méthodes de travail:

3.1. arriérés: la détermination des arriérés effectivement dus peut poser des problèmes tant pour le créancier (justificatifs, prescription) que pour le débiteur (justificatifs, manque de collaboration) ou encore le SECAL (éléments disponibles, manque d'informations);

3.2. notification prévue à l'article 8: il s'agit de la notification par laquelle le débiteur est informé de l'ouverture d'un dossier à sa charge et de la possibilité qui lui est donnée de réagir sur les montants réclamés ou sur l'actualité du titre. La majorité des débiteurs ne réagit pas, avec pour conséquence qu'une partie de la procédure doit être recommencée et donc une perte de temps. D'autre part, il n'y a pas de sanction prévue pour pallier à ce problème.

Plusieurs propositions de modification de loi font état de cette question;

3.3. Notification prévue à l'article 10: il s'agit de la notification de la mise en demeure à laquelle est joint le premier avis de paiement reprenant le détail des sommes dues. L'article ne prévoit cependant pas qu'à dater de la notification, des intérêts sont dus.

Ce point fait également l'objet de propositions de modification de loi;

3.4. facilités de paiement: un certain nombre de débiteurs sollicite un plan d'apurement. Cependant, il y a souvent un écart important entre la mensualité proposée et la hauteur des sommes dues. Les mensualités proposées par le service sont donc plus élevées de façon à éviter d'aggraver la situation en voyant la dette augmenter plutôt que de diminuer;

3.5. enquête de solvabilité: bien que le Service a accès à la documentation des diverses entités du SPF Finances, il est essentiel, pour la réussite du recouvrement, que les informations des organismes de la Sécurité Sociale puissent être consultées. Il peut s'agir de l'identité de l'employeur ou des organismes de paiement, de la hauteur des revenus ou des indemnités et allocations, etc.;

3.6. revenu d'intégration sociale (RIS) — limite à l'insaisissabilité: aucun recouvrement ne peut être effectué aussi longtemps que le débiteur d'aliments bénéficie du revenu d'intégration ou ne dispose que de ressources d'un montant inférieur ou égal au montant du revenu d'intégration auquel il aurait droit. De plus, le recouvrement ne peut avoir pour effet de faire descendre les ressources du débiteur au-dessous du montant du revenu d'intégration auquel il aurait droit. Le SECAL fait face à deux problèmes:

— le revenu d'intégration varie selon la situation personnelle du débiteur d'aliments et il est difficile pour le SECAL de déterminer lui-même le montant du revenu d'intégration;

— il se peut que le débiteur d'aliments bénéficie d'indemnités ou allocations d'organismes différents dont les montants pris séparément sont inférieurs au revenu d'intégration mais pris ensemble dépassent le revenu d'intégration. En principe, l'ensemble des indemnités et allocations devrait être pris en considération pour déterminer la limite de l'insaisissabilité;

3.7. règlement collectif de dettes: un grand nombre de débiteurs d'aliments bénéficie de la procédure de règlement collectif de dettes. Ceci peut poser quelques problèmes:

— dans un certain nombre de dossiers, le médiateur de dettes refuse d'effectuer les paiements au service et ce, malgré le fait que ce dernier a reçu un mandat du créancier d'aliments;

— certains médiateurs de dettes contestent également la contribution aux frais de fonctionnement de 10 % prévue par la loi;

— après la décision d'admissibilité du règlement collectif de dettes, les voies d'exécution sont suspendues. Néanmoins, le SECAL continue d'accorder ses services pour assister le créancier d'aliments pendant cette procédure, sauf si celui-ci a renoncé à l'intervention du service;

— le créancier d'aliments est, en ce qui concerne les arriérés, mis sur le même pied que les autres créanciers. Vu la nature de la créance, les créanciers d'aliments trouvent cela injuste. Pour pallier à cela, une modification du Code judiciaire devrait être envisagée: supprimer dans l'article 1675/13, § 3, premier tiret, du Code judiciaire, les mots « non échues au jour de la décision arrêtant le plan de règlement judiciaire ». Le juge ne pourra plus remettre les arriérés de pensions alimentaires dans le cadre d'un plan de règlement judiciaire ou d'une remise de dettes totale.

4) Budget: le fonds a été remplacé par un article dans le budget général des dépenses.

Pour ce qui concerne la loi du 21 février 2003 elle-même, l'intervenante explique les points relevés. La Plate-forme associative « créances alimentaires » a remis une note à la Commission d'évaluation dont le contenu s'inscrit largement ici:

1. La diffusion de l'information: un manque de publicité est soulevé de manière récurrente. Ce problème est également repris dans l'accord du gouvernement, la note de politique générale du ministre de même que dans le Plan fédéral pauvreté. Différentes choses peuvent être organisées ou l'ont déjà été:

— organisation d'une campagne de publicité générale (par exemle participation à l'émission G1 Plan de la RTBF via la Fondation Roi Baudoin);

— organisation de campagnes d'information ciblées;

— affiches, brochures et dépliants mis à jour annuellement;

— participation à des salons ou communication d'informations lors de salons auxquels le SPF Finances participe (Batibouw, Zenith, Énergie);

— site web;

— participation à des journées d'étude ou séances d'information sur des thèmes sur le SECAL à l'invitation de divers organismes ou institutions (CPAS, maisons de Justice, écoles, groupes d'action sur-endettement, groupes d'intérêt tels que Vie féminine ou la Ligue des familles, services de proximité, centres de médiation, ...);

— diffusion d'informations spécifiques au créancier et au débiteur d'aliments (aussi repris dans la note de politique générale du ministre et le Plan fédéral pauvreté) (par exemple: envisager l'ajout d'une annexe explicative concernant les droits et devoirs du débiteur d'aliments à la notification prévue à l'article 8 de la loi SECAL);

— depuis l'entrée en vigueur de la loi du 19 mars 2010 visant à promouvoir une objectivation du calcul des contributions alimentaires des père et mère au profit de leurs enfants, une information relative à l'existence et aux missions du service est insérée directement dans le titre exécutoire (article 1321, § 3 du Code judiciaire).

