5-1673/3

5-1673/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2011-2012

9 JUILLET 2012


Projet d'insertion d'un article 157bis dans la Constitution

Projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles

Projet de loi modifiant la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, à la suite de la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles


Procédure d'évocation


Proposition de loi visant à créer un arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde et à instituer des tribunaux néerlandophones et francophones dans l'arrondissement de Bruxelles ainsi que la cour d'appel de Louvain


RAPPORT FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES INSTITUTIONNELLES PAR MME TARGNION ET M. ANCIAUX


I. INTRODUCTION

Le 21 juin 2012, la Chambre des représentants a adopté les trois projets suivants:

— le projet d'insertion d'un article 157bis dans la Constitution, par 106 voix contre 40 (doc. Chambre, nos 53-2141/1-5);

— le projet de loi, soumis à la procédure bicamérale obligatoire, portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, par 106 voix et 40 abstentions (doc. Chambre, nos 53-2140/1-9);

— le projet de loi, soumis à la procédure bicamérale optionnelle, modifiant la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, à la suite de la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, par 106 voix contre 40 (doc. Chambre, nº 53-2280/1). La Chambre a dissocié ce projet du projet de loi nº 53-2140/1, car ce dernier projet, soumis à la procédure bicamérale obligatoire, contenait des dispositions relevant de la procédure législative prévue à l'article 78 de la Constitution.

Les trois projets précités découlent de deux propositions déposées le 4 avril 2012 par des représentants des huit partis signataires de l'Accord institutionnel pour la Sixième Réforme de l'État, conclu le 11 octobre 2011.

Les trois projets ont été transmis au Sénat le 22 juin 2012 et le projet soumis à la procédure bicamérale optionnelle a été immédiatement évoqué. Les trois textes ont été transmis le même jour à la commission des Affaires institutionnelles.

La commission a examiné les trois projets conjointement avec la proposition de loi nº 5-755/1 de MM. Laeremans et Ceder au cours de ses réunions des 26, 27 et 29 juin et du 3 juillet 2012, en présence de M. Servais Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles.

Le présent rapport a été soumis à la commission pour approbation le 9 juillet 2012.

II. PROCÉDURE

A. Désignation des rapporteurs

M. Cheron propose Mme Targnion et M. Anciaux comme rapporteurs.

M. Pieters propose de désigner aussi M. Vanlouwe comme rapporteur.

La premi!re proposition est adoptée par 8 voix et 3 abstentions.

La proposition de désigner M. Vanlouwe comme troisième rapporteur est rejetée par 8 voix contre 3.

B. Présence de la ministre de la Justice

M. Vanlouwe exige que la ministre de la Justice assiste à la discussion des quatre textes à l'examen. En effet, le projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles est étroitement lié aux projets du gouvernement visant à redessiner complètement le paysage judiciaire. Un des éléments clés à ce sujet est l'agrandissement d'échelle des arrondissements judiciaires, que l'on ferait coïncider avec les dix provinces, Eupen et Bruxelles, ce qui permettrait de ramener leur nombre de 27 à 12.

La question de savoir dans quelle mesure ces deux projets de réforme sont compatibles se pose dès lors à juste titre. Il coule donc de source que la ministre de la Justice assiste à la discussion des projets à l'examen.

M. Moureaux attire l'attention sur une autre évidence, à savoir le fait que le gouvernement est un et indivisible. Les points de vue adoptés au sein de cette commission par le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles engagent l'ensemble du gouvernement. Le gouvernement est donc représenté. De plus, les projets à l'examen découlent de propositions déposées à la Chambre et ne sont donc pas des initiatives gouvernementales.

M. Cheron se range à cet avis.

M. Vanlouwe ne peut se satisfaire d'une telle réponse qui ne veut rien dire. Il aimerait entendre de la bouche de la ministre de la Justice si les deux projets de loi sont compatibles avec la réforme du paysage judiciaire projetée par le gouvernement. Il attend également une réponse de la ministre en ce qui concerne la mesure de la charge de travail qui est proposée (art. 57 du projet de loi nº 5-1674/1).

MM. Anciaux et Delpérée insistent à nouveau sur le principe d'unité et d'indivisibilité du gouvernement. Tous les points de vue adoptés par le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles lors de la discussion des projets à l'examen reflètent bien évidemment la position du gouvernement et engagent donc également la ministre de la Justice.

M. Delpérée ajoute que l'opposition n'a pas exigé la présence du ministre des Affaires étrangères lors de la discussion du projet de loi portant modification du Code électoral, en ce qui concerne le vote des Belges à l'étranger (doc. Sénat, nº 5-1672/1).

M. Laeremans appuie la demande formulée par M. Vanlouwe. Pour un projet d'une telle ampleur, ayant un tel impact budgétaire, l'on ne saurait justifier que le gouvernement soit représenté par un secrétaire d'État. Il faut pour cela un ministre, qui, contrairement au secrétaire d'État, siège au Conseil des ministres, ce qui donne plus de poids à sa voix.

M. Tommelein affirme sa pleine confiance envers le secrétaire d'État qui, en ce qui concerne le projet concerné, s'exprime également au nom du groupe libéral. Contrairement à d'autres niveaux de compétence, le gouvernement fédéral et ses membres parlent d'une seule voix. De plus, il ne faut pas perdre de vue que les trois projets découlent d'une initiative parlementaire.

M. De Decker déclare qu'il pourrait soutenir la demande de M. Vanlouwe si les projets à l'examen émanaient du gouvernement, en l'occurrence de la ministre de la Justice, et qu'ils avaient été envoyés à la commission de la Justice, ce qui n'est pas le cas. Il s'agit en l'espèce d'une réforme institutionnelle, qui a logiquement été soumise à la commission des Affaires institutionnelles.

M. Vanlouwe rappelle que son groupe avait proposé d'examiner ces projets en commission de la Justice mais que le Bureau du Sénat a refusé. Sur le fond, la question qui demeure est de savoir comment la réforme proposée de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles pourra être conciliée avec la réforme du paysage judiciaire qui a été annoncée par la ministre de la Justice et qui se traduira par une réduction du nombre des arrondissements judiciaires, qui sera ramené de 27 à 12. Étant donné que la ministre de la Justice est la seule à pouvoir répondre à cette question, elle devrait venir en commission des Affaires institutionnelles afin d'en dire plus.

M. Tommelein comprend la méfiance de la N-VA qui, à un autre niveau de pouvoir, est confrontée à un gouvernement qui agit en ordre dispersé. Le gouvernement fédéral respecte toutefois les principes de loyauté et d'unité, ce qui signifie que lorsqu'un membre du gouvernement dit quelque chose, il parle pour tous les autres. Autrement dit, les déclarations du secrétaire d'État, M. Verherstraeten, engagent la ministre de la Justice, Mme Turtelboom.

M. Beke fait remarquer qu'il a régulièrement été question, ces dernières décennies, d'une réforme judiciaire de grande ampleur. La réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, avec la scission du parquet et le dédoublement du siège, a systématiquement été présentée comme la clef de voûte de cette réforme globale. Ces deux volets sont donc étroitement liés. Mais l'Accord institutionnel pour la Sixième Réforme de l'État fait partie de l'accord de gouvernement et engage donc aussi la ministre de la Justice qui devra mettre en œuvre cette partie de l'accord. Il lui appartiendra donc de veiller à la bonne articulation entre les deux réformes, notamment au moyen de la mesure de la charge de travail. La réforme de la justice est impossible sans la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles. C'est en cela que ces deux réformes sont liées. Mais la différence est que la première relève de la responsabilité du gouvernement alors que la seconde trouve son origine dans une initiative parlementaire et est nécessaire à la réalisation de la première, qui sera de grande ampleur.

M. Anciaux a deux observations à formuler. Il trouve curieux que certains membres subordonnent un projet de loi, adopté par la Chambre et en cours d'examen au Sénat, aux projets éventuels de la ministre de la Justice. Ce qui prime en l'espèce, c'est quand même le projet de loi que la Chambre a déjà approuvé.

Il est donc évident que la ministre de la Justice devra tenir compte de la loi qui sera adoptée par le Parlement fédéral. Ses projets devront être compatibles avec les lois qui sont votées sous la présente législature. L'intervenant n'imagine pas que la ministre mette subitement à exécution des projets qui seraient en contradiction avec la loi relative à la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

Tout le monde est d'accord pour dire qu'il faut une réforme des arrondissements judiciaires afin d'améliorer la collaboration, mais cela ne saurait se faire au mépris du souhait de la majorité institutionnelle d'opter, pour Bruxelles-Hal-Vilvorde, en faveur d'un dédoublement du siège et d'une scission du parquet. La ministre de la Justice devra respecter ce souhait.

S'agissant du problème de l'interférence éventuelle des projets de loi à l'examen avec la réforme future du paysage judiciaire, M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, renvoie à l'accord de gouvernement. Les principes énoncés dans les projets de loi en question, qui ont d'ailleurs été examinés en cabinet restreint, n'interfèrent nullement avec cette vaste réforme. Une fois que les projets de loi auront été approuvés, le gouvernement ne touchera plus à la délimitation du parquet de Bruxelles ni à celle du parquet de Hal-Vilvorde.

La ministre de la Justice souhaiterait regrouper d'autres arrondissements judiciaires, mais cela ne concerne pas l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde ni l'arrondissement administratif de Bruxelles.

M. Laeremans pense qu'il existe bel et bien un lien entre les projets de loi et la réforme prévue du paysage judiciaire. En effet, l'objectif est de regrouper les arrondissements judiciaires par province. Avec cette réforme, on sabote cette possibilité puisque l'on rattache constitutionnellement Hal-Vilvorde à Bruxelles. Le Brabant flamand ratera ainsi le train de la modernisation et sera privé d'une structure provinciale unique pour ses tribunaux et parquets.

Comment la ministre de la Justice procédera-t-elle pour concilier le regroupement des arrondissements à l'échelle provinciale avec les projets de loi à l'examen ?

L'intervenant ajoute qu'il a préparé plusieurs questions au sujet de l'impact budgétaire de cette réforme sur les tribunaux et les parquets ainsi qu'au niveau des magistrats. Il comprend que le secrétaire d'État ne puisse pas y répondre sur-le-champ, mais il souhaiterait quand même que celui-ci prenne l'engagement de fournir ces informations à la commission lors de la prochaine réunion et ce, après concertation avec la ministre de la Justice.

M. Vanlouwe prend acte du fait que les partis de la majorité certifient qu'ils ne toucheront pas sous cette législature aux modifications qui seront approuvées dans le cadre de cette réforme.

L'intervenant constate par ailleurs que M. Laeremans a raison lorsqu'il dit que la réforme du paysage judiciaire a pour but de regrouper les arrondissements judiciaires à l'échelle provinciale. Il y en a actuellement 27, ce qui est effectivement beaucoup trop. On peut donc dire qu'en soi, la réforme est une bonne chose.

L'intervenant tient cependant à rappeler qu'en 2002, la coalition violette avait décidé de regrouper aussi les arrondissements électoraux à l'échelle provinciale, à l'exception de Bruxelles-Hal-Vilvorde. C'est à la suite de cette décision que la Cour constitutionnelle a rendu son arrêt nº 73/2003, avec toutes les conséquences que l'on sait. Il ne peut s'empêcher de penser que le gouvernement actuel s'engage dans la même voie et qu'il propose une nouvelle fois une solution ambiguë qui soumettra Hal-Vilvorde à un régime différent de celui des autres arrondissements judiciaires.

Étant donné que la ministre de la Justice n'a pas pu être présente, l'intervenant demande au secrétaire d'État de confirmer que l'on s'achemine effectivement vers un total de 11 arrondissements. Ou y en aura-t-il 12, compte tenu de la situation spécifique de Hal-Vilvorde ?

Le secrétaire d'État répond qu'il ne saurait être question d'entamer aujourd'hui le débat sur la refonte du paysage judiciaire. C'est une question qui sera abordée ultérieurement à la Chambre et au Sénat.

La demande visant à inviter la ministre de la Justice afin qu'elle fournisse davantage d'explications sur la future réforme des arrondissements judiciaires est rejetée par 10 voix contre 3.

III. COMMENTAIRE DES PROJETS ET DE LA PROPOSITION DE LOI

A. Projet d'insertion d'un article 157bis dans la Constitution (doc. Sénat, nº 5-1673/1)

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, déclare que l'accord institutionnel du 11 octobre 2011 prévoit une réforme en profondeur de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles.

Cette réforme prévoit une approche fonctionnelle et efficace de la justice dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, tant dans l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale que dans l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde, avec des garanties spécifiques pour les droits des francophones comme pour ceux des néerlandophones dans cet arrondissement.

Certains éléments de cette réforme ont été jugés tellement essentiels par les auteurs de la proposition de loi initiale qu'ils ne pourront être adaptés à l'avenir qu'à une majorité spéciale.

C'est à cet effet qu'a été déposé le projet d'insertion d'un article 157bis dans la Constitution, adopté la semaine dernière par la Chambre des représentants.

L'accord institutionnel du 11 octobre 2011 précisait déjà explicitement que les éléments essentiels de la réforme qui concernent l'emploi des langues en matière judiciaire au sein de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles (Hal-Vilvorde), ainsi que les aspects y afférents relatifs au parquet, au siège et au ressort ne pourront être modifiés qu'à la majorité spéciale visée à l'article 4, dernier alinéa, de la Constitution.

Cet ancrage constitutionnel se justifie par le constat que la réforme touche au cœur des grands équilibres qui sous-tendent la paix communautaire — par analogie avec ce que prévoient d'autres dispositions de la Constitution qui touchent également à ces grands équilibres.

Ces « éléments essentiels » sont précisés dans les développements du projet. Étant donné que le projet à l'examen est traité conjointement avec les projets de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, ces éléments sont donc déjà connus du Constituant au moment où il doit se prononcer sur la révision de la Constitution à l'examen.

Comme cela a été précisé, ces « éléments essentiels » ont été identifiés dans les développements de la proposition de révision de la Constitution.

Au cours des discussions menées à la Chambre, un intervenant a relevé que l'on ne tenait pas compte de la suggestion du Conseil d'État de scinder la proposition en deux parties, la première réunissant toutes les dispositions relatives aux « éléments essentiels », et la deuxième rassemblant toutes les autres dispositions.

Il ne faut pas perdre de vue que le projet de loi à l'examen concerne essentiellement des dispositions modificatives du Code judiciaire et de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. Il est impossible de déterminer a priori si toute modification ultérieure des dispositions légales traduisant les éléments essentiels dans la loi doit nécessairement être considérée comme touchant à un élément essentiel de la réforme. Il n'est pas non plus certain qu'une autre disposition légale liée très étroitement à ces éléments puisse être modifiée ultérieurement par une loi ordinaire, si cette modification remet en cause ces éléments essentiels relatifs à l'emploi des langues en matière judiciaire dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles ou l'un des aspects connexes relatifs au parquet, au siège et au ressort. Il faudra déterminer, en fonction de l'objet et de la portée d'une future modification, si cette modification doit ou non faire l'objet d'une loi requérant une majorité spéciale.

Le secrétaire d'État renvoie aux développements de la proposition initiale, dans lesquels les sept éléments essentiels sont énumérés de manière limitative.

Le projet actuel prévoit donc d'insérer un article 157bis dans la Constitution.

Eu égard à son objet, cette disposition constitutionnelle doit entrer en vigueur à la date de l'entrée en vigueur de la loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles.

Pour ce motif, le projet à l'examen prévoit également une disposition transitoire.

L'article 61, alinéa 1er, du projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles prévoit concrètement que cette entrée en vigueur intervient dès que chacun des nouveaux cadres et chacun des cadres linguistiques fixés conformément aux articles 57 à 60 du projet de loi précité sont remplis à 90 %. Conformément à l'article 61, alinéa 2, c'est le Roi qui constate par arrêté que la condition des 90 % est remplie. Les dispositions de la loi sont intégralement applicables le premier jour du deuxième mois qui suit la publication de cet arrêté royal au Moniteur belge.

B. Projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles (doc. Sénat, nº 5-1674/1)

Projet de loi modifiant la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, à la suite de la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles (doc. Sénat, nº 5-1675/1)

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, déclare que les deux projets de loi ont été adoptés par la Chambre des représentants lors de la séance plénière du 21 juin dernier.

L'organisation de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles faisait débat depuis de longues années.

L'accord sur la sixième réforme de l'État entend apporter une réponse à ce débat en procédant à une réforme fondamentale de cet arrondissement. Cette réforme touche au cœur des grands équilibres qui œuvrent à la paix communautaire. C'est la raison pour laquelle ses éléments essentiels ne pourront plus, en vertu de l'article 157bis de la Constitution qui sera adopté concomitamment avec les projets de loi susmentionnés, être modifiés à l'avenir que par le biais d'une loi adoptée à la majorité spéciale.

Les présents projets de loi ont pour objet de traduire fidèlement l'accord institutionnel, qui prévoit:

— le dédoublement du siège sur l'ensemble des 54 communes qui composent actuellement l'arrondissement de Bruxelles;

— la scission du parquet de Bruxelles en deux parquets dont l'un est compétent sur l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale et l'autre sur celui de Hal-Vilvorde;

— l'adaptation de certaines règles contenues dans la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire.

En ce qui concerne le dédoublement du siège

L'accord institutionnel prévoit que:

« Le tribunal de première instance, le tribunal de commerce, le tribunal du travail et le tribunal d'arrondissement seront dédoublés en un tribunal francophone et un tribunal néerlandophone compétents sur tout l'arrondissement judiciaire de Bruxelles composé des 54 communes actuelles de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

Le ressort de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles reste identique. Les règles de répartition des affaires entre les tribunaux francophones et néerlandophones restent identiques à celles prévalant pour la répartition actuelle des chambres francophones et néerlandophones, à l'exception des règles actualisées en matière de changement de langue et de renvoi et sans préjudice de la législation existante sur l'emploi des langues en matière judiciaire du 15 juin 1935 et de la pratique relative à son application.

En ce qui concerne le tribunal de police, seul le tribunal de police de Bruxelles sera dédoublé. ».

Ce dédoublement des juridictions sur l'ensemble de l'arrondissement de Bruxelles passe par une modification de diverses dispositions du Code judiciaire et de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire.

Les modifications du Code judiciaire relatives au dédoublement du siège font l'objet en particulier des articles 2 à 10, 28, 30, 32, 33 et 35 du projet.

Il s'agit essentiellement de procéder au dédoublement des différents tribunaux concernés (voir notamment les articles 4, 7, 8, 20 et 39 du projet). Il s'agit ensuite de définir les relations entre les tribunaux dédoublés et les parquets scindés (voir notamment les articles 3, 17, 18, 29, ...).

Il s'agit enfin de déterminer les liens des justices de paix et des tribunaux de police, ainsi que des huissiers, avec les tribunaux dédoublés en différentes matières (voir notamment les articles 6, 28, 30, 32, 33, 34, 35, 39, 40).

L'accord institutionnel redéfinit également les exigences de bilinguisme au niveau des magistrats et du personnel des greffes. Il dispose ainsi que: « Un tiers des magistrats des tribunaux francophones et un tiers des magistrats des tribunaux néerlandophones (en ce compris les deux tribunaux de police de Bruxelles) seront bilingues (connaissance fonctionnelle). Les chefs de corps des tribunaux devront avoir une connaissance approfondie de l'autre langue ».

Ces exigences sont traduites aux articles 57 à 60 du projet qui modifient en ce sens la loi du 15 juin 1935.

L'accord institutionnel tire enfin les conséquences du dédoublement des tribunaux au niveau de la détermination des cadres linguistiques en prévoyant que:

« Il sera créé un cadre linguistique distinct pour les tribunaux néerlandophones et les tribunaux francophones. Dans l'attente de la fixation des cadres, notamment selon la mesure de la charge de travail, le cadre N et le cadre F du tribunal de police, du tribunal du travail et du tribunal de première instance correspondront respectivement à 20 % et 80 % du cadre actuel incluant les magistrats de complément. En ce qui concerne le tribunal de commerce, cette répartition sera de 40 % N et de 60 % F du cadre actuel incluant les magistrats de complément.

Ces exigences de bilinguisme et les cadres adaptés seront aussi applicables aux secrétariats des parquets et au personnel judiciaire.

Les places manquantes seront immédiatement déclarées vacantes et publiées. L'entrée en vigueur de la réforme sera effective dès que les nouveaux cadres seront remplis à 90 %. Les places en surnombre disparaîtront progressivement par extinction (non remplacement des départs) ».

Ces différents éléments se trouvent traduits aux articles 57 à 60 du projet de loi qui prévoient en outre des mesures transitoires supplémentaires destinées à éviter que la réforme puisse porter atteinte au bon fonctionnement de la justice à Bruxelles, tout en incitant toutes les parties concernées à l'exécuter rapidement.

Il a été prévu en particulier qu'il sera de nouveau possible à partir de l'entrée en vigeur de la réforme, de recruter des magistrats pour les tribunaux néerlandophones jusqu'à 27 % du cadre existant. Il sera créé un comité de monitoring pour accompagner la transition afin d'empêcher l'apparition d'un arriéré judiciaire. Le cas échéant, des mesures supplémentaires seront prises comme le recours à des magistrats de complément.

Concernant la scission du parquet

L'accord institutionnel prévoit ce qui suit: « Le parquet sera scindé en un parquet de Bruxelles compétent sur le territoire des 19 communes de la Région de Bruxelles-Capitale et un parquet de Hal-Vilvorde compétent sur le territoire de Hal-Vilvorde.

Le parquet de Hal-Vilvorde sera composé de 20 % du cadre actuel du parquet de Bruxelles (=BHV) incluant les magistrats de complément. Une évaluation de la pertinence de ce pourcentage pourra être réalisée endéans les 3 ans après la mise en œuvre de la réforme, à la demande d'un des deux procureurs du Roi concernés.

Dans l'attente de la fixation des cadres, notamment sur la base de la charge de travail, le parquet de Bruxelles se composera désormais d'un cinquième de néerlandophones, de quatre cinquièmes de francophones. La mesure de la charge de travail ne pourra avoir pour effet de diminuer le nombre de magistrats respectifs dans chaque groupe linguistique. Sur l'ensemble des magistrats un tiers seront bilingues (connaissance fonctionnelle). »

Cette scission est concrétisée par les articles 15 et 18 du projet, par la répartition proposée des magistrats entre les deux parquets et par les dispositions relatives aux cadres linguistiques, comme prévu aux articles 57, 62 et 63.

L'accord institutionnel redéfinit également les exigences portant sur les connaissances linguistiques au niveau des magistrats et du personnel du parquet: « Le parquet de Hal-Vilvorde est composé de magistrats néerlandophones dont 1/3 est bilingue. »

Ces exigences sont inscrites dans les articles 57, 59 et 60 du projet.

L'accord institutionnel prévoit un système de détachement des magistrats francophones au parquet de Hal-Vilvorde dans les termes suivants: « Des magistrats francophones bilingues fonctionnels, correspondant à 1/5 du nombre de magistrats néerlandophones de Hal-Vilvorde, seront détachés du parquet de Bruxelles en vue du traitement par priorité des affaires francophones. Ils prendront ces affaires en charge dès le choix de la langue française par le suspect. Ils sont sous l'autorité du procureur du Roi de Hal-Vilvorde en ce qui concerne l'application des directives de politique criminelle mais sont sous l'autorité hiérarchique du procureur du Roi de Bruxelles. Le nombre de magistrats détachés sera pris en compte dans la fixation du nouveau cadre du parquet de Bruxelles pour compenser le détachement. »

Ce régime est concrétisé dans les articles 14, 15 et 18 du projet concernant la définition des compétences de ces magistrats détachés et dans l'article 57, qui traite des exigences en matière de connaissances linguistiques et de la manière dont ces magistrats sont pris en compte dans les cadres.

L'accord institutionnel prévoit en outre ce qui suit: « Pour la répartition linguistique des affaires tant au parquet de Bruxelles qu'à celui de Hal-Vilvorde, les principes actuels contenus dans la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire seront d'application.

La direction du parquet de Hal-Vilvorde est assurée par un procureur du Roi néerlandophone ayant une connaissance approfondie du français.

La direction du parquet de Bruxelles est assurée par un procureur du Roi de l'autre régime linguistique, ayant une connaissance approfondie de l'autre langue. Il est assisté d'un procureur adjoint d'un autre régime linguistique que le procureur du Roi, ayant une connaissance approfondie de l'autre langue.

Les exigences de bilinguisme et les cadres adaptés seront aussi applicables aux secrétariats des parquets et au personnel judiciaire.

Les places manquantes seront immédiatement déclarées vacantes et publiées. L'entrée en vigueur de la réforme sera effective dès que les nouveaux cadres seront remplis à 90 %. Les places en surnombre disparaîtront progressivement par extinction (non remplacement des départs). »

Ces différents éléments figurent dans les articles 57 et suivants du projet.

L'accord institutionnel prévoit enfin ce qui suit:

« Un comité de coordination sera mis sur pied afin d'assurer la concertation entre le parquet de Bruxelles et le parquet de Hal-Vilvorde, notamment en ce qui concerne les modalités de collaboration des deux parquets et de détachement des magistrats francophones à Hal-Vilvorde. »

Les missions et le fonctionnement du comité de coordination sont réglés dans l'article 16 du projet.

La désignation d'un directeur coordinateur administratif et d'un directeur coordinateur judiciaire ainsi qu'une concertation de sécurité distincte dans les deux arrondissements administratifs sont réglés dans le projet de loi évoqué séparément.

En ce qui concerne l'adaptation de la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire

L'accord institutionnel commence par prévoir de manière générale que: « Les droits actuels de l'ensemble des justiciables de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles sont intégralement préservés, de sorte que les possibilités de changement de langue, telles que prévues à l'heure actuelle dans la législation linguistique et son application, relatives aux défendeurs domiciliés dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, et spécifiquement relatives aux défendeurs domiciliés dans les communes à régime linguistique spécial sont intégralement maintenues.

La législation de 1935 sur l'emploi des langues reste inchangée à l'exception des modifications décrites ci-dessous, nécessaires d'une part, pour garantir les droits linguistiques actuels des francophones de Hal-Vilvorde et des néerlandophones de Bruxelles et, d'autre part, pour tenir compte de la spécificité des six communes périphériques.

Les possibilités de demande de changement de langue existant actuellement seront maintenues mais le cas échéant transformées en demandes de renvoi compte tenu du dédoublement des juridictions ».

Il prévoit ensuite de manière spécifique les différentes modifications auxquelles il doit être procédé. Ces modifications portent essentiellement sur:

— le changement de langue ou le renvoi demandés de commun accord;

— la comparution volontaire devant le tribunal de son choix

— l'encadrement du pouvoir d'appréciation du juge en cas de demande de changement de langue ou de renvoi formulée unilatéralement par le défendeur;

— l'instauration d'un recours spécifique contre les décisions refusant une demande de changement de langue ou de renvoi.

Premièrement, l'accord institutionnel prévoit que:

« Devant les juridictions néerlandophones ou francophones de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, les parties peuvent demander de commun accord le changement de langue ou le renvoi. Le juge fait droit d'office à cette demande par une décision prononcée sans délai.

Pour l'ensemble des arrondissements judiciaires du pays, une nouvelle procédure sera instaurée en ce qui concerne la demande de commun accord de changement de langue ou de renvoi. La demande de commun accord est introduite auprès du greffe de la juridiction concernée. Une procédure écrite est initiée près le magistrat. Dans un délai de 15 jours, le juge rend une ordonnance. À défaut de décision endéans ce délai, l'absence de décision vaut renvoi ou acceptation du changement de langue. Le greffe notifie aux parties et, le cas échéant, au tribunal de renvoi, l'ordonnance ou l'absence d'ordonnance ».

Cette nouvelle procédure est définie à l'article 50 du projet.

Deuxièmement, l'accord institutionnel dispose ce qui suit: « Lorsque les parties sont domiciliées sur le territoire des 19 communes de Bruxelles ou des 35 communes, les parties pourront comparaître volontairement devant le tribunal de la langue de leur choix. À cette fin, il sera rajouté à la suite de l'article 7 de la loi du 15 juin 1935: « Par dérogation aux alinéas précédents, lorsque les parties sont domiciliées dans une des 54 communes de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles et qu'elles parviennent, après la naissance du litige, à un accord au sujet de la langue de la procédure, elles peuvent comparaître de manière volontaire ou introduire une requête conjointe devant les tribunaux néerlandophones ou francophones de leur choix en application de l'article 706 du Code judiciaire ». »

Cette procédure de comparution volontaire, hors le cas des dispositions d'ordre public relatives à la compétence territoriale, est régie par l'article 52 du projet.

Troisièmement, l'accord institutionnel indique que: « En outre, en matière civile, en ce qui concerne les défendeurs domiciliés dans les 6 communes périphériques et dans les 19 communes de la Région de Bruxelles-Capitale, le pouvoir d'appréciation du juge dans le cadre d'une demande de changement de langue/de renvoi devant toutes les juridictions sera limité aux deux motifs suivants: lorsque le changement de langue est contraire à la langue de la majorité des pièces pertinentes du dossier ou à la langue de la relation de travail.

Pour les autorités administratives, la situation reste inchangée et elles restent soumises, si elles introduisent une demande de changement de langue ou de renvoi, au pouvoir d'appréciation du magistrat fondé sur la connaissance de la langue ».

Cet encadrement du pouvoir du juge se trouve traduite aux articles 47, 49 et 51 du projet.

Quatrièmement, l'accord institutionnel prévoit ce qui suit: « Un droit de recours direct et de pleine juridiction devant les tribunaux d'arrondissement F et N réunis sera mis en place en cas de violation de ces droits et garanties procédurales. En cas de parité, la voix du président est prépondérante. La présidence de cette juridiction est assurée alternativement par un magistrat francophone et un magistrat néerlandophone selon un rôle établi en début de chaque année judiciaire. La procédure sera une procédure comme en référé. ».

Cette procédure de recours, qui s'applique aux décisions des tribunaux civils et à celles des tribunaux de police de Bruxelles et de Hal-Vilvorde, est organisée par les articles 9 et 55, qui modifient respectivement le Code judiciaire et la loi du 15 juin 1935.

Sur les dispositions transitoires et l'entrée en vigueur

Le chapitre 5 du projet règle l'entrée en vigueur et prévoit des dispositions transitoires particulières, notamment en ce qui concerne le personnel des greffes et des secrétariats de parquet, en vue de permettre une transition efficace.

C. Proposition de loi visant à créer un arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde et à instituer des tribunaux néerlandophones et francophones dans l'arrondissement de Bruxelles ainsi que la cour d'appel de Louvain (de MM. Bart Laeremans et Jurgen Ceder) (doc. Sénat, nº 5-755/1)

M. Laeremans déclare qu'au départ, la proposition de loi était une réaction à la note de Bart De Wever, laquelle se fondait sur la proposition de loi du sénateur Hugo Vandenberghe et consorts (voir doc. Sénat, nº 4-133/1).

M. Laeremans souhaite d'abord démontrer qu'il est parfaitement possible de réaliser une scission équitable, raisonnable et efficace, offrant aux néerlandophones de Hal-Vilvorde et de Bruxelles des tribunaux fonctionnels. Le résultat final profitera non seulement aux habitants de Hal-Vilvorde, mais aussi à tous les habitants de Bruxelles. La proposition part en effet d'un statu quo certain qui permet d'offrir une alternative que les membres de la commission pourraient accepter en ne perdant nullement la face. L'intervenant espère qu'aujourd'hui, il parviendra à convaincre la commission de l'utilité de sa proposition de loi.

Il souligne que sa proposition ne supprime pas les facilités dont bénéficient les francophones des six communes à facilités. Elles sont garanties dans la loi, pour ne pas dire bétonnées. Les affaires intentées par des francophones sont néanmoins canalisées vers les tribunaux néerlandophones de Hal-Vilvorde. En degré d'appel, on pourra réagir en français à des jugements qui auront été rendus en français dans les justices de paix des trois cantons concernés. Ceci témoigne d'une approche réaliste et du maintien de la situation prévalant actuellement.

Pour les éléments que l'on pourrait néanmoins être amené à modifier, le sénateur Laeremans prévoit une restructuration du système actuel qui peut s'accorder avec les propositions relatives à la réforme du paysage judiciaire, que le gouvernement et la ministre de la Justice préparent actuellement.

D'après M. Laeremans, le dossier à l'examen est malheureusement toujours resté dans l'ombre de celui concernant la scission de l'arrondissement électoral, à n'en pas douter en raison de sa complexité. Pour beaucoup de gens, les tribunaux forment un écheveau impénétrable qui manque de transparence. L'emploi des langues au sein du parquet et devant les tribunaux est régi par la monumentale « loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire », qui date de 1935, mais qui est assez méconnue. Les personnes qui maîtrisent cette matière, comme les magistrats et les avocats, sont généralement partisanes d'un statu quo. Le monde politique n'a cessé de reporter ce dossier, empêchant l'enregistrement de la moindre avancée.

