5-272COM

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Commission des Relations extérieures et de la Défense

Annales

MERCREDI 15 JANVIER 2014 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Demande d'explications de M. Benoit Hellings au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes sur «la présence en Belgique d'un proche du régime syrien» (no 5-4181)

M. Benoit Hellings (Ecolo). - Ma question, même si elle porte sur la Syrie, fera réapparaître en filigrane la question russe, qui visiblement ne cesse de nous occuper ici au Sénat.

Les réseaux sociaux ont rapporté durant le week-end des 26 et 27 octobre derniers la présence, sur le sol belge et à Bruxelles en particulier, du parlementaire syrien Sharif Shehadeh. Ce député, réputé proche du clan el-Assad, s'est fait connaître à l'occasion du désastreux conflit actuel comme le chantre du président syrien et de son régime dans les médias arabophones. Il suffit de faire une recherche sur son nom sur YouTube et l'on obtient une quantité infernale de vidéos à la gloire d'el-Assad. Il fait partie de ceux qui, durant l'escalade du mois de septembre dernier, ont déclaré que le gouvernement syrien ne possédait pas d'armes chimiques... On sait depuis lors ce qu'il en est puisque ces armes chimiques vont même être traitées par des entreprises belges.

La visite de l'intéressé en Belgique a été révélée par la publication, le 26 octobre sur sa page Facebook, d'une photo où il pose avec le parlementaire socialiste bruxellois, Mohammadi Chahid.

Plusieurs rumeurs ont fait état d'une demande d'asile par M. Shehadeh et les membres de sa famille. Selon d'autres ouï-dire, cette visite en Belgique avait un rapport avec le sort des minorités chrétiennes dans cette région que l'on sait à feu et à sang. Quoi qu'il en soit, ce député syrien a obtenu un visa en bonne et due forme des autorités belges pour se rendre à Bruxelles.

Ceci est étonnant, sachant que Michel Shammas, un avocat engagé pour les droits de l'homme en Syrie, s'est vu dernièrement opposer un refus de visa, alors que des organisations non gouvernementales belges l'avaient, quant à lui, invité à s'exprimer.

Voici donc mes questions.

Pourquoi le SPF Affaires étrangères a-t-il refusé l'octroi d'un visa à Michel Shammas, alors qu'il l'a, semble-t-il, octroyé à Sharif Shehadeh ? Pouvez-vous confirmer cette information ? Si oui, quelle est la raison politique pour laquelle le gouvernement a permis à un personnage-clé du régime el-Assad de se rendre en Belgique, quand on connaît la situation politique particulièrement désastreuse en Syrie, tant du point de vue sécuritaire qu'humanitaire, et les actes de violence posés quotidiennement, et aujourd'hui encore, par l'actuel chef de l'État syrien ?

Enfin, même si vous n'avez pas l'asile dans vos attributions, savez-vous si Sharif Shehadeh a vraiment demandé l'asile politique à la Belgique ? Si oui, pour quelles raisons ? Cette éventuelle demande d'asile aurait en effet un impact politique évident sur la scène internationale aujourd'hui. Cette demande d'asile a-t-elle été concertée avec le SPF Affaires étrangères ?

M. Didier Reynders, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes. - La Belgique n'a pas délivré de visa à M. Sharif Shehadeh. L'intéressé n'a pas introduit de demande auprès d'un consulat ou d'une ambassade belge. Il est donc inutile de vous demander si nous sommes au courant de la situation désastreuse que connaît la Syrie. En effet, vous laissez sans arrêt accroire que puisque nous aurions délivré un visa, c'est que nous ne serions pas tellement éloignés des thèses d'un régime que nous combattons. Je vous répète donc que nous ne lui avons pas délivré de visa. Si vous avez un doute à ce sujet, n'hésitez pas à contacter mon cabinet.

M. Michel Shammas a introduit une demande de visa auprès de notre ambassade à Beyrouth. Cette demande a été refusée le 23 octobre 2013 par l'Office des étrangers qui examine chaque demande. Pour le reste, si vous voulez connaître les raisons de la demande de visa de M. Shammas et du refus qui lui a été opposé, je vous renvoie à ma collègue Mme De Block. Vous pouvez également interroger celle-ci si vous voulez savoir quel sort aurait été réservé à une éventuelle demande de visa déposée en Belgique par M. Shehadeh, auquel je le répète, nous n'avons pas délivré de visa. Et de gráce, ne tirez pas toute une série de conclusions sur l'attitude belge à l'égard de la Syrie par rapport à un acte que nous n'avons pas posé !

M. Benoit Hellings (Ecolo). - Monsieur le ministre, à aucun moment je n'ai sous-entendu que la Belgique soutenait le régime el-Assad. J'ai simplement demandé la raison pour laquelle M. Shehadeh se trouvait sur le territoire belge et s'il avait introduit une demande de visa.

M. Didier Reynders, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes. - J'ai fait mes études chez les salésiens. Auriez-vous étudié chez les jésuites ? Vous y auriez été un excellent étudiant !

M. Benoit Hellings (Ecolo). - Une série de militants pour la paix en Syrie ont été légitimement interloqués par cette présence sur le sol belge et il est tout à fait normal que l'on puisse en demander la raison.

Je me réjouis d'apprendre que la Belgique n'a pas octroyé de visa à M. Shehadeh et la raison pour laquelle M. Shammas n'a pas pu être accueilli ici. Je poserai donc une question à votre collègue en charge de l'asile. Il est heureux que la Belgique ait pu jouer son rôle et que le débat parlementaire ait permis d'arriver à cette conclusion. Nous sommes donc d'accord.