2. La disponibilité de l'information: Il y a une absence de données statistiques permettant de cerner au mieux la problématique des pensions alimentaires. Ces données devant permettre d'avoir une vision actualisée et plus proche de la réalité concernant le nombre de divorces ou séparations dans lesquels une pension alimentaire est octroyée, le nombre de décisions prévoyant une clause de délégation de sommes, le nombre de créanciers d'aliments à qui un secours alimentaire ou une part contributive est octroyée, la hauteur des sommes, ... L'étude du Professeur Pacolet répond à ce souci.

3. La constitution d'un registre national des décisions judiciaires et des actes authentiques. Ce point fait l'objet d'une des propositions de modification de loi.

4. Le plafond de revenus comme condition d'octroi pour l'intervention du Service est également repris dans certaines propositions de modification de loi.

5. L'extension de l'intervention pour l'octroi d'avances aux ex-conjoints.

6. Le super privilège pour le recouvrement des pensions alimentaires fait partie des changements repris dans les propositions de modification de loi et nécessite une modification du Code civil.

7. Les autres moyens de pression: comme par exemple, surtout dans les pays anglo-saxons, l'autorité peut refuser de délivrer, suspendre ou retirer une autorisation ou une attestation (par exemple: le permis de conduire, le passeport, ...). Ce point est repris dans les propositions de modification de loi.

4. Exposé introductif de Madame Christine Dekoninck, secrétaire du département des CPAS de l'AVCB-VSGB (Association de la ville et des communes de la Région de Bruxelles-Capitale — Vereniging van de stad en de gemeenten van het Brussels Hoofdstedelijk Gewest)

Madame Dekoninck remercie la Commission d'avoir pris cette initiative d'auditionner divers acteurs dont les fédérations de CPAS.

Elle souligne qu'elle parlera au nom des trois fédérations: AVCB, VVSG (Vereniging van Vlaamse steden en gemeenten) et UVCW (Union des villes et communes de Wallonie) qui représentent les 589 CPAS du pays.

Les centres publics d'action sociale se sont vus déchargés complètement de la mission de l'octroi des avances sur pensions alimentaires à partir d'octobre 2005.

En effet, pour rappel, de septembre 1989 à septembre 2004, les CPAS, en application de l'article 68bis à 68 quater de la loi organique des CPAS du 8 juillet 1976, avaient pour missions:

— d'octroyer des avances sur pensions alimentaires en cas de retard de paiement du débiteur d'aliment;

— de recouvrer ces avances auprès du débiteur d'aliments.

Suite à l'adoption de la loi du 21 février 2003 créant un Service de créances alimentaires (SECAL) au sein du SPF Finances, les CPAS ont dans un premier temps été déchargés de la mission de recouvrement (en 2004) reprise par le SECAL puis dans un deuxième temps, de la mission d'octroi des avances (en octobre 2005). Cette loi est entrée en vigueur le 1er octobre 2005 et les articles 68bis à 68quater ont été abrogés.

Ce fut pour les CPAS, un soulagement administratif et financier, car, cette mission « considérée comme supplétive, représentait une charge administrative lourde, un coût financier important et un surplus de travail conséquent pour, souvent une frange de la population qui ne faisait pas partie des usagers habituels » à l'époque.

Or à la lecture des propositions de loi déposées, on pourrait craindre un retour en arrière et un glissement de la charge financière vers les CPAS mais sous une autre forme.

Madame Dekoninck s'explique:

Toutes ces propositions visent à modifier diverses dispositions légales et relatives à la loi créant le SECAL, ce afin de solutionner certains problèmes.

Sur certaines de ces propositions, les fédérations de CPAS peuvent marquer leur satisfaction:

— le relèvement du plafond des ressources du créancier d'aliment afin d'ouvrir le droit à des avances sur pension alimentaire à un nombre plus grand de bénéficiaires (les isolés actifs par exemple): cet objectif d'étendre le groupe-cible est un bon objectif quand on sait effectivement que 13 % des ménages avec enfants sont confrontées à un défaut de paiement des pensions alimentaires. L'étude de HIVA-KULeuven de fin 2012 souligne que les familles qui bénéficient d'une pension alimentaire sont plus épargnées par la pauvreté, gráce également à l'aide du SECAL;

— la suppression de la participation du créancier d'aliment aux frais de fonctionnement avec éventuellement pour corollaire, l'augmentation de ces frais pour le débiteur d'aliment;

— la création dans la loi hypothécaire, d'un privilège pour les arriérés de pensions alimentaires;

— la création au sein du SPF Justice d'un fichier central des jugements ou actes allouant une pension alimentaire.

Mais par contre, les fédérations des CPAS doivent rendre un avis négatif sur la proposition qui vise à maximiser le recouvrement auprès des débiteurs d'aliments par la suppression de l'article 16, § 2, de la loi créant le SECAL. En effet, cet article dispose: « § 2. Toutefois, aucun recouvrement ne peut être effectué aussi longtemps que le débiteur d'aliments bénéficie du revenu d'intégration ou ne dispose que de ressources d'un montant inférieur ou égal au montant du revenu d'intégration auquel il aurait droit.

De plus, le recouvrement ne peut pas avoir pour effet de faire descendre les ressources du débiteur au-dessous du montant du revenu d'intégration auquel il aurait droit. »

Cela signifie donc que le SECAL ne peut recouvrer les avances faites (voire les arriérés) auprès d'un débiteur d'aliment bénéficiaire d'un revenu d'intégration sociale ou bénéficiaire d'un revenu inférieur ou équivalent au montant du revenu d'intégration sociale (RIS) et si recouvrement il devait y avoir, celui-ci ne doit pas avoir pour conséquence de faire descendre le revenu sous le seuil du RIS.

Déjà lors des débats parlementaires relatifs à cette loi, il était indiqué « qu'en dessous d'un certain seuil, aucune saisie ne pourra avoir lieu, même lorsqu'il s'agit de garantir le paiement de créances alimentaires. En effet, l'objectif du législateur n'est pas de plonger les personnes dans une plus grande précarité, si ce fait est déjà établi ».