Pourtant, ce dossier était pressant, tout d'abord à cause des habitants de Hal-Vilvorde, et des difficultés linguistiques qui étaient rencontrées, par exemple lors des contacts entre le parquet et la police. En effet, de nombreux magistrats de parquet sont francophones unilingues et ne peuvent dès lors pas communiquer correctement avec la police.

La criminalité à Hal-Vilvorde est traitée en parent pauvre, si bien qu'il règne un sentiment d'impunité. Le parquet de Bruxelles juge la petite criminalité moins essentielle. On a remédié en partie à cette situation en créant une section distincte au sein du parquet bruxellois, mais le sentiment d'impunité persiste. D'autre part, il faut bien reconnaître qu'avec près de 600 000 habitants, soit l'équivalent de l'arrondissement de Termonde, Hal-Vilvorde pourrait constituer un arrondissement à part entière.

Le parquet fonctionne mal et inefficacement, car le ressort est très vaste et la législation très disparate. Les différentes Régions et Communautés ainsi que les provinces forment un écheveau complexe. Il en résulte un taux massif de classement sans suite, qui avoisine les 80 % à Bruxelles, tandis que la réaction à la petite criminalité est très lente et que l'arrondissement judiciaire a fait l'objet d'un audit négatif. La situation s'est améliorée à plusieurs égards avec l'arrivée de M. Bulthé comme procureur du Roi, mais il subsiste un taux de classement sans suite très élevé et un fort sentiment d'impunité. Cela est lié à la situation déplorable du parquet bruxellois, ce qu'admet d'ailleurs lui-même le procureur Bulthé, qui a demandé à plusieurs reprises plus de magistrats du parquet afin d'y remédier.

Selon M. Laeremans, la situation actuelle n'est pas en adéquation avec la structure policière, qui a une orientation plutôt provinciale. Le gouverneur y joue un rôle pilote, qu'il ne peut cependant pas assurer correctement à Bruxelles-Hal-Vilvorde, car il outrepasserait alors son ressort. En outre, la législation pénale s'est de plus en plus différenciée au fil du temps parce que les cultures évoluent dans des sens différents. Cela constitue déjà un motif suffisant en soi pour passer à des systèmes différents.

Les tribunaux, eux non plus, ne sont pas vraiment connus pour leur bon fonctionnement. Ils sont confrontés à un arriéré important, ce qui est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles les francophones sont demandeurs d'une réforme. Les magistrats bilingues sont beaucoup trop peu nombreux et cela a des conséquences sur le fonctionnement des tribunaux, car il n'est pas possible de communiquer correctement. Moins de magistrats bilingues signifie également qu'il faut davantage faire appel à des interprètes, ce qui rend les procédures plus lentes, moins efficaces et, au final, plus longues.

À ces problèmes généraux s'ajoute l'impérialisme bruxellois, qui est également perceptible dans le domaine judiciaire. Hal-Vilvorde est considéré par la loi linguistique de 1935 comme un territoire unilingue, ce à quoi on ne peut toucher, selon M. Laeremans. Cela se manifeste également au niveau du barreau et de la scission asymétrique du barreau opérée au début des années '80. Il existe un barreau bruxellois, compétent pour Hal-Vilvorde, qui s'appelle l'« Ordre néerlandais des avocats du barreau de Bruxelles ». Cet ordre comptait au total 2483 avocats, dont 1912 avaient leur cabinet à Bruxelles et seulement un bon 500 à Hal-Vilvorde. Le barreau de Bruxelles, sans Hal-Vilvorde, est ainsi plus grand que celui d'Anvers. Les francophones sont réunis au sein de l'« Ordre français ». L'Ordre français remet cela en cause puisqu'il souhaite deux tribunaux unilingues pour le même territoire, couvrant donc les 54 communes. En effet, il souhaite gagner des clients à Hal-Vilvorde.

L'impérialisme bruxellois transparaît également dans la proposition de loi de M. Maingain (voir doc. Chambre, nº 53-423/1), qui, si elle était adoptée, rapporterait un double bénéfice aux francophones. Non seulement la proportion de magistrats bilingues serait ramenée de 2/3 à 1/3, mais Hal-Vilvorde serait en outre considéré comme une partie de Bruxelles, où le tribunal francophone serait compétent pour Hal-Vilvorde de la même manière que le tribunal néerlandophone.

Il y a eu, par le passé, plusieurs occasions manquées de mettre en œuvre cette réforme. M. Laeremans fait référence à l'accord de gouvernement flamand de 2004, dans lequel les partis flamands alors dans la majorité, le CD&V/N-VA, le Sp.a-Spirit et le VLD, s'engageaient explicitement à scinder « immédiatement » tant l'arrondissement judiciaire que la circonscription électorale. L'accord de gouvernement prévoyait donc que les partis flamands de la majorité déposeraient ensemble, au plus tard au début de l'année parlementaire (c'est-à-dire au mois d'octobre 2004), une proposition de loi en vue de scinder l'arrondissement judiciaire, et qu'ils l'adopteraient sans délai. Mais aucune proposition de loi collective n'a jamais été déposée. Depuis août 2003, une proposition (doc. Sénat, nº 4-133/1) a néanmoins été déposée par le sénateur CD&V Hugo Vandenberghe. Il ne s'agit cependant pas d'une proposition commune et le texte présentait de sérieux manquements.

Dans sa déclaration gouvernementale d'octobre 2004, le premier ministre de l'époque, M. Verhofstadt, a donné à la ministre PS Onkelinx le choix entre une scission totale et une décentralisation d'une partie du tribunal vers Hal-Vilvorde, ce qui aurait fait de Hal-Vilvorde une sorte de juridiction auxiliaire de Bruxelles. Mme Onkelinx n'a pris aucune initiative pour faire avancer ce dossier. En sa qualité de ministre de la Justice, elle a néanmoins réussi à assouplir les exigences de bilinguisme pour les greffiers, revoyant sérieusement à la baisse le niveau des examens linguistiques de la majorité du personnel des tribunaux bruxellois, de telle sorte qu'il est devenu possible de nommer un contingent beaucoup plus important de francophones (jusqu'en 2004, 70 % du personnel des greffes de première instance et d'appel étaient des néerlandophones).

Trois ans plus tôt, on avait déjà connu un épisode comparable sous le ministre Verwilghen, avec un assouplissement radical des examens linguistiques et la nomination de vingt-cinq juges unilingues « de complément » et de dix-sept magistrats de parquet hors cadre.

Plus tard, sous l'impulsion du ministre de la Justice, M. Stefaan De Clerck, neuf partis de la majorité et de l'opposition ont négocié une modernisation des structures judiciaires dans le cadre de la concertation dite de l'Atomium. La question de BHV était exclue de la concertation. Le 31 mars 2010, un accord fut conclu au sein du gouvernement Leterme, prévoyant certes une réorganisation des tribunaux de première instance basée sur les limites provinciales, mais aussi une réorganisation des tribunaux de commerce et du travail basée sur les limites du ressort de la cour d'appel. Les tribunaux unilingues de Louvain auraient ainsi été absorbés par les tribunaux bilingues de Bruxelles. Une structure aussi complexe ne serait pas seulement totalement impossible à mettre en œuvre, elle représenterait en outre pour les Flamands un grand pas en arrière et non une avancée. Heureusement, cet accord est passé à la trappe avec la chute du gouvernement Leterme.

Ensuite, on a suggéré de procéder à une scission asymétrique de BHV. C'est une idée que Bart De Wever a défendue dans son « Rapport au Roi ». Il proposait d'organiser cette scission en se basant sur l'ancienne proposition de loi Vandenberghe et consorts (voir doc. Sénat, nº 4-133/1), mais en y ajoutant un certain nombre d'éléments. L'idée était de confier l'organisation et le fonctionnement des tribunaux aux Communautés, à l'exception toutefois des tribunaux bruxellois qui continueraient à relever intégralement de la compétence de l'autorité fédérale. La proposition à l'examen réserve aux Communautés un rôle sensiblement plus limité et prévoit uniquement une sorte de droit d'injonction dans les matières qui les concernent et une voix au sein du collège des procureurs généraux.

Mais l'idée d'une scission asymétrique de Bruxelles a fait perdre à la proposition de Bart De Wever une grande part de sa force. Bruxelles restait ainsi fédérale, ce que M. Laeremans trouve parfaitement acceptable. Une justice scindée — la Flandre et la Wallonie fonctionneraient de manière autonome et seule Bruxelles relèverait encore du fédéral — ne serait pas une mauvaise idée. En effet, la justice est la matière par excellence qui pourrait rester fédérale au sein d'une Belgique résiduelle. Or, si Bruxelles est maintenue dans ce cadre, l'arrondissement de Hal-Vilvorde ne peut certainement pas être séparé du reste de la Flandre. C'est essentiel. Si on effectue cette séparation, il y aura à Hal-Vilvorde une politique judiciaire différente de celle menée dans le reste de la Flandre. Hal-Vilvorde se retrouverait ainsi partiellement séparé de la Flandre en matière de justice. Des alternatives sont nécessaires, et il en existe. C'est pour cela d'ailleurs que M. Laeremans a déposé sa proposition de loi.

Quoi qu'il en soit, il est un fait qu'une scission asymétrique ferait obstacle à toute avancée ultérieure vers une plus grande autonomie en matière de justice. Elle aurait en réalité pour conséquence que le tribunal flamand serait compétent pour Bruxelles-Hal-Vilvorde et que le tribunal francophone serait compétent pour Bruxelles. Telle était l'idée de M. Vandenberghe, qui a été reprise par M. De Wever. Ce système, qui demeure encore malgré tout très compliqué, est certes meilleur que le système actuel, mais il ne saurait servir de modèle.

C'est la raison pour laquelle l'intervenant, dans sa propre proposition de loi, se montre critique à l'égard de la proposition de M. Vandenberghe. Elle prévoit en effet le maintien de l'arrondissement judiciaire, ce que M. Laeremans ne souhaite pas. Elle suit le principe du barreau en prévoyant un tribunal francophone pour Bruxelles et un tribunal néerlandophone pour Bruxelles-Hal-Vilvorde. Elle prévoit en même temps un parquet pour Hal-Vilvorde auprès du tribunal néerlandophone. La scission est ainsi totalement achevée. Le parquet prévu pour Bruxelles dépendrait du tribunal francophone et disposerait d'un procureur francophone. Le procureur bruxellois est toujours francophone et exerce l'action publique au tribunal francophone de Bruxelles.

La proposition de M. Vandenberghe établit aussi un parallèle qui n'est pas correct entre Bruxelles et Hal-Vilvorde. Les néerlandophones de Bruxelles bénéficient d'une sorte de statut d'exception puisque, selon la proposition de M. Vandenberghe, ce sont les magistrats flamands du parquet de Hal-Vilvorde qui exerceraient l'action publique pour eux. Le parquet bilingue de Bruxelles ne travaillerait plus sur un pied d'égalité pour les néerlandophones et les francophones de Bruxelles. À Bruxelles, on prévoirait pour les Flamands un ersatz de système par lequel ils seraient en fait rattachés à Hal-Vilvorde. Cela aboutirait à une forte francisation du parquet de Bruxelles. On pourrait parfaitement éviter cela en confiant le fonctionnement du parquet de Bruxelles à un tribunal néerlandophone.

À cet égard, M. Vandenberghe a insisté notamment sur la nécessité de préserver la symbiose entre Bruxelles et son hinterland économique.

À cela, M. Laeremans rétorque que l'on use et abuse de l'argument de la symbiose en vue de favoriser l'élargissement de Bruxelles. L'hinterland doit bien se terminer quelque part et l'arrondissement se limite à la frontière de la province et, a fortiori, aux frontières de la Région. De plus, la Région a une autre réglementation et mène une autre politique.

Par ailleurs, il y a l'argument de l'affaiblissement des positions flamandes à Bruxelles en cas de scission intégrale. M. Laeremans indique qu'il ne s'agit là que d'une hypothèse et qu'il n'a jamais cru à la pertinence de cet argument. Tout d'abord, il fait valoir qu'après la scission, l'Ordre néerlandais (les avocats flamands près le tribunal de Bruxelles) sera le plus grand barreau flamand du pays. On pourrait empêcher la marginalisation des magistrats bruxellois en créant un tribunal néerlandophone distinct à Bruxelles, qui pourrait affronter la concurrence du tribunal francophone. Les Bruxellois n'ont pas toujours une identité linguistique — néerlandophone ou francophone — clairement déterminée et sont donc appelés à un moment donné à choisir le tribunal auquel ils souhaitent s'adresser. Le développement d'une saine concurrence pourrait peut-être contribuer à améliorer l'administration de la justice.

M. Laeremans plaide en faveur d'une scission complète de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles en deux arrondissements distincts. Selon l'intervenant, pareille scission se justifie pour les raisons suivantes:

— Avec plus de 580 000 habitants, Hal-Vilvorde est, en taille, le sixième arrondissement du pays. Il représente, de surcroît, un acteur économique important, comparable à l'arrondissement de Gand;

— Une scission complète permettra de mettre un terme à l'impérialisme bruxellois francophone plus efficacement que ne le ferait une scission asymétrique complexe, qui maintiendrait l'arrondissement de Bruxelles;

— La tendance est d'organiser la justice à l'échelle provinciale. M. Laeremans fait remarquer que tel est déjà le cas pour l'organisation des cours d'assises et le contentieux fiscal. Le Brabant flamand doit donc être traité comme une province à part entière;

— Une scission asymétrique empêcherait la Flandre de devenir pleinement compétente pour la politique judiciaire à Hal-Vilvorde et tuerait dans l'œuf toute nouvelle avancée vers l'autonomie flamande en matière de justice;

— Si l'on procède aujourd'hui à une scission incomplète, il faudra à nouveau mener un long combat en vue d'une prochaine scission, complète cette fois, ce qui nécessitera, une fois de plus, beaucoup d'investissement en temps et en énergie;

— La scission intégrale de l'arrondissement peut se faire sans porter préjudice aux Bruxellois néerlandophones ou francophones. Au contraire, pareille scission serait bénéfique aux deux groupes linguistiques.

M. Laeremans plaide concomitamment pour une scission du ressort de la cour d'appel de Bruxelles et la création de la cour d'appel de Louvain. Cette solution innovante créera donc trois cours d'appel distinctes en Flandre: la cour d'appel d'Anvers, la cour d'appel de Gand et la cour d'appel de Louvain. Cette dernière serait compétente pour le Limbourg et le Brabant flamand.

Les arguments qui sous-tendent cette proposition sont les suivants:

— L'accord du gouvernement Leterme du 31 mars 2010 prévoyait d'organiser les tribunaux de commerce et les tribunaux du travail par ressort. Les tribunaux du ressort de Louvain auraient donc été absorbés par les tribunaux bruxellois bilingues. Or, le seul moyen d'empêcher une telle réorganisation est de faire dépendre les arrondissements de Hal-Vilvorde et de Louvain d'une nouvelle cour d'appel;

— Si la Flandre devenait compétente pour le fonctionnement et l'organisation des tribunaux et des cours, à l'exception unique de Bruxelles, il serait capital que le Brabant flamand puisse bénéficier du même régime que les quatre autres provinces;

— Depuis des années, le Limbourg demande à disposer de sa propre cour d'appel et ne plus dépendre de la cour d'appel d'Anvers. La création d'une nouvelle cour d'appel à Louvain constituerait une solution intermédiaire acceptable. Outre que Louvain est plus facilement accessible qu'Anvers, le but serait aussi que la cour d'appel siège à Hasselt, comme la cour du travail le fait déjà. De cette manière, avec 1,8 million d'habitants, le nouveau ressort Brabant flamand/Limbourg aurait une importance similaire à celle des cours d'appel d'Anvers (1,7 million d'habitants) et de Gand (2,6 millions d'habitants);

— La création d'une troisième cour d'appel en Flandre est justifiée au regard de la répartition linguistique dans notre pays. La présence de trois cours d'appel en Flandre, de deux cours en Wallonie et d'une cour bilingue à Bruxelles correspond à la proportion 60/40 en Belgique. Cette proportion se reflète également au sein du collège des procureurs généraux, dont la composition sera déterminée désormais sur la base d'une proportion de 4/3 au lieu de la parité linguistique (en tenant compte du fait que le procureur fédéral siège également au collège des procureurs généraux).

M. Laeremans concède que la création d'une nouvelle cour d'appel n'est pas conforme à l'article 156 de la Constitution actuelle. Ledit article n'a pas été ouvert à révision, mais ce n'est pas, pour l'orateur, un problème insurmontable puisque l'article 195 relatif à la révision de la Constitution est, quant à lui, ouvert à révision.

En conclusion, M. Laeremans résume les lignes de force de la présente proposition:

En ce qui concerne la nouvelle cour d'appel de Louvain:

— Hal-Vilvorde formera, avec Louvain et le Limbourg, un nouveau ressort et représentera près de 1,8 millions d'habitants;

— La cour d'appel de Louvain siégera à Louvain, Hasselt et Asse (Hal-Vilvorde). Elle sera composée de 35 conseillers (14 magistrats venant d'Anvers et 21 magistrats de Bruxelles);

— Le parquet général comprendra 17 magistrats (6 magistrats venant d'Anvers, 7 magistrats de Bruxelles et 4 nouveaux magistrats);

— La cour du travail sera composée de 8 conseillers (4 magistrats venant d'Anvers, 2 magistrats de Bruxelles et 2 nouveaux magistrats);

— L'auditorat-général sera composé de 4 magistrats (2 magistrats venant d'Anvers, 1 de Bruxelles et 1 nouveau magistrat);

— Il ne faudrait donc que 7 nouveaux magistrats afin de créer cette nouvelle cour d'appel de Louvain.

En ce qui concerne la cour d'appel de Bruxelles:

— La cour d'appel et la cour du travail de Bruxelles verront leur ressort territorial limité au territoire de la Région de Bruxelles-Capitale (19 communes), le ressort de la cour d'appel de Mons, qui ne couvrait jusqu'à présent que le Hainaut, étant étendu au Brabant wallon;

— Par cette mesure, la population du ressort de la cour d'appel de Bruxelles diminuerait ainsi de 57 % (de 2,482 millions d'habitants à 1,053 millions). Bien qu'il ne resterait plus que 43 % des habitants du ressort actuel, la cour d'appel conserverait néanmoins 64 % de ses magistrats. Cette mesure très favorable pour Bruxelles tient compte également des compétences spécifiques attribuées à cette cour et des tâches plus larges auxquelles sont confrontés les tribunaux en milieu urbain. Une présence de magistrats néerlandophones est en outre garantie;

— La cour sera composée de deux sections linguistiques distinctes;

— Un quart des magistrats (25 %) en question devront être titulaires d'un diplôme délivré en langue néerlandaise (bien que l'intervenant pourrait souscrire à une répartition 80 % francophones/20 % néerlandophones dans le cas précis de ce ressort, critère appliqué par ailleurs dans l'enseignement);

— Les fonctions de président de la cour d'appel et de la cour du travail, de procureur général et de procureur fédéral seront alternativement occupées par des francophones et des néerlandophones;

— Tous les magistrats devront justifier au minimum d'une connaissance passive de l'autre langue nationale, et deux tiers (au lieu d'1/3) d'entre eux devront fournir la preuve d'une connaissance suffisante de l'autre langue;

— La cour d'appel dans cette nouvelle configuration comporterait non plus 32 magistrats francophones et 30 magistrats néerlandophones mais 27 magistrats francophones et 9 néerlandophones. 21 magistrats néerlandophones et 5 francophones seraient ainsi déplacés respectivement vers Louvain et Mons.

En ce qui concerne l'arrondissement de Bruxelles:

— L'arrondissement de Bruxelles sera limité au territoire de la Région de Bruxelles-Capitale (19 communes);

— Les tribunaux et les parquets de Bruxelles conserveront 90 % de leurs effectifs, malgré une diminution de 36 % du nombre de justiciables.

— La situation des justices de paix (bilingues) restera inchangée;

— Il y aura des tribunaux de police distincts avec une répartition 25 %/75 % qui correspondrait aussi à la charge de travail des magistrats néerlandophones et francophones;

— Des tribunaux de police, du travail, de première instance et de commerce unilingues francophones et néerlandophones seront mis en place;

— Vu le caractère unilingue de ces tribunaux, les exigences linguistiques sont assouplies (un tiers de bilingues dans chaque tribunal au lieu de deux tiers) même si, idéalement, tout magistrat devrait être bilingue dans une ville bilingue;

— Chaque juge unique (néerlandophone ou francophone) devra toujours démontrer sa connaissance de la seconde langue car il doit être à même de lire des pièces d'un dossier rédigé dans une autre langue;

— Dans le cas d'une chambre collégiale, au moins un des trois juges devra posséder cette connaissance;

— Au moins la moitié du cadre des greffes devra également posséder cette connaissance;

— Un quart au moins des magistrats du parquet seront néerlandophones et un quart au moins francophones. Le cadre restant serait rempli par les magistrats disponibles qu'ils soient francophones ou néerlandophones;

— Par ailleurs, le procureur et le premier substitut ayant le rang le plus élevé seront alternativement francophones et néerlandophones. Tous les magistrats du parquet et de l'auditorat devront au minimum justifier d'une connaissance passive de l'autre langue;

— Le cadre total de ce parquet serait de 101 magistrats, ce qui correspond au cadre actuel du parquet de Bruxelles.

M. Anciaux indique qu'il a du mal à suivre le raisonnement de M. Laeremans selon lequel la répartition proposée entre magistrats unilingues et bilingues (1/3 de bilingues et 2/3 d'unilingues) serait acceptable pour Bruxelles mais pas pour l'arrondissement BHV.

M. Laeremans précise que sa critique fondamentale ne porte pas sur l'assouplissement des conditions liées au bilinguisme à Bruxelles. Il peut comprendre que les francophones ont milité pour une scission pour éviter le problème du bilinguisme, ce d'autant plus que ce sont surtout les néerlandophones qui remplissent le cadre bilingue. Il devient également difficile de trouver des magistrats bilingues parmi les néerlandophones.

Par ailleurs, il existe une grande différence entre les tribunaux bilingues et les tribunaux unilingues. Pour ceux-ci, il est logique de réduire le nombre de magistrats bilingues. Toutefois, l'intervenant revendique en contrepartie, l'obligation pour le juge siégeant seul d'avoir une connaissance de la seconde langue. De même, dans une chambre collégiale, au moins un juge devrait avoir cette connaissance. Enfin, il importe d'introduire une nouvelle disposition imposant une connaissance minimale et passive de la seconde langue pour tous les magistrats et employés de greffe. M. Laeremans met l'accent sur l'importance de cette dernière proposition qui devrait à tout le moins être adoptée et reprise dans le projet de loi en discussion. Pour l'orateur, c'est un minimum que l'on puisse à ce niveau lire et comprendre une décision judiciaire rédigée dans la deuxième langue. Pourquoi l'exige-t-on des policiers actifs à Bruxelles et non pas de magistrats ?

L'assouplissement des quotas de bilingues de 2/3 à 1/3 devrait donc être compensé par l'obligation pour les nouveaux magistrats et employés de greffe de posséder une connaissance, ne fût-ce que passive, de la deuxième langue.

En ce qui concerne l'arrondissement Hal-Vilvorde

Dans la proposition de loi nº 5-755/1 que M. Laeremans a déposée, Hal-Vilvorde deviendrait un arrondissement à part entière, doté de ses propres tribunaux de première instance, de commerce et du travail. Le siège du tribunal serait établi à Hal, avec une antenne à Vilvorde où se tiendraient également des audiences.

Les cadres de ces tribunaux se situeraient entre ceux de l'arrondissement de Louvain et ceux de l'arrondissement de Gand, qui sont relativement comparables au niveau du nombre d'habitants. De manière globale, la création d'un nouvel arrondissement Hal-Vilvorde nécessiterait l'extension des cadres globaux à concurrence de huit postes de magistrats néerlandophones.

M. Laeremans souligne que la réforme en profondeur qu'il propose, et qui assurerait un meilleur fonctionnement des tribunaux, tant à Bruxelles qu'à Hal-Vilvorde, pourrait être réalisée moyennant une augmentation totale des cadres d'à peine quinze unités. À titre comparatif, les propositions déposées par la majorité institutionnelle prévoient une augmentation des cadres à concurrence de quarante unités.

La proposition de loi nº 5-755/1 prévoit en outre de maintenir la législation linguistique actuelle, y compris en ce qui concerne les facilités, à ceci près que les appels des jugements rendus en français par les justices de paix seraient traités par des juges de Hal-Vilvorde (et plus par des juges de Bruxelles). Il est également proposé de mettre fin aux possibilités excessives offertes aux francophones (y compris en dehors des communes à facilités) d'exiger le renvoi à Bruxelles d'une affaire devant le tribunal de police.

L'orateur pense qu'il faudrait quitter la logique suivie au début du XXe siècle selon laquelle le justiciable a le droit d'être jugé dans sa langue. Face à l'augmentation du nombre d'allophones, il serait plus simple de prévoir que les personnes ne parlant pas le néerlandais pourraient faire appel aux services d'un interprète plutôt que de renvoyer l'affaire.

En conclusion, M. Laeremans souligne que la proposition de loi nº 5-755/1 permet de scinder complètement l'arrondissement judiciaire de Bruxelles ainsi que le ressort de la cour d'appel de Bruxelles, sans augmenter massivement le nombre de magistrats. Elle permet d'améliorer et de simplifier les procédures à Bruxelles. Les tribunaux néerlandophones séparés qui seraient créés à Bruxelles seraient parfaitement viables.

Le parquet de Bruxelles serait également scindé. Le cadre actuel se compose de 92 magistrats dont 31 néerlandophones et 61 francophones. Dans le système proposé par l'orateur, 11 magistrats du parquet de Bruxelles seraient mutés à Hal-Vilvorde dont le parquet serait renforcé par 7 nouveaux magistrats.

L'orateur est convaincu que sa proposition aboutirait à une justice plus efficace, sans grande augmentation des coûts. Les parquets de Bruxelles et de Hal-Vilvorde pourraient se concentrer sur les phénomènes criminels qui sont propres à leur arrondissement. La criminalité n'est en effet pas de même nature à Bruxelles et dans la périphérie. Par ailleurs, cette proposition ne crée pas d'obstacles si l'on devait, à l'avenir, aller vers une plus grande autonomie des Régions en matière de justice. Enfin, sa proposition de loi respecte pleinement la province de Brabant flamand alors que les textes proposés par la majorité institutionnelle font de Hal-Vilvorde une zone bilingue adossée à Bruxelles.

IV. DISCUSSION GÉNÉRALE

M. Laeremans trouve que les propositions de la majorité institutionnelle sont extrêmement injustes pour les habitants de Hal-Vilvorde. Les chiffres utilisés à l'appui de cette réforme mystifient la population. Cette réforme a suscité une levée de boucliers de toute une série d'instances et d'acteurs. L'intervenant propose d'organiser des auditions pour donner l'occasion à toutes ces voix de s'exprimer. A défaut, il sera dans l'obligation de reprendre tous les arguments avancés par ces différents acteurs pour dénoncer l'ineptie des textes à l'examen. Entendre les représentants de ces instances serait la façon la plus efficace de tenir un débat de fond sur les réformes proposées.

M. Vanlouwe se rallie à cette dernière suggestion.

Les dispositions à l'examen sont le maillon le plus faible de toute la réforme de l'État, en tout cas pour les partis flamands. C'est pourquoi l'intervenant souhaiterait que la majorité institutionnelle engage le débat avec les divers acteurs du monde judiciaire. La majorité osera-t-elle écouter les personnes qui travaillent sur le terrain ? Est-elle disposée à organiser des auditions, comme l'a demandé l'intervenant ? Et pourrait-elle exposer les raisons pour lesquelles elle s'opposerait, le cas échéant, à des auditions ?

L'intervenant aimerait entendre les personnes ou groupements suivants (plusieurs d'entre eux ayant personnellement émis le souhait d'être entendus):

— les deux coprésidents du Conseil supérieur de la Justice, qui pourraient commenter l'avis qu'ils ont déjà émis à ce sujet;

— des représentants du « Stuurgroep BHV »;

— des représentants de l'Union nationale des Magistrats;

— des représentants de l'Orde van Vlaamse Balies;

— des représentants de l'Ordre des barreaux francophones et germanophone de Belgique;

— des représentants de la Fédération nationale des Greffiers près les Cours et Tribunaux. L'intervenant renvoie à cet égard à la lettre ouverte adressée par cette fédération aux parlementaires.

M. Laeremans qui souhaite aussi l'organisation d'auditions dans le cadre de cette réforme, estime que l'argument du temps ne peut être invoqué en l'espèce, étant donné qu'au 26 juin, la commission dispose encore d'un délai de près d'un mois jusqu'au 21 juillet.

L'intervenant souhaite que la commission entende les personnes suivantes:

— Mme Gaby van den Bossche, présidente du tribunal du travail de Bruxelles;

— Mme Anouk Devenyns, vice-présidente du tribunal de première instance de Bruxelles;

— M. Luc Hennart, président du tribunal de première instance;

— M. Antoon Boyen, premier président de la cour d'appel de Bruxelles;

— M. Christian Denoyelle, président de l'Union nationale des Magistrats;

— Mme Francine de Tandt, présidente du tribunal de commerce;

— M. Patrick Lenvain, doyen des juges de police, et éventuellement son collègue francophone Edgard Boydens, président de l'OVB;

— M. Hugo Vandenberghe, bâtonnier à Bruxelles;

— M. Hugo Van Eecke, ancien doyen de l'Ordre national, ancien fondateur de l'Ordre néerlandais des avocats du barreau de Bruxelles;

— Procureur Bruno Bulthé, et M. le Procureur général Marc de le Court;

— un représentant du Conseil supérieur de la Justice (N/F);

— un représentant de la Fédération nationale des Greffiers près les Cours et Tribunaux (CENEGER).

La Fédération des greffiers a envoyé une lettre ouverte à tous les parlementaires dans laquelle elle s'exprime en ces termes:

« On doit réaliser que, probablement, aucune justice ne pourra être rendue dans les délais raisonnables sans suffisamment de greffiers soutenus par un sous-effectif du personnel de greffe. Entre-temps, la proposition de loi est défendue par les politiciens avec une persistance incroyable et une totale méconnaissance de la réalité. »

M. Delpérée s'insurge contre une telle attitude qui est digne, selon lui, d'un régime fasciste, dans la mesure où elle entend contester la légitimité des autorités élues.

L'intervenant souhaiterait également entendre Jo Baret, ancien directeur de la cellule stratégique du ministre de la Justice Stefaan De Clerck. M. Baret a été mis en cause, car il est à la base des chiffres erronés qui ont conduit à l'échec de l'accord actuel. Il devrait prochainement accéder à une très haute fonction au sein du SPF Justice.

M. Beke souhaite protester contre les procès d'intention visant certaines personnes. Il est disposé à discuter de l'exactitude des chiffres et de leur origine, mais il n'accepte pas les attaques dirigées contre des personnes déterminées. En effet, M. Baret a été admis à la retraite.

M. Laeremans insiste pour que l'on convoque au moins une des personnes proposées. Le Parlement ne peut pas travailler dans une tour d'ivoire sans connaître l'opinion des personnes concernées.

M. Anciaux revient sur l'affirmation de MM. Vanlouwe et Laeremans selon laquelle il serait grave de ne pas prendre connaissance de l'opinion des orateurs proposés en ce qui concerne la réforme.

Il réfute cette affirmation: ce n'est pas parce qu'aucune audition n'est organisée que les huit partis de la majorité ne connaissent pas le dossier ni le point de vue des personnes concernées. L'intervenant peut ainsi démontrer qu'il y a eu une correspondance et un échange d'informations avec le Conseil supérieur de la Justice, la Fédération nationale des Greffiers près les Cours et Tribunaux, etc.

Le débat sur les projets de loi et propositions à l'examen doit être mené au Parlement. Affirmer que les auteurs ne connaissent pas le point de vue des personnes qui n'ont pas été auditionnées est une contre-vérité. Les auteurs ont été mis formellement au courant, et l'intervenant n'a pas entendu le nom d'un seul orateur n'ayant pas pu faire connaître son point de vue.

Il n'a donc entendu aucun argument démontrant que les auditions demandées seraient d'une importance cruciale.

M. Delpérée rejoint les propos de M. Anciaux pour plusieurs raisons.

D'abord, M. Vanlouwe s'offusque de ce qu'on puisse scinder l'arrondissement judiciaire de BHV sans procéder à des auditions. Or, il ne s'agit absolument pas d'une scission mais d'un dédoublement des tribunaux à Bruxelles.

