5-1836/3

5-1836/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2012-2013

21 NOVEMBRE 2012


Proposition de résolution relative à la position de la Belgique concernant l'augmentation massive des accises françaises sur la bière


TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION DES FINANCES ET DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES


A. Vu le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013, adopté en 1re lecture par l'Assemblée nationale le 30 octobre 2012 et rejeté en 1re lecture par le Sénat ce 15 novembre;

B. Vu l'article 23 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013 relatif à l'augmentation du tarif du droit spécifique à la bière;

C. Vu l'article 110 du Traité de sur le fonctionnement de l'Union européenne, qui dispose notamment qu'aucun État membre ne frappe les produits des autres États membres d'impositions intérieures de nature à protéger indirectement d'autres productions;

D. Vu la directive nº 92/83/CEE du Conseil du 19 octobre 1992 concernant l'harmonisation des structures des droits d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques qui définit les catégories d'alcool et de boissons alcooliques soumises à accises et la méthode de calcul de l'accise;

E. Vu la directive nº 92/84/CEE du Conseil du 19 octobre 1992, concernant le rapprochement des taux d'accises sur l'alcool et les boissons alcooliques qui définit les tarifs minima applicables à ces produits;

F. Vu l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 20 février 1978, « Cassis de Dijon », opposant Rewe-Zentral AG contre Bundesmonopolverwaltung für Branntwein, concernant le principe de libre circulation des marchandises (cas 120/78);

G. Vu les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 27 février 1980 et du 12 juillet 1983 opposant la Commission européenne et le Royaume Uni, concernant la soumission des vins importés à une surcharge fiscale, de nature à protéger la bière de production nationale (cas 170/78);

H. Vu l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) du 8 avril 2008 opposant la Commission européenne et le Royaume de Suède, concernant l'imposition du vin (cas 167/05);

I. Considérant l'importance pour la Belgique d'une production brassicole belge génératrice d'emplois;

J. Considérant que les brasseries belges exportent approximativement 60 % de leur production et que la France représente 32 % des exportations de bière produite en Belgique;

K. Considérant que l'article 23 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013 prévoit une augmentation de 160 % du droit d'accises sur la bière, et qu'une telle augmentation n'est par contre pas prévue pour le vin;

L. Considérant qu'il apparaît que le projet d'augmentation des accises sur la bière en France ne semble pas procéder d'une politique de santé publique mais parait s'inscrire davantage dans la volonté d'opérer un déplacement de comportement des consommateurs français d'un secteur à l'autre;

M. Considérant qu'une réelle politique de santé publique visant à prévenir de tels abus s'efforcerait au contraire à développer une approche cohérente de la fiscalité sur l'ensemble des boissons alcoolisées, ce qui n'est du reste pas l'approche développée par le projet de loi française qui ne cible — s'agissant de l'augmentation des accises — que la bière;

N. Considérant l'impact éventuel de cette hausse d'accises sur le secteur brassicole belge qui redoute une baisse substantielle de son chiffre d'affaires en dépit de son ancrage local français;

O. Considérant la discrimination potentielle créée par la différence de prélèvement d'accises par degré d'alcool dans le vin et dans la bière;

P. Considérant la volonté de l'Union européenne de développer un marché commun européen exempt de discrimination et de restriction quantitative,

Le Sénat,

Demande au gouvernement:

— d'interpeller le gouvernement français au sujet des conséquences potentiellement négatives de l'article 23 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2013 sur l'économie belge;

— d'étudier l'opportunité d'informer la Commission européenne à ce sujet et, sur la base de l'éventuel avis de la Commission européenne, d'introduire un recours devant les institutions européennes compétentes en la matière.