À leur sens, il est impératif de préserver cette situation et comme indiqué dans le mémorandum de 2010 et 2011, il faut éviter à tout prix la saisissabilité totale des revenus des débiteurs d'aliments en cas de non-paiement de pension alimentaire, car cela constituerait un véritable problème pour les CPAS qui se verraient alors obligés d'intervenir financièrement de manière supplétive en accordant une aide sur fonds propres.

La disposition reprise dans l'art 16, § 2, répondait ainsi aux préoccupations des CPAS à l'époque. Les fédérations des CPAS estiment que modifier ou abroger cet article aurait un impact considérable sur les CPAS aujourd'hui. La suppression de cet article ajouterait ce public à celui déjà connus des CPAS, c'est-à-dire les débiteurs d'aliments dont les créanciers ne se sont pas adressés au SECAL (et donc n'ont pas bénéficié d'avances) et qui ont eu recours à des procédures judiciaires. Pour ceux-là déjà, le RIS est saisissable (article 1412 du Code judiciaire).

Par ailleurs, dans un avis du 3 août 2012, la Cour de comptes souligne le fait que « si l'article 16, § 2, devait être supprimé, les recettes supplémentaires pour le SECAL seraient limitées et qu'à l'inverse, cela représenterait un surcoût pour les administrations locales. » (voir doc. Chambre, nº 53-2076/2, p. 6) Le CPAS devrait alors suppléer le manque de moyens du débiteur d'aliments suite au recouvrement de la dette alimentaire par le SECAL sur leur revenu d'intégration sociale ou sur leurs ressources inférieures ou équivalente » (selon le principe de l'article 1er de la loi organique: « toute personne a droit à l'aide sociale. Celle-ci a pour but de permettre à chacun de mener une vie conforme à la dignité humaine » (et article 23 de la Constitution)).

« Le CPAS est tenu d'accorder un droit à l'aide sociale mais contrairement au revenu d'intégration, les autorités fédérales n'assurent pas le co-financement de cette aide complémentaire, qui est donc exclusivement à charge du budget des administrations locales. »

Et même l'étude de HIVA-KULeuven relève que sur 179 758 personnes avec enfants bénéficiant d'une pension alimentaire en Belgique, 13 % ont des difficultés à les percevoir et dans près de quatre cas sur dix, c'est parce que les revenus de l'ex-conjoint sont trop faibles ou ils sont insolvables.

Même s'il est difficile aujourd'hui d'estimer le coût que cela représenterait pour les CPAS, un tel glissement de la charge financière (et administrative) sur les collectivités locales est inacceptable. De plus cela augmenterait inutilement la population à charge des CPAS et par ailleurs, cela reviendrait à faire en sorte que les pensions alimentaires sont en définitives payées par les collectivités locales.

Les CPAS paieraient l'addition ! Et le débiteur d'aliment ne serait pas plus responsabilisé face à ses obligations alimentaires !

Les fédérations des CPAS plaident pour que l'article 16, § 2, ne soit ni modifié ni supprimé.

L'accord du gouvernement du 1er décembre 2011 prévoit que « pour venir en aide aux familles confrontées à la défaillance du débiteur d'aliments, le gouvernement entend améliorer l'action du Fonds de créances alimentaires (le SECAL), notamment en optimisant les récupérations des avances auprès du parent débiteur et en informant encore mieux la population sur les services proposés par le SECAL ».

Les fédérations de CPAS soutiennent totalement cet objectif puisque dans leur dernier mémorandum, elles préconisaient: d'améliorer le fonctionnement du Service des créances alimentaires au profit du grand public. Mais, il ne faut pas que cet objectif louable soit poursuivi au détriment d'autres institutions comme les CPAS.

D'autres moyens peuvent certainement être avancés pour l'atteindre.

Madame Dekoninck signale aux membres de la commission que les Fédérations de CPAS ont d'ailleurs envoyé un courrier à la suite de l'examen d'une proposition de loi similaire datée du 20 février 2012 et examinée à la Chambre.

5. Exposé introductif de Madame Marie-Thérèse Coenen, représentante de la Plate-forme créances alimentaires

La plate-forme créances alimentaires représente plus de trente associations, néerlandophone ou francophone, rassemblées pour dénoncer le problème du non-paiement des pensions alimentaires et les conséquences de cette situation auprès des femmes, mono-parentales, et des enfants directement concernés. Cette plateforme est pluraliste. Le dossier « créances alimentaires » fait partie des revendications essentielles du mouvement féminin et féministe depuis les années septante. Il sera rejoint, dans ce débat, par les mouvements familiaux comme le Bond et la Ligue des familles.

La position de base de la plateforme est la suivante: suite à une séparation ou un divorce, la contribution alimentaire, établie par jugement ou d'une autre manière avec portée juridique équivalente, est une obligation prioritaire. Le Code civil est clair: chacun doit contribuer dans la mesure de ses moyens à l'éducation de ses enfants ou doit assistance au conjoint. Le non-paiement de cette dette est un délit d'abandon de famille. Pour la plate-forme, il s'agit d'un droit qui existe dans le chef de chacun des ex-conjoints comme dans celui des enfants. Il n'est donc pas question de lier ce droit à un état de besoin ou à une enquête sur les revenus. C'est contre le non-respect dans l'application de ce jugement qu'il faut s'élever et arrêter le sentiment d'impunité. Un état démocratique se doit de tout mettre en œuvre pour faire appliquer la loi et la chose jugée. L'adoption de la loi du 21 février 2003 créant le SECAL au sein du service fédéral des Finances a été une étape importante dans ce processus.

La question des pensions alimentaires est complexe: elle porte sur la méthode de calcul de la pension, sur le non-paiement, sur le recouvrement, sur les aides complémentaires accordés dans les aides ou assurances sociales aux personnes qui sont débitrices. Elle contient un volet économique et fiscal important.

Le non-paiement des pensions alimentaires, voire le refus de la demander, contribue aussi à approfondir la pauvreté et la précarité des familles dite mono-parentales, c'est-à-dire dans sa grande majorité, des femmes avec enfants à charge et qui les élèvent seules. Dans l'Annuaire 2013, Combattre la pauvreté, présenté ce 31 janvier 2013, les auteurs précisent que 38,5 % des familles mono-parentales vivent sous le seuil de pauvreté (22,2 % en Région flamande contre 54,3 % en Région wallonne).