En second lieu, il constate que toutes les personnes qui, selon le Vlaams Belang et la N-VA, devraient être entendues se sont déjà exprimées. Il se réfère à cet égard aux écrits, mémorandums et lettres ouvertes. Les partis de la majorité savent lire et écouter. En quoi une comparution en personne au cours d'une audition en commission des Affaires institutionnelles apporterait-elle une plus-value ?

En troisième lieu, les sénateurs qui plaident pour ces auditions oublient qu'il faut avant tout entendre les représentants des citoyens et des justiciables. Il revendique la souveraineté du parlement contre le monde des lobbys.

En dernier lieu, il s'oppose à ce qu'on insulte les magistrats: certains se font traiter de menteurs par des sénateurs et doivent « comparaître » pour répondre de leurs chiffres et discours. Il ne peut tolérer de tels abus. Les auditions n'ont dès lors pas lieu d'être.

M. Vanlouwe revient sur la prétendue absence d'arguments appuyant la nécessité d'organiser des auditions. Les partis de la majorité oseraient-ils mener le débat ? Ce serait pourtant la meilleure façon de réfuter les arguments des orateurs qu'il propose d'entendre. Force lui est de constater que la majorité ne le souhaite pas mener.

Il déplore également au plus haut point que certains sénateurs considèrent par exemple que la position défendue par la Fédération nationale des greffiers relève du fascisme.

Il formule dès lors une ultime proposition en demandant l'audition de M. Hugo Vandenberghe, Bâtonnier de l'Ordre néerlandais des avocats du barreau de Bruxelles.

M. Laeremans rappelle qu'il n'y a pas de consensus sur les chiffres. Stefaan De Clerck a certifié à la Chambre que ses chiffres étaient corrects. Cela ne correspond pas à la réalité car ces chiffres ont été clairement contredits.

D'après l'intervenant, l'argument décisif est celui qui renvoie à l'avis du Conseil d'État sur le projet de loi 5-1674 (voir doc. Chambre nº 53-2140/2, p. 23):

« Les développements de la proposition de loi et, en particulier, le commentaire de la disposition examinée ne fournissent aucune information quant à la manière dont ces clés de répartition ont été établies. Si, comme l'intention en est exprimée dans le commentaire de l'article, la proposition de loi entend lutter contre l'arriéré judiciaire, les chambres législatives doivent être en mesure de justifier que les pourcentages retenus sont en rapport raisonnable avec l'objectif poursuivi, tant en ce qui concerne les tribunaux francophones et néerlandophones qu'en ce qui concerne les magistrats du parquet et le personnel d'appui. L'attention est, à cet égard, attirée sur la responsabilité que l'État législateur est susceptible d'encourir en cas de dépassement du « délai raisonnable ».

Il refuse dès lors de prendre des décisions erronées sur la base de données fautives.

La commission soumet au vote la proposition de Messieurs Laeremans et Vanlouwe visant à organiser des auditions. Celle-ci est rejetée par 9 voix contre 5.

M. Vanlouwe déplore vivement le manque d'audace des partis de la majorité qui, à l'évidence, n'osent pas engager le débat.

Il renvoie aux déclarations de M. Fernand Keuleneer, avocat au barreau de Bruxelles, ancien président de la « Vlaams Pleitgenootschap » auprès du barreau de Bruxelles et ancien membre du Conseil de l'Ordre et de l'Assemblée générale de l'Ordre des barreaux néerlandophones (OVB):

« L'accord sur BHV est un fiasco sur toute la ligne. Au lieu de régler les problèmes, il ne fera qu'en créer. Et les dernières modifications aggraveront encore les choses. C'est un énorme gâchis. » (traduction — Source: Knack).

Mme Gaby Van den Bossche, présidente du tribunal du travail de Bruxelles, déclare pour sa part: « On voit, d'après des échanges d'e-mails, que dans le dossier BHV, on a fait n'importe quoi ».

Et l'intervenant de rapporter d'autres propos de M. Fernand Keuleneer:

« Dans le cadre de la réforme de l'arrondissement judiciaire, le CD&V, l'Open VLD, le sp.a et Groen n'ont pas vendu les intérêts flamands, et pour cause. Quand on vend quelque chose, on reçoit autre chose en retour. Or, ici, ils ont tout cédé gratuitement ... ».

L'intervenant montrera dans le cadre de son intervention qu'en réalité, les partis flamands de la majorité ont fait dix cadeaux aux francophones.

Il commence par présenter un aperçu concret des chiffres relatifs à l'arrondissement de BHV.

L'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde est l'un des 27 arrondissements judiciaires du pays. Il coïncide avec l'arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde et s'étend sur deux Régions, à savoir Bruxelles et la Flandre. Par ailleurs, il s'étend aussi sur deux régions linguistiques: la région bilingue de Bruxelles et la région de langue néerlandaise.

Au total, il couvre 54 communes, dont les 19 communes bruxelloises et les 6 communes flamandes à facilités. L'arrondissement de BHV compte 1,63 million d'habitants, dont 584 000 à Hal-Vilvorde.

L'arrondissement judiciaire d'Anvers compte 1,2 million d'habitants alors que les arrondissements judiciaires de Gand, Liège, Termonde et Charleroi en comptent environ 600 000.

L'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde est donc un « super-arrondissement ».

Selon une étude du Conseil supérieur de la Justice, l'effectif du tribunal de première instance se compose de 210 néerlandophones (dont 39 juges) et de 323 francophones (dont 96 juges). La proportion de néerlandophones et de francophones dans l'ensemble du personnel du tribunal est respectivement de 39,4 % et de 60,6 %. En 2010, on a dénombré 11 855 nouvelles affaires du côté néerlandophone (31,4 %) contre 25 891 du côté francophone (68,6 %).

Toujours selon l'étude du Conseil supérieur de la Justice, le volume des affaires dont le tribunal du travail a été saisi en 2011 s'établit à 5 962 du côté néerlandophone (29,5 %) et à 14 238 du côté francophone (70,4 %).

En 2010, le nombre d'affaires nouvelles portées devant le tribunal de commerce s'est élevé à 17 388, dont 39,9 % étaient néerlandophones et 60 % francophones.

En 2011, au tribunal de police de Bruxelles, 7 238 dossiers néerlandophones (13,4 %) ont été introduits contre 46 644 dossiers francophones (85,6 %). En revanche, pour ce qui est des affaires civiles entrantes (qui sont généralement plus graves et plus complexes), les proportions sont différentes: on a dénombré 503 affaires néerlandophones (30,17 %) et 1 164 affaires francophones (69,83 %), avec une tendance à la hausse pour le nombre total d'affaires néerlandophones.

À l'heure actuelle, BHV est un arrondissement judiciaire unique qui compte un tribunal de première instance, un tribunal du travail et un tribunal de commerce. Ces tribunaux sont composés de chambres néerlandophones et de chambres francophones. En outre, il y a aussi des tribunaux de police et des justices de paix. Les juges des tribunaux de police et les juges de paix à Bruxelles et dans les six communes à facilités sont bilingues et traitent au cours d'une même audience aussi bien des litiges en français que des litiges en néerlandais, selon la langue définie par la loi.

La langue de la procédure est réglée par la loi linguistique de 1935. Celle-ci détermine la langue dans laquelle la procédure est entamée et menée. La situation diffère selon qu'il s'agit d'affaires civiles ou d'affaires pénales.

En matière pénale, l'inculpé a toujours le droit de s'exprimer dans sa propre langue et de demander que les audiences du tribunal se déroulent en français ou en néerlandais.

En matière civile, la réglementation est différente. Et à BHV, elle part de la distinction opérée entre les compétences « intra-muros » et « extra-muros ».

« Extra-muros »: si les tribunaux civils de BHV siègent sur la base de leur compétence territoriale et que ce territoire est une localité de Flandre, ils fonctionnent alors comme un tribunal flamand de n'importe quel endroit de Flandre. Prenons l'exemple d'un litige locatif relatif à un logement situé à Vilvorde. Dans ce cas, la localisation du logement détermine le tribunal compétent. La citation doit être rédigée en néerlandais et la procédure menée dans cette langue. Ce n'est que lorsque le défendeur (par exemple le propriétaire du logement qui est assigné par le locataire) habite dans une des six communes à facilités qu'il peut demander un changement de langue. Mais le juge peut rejeter cette demande. (Soit dit en passant, d'après la législation linguistique, cet avantage n'échoit pas aux défendeurs qui résident dans les 19 communes de Bruxelles, mais en pratique, il leur est souvent accordé.) Il faut dire qu'un changement de langue est toujours possible lorsque toutes les parties à un litige civil acceptent de faire examiner l'affaire dans une autre langue nationale, mais c'est le cas partout en Belgique.

Les litiges intra-muros sont ceux où la compétence territoriale du tribunal est déterminée par une localisation dans l'une des 19 communes bruxelloises. Ils incluent également les litiges pour lesquels un des critères de rattachement territoriaux se trouve dans les 19 communes de Bruxelles. Mais le principe est ici différent. Le demandeur choisit lui-même la langue de la citation et toute la procédure se déroule dès lors dans cette langue, sauf si le défendeur demande un changement de langue in limine litis, qui est alors soumis à l'appréciation du juge.

La législation linguistique prévoit par ailleurs qu'à Bruxelles, au moins un tiers des magistrats des tribunaux de première instance, de commerce, du travail, du parquet et de l'auditorat du travail doivent posséder un diplôme délivré en néerlandais et au moins un tiers un diplôme délivré en français. En outre, deux magistrats sur trois doivent avoir une connaissance « approfondie » de l'autre langue. Ils doivent présenter un examen linguistique pour justifier de cette connaissance. Cette condition crée de grandes difficultés sur le terrain parce qu'on ne parvient pas à trouver suffisamment de magistrats bilingues, ce qui pose surtout problème pour les francophones.

L'intervenant trouve incompréhensible que dans une ville bilingue comme Bruxelles, on ne parvienne pas à trouver suffisamment de juges bilingues. Il est curieux de constater qu'au cours des quarante dernières années, tout n'a pas été mis en œuvre pour organiser des formations en langues et autres à l'intention des juristes pour les aider à réussir l'examen de bilinguisme. À côté de cela, l'intervenant trouve aussi qu'il y a trop peu de magistrats francophones. Les partis francophones sont opposés de longue date à cette distinction entre compétence intra-muros et compétence extra-muros. Ils souhaitent que le droit au changement de langue (intra-muros) soit appliqué sur l'ensemble du territoire de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Ainsi, les justiciables francophones auraient accès à une procédure en français dans l'ensemble de l'arrondissement. L'intervenant cite M. Fernand Keuleneer: « Les francophones ont constaté avec étonnement que les Flamands accueillaient la scission avec énormément d'enthousiasme ». (traduction)

La N-VA a toujours été partisane de la scission de Bruxelles-Hal-Vilvorde, non pas pour le plaisir de scinder, mais parce qu'elle estime que lorsqu'une réforme a tout à gagner d'une scission, il faut procéder à cette scission. Bruxelles compte environ 1 600 000 justiciables et est donc un véritable mastodonte par rapport aux autres arrondissements. Une réforme du paysage judiciaire est pertinente lorsqu'elle s'organise au niveau provincial et ce serait une bonne solution pour le Brabant flamand et pour Bruxelles.

La N-VA est favorable à la scission de l'arrondissement parce qu'elle est parfaitement conforme à la logique constitutionnelle et légale et que l'arriéré judiciaire est important, ce qui crée un sentiment d'impunité. Vu le nombre d'infractions et de délits commis dans cet arrondissement, il y a moins de poursuites et de condamnations effectives, d'où la pertinence de créer un arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale avec une scission horizontale asymétrique.

En outre, la N-VA trouve important que l'on précise une fois pour toutes où se trouve la frontière linguistique, où se termine la Région bilingue de Bruxelles-Capitale et où commence réellement la Région flamande unilingue. Les francophones qui viennent habiter en Flandre sont les bienvenus, mais ils doivent comprendre qu'ils vont habiter dans une région qui parle une autre langue. Que l'on habite Dilbeek ou Alost, le constat est identique.

L'intervenant cite les propos du secrétaire d'État Verherstraeten à la Chambre, qui se dit « Il est parfaitement convaincu que la réforme contribuera à résorber l'arriéré judiciaire ». Pour l'intervenant, cette affirmation est démentie par les chiffres publiés par le Conseil supérieur de la Justice. L'arriéré judiciaire augmentera surtout du côté néerlandophone. Pour le tribunal du travail, les statistiques 2011 sont les suivantes: il y a eu un flux entrant de 5 962 dossiers et un flux sortant de 4 323 dossiers. L'intervenant est conscient que tous les dossiers n'entrent et ne sortent pas tous la même année mais c'est le seul critère objectif dont on dispose jusqu'à présent. Pour 2011, l'arriéré judiciaire du tribunal du travail s'élevait à 1 638 dossiers (flux entrant — flux sortant). Actuellement, ces affaires sont traitées par neuf juges du travail. Si l'on applique la règle 20/80, il ne subsistera que cinq juges du travail pour traiter ces 5 962 dossiers. À proportions égales, cela signifierait qu'ils ne pourront traiter que 2 594 dossiers. L'arriéré judiciaire atteindrait dès lors 3 368 dossiers, soit à peu près le double de la situation actuelle. C'est donc surtout du côté néerlandophone que l'arriéré judiciaire augmentera. Si l'on effectue le même calcul sur la base de la mesure transitoire de 27 % de juges néerlandophones, 7 juges du travail seraient en activité et pourraient traiter 3 502 dossiers. Cela signifie qu'il y subsisterait encore un arriéré judiciaire de 2 460 dossiers, soit une nouvelle augmentation.

Selon l'intervenant, il est intéressant d'effectuer également le calcul du côté francophone. Les juges du travail y sont actuellement au nombre de 18. En 2011, il y a eu 14 238 nouveaux dossiers tandis que 11 308 dossiers ont été traités. L'arriéré judiciaire du côté francophone est donc de 2 930 dossiers. Si l'on appliquait le pourcentage proposé de 80 %, le nombre de juges du travail francophones passerait de 18 à 21, ce qui permettrait de traiter 13 570 dossiers. L'arriéré judiciaire ne serait dès lors plus que de 668 dossiers. Il se réduirait donc du côté francophone mais augmenterait du côté néerlandophone.

Un calcul similaire peut être effectué pour le tribunal du commerce, où, là aussi, l'arriéré judiciaire augmenterait du côté néerlandophone.

M. Anciaux fait remarquer que le calcul de M. Vanlouwe est réalisé pour l'année 2011, qui est par hasard celle pendant laquelle l'arriéré judiciaire du côté francophone a atteint son niveau le plus bas des dernières années.

Par ailleurs, selon l'intervenant, deux grandes périodes doivent être prises en considération dans l'évaluation de la scission de l'arrondissement judiciaire et du parquet de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Il y a tout d'abord une période de transition, qui aboutira à une situation définitive. La période de transition est sévèrement critiquée et considérée comme une défaite pour les néerlandophones, alors qu'il ne s'agit que d'une période de transition. L'intervenant entend très peu de critiques sur la situation définitive, qui sera caractérisée par une mesure objective de la charge de travail. L'accord de gouvernement prévoit le calendrier pour la mesure de la charge de travail, que les huit partis se sont engagés à mettre en œuvre de manière sérieuse et définitive avant la fin de la législature.

L'intervenant s'étonne également de voir d'aucuns faire comme si l'adoption de la loi proposée allait créer, sur le champ, une situation entièrement nouvelle, où tous les juges actuels seraient liquidés et de nouveaux mis en place selon la règle 20/80. La ministre de la Justice a été interrogée plusieurs fois sur les conséquences effectives. La réponse était qu'une mesure de transition était prévue et que personne ne serait licencié.

L'argument le plus important est celui de l'accès à la justice, à savoir le fait que l'administration de la justice serait compromise par la mesure à l'examen. Ce n'est toutefois pas le cas et personne ne peut encore dire si, pendant la période de transition, le nombre de juges actuels disparaîtra du jour au lendemain. Au contraire, une extinction progressive est annoncée dans l'hypothèse où la période de transition durerait dix ans. Une période de dix ans n'est toutefois pas à l'ordre du jour, puisque les huit partis se sont engagés à procéder à une mesure sérieuse de la charge de travail.

L'intervenant souligne également que le nombre de nouveaux dossiers et de dossiers traités ne constitue pas une mesure exacte de la charge de travail. En tant qu'avocat, il a eu régulièrement l'occasion de constater que des juges prenaient parfois plusieurs années pour rendre un jugement ou ne brillaient pas par leur efficacité. Leur nombre de dossiers traités n'était toutefois pas mauvais en raison du prononcé de jugements de réouverture des débats.

M. Vanlouwe se demande pourquoi l'on ne procède pas immédiatement à une mesure de la charge de travail. À Mons, un projet de mesure de la charge de travail est en cours depuis déjà plus de quinze ans. Le Conseil supérieur de la Justice affirme qu'une mesure de la charge de travail pour Bruxelles pourra être réalisée au plus tôt en 2017.

M. Laeremans pense que le débat ne doit pas porter sur la productivité des magistrats. Le nombre de nouveaux dossiers est un critère objectif et il n'est pas exact d'affirmer que les affaires du côté francophone seraient en moyenne plus lourdes que celles du côté néerlandophone. Le rapport n'est certainement pas de 20/80, mais plutôt de 30/70, voire même de 40/60 dans certains types d'affaires.

Il est prévu, dans le régime, une grande différence qui joue en faveur des francophones et en défaveur des Flamands: tandis que le pourcentage de 80 % est fixé pour les francophones, une mesure de la charge de travail sera nécessaire du côté néerlandophone pour déterminer le pourcentage à appliquer. Tandis que les francophones se voient offrir un cadeau, un chèque en blanc, les Flamands devront se justifier. De plus, il n'est pas si sûr que la mesure de la charge de travail annoncée sera un jour mise en œuvre, étant donné que le texte prévoit que: « Si la mesure de la charge de travail n'aboutit pas dans ce délai, les magistrats qui excèdent 20 % sont placés dans un cadre d'extinction. » Le régime à l'examen prévoit explicitement que la mesure de la charge de travail ne sera peut-être pas appliquée, ce qui n'est pas sérieux. Les francophones ont donc tout intérêt à saboter la mesure de la charge de travail et à empêcher que les résultats soient connus.

M. Vanlouwe pense que si la majorité faisait preuve de sérieux, elle ferait en sorte que la mesure de la charge de travail soit immédiatement réalisée. On ne travaillerait pas sur la base de chiffres ou de pourcentages arbitraires, comme c'est le cas actuellement. En général, on prend des mesures pour protéger une minorité. Or, dans cet accord, c'est la communauté la plus grande qui est protégée et qui pourra dans tous les cas désigner 80 % des magistrats.

Onze juges néerlandophones siègent au tribunal de commerce de Bruxelles. En 2011, on a dénombré 6 932 dossiers entrants contre 6 493 dossiers sortants, si bien que l'arriéré judiciaire se limite à 439 dossiers. Si on ramène le nombre de juges à 9, l'arriéré judiciaire se montera à 1 265 dossiers par an.

Treize magistrats francophones siègent dans ce même tribunal. En 2011, le nombre de dossiers entrants s'est élevé à 10 456 unités et un jugement a été rendu dans 8 172 dossiers. L'arriéré judiciaire est donc de 2 284 dossiers. Si le pourcentage convenu par la majorité est appliqué, ce ne sont plus 13 mais 14 magistrats qui siégeront, ce qui fera tomber l'arriéré judiciaire à 1 404 dossiers.

Du côté néerlandophone, l'arriéré judiciaire va donc tripler alors que du côté francophone, il diminuera de moitié.

Les chiffres les plus interpellants sont ceux qui concernent le tribunal de première instance.

Du côté néerlandophone, il y a actuellement 39 juges et ils ont reçu 10 934 dossiers en 2011. On note qu'un jugement a été rendu dans 15 084 dossiers, ce qui veut dire que l'arriéré judiciaire est en train de se résorber. En vertu des mesures prévues par la majorité, le nombre de juges devrait être ramené à 27, ce qui aura pour conséquence que l'arriéré judiciaire recommencera à augmenter.

Le nombre de juges francophones passera de 96 à 108. En 2011, ils ont reçu 22 947 nouveaux dossiers et ont rendu un jugement dans 27 962 dossiers, de sorte que l'arriéré judiciaire a diminué de 5 000 unités. Avec les juges qui devraient s'adjoindre à eux, ils devraient pouvoir résorber l'arriéré judiciaire à concurrence de 70 %.

Le pourcentage de 20 % de juges du côté néerlandophone fera donc augmenter l'arriéré judiciaire côté néerlandophone alors que le pourcentage de 80 % de juges francophones permettra de réduire à nouveau l'arriéré côté francophone.

L'argument selon lequel le régime prévu par la majorité fera baisser l'arriéré judiciaire des deux côtés est donc manifestement sans fondement.

C'est là le premier grand cadeau que les francophones ont reçu pour la non-scission de l'arrondissement judiciaire.

Le deuxième cadeau qu'ils ont reçu a trait aux effectifs de personnel. Du côté francophone, on procédera à des recrutements massifs de magistrats et de collaborateurs. Du côté néerlandophone, il y aura peut-être une réduction des effectifs puisqu'il y a 181 personnes en surnombre. C'est ainsi que du côté néerlandophone, il n'y aura plus qu'une seule chambre pour traiter tous les dossiers pénaux néerlandophones liés à des faits de drogue, de violence, de fraude financière et de terrorisme.

M. Anciaux indique que ce ne sera le cas que si, la situation très temporaire devient définitive. Il ne pense pas que ce sera le cas.

M. Vanlouwe souligne qu'il ne fait que relayer le point de vue exprimé par le président du tribunal de commerce dans une interview. Si la commission avait organisé une audition, un débat sur le sujet aurait été possible.

Deux des quatre juges de la jeunesse néerlandophones disparaîtront, si bien qu'il sera impossible de lutter résolument contre la délinquance juvénile.

Le troisième cadeau offert aux francophones réside non seulement en ce que les Flamands de Bruxelles et de la périphérie seront les victimes du régime proposé, mais aussi en ce que tous les Flamands engagés dans un procès à Bruxelles seront touchés par l'arriéré judiciaire grandissant. À Bruxelles, on traite les dossiers de très nombreux citoyens qui y travaillent, d'entreprises qui y ont leur siège social et d'institutions publiques flamandes, bruxelloises et fédérales.

Si l'accord à l'examen est tellement mauvais, c'est parce qu'il est basé sur des chiffres erronés, comme le confirment différentes sources. C'est ainsi qu'un négociateur flamand regrettait (dans une interview accordée il y a quelques mois au journal De Tijd) que le chef de cabinet de l'ancien ministre de la Justice se soit basé sur des chiffres inexacts.

L'ancien ministre de la Justice, Stefaan De Clerck, a tenté de s'expliquer à ce propos au cours de la discussion de la proposition de loi à la Chambre, mais voici ce qu'il a déclaré dans une interview:

(traduction) « avec les chiffres qui sont publiés aujourd'hui, l'accord aurait été différent. (...) La répartition 20/80 est le point de départ d'un compromis politique. Si l'on évoque au parlement des chiffres objectivement contestables, il sera encore possible d'en débattre. » (De Tijd, 20 octobre 2011).

Il s'agit donc d'un compromis où les néerlandophones font des concessions sans rien recevoir en échange.

Les magistrats eux-mêmes dénoncent l'inexactitude des chiffres. Dans un avis d'office rendu en mai 2012, le Conseil supérieur de la Justice a publié ses chiffres basés sur une mesure récente et objective. L'Union nationale des magistrats de première instance a rédigé une note d'analyse dans laquelle elle pointe l'utilisation de chiffres erronés. Cette note a été signée par tous les juges néerlandophones du tribunal de première instance et du tribunal du travail de Bruxelles, la Conférence des présidents néerlandophones des tribunaux de première instance, la Conférence des présidents néerlandophones des tribunaux du travail et l'Union nationale des magistrats.

Même le premier ministre a promis à plusieurs reprises que les chiffres seraient adaptés lors du débat parlementaire:

« L'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde sera profondément réformé. (...) Si les chiffres relatifs à la répartition des cadres s'avèrent erronés, ceux-ci seront adaptés. » (Déclaration de politique à la Chambre, 10 décembre 2011)

Bref, tout le monde reconnaît que ces chiffres sont erronés. Les huit partis ont promis solennellement de les adapter au cours du débat parlementaire, mais ils n'en font rien dans la pratique.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, demande à M. Vanlouwe de citer correctement les personnes et de ne pas leur faire dire ce qu'elles n'ont pas dit. Ni le premier ministre, ni M. Stefaan De Clerck n'ont dit que les chiffres utilisés étaient erronés. Il envoie à cet égard à l'intervention de M. Stefaan De Clerck au cours du débat en commission de la Chambre:

« M. Stefaan De Clerck (CD&V) tient à préciser qu'il n'a jamais transmis de chiffres erronés mais uniquement des rapports de magistrats contenant leurs propres chiffres, par ailleurs corrigés ultérieurement. Les négociateurs de l'accord institutionnel ont pris connaissance de ces chiffres et de leur complexité et sont arrivés à un accord politique. La clé de répartition est un point de départ, politiquement négocié. L'objectif est que les arrondissements puissent disposer du nombre de magistrats nécessaire en fonction de leur charge de travail. Il appartient au gouvernement de mesurer cette charge de travail. Dans l'intervalle, la clé de répartition pourra être adaptée et un comité de suivi sera mis en place. » (doc. Chambre, nº 53-2140/005, p. 13).

M. Verherstraeten demande que l'on fasse preuve d'honnêteté intellectuelle dans le débat et, donc, que les citations des propos tenus soient correctes.

M. Vanlouwe demande si tous les chiffres qu'il a cités — c'est-à-dire ceux du Conseil supérieur de la Justice et des associations de magistrats néerlandophones — sont erronés. Il invite dès lors le secrétaire d'État à lui signaler les erreurs.

M. Verherstraeten demande une fois encore qu'on ne lui prête pas des propos qu'il n'a pas tenus.

M. Vanlouwe réitère la revendication de son groupe politique de faire réaliser une mesure de la charge de travail avant de procéder à la réorganisation de l'arrondissement judiciaire. La réforme proposée en l'occurrence n'a été demandée par personne et elle ne permettra assurément pas d'atteindre l'objectif annoncé, à savoir la résorption de l'arriéré judiciaire. C'est la raison pour laquelle il demande une mesure objective, qui permette d'agir ensuite sur la base de chiffres concrets. S'agit-il là d'une suggestion tellement déraisonnable ?

Le quatrième cadeau fait aux francophones réside dans le manque d'objectivité de la mesure de la charge de travail. La mesure actuelle se base visiblement sur un seuil minimum de 80 % de magistrats francophones.

Le cinquième cadeau aux francophones est le calendrier prévu pour la mesure de la charge de travail. On affirme que celle-ci sera terminée pour 2014; or, la mesure de la charge de travail actuelle au sein de la magistrature est déjà en cours depuis des années, et une étude conteste vivement la méthodologie appliquée à cet égard. Le Conseil supérieur de la Justice affirme lui-même qu'il sera impossible de boucler la mesure de la charge de travail pour 2014.

M. Anciaux reconnaît que si l'on confie la mesure de la charge de travail à la seule magistrature, on risque effectivement de devoir attendre quelque temps. Il appelle dès lors le gouvernement à charger la ministre de la Justice de prendre l'initiative de cette mesure de la charge de travail, ainsi que de définir et d'imposer les critères à respecter.

À ce propos, M. Vanlouwe aimerait que le gouvernement lui fasse savoir si un marché public a déjà été lancé en vue de cette mesure de la charge de travail et quel est le budget prévu à cet effet.

Les mesures transitoires concernant notamment la mesure de la charge de travail et les juges de complément constituent le sixième cadeau offert aux francophones. Pendant des années, les partis flamands — y compris ceux de la majorité actuelle — ont dénoncé le système des juges de complément parce que ceux-ci ne satisfont pas à la condition de bilinguisme. En conséquence de l'accord proposé ici, ces juges de complément seront tout simplement nommés. Ces magistrats seront ainsi récompensés parce que l'État n'est pas parvenu à faire appliquer la loi.

Le nœud du problème, et la raison pour laquelle BHV doit être scindé, c'est le respect dû au principe du caractère néerlandophone de la Région flamande et au principe du caractère bilingue de la Région de Bruxelles-Capitale. Or, on ne trouve nulle trace de ce respect dans la proposition de loi à l'examen. Celle-ci viole une convention conclue il y a des années, et qui garantit que nous puissions vivre, en Belgique, dans des régions linguistiques qui correspondent aux frontières des Régions et dans des Communautés qui transcendent ces frontières. Celles et ceux qui veulent vivre en Flandre sont les bienvenus, mais ils doivent respecter le caractère néerlandophone de la Flandre. À Bruxelles aussi, il faut respecter le caractère bilingue de la capitale. En ramenant la proportion requise de magistrats bilingues de 2/3 à 1/3, on porte atteinte à ce caractère bilingue de Bruxelles.

M. Anciaux fait remarquer que M. Laeremans peut très bien vivre avec une proportion d'1/3 de magistrats bilingues à Bruxelles.

M. Laeremans rétorque que ce qu'il trouve vraiment inadmissible, c'est qu'il y aura 1/3 de magistrats francophones à Hal/Vilvorde, dans une région flamande unilingue. On assimile ainsi Hal/Vilvorde à Bruxelles, ce qui est inimaginable.

M. Armand De Decker rappelle que Bruxelles fait face à un manque cruel de substituts. Il ne faut dès lors pas s'étonner que la Justice se porte mal à Bruxelles.

M. Vanlouwe fait remarquer que les chiffres cités par l'intervenant précédent ne sont pas corrects. M. De Decker a avancé le chiffre de 150 substituts du procureur à Bruxelles alors qu'il n'y en a actuellement que 92, dont 31 néerlandophones. Il y a 140 magistrats assis, dont 39 néerlandophones.

Une septième concession aux francophones est le fait qu'il n'y aura absolument aucune scission; il y aura seulement un dédoublement des tribunaux. Ce sont deux choses radicalement différentes. Les mesures qui sont sur la table aujourd'hui n'empêcheront pas les juges francophones de continuer à dire le droit dans l'ensemble du territoire de Hal-Vilvorde, donc pas uniquement à Bruxelles ni même uniquement dans les communes à facilités.

Ce dédoublement donne un signal clair et c'est le suivant:

« Vous êtes peut-être un francophone qui habite en Flandre, mais vous serez traité comme si vous habitiez dans la région bilingue de Bruxelles. »

Et cela ne s'arrête pas là. Ce dédoublement est, de surcroît, bétonné dans la Constitution, ce qui veut dire, en clair, que la scission de l'arrondissement judiciaire est rendue impossible dans le futur puisqu'une modification à la majorité simple n'est plus à l'ordre du jour.

Un huitième cadeau pour les francophones est le fait qu'en plus de cette non-scission, ils recevront aussi cinq magistrats de parquet francophones supplémentaires à Hal-Vilvorde. Cela implique que les huit partis pensent en fait que les magistrats flamands du parquet ne peuvent pas être objectifs dans leur politique de poursuites, même s'ils attestent, sur la base du brevet linguistique du Selor, qu'ils sont parfaitement bilingues. On n'a pas confiance dans la politique de poursuites que ces magistrats flamands du parquet mettront en œuvre à Hal-Vilvorde. À titre de comparaison, l'intervenant évoque le manque de confiance qui existe à l'égard des conseillers d'État néerlandophones.

Il s'adresse au secrétaire d'État Verherstaeten, qui avait pourtant déclaré l'année dernière:

« Les droits dont les francophones disposent déjà actuellement semblent suffire ».

À l'époque, M. Carl Decaluwé, aujourd'hui gouverneur de Flandre occidentale, avait lui aussi déclaré:

« Des juges francophones dans les tribunaux flamands, c'est inacceptable. En Chine, il n'y a pas non plus de juges néerlandophones. »

Comment concilier de telles déclarations avec ce qui est sur la table ?

Et cela ne s'arrête malheureusement pas là. En plus des tribunaux francophones à Hal-Vilvorde et des magistrats francophones du parquet détachés dans cet arrondissement, nous aurons aussi affaire à des belles-mères francophones. Les francophones obtiennent en effet un droit de veto sur des dossiers purement néerlandophones à Hal-Vilvorde. L'intervenant évoque le contrôle des chefs de corps des tribunaux de première instance sur les justices de paix, auquel le président-chef de corps francophone pourra demander à être associé. Ce contrôle portera, par exemple, sur l'organisation et la politique du personnel de la justice de paix. Il faudra tendre au consensus, faute de quoi l'affaire sera portée à un échelon supérieur, à savoir la cour d'appel. Les francophones ont donc reçu, à titre de neuvième cadeau, le droit d'exercer une sorte de tutelle.

Ce que les néerlandophones obtiennent, c'est moins de bilinguisme à Bruxelles, la capitale de la Belgique fédérale, de la Communauté flamande et de l'Union européenne. Dans une ville internationale, on pourrait pourtant s'attendre à ce que l'on développe le multilinguisme. Dans cette optique, il faudrait commencer par faire respecter le principe du bilinguisme. À Bruxelles, les magistrats et les fonctionnaires doivent être bilingues. C'est à ce moment-là seulement que Bruxelles sera véritablement une capitale bilingue. Or, ce que l'on fait maintenant, c'est démanteler progressivement ce bilinguisme. On passera de deux tiers de magistrats bilingues à un tiers. Une nouvelle fois, on récompense les francophones pour leur mauvaise politique dans la mesure où celle-ci n'a servi ni le bilinguisme ni le statut de capitale de Bruxelles.

En acceptant un tel recul du bilinguisme, les huit partis font clairement la preuve qu'ils sont déconnectés de la réalité. C'est ce que dénonce d'ailleurs aussi la fédération des greffiers des cours et tribunaux.

M. Anciaux rétorque que le démantèlement du bilinguisme est incontestablement une suite logique de la scission des tribunaux bilingues en un tribunal francophone et un tribunal néerlandophone. Vu l'augmentation du nombre de chambres unilingues, il est normal que le besoin de magistrats bilingues diminue.

M. Vanlouwe pense que cet argument ne tient pas la route, puisqu'il n'y aura pas de scission en l'espèce, mais bien l'instauration d'un arrondissent judiciaire de « Bruxelles-Hal-Vilvorde », à côté d'un arrondissement de « Bruxelles-Hal-Vilvorde ». On aura deux arrondissements qui couvriront le même territoire.

Or, ce dont une capitale bilingue a besoin, c'est justement de plus de bilinguisme et d'un bilinguisme effectif. La diminution du nombre de bilingues aura un impact négatif sur la gestion d'un grand nombre de dossiers, qui comportent très souvent des pièces dans les deux langues.

L'intervenant cite l'exemple de deux habitants francophones de Lennik qui sont impliqués dans un litige civil. Il est évident que ce dossier contiendra aussi des pièces établies en néerlandais.

L'intervenant renvoie aussi aux études du professeur Frans De Pauw, qui indique qu'il faut développer davantage le bilinguisme. Il a déclaré que tout magistrat bruxellois devait être bilingue. En effet, chaque dossier est mixte sur le plan linguistique, et les textes à l'examen n'y changeront rien.

La preuve la plus frappante du manque de respect envers les néerlandophones dans la politique que les huit partis veulent mettre en œuvre est le fait qu'à l'avenir, le procureur du Roi et l'auditeur du travail à Bruxelles devront toujours être francophones. Cela revient à imposer une interdiction professionnelle aux néerlandophones, ce qui est discriminatoire et constitue une triste première. Des fonctions de haut niveau dans une région bilingue seront donc réservées à des francophones. Il sera impossible à l'avenir d'avoir un procureur parfaitement bilingue avec un diplôme établi en langue néerlandaise; celui-ci pourra seulement être adjoint. La Cour constitutionnelle devra se prononcer à ce sujet.

Toutefois, si l'on veut étendre cette règle et rompre la parité, on devrait décréter que toutes les fonctions supérieures au niveau fédéral doivent être réservées à des néerlandophones.

M. Delpérée indique qu'au Parlement bruxellois, 17 sièges sont réservés aux néerlandophones.

M. Vanlouwe pense que ce n'est pas un argument. On ne peut pas comparer les règles qui s'appliquent aux élus et celles qui s'appliquent aux fonctionnaires.

M. Anciaux renvoie aux règles relatives au greffier et au greffier-adjoint du Parlement bruxellois, qui doivent également être de rôles linguistiques différents. Cela vaut aussi, par exemple, pour le président du Comité R et le président du Comité P.

M. Vanlouwe maintient que ce n'est pas comparable. Il ne s'agit pas, en l'espèce, d'un régime d'alternance où le procureur peut être de tel rôle linguistique et où l'adjoint doit alors appartenir à l'autre rôle linguistique.

En l'espèce, le procureur du Roi de Bruxelles sera toujours un francophone.

Pour conclure, l'intervenant aimerait s'attarder quelque peu sur les prétendus points positifs de l'accord.

On devrait en effet se réjouir que le parquet soit scindé.

Il sera peut-être possible alors dans l'arrondissement de Hal-Vilvorde de mener une politique propre en matière pénale; le problème est que le nombre de magistrats sera réduit et que l'arriéré judiciaire augmentera de manière telle que plus aucune condamnation ne pourra être prononcée. Il n'y aura plus de juges pour pouvoir prononcer des condamnations au final. Ce sera donc un coup dans l'eau.

De plus, le parquet de l'arrondissement de Hal-Vilvorde ne sera pas un parquet à part entière. En effet, le procureur ne sera pas le chef de corps de tous ses magistrats puisque que certains d'entre eux seront détachés de Bruxelles. C'est au procureur de Bruxelles exclusivement qu'incombera la responsabilité d'exercer le contrôle sur ces magistrats de parquet francophones à Hal-Vilvorde et lui seul pourra leur infliger des sanctions disciplinaires. Le procureur de Hal-Vilvorde n'a aucune compétence dans ce domaine.

L'intervenant devrait aussi se réjouir du fait que les tribunaux seront scindés en tribunaux néerlandophones et en tribunaux francophones. Or, les tribunaux francophones pourront continuer à dire le droit sur tout le territoire de Hal-Vilvorde. Le principe de territorialité n'est donc pas respecté. En quoi y a-t-il donc une amélioration ?

On devrait aussi être satisfait qu'une mesure de la charge de travail sera enfin réalisée. Mais on sait d'ores et déjà que cette mesure ne sera pas objective et qu'elle favorisera uniquement les francophones et pas les néerlandophones.

Il n'y a pas de quoi se réjouir non plus de la mesure transitoire, qui prévoit une proportion de 27/80 au lieu de 20/80. Il est déjà certain, à ce stade, que ces 27 % de néerlandophones ne suffiront pas et que l'arriéré judiciaire ne fera qu'augmenter. En matière de droit du travail par exemple, 29 et même jusqu'à 40 % des dossiers sont néerlandophones.

Enfin, à Hal-Vilvorde, il y aura un procureur néerlandophone, ce qui est la logique même. Mais, dans le même temps, à Bruxelles, le procureur sera toujours un francophone.

L'intervenant annonce dès lors qu'il déposera plusieurs amendements, dont l'un aura pour but de concrétiser une proposition qui avait été formulée à l'époque par MM. Vandenberghe et Verherstraeten. Ces amendements tendront à la réalisation d'une véritable scission, avec, au préalable, une mesure objective de la charge de travail et ensuite seulement la réforme. En outre, il faut qu'à Hal-Vilvorde, la procédure relève à nouveau de la responsabilité de juges néerlandophones et que ceux-ci ne puissent pas être remplacés par des magistrats francophones. Enfin, à Bruxelles, il faut que le procureur et l'auditeur du travail puissent aussi être néerlandophones.

L'intervenant conclut que cette réforme conduira à l'impunité. Elle témoigne du peu de respect que les huit partis ont à l'égard des Flamands. On balaie purement et simplement leurs souhaits alors que l'on couvre les francophones de cadeaux. Et ceux qui feront les frais de cette réforme, ce seront tous les Flamands et tous les justiciables et pas seulement ceux qui habitent à Bruxelles ou à Hal-Vilvorde.

Personne n'a demandé cette scission, pas plus les acteurs judiciaires que le Mouvement flamand. Elle sert uniquement les intérêts des francophones qui empochent au passage une dizaine de cadeaux. En outre, elle porte en elle les germes de la prochaine crise communautaire.

Ceux qui osent ne fût-ce que la défendre devraient avoir honte.

M. Laeremans se rallie à ce point de vue et se réjouit d'entendre l'argumentation du préopinant. En effet, il est plus que nécessaire de s'insurger contre cet accord particulièrement scandaleux. Cet accord, qui est un triomphe pour les francophones, est à ce point irrationnel que l'on peut se demander si ceux qui l'ont conclu ne sont pas fous à lier, ce qui n'est pourtant pas le cas. Si les partis concernés continuent à défendre cet accord en connaissance de cause, il serait toutefois impossible de ne pas les accuser d'une certaine immoralité. En l'espèce, ils abusent de la confiance de citoyens qui ne se doutent de rien. On prive les Flamands de leurs juges, lesquels sont remplacés par des juges francophones pour des motifs très indécents, dans le cadre d'une politique du pouvoir et de la force. Les négociateurs se sont, pour la plupart, avérés trop inexpérimentés et tentent à présent de justifier le mauvais accord conclu. Des critiques et des mises en garde ont été formulées tant par des magistrats et des avocats que par le Conseil supérieur de la Justice et le Conseil d'État, mais, en dépit du bon sens, les partis concernés s'entêtent à poursuivre sur la voie empruntée. Par chance pour eux, seuls quelques journaux osent se livrer à une analyse approfondie de l'accord et le condamner. La population est maintenue dans l'ignorance.

Une première réflexion concerne l'extension de la compétence des tribunaux francophones. Jusqu'à présent, les chambres francophones n'étaient compétentes que de manière limitée pour Hal-Vilvorde, du moins dans les affaires civiles, en raison du principe de la compétence intra muros ou extra muros. Désormais, les tribunaux francophones seront compétents sur un pied d'égalité pour les 54 communes de Bruxelles-Hal-Vilvorde. En ce qui concerne les tribunaux, le modèle « Maingain » a donc réussi à s'imposer. Cela aura des conséquences phénoménales pour Hal-Vilvorde. En effet, les néerlandophones de Hal-Vilvorde pourront comparaître volontairement devant le tribunal francophone et mener la procédure en français parce que celle-ci est plus rapide. Cette équivalence de compétence crée une concurrence qui ouvre la voie à la francisation juridique du Brabant flamand.

En outre, des juges de paix néerlandophones, y compris dans des cantons sans facilités, seront assujettis au président francophone du tribunal de première instance de Bruxelles qui disposera d'un droit de veto. « Belle-mère » est vraiment le terme adapté à la situation.

L'intervenant fait également référence à la simplification de la procédure relative au changement de langue, qui est réduite à une formalité minimale. Des affaires seront donc drainées vers des tribunaux francophones, et pas seulement à Bruxelles, ce qui empêchera la Flandre de pouvoir être un jour autonome en matière de justice.

Une autre nouveauté que M. Laeremans trouve insupportable concerne le détachement, de Bruxelles vers le Brabant flamand, de magistrats de parquet francophones qui resteront cependant sous l'autorité hiérarchique du procureur du Roi francophone de Bruxelles. L'intervenant est convaincu que cette situation engendrera un traitement privilégié des délinquants non néerlandophones. On aura ainsi une justice de deux poids, deux mesures. C'est une régression par rapport à la situation actuelle, car de tels dossiers sont actuellement traités par des magistrats néerlandophones bilingues.

De plus, on institutionnalise une ingérence poussée de Bruxelles dans l'arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde. Les juges de paix de Meise, Kraainem et Rhode-Saint-Genèse relèveront désormais de l'autorité hiérarchique conjointe des présidents francophone et néerlandophone des tribunaux de première instance. Les deux présidents constituent ensemble le chef de corps de ces juges de paix.

Une situation similaire est créée en ce qui concerne l'organisation hiérarchique du parquet. En effet, le procureur du Roi de Bruxelles sera le supérieur hiérarchique des magistrats francophones du parquet qui auront été détachés dans les cantons judiciaires de Hal-Vilvorde.

Aucune mesure équivalente n'est cependant prévue pour le procureur du Roi néerlandophone à propos de Bruxelles. Le procureur francophone occupe manifestement une place plus élevée dans la hiérarchie que son homologue néerlandophone ...

Une autre chose que M. Laeremans juge totalement inacceptable est l'institutionnalisation de la suprématie des francophones à Bruxelles: le procureur du Roi de Bruxelles devra désormais systématiquement être un francophone. Les équilibres linguistiques qui existaient jusqu'à présent en la matière s'en trouvent affectés. Le risque est dès lors réel que la politique de sécurité menée dans la capitale, qui est le plus important arrondissement judiciaire du pays, devienne à terme une affaire purement francophone. En effet, tant le procureur du Roi que le procureur général de Bruxelles seront des francophones. Cela prouve une fois de plus que Bruxelles est en train de devenir une ville francophone, où les néerlandophones sont clairement dans une position d'infériorité. M. Laeremans annonce qu'une procédure sera de toute façon entamée auprès de la Cour constitutionnelle pour que les dispositions proposées soient examinées à la lumière du principe d'égalité prévu par la Constitution. Une initiative similaire a également déjà été annoncée par l'Ordre des barreaux flamands.

L'intervenant voit dans le nouveau régime l'ancrage dans la loi d'une sorte de racisme linguistique.

Réagissant à l'intervention de M. De Decker qui soulignait que la loi prévoit quand même un procureur du Roi néerlandophone pour Hal-Vilvorde, M. Laeremans répond que l'on ne peut pas comparer les communes unilingues de l'arrondissement de Hal-Vilvorde — en ce compris les communes à facilités — avec la région bilingue de Bruxelles-Capitale.

M. De Decker répond que la nouvelle réglementation est basée sur l'important écart qui existe entre le nombre de dossiers francophones et néerlandophones. Par ailleurs, il tient à réagir à une précédente intervention de M. Vanlouwe en précisant qu'il n'est pas exact que l'on nomme systématiquement à Bruxelles des hauts fonctionnaires francophones et des adjoints néerlandophones. Cette affirmation est totalement fausse. L'administration de la Région de Bruxelles-Capitale connaît une parité linguistique absolue pour les fonctions de directeur des niveaux A3 à A7.

M. Laeremans dit constater qu'au niveau fédéral, c'est l'inverse qui se produit, à titre de compensation. En tant que minorité linguistique, les francophones sont systématiquement favorisés au niveau fédéral, depuis le gouvernement fédéral jusqu'à la plus petite administration fédérale. Ce système fait partie des grands équilibres de notre pays. Or, les dispositions proposées en ce qui concerne la nomination du procureur du Roi de Bruxelles et son appartenance linguistique rompent précisément les équilibres actuels et créent dès lors un précédent très dangereux.

De plus, cela compromet également l'équilibre linguistique au sein du Conseil des procureurs du Roi puisque sept procureurs francophones et six néerlandophones y siégeront désormais.

Une autre nouvelle mesure qui ne trouve pas grâce aux yeux de M. Laeremans est la clé de répartition 80 % — 20 % fixée par la loi.

M. Delpérée réplique qu'il s'agit en l'occurrence d'une répartition forfaitaire.

M. Laeremans dénonce le fait qu'en dépit des critiques émises par le Conseil d'État et par les magistrats et avocats néerlandophones, on reste sourd aux arguments rationnels, que l'on tente par ailleurs d'occulter par la mesure de la charge de travail annoncée. Ce n'est cependant que duperie, car de très nombreuses incertitudes demeurent quant à l'issue de cette mesure de la charge de travail.

Par ailleurs, l'intervenant ne croit pas M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, lorsqu'il affirme que le pourcentage de magistrats néerlandophones sera porté à 27 %. Il ne s'agira que d'une mesure très temporaire, qui ne sera sans doute pas maintenue.

M. Laeremans souhaite ensuite attirer l'attention sur le point de vue défendu par M. Fernand Keuleneer, éminent avocat, (source: « Fernand Keuleneer en het gerechtelijk arrondissement BHV », Gazet van Antwerpen, 4 juin 2012) (traduction):

« Il convient tout d'abord de souligner qu'une fois de plus dans le domaine de la justice, on jette l'argent par les fenêtres. Le coût (inutile) de ces changements sera énorme, si toutefois les moyens nécessaires sont trouvés ...

Un coup de canif est porté au bilinguisme à Bruxelles. Le dédoublement des tribunaux lésera les Flamands d'une manière inimaginable et totalement injustifiable, et le justiciable sera le premier à en pâtir. Le procureur du Roi de Bruxelles sera toujours un francophone. À Hal-Vilvorde, la procédure pénale sera largement francisée. Ainsi, une instance qui fera office de petit parquet flamand, pouvant se spécialiser dans des dossiers secondaires, sera mise en place et sera flanquée d'une puissante branche francophone du parquet de Bruxelles, qui se concentrera sur la véritable criminalité.

Les équilibres fondamentaux de la législation linguistique sont ébranlés, sans le moindre bénéfice pour les Flamands. La réglementation relative au parquet laisse déjà entrevoir le risque que la distinction entre les compétences extra-muros et intra-muros disparaisse également dans les affaires civiles. Les tribunaux francophones seront d'ailleurs beaucoup plus grands et dotés de moyens plus importants.

Il est vrai qu'en ce qui concerne la réglementation relative à la langue de la procédure, la législation linguistique reste, pour l'heure, largement intacte, si l'on excepte l'assouplissement des modalités de changement de langue et de renvoi. Mais le travail de sape des piliers est savamment mis en œuvre et il ne faudra pas très longtemps pour que le système se lézarde.

Un aspect auquel on prête peu d'attention est le fait que les litiges sur les principes fondamentaux des lois linguistiques seront tranchés à l'avenir par les tribunaux d'arrondissement bruxellois, au sein desquels le président disposera d'une voix prépondérante, sans possibilité de recours ni d'appel ! Et tout cela sera ancré dans la Constitution.

Dernière remarque et non des moindres: une grande partie des affaires pénales à Hal-Vilvorde seront peut-être de nouveau traitées par des avocats francophones. Le phénomène s'étendra aux affaires civiles et commerciales et, à terme, l'Ordre français des avocats pourra peut-être aussi avoir à nouveau des membres dans le Brabant flamand. Les avocats ne représentent-ils pas un secteur économique important pour la Flandre ?

Les négociateurs flamands ont fait preuve d'une grande incompétence et d'un manque criant de vision stratégique. En ce qui concerne ce dernier point, ils peuvent tenter de se cacher derrière le Mouvement flamand, qui souffre du même mal. L'obstination de la scission a eu la conséquence prévisible que l'on connaît. Les intérêts flamands n'ont pas été vendus, car, dans le cas d'une vente, on reçoit quelque chose en contrepartie. Non, ils ont en l'occurrence été cédés gratuitement. Les francophones n'en reviennent d'ailleurs pas de tout ce qu'ils ont pu tirer de l'impasse dans laquelle ils se trouvaient.

Bref, cette réforme de l'arrondissement judiciaire de BHV est une abomination, un fiasco sur toute la ligne. Il y a cinq ans, quiconque affirmait que l'on en arriverait à un tel résultat aurait été raillé et, à présent, tout le monde semble considérer cette défaite politique décisive comme normale.

Dans leur courrier adressé aux parlementaires, les magistrats néerlandophones disent trouver particulièrement cynique que la réforme proposée ait pour but d'améliorer le fonctionnement de la justice. »

Pour bien faire comprendre à quel point la nouvelle situation sera préjudiciable aux néerlandophones, M. Laeremans brandit la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, qui tenait largement compte du caractère unilingue de Hal-Vilvorde. Ce territoire dans la zone de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde était qualifié de territoire « extra muros » et considéré comme une région unilingue.

Les lois linguistiques de 1963 ont fixé les frontières linguistiques et ont donné naissance aux communes à facilités, où des concessions individuelles sont désormais prévues pour les francophones. Ainsi, les justices de paix peuvent y rendre des jugements en français, susceptibles de recours auprès d'un juge francophone. Pour le reste, à Vilvorde, les citations sont toujours introduites en néerlandais et ensuite, la procédure est en principe menée en néerlandais.

Il peut être dérogé à ce régime, à Vilvorde comme dans l'ensemble du pays, mais dans ce cas les deux parties doivent en faire la demande au juge. M. Laeremans aimerait que le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles lui dise si cette possibilité prévue par la loi est souvent appliquée et, si oui, à quelle fréquence. Pourquoi modifie-t-on le régime actuel, qui ne suscite pourtant aucune plainte ? En outre, l'intervenant estime que le nouveau régime bétonne de facto l'organisation de la justice au niveau fédéral et empêche d'évoluer vers un accroissement d'autonomie pour les entités fédérées dans le domaine de l'organisation judiciaire.

Depuis la scission du barreau de Bruxelles en 1985, l'unilinguisme de l'arrondissement de Hal-Vilvorde est également respecté par les avocats. L'article 430 du Code judiciaire prévoit très clairement que seuls les avocats de l'Ordre néerlandophone peuvent avoir leur cabinet dans l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde. Quant aux avocats francophones, ils ont leur cabinet exclusivement à l'intérieur des 19 communes bruxelloises, et il n'est pas question qu'ils puissent l'avoir dans les communes à facilités.

Selon M. Laeremans, ce régime risque lui aussi d'être remis en cause, alors même que la situation actuelle est jugée satisfaisante sur ce point.

Le légendaire arriéré judiciaire de Bruxelles s'explique, entre autres, par l'étendue et la lourdeur excessives de l'organisation du tribunal et du parquet bruxellois. M. Laeremans se dit convaincu que la seule façon d'y remédier consiste à opérer une scission (verticale) complète tant du parquet que des tribunaux. Sa proposition de loi nº 5-755/1 prévoit la création de tribunaux néerlandophones distincts et dotés de leur propre parquet pour Hal-Vilvorde (avec maintien des facilités dans les six communes de la périphérie et, donc, un certain nombre de magistrats bilingues). Parallèlement à cela seraient instaurés, à Bruxelles, un parquet bilingue et des tribunaux unilingues néerlandophones et francophones séparés. Un quart des magistrats à Bruxelles seraient néerlandophones.

Cette proposition est la garantie d'un tribunal néerlandophone viable à Bruxelles.

Les textes transmis par la Chambre prévoient une clé de répartition 80 %-20 % qui, en matière civile surtout, jouera en défaveur des néerlandophones car la charge de travail dévolue aux néerlandophones sera bien souvent supérieure aux 20 % prévus. Selon M. Laeremans, il ne faut pas oublier que de très nombreuses compagnies d'assurance ont leur siège social à Bruxelles. Leurs dossiers sont donc introduits au tribunal de police de Bruxelles, si bien que la charge de travail des magistrats néerlandophones de ce tribunal dépasse largement les 20 %.

S'agissant de la condition de bilinguisme, M. Laeremans souligne qu'à l'avenir, un tiers seulement des magistrats de chaque tribunal devront encore posséder une connaissance de la deuxième langue nationale. Il n'y a pas si longtemps, les examens linguistiques ont déjà été assouplis et on a appliqué le système des juges de complément. Mais cela n'était pas encore suffisant pour les francophones, alors qu'ils sont pourtant nettement avantagés par le système des juges de complément: les tribunaux de première instance se sont vu adjoindre des juges presque exclusivement francophones. La règle d'un tiers était ainsi tout simplement contournée !

La proposition de loi nº 4-133 « modifiant diverses dispositions en vue de créer des tribunaux de première instance francophones et néerlandophones et de scinder le ministère public près le tribunal de première instance dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde », déposée par M. Hugo Vandenberghe, actuellement sénateur honoraire, s'inspirait de la scission du barreau bruxellois de 1985.

L'un des principaux arguments avancés par M. Vandenberghe contre une scission verticale est qu'elle aurait pour effet d'affaiblir considérablement la présence flamande à Bruxelles. Cet argument n'est pas convaincant. En décembre 2010, l'Ordre néerlandais (c'est-à-dire les avocats flamands inscrits au barreau de Bruxelles) comptait 2 481 avocats, dont pas moins de 1 912 avaient leur cabinet à Bruxelles, contre 569 seulement à Hal-Vilvorde. Avec ses 1 912 avocats, le barreau néerlandophone de Bruxelles devance encore et toujours le barreau anversois (1 836 avocats). Les Flamands n'ont donc pas à redouter d'être inévitablement marginalisés à Bruxelles en cas de scission verticale. Tout dépendra, dans une large mesure, de la manière dont la scission sera opérée et de la taille du nouveau tribunal néerlandophone à Bruxelles.

Le maintien de l'actuel arrondissement judiciaire empêche l'organisation, en Brabant flamand, d'un tribunal organisé sur une base provinciale (conformément à ce qui a été convenu entre-temps dans l'accord sur la Sécurité et la Justice du 28 octobre 2011). Cela empêche aussi la Flandre d'acquérir, à terme, l'autonomie en matière de justice sur l'ensemble de son territoire.

En fait, Hal-Vilvorde devient une annexe de Bruxelles. Même si c'est un peu moins le cas pour le parquet, à certains égards, Hal-Vilvorde reste subordonné au parquet de Bruxelles, ne fût-ce que par le biais des 5 magistrats détachés.

En tout cas, il sera impossible d'aboutir à une situation homogène en matière de justice pour toute la Flandre. Le nouveau système sera bétonné dans une loi spéciale et sera irréversible.

Marc Van Peel a un jour déclaré que la scission de la Justice était plus importante que celle de BHV. Si un jour on veut aller vers une justice flamande autonome, on n'aura pas d'autre choix que soit s'adresser aux francophones pour obtenir une majorité spéciale, soit scinder la Belgique.

L'orateur voit 2014 comme une date possible pour la déclaration de la scission de la Belgique, et 2015, date anniversaire de ses 185 ans d'existence, comme celle où le pays pourrait effectivement cesser d'exister. L'intervenant renvoie à ce qui s'est passé en Tchécoslovaquie.

M. Delpérée fait observer que Prague est restée la capitale de la Tchéquie.

M. Anciaux déclare qu'il ne connaît aucune autre situation au monde comparable à celle de la Belgique, avec une capitale bilingue occupant la situation de Bruxelles. Il est parfaitement possible de scinder la Belgique, mais ceux qui le réaliseront seront coresponsables du fait qu'à l'avenir, les Flamands de Bruxelles vivront dans une ville unilingue francophone.

M. Laeremans estime que c'est l'inverse: c'est la réforme que l'on prépare aujourd'hui qui aura cette conséquence. On institutionnalise la suprématie des francophones, notamment en faisant en sorte que le procureur de Bruxelles soit toujours francophone. Il ne s'agit même pas d'un agenda caché.

À cela s'ajoute l'évolution démographique, déjà invoquée par M. De Decker.

M. De Decker répond que jamais les Flamands n'ont été aussi bien à Bruxelles, comme en témoignent la qualité de la vie et l'activité culturelle flamande à Bruxelles, qui est l'une des plus riches d'Europe. Le précédent orateur n'a guère de considération pour cela. Il travaille pour un séparatisme qui aura pour conséquence que si la Flandre veut prendre son indépendance, elle devra le faire sans obtenir un centimètre carré de Bruxelles, sauf à devenir un État bilingue, comme l'était la Belgique, car elle ne pourra ignorer près d'un million de francophones.

On parle beaucoup de Wallobrux, mais les Bruxellois pensent aussi, le cas échéant, à conférer à Bruxelles le statut d'une ville-État, capitale de l'Europe.

M. Laeremans ne l'ignore pas. Dans une Flandre indépendante, les Bruxellois vivraient dans une capitale bilingue, où les pièces et documents officiels seraient eux aussi bilingues.

Il y a donc le « modèle Laeremans », le « modèle Vandenberghe » (scission verticale), et le « modèle Maingain » (voir doc. Chambre, nº 53-423). Cette dernière proposition de loi s'intitule, comme par hasard, « Proposition de loi organisant le dédoublement linguistique du tribunal de première instance de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles ». Les textes proposés ici organisent eux aussi un dédoublement.

Or, c'est là l'élément central: la différence entre un dédoublement et une scission.

M. Cheron fait observer que, pourtant, c'est bien Olivier Maingain qui, à la Chambre, a combattu le texte proposé par la majorité.

M. Laeremans répond que ce dernier argument relève du camouflage.

Le secrétaire d'État, M. Verherstraeten, conteste fermement que les huit partis négociateurs aient opté pour le système proposé par M. Maingain.

Les différentes propositions de loi déposées dans le passé à propos de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde et de sa scission éventuelle étaient articulées autour de deux axes.

Le premier est celui de la territorialité de la compétence du tribunal: celui-ci est-il ou non compétent pour l'ensemble de l'arrondissement de Bruxelles et de Hal-Vilvorde ?

Le second est celui de la législation sur l'emploi des langues. Dans la situation actuelle, un tribunal bruxellois bilingue est compétent pour l'ensemble de l'arrondissement de Bruxelles et de Hal-Vilvorde, mais c'est la législation sur l'emploi des langues (cf. l'article 622 du Code judiciaire) qui assure le dispatching. Il est exact, en effet, que M. Maingain, comme d'autres, parmi lesquels M. Vandenberghe, a proposé un dédoublement du tribunal, c'est-à-dire la création de deux tribunaux unilingues compétents pour l'ensemble de l'arrondissement. Cependant, en ce qui concerne le dispatching sur base de la langue, la proposition introduite par les huit cosignataires est en complète opposition avec ce que proposait M. Maingain.

En effet, en matière de législation sur l'emploi des langues, Olivier Maingain a opté purement et simplement pour le principe de personnalité, alors que les huit cosignataires maintiennent intégralement l'article 3, et presque totalement l'article 4, à l'exception de quelques règles de renvoi linguistique (en rapport avec le dédoublement du tribunal) et du droit de recours.

Ce que dit M. Laeremans n'est donc pas exact.

M. Laeremans répond qu'il vise non la lettre des textes mais le modèle qui les sous-tend.

Le secrétaire d'État, M. Verherstraeten, objecte que le précédent orateur impute tant à M. Maingain qu'à M. Vandenberghe des choses inexactes. L'intervenant renvoie à la proposition de loi déposée par M. Vandenberghe en 2003 (voir doc. Sénat, nº 3-159/1), puis redéposée en 2007 et non réactualisée. Les développements relatifs à l'article 23 exposent clairement que les deux tribunaux résultant du dédoublement restaient compétents et pour Bruxelles et pour Hal-Vilvorde.

M. Vanlouwe demande s'il faut déduire de ce qui vient d'être dit que les textes à l'examen se situent dans la ligne de la proposition de loi de M. Vandenberghe.

Le secrétaire d'État, M. Verherstraeten, répond qu'il n'a pas dit cela. Les textes à l'examen dérogent évidemment à la proposition de loi de M. Vandenberghe parce que cette dernière prévoit notamment des modifications à l'article 622 du Code judiciaire qui n'ont pas été retenues par les huit auteurs des textes en discussion. Ceux-ci ont retenu pour partie des éléments qui se retrouvent dans la proposition de loi de M. Vandenberghe, pour partie des éléments qui se retrouvent dans celle de M. Maingain, mais en ce qui concerne le dispatching linguistique, les textes à l'examen diffèrent de ces deux propositions.

M. Vanlouwe aimerait obtenir plus de précisions en ce qui concerne le principe de territorialité tel qu'il s'applique dans la proposition de loi de M. Vandenberghe.

Le secrétaire d'État, M. Verherstraeten, renvoie aux développements précédant cette proposition, où l'on peut lire: « La compétence territoriale des tribunaux francophones et des tribunaux néerlandophones est identique (puisqu'ils couvrent le même ressort défini par la loi), mais elle est limitée par la langue de la procédure » (doc. Sénat, nº 3-159/1, p. 17).

M. Vanlouwe répond qu'il faut lire également ce qui figure au point 3 des développements précédant la proposition en question: « Toutes les affaires néerlandophones seront ainsi instruites par un tribunal néerlandophone, territorialement compétent pour le territoire de Hal-Vilvorde-Bruxelles-Capitale, les affaires francophones étant instruites par un tribunal francophone, territorialement compétent pour le territoire de Bruxelles-Capitale: il s'agit d'une scission, horizontale, asymétrique » (doc. Sénat, nº 3-159/1, p. 5, 3.1.1).

Le secrétaire d'État répète que l'on déroge bien au texte de M. Vandenberghe. Cette dérogation concerne l'article 622 du Code judiciaire et non l'étendue de la compétence territoriale du tribunal.

M. Laeremans réplique que le précédent orateur procède à des citations sélectives. À propos de l'article 23 de la proposition de M. Vandenberghe, les développements précisent encore: « Seuls les tribunaux néerlandophones sont compétents pour connaître des affaires dont la compétence est déterminée par un lieu du territoire de Hal-Vilvorde » (doc. Sénat, n 3-159, p. 17). Dans la partie générale des mêmes développements, on peut lire aussi: « Toutes les affaires néerlandophones seront ainsi instruites par un tribunal néerlandophone, territorialement compétent pour le territoire de Hal-Vilvorde-Bruxelles-Capitale, les affaires francophones étant instruites par un tribunal francophone, territorialement compétent pour le territoire de Bruxelles-Capitale: il s'agit d'une scission horizontale, asymétrique. » (idem, p. 5).