Après 2003, la Plate-forme a continué son travail de vigilance à la fois comme membre de la commission d'évaluation SECAL mise en place en 2005, mais également comme mouvement exerçant une pression pour l'application de la loi de 2003. C'est bien à ce titre que Madame Coenen prend la parole. Dans quelle mesure, les propositions de loi qui sont sur la table de la commission des Finances et des affaires Économiques du Sénat, sont une avancée et rencontrent les positions de la Plateforme Créances alimentaires ?

a) Proposition de loi modifiant la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances (de M. Bert Anciaux et consorts), nº 5-1359/1

Cette proposition de relever le plafond des revenus à 1 800 euros, indexé, l'oratrice suppose, est une amélioration qui va permettre de donner accès au SECAL à une série d'ayant droits, dont les revenus sont supérieurs au montant précédent.

L'étude menée par HIVA-KULeuven et présenté à l'occasion des dix ans du SECAL, montre qu'avec ce plafond de revenu, plus 71 % des familles confrontées aux déficits de paiement, pourront trouver une aide. Mais le fait de ne pas tenir compte ou ne plus tenir compte de la composition du ménage, et du nombre d'enfants à charge, pose un nouveau problème.

La limite de 1 800 euros pénalisera de fait, le ménage mono-parental avec trois enfants à charge. Ce plafond dans cet exemple reste trop bas. On risque de créer de l'inéquité.

La Plate-forme ne comprend donc pas pourquoi la proposition ne fait plus intervenir la taille de la famille.

Sur ce point, la proposition de loi déposée par Mmes Zakia Khattabi et Mieke Vogels, nº 5-1556/1, proposé de supprimer l'article 4, § 1er et donc le plafond de revenu pour permettre non seulement un accès universel au SECAL mais également les avances. Elle répond au projet soutenu par la plateforme, de mettre en place un service universel pour faire respecter la chose jugée.

Madame Coenen plaide ensuite pour la suppression des plafonds de revenus.

Une des missions du SECAL est le recouvrement et la récupération des avances auprès des débiteurs et débitrices. La suppression du plafond est un argument en faveur de ce recouvrement.

Plus le SECAL s'occupera de personnes solvables qui ne paient pas ou mal leur créance alimentaire, plus sa fonction de recouvrement sera possible. Aujourd'hui, ces personnes peuvent avec un sentiment d'impunité, ne pas honorer leurs créances alimentaires. L'État, par le biais du service SECAL, ne fait rien contre eux. L'objectif de la plate-forme créances alimentaires est aussi que toutes les pensions soient payées sans discussion parce que c'est une obligation juste et que cela relève de la responsabilité de chacun. Le SECAL est donc aussi un outil au service de ce travail de conviction. Mais pour le moment, ce sont les ménages ou cohabitant les plus précarisés qui sont dans la mire et non les autres.

b) Proposition de loi modifiant diverses dispositions de la loi du 21 février 2003 créant un Service des créances alimentaires au sein du SPF Finances et modifiant le Code judiciaire en vue d'assurer le recouvrement effectif des créances alimentaires (de Mme Cindy Franssen, Wouter Beke et Sabine de Bethune), nº 5-1439/1

Cette proposition de loi couvre un champ beaucoup plus large que le simple champ des paiements des pensions alimentaires due, suite à une séparation. La Plate-forme Créances alimentaires ne s'est jamais penchée sur les autres types de créances. Elle garde dans son analyse: les créances alimentaires suite à une décision judiciaire, à une séparation ou un divorce, entre ex-conjoints et vis-à-vis des enfants, nés de cette union ou cohabitation. Pour rappel, le SECAL ne fait des avances que pour les enfants et jamais pour l'ex-conjoint même si celle-ci peut faire valoir le droit à une pension alimentaire. Étendre ce droit aux ex-conjoints, serait une reconnaissance de leur droit.

En ce qui concerne le premier article de la proposition, Madame Coenen renvoi à ses commentaires, avec une petite remarque, l'accès au service est universel mais c'est le principe d'avance qui est conditionné aux revenus des ayants droits.

La Plate-forme ne peut que souscrire à la proposition de supprimer la charge des 5 % dans le chef des créanciers et créancières. Cette décision avait été le fruit d'un débat et d'un « compromis » dans l'élaboration de la loi de février 2003. Il semblait normal que la personne qui allait pouvoir introduire un dossier et le faire gérer par l'administration publique, le SECAL, et qui de ce fait, faisait des économies de procédure judiciaire, participe au coût, par cette retenue de 5 % sur les montants perçus.

Mais la Plate-forme suit tout à fait le législateur quand celui-ci veut faire porter le coût du service sur la personne qui s'est dérobée à ses obligations. Cela ne résoudra pas un autre problème qui concerne les débiteurs d'aliments: la somme des créances non payées plus les intérêts de retard plus les 15 % de frais administratifs, peuvent devenir un argument pour le non-paiement: c'est trop !

Par ailleurs, les médiateurs de dette, contestent au SECAL, cette « taxe » administrative.

En cas de récupération et de recouvrement, l'État et donc le SECAL, se sert en premier et verse le solde du montant récupéré à l'ayant droit. En fin de chaîne, entre la dette initiale, ce qui est récupéré auprès du débiteur, le montant est parfois fortement diminué.

Le message à faire passer, à tout prix, est que la meilleure dette est celle qui n'existe pas. Et plus tôt la personne règle ses arriérés de pensions alimentaires, mieux cela vaudra pour tout le monde.

Article 5

Nous laissons à l'administration du SECAL de se prononcer sur les articles 4 et 5:

Comment inciter les personnes à réagir le plus rapidement possible finalement dans leur intérêt ? Ce débat ne doit pas occulter les difficultés concrètes que rencontrent toutes les administrations quand elles doivent contacter des citoyens et plus particulièrement, ceux et celles qui vivent dans la précarité.

Renforcer le pouvoir et les moyens du SECAL à l'encontre des débiteurs d'aliments est une bonne chose. Pour la Plate-forme, faire en sorte que plus personne ne se sente en impunité et non obligé quand il s'agit de paiement des pensions alimentaires, est l'objectif à atteindre.