Le résultat est qu'il reste encore une différence entre les compétences des tribunaux francophones et néerlandophones en ce qui concerne Hal-Vilvorde.

Si l'on veut adresser une citation à un habitant de Hal-Vilvorde, il faut le faire en néerlandais, et la procédure a lieu en néerlandais, à moins que le changement de la langue de la procédure ne soit demandé. À l'avenir, ce changement sera plus facile qu'auparavant.

En matière de comparution volontaire, la règle change. Dans le système actuel, deux habitants de Dilbeek qui veulent comparaître volontairement doivent le faire en néerlandais. Ce ne sera plus le cas à l'avenir.

Le secrétaire d'État, M. Verherstraeten, précise qu'une exception est prévue pour les règles d'ordre public en matière de territorialité.

M. Laeremans répond qu'il faut définir ce qui est d'ordre public et ce qui ne l'est pas. Or, cette définition semble floue.

En tout cas, il sera désormais plus facile, en cas de comparution volontaire, de transférer une affaire vers un arrondissement francophone. L'orateur pense que, même pour des conflits très simples, par exemple locatifs, relevant de la compétence du juge de paix, et dont on penserait qu'ils sont clairement liés au territoire (par exemple en raison du lieu de situation d'un immeuble), on pourrait très facilement obtenir le transfert vers le tribunal francophone le plus proche. Les exceptions d'ordre public seront très rares.

M. Anciaux demande si le précédent orateur voit un problème fondamental dans le fait que deux francophones en Flandre ou deux Flamands en Wallonie, qui sont en conflit, puissent demander un renvoi devant un autre tribunal afin de faire juger leur affaire dans leur langue.

Quel est l'inconvénient d'un tel système, qui réalise une meilleure administration de la justice ?

M. Laeremans répond que, tant que le droit est le même partout, cela ne pose pas de problème. Par contre, il en ira autrement si un jour, la Flandre décide d'adopter une législation totalement différente de celle de la Wallonie dans une matière déterminée.

M. Delpérée répond que ce cas de figure se présente déjà aujourd'hui. Le tribunal de Liège, par exemple, rend parfois des décisions en appliquant des décrets flamands.

M. Anciaux rappelle qu'à l'heure actuelle, Hal-Vilvorde fait partie de l'arrondissement judiciaire bilingue de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

M. Laeremans fait remarquer qu'en vertu du principe de territorialité « Hal-Vilvorde » est considéré comme néerlandophone.

M. Anciaux répond que cela ne changera pas à l'avenir. Les règles en matière d'emploi des langues pour ce qui concerne les actes introductifs d'instance ne changent pas.

M. Laeremans admet que les citations devront être rédigées en néerlandais. Par contre, les règles relatives à la comparution volontaire sont modifiées. Deux néerlandophones du Brabant flamand pourront à l'avenir faire du shopping juridique. Ces deux justiciables pourront porter leur litige devant les tribunaux francophones qui seront, vu la disparité au niveau des cadres, nettement moins encombrés que leurs pendants flamands.

M. Deprez ne voit pas quel est le problème si des justiciables décident librement de faire trancher leur litige par tel ou tel tribunal, selon leur préférence.

M. Laeremans pense que le fait de fixer une clé de répartition de 80 % de magistrats francophones et 20 % de néerlandophones favorise nettement les juridictions francophones au détriment des néerlandophones. La conséquence sera que les procédures devant les tribunaux néerlandophones seront plus longues car ces juridictions seront surchargées. C'est une politique discriminatoire car l'on applique deux poids et deux mesures. Les justiciables néerlandophones de la périphérie seront indirectement incités à recourir aux juridictions francophones qui disposeront de moyens supplémentaires et pourront ainsi juger plus rapidement. L'orateur attire l'attention sur cette conséquence inéluctable d'une concurrence causée par un dédoublement des juridictions sur un même territoire.

M. Laeremans reconnaît que sur le plan des principes, la scission du parquet de Bruxelles est, en soi, un élément positif. Il se réjouit du fait qu'un parquet distinct soit créé pour l'arrondissement de Hal-Vilvorde. De cette manière, il sera possible de mener une politique criminelle adaptée à l'arrondissement dont la criminalité n'a rien à voir avec celle de Bruxelles.

Première observation

Cette scission est cependant vidée de sa substance par la désignation, au sein du parquet de Hal-Vilvorde, de magistrats francophones — l'orateur estime qu'ils seront cinq — qui ne sont pas sous les ordres du procureur du Roi flamand de Hal-Vilvorde mais resteront subordonnés au procureur du Roi (francophone) de Bruxelles.

M. Laeremans demande des précisions quant à la répartition des magistrats de l'actuel parquet de Bruxelles. Le parquet de Hal-Vilvorde sera composé de 20 % du cadre du parquet de Bruxelles, soit 20 % de 129 magistrats, c'est-à-dire 29 magistrats néerlandophones. D'autres chiffres ont été cités, notamment par le gouverneur du brabant flamand qui a parlé de 31 magistrats et estimé que le cadre devait même être porté à 38 magistrats. Le gouvernement peut-il éclairer les membres sur ce point ?

Il note ensuite que les magistrats francophones détachés au parquet de Hal-Vilvorde traiteront par priorité des affaires francophones. Qu'est-ce qui justifie une telle priorité dans le traitement des dossiers francophones ? Les dossiers francophones sont-ils plus importants que les dossiers néerlandophones ? N'est-ce pas une politique de deux poids et deux mesures ?

L'intervenant demande pourquoi il est indispensable que des délinquants francophones qui commettent une infraction à Hal-Vilvorde soient poursuivis par des magistrats de parquet francophones ? Les magistrats néerlandophones bilingues du parquet de Hal-Vilvorde ne sont-ils pas à même de traiter ce contentieux ? Le régime proposé fait preuve d'un manque de confiance vis-à-vis des magistrats néerlandophones du parquet de Hal-Vilvorde.

M. Anciaux précise qu'il n'y a aucune règle d'exclusivité. Le texte à l'examen ne s'oppose pas à ce que le parquet de Hal-Vilvorde poursuive un auteur francophone. C'est le procureur du Roi de Hal-Vilvorde qui fixera les règles de politique criminelle pour son arrondissement. L'orateur trouve positif que l'on détache des magistrats du parquet de Bruxelles au parquet de Hal-Vilvorde.

M. Laeremans n'en est pas convaincu. À l'heure actuelle, ce sont des magistrats de parquet néerlandophones qui gèrent les dossiers de Hal-Vilvorde, y compris les affaires en français.

M. Anciaux rappelle que le parquet bilingue de Bruxelles est actuellement compétent pour Hal-Vilvorde. Un substitut francophone peut dès lors être en charge d'un dossier de prise d'otages à Hal.

M. Laeremans répond qu'au sein du parquet de Bruxelles, une section spécifique, composée de magistrats néerlandophones, est chargée des dossiers de Hal-Vilvorde.

M. Vanlouwe se demande pourquoi prévoir le détachement de magistrats francophones au parquet de Hal-Vilvorde. C'est un signal politique. N'est-il pas suffisant de prévoir un certain nombre de magistrats néerlandophones bilingues ? Pourquoi cette méfiance à l'égard de magistrats néerlandophones bilingues ? L'orateur ne comprend pas pourquoi il faut recourir à la technique du détachement de magistrats qui ne seront pas sous l'autorité hiérarchique du procureur du Roi de Hal-Vilvorde ?

M. Anciaux répond que c'est un compromis politique.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux réformes institutionnelles, renvoie au texte du projet de loi. Les huit partis se sont accordé sur le détachement au parquet de Hal-Vilvorde de cinq magistrats de parquet francophones justifiant d'un bilinguisme fonctionnel. Ces magistrats traiteront par priorité des affaires francophones. Si le prévenu a demandé le changement de langue, ces magistrats citeront l'auteur devant le tribunal correctionnel ou de police francophone.

Le projet ne prévoit cependant aucune exclusivité. Des magistrats néerlandophones bilingues du parquet de Hal-Vilvorde pourront également traiter des dossiers dans lesquels le changement de langue a été demandé. Ce sera par exemple le cas dans l'hypothèse d'un afflux de dossiers francophones à Hal-Vilvorde auquel les cinq magistrats détachés ne sauraient pas faire face. Il faudra cependant voir comment les choses se passeront sur le terrain. Le détachement de magistrats francophones n'est pas une marque de défiance à l'égard des magistrats néerlandophones du parquet de Hal-Vilvorde. Cette mesure est dictée par un souci d'efficacité.

M. Laeremans trouve que le projet à l'examen donne l'impression que seuls les cinq magistrats francophones détachés peuvent citer devant une juridiction francophone, au détriment de leurs collègues néerlandophones. Il se réjouit dès lors des précisions apportées par le secrétaire d'État.

Deuxième observation

L'intervenant aborde ensuite la question des exigences linguistiques pour les magistrats détachés à Hal-Vilvorde. Celles-ci sont assez souples. On exige de leur part un « bilinguisme fonctionnel » et non un « bilinguisme approfondi » alors que ces magistrats travailleront dans une région unilingue néerlandophone. Comment vont-ils communiquer avec les services de police, les autres magistrats, etc., s'ils ne disposent pas d'une connaissance approfondie du néerlandais ? Pourquoi les exigences en matière linguistique ne sont-elles pas plus élevées ?

L'intervenant est convaincu que les magistrats détachés vont encourager les allophones de Hal-Vilvorde à opter pour une procédure en français. Un grand nombre de dossiers sera de la sorte orienté vers les juridictions francophones plus laxistes, où l'on libère plus rapidement, etc.

À l'heure actuelle, le nombre de changements de langue qui sont demandés au niveau des tribunaux de police de Hal-Vilvorde est d'environ 1 %. C'est un pourcentage très réduit. Le changement de langue et le renvoi vers Bruxelles n'est pas automatique. Le tribunal contrôle que l'auteur des faits ne connaît pas le néerlandais. Le projet à l'examen va complètement changer la donne sur ce point. Le système mis en place encouragera les changements de langue. On dissuade de la sorte les allochtones de recourir aux juridictions néerlandophones. Le détachement des cinq magistrats du parquet à Hal-Vilvorde a dès lors pour effet d'entraver l'intégration des allophones. L'intervenant pense qu'il serait préférable de remplacer les magistrats francophones détachés par des magistrats néerlandophones justifiant d'une connaissance approfondie du français. Il y a vraiment un manque de confiance vis-à-vis des magistrats néerlandophones.

Troisième réflexion

Pourquoi ces magistrats de parquet francophones ne peuvent-ils pas être placés sous l'autorité du procureur de Hal-Vilvorde ? Pourquoi partage-t-on cette autorité hiérarchique ? D'une part, la politique des poursuites dans l'arrondissement de Hal-Vilvorde est déterminée par le procureur de l'arrondissement en question, tandis que l'autorité hiérarchique sur les magistrats de parquet francophones détachés reste entre les mains du procureur de Bruxelles. L'on crée ainsi une espèce d'anarchie qui contient d'emblée les germes d'un conflit. C'est en contradiction avec la nécessité d'une politique de sécurité uniforme à Hal-Vilvorde où il est essentiel que le procureur de cet arrondissement soit hiérarchiquement compétent et qu'il puisse, au besoin, intervenir. Nulle part ailleurs en Belgique il n'est possible à un procureur de littéralement saboter un autre procureur par le biais de la compétence disciplinaire sur un magistrat relevant d'un autre procureur.

Quatrième réflexion

La réglementation proposée va à l'encontre du principe de territorialité et méconnaît totalement le caractère néerlandophone de Hal-Vilvorde. Dans les communes à facilités, on ne nomme plus actuellement de personnel francophone, mais uniquement des personnes ayant un diplôme établi en néerlandais qui, dans un certain nombre de cas, doivent justifier de la connaissance du français. Une personne qui travaille par exemple au service d'entretien des parcs et jardins d'une commune à facilités ne doit pas avoir une connaissance approfondie du français.

Eu égard à la problématique des communes à facilités, l'intervenant ne trouve pas illogique qu'une partie des magistrats et magistrats de parquet flamands connaissent le français. Il est admissible que des magistrats flamands prononcent des jugements en français dans le cadre d'un recours contre une décision du juge de paix d'un tribunal flamand, mais cela ne justifie pas pour autant la désignation de magistrats de parquet francophones.

Cinquième réflexion

La réglementation proposée aura pour effet que, dans les dossiers impliquant un auteur allophone, toute l'enquête sera confiée dès le départ à un juge d'instruction francophone et sera menée en grande partie en français, même si le dossier comporte de nombreux autres éléments « néerlandophones ». L'intervenant donne l'exemple d'un trio de voleurs est-européens ou nord-africains, domiciliés à Hal, qui commettent un vol par effraction dans la maison d'une famille néerlandophone à Dworp, avec des déclarations de témoins en néerlandais et une enquête de police réalisée également en néerlandais. Malgré la présence de ces éléments néerlandophones, l'enquête sera effectuée en français alors qu'aujourd'hui, elle le serait en néerlandais parce que les magistrats de parquet compétents sont néerlandophones.

M. Anciaux trouve que cet exemple ne correspond pas à la réalité. Un néerlandophone qui commet une infraction sera toujours jugé par un tribunal néerlandophone.

Sixième réflexion

Les juges d'instruction et les juges répressifs francophones sont depuis toujours plus laxistes que leurs collègues néerlandophones. Les auteurs étrangers, souvent francophones, auront donc davantage tendance à opter pour un juge d'instruction ou un juge répressif francophone.

M. De Decker rappelle que les auteurs d'un meurtre à Uccle ont écopé de la peine maximale devant la cour d'assises francophone de Bruxelles.

L'intervenant précise que le cadre du parquet pour BHV est de 144 magistrats mais il manque à l'heure actuelle 42 substituts du procureur du Roi à Bruxelles, les deux régimes linguistiques confondus. Une des origines du « laxisme » général à BHV vient du fait que ces magistrats sont complètement dépassés par le nombre de dossiers. À l'heure actuelle, le procureur du Roi demande aux zones de police de poursuivre des faits avec des amendes communales administratives dans des domaines comme les menaces et les coups simples.

M. Laeremans répond que le cadre compte selon lui 121 magistrats et qu'il en manque actuellement 20 (2 néerlandophones et 18 francophones).

L'Ordre des barreaux flamands a aussi protesté avec force contre le détachement de 5 magistrats de parquet francophones à Bruxelles-Hal-Vilvorde en raison de la pénurie de magistrats bilingues à Bruxelles.

Dans une interview parue dans le Juristenkrant du 26 octobre 2011, M. Jos Colpin, premier substitut et ancien porte-parole du parquet de Bruxelles, a réagi comme suit:

(traduction) « Comment ont-ils pu imaginer une chose pareille ? Ces personnes dépendent du procureur de Bruxelles. Comment le chef de corps de Hal-Vilvorde pourra-t-il encore mener une bonne politique du personnel ? Tout cela donne l'impression que l'intention est de créer un poste d'adjoint amélioré du procureur du Roi de Bruxelles. J'espère que cela ne se passera pas comme ça. De plus, nous n'avons pas besoin de ces francophones à Hal-Vilvorde. Les néerlandophones y maîtrisent suffisamment le français pour traiter eux-mêmes les affaires en français, comme c'est le cas aujourd'hui et comme cela a toujours été le cas ces dernières décennies. (....) Je présume qu'il y a là-derrière une intention politique, à savoir garder une influence de plus en plus grande à Hal-Vilvorde dans la perspective de l'élargissement de Bruxelles. »

M. Fernand Keulenaar, avocat, a déclaré dans la « Gazet van Antwerpen » du 7 juin 2012: « Je ne vois vraiment pas pourquoi les magistrats néerlandophones bilingues de Hal-Vilvorde ne seraient pas capable de s'occuper de ces criminels francophones. Le principe de territorialité doit s'incliner devant le principe de personnalité. Si un auteur francophone demande que la procédure se déroule en français, ce ne sont pas les instances locales qui sont compétentes, même si elles sont parfaitement capables de juger une affaire en français, mais bien une instance sise dans un autre ressort. Ce n'est pas le territoire, mais bien la langue de l'intéressé(e) qui détermine quelle instance sera compétente en l'espèce. Le principe de personnalité, selon lequel on opte en outre pour la langue de l'auteur au lieu de celle de la victime, est mélangé au principe de territorialité et l'emporte sur ce dernier. Cela ne sera pas non plus sans effet au civil. Le lien avec le parquet bruxellois est ancré parce que les magistrats détachés le sont et le restent sous l'autorité du procureur de Bruxelles, tandis que le procureur de Hal-Vilvorde fixe la politique en matière de poursuites. Quel sera le pouvoir réel de ce dernier en cas de litige ? Je m'attends du reste à ce qu'à long terme, les magistrats francophones détachés travaillent avec la police bruxelloise et non pas avec celle de Hal-Vilvorde, si bien que toute l'instruction risque de se dérouler en français. »

M. Hendrik Vuye, professeur de droit constitutionnel aux Facultés universitaires de Namur (octobre 2011), voit les choses comme ceci: « Pourquoi ces affaires ne peuvent-elles pas être traitées par des Flamands bilingues ? Je comprends que l'on puisse demander à être jugé dans sa langue, mais dire que les francophones ne peuvent être jugés que par des francophones dépasse les bornes. C'est un argument ethnique qui ne pourra jamais conduire à une pacification. (...) Flamands et francophones seront déçus à terme: les francophones parce qu'ils sont bien loin du bilinguisme demandé et les Flamands parce que cet accord sur BHV vide largement de sa substance le principe de territorialité. Que reste-t-il en effet de la territorialité si des procureurs bruxellois francophones et des juges bruxellois francophones sont actifs en Flandre ? La territorialité devient ainsi une véritable passoire ».

M. Laeremans souhaite poser au total 64 questions au secrétaire d'État et aux partis de la majorité institutionnelle.

Les treize premières concernent les magistrats de parquet détachés et l'auditorat:

1. Quelle est la réaction à la critique du Conseil d'État selon laquelle la proportion 80/20 n'est pas motivée ici non plus ? Pourquoi ajoute-t-on par exemple cinq magistrats de parquet francophones à Hal-Vilvorde ?

2. Qu'entend-on dans les accords par le « traitement prioritaire » des affaires francophones ? Les francophones vont-ils bénéficier d'une quelconque priorité ?

3. À la page 8 des développements de la proposition de loi (doc. Chambre, n 53-2140/1), il est dit que les magistrats de parquet détachés traiteront par priorité les affaires dans lesquelles le suspect a fait choix de la langue française. Ce point pourrait-il être précisé ? Quelle est la différence entre les deux procédures ?

4. Les termes « par priorité » signifient-ils que ces francophones, qui ne justifient pas de la connaissance approfondie de la langue néerlandaise, vont également traiter des dossiers relatifs à des néerlandophones ?

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que les magistrats de parquet de Hal-Vilvorde et de Bruxelles sont rattachés au Tribunal de première instance de « Bruxelles néerlandophone ». Les magistrats de parquet francophones près le parquet de Bruxelles et près celui de Hal-Vilvorde sont rattachés au tribunal francophone de Bruxelles. Conformément à l'article 12 de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, si la poursuite (en d'autres mots donc la citation) est censée passer devant un tribunal francophone de Bruxelles, elle doit être traitée par des magistrats de parquet rattachés à ce tribunal. Cela veut donc dire que si dans le cadre d'un dossier néerlandophone à Hal-Vilvorde, l'intéressé demande que la procédure ait lieu en français, il devra être cité à comparaître devant le tribunal répressif francophone. La poursuite dans cette affaire sera exercée par un magistrat de parquet francophone parce qu'il est le seul à être rattaché à ce tribunal francophone en application de l'article 12 de la loi du 5 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire.

M. Laeremans pense que M. Verherstraeten vient de dire le contraire.

M. Verherstraeten répond qu'il s'est borné à dire il y a quelques instants qu'il n'y a pas d'exclusive, comme M. Laeremans l'a d'ailleurs relevé à juste titre. Mais si, à la fin de l'information, une poursuite débouche sur une citation, ce sera naturellement l'article 12 de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire qui trouvera à s'appliquer.

M. Laeremans en conclut que seul un des cinq magistrats détachés pourra requérir à l'audience.

M. Verherstraeten répond qu'il faut faire une distinction entre l'instruction et la poursuite. Il y a en outre plusieurs manières d'exercer l'action publique: la citation directe, la citation ordinaire ou, en cas d'enquête judiciaire, le règlement de la procédure par la chambre du conseil.

Ni l'article 12, ni l'article 16 de la loi du 5 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire ne sont modifiés par la proposition de loi. Cela signifie que presque rien ne change en pratique.

M. Laeremans estime qu'actuellement, aucun habitant de Hal-Vilvorde ne peut être cité directement devant un tribunal francophone.

En revanche, les cinq magistrats de parquet francophones pourront citer à comparaître.

M. Anciaux dément cette affirmation. Par contre, le suspect pourra demander un changement de langue qui aura pour effet de renvoyer l'affaire devant un tribunal francophone. Ainsi, un suspect demandera lors de sa première audition que la procédure se déroule en français et il élira domicile chez un avocat francophone à Bruxelles. De ce fait, la citation pourra aussi se faire en français.

M. Deprez donne l'exemple d'un francophone bilingue à Bruxelles-Halle-Vilvorde qui désire suivre la procédure en néerlandais. Il pourra le faire en néerlandais devant un magistrat néerlandophone. Un néerlandophone parfaitement bilingue qui a commis un méfait préférera d'être jugé par un magistrat francophone vu le soi-disant laxisme des magistrats francophones.

M. Laeremans pense que la criminalité est principalement le fait de personnes allochtones, pour toutes sortes de raisons, notamment culturelles. Un étranger ou un Belge d'origine étrangère pourra maintenant faire du « shopping légal ».

M. Anciaux trouve que M. Laeremans a tort de penser que la situation va empirer à cause de la scission du parquet. C'est l'inverse qui est vrai.

M. Laeremans retient surtout que rien ne change en ce qui concerne la procédure de citation. Un francophone dont le dossier est traité en français par un magistrat du parquet détaché doit passer, en tout état de cause, par le tribunal néerlandophone. Il appartient au prévenu de demander un changement de langue, mais cela n'en reste pas moins un système singulier.

5. Pourquoi ces magistrats francophones doivent-ils seulement justifier d'un « bilinguisme fonctionnel » et non d'un « bilinguisme approfondi », alors qu'ils travaillent pourtant dans une région unilingue néerlandophone ? Peuvent-ils, dans ces conditions, traiter des dossiers néerlandophones et requérir en néerlandais ?

M. Verherstraeten répond que ces magistrats de parquet sont rattachés au tribunal de première instance francophone de Bruxelles et qu'ils ne peuvent par conséquent requérir qu'en français devant les tribunaux francophones, de la même manière que les magistrats néerlandophones de Hal-Vilvorde, rattachés au tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles, ne peuvent requérir qu'en néerlandais devant les tribunaux néerlandophones.

6. Pourquoi est-il nécessaire de détacher des magistrats de parquet francophones et pourquoi des néerlandophones bilingues ne suffisent-ils pas ?

7. Quelles sont les règles applicables actuellement ? Combien la section de Hal-Vilvorde compte-t-elle de magistrats ? Est-il exact qu'ils sont tous néerlandophones et que les dossiers des allophones de Hal-Vilvorde sont actuellement traités par des néerlandophones bilingues ?

8. À l'heure actuelle, combien de dossiers de Hal-Vilvorde sont en néerlandais, et combien en français ?

9. Le nouveau régime aura-t-il pour conséquence que la police de Hal-Vilvorde effectuera désormais des devoirs d'enquête en français ? Des missions seront-elles données en français (des apostilles, par exemple) ? Quelles seront les différences par rapport à la situation actuelle ?

10. Y aura-t-il des conséquences en termes d'exigences linguistiques imposées à la police de Hal-Vilvorde ? Dans quelle mesure celle-ci peut-elle établir des procès-verbaux en français ? Ou bien la police de Hal-Vilvorde établit-elle des procès-verbaux en néerlandais dans le cadre de dossiers pénaux francophones ? À moins que les magistrats de parquet francophones ne puissent faire appel à des policiers francophones de Bruxelles ?

11. Comment pourra-t-on éviter une politique de deux poids, deux mesures ? L'intervenant dit avoir compris qu'il sera toujours possible de choisir une autre langue jusqu'au moment de la comparution devant le juge.

12. Comment fera-t-on pour éviter le « shopping légal » ? Comment évitera-t-on, par exemple, que des étrangers qui ont une connaissance identique du français et du néerlandais optent systématiquement pour la procédure en français parce que le tribunal francophone mène une politique plus laxiste ?

13. Pourquoi place-t-on les magistrats de parquet détachés francophones sous l'autorité hiérarchique du procureur bruxellois ? Que vise-t-on concrètement par là ? Cela n'entraînera-t-il pas des contradictions et un risque d'ingérence depuis Bruxelles ?

La série de questions suivante concerne le parquet et l'auditorat du travail de Bruxelles et, en particulier, le démantèlement progressif du bilinguisme.

« Dans l'attente de la fixation des cadres, notamment sur la base de la charge de travail, le parquet de Bruxelles se composera désormais d'un cinquième de néerlandophones et de quatre cinquièmes de francophones. Sur l'ensemble des magistrats, un tiers seront bilingues. »

Lue conjointement avec le chapitre précédent (parquet de Hal-Vilvorde), cette réglementation implique que le parquet de Bruxelles garde un cadre de 97 magistrats, dont 19 néerlandophones et 78 francophones. M. Laeremans aurait préféré avoir à Bruxelles une proportion de 25 %-75 % (cf. sa propre proposition de loi) plutôt qu'une clé de 20 %-80 %, mais étant donné la charge de travail très élevée pour les magistrats francophones en matière pénale à Bruxelles, il peut admettre la clé de répartition proposée ici. Malgré tout, ces 20 % de néerlandophones sont un minimum absolu. Si l'on passe en dessous de ce seuil, les magistrats du parquet néerlandophones risquent d'être totalement marginalisés. C'est ce qui va vraiment se passer à terme, vu que le cadre définitif dépendra de la charge de travail. Pour l'intervenant, 20 % est un seuil minimum absolu.

Par contre, l'intervenant n'est absolument pas d'accord avec la fin progressive de l'obligation de bilinguisme au parquet, qui passe de 2/3 à 1/3 à peine. Comme Bruxelles est une ville bilingue et que le parquet bruxellois doit collaborer tant avec le tribunal néerlandophone qu'avec le tribunal francophone et avec des policiers néerlandophones et francophones, une obligation de bilinguisme généralisée reste nécessaire pour les magistrats du parquet. Au demeurant, pourquoi exiger le bilinguisme de la police, et non des magistrats, qui sont pourtant mieux formés ?

Étant donné que la règle d'1/3 s'applique globalement et non par groupe linguistique, les francophones ne sont presque plus incités à passer un examen de bilinguisme. On pourrait au moins imposer à tous les magistrats du parquet une connaissance passive de l'autre langue nationale, afin qu'ils soient capables de comprendre les documents et les jugements dans l'autre langue.

Vouloir imposer des obligations de bilinguisme aussi lourdes (chaque fois 1/3) à Bruxelles qu'à Hal-Vilvorde est tout à fait illogique et témoigne une fois de plus d'une volonté d'assimiler le Brabant flamand à Bruxelles. Il faut soit augmenter le pourcentage à Bruxelles, soit le diminuer à Hal-Vilvorde.

M. Anciaux réplique que le projet prévoit d'adapter les rapports de force dès que la charge de travail sera connue. L'actuel gouvernement va s'atteler à la mesure de la charge de travail.

M. Laeremans trouve cette approche un peu naïve et souhaite d'autre part poser quelques questions ponctuelles:

14. Pourquoi est-il suffisant d'avoir un tiers de bilingues à Bruxelles ? N'est-il pas indispensable, surtout à Bruxelles, que tous les magistrats de parquet possèdent une connaissance minimale de l'autre langue nationale ? Le secrétaire d'État est-il disposé à soutenir un amendement qui imposerait au moins une connaissance passive à tous les magistrats, afin qu'ils soient en mesure de lire des documents rédigés dans l'autre langue ?

15. Est-il exact que l'exigence d'un tiers de bilingues s'applique globalement et non par groupe linguistique ? Pourquoi en est-il ainsi ? Le secrétaire d'État est-il disposé à changer cette situation pour éviter que tous les efforts soient de nouveau fournis par le même groupe linguistique ? Actuellement, la grande majorité des bilingues sont des néerlandophones. Si l'on abaisse le pourcentage obligatoire, les francophones ne seront plus incités, pour de nombreuses années, à passer l'épreuve de bilinguisme, puisque la proportion d'un tiers sera atteinte immédiatement.

M. Anciaux demande ensuite quel pourcentage de dossiers répressifs en néerlandais sont portés devant un tribunal pénal. En ce qui concerne le parquet, l'intervenant se demande si la mesure de la charge de travail ne va pas révéler que dans les 19 communes de Bruxelles, moins de 20 % des dossiers sont en néerlandais. La période transitoire pourra donc également tourner à l'avantage des néerlandophones.

M. Laeremans répond que selon les données fournies par M. Hennart, président du tribunal de première instance de Bruxelles, 2 209 jugements ont été rendus en néerlandais en matière répressive en 2010, contre 6 180 en français, soit un rapport de 26,33 %-73,67 %. Pourtant, à la télévision, ce magistrat n'a pas hésité à déclarer qu'en matière répressive, le rapport était de 20 %-80 %.

M. Anciaux répond que d'après les chiffres communiqués par le Conseil supérieur de la Justice à propos des décisions correctionnelles, le rapport était de 21,70 %-78,30 %.

M. Laeremans se réfère à l'avis émis d'office par le Conseil supérieur de la Justice sur la scission de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles (p. 13), qui présente pourtant d'autres chiffres. Il atteste qu'en 2009, 2010 et 2011, le nombre d'affaires correctionnelles en néerlandais représentait entre 26 et 28 % du total. Ce n'est que dans un seul secteur, celui des décisions correctionnelles, que le pourcentage a exceptionnellement chuté à 21,70 % en 2011. La majorité institutionnelle s'est contentée de retenir comme critère ce dernier chiffre, exceptionnellement bas par rapport aux autres. Cela n'est pas correct.

M. Vanlouwe observe que la mesure de la charge de travail ne doit pas seulement prendre en compte le flux des dossiers sortants, mais aussi celui des dossiers entrants, la nature des dossiers et la charge de travail proprement dite.

M. Anciaux se demande si la mesure de la charge de travail qui est prévue pour le parquet de Bruxelles n'avoisinera pas le rapport 20 % — 80 % ou si elle ne sera même pas inférieure à 20 % pour les néerlandophones, si bien que pour ces derniers, la période de transition pourrait être plus bénéfique que le résultat de la mesure de la charge de travail.

M. Laeremans confirme que la mesure de la charge de travail pourrait révéler qu'à Bruxelles, à peine 10 % du travail proprement dit s'effectue en néerlandais. Il ne faut pas être un grand prophète pour prédire qu'actuellement, même la proportion de 20 % est remise en cause. Le texte prévoit en effet que la mesure de la charge de travail ne pourra avoir pour effet de diminuer le nombre de magistrats respectif de chaque groupe linguistique. Supposons que sur 100 magistrats travaillant au parquet de Bruxelles, 20 soient flamands (20 %). Supposons ensuite que la mesure de la charge de travail révèle une proportion de 10 % de néerlandophones seulement. Les francophones obtiendront dans ce cas des magistrats supplémentaires. Cela n'aura pas pour effet de réduire le nombre de magistrats flamands à moins de 20, mais de faire passer leur proportion globale en dessous des 20 %.

M. Anciaux constate que d'après M. Laeremans, la période transitoire durera une éternité, alors qu'il dit lui-même que l'on procédera à une mesure de la charge de travail. D'après M. Laeremans, la période transitoire aura également une incidence particulièrement négative. Mais pour le parquet, les répercussions ne seront quand même pas si négatives. M. Laeremans pourrait-il trancher: l'effet sera-t-il négatif ou positif ?

Selon M. Laeremans, la position de M. Anciaux est correcte en ce qui concerne le parquet. Mais même là, la situation est incertaine. Pour pouvoir fonctionner au parquet sans être marginalisé, il faut un pourcentage minimum d'environ 20 %. Cinq magistrats ont été placés au parquet de Hal-Vilvorde parce que cela crée ainsi une sorte de capacité de résistance, un mini-corps qui peut exister de manière autonome sans être marginalisé. Mais au parquet de Bruxelles, cela risque à terme de se produire avec les néerlandophones.