Article 6

La Plate-forme appuie cette proposition qui lève une discrimination subie par le SECAL et qui le prive d'un outil important dans le recouvrement des montants non payés.

Cet article était une demande de l'Union des villes et des communes, section CPAS, qui ne souhaitait pas la saisie des RIS pour les personnes concernées par des dettes d'aliments. Par ailleurs, les CPAS accordent un RIS isolé avec personne à charge quand l'ayant droit fait valoir un titre de pension alimentaire.

Il existe aussi des compléments financiers dans d'autres législations sociales: l'Office national de l'emploi (ONEm) paie un complément au chômeur ou chômeuse isolée, ayant un titre de créance alimentaire à payer, ... À de nombreuses reprises, la Plate Forme a demandé à l'ONEm et aux services de paiement chômage, de n'accorder ce complément uniquement sur preuve de paiement de la pension alimentaire. Mais cela n'a jamais été suivi des faits.

L'article introduit le droit de recouvrer de manière universelle, en fonction des règles générales de droit dans ce domaine. Et c'est une bonne chose.

Article 7

L'article 7 porte sur la mise en place d'un registre national des décisions judiciaires. La Plate-forme joigne dans son analyse, la proposition nº 5-1515/1 de Mmes Zakia Khattabi et Mieke Vogels portant sur la création d'un registre national des décisions judiciaires.

La mise en place d'un registre des décisions judiciaires et des actes authentiques concernant les dettes alimentaires, est une demande que la Plate-forme porte depuis toujours et qu'elle traduit en résolution, dans le rapport d'évaluation de la Commission SECAL.

L'existence d'un tel fichier, encadré par les lois sur la protection de la vie privée, est élémentaire. C'est un outil pour suivre l'évolution des décisions judiciaires, tant sur les montants attribués et sur les méthodes de calcul.

C'est un outil pour faire valoir un droit pour les créanciers mais aussi pour les débiteurs.

C'est une initiative qui permettra une simplification administrative dans le traitement des dossiers et dans leur suivi.

C'est un outil contre la fraude et le chantage. Cela met de la neutralité dans un champ ou souvent la passion règne.

La Plate-forme n'est pas habilitée à faire des commentaires plus poussés sur la méthode à suivre pour concrétiser sa mise en place. Cela doit se faire, si ce n'est pas déjà le cas, en dialogue avec le monde judiciaire et le SECAL, comme représentant de l'administration financière.

Par contre, si la création d'un tel registre, permettra d'objectiver cette nébuleuse des pensions alimentaires mais Madame Coenen attire l'attention de la commission sur le nombre important de femmes mono-parentales, qui après une séparation, ou un divorce, ne demandent rien à leur ex-conjoint, ni pour elles-mêmes, ni pour les enfants, nés de leur liaison: par peur de représailles, parce qu'on ne veut plus avoir à faire avec l'autre parent, par volonté d'autonomie et d'indépendance: « Je pars, avec mes enfants. Je ne demande rien. » C'est dans ce public, là qu'on trouve des familles très précarisés qui demandent des aides diverses et qui ne peuvent ou ne veulent en aucun cas, entamer une démarche pour bénéficier d'une pension alimentaire auprès de l'ancien ou l'ancienne conjointe. La justice ou les organismes d'aide sociale, pourrait rappeler auprès de l'ex conjoint à ses devoirs et obligations. Ce problème n'est pas traité dans les deux propositions de loi. Cela mérite sans doute un examen de la part de la commission.

Les articles 8 et 9 et 10 s'inscrivent dans la volonté du législateur de contraindre le débiteur à acquitter de sa dette et de l'obliger à finalement assumer cette décision judiciaire par la limitation de la remise de la dette, par la possibilité d'être condamné à des sanctions alternatives, la déchéance du permis de conduire, ... Il existe aussi au Canada, la suppression du passeport de la personne qui a des dettes ou l'obligation de mettre un montant financier en caution sur un compte bloqué, ...

Tous les moyens permettant une meilleure exécution des pensions alimentaires rencontrent l'objectif de la Plate-forme. Tout ce qui va dans ce sens, est positif. Il faudra néanmoins accompagner cela d'une communication forte pour que le sentiment d'impunité, se mue en sens des responsabilités de chacun, et chacune.

Si cette dernière proposition de loi couvre des champs assez peu explorés jusqu'à maintenant dans les différentes propositions qui se sont succédées depuis 2003, Madame Coenen attire toutefois l'attention des parlementaires, sur le silence concernant le traitement fiscal de la pension alimentaire dans le chef de la créancière, dans le chef des enfants, quand la pension alimentaire leur est directement attribué, et dans le chef du débiteur. Il y a là pour des spécialistes du droit fiscal, des nœuds de contestation important et matière à légiférer.

C'est ce qu'avançait déjà, Monsieur Quintens, dans son exposé à la commission des Affaires sociales et de la Justice, en mars 2001, sur les rentes alimentaires à l'impôt des personnes physiques: Madame Coenen le cite : « Outre la complexité du système, il est difficile de vérifier le paiement régulier des pensions alimentaires. Le code prévoit bien que les preuves de paiement doivent s'établir de manière suffisante la réalité et la destination des paiements mais s'il s'agit d'une rente périodique, les documents justifiants l'obligation alimentaire ne doivent pas être introduits chaque année du moment qu'ils ont été fournis une fois, on pourra sauf le cas de suspicion de fraude, ne plus exiger de justifications ultérieures. C'est aussi le point de vue présenté à la même commission, le 21 mars 2001, du professeur Alain-Charles Van Gysel, qui plaide lui pour une défiscalisation des pensions alimentaires pour des raisons d'équité et de simplification administrative.

Dans l'ensemble, les propositions de loi soumises à examen, vont dans un sens qui donne un plus grande efficacité au SECAL, rencontre l'objectif de la Plate- forme de mettre la puissance de l'État au service du paiement des pensions alimentaires suit à un jugement ou autres conventions légales et de lutte contre le sentiment d'impunité qui reste encore très présent. Au nom de la Plate Forme alimentaire, Madame Coenen remercie la commission et la souhaite bon travail.  

B. ÉCHANGE DE VUES

Mme Franssen retient des exposés que le débat est loin d'être clos. Il est nécessaire de laisser « décanter » toutes les remarques qui ont été formulées, et il faudra par ailleurs prendre le temps de comparer les divers exposés. Mme Franssen formule ensuite les questions suivantes:

— L'étude du professeur Pacolet et de M. De Wispelaere est claire. Toutefois, le professeur Pacolet se demandait, au sujet de la proposition nº 5-1459/1 de Mme Franssen et consorts, si le plafond suggéré dans cette proposition implique que l'on prévoit aussi une augmentation de 62 euros par enfant à charge. Mme Franssen indique que telle était en tout cas l'intention du groupe CD&V, même si cela n'apparaît pas très clairement à la lecture de la proposition de loi. Si cette proposition a été déposée, c'est parce que les règles actuelles posent des difficultés pour les mères qui élèvent seules leurs enfants, comme le montrent d'ailleurs clairement les chiffres de l'étude du professeur Pacolet. Ce sont les familles monoparentales, surtout celles composées d'une mère isolée avec enfants, qui sont victimes de la pauvreté générationnelle. L'intervenante trouve aussi qu'il est important, comme l'a également expliqué Mme Coenen (représentante de la Plate-forme Créances alimentaires), que les débiteurs d'aliments soient soumis à certaines formalités, afin qu'ils ne se rendent pas coupables du délit d'abandon de famille. Il s'agit donc de trouver un juste équilibre. Mme Franssen ne souhaite pas non plus aggraver encore davantage le problème de la pauvreté en tant que tel, raison pour laquelle elle espère pouvoir supprimer l'effet Matthieu au moyen du nouveau système. D'où sa question adressée spécifiquement au professeur Pacolet: peut-elle déduire de l'exposé du professeur qu'en instaurant purement et simplement une augmentation linéaire, on créerait une inégalité de traitement entre les familles avec un enfant et les familles avec plusieurs enfants ? Induirait-on par conséquent un effet Matthieu si l'on ne prévoyait pas un montant supplémentaire par enfant à charge ? L'intervenante adresse cette question spécifique au professeur Pacolet, dont elle attend une réponse affirmative ou négative sans équivoque.

— Mme Franssen souhaite également poser une question à M. Boelaert (administrateur du Recouvrement non fiscal au service SECAL, SPF Finances). Étant entendu que les pensions alimentaires peuvent faire l'objet d'une remise de dette dans le cadre du règlement collectif de dettes, l'intervenante aimerait savoir à combien M. Boelaert estime les montants non récupérés, par suite de décisions de remise de dettes alimentaires prononcées par les tribunaux. Elle suggère que M. Boelaert lui fournisse éventuellement ces données par écrit s'il n'est pas en mesure de répondre immédiatement à la question.

— L'intervenante conclut également que les échanges d'informations entre le fisc et les autres services se sont considérablement améliorés. Mme Coenen a également évoqué une série de questions à ce propos, car il n'est évidemment pas question en l'espèce d'une mesure neutre sur le plan budgétaire. C'est pourquoi Mme Franssen a également une question qui s'adresse à tous les intervenants. Elle évoque l'avis du Conseil supérieur des Finances de mars 2013 concernant le régime fiscal des rentes alimentaires. N'y a-t-il effectivement aucune marge du côté des possibilités de déduction fiscale pour libérer des moyens permettant d'augmenter le montant du plafond ? Elle pense qu'il s'agit là d'une piste intéressante, qui a d'ailleurs été évoquée dans les exposés.

— Enfin, Mme Franssen souhaite encore poser une question à Mme Pihard (Commission d'évaluation du SECAL), qui a fait référence à une campagne menée sur la RTBF. Qu'en est-il de la collaboration avec les ministres communautaires et régionaux compétents, pour ce qui est de la campagne de sensibilisation du public au rôle du SECAL ? Elle pense qu'il y a certainement ici des points de tangence avec les compétences des communautés.

— Mme Franssen demande à Mme Dekoninck (secrétaire du département des CPAS de l'AVCB-VSGB) ce que les fédérations des CPAS pensent de l'augmentation de 62 euros par enfant à charge. S'agissant de la pauvreté, les enfants sont finalement les premiers touchés, et il est évident que les parents débiteurs d'aliments ont encore des responsabilités à l'égard de leurs enfants.

M. Laaouej renvoie à une déclaration, dans la presse du jour, de M. Claude Emonts, président de la Fédération des CPAS de Wallonie, dans laquelle ce dernier tire la sonnette d'alarme en soulignant qu'on fait même appel à des huissiers de justice pour réclamer les arriérés de paiement des pensions alimentaires. Et aujourd'hui, on va même jusqu'à saisir des revenus d'intégration pour garantir le paiement d'arriérés de dettes alimentaires. Ainsi, en voulant remédier à une situation de vulnérabilité, on crée une autre forme de vulnérabilité. Les personnes concernées se voient privées d'un revenu d'intégration — qui est leur revenu de remplacement —, et elles tombent ainsi dans la précarité. En résolvant un problème, on en crée un autre. M. Emonts suggère que le SECAL puisse intervenir ici, afin d'éviter que le CPAS ne soit confronté en fin de compte à des situations dramatiques. Ce problème, qui va certes plus loin que le cadre de discussion qui nous occupe aujourd'hui, remet à l'avant-plan la question de la saisissabilité des revenus de remplacement dans le cadre de l'intégration sociale. Par ailleurs, M. Laaouej se demande pourquoi le SECAL n'interviendrait pas, de manière quasi automatique, en faveur des personnes qui bénéficient d'un revenu d'intégration et qui ont en même temps des dettes alimentaires, en fixant par exemple les modalités de remboursement, ce qui lui permettrait d'être utile aussi au CPAS.