M. Laeremans a encore quelques questions à poser à propos du démantèlement progressif du bilinguisme. Pourquoi 1/3 de bilingues à Hal-Vilvorde et donc le même pourcentage qu'à Bruxelles ? Pourquoi Hal-Vilvorde et Bruxelles sont-ils traités sur un pied d'égalité ? Les magistrats détachés sont-ils inclus dans cette proportion ? Ou le 1/3 vise-t-il uniquement le cadre permanent de néerlandophones ?

L'intervenant pose la même question pour les secrétaires de parquet. Pourquoi sont-ils les seuls à devoir être en partie bilingues, et non les juristes de parquet et les employés de parquet ? Dans les greffes, il doit y avoir 1/3 de néerlandophones, alors que ce n'est pas le cas dans les parquets. Quelle est la justification de la différence de traitement et quelle en est la cause ? Quelle est la situation à l'heure actuelle ? Qui est soumis à des obligations linguistiques ? Y a-t-il ici aussi un affaiblissement ou même une disparition des exigences linguistiques ? Quelque chose change-t-il ? Le secrétaire d'État peut-il préciser les connaissances linguistiques actuelles du personnel du parquet ? Dispose-t-on de chiffres en la matière ? Ne serait-il pas logique, surtout à Bruxelles, d'exiger une connaissance passive minimale de la part de tous les membres du personnel et le secrétaire d'État serait-il disposé à soutenir un amendement en ce sens ?

M. Laeremans espère obtenir une réponse à ces questions étant donné l'importance de la matière. Il souligne que le Conseil d'État demande aussi une réponse formelle dans plusieurs domaines.

D'après le texte à l'examen, le procureur du Roi de Bruxelles devra toujours être un francophone. M. Laeremans a déjà dénoncé cet état de fait, qui consacre la suprématie des francophones à Bruxelles. Aucune justification objective n'est fournie pour l'expliquer alors que le Conseil d'État en demande également une. À ce jour, aucune réponse sérieuse n'a été donnée.

Ce qui est pire encore, si du moins c'est possible, c'est qu'à l'avenir, le parquet et l'auditorat bruxellois seront toujours dirigés par un procureur et un auditeur francophones, assistés d'un adjoint néerlandophone. On n'a même pas opté pour un procureur francophone et un auditeur néerlandophone, puisque les deux postes sont attribués à des francophones. Cette réglementation est discriminatoire et presque raciste, d'autant plus que bon nombre d'articles du projet prévoient des interventions du procureur bruxellois à Hal-Vilvorde. C'est inouï et cela accentue l'interventionnisme des francophones en périphérie flamande. Un néerlandophone, aussi compétent soit-il, fût-il même manifestement plus compétent qu'un candidat francophone, ne pourra jamais être préféré à ce dernier. Un néerlandophone ne pourra même pas se porter candidat, ce qui est tout à fait extrême dans le parquet le plus grand et le plus important du pays, ayant juridiction sur les institutions internationales. Ce parquet ne pourra jamais plus être dirigé par une personne parlant la langue de la majorité des habitants du pays. Cette réglementation est fondamentalement erronée et inacceptable.

M. Anciaux fait remarquer que de plus en plus de Flamands obtiennent leur dernier diplôme en français.

Pour M. Laeremans, le fait que le parquet bruxellois sera toujours dirigé par un francophone crée un dangereux précédent. La justification avancée est que le procureur de Hal-Vilvorde est toujours un néerlandophone, ce qui constitue une énième assimilation entre Bruxelles et Hal-Vilvorde, mais c'est un faux argument, car les deux situations ne sont pas comparables et ne peuvent pas être mises en corrélation. Bruxelles est en effet la capitale bilingue du pays, et néerlandophones et francophones doivent y être traités sur un pied d'égalité. Ils doivent pouvoir bénéficier des mêmes possibilités, des mêmes perspectives, et pouvoir briguer les mêmes emplois. À défaut, ils ne sont plus sur le même pied d'égalité et l'un des deux groupes linguistiques n'est plus respecté.

Actuellement, le rôle linguistique du procureur général de Bruxelles est lié à celui du procureur du Roir de Bruxelles. Ils ne peuvent jamais appartenir au même rôle linguistique. Qui plus est, un francophone doit toujours succéder à un néerlandophone et vice versa. À l'avenir, cette alternance va donc disparaître. Cela signifie que les Flamands auront beaucoup moins d'emprise sur la politique de sécurité menée dans la capitale et dans le ressort du parquet le plus important du pays. Cette réglementation illustre une fois de plus que Bruxelles, ville bilingue, est en train de devenir une ville à dominance francophone, où les néerlandophones sont relégués au rang de citoyens de seconde zone.

La situation est encore plus grave dans la mesure où le procureur du Roi francophone et le président du tribunal francophone pourront s'ingérer activement dans bon nombre de domaines concernant Hal-Vilvorde, et disposeront même d'une forme de droit de veto. Ceci met clairement le procureur de Hal-Vilvorde dans une position subalterne par rapport à son collègue bruxellois.

Comment peut-on justifier objectivement, comme le demande le Conseil d'État, que le procureur de Bruxelles soit toujours un francophone ? Comment éviter que cela soit considéré comme discriminatoire ? Existe-t-il des précédents, par exemple pour des hauts fonctionnaires ou des magistrats ?

Pourquoi le procureur du Roi de Bruxelles et celui de Hal-Vilvorde ne disposent-ils pas de compétences identiques et pourquoi le procureur du Roi de Hal-Vilvorde ne peut-il pas s'ingérer de manière analogue dans la situation de Bruxelles ? Y a-t-il une hiérarchie entre eux deux ?

À l'avenir, combien de membres comptera le Conseil fédéral des procureurs du Roi ? Si le Conseil compte six Wallons (1 par province et 2 pour le Hainaut), six Flamands et un francophone à Bruxelles, la majorité sera dans ce cas toujours francophone. Ce calcul est-il exact ? Comment peut-on justifier une telle situation ?

Le cas échéant, pourrait-on y remédier en intégrant l'adjoint à ce Conseil et en lui donnant une voix effective ?

M. Delpérée estime que M. Laeremans émet là de pures hypothèses.

D'après M. Laeremans, la question sous-jacente est de savoir si l'adjoint du procureur du Roi n'est qu'un auxiliaire ou s'il peut être mis sur le même pied que le procureur. Ainsi, pourrait-il remplacer le procureur de telle manière que ce dernier ne serait même plus mentionné dans l'article de loi ? Il y a deux possibilités: soit une fonction s'exerce en alternance avec une autre et dans ce cas, les fonctions sont équivalentes, soit il est décidé de toujours prévoir un néerlandophone comme adjoint, mais dans ce cas, cette personne doit obtenir davantage de droits.

M. Laeremans a aussi quelques objections à formuler en ce qui concerne le nombre de magistrats de parquet. Dans l'intervalle, la taille du nouveau parquet a déjà été critiquée par le gouverneur du Brabant flamand, qui le juge trop petit. Le cadre actuel du parquet de BHV comprend 92 statutaires et 29 magistrats de complément, soit 121 personnes. Le SPF Justice a lui-même communiqué ces données à M. Laeremans. Selon les estimations de l'intervenant, le parquet de Hal-Vivorde comptera 24 magistrats de parquet néerlandophones, dont 8 seront sans doute fonctionnellement bilingues. Un parquet de 24 membres, inutilement renforcé par 5 magistrats francophones en détachement, ne sera certainement pas surdimensionné, compte tenu de la criminalité élevée à Hal-Vilvorde. Hal-Vilvorde restera donc un petit parquet pourtant confronté à une criminalité adulte. Partout ailleurs en Flandre, on s'efforce de mettre sur pied des parquets provinciaux, mais de toute évidence, le Brabant flamand n'est pas assimilé à une province.

Bruxelles conserve ainsi un cadre de 97 personnes, un chiffre plus de quatre fois supérieur aux 24 magistrats de Hal-Vilvorde. Étant donné les statistiques de criminalité importantes, la formation de bandes et le grand banditisme dans la ville, ce nombre de magistrats n'est pas excessif. M. Laeremans insiste encore une fois: 20 % de magistrats néerlandophones à Bruxelles constitue un seuil minimum absolu pour pouvoir survivre dans un parquet bilingue.

Le parquet de Bruxelles sortira globalement renforcé de l'opération. Actuellement, il dispose d'un cadre de 92 statutaires et de 29 magistrats de complément. Chez les statutaires, le rapport est de 61-31, et chez les magistrats de complément, de 20-9. La proportion 1/3 — 2/3 y est donc respectée. Mais sur le terrain, 20 places statutaires (2 néerlandophones et 18 francophones) sont vacantes. Le nombre de magistrats effectifs est donc actuellement de 101. Du côté néerlandophone, la situation ne changera pas beaucoup puisque les deux néerlandophones ne feront pas une grande différence, contrairement aux 18 francophones. Actuellement, on parvient très difficilement, du côté francophone, à trouver des magistrats de parquet bilingues pour pouvoir respecter le rapport de 2/3. Selon les statistiques d'octobre, il y a 27 francophones bilingues sur un cadre francophone de 61 magistrats effectifs (en dehors des magistrats de complément). C'est moins de la moitié et cela représente un déficit de 14 magistrats pour respecter l'exigence de 2/3. Le système des magistrats de complément a d'ailleurs été créé pour pouvoir contourner l'obligation de bilinguisme. Avec la nouvelle réglementation, les postes francophones vacants pourront être pourvus très rapidement parce qu'aucune des nouvelles recrues ne devra être bilingue.

Les 97 magistrats de parquet pour Bruxelles représentent 4 magistrats de moins que le nombre actuel, mais ils devront uniquement officier à Bruxelles et non plus à Hal-Vilvorde. Concrètement, sans Hal-Vilvorde, ils ne devraient plus assumer qu'environ 64 % du volume de travail. M. Laeremans n'est pas opposé au renforcement relatif du parquet de Bruxelles, mais il préférerait que celui-ci compte 25 % de néerlandophones, que la proportion de 2/3 de bilingues soit conservée et que l'obligation d'une connaissance passive de la deuxième langue soit généralisée.

Avec la réforme, les francophones enregistrent une progression réelle de 20 magistrats de parquet, soit plus de 30 %. Officiellement, ils étendent leur cadre de 81 à 83 magistrats, mais en réalité, leur cadre passe de 63 à 83 magistrats. Contrairement à ce qui est le cas pour la magistrature du siège, du côté des parquets, les néerlandophones ne s'affaiblissent pas. Ils enregistrent même une hausse de 2 magistrats effectifs. Mais cette augmentation est sans commune mesure avec le gain de 20 magistrats enregistré chez les francophones.

M. Laeremans est demandeur d'un renforcement de tous les parquets. Il souscrit aux propos de M. De Decker selon lesquels les parquets doivent céder beaucoup trop aux communes via les amendes SAC (sanctions administratives communales), ce qui constitue un usage impropre de ce type d'amendes. Il faut que les parquets puissent faire leur travail et fonctionner.

Dans les auditorats, on constate un statu quo du côté néerlandophone: 3 à Bruxelles et 4 à Hal-Vilvorde. Une extension limitée est prévue du côté francophone: 12 à Bruxelles et 1 à Hal-Vilvorde. Alors que 5 magistrats sont donc détachés du parquet, une personne serait détachée de l'auditorat de Bruxelles vers celui de Hal-Vilvorde. Ces chiffres sont-ils exacts ?

Étant donné l'érosion progressive de l'obligation de bilinguisme et le comblement accéléré des cadres, le nombre de francophones passera effectivement de 9 à 13.

En outre, l'intervenant a quelques questions concernant le nombre de magistrats du parquet. Est-il exact qu'il y aurait 24+5 magistrats de parquet à Hal-Vilvorde (l'intervenant pense avoir lu quelque part qu'il y en aurait 31) et 4 + 1 membres pour l'auditorat ?

L'intervenant renvoie ensuite à la page 31 de la proposition de loi, où il est question à la fois fait d'une évaluation et d'une mesure de la charge de travail. On peut y lire qu'à Bruxelles, la mesure de la charge de travail ne peut avoir pour effet de diminuer le nombre de magistrats dans chaque groupe linguistique. Il est également affirmé qu'à la demande d'un des procureurs du Roi (Bruxelles ou Hal-Vilvorde), une évaluation de la pertinence du pourcentage pourra être réalisée dans les trois ans de l'entrée en vigueur de la disposition en question. Quelle est la différence entre cette évaluation, d'une part, et la mesure de la charge de travail, d'autre part ? Que vise-t-on au juste par cette évaluation ?

Une autre question est de savoir si le nombre de magistrats du parquet de Hal-Vilvorde est comparable à leur nombre dans d'autres arrondissements de même ampleur, comme celui de Termonde par exemple. Le gouvernement a-t-il procédé à cette comparaison ? L'intervenant a l'impression qu'il y aurait plus de magistrats de parquet à Hal-Vilvorde qu'à Louvain. Qu'en est-il ?

L'intervenant aimerait aussi savoir si le chiffre de 97 magistrats de parquet pour Bruxelles, dont 19 néerlandophones, est exact. Y a-t-il effectivement 12 membres francophones et 3 néerlandophones pour l'auditorat ? Des décisions ont-elles déjà été prises concernant la répartition des mandats inférieurs au sein du parquet ?

Pourrait-on communiquer le nombre de membres du personnel, répartis par catégories (secrétaires, juristes et employés de parquet), actifs auprès des parquets et des auditorats, en précisant combien sont néerlandophones et combien sont francophones ? L'intervenant déclare n'avoir aucune idée des effectifs des parquets.

Combien y aura-t-il de membres du personnel au parquet et à l'auditorat de Hal-Vilvorde ? Les magistrats détachés seront-ils soutenus par du personnel néerlandophone ou francophone ? Combien de francophones seront, par exemple, employés au service des 5 magistrats de parquet détachés ? Comment leurs liens hiérarchiques sont-ils organisés ? Le procureur du Roi de Bruxelles demeure-t-il compétent en la matière ou est-il prévu d'élaborer une réglementation sui generis ?

Pourrait-on ensuite savoir combien de membres du personnel compteront le parquet et l'auditorat de Bruxelles ? Combien y aura-t-il de néerlandophones et de francophones dans les diverses catégories ?

L'intervenant voudrait également savoir si l'arrêté d'exécution visé à l'article 59 est déjà en préparation. L'article 59 prévoit en effet que les cadres seront fixés par arrêté délibéré en Conseil des ministres. Cet arrêté pourra-t-il être communiqué le cas échéant ?

La loi ne peut entrer en vigueur que si 90 % du cadre est comblé à tous les niveaux, sans distinction entre les parquets, les greffes et les tribunaux. Il est possible de combler rapidement 90 % du cadre pour le parquet de Hal-Vilvorde. Mais faudra-t-il attendre le recrutement de magistrats supplémentaires auprès des tribunaux, ou le parquet de Hal-Vilvorde pourrait-il être opérationnel plus rapidement ?

L'intervenant demande ensuite s'il y aura à Hal-Vilvorde une maison de justice, un laboratoire de recherche et d'enquête et un conseil d'arrondissement pour l'assistance aux victimes.

Il pense avoir compris que les juges d'instruction auront tous leur bureau à Bruxelles même et ne suivraient donc pas les parquets. Est-ce exact ou auraient-ils aussi un bureau à Hal-Vilvorde ?

La localisation du nouveau parquet provoque aussi visiblement quelques remous. Le bâtonnier de l'Ordre des avocats néerlandophones près le barreau de Bruxelles, M. Van Gerven, s'est dit satisfait de la scission mais a affirmé que le nouveau parquet de Hal-Vilvorde resterait établi à Bruxelles. Il est évidemment prévu d'établir aussi le parquet à Hal-Vilvorde. On entend régulièrement dire le parquet sera établi à Asse, près de la police fédérale. Une décision a-t-elle déjà été prise à ce sujet ?

L'intervenant renvoie en outre aux réflexions formulées par les barreaux. Ceux-ci ont déclaré que la condition d'1/3 de bilinguisme porte sur le total des magistrats, et non sur chaque groupe linguistique. Il y a également eu des remarques au sujet du fait que le procureur du Roi de Bruxelles serait dorénavant toujours francophone; une alternance devrait être proposée entre le procureur du Roi et l'auditeur du travail, de manière à ce qu'ils soient alternativement néerlandophone et francophone, tout en ayant une connaissance approfondie de la deuxième langue.

Un chapitre suivant concerne des questions et des observations relatives au « dédoublement » des tribunaux selon le modèle Maingain.

Il est tout simplement désastreux que l'on utilise le modèle Maingain pour les tribunaux et non le modèle Vandenberghe, ni, a fortiori, le modèle de scission préconisé par le Vlaams Belang: il n'y aura donc pas de scission entre Bruxelles et Hal-Vilvorde, mais un dédoublement en tribunaux unilingues, compétents sur un pied d'égalité pour l'ensemble de Hal-Vilvorde. Le texte de l'accord est très clair: « Le tribunal de première instance, le tribunal de commerce, le tribunal du travail et le tribunal d'arrondissement seront dédoublés en un tribunal F et un tribunal N compétents sur tout l'arrondissement judiciaire de Bruxelles composé des 54 communes actuelles de BHV. »

Pour que les choses soient claires: le tribunal d'arrondissement n'est pas un véritable tribunal, mais une chambre de renvoi.

C'est un scénario catastrophe, car il s'agit en l'occurrence d'une véritable rupture de digue en faveur des francophones. Actuellement, Hal-Vilvorde est en effet considéré comme une région néerlandophone unilingue, où les procédures se déroulent en néerlandais. L'assignation des habitants de Hal-Vilvorde (c'est-à-dire la citation officielle à comparaître par le biais d'un huissier de justice) se déroule toujours en néerlandais. Et lorsque deux habitants de Hal-Vilvorde décident d'aller ensemble au tribunal (comparution volontaire), ils doivent s'adresser, en règle générale, à une chambre néerlandophone du tribunal bruxellois.

Les exceptions sont limitées:

1. Les jugements du juge de paix concernant des habitants des communes à facilités peuvent être établis en français. Dans ce cas, ce sont des chambres francophones du tribunal de première instance qui jugent en appel.

2. En matière pénale, il est possible de demander un renvoi devant une chambre francophone ou un tribunal de police bruxellois, mais le juge (néerlandophone) dispose d'une marge d'appréciation et peut jauger les véritables connaissances linguistiques de la personne citée. Dans les tribunaux de police de Hal et de Vilvorde, cela a lieu de manière assez conséquente, ce qui irrite de nombreux francophones, qui préfèrent comparaître devant un juge de police francophone indulgent.

3. En matière civile, un changement de langue peut être demandé, mais les deux parties doivent être d'accord, il faut défendre cette demande devant le juge et ce dernier doit, en règle générale, l'évaluer sur le plan du contenu. Les avocats déconseillent en général pareille demande.

4. Actuellement, un défendeur (une personne assignée) issu d'une commune à facilités peut demander unilatéralement un renvoi devant un juge francophone, mais le juge dispose, également en la matière, d'une large marge d'appréciation, et il peut se baser sur les connaissances linguistiques concrètes de la personne assignée.

À la suite de la réforme proposée, la situation change complètement: les tribunaux francophones seront compétents, au même titre que les tribunaux néerlandophones, pour l'ensemble des 35 communes de Hal-Vilvorde. La différence qui demeure, c'est que les actions intentées à Hal-Vilvorde doivent continuer à l'être en néerlandais et que les procédures par voie de citation doivent par conséquent être toujours entamées devant le tribunal néerlandophone, mais:

1. Deux habitants de Hal-Vilvorde peuvent désormais s'adresser directement au tribunal francophone (comparution volontaire), même sans qu'ils soient francophones, par exemple parce que la procédure se déroule plus rapidement devant ce tribunal francophone. C'est une nouveauté. Il n'y a plus aucune appréciation ou contrôle par un juge néerlandophone.

2. La demande conjointe de changement de langue est grandement facilitée lors de la procédure par voie de citation. Il suffit d'en faire la demande au greffe. Le juge doit statuer dans les quinze jours et il ne peut que vérifier s'il y a effectivement un accord. Cela devient donc une formalité. Ce régime est même étendu à l'ensemble du pays. Aujourd'hui, pareil changement de langue est très exceptionnel; à l'avenir, il va se multiplier à travers toute la Flandre.

M. Anciaux signale qu'il existe d'ores et déjà une série de procédures dans lesquelles il n'y a pas d'assignation devant le tribunal correctionnel. L'intervenant cite l'exemple d'un renvoi par la chambre du conseil ou de l'arrestation, dans le cadre de laquelle le changement de langue est effectué au greffe de la prison.

3. Lorsque le défendeur est un habitant d'une commune à facilités, il peut réclamer beaucoup plus facilement le changement de langue et, partant, faire renvoyer l'affaire devant un tribunal francophone, même si le requérant est néerlandophone et qu'il ne souhaite absolument pas un changement de langue. La marge d'appréciation du juge est très limitée: il ne peut plus qu'examiner les pièces du dossier ainsi que la langue éventuelle de la relation de travail. Les connaissances linguistiques de la personne citée ne peuvent plus être évaluées. Exemple: si un vendeur vend une automobile à un habitant de Wemmel et qu'il y a eu plus de courriels en français qu'en néerlandais, il peut désormais être amené à aller s'expliquer devant un juge francophone plutôt que devant un juge néerlandophone, même si l'acheteur parle parfaitement le néerlandais.

Plus fort encore, on envisage d'étendre ces facilités supplémentaires à l'ensemble du pays.

4. Au moindre conflit linguistique, on peut aller en appel auprès des « tribunaux d'arrondissement francophone et néerlandophone réunis ». La voix du président est prépondérante. La présidence de ce collège est exercée alternativement selon une rotation régulière. Conséquence concrète: la personne qui est citée à comparaître devant le tribunal de police de Vilvorde et qui parle le néerlandais, mais qui préfère comparaître en français devant le tribunal de police de Bruxelles, obtiendra désormais bien plus facilement le renvoi de l'affaire.

L'intervenant conclut comme suit:

alors que le tribunal francophone n'est aujourd'hui qu'exceptionnellement compétent pour les habitants de Hal-Vilvorde, les tribunaux francophone et néerlandophone seront à l'avenir mis sur un pied de quasi égalité. Cela signifie que, d'un point de vue juridique, Hal-Vilvorde, qui était une zone néerlandophone unilingue, devient une zone bilingue. La francisation juridique de l'ensemble de Hal-Vilvorde est ainsi lancée.

Si, dans ces circonstances, on accorde encore des moyens supplémentaires aux tribunaux francophones par rapport aux tribunaux néerlandophones (davantage de juges et de greffiers), on leur accorde un important avantage concurrentiel, qui leur permettra d'évincer les tribunaux néerlandophones même à Hal-Vilvorde.

Jusqu'ici, la loi n'autorisait pas que des membres de l'Ordre français des avocats s'établissent à Hal-Vilvorde, mais le risque est grand que cette interdiction disparaisse rapidement. Rien ne figure dans l'accord à ce propos, mais dès lors que les deux tribunaux seront à l'avenir compétents quasiment au même titre pour Hal-Vilvorde, c'est la porte ouverte à un afflux massif d'avocats francophones à Hal-Vilvorde et à une multiplication des plaintes devant la Cour constitutionnelle pour « discrimination ».

Parquets

Le nouveau système relatif à l'organisation du parquet de Bruxelles est lui aussi critiquable selon M. Laeremans. L'on passe de deux tiers à un tiers de magistrats néerlandophones, et le tribunal francophone reste compétent pour la région linguistique unilingue néerlandophone. Il aurait fallu prévoir des compensations en échange, par exemple des juges uniques, l'obligation qu'une Chambre composée de trois juges comprenne un juge maîtrisant la langue néerlandaise, ou l'obligation d'un niveau de connaissance linguistique passive.

M. Laeremans déduit d'un exposé du doyen des juges de police que la pratique quotidienne des tribunaux de police est très similaire à celle des justices de paix: on passe sans cesse du néerlandais au français et vice-versa. Dans les tribunaux de police, la plupart des juges sont des néerlandophones bilingues. En vertu du nouveau système, la condition d'un bilinguisme approfondi sera ramenée à celle de la présence d'un tiers de conseillers ayant une connaissance fonctionnelle de l'autre langue nationale, alors que la plupart des dossiers sont plurilingues et que les magistrats des tribunaux de police doivent siéger seuls. Ce n'est pas raisonnable.

Au cours d'un débat organisé par le Vlaams Pleitgenootschap, il est apparu clairement que les juges de police émettent de sérieuses réserves quant à la division en deux niveaux de connaissance linguistique. Ils se sont exprimés sans ambiguité en faveur du maintien de la situation actuelle.

M. Laeremans souhaite que le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles lui indique si son interprétation du nouveau système est correcte. L'intervenant comprend qu'il resterait encore deux niveaux: le niveau de connaissance linguistique approfondie pour le président des tribunaux et pour deux juges d'instruction, et le niveau de connaissance fonctionnelle pour un tiers des magistrats, en ce compris les trois précités.

Dans sa critique du projet de loi, l'Orde van Vlaamse Balies relève que le projet occasionne un recul de la connaissance de l'autre langue nationale: « L'Orde van Vlaamse Balies déplore l'abolition progressive de la connaissance approfondie de l'autre langue nationale à Bruxelles. La redéfinition du bilinguisme de Bruxelles est inacceptable. La connaissance approfondie des deux langues nationales ne serait plus requise désormais que pour les chefs de corps. »

M. Laeremans souhaite que le secrétaire d'État réponde à cette critique formulée par l'Orde van Vlaamse Balies.

Peut-on préciser, par tribunal, combien de néerlandophones et de francophones remplissent actuellement les conditions fixées dans le projet de loi ? En d'autres termes, la règle des deux tiers est-elle satisfaite dans chaque tribunal ?

En ce qui concerne la situation prétendue dans laquelle se trouvent les tribunaux de première instance, M. Laeremans affirme qu'elle est inexacte en réalité et qu'elle correspond plutôt à une proportion de 28 % — 72 %.

Pourquoi seulement deux juges d'instruction doivent justifier d'un bilinguisme approfondi, tel que le prévoit l'article 43 en projet de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire (voir le doc. Chambre, nº 53-2140/9, p. 29) ? S'agit-il de deux par groupe linguistique ou de deux au total ?

Les autres juges d'instruction doivent-ils au moins justifier d'un bilinguisme fonctionnel ou non ? Où cet aspect est-il réglé dans la loi ?

Quelle est la situation actuelle concernant les juges d'instruction ? Combien de juges d'instruction néerlandophones et combien de juges d'instruction francophones ont une connaissance approfondie de l'autre langue et combien sont-ils à avoir une connaissance fonctionnelle en la matière ? Combien y a-t-il de juges d'instruction qui n'ont une connaissance ni approfondie ni fonctionnelle ?

M. Laeremans souhaite que le gouvernement réponde clairement aux questions qu'il a posées.

Selon l'intervenant, on a introduit le système des magistrats de complément pour contourner les lois linguistiques. Dans les conditions actuelles, est-il encore utile de maintenir intégralement le cadre des magistrats de complément ? La question est donc double: le nombre actuel de magistrats de complément doit-il rester aussi élevé dès lors que les cadres pourront désormais être remplis plus facilement, et faut-il maintenir le système en tant que tel ? Pourquoi ces magistrats ne sont-ils pas partiellement ou totalement intégrés dans le cadre ?

Ensuite, l'intervenant voudrait savoir comment l'on justifie le fait que l'on passe d'une connaissance linguistique approfondie pour 100 % des juges de police à une connaissance linguistique fonctionnelle pour un tiers d'entre eux, alors que ceux-ci doivent tout de même siéger seuls. Cette modification ne risque-t-elle pas d'aggraver encore l'arriéré ?

Le secrétaire d'État ne pense-t-il pas qu'une connaissance linguistique passive constitue le strict minimum que l'on pourrait attendre de tout magistrat dans une ville bilingue, ne serait-ce que pour comprendre les jugements qui sont prononcés dans sa propre ville et les simples demandes de renseignements ? Si oui, comment le secrétaire d'État compte-t-il y veiller ? M. Laeremans annonce qu'il déposera un amendement à cet effet.

M. Laeremans déclare ensuite qu'au cours de la préparation du débat en commission, il a observé à plusieurs reprises que le nouveau système aura un effet néfaste sur la procédure judiciaire dans la région. De surcroît, ce système est fondamentalement injuste, notamment en ce qui concerne un certain nombre de magistrats qui seront bientôt en surnombre.

Dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, on garantissait jusqu'ici une présence minimale d'un tiers de magistrats néerlandophones et d'un tiers de magistrats francophones au tribunal du travail, au tribunal de commerce et au tribunal de première instance, ainsi qu'au parquet et à l'auditorat du travail. Ces proportions établies de longue date n'ont jamais été remises en question. Le reste du cadre est complété sur la base du volume de travail, conformément à la législation en vigueur. Tout le monde considère que ce système est équitable. En application de ce système, on constate par exemple que le tribunal de commerce bruxellois comptait 44 % de magistrats néerlandophones et 56 % de magistrats francophones au mois d'octobre 2011. La situation aurait évolué depuis lors. L'intervenant y reviendra plus tard.

La réglementation en vigueur en la matière est bien respectée également au tribunal du travail qui compte 9 juges néerlandophones et 16 juges francophones. Cependant, le nouveau système aura un impact énorme sur l'effectif: le nombre de magistrats néerlandophones serait presque réduit de moitié (de 9 à 5), alors que, pour les francophones, le cadre passerait de 17 à 21.

Au tribunal de première instance, la règle concernant la présence minimale d'un tiers de néerlandophones est déjà contournée depuis longtemps de façon perfide à l'aide du système des magistrats de complément. Les cadres définitifs prévoient en effet un rapport de 35 postes néerlandophones pour 70 francophones (dont 5 sont vacants), mais il y a 31 magistrats de complément francophones contre 5 néerlandophones. Sur un total de 136 postes occupés, on dénombre aujourd'hui 96 francophones, soit plus de 71 %, et à peine 40 néerlandophones, soit 28,4 %. En d'autres termes, il manque déjà 5 % de néerlandophones dans le plus grand tribunal de Bruxelles.

Hasard ou pas, la proportion de 28,4 % de néerlandophones est très proche de celle de 27 % qui est prévue dans le projet de loi. Il est totalement irrationnel de prévoir ce pourcentage dans la loi sans aucune forme de justification.

Le texte de l'article 57 du projet de loi traduit un compromis exécrable. Au départ, on lisait en effet uniquement la phrase suivante: « Les magistrats qui excèdent le nombre fixé par le cadre linguistique néerlandophone sont placés temporairement dans un cadre d'extinction. » Après protestation des magistrats concernés, on y a alors ajouté la disposition suivante:

« Toutefois, si à un moment entre le 1er janvier 2012 et la date d'entrée en vigueur de la présente disposition, le nombre de magistrats néerlandophones excède, dans un cadre, 27 % de ce cadre augmenté du nombre de magistrats de complément et si ce nombre descend en dessous de ces 27 %, il est pourvu au remplacement de ces magistrats jusqu'à concurrence de ces 27 % durant l'année qui suit la date d'entrée en vigueur de la réforme visée à l'article 61, alinéa 1er, de la loi du ... portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles. »

Selon M. Laeremans, cette mesure transitoire qui témoigne d'un grand amateurisme a été insérée pour répondre à l'indignation des magistrats.

L'intervenant estime que l'on peut avoir une idée du volume de travail en se basant sur le nombre de dossiers civils et de jugements en matière répressive en 2010.

La majorité des dossiers introduits devant le tribunal de première instance sont des dossiers civils (un peu plus de 30 000 en 2010), dont les dossiers néerlandophones nouvellement inscrits représentaient 32,7 %. Le nombre de jugements en matière répressive s'élevait quant à lui pour la même période à 8 389, dont 26,3 % de dossiers néerlandophones. Si l'on additionne ces chiffres, on obtient encore 31,35 % de dossiers néerlandophones. La réduction actuellement prévue du pourcentage des magistrats néerlandophones à 28 % — ces magistrats étant aidés dans leur tâche par des magistrats de complément — est donc injuste et injustifiable. Et il est totalement extravagant d'accentuer encore le déséquilibre en prévoyant un rapport de 20 % de néerlandophones contre 80 % de francophones.

M. Anciaux réplique que la disposition en projet prévoit clairement que des magistrats néerlandophones sont adjoints dès que la proportion de 27 % est dépassée. Si l'on suit le raisonnement de M. Laeremans, cette condition est donc déjà remplie aujourd'hui.