M. Pacolet répond à la question de Mme Franssen concernant la différenciation du plafond de revenu en fonction du nombre d'enfants à charge. Il se demande si 62 euros par enfant à charge est un montant adéquat. Selon lui, il serait plus équitable de porter le montant de 1 300 euros à 1 800 euros, majoré de 62 euros par enfant à charge; c'est également le consensus qui se dégage de différentes propositions. Toutefois, il doit encore examiner si le montant de 62 euros est adéquat ou non.

En réponse à la question de Mme Franssen, M. Boelaert précise que le SECAL ne dispose pas de statistiques concernant le nombre de règlements collectifs de dettes ou les montants qui sont perdus, selon qu'une remise de dette est accordée ou non dans le cadre de certains dossiers.

En réponse à la remarque de M. Laaouej, Mme Coenen précise qu'il est très important, selon elle, que toutes les autorités concernées collaborent et tendent vers le même objectif.

Si l'on accorde un droit supplémentaire, financé par quelque système d'assurance sociale que ce soit, il faut que les instances compétentes veillent attentivement à ce que les bénéficiaires en question perçoivent effectivement la rente alimentaire. Or cela n'est pas le cas actuellement. La Plate-forme estime dès lors que refuser d'emblée lorsque le débiteur d'aliments ne dispose que d'un revenu d'intégration, ne tient pas la route.

IV. DISCUSSION

A. Discussion générale relative à la proposition de loi nº 5-2476/1

Mme Franssen indique que cette commission a déjà organisé une audition sur le sujet le 27 mars 2013. À cette occasion, elle a entendu le professeur Pacolet, qui a présenté l'étude HIVA-KULeuven relative au fonctionnement du SECAL, mais aussi des représentants de toutes les parties concernées, à savoir le SECAL, la commission d'Évaluation du SECAL, le Fonds des créances alimentaires et les CPAS.

Sur la base des réactions et des observations de fond formulées dans le cadre de cette audition, Mme Franssen a préparé une proposition de loi de consensus, conjointement avec les collègues de la majorité. Cette proposition reprend les éléments de base des propositions déposées précédemment.

La proposition de consensus vise, d'une part, à rendre le fonctionnement du SECAL plus efficace, ce qui permettra de recouvrer davantage de moyens et d'améliorer son financement, et, d'autre part, à étendre le champ d'action du SECAL afin qu'un plus grand nombre de personnes puissent y faire appel.

La nouvelle proposition prévoit en outre les modifications suivantes:

1. la majoration de la contribution du débiteur d'aliments est calculée avec exactitude et est fixée à 13 % au lieu des 10 % actuels. On s'est basé sur l'étude du professeur Pacolet pour déterminer avec précision dans quelle mesure il faudrait majorer la contribution du débiteur d'aliments pour pouvoir supprimer la contribution de 5 % du créancier d'aliments;

2. le demandeur ne doit plus joindre un avertissement-extrait de rôle de l'impôt sur le revenu. En tant que service du SPF Finances, le SECAL a la possibilité de demander lui-même les informations concernant l'avertissement-extrait de rôle. C'est pourquoi l'obligation de joindre l'avertissement-extrait de rôle le plus récent à la demande est supprimée, ce qui constitue une simplification administrative évidente;

3. le SECAL peut récupérer les sommes payées indûment, à concurrence de 10 % de chaque paiement ultérieur qui sera effectué en faveur du créancier d'aliments, ou à concurrence de 100 % si le créancier d'aliments les a obtenues à la suite d'une déclaration ou d'un acte frauduleux. Cela générera une recette supplémentaire limitée pour le SECAL;

4. le privilège sur les biens meubles prévu dans la loi hypothécaire en ce qui concerne les dettes alimentaires a été porté à 15 000 euros. Ce privilège est censé augmenter les chances de recouvrement tant pour le créancier d'aliments que pour le SECAL lorsqu'une situation de concours se présente entre créanciers. Il est ressorti de l'audition que la dette alimentaire moyenne s'élève à 15 000 euros, ce qui explique la majoration en question;

5. une majoration supplémentaire est accordée pour un enfant handicapé à charge en ce qui concerne le plafond de revenus d'application pour le recours au SECAL. Il est apparu lors de l'audition organisée au Sénat le 27 mars 2013 que l'on ne tient pas compte actuellement de la charge financière que représente un enfant handicapé. La commission d'évaluation du SECAL a reconnu que de nombreuses plaintes sont déposées en la matière;

6. diverses petites adaptations visant à favoriser le recouvrement par le SECAL et quelques adaptations légistiques;

7. on a prévu une date réaliste pour l'entrée en vigueur afin de permettre au SECAL de prendre les mesures préparatoires nécessaires.

Mme Vermeulen indique qu'elle n'a pu prendre connaissance que la semaine dernière de la nouvelle proposition de loi des partis de la majorité.

Elle demande quel est le point de vue du gouvernement à ce sujet. Que pense le ministre des Finances de cette proposition de loi ? Et qu'en est-il, en particulier, de la ministre de la Justice ?

La proposition prévoit en effet de créer, auprès du SPF Justice, un fichier central des jugements, arrêts et actes allouant une pension alimentaire, ainsi qu'un Comité de gestion et de surveillance de ce fichier. Le texte à l'examen vise aussi à modifier l'article 19 de la loi hypothécaire et l'article 391 du Code pénal.

Que pense la Commission de la protection de la vie privée des modifications légales proposées ? Les dispositions à l'examen prévoient en effet, ainsi que l'intervenante l'a dit plus haut, la création d'un registre central des jugements, arrêts et actes.

M. Laaouej se réjouit que ce dossier progresse, car il revêt une importance majeure pour un grand nombre de parents isolés, principalement des femmes, et pour leurs enfants. Il ressort en effet d'une étude que 36 % des parents isolés et leurs enfants vivent sous le seuil de pauvreté. Une fois que la réglementation proposée aura été adoptée, il faudra, selon l'intervenant, évaluer son efficacité et, si nécessaire, l'ajuster à échéances régulières, ne serait-ce, par exemple, que pour mieux tenir compte du nombre d'enfants à charge.

M. Hellings formule plusieurs questions à titre informatif au sujet de la proposition de consensus.

L'intervenant indique que s'agissant des sanctions administratives, le texte est formulé de manière très pragmatique. C'est ainsi que, dans la pratique, le débiteur d'aliments en défaut de paiement pourra être déchu de son droit de conduire un véhicule motorisé. Cette interdiction ne risque-t-elle pas d'être un handicap pour l'intéressé si celui-ci aspire à se procurer des revenus et à payer ses dettes ?