M. Laeremans poursuit sa démonstration et renvoie au rapport établi par le Conseil supérieur de la Justice, dans lequel on peut lire ceci à la page 19: « Les proportions arrêtées NL/FR ne sont pas davantage en concordance avec les entrées et les sorties constatées par rôle linguistique. Une fixation erronée du cadre organique est de nature à entraver le bon fonctionnement des tribunaux. » On lit ensuite à la page 24 du même rapport qu'il convient d'éviter que les moyens soient « répartis sans fondement objectif et scientifique ». Selon M. Laeremans, il est clair que ce fondement objectif et scientifique fait encore défaut et que, par conséquent, les proportions actuelles ne peuvent pas être modifiées.

Greffes

Auprès des greffes aussi, M. Laeremans constate qu'à la suite du nouveau système, l'exigence du bilinguisme ne s'applique plus qu'à un tiers de l'effectif, alors que les greffes sont aussi compétents pour la région linguistique unilingue néerlandophone.

M. Laeremans demande au secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles et à la Régie des Bâtiments de faire la clarté sur ce point également. Le secrétaire d'État peut-il préciser quelles sont les exigences linguistiques auxquelles les greffiers sont soumis actuellement ? S'agit-il du même système à deux niveaux de connaissance, approfondie et fonctionnelle, ou a-t-on prévu des niveaux intermédiaires qui correspondent à la nature du service ?

Est-il vrai qu'une personne qui ne remplit pas la condition d'une connaissance linguistique fonctionnelle ne peut pas actuellement être engagée auprès des greffes à titre définitif, mais bien à titre contractuel ? Utilise-t-on aujourd'hui abusivement le statut contractuel pour contourner les obligations linguistiques ? En effet, l'intervenant a constaté que les greffes bruxellois occupent un très grand nombre de contractuels. Selon lui, cette situation découle de la volonté de contourner les exigences linguistiques.

Peut-on préciser combien de contractuels sont bilingues et combien ne le sont pas (encore) par tribunal et par groupe linguistique ?

N'exagère-t-on pas en ramenant la proportion de 100 % de bilingues à 30 % chez les greffiers ? Le secrétaire d'État ne juge-t-il pas logique qu'au moins 50 % des greffiers puissent justifier de la connaissance approfondie ?

Le secrétaire d'État ne pense-t-il pas qu'une connaissance linguistique passive constitue le strict minimum que l'on pourrait attendre de tout employé du greffe dans une ville bilingue, ne serait-ce que pour comprendre les jugements qui sont prononcés dans sa propre ville et les simples demandes de renseignements ? Si oui, comment le secrétaire d'État compte-t-il y veiller ?

Par ailleurs, M. Laeremans souhaite rappeler que le premier ministre, M. Di Rupo, a clairement affirmé en séance plénière de la Chambre des Représentants que « si les chiffres devaient s'avérer erronés, ils seront adaptés ».

Or, l'intervenant constate qu'aucune adaptation n'a eu lieu et ce malgré le fait que le Conseil supérieur de la Justice a confirmé que les données de départ étaient erronées.

De la même manière, le ministre De Clerck avait en date du 9 novembre 2011 affirmé en Commission du Sénat que

« C'est pourquoi il est important de recueillir un maximum de données aujourd'hui, de les vérifier et de les revérifier. Je ne puis m'imaginer qu'il serait impossible de mener au Parlement un débat correct, fondé sur des chiffres exacts. Ces chiffres serviront de base au débat que la Chambre et le Sénat organiseront à propos de la modification du Code judiciaire. » (traduction.)

Le même ministre aurait admis le 20 octobre 2011 que

« À ma connaissance, nous ne disposons de chiffres correcteurs que pour le tribunal du travail. Au tribunal de police de Bruxelles, les affaires intentées en néerlandais ne représentent que 10 % de l'ensemble ... (...) La répartition 20/80 est le point de départ d'un compromis politique. Et le chemin à parcourir est encore long avant d'arriver à un accord définitif au Parlement. Si l'on évoque au Parlement des chiffres objectivement contestables, il sera encore possible d'en débattre. De plus, on a prévu une mesure de la charge de travail qui se traduira par des chiffres exacts dans un délai de trois ans. » (Journal De Tijd, 20 octobre 2011) (traduction.)

L'intervenant déduit de cette déclaration qu'il existait encore un espace de négociation en vue d'adapter la proportion 80/20, ce qui n'est apparemment plus le cas maintenant.

L'article en question cite également un des négociateurs dans les termes suivants:

« Mais je viens d'apprendre que l'on a confondu les chiffres pour le tribunal du travail avec ceux pour l'auditorat du travail, ce qui fait évidemment une énorme différence. Si nous avions su que les chiffres étaient inexacts, nous aurions pris nos propres renseignements. C'est très ennuyeux. Nous nous sentons piégés. » (traduction.)

La ministre de la justice Turtelboom a déclaré, dans le même sens, le 11 janvier 2012, au Sénat (Annales, 5-111, 11 janvier 2012):

« (...) L'accord de gouvernement mentionne effectivement un pourcentage de magistrats néerlandophones et francophones pour les tribunaux qui naîtront de la scission de l'arrondissement judiciaire, mais lors de la discussion de la déclaration gouvernementale, le premier ministre a déclaré que d'autres instruments objectifs pourraient être employés pour déterminer cette proportion. Chacun a évidemment intérêt à ce qu'on reste aussi près que possible de l'équilibre complexe et laborieux de l'accord de gouvernement. (...) »

Le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles peut-il préciser les critères objectifs auxquels la ministre de la justice a fait référence ?

Enfin, l'orateur cite encore M. Stefaan De Clerck qui, au cours de la discussion de ce projet en commission de la justice de la Chambre des Représentants, a déclaré:

« M. Stefaan De Clerck tient à préciser qu'il n'a jamais transmis de chiffres erronés mais uniquement des rapports de magistrats contenant leurs propres chiffres, par ailleurs corrigés ultérieurement. Les négociateurs de l'accord institutionnel ont pris connaissance de ces chiffres et de leur complexité et sont arrivés à un accord politique. La clé de répartition est un point de départ, politiquement négocié. L'objectif est que les arrondissements puissent disposer du nombre de magistrats nécessaires en fonction de leur charge de travail. Il appartient au gouvernement de mesurer de cette charge de travail. Dans l'intervalle, la clé de répartition pourra être adaptée et un Comité de suivi sera mis en place. Dans son rapport, le Conseil supérieur de la Justice reconnaît d'ailleurs qu'il est particulièrement difficile d'obtenir des chiffres corrects ».

M. Laeremans conteste cette prise de position et affirme que les données du Conseil supérieur de la Justice étaient exactes à l'exception de celles relatives au tribunal de première instance de Bruxelles. L'intervenant estime donc que l'ancien ministre de la justice a fui ses responsabilités dans ce dossier.

Pour le surplus, le fait que les chiffres relatifs au tribunal du travail de Bruxelles ont été confondus avec ceux relatifs à l'auditorat du travail ressort à suffisance des articles de M.Lars Bové parus au journal « De Tijd » et d'un échange de mails entre Mme Gaby Van den Bossche, présidente du tribunal du travail de Bruxelles et M. Baret, chef de cabinet du ministre De Clerck.

Pour le secrétaire d'État, les affirmations de M. Laeremans ne démontrent rien et certainement pas le fait que les négociateurs se seraient exclusivement basés sur ces données. Il ne peut donc être question de preuves irréfutables comme l'affirme à tort M. Laeremans.

M. Vanlouwe estime qu'il y a bien un indice sérieux selon lequel certains chiffres sur lesquels les négociateurs se sont basés étaient inexacts. S'agit-il finalement de chiffres arbitraires comme l'a affirmé M. Delpérée ?

M. Peter Van Rompuy rappelle qu'il faut être très prudent lorsque l'on commence à citer des extraits de mails parus dans la presse.

M. Delpérée précise qu'il n'a pas parlé de chiffres arbitraires mais de forfaits. En effet, si les résultats de statistiques amènent à des chiffres concrets, le résultat d'une négociation fige une situation, comme dans le cas présent (80/20), mais ce résultat découle au départ d'une réalité.

M. Vanlouwe rappelle une fois de plus les déclarations faites dans la presse (Journal De Tijd, 20 octobre 2011) et qui confirment l'inexactitude des données sur lesquelles les négociateurs se sont basés:

— M.Renaat Landuyt affirme ainsi

« Ceci est très grave. Si déjà l'administration n'est pas capable de fournir des chiffres exacts, je pense que c'est l'administration plutôt que l'arrondissement judiciaire qu'il faudrait réformer. » (traduction.)

— Le ministre de la Justice, Stefaan De Clerck (CD&V), affirme aussi

« avec les chiffres qui sont publiés aujourd'hui, l'accord aurait été différent. (...) La répartition 20/80 est le point de départ d'un compromis politique. » (traduction.)

— Un autre négociateur indique également

« que nous savons aussi que le directeur de cabinet de l'ancien ministre de la Justice a utilisé des chiffres erronés au cours des négociations. Mais nous ne pouvons pas changer un iota aux textes de l'accord. Il nous faut simplement gagner du temps et faire effectuer rapidement une mesure de la charge de travail auprès des juges bruxellois pour adapter la redistribution. » (traduction.)

De son côté, M. Laeremans souligne le fait qu'il s'est basé sur les chiffres qu'il a lui-même pu récolter. Toutefois, ceux-ci, correspondent en ce qui concerne le tribunal du travail, à ceux du Conseil supérieur de la Justice. Or, cet organe constate les pourcentages suivants pour la juridiction du tribunal du travail:

Dossiers entrants %:
Néerlandais Français
Année Année Année Année Année Année
2009 2010 2011 2009 2010 2011
26,02 % 26,85 % 29,51 % 73,98 % 73,15 % 70,49 %

L'intervenant s'insurge donc encore une fois sur la répartition 20/80 alors qu'objectivement seule une répartition 30/70 aurait dû être fixée. Il fait le même constat en ce qui concerne le personnel du greffe de ce tribunal qui aujourd'hui travaille à raison de 40 % en néerlandais et 60 % en français. Or, là aussi, une répartition 20/80 a été prévue. Il est inconcevable que l'on ne veuille pas rectifier l'erreur commise.

M. Vanlouwe se réfère aux propos que M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, a tenus à la Chambre des représentants, le 20 juin 2012 (voir le Compte rendu intégral de l'assemblée plénière, nº CRIV 53 PLEN 093, p. 55):

« Chers collègues, à ce moment-là, je n'étais pas assis avec vous à la table des négociations. Le 30 septembre, je n'étais pas à la table des négociations. Et comme d'autres, j'ai donc demandé à mon président de parti d'où venaient les données qui avaient été fournies. Il m'a été répondu que les huit négociateurs avaient reçu les chiffres de population de l'arrondissement judiciaire, la répartition des cadres entre les tribunaux néerlandophones et francophones et les chiffres extraits des rapports d'activité, tels qu'ils ont été approuvés par l'assemblée générale des cours et des tribunaux.

Les rapports annuels intégraux ont été remis aux techniciens des huit partis. Pour le bon ordre, je précise qu'en ce qui concerne le tribunal du travail, les chiffres provenaient des rapports annuels tant de l'auditorat du travail que du tribunal du travail, c'est-à-dire des deux juridictions ensemble, et non d'une seule. Chers collègues, vous avez aussi reçu ces chiffres. Vous les avez reçus en mai, lorsqu'ils ont été envoyés par courrier à la commission.

Moi, j'ai pris la peine de les comparer. Prenons l'exemple du tribunal du travail. Le rapport annuel 2010 qui a été communiqué aux huit négociateurs indique qu'en 2009, il y a eu 5 329 affaires néerlandophones, soit 26,02 %. En 2010, ce nombre était de 5 648, soit 26,83 %. Quels sont les chiffres communiqués à cette commission en date du 10 mai, par le groupe de pilotage de l'arrondissement judiciaire de BHV ? En 2009, il y a eu 5 329 affaires, et en 2010, 5 648. Les chiffres communiqués aux membres de la commission sont exactement les mêmes que ceux qui ont été fournis aux huit négociateurs, en tout cas en ce qui concerne le tribunal du travail. Il y a des différences tout à fait mineures en ce qui concerne le tribunal de première instance de Bruxelles. Il y a une différence de quelques dixièmes: 28,5 % au lieu de 28,99 %. »

Pourtant, on a quand même accepté la proportion de 20 % d'affaires néerlandophones contre 80 % d'affaires francophones, alors que le chiffre que le secrétaire d'État cite lui-même indique d'autres proportions: il s'agit en effet de plus de 26 % de dossiers néerlandophones. Ce n'est que sous la pression de l'opinion publique que les négociateurs flamands ont accepté la mesure transitoire de 27 % pour les affaires néerlandophones.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, confirme les propos qu'il a tenus à la Chambre des représentants et constate qu'auparavant, les précédents intervenants soutenaient que les négociateurs avaient négocié sur la base de chiffres erronés, mais qu'ils admettent à présent qu'ils disposaient bien des bons chiffres. Les propos outrageants qu'ils ont tenus à l'encontre d'un fonctionnaire public sont donc sans fondement et ils doivent maintenant changer leur fusil d'épaule.

M. Vanlouwe réplique qu'il faisait seulement référence aux propos de MM. De Clerck et Landuyt. Ils ont prétendu que si on avait disposé de ces chiffres à l'époque, l'accord aurait pris une autre tournure, et que c'est très grave que le Service public fédéral Justice n'ait simplement pas pu produire les chiffres exacts.

M. Cheron constate que le précédent intervenant cite constamment, et de façon décousue, des sources différentes: un journal, un parlementaire, un magistrat, etc. On peut se demander s'il a lui-même sa propre opinion. Certains créent volontairement un rideau de fumée en citant toutes sortes de sources. L'accord politique part d'une approche forfaitaire de la situation actuelle, mais prévoit aussi une méthodologie objective associée à un calendrier concret. Il est également tenu compte de l'arriéré judiciaire. En revanche, l'intervenant précédent ne propose aucune alternative et est incapable de présenter une vision cohérente de la question.

M. Vanlouwe veut seulement démontrer que les négociateurs sont partis de chiffres inexacts et qu'ils ont beaucoup de mal à l'admettre. Le secrétaire d'État admet à présent lui-même qu'il y a plus de 26 % d'affaires néerlandophones, alors que les partis flamands ont marqué leur accord pour 20 %. Aucune explication n'est donnée pour le justifier.

L'intervenant a bel et bien une proposition concrète à formuler. Il suggère de faire d'abord réaliser une mesure de la charge de travail et de prendre des décisions sur la base de celle-ci.

M. Laeremans se rallie à cette proposition. Il souligne également que l'arriéré judiciaire est un phénomène temporaire. Il n'est pas correct de prendre en compte cet arriéré pour déterminer le nombre d'affaires francophones et aboutir ainsi à 80 %. On crée alors des cadres permanents pour l'avenir sur la base de chiffres temporaires du passé: l'arriéré judiciaire doit être rattrapé à l'aide de cadres temporaires. C'est également ce qui se passe ailleurs.

En ce qui concerne le tribunal du travail, l'intervenant estime que l'on peut parler d'une perte de 4 sièges du côté flamand, alors que les francophones en obtiennent 4 de plus. La situation est pire en ce qui concerne le greffe: il compte actuellement 50 employés néerlandophones et 30 francophones mais les effectifs seront inversés suite à la réforme: 16 employés néerlandophones contre 64 francophones ! Ce calcul a été effectué en se basant sur le rapport 20 % NL 80 % F, mais il a déjà été démontré que celui-ci ne se justifiait pas, ce qui signifie que les francophones reçoivent ici un cadeau exceptionnel de 10 employés de greffe auxquels ils n'ont en fait pas droit.

Pour le tribunal de première instance, M. Laeremans se base sur les chiffres du Conseil supérieur de la Justice. Il s'agit de 10 000 affaires néerlandophones (un peu plus de 30 %) et de 22 000 affaires francophones (un peu moins de 70 %). L'accord politique part cependant d'un rapport de 20 % NL 80 % F, si bien que des employés de greffe néerlandophones passeront à nouveau à la trappe. Concrètement, il s'agit aujourd'hui de 170 employés de greffe néerlandophones (112 statutaires et 58 contractuels) et de 260 employés de greffe francophones, dont 92 néerlandophones disparaîtront, alors que 92 francophones seront engagés. C'est tout à fait disproportionné ! Ces employés francophones n'auront absolument rien à faire puisqu'il n'y a actuellement aucun manque de personnel, alors que dans le même temps, on licencie à tour de bras dans les maisons de justice.

Tout ceci est la conséquence du manque de courage des négociateurs flamands, qui n'ont pas remis en cause les proportions entre néerlandophones et francophones convenues de manière forfaitaire et arbitraire. La proportion 20 % NL 80 % F se base en effet sur les déclarations de quelques magistrats francophones, que les responsables politiques francophones ont relayées sans la moindre justification objective. Le président francophone du tribunal de première instance de Bruxelles prétend également que cette proportion s'applique à son tribunal, alors que des chiffres objectifs démontrent que c'est totalement faux. Un tel mensonge devrait donner lieu à des sanctions disciplinaires. L'intervenant se réfère à la question orale nº 5-609 qu'il a posée le 14 juin 2012 à la ministre de la Justice à propos de ces déclarations (Annales Sénat, nº 5-63, p. 28 et suiv.).

D'ailleurs, M. Laeremans reconnaît bien volontiers ses torts lorsqu'il fait erreur. Pour le tribunal de commerce, par exemple, l'intervenant avait appris initialement que 45 % des 15 687 affaires se déroulaient en néerlandais et qu'il y avait 11 magistrats néerlandophones sur un total de 24. À l'avenir, la proportion passera à 40 % N/60 % F. Au départ, M. Laeremans avait contesté cette proportion, mais des chiffres récents du Conseil supérieur de la Justice montrent qu'elle est quand même justifiée. Il ne voit dès lors aucun inconvénient à reconnaître publiquement que sa réaction de départ était erronée et que l'accord qui a été conclu repose sur des chiffres exacts. Mais il se demande pourquoi d'autres ne peuvent pas admettre à leur tour que la proportion 20 % N/80 % F est incorrecte pour ce qui concerne le tribunal de première instance et le tribunal du travail. Pourquoi s'entêter dans le refus de reconnaître ses erreurs quand des chiffres objectifs démontrent que cette proportion est incorrecte ?

M. Laeremans rappelle ensuite que les tribunaux de police bruxellois seront également réorganisés selon la proportion 20 % N/80 % F. Ici aussi, la proportion ne correspond pas à la charge réelle de travail et ce, en dépit du fait qu'il s'agit de tribunaux qui se situent exclusivement dans les 19 communes de la Région de Bruxelles-Capitale. En matière pénale, la proportion réelle entre affaires néerlandophones et francophones est en effet de 12,5 % N/87,5 % F. Mais dans les affaires civiles de roulage, la proportion est de 30 % d'affaires néerlandophones contre 70 % d'affaires francophones. Certes, de tels dossiers — dans lesquels interviennent notamment des assureurs — sont beaucoup moins nombreux, mais représentent pourtant une énorme charge de travail.

M. Anciaux estime que le Conseil supérieur de la Justice a retenu d'autres chiffres en la matière et regrette que l'intervenant précédent sélectionne ses sources en fonction du résultat qu'il veut atteindre. Ce n'est pas sérieux.

M. Laeremans met en évidence une différence entre les affaires où le tribunal de police statue généralement à l'audience même, sans devoir procéder à des analyses fastidieuses, et les affaires civiles où le tribunal doit statuer sur des questions d'assurance, déterminer des responsabilités et accorder des dommages-intérêts. Dans les faits, la charge de travail n'est donc absolument pas comparable.

Le tribunal de police bruxellois est, lui aussi, scindé suivant la proportion 20/80. Mais bien que la compétence territoriale de ce tribunal soit limitée à Bruxelles-19 (Hal et Vilvorde ont leurs propres tribunaux de police), cette proportion ne correspond pas à la charge de travail réelle. En matière pénale, la proportion est de 12,5 % de dossiers néerlandophones contre environ 90 % de dossiers francophones, mais dans les affaires civiles de roulage, la proportion est actuellement, d'après le doyen du tribunal de police, de 30 % N/70 % F (30,2 contre 69,8). Bien qu'étant beaucoup moins nombreux, ces dossiers génèrent la plus grande charge de travail. En effet, il s'agit souvent de vastes dossiers d'assurance, dans lesquels il y a lieu de calculer des dommages-intérêts.

M. Anciaux souligne que M. Laeremans ne cite que les chiffres qui corroborent son discours. En 2011, le tribunal de police de Bruxelles a examiné 12,9 % de dossiers pénaux néerlandophones et le nombre de dossiers civils a été de 30,1 %, ce qui représente un flux entrant de dossiers néerlandophones de 13,43 % contre 86,57 % de dossiers francophones. On peut difficilement prétendre que la norme appliquée a été mal choisie.

M. Laremans répond qu'on ne peut pas comparer des pommes et des poires. Seule une mesure de la charge de travail pourra apporter une réponse définitive.

M. Delpérée estime que le problème de la mesure de la charge du travail n'est pas une question nouvelle. Elle implique la mise en œuvre de toute une méthodologie: la recension et l'évaluation des dossiers. Il ne faut pas croire que l'on pourrait établir la méthodologie adéquate en une demi-heure. L'esprit de la proposition est d'établir dans une première étape, peut-être un peu grossièrement, une relation 80/20, et puis, se donner le temps d'une évaluation concrète de la charge de travail dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles.

M. Laeremans répond qu'il ne propose pas de mettre au point immédiatement une méthode de mesure de la charge de travail. Il veut seulement insister sur le fait que les Flamands se font berner d'une façon incroyable par la majorité et son accord.

Il y a actuellement 14 juges de police actifs à Bruxelles, parmi lesquels 11 sont néerlandophones. La scission du tribunal et l'application de la proportion 20/80 auront pour conséquence que le nombre de juges néerlandophones chutera de 11 à 3, tandis que le nombre de francophones passera, à l'inverse, de 3 à 11. Le nombre d'employés de greffe néerlandophones tombera de 26 à 10, alors qu'il y aura 16 francophones supplémentaires dans cette catégorie.

Toutefois, cette commission s'est manifestement promis de n'accorder aucun crédit à ce que dit le doyen des tribunaux de police.

L'intervenant aimerait savoir si, actuellement, l'arriéré dans le traitement des dossiers francophones par les tribunaux de police est tel qu'il justifie une telle évolution. En effet, 99 % des affaires devant un tribunal de police sont réglées à l'audience. De même, M. Laeremans demande s'il y a des plaintes concrètes concernant des magistrats néerlandophones ou francophones qui ne maîtrisent pas suffisamment l'autre langue.

Les francophones ont voulu en finir avec la surreprésentation des néerlandophones et sont donc extrêmement enthousiastes à propos de cette partie de l'accord sur le volet judiciaire de BHV. Sur le site web des libéraux francophones, Vincent de Wolf, député et chef de groupe MR au parlement bruxellois, crie victoire:

« Il garantira aux francophones d'être traités par des magistrats francophones, et ce alors qu'une grande majorité des magistrats actuels étaient néerlandophones. La nouvelle répartition des magistrats permettra aux justiciables francophones d'être jugés sous un délai raisonnable. »

Le fait que les juges de police soient en majorité néerlandophones pose en soi problème aux francophones, même si ces juges traitent parfaitement leurs dossiers dans les deux langues nationales. Les propos susmentionnés de M. De Wolf participent d'une rhétorique ethnique et raciste. Il est suggéré que les francophones sont actuellement traités de manière inéquitable et qu'ils doivent attendre plus longtemps avant d'obtenir un jugement.

Tous ces juges sont titulaires d'un brevet de « bilinguisme approfondi ». Ils sont donc habilités à et capables de siéger dans les deux langues. Comme pour les juges de paix bruxellois, leurs audiences sont entièrement bilingues et le traitement des dossiers francophones et néerlandophones obéit en permanence au principe de l'alternance. De plus, l'arriéré du tribunal de police a été résorbé au cours des dernières années. Il est donc totalement injustifié de parler d'un arriéré qui serait plus important du côté francophone que du côté néerlandophone.

M. Armand De Decker rappelle qu'une des grandes sources du mouvement flamand est que l'on a jugé des néerlandophones devant des tribunaux francophones. Quand on est conscient de cela, il ne faut pas souhaiter que des francophones soient jugés devant des juges flamands.

M. Laeremans précise que la situation est très différente. En Wallonie et en Flandre, il est arrivé que des juges unilingues condamnent des justiciables néerlandophones sans l'aide d'un interprète et sans que ceux-ci comprennent le procès. Si l'on suit la logique de M. De Decker, il faut interdire que des juges de paix néerlandophones traitent des dossiers francophones à Bruxelles.

L'on pourrait peut-être résoudre ce problème en intégrant une partie des juges néerlandophones aux juges francophones.

Selon M. Laeremans, le rapport 80/20 aura globalement pour effet que les tribunaux de première instance et du travail francophones seront quatre fois plus grands que les tribunaux néerlandophones, alors qu'ils auront seulement le double de volume de travail. Si une telle proposition avait été émise par le FDF il y a plusieurs mois, tout le monde s'en serait gaussé. Or, cette proposition va maintenant devenir une loi.

Le dupe de cette histoire sera le Flamand de Bruxelles et de Hal-Vilvorde, qui sera jugé dans un délai bien plus long qu'aujourd'hui. Ce traitement de faveur excessif accordé aux francophones entraînera également une francisation croissante. Les tribunaux francophones seront plus « compétitifs » dès le début, et les justiciables seront donc plus nombreux à s'adresser à eux.

Les négociateurs flamands se sont fait avoir comme des amateurs par les francophones qui ont maîtrisé ce dossier jusque dans les moindres détails. Lorsqu'on a communiqué les rapports de forces linguistiques convenus, le parti de l'intervenant a prévenu que cela provoquerait un bain de sang chez les magistrats néerlandophones de Bruxelles.

En outre, la proportion 80/20 entre en vigueur immédiatement, si bien que les francophones peuvent tout de suite commencer à recruter. Les magistrats flamands sont directement versés dans un régime d'extinction, tandis que les francophones peuvent engager sans la moindre justification. Les francophones n'ont donc aucun intérêt à procéder à une mesure de la charge de travail pour 2014, et le risque est grand qu'ils sabotent cet exercice.

Le régime 27/73 destiné à faire passer la pilule n'est applicable que pour un an. Comment a-t-on défini cette proportion de 27 % ? Pourquoi ce régime est-il limité dans le temps à une seule année après l'entrée en vigueur de la loi ? De surcroît, il n'est même pas certain que ce régime sera appliqué effectivement, car l'une des conditions pour ce faire est que tous les cadres doivent être remplis à 90 %. Dans un texte signé par tous les magistrats néerlandophones du tribunal de première instance et du tribunal du travail de Bruxelles, la Conférence des présidents néerlandophones des tribunaux de première instance et la Conférence des présidents néerlandophones des tribunaux du travail, on peut lire ceci: « Le texte ne fixe aucune date à laquelle le dédoublement ou la scission sera une réalité. Dès lors que tous les cadres (tribunal, parquet, greffe) doivent être remplis à 90 %, il n'est pas impensable que le dédoublement ou la scission ne soit jamais opéré dans la pratique. En effet, de nombreux postes de magistrats de parquet sont vacants dans tout le territoire flamand, et il n'y a quasiment pas de candidats en réserve: la réserve de stagiaires judiciaires de cette année est pratiquement épuisée. Il faudra attendre l'année prochaine pour le recrutement suivant. De plus, dans les conditions actuelles, Bruxelles n'est pas le poste le plus prisé. La constitution du cadre du greffe posera aussi un énorme problème, car ce cadre n'a encore jamais été rempli à 90 %. Par exemple, au 1er juillet 2012, le greffe du tribunal du travail de Bruxelles ne compte plus que 11 greffiers sur un cadre de 32, et plusieurs d'entre eux ont demandé une mutation. (trad.) »

Les magistrats qui ont rédigé ce texte partent du principe que les cadres ne seront jamais remplis à 90 %. Entre-temps, on engagera des magistrats francophones, et le nombre de magistrats flamands va diminuer sans que les conditions soient satisfaites pour faire appliquer la règle des 27 %. En effet, la règle des 27 % ne vaut que pour la période d'un an qui suit l'entrée en vigueur de la loi.

Dans son édition du 27 mars 2012, le quotidien De Standaard écrit que la bévue de la clé de répartition 80/20 est réparée par la règle des 27 %, mais « oublie » de préciser à cet égard qu'il s'agit uniquement d'une mesure transitoire. Par ailleurs, le premier ministre Di Rupo a immédiatement contredit cette information, ce qui illustre une fois de plus à quel point les francophones sont sur leurs gardes quand il s'agit de veiller sur les privilèges acquis. De Standaard n'a cependant pas fait écho au démenti de M. Di Rupo, ce qui prouve à nouveau combien ce journal contribue à la désinformation de l'opinion publique flamande. Le quotidien De Tijd est le seul journal à avoir fait preuve de sens critique. En attendant, les Flamands pensent que tout est réglé alors que ce n'est pas le cas.

On dit que la mesure de la charge de travail serait confiée à un organisme externe. Quand va-t-on commencer cette mesure ? Quel est l'organisme externe qui en sera chargé ? Quel est le budget prévu à cet effet ? Quelle est la méthodologie qui sera employée ?

Le Conseil supérieur de la Justice affirme explicitement que les résultats d'une mesure de la charge de travail seront connus, au mieux, en 2017. Pourquoi le gouvernement est-il à ce point certain que l'on aura terminé cette mesure pour le 1er juin 2014 ? Comment un organisme externe peut-il procéder à cette mesure en mettant trois ans de moins qu'un auditeur interne qui a de l'expérience dans la mesure de la charge de travail au sein de la Justice ?

M. Laeremans constate que la fixation des cadres linguistiques devrait être prête, au plus tard, pour le 1er juin 2014. Or, à ce moment-là, le Parlement sera dissous, si bien qu'il ne pourra pas exercer sa fonction de contrôle.

Dans le rapport du Conseil supérieur de la Justice, on pose la question de savoir s'il sera tenu compte des différences culturelles dans le cadre de la mesure de la charge de travail. En effet, les francophones ont une culture juridique propre et leurs plaidoiries sont plus longues. Du côté flamand, en revanche, on a tendance à privilégier les procédures écrites. Sera-t-il également tenu compte de l'arriéré historique lors de la réalisation de la mesure de la charge de travail ? Est-il normal d'être sanctionné si on a travaillé plus vite et plus efficacement par le passé ? M. Laeremans pense que pour remédier à l'arriéré, il vaudrait mieux fixer des cadres temporaires; on éviterait ainsi de l'institutionnaliser.

Les recrutements prévus posent aussi un certain nombre de questions. Dans le journal « De Standaard » du 2 juin 2012, sous le titre « Grote aanwervingsronde bij Justitie om BHV te splitsen », on pouvait lire la déclaration suivante de M. Verherstraeten (CD&V), secrétaire d'État aux réformes institutionnelles:

« Dans les greffes et les parquets, il faudra donc recruter une quarantaine de magistrats et jusqu'à deux cents agents supplémentaires. » (traduction)

Pour les francophones, ce sera une vaste campagne de recrutement. De son côté, le président de l'Open VLD, Alexander De Croo, a déclaré à ce sujet que du côté néerlandophone, le personnel était en surnombre alors que du côté francophone, les cadres sont loin d'être remplis. Il faudra donc non seulement procéder à des recrutements mais aussi opérer des glissements. C'est ainsi que des néerlandophones bilingues complèteront provisoirement les effectifs francophones. On pourra de cette manière comprimer les coûts de l'opération.

Les recrutements débuteront après la publication au Moniteur belge, c'est-à-dire probablement en septembre. Pour les juges, la procédure prendra facilement un an. Mais que se passera-t-il si les cadres de personnel dans les tribunaux dédoublés ou au parquet de Hal-Vilvorde ne sont pas remplis à 90 % ou plus ? Pour dire les choses simplement: sans juges, on ne pourra pas créer de nouveau tribunal.

Un groupe de travail spécifique sera chargé de suivre le dossier de près et d'effectuer une évaluation à la fin de cette année et à la mi-2013. Toute cette procédure devra être terminée pour la fin de l'année 2013, c'est-à-dire au moment où la mesure de la charge de travail concernant la justice bruxelloise — attendue depuis longtemps — devra être prête. C'est alors seulement que l'on saura avec précision combien de magistrats et d'agents seront nécessaires. Au début de l'année 2014, la scission devra être une réalité.

M. Laeremans demande si les données et les chiffres cités peuvent être confirmés. Comment les chiffres relatifs aux recrutements supplémentaires peuvent-ils être justifiés ? Dans quels tribunaux ces magistrats supplémentaires seront-ils affectés ? Est-il possible de disposer d'une ventilation des chiffres par tribunal et par greffe ?