Le membre ajoute qu'il est favorable à la suppression du plafond. Il déposera d'ailleurs un amendement dans ce sens.

Dans le texte à l'examen, il est précisé que l'objectif est d'améliorer le recouvrement des sommes dues. À cet égard, le texte français du commentaire de l'article 8 (doc. Sénat, nº 5-2476/1, p. 18) renvoie erronément à l'article 1410, § 4, du Code civil alors qu'il s'agit de l'article 1410, § 4, du Code judiciaire, comme le mentionne pertinemment le texte néerlandais correspondant.

Mme Matz se réjouit des progrès enregistrés en la matière. Elle constate que les principales priorités définies dans la proposition de résolution demandant une amélioration du fonctionnement du Service des créances alimentaires (SECAL) (doc. Sénat, nº 5-602/1) de Mme Matz et M. du Bus de Warnaffe, sont reprises dans le texte à l'examen et que les dispositions proposées vont plus loin que le texte de l'accord de gouvernement.

M. Bellot espère que toutes les dispositions proposées sont compatibles avec le Code judiciaire. S'agissant de la remarque concernant la déchéance du droit de conduire un véhicule motorisé, il indique que le juge peut prononcer cette sanction. Il s'agit donc pour lui d'une possibilité; l'intervenant espère toutefois qu'elle ne sera pas appliquée trop souvent. Il ne saurait en effet être question d'empêcher le débiteur d'aller travailler et de tirer des revenus de cette activité professionnelle.

Mme Talhaoui, la présidente, se déclare satisfaite au sujet des dispositions à l'examen. Elle renvoie à différentes études scientifiques et indique que, gráce à la nouvelle réglementation, le nombre de femmes confrontées à la pauvreté diminuera sensiblement. L'intervenante ajoute que les débats auxquels les autres propositions ont donné lieu se sont déroulés aussi en présence du ministre des Finances, qui a apporté son soutien à la proposition de loi.

Mme Vermeulen réplique que la demande de formuler des avis ne cache nulle manoeuvre dilatoire, mais est dictée par une réelle volonté d'améliorer le contenu du texte. Si l'on veut instaurer légalement un service supplémentaire au sein du SPF Justice, il est logique de demander l'avis du ministre qui a la Justice dans ses attributions.

Mme Franssen souligne que des propositions connexes ont été régulièrement mises à l'ordre du jour par le passé, sans que l'on ait demandé à disposer d'avis complémentaires. En ce qui concerne les sanctions alternatives, l'intervenante souhaite faire remarquer que l'« abandon de famille » est actuellement considéré comme une infraction passible de sanctions pénales. Dans la pratique, ces sanctions pénales ont cependant un effet dissuasif minimal. C'est pourquoi des sanctions alternatives ont été ajoutées comme un ultime moyen de pression. Le juge n'est cependant pas habilité à prendre des décisions à ce sujet.

La représentante du ministre des Finances souligne que deux aspects sont importants dans ce dossier: d'une part, le relèvement du plafond des ressources nettes afin qu'un plus grand nombre de créanciers d'aliments puissent bénéficier du paiement d'avances et, d'autre part, l'amélioration des possibilités de recouvrement à la disposition du SECAL.

La représentante du ministre des Finances explique que le relèvement du plafond de revenu à 1 800 euros aura, comme le montre l'étude réalisée par M. Pacolet, un impact budgétaire d'environ 8 millions d'euros. Quant au coût d'une suppression complète du plafond, il est estimé à environ 20 millions d'euros. L'intervenante explique avoir insisté pour que les dispositions soient adaptées de telle façon que le coût de 8 millions puisse être compensé par les possibilités d'amélioration des perceptions et des recouvrements. En l'espèce, il est tenu compte de ces possibilités et une proposition équilibrée et budgétairement neutre est sur la table. Le ministre des Finances soutient dès lors la proposition de loi nº 5-2476, qui intègre les deux aspects précités.


La commission rejette par 11 voix contre 3 la proposition de demander l'avis de la ministre de la Justice. Elle rejette également par 11 voix contre 3 la proposition de demander l'avis de la Commission de la protection de la vie privée.

B. Discussion des articles

Article 2

M. Hellings dépose un amendement (doc. Sénat, nº 5-2476/2) visant à supprimer le plafond de revenu proposé. Il renvoie ensuite à la discussion qui précède et à la justification écrite de son amendement.

Mme Matz dit très bien comprendre la philosophie de l'amendement proposé. Elle précise que les dispositions proposées résultent d'un compromis.

La représentante du ministre déclare n'être, sur le fond, pas opposée à la suppression du plafond de revenu. La disposition proposée, si elle est adoptée, aura cependant des répercussions importantes sur le fonctionnement du SECAL, qui n'est actuellement pas organisé de cette manière. Une autre conséquence est qu'il faudra améliorer encore les possibilités de perception et de recouvrement du SECAL pour parvenir à nouveau à une mesure budgétairement neutre. La mesure proposée n'est pas exclue dans un plan pluriannuel. Le plafond proposé est toutefois l'option qui est retenue dans une première phase. L'intervenante demande dès lors de rejeter l'amendement.

M. Hellings se réjouit de savoir que le gouvernement souhaite, à long terme, soutenir son amendement.

V. VOTES

L'article 1er est adopté à l'unanimité des 14 membres présents.

L'amendement nº 1 de M. Hellings est rejeté par 13 voix contre 1.

Les articles 2 à 13, ainsi que la proposition de loi dans son ensemble, sont adoptés par 12 voix et 2 abstentions.

Confiance a été faite à la rapporteuse pour la rédaction du présent rapport.

Sur avis du service d'Évaluation de la législation du Sénat, des corrections de texte ont été apportées.

La rapporteuse, La présidente,
Marie ARENA. Fauzaya TALHAOUI.

Texte corrigé par la commission (voir le doc. nº 5-2476/4 — 2013/2014).


ANNEXE