Quel sera, au final, le coût de toute cette opération qui devrait être lancée au plus vite ? Ce coût est-il inscrit au budget de l'année prochaine ? En effet, il est question en l'espèce de 240 équivalents temps plein, dont 40 magistrats et 200 membres du personnel de greffe. L'intervenant ne peut se départir de l'impression qu'il s'agit en l'espèce d'un gaspillage irresponsable d'argent public.

Combien de temps faudra-t-il objectivement pour mener une telle opération de recrutement ? Quand peut-on raisonnablement s'attendre à ce qu'elle soit terminée ?

Quel moyen objectif utilisera-t-on pour s'assurer que 90 % de l'ensemble des cadres sont remplis ? L'intervenant renvoie à cet égard aux chiffres fournis par Mme G. Vandenbossche. Celle-ci a indiqué que le greffe du tribunal du travail de Bruxelles ne compte que 11 greffiers sur un cadre de 36. Comment procédera-t-on pour remplir ce cadre à 90 % pour 2014 ? Ou tiendra-t-on compte des contractuels dans ce calcul ?

L'intervenant souhaiterait également obtenir quelques précisions au sujet du cadre extinctif. S'agit-il d'une nouveauté ? Qui sera considéré concrètement comme étant en surnombre ? Il y a quatre magistrats pour qui cela devrait être le cas au tribunal du travail. De quels magistrats s'agira-t-il sur les neuf ? Qui effectuera la sélection ?

M. Anciaux fait remarquer que les magistrats en surnombre ne seront pas désignés personnellement.

M. Laeremans rétorque qu'il a bel et bien été précisé que les magistrats qui sont en surnombre par rapport à l'effectif fixé du cadre linguistique néerlandais seront intégrés dans un cadre extinctif. L'intervenant en déduit qu'il s'agit de magistrats bien déterminés, mais il se peut qu'il se trompe.

Combien de juges d'instruction néerlandophones et francophones y a-t-il aujourd'hui ? Combien seront-ils une fois que les cadres linguistiques auront été adaptés ? Que deviendra alors le cadre extinctif ? L'intervenant a cru comprendre que du côté néerlandophone, le nombre de juges d'instruction passera de 5 à 3.

Est-il exact que sur les 8 juges d'instruction néerlandophones actuels, il n'en resterait que 6 ? Existe-t-il une note du tribunal à ce sujet et, le cas échéant, est-il possible d'en prendre connaissance ?

L'intervenant déclare qu'il se base sur la note du « stuurgroep BHV », qui se compose de hauts magistrats.

Ainsi, dans cette note, le « stuurgroep » précise ce qui suit: « Dans son avis, le Conseil d'État a indiqué clairement que les chambres législatives doivent être en mesure de justifier que les pourcentages retenus sont en rapport raisonnable avec l'objectif poursuivi, notamment la lutte contre l'arriéré judiciaire. Sur la base des chiffres cités, nous montrons clairement que l'application des pourcentages 80-20 provoquera très rapidement un allongement exponentiel des délais de traitement des dossiers. De plus, si, comme il est prévu dans le scénario annoncé, deux des cinq juges d'instruction et deux des quatre juges de la jeunesse partent, des dossiers impliquant l'arrestation de personnes risquent de ne pas être traités à temps, ce qui pourrait se solder par des remises en liberté non voulues. À cet égard, le Conseil d'État a attiré l'attention sur la responsabilité que le pouvoir législatif est susceptible d'encourir en cas de dépassement du « délai raisonnable ».

L'intervenant attend dès lors une réponse à ce problème soulevé par les hauts magistrats. À la Chambre des représentants, cette question n'a pas donné lieu à de grandes discussions.

Une dernière réflexion concerne la problématique de l'extension des facilités, qui permet à la partie défenderesse citée à comparaître en matière civile d'exiger unilatéralement que la cause soit renvoyée au tribunal francophone et ce, sur la base de critères liés aux relations de travail ou au nombre de pièces du dossier. La commission de modernisation de l'ordre judiciaire examinera l'opportunité d'appliquer ce régime à l'ensemble des arrondissements judiciaires du pays. Cette extension impliquerait que la partie défenderesse qui est citée à comparaître à Gand par un habitant flamand de cette même ville, par exemple, pourrait demander que la cause soit traitée par le tribunal de Namur au motif que le dossier renferme des pièces établies en français. A-t-on chargé un groupe de travail d'examiner la question et, le cas échéant, s'est-il réuni récemment ? Il serait inacceptable de revenir aux privilèges de la période antérieure à celle de la législation linguistique de 1935.

Il est certain qu'en assouplissant les procédures de demande de changement de langue dans tout le pays, on risque de paralyser le système judiciaire au niveau fédéral et de compromettre, a fortiori, l'instauration d'une justice moderne en Brabant flamand.

L'intervenant pense qu'il n'est pas indiqué de faciliter les procédures de demande de changement de langue. Cela n'est absolument pas nécessaire. Il est parfaitement possible en effet de faire appel à un traducteur, et ce principe devrait valoir aussi pour les francophones de la région flamande. Ils pourraient très bien choisir un avocat néerlandophone qui puisse communiquer avec eux en français. Cette réglementation qui facilite la procédure de changement de langue devrait être supprimée, car la justice risquerait, sinon, d'être entièrement subordonnée à la notion de « personnalisation » sans que l'on ne doive plus tenir compte du lieu de résidence, ni des usages de cette région.

L'Ordre des barreaux flamands souligne à juste titre les nombreux problèmes qui accompagneront un tel assouplissement linguistique. Exemple: dans quelle langue un tel jugement doit-il être exécuté ? Faudra-t-il à nouveau fournir une traduction ? Qui en supportera les frais ? Et qu'adviendra-t-il des litiges qui, aujourd'hui, doivent obligatoirement être portés devant le tribunal territorialement compétent ? Le secrétaire d'État a déjà indiqué que l'emploi de la langue de la région ne sera obligatoire que s'il s'agit d'affaires relevant de l'ordre public.

L'Ordre des barreaux flamands craint aussi que la possibilité de demander, partout en Belgique et moyennant l'accord de toutes les parties au procès, le changement de langue avec renvoi de l'affaire, entraînera un grand nombre de problèmes. Le pouvoir d'appréciation du juge s'en trouvera limité.

Les problèmes surviendront notamment au moment de l'exécution du jugement, après le renvoi. Un jugement ordonnant la dissolution de la vente d'un bien immobilier situé à Gand après renvoi à Tournai devra-t-il désormais être traduit en vue de son exécution ou l'huissier pourvoira-t-il à cette exécution dans la langue du jugement ? Certains litiges doivent d'ailleurs être obligatoirement portés devant un tribunal fixé territorialement (par exemple les litiges qui concernent les héritages, les litiges dans le domaine du droit du travail). Y aura-t-il aussi des changements en l'espèce ?

Que répond le gouvernement sur ce point ?

Par ailleurs, l'assouplissement proposé des règles en matière de changement de langue va bloquer toute évolution vers une véritable défédéralisation de la justice. Les francophones exigeront partout en Flandre le droit d'être jugé par une juridiction francophone avec, comme corollaire, le droit de se voir appliquer les règles fédérales sur le plan du fond et de la procédure.

M. Van Peel, ancien président du CD&V, a déclaré, il y a plusieurs années, que la scission de la justice était plus urgente que la scission de B-H-V. Les modifications institutionnelles préparées par les huit partis ont pour effet de bétonner constitutionnellement l'arrondissement judiciaire de B-H-V et de rendre une défédéralisation de la justice plus improbable que jamais.

M. Laeremans renvoie ensuite à l'accord d'octobre 2011 visant à réorganiser le paysage judiciaire. Le gouvernement propose de réduire le nombre d'arrondissements de 27 à 13 et de regrouper les tribunaux et parquets sur une base provinciale. S'il peut soutenir cette réorganisation sur une base provinciale, force est de constater que le Brabant flamand n'y est pas reconnu comme une province à part entière. Hal-Vilvorde reste une sorte d'annexe de Bruxelles alors que l'arrondissement de Leuven garde sa taille réduite, ce qui l'empêchera d'évoluer vers plus d'efficacité. Cette réforme du paysage judiciaire empêchera la province du Brabant flamand de monter dans le train de la modernisation. C'est pour éviter une telle discrimination que le groupe de l'intervenant a défendu l'idée d'une scission verticale de l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde (doc. Sénat, nº 5-755/1).

Comme l'a déclaré M. Jos Colpin, premier substitut du procureur du Roi de Bruxelles dans une interview parue dans le Juristenkrant du 26 octobre 2011, la seule véritable solution est la création d'un tribunal de première instance à part entière pour Hal-Vilvorde. M. Laeremans ne peut que souscrire à cette déclaration. Les réformes à l'examen sont une véritable catastrophe pour les Flamands, dont la situation s'aggrave, tant à Bruxelles qu'à Hal-Vilvorde. Le projet à l'examen doit être résolument rejeté.

M. Anciaux déplore que durant la discussion générale, l'opposition ait présenté la réforme de l'État sous un jour très défavorable, et souhaite formuler à ce sujet la réplique suivante. L'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde est réformé, d'une part, par un dédoublement du tribunal et, d'autre part, par une scission du parquet. Ces modifications concordent parfaitement avec l'ensemble de la réforme de l'État, où la refonte de l'arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde et l'autonomie fiscale des entités fédérées jouent un rôle majeur, et qui bénéficie d'ailleurs du soutien de huit partis politiques.

Il est heureux que l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde ne soit pas scindé verticalement en un arrondissement judiciaire de Bruxelles et un arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde. En effet, ce serait incompatible avec le lien que les Flamands de Bruxelles veulent maintenir avec le reste de la Flandre.

Cette réforme répond à une revendication de longue date, qui est la création d'un parquet spécifique pour Hal-Vilvorde, afin d'y combattre la criminalité sans que des facilités supplémentaires soient octroyées à des allophones. Toutefois, les deux parties litigeantes ont toujours la possibilité de demander un changement de langue, mais les autres arrondissements judiciaires de notre pays bénéficient également de cette souplesse de la procédure.

À plus long terme, la composition des tribunaux dédoublés sera basée sur le principe de la mesure de la charge de travail. La discussion porte surtout sur la première moitié de la période transitoire de deux ans. La proportion 27/73 s'appliquera durant la première année et permettra de résoudre la plupart des problèmes. La proportion 20/80 s'appliquera durant la deuxième année en partant du postulat que tout se mette en place très rapidement. Cette période transitoire sera suivie d'un processus progressif durant lequel l'administration de la justice ne sera jamais menacée pour les néerlandophones. Il est vrai que les francophones bénéficieront d'un nombre plus élevé de juges pendant la période de transition, afin d'effectuer un mouvement de rattrapage, mais les proportions seront revues par la suite sur la base de la mesure de la charge de travail. L'intervenant a pleine confiance en la volonté politique du gouvernement de mener à bien la mesure de la charge de travail. En effet, il est de l'intérêt de tous que le justiciable à Bruxelles et à Hal-Vilvorde bénéficie d'une administration correcte de la justice.

Réponses de M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles

Les projets de loi discutés aujourd'hui n'ont pas seulement fait l'objet d'un débat approfondi à la Chambre des représentants, ils mettent également l'opinion publique en émoi, comme il se doit au sein d'une démocratie.

Certains se sont demandé si les huit présidents de parti qui ont conclu l'accord sur la réforme de l'État disposaient bien des statistiques exactes.

L'évolution du vocabulaire utilisé au cours du débat sur les échanges de courriers électroniques entre le cabinet du ministre de la Justice de l'époque et un président d'un tribunal bruxellois est tout à fait édifiante. Au départ, il fut question d'une « preuve irréfutable », puis d'une « présomption ». Ensuite, on évoqua une « déduction faite par un journaliste sur la base d'un courrier électronique ». Et enfin, il fut dit « qu'il n'était pas possible de prouver l'impossible ». En séance plénière de la Chambre des représentants du 20 juin 2012 (doc. Chambre, CRIV 53 PLEN 093), il a été dit, après l'intervention de l'intervenant, que les chiffres qu'il citait étaient « les bons ». L'intervenant constate que plusieurs personnes qui n'ont pas assisté aux négociations entre les huit présidents de parti ont proclamé leurs « vérités ». Il souhaite cependant s'en tenir aux faits.

Il est exact que le SPF Justice a fourni des données chiffrées aux négociateurs. Le 30 septembre 2011, tous les négociateurs ont reçu les chiffres de population des arrondissements judiciaires, la ventilation actuelle des cadres des tribunaux et des parquets et les statistiques publiées dans les rapports d'activité approuvés par l'Assemblée générale des cours et des tribunaux. La présidente des groupes de travail techniques a transmis aux experts tous les rapports annuels disponibles. En septembre 2011, les chiffres issus des rapports annuels de l'auditorat du travail et du tribunal du travail ont également été communiqués.

L'intervenant a comparé ces chiffres à ceux communiqués par le Groupe de pilotage « Arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde » à la commission de Révision de la Constitution et de la Réforme des Institutions de la Chambre des représentants, qui sont donc également ceux reçus par la commission des Affaires institutionnelles du Sénat.

L'intervenant cite les chiffres:

Chiffres du tribunal du travail, envoyés le 30 septembre 2011 aux présidents de parti:

2009: total de 20 480 affaires, dont 5 329 (26,02 %) néerlandophones et 15 151 (73,98 %) francophones.

2010: total de 21 784 affaires, dont 5 846 (26,83 %) néerlandophones et 15 938 (73,16 %) francophones.

Parallèlement à ces chiffres du tribunal du travail, les chiffres de l'auditorat du travail ont également été fournis.

L'intervenant constate que les chiffres communiqués aux commissions de la Chambre et du Sénat sont identiques.

Les chiffres que le cabinet de la Justice a fournis le 30 septembre 2011 aux huit présidents de parti et ceux provenant du Groupe de pilotage Arrondissement judiciaire qui ont été communiqués aux commissions compétentes de la Chambre et du Sénat étaient identiques pour ce qui concerne les enquêtes judiciaires, les affaires correctionnelles et les affaires pénales impliquant des mineurs. Le secrétaire d'État a déclaré en commission de Révision de la Constitution et de la Réforme des Institutions de la Chambre des représentants que de très légères différences pouvaient être relevées en ce qui concerne le nombre d'affaires civiles en première instance (doc. Chambre, nº 53-2140/005, p. 60). Dans son avis émis d'office le 30 mai 2012 au sujet de la scission de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, le Conseil supérieur de la Justice a également affirmé qu'il n'était pas toujours facile d'obtenir les statistiques concernant le nombre d'affaires civiles en première instance (avis du CSJ, avis 2012, http://www.csj.be/).

L'intervenant affirme que ni les huit présidents de parti qui ont conclu l'accord sur la sixième réforme de l'État, ni le gouvernement ne se retranchent derrière ces statistiques.

L'accord papillon relatif à la Sixième réforme de l'État fait partie de l'accord de gouvernement qui a été conclu le 1er décembre 2011. Lors de l'installation du gouvernement, le premier ministre, M. Di Rupo, y a d'ailleurs aussi fait référence dans sa déclaration gouvernementale du 7 décembre 2011.

En mars 2012, les huit présidents de parti, le premier ministre et les deux secrétaires d'État aux Réformes institutionnelles se sont réunis afin d'élaborer, dans le cadre de la réforme de l'État, des textes de loi qui ont été déposés à la Chambre et au Sénat par des membres des commissions compétentes. Ces propositions de loi ont ensuite été transmises pour avis au Conseil d'État. Les huit présidents de parti, le premier ministre et les deux secrétaires d'État aux Réformes institutionnelles se sont alors une nouvelle fois réunis afin d'adapter les propositions de loi sur la base des observations du Conseil d'État et certains membres des commissions compétentes de la Chambre et du Sénat ont déposé des amendements.

Quels choix a-t-on faits ? Chaque tribunal, chaque parquet et donc aussi les tribunaux francophones et néerlandophones de Bruxelles, le parquet bruxellois et le parquet de Hal-Vilvorde se verront attribuer à l'avenir le nombre de magistrats dont ils ont besoin, conformément à la mesure de la charge de travail qui aura été réalisée.

Nul ne conteste que la réalisation de cette mesure accuse un certain retard. Mais le dossier est à présent pris en main au niveau politique, sous la responsabilité du gouvernement et plus spécifiquement de la ministre de la Justice. Il est ainsi prévu que la mesure devra être terminée pour le 1er juin 2014 au plus tard. En attendant, on prévoit une clé de répartition provisoire pour le cadre.

L'intervenant a particulièrement apprécié le débat, même s'il n'est pas d'accord avec les interventions de l'opposition flamande. Cela s'explique aussi par le fait qu'il y a en la matière des points de vue diamétralement opposés. Le secrétaire d'État n'est pas favorable à une scission de la Belgique et est toujours disposé à dialoguer avec les autres communautés linguistiques.

Ceux qui ont formulé des critiques fondamentales sur les textes à l'examen ont indiqué qu'ils n'avaient aucune objection contre la fixation d'une clé de répartition provisoire pour le tribunal de commerce. Le secrétaire d'État s'en réjouit.

En ce qui concerne le tribunal du travail, la règle des 27 %, qui sera d'application à partir de la date d'entrée en vigueur de la réforme (cadre rempli à 90 %), semble correspondre assez bien avec les chiffres qui ont été communiqués aux huit présidents de parti, aux chiffres que le comité de pilotage « Bruxelles-Hal-Vilvorde » a transmis aux commissions de la Chambre et du Sénat et aux chiffres en vigueur pour le Conseil supérieur de la Justice.

Lors du débat sur le parquet de Bruxelles, une discussion s'est engagée entre MM. Laeremans et Anciaux, mais ils étaient d'accord sur le fait que la proportion 80/20 est une proportion correcte. Le secrétaire d'État apprécie le fait que ceux qui s'opposent au projet sont aussi capables de faire preuve d'honnêteté à propos de certains éléments objectifs.

On a dit également que les textes à l'examen s'écartent de l'accord papillon, ce qui est exact puisque la norme de 27 % n'y figurait pas. C'est la preuve que les huit partis qui ont négocié ont entendu les revendications exprimées sur le terrain et dans d'autres communautés. Cette réforme a pour unique ambition de faire en sorte que la Justice fonctionne bien partout dans le pays et spécifiquement à Bruxelles-Hal-Vilvorde et qu'il n'y ait plus d'arriéré judiciaire. C'est dans ce but que la norme de 27 % a été instaurée.

Le secrétaire d'État indique que cette norme aura un caractère temporaire, tout comme d'autres normes prévues dans le projet.

On a dit à propos de ces cadres temporaires qu'ils ne permettaient pas de tenir compte des observations du Conseil d'État. Le secrétaire d'État dément cette affirmation. La norme de 27 % avait déjà été prévue avant l'envoi des textes au Conseil d'État. Par la suite, le Conseil d'État a mis l'accent sur la possible responsabilité du législateur. Les huit partis qui ont négocié ont cherché une solution. Au moyen d'une référence explicite au droit commun, on a instauré la possibilité de faire appel à des juges de complément si des problèmes devaient survenir sur le terrain. Ainsi, on a fait référence à l'article 86bis du Code judiciaire, en ce qui concerne le siège. S'agissant des parquets, le secrétaire d'État renvoie à l'article 326, § 1er, du Code judiciaire et à la loi du 3 avril 1953.

En ce qui concerne les juges des tribunaux de police, un dédoublement de ces tribunaux est prévu de sorte qu'il devrait y avoir sept juges néerlandophones en surnombre. Un régime facultatif a été élaboré à leur intention afin de leur permettre de demander leur mobilité, soit vers un autre tribunal de police, soit vers un autre tribunal, avec maintien de leur statut.

Par ailleurs, il a été décidé de créer un comité de monitoring réunissant des représentants des huit partis et qui sera chargé, sous la direction de la ministre de la Justice, de suivre l'évolution de la situation sur le terrain. On pourra ainsi intervenir immédiatement si un arriéré judiciaire devait se faire jour à la suite de la réforme.

D'aucuns ont exprimé leur inquiétude à propos de la condition prévoyant un cadre rempli à 90 % et, partant, de l'entrée en vigueur de la loi à l'examen. C'est la préoccupation de chacun et le gouvernement doit aussi veiller de surcroît à ce qu'il y ait suffisamment de magistrats et de personnel au siège, au greffe et au parquet dans l'arrondissement de Bruxelles et dans celui de Hal-Vilvorde.

L'objectif de départ était de résorber l'arriéré judiciaire et c'est la raison pour laquelle des contacts ont déjà été pris avec le SPF Personnel et Organisation, Selor et le Conseil supérieur de la Justice. Si le Sénat approuve aussi le texte, on pourra procéder immédiatement aux recrutements et donner aux services la possibilité d'effectuer un travail préparatoire. Toute cette procédure sera suivie de près et des évaluations auront lieu en décembre 2012 et en juin 2013.

L'objectif est de faire en sorte que la loi entre en vigueur pour 2014. La mesure de la charge de travail devra être terminée pour le mois de juin 2014 au plus tard de manière que l'on puisse transposer la norme de 27 % pour ainsi dire automatiquement sous la forme de cadres définitifs.

D'aucuns affirment que les clés de répartition temporaires sont définitives et peuvent être appliquées immédiatement sur le terrain. C'est faux bien entendu. À ce propos, le secrétaire d'État se réfère à l'article 152 de la Constitution. Tous les magistrats restent nommés là où ils siègent. Des changements ne pourront intervenir dans les tribunaux respectifs bruxellois qu'en cas de mises à la retraite ou de mutations; personne ne passera à la trappe. La situation réelle ne correspondra donc certainement pas tout de suite aux clés de répartition temporaires que les huit formations ont définies.

On a évoqué le fait qu'il faudrait réduire le nombre de juges au tribunal de commerce. Selon les chiffres dont dispose le secrétaire d'État, ils sont actuellement dix et ils le resteront. Le tribunal du travail compte neuf juges, et ce nombre serait, soi-disant, ramené à cinq. Le secrétaire d'État renvoie à l'intervention de M. Anciaux concernant l'application de la norme des 27 % et confirme ses propos. La norme sera applicable à tous les tribunaux une fois que la réforme globale sera entrée en vigueur. Cela signifie qu'il y aura huit juges au tribunal du travail. À cet égard, le secrétaire d'État renvoie aux textes en projet et aux règles d'arrondissement qui sont applicables.

Le but est que ces chiffres soient aussi temporaires que possible, puisque la mesure de la charge de travail doit être terminée d'ici juin 2014. À ce propos, on a relevé que le Conseil supérieur de la Justice aurait dit qu'elle ne pourra pas être achevée avant 2017. Le secrétaire d'État précise que ce n'est pas le Conseil supérieur de la Justice qui a fait cette déclaration. Il se réfère à la page 13 de l'avis rendu par le Conseil supérieur de la Justice: « Des informations recueillies de la Commission de Modernisation de l'Ordre judiciaire dans le cadre du présent rapport, il appert que celle-ci n'envisage la finalisation complète de la mesure de la charge de travail qu'en 2017 et ce, dans le meilleur cas de figure. » En réaction à cette information, « le Conseil supérieur de la Justice considère dès lors qu'il est nécessaire de vérifier dans quelle mesure on peut obtenir les bonnes analyses à partir des données existantes au plus tard pour la mi-2014). » Le Conseil supérieur de la Justice formule ensuite lui-même des suggestions pour que cet exercice puisse être terminé d'ici la mi-2014. Le secrétaire d'État souligne que cela relève de la responsabilité du gouvernement et de la ministre de la Justice.

On a dit beaucoup de choses sur la législation linguistique au cours du débat. La législation linguistique est particulièrement complexe, et le secrétaire d'État ne souhaite pas trop s'étendre sur des cas spécifiques. Il renvoie à son exposé détaillé sur les projets transmis par la Chambre et aux développements des propositions déposées initialement à la Chambre (doc. Chambre, nº 53-2140/1).

L'on a également évoqué la modification des conditions linguistiques, qui ramène l'exigence du bilinguisme de 2/3 à 1/3. Le secrétaire d'État relève que, pour M. Laeremans, cette modification est logique, en ce qui concerne le siège, dans le cadre du dédoublement. Le secrétaire d'État partage ce point de vue.

L'intervenant nie l'existence d'une quelconque forme de droit de veto et de tutelle. Il est seulement question d'un droit d'évocation facultatif du président du tribunal de première instance francophone de Bruxelles en matière de surveillance et de discipline pour les justices de paix. Cela découle du fait que les justices de paix ne sont pas dédoublées et que la surveillance à leur égard n'est pas modifiée. On prévoit aussi la possibilité d'intenter un recours contre les décisions de certaines justices de paix de Hal-Vilvorde, après changement de langue, auprès du tribunal de première instance francophone de Bruxelles, ainsi que la possibilité, dans toutes les justices de paix de l'arrondissement, d'intenter un recours auprès des tribunaux d'arrondissement francophone et néerlandophone conjoints en cas de refus de changement de langue, là où la loi le prévoit.

L'intervenant tient aussi à souligner que certaines personnes qui critiquent le projet accueillent tout de même positivement la scission du parquet. Chaque parquet, aussi bien celui de Bruxelles que celui de Hal-Vilvorde, pourra ainsi mener sa propre politique sur mesure.

La manière dont on évalue le projet à l'examen dépend de l'angle d'approche défendu par chaque groupe politique. Le débat a été différent à la Chambre, car il y avait aussi un groupe dans l'opposition francophone. Les arguments qui y ont été échangés étaient donc évidemment différents. On a prétendu que la critique de M. Maingain était marginale, mais le secrétaire d'État souhaite réfuter cette affirmation. À ce propos, il renvoie donc au rapport de la Chambre (doc. Chambre, nº 53-2140/5).

Les huit partis ne souscrivent pas à la critique émanant de l'opposition, qu'elle soit francophone ou néerlandophone. Le secrétaire d'État trouve que cet accord est équilibré et que les textes adoptés par la Chambre sont excellents. Par conséquent, il estime qu'il n'est pas nécessaire de soutenir des amendements.

Le secrétaire d'État va parcourir les questions qui ont été posées au cours du débat.

Il répond d'abord à la question concernant les cinq magistrats de parquet qui seront détachés du parquet de Bruxelles vers celui de Hal-Vilvorde, où ils seront placés sous l'autorité du procureur du Roi de Hal-Vilvorde en ce qui concerne la politique de poursuites pénales et de sécurité.

Dès lors que la législation linguistique est maintenue, on a choisi, dans un souci d'efficacité et en vue du bon suivi du dossier, l'option dans le cadre de laquelle des magistrats de parquet détachés, placés sous l'autorité du procureur de Hal-Vilvorde, peuvent suivre une affaire dès le début et la porter devant le tribunal le cas échéant, plutôt que l'option prévoyant qu'une affaire portée devant le tribunal (francophone) est directement « reprise » par le parquet bilingue de Bruxelles-Capitale, qui est en effet le seul parquet attaché au tribunal francophone. Le projet prévoit donc un « pilotage » auprès du procureur de Hal-Vilvorde, mais préserve par ailleurs l'application actuelle de la législation linguistique. Alors qu'aujourd'hui, un dossier francophone (c'est-à-dire un dossier après un changement de langue) est en fin de compte porté devant le tribunal par un magistrat francophone, ce dossier sera désormais traité en priorité aussi par les magistrats en question.

En ce qui concerne le « traitement prioritaire » des affaires francophones et la question de savoir si celles-ci seront prioritaires, le secrétaire d'État répond que les affaires francophones ne bénéficieront d'aucune priorité de traitement sur d'autres affaires. Le projet prévoit seulement que ces affaires francophones seront traitées en priorité par les magistrats détachés, mais sans exclusivité. Les priorités de la politique des poursuites sont fixées par le Collège des procureurs généraux et par le procureur concerné, chacun dans le ressort de son parquet.

La distinction établie dans le projet entre un « changement de langue » et un « renvoi » concerne les affaires pour lesquelles un changement de langue est demandé, par exemple, pendant l'instruction (art. 16, § 2, de la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire) et celles dont connaît le tribunal de police (art. 15 — renvoi à Bruxelles). Dans les deux cas, ce sera en priorité un magistrat francophone qui les prendra en charge.

Sur la question de savoir si l'expression « par priorité » signifie que ces francophones traiteront également des dossiers de néerlandophones, le secrétaire d'État répond qu'elle porte essentiellement sur les dossiers dans lesquels un changement de langue a été demandé; ce sont donc prioritairement les magistrats de parquet détachés qui traiteront ces dossiers. En ce qui concerne l'examen des autres dossiers, il est fait référence à la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire (art. 43, § 5). Le projet ne prévoit pas de restrictions à l'égard de la pratique actuelle.

Il a également été demandé pourquoi ces magistrats francophones doivent seulement justifier d'un « bilinguisme fonctionnel » et non d'un « bilinguisme approfondi », alors qu'ils travaillent pourtant dans une région unilingue néerlandophone. Le secrétaire d'État explique que le choix du bilinguisme fonctionnel cadre avec les exigences imposées par l'article 43quinquies, § 1er, alinéa 3, où le bilinguisme fonctionnel est la norme « dans tous les cas où la présente loi requiert la connaissance de l'autre langue ». La législation actuelle sur l'emploi des langues en matière judiciaire demeure d'application. D'autre part, le projet ne prévoit pas de restrictions à l'égard de la pratique actuelle.

En ce qui concerne le détachement de magistrats de parquet francophones vers le parquet de Hal-Vilvorde, l'ambition des huit partis était de résoudre les problèmes de justice à Bruxelles, de répondre aux demandes et aspirations de scission du parquet et de permettre une gestion plus autonome avec des tribunaux francophones et néerlandophones distincts. Les huit négociateurs ont apporté à ces demandes une réponse équilibrée.

Actuellement, les affaires de Hal-Vilvorde sont finalement traitées, après un changement de langue, par des magistrats de parquet francophones en vue du réquisitoire devant le tribunal; bien entendu, l'instruction peut également être menée par des magistrats de parquet néerlandophones bilingues, notamment en application de l'article 43, § 5, alinéa 4. Cette disposition n'est pas modifiée, mais doit être lue conjointement avec le traitement « par priorité ».

Plusieurs questions ont été posées à propos de statistiques concernant le personnel, les cadres, la magistrature, etc. Le SPF Justice a fourni les données les plus récentes disponibles. D'autres statistiques ont été demandées et seront transmises, si elles sont disponibles, dans les meilleurs délais.

À la question de savoir si la réglementation proposée aura pour conséquence que des actes d'instruction seront exécutés en français par la police de Hal-Vilvorde et si des missions seront données en français, le ministre souligne que la législation sur l'emploi des langues en matière judiciaire demeure d'application intégrale. Compte tenu de l'unilinguisme de Hal-Vilvorde, les procès-verbaux, les apostilles, les directives données à la police, etc., doivent actuellement être rédigés en néerlandais. Cette situation n'est pas modifiée. La législation sur l'emploi des langues en matière judiciaire prévoit déjà qu'en cas de changement de langue de la procédure, une traduction de ces apostilles doit obligatoirement être annexée. Cette situation n'est pas non plus modifiée. D'autre part, il est admis que le magistrat qui possède un bilinguisme approfondi peut se charger personnellement de cette traduction en néerlandais.

Le secrétaire d'État certifie que la nouvelle réglementation ne change rien à la situation actuelle en ce qui concerne les exigences linguistiques qui s'appliquent à la police de Hal-Vilvorde.

Il souligne que le procureur de Hal-Vilvorde veille à l'uniformité de la politique criminelle, quelle que soit la langue du dossier, sans risque de mener une politique de deux poids, deux mesures.

Pour ce qui concerne l'évitement du « shopping judiciaire », le secrétaire d'État pointe l'article 16, § 3, de la loi sur l'emploi des langues en matière judiciaire, qui prévoit que le changement de langue peut être refusé si l'inculpé ne comprend pas la langue dont il demande l'emploi.

Sur le fait que les magistrats francophones relèvent de la tutelle hiérarchique du procureur de Bruxelles et sur le prétendu risque d'ingérence de la part de Bruxelles, le secrétaire d'État répond que le texte ne souffre d'aucune ambiguïté. Les magistrats de parquet détachés sont sous l'autorité (et donc sous la direction et le contrôle) du procureur de Hal-Vilvorde pour ce qui concerne leur fonctionnement au quotidien dans l'exécution de leur politique criminelle. En revanche, du point de vue fonctionnel et juridique, ils continuent à faire partie du parquet de Bruxelles où ils demeurent sous la direction hiérarchique du procureur de Bruxelles, notamment dans le cadre de la politique disciplinaire ou dans le cadre d'avis émis vis-à-vis des candidats postulant à une fonction. Il y aura toutefois des contacts entre ces deux niveaux. Ainsi, il est logique que le procureur du Roi de Hal-Vilvorde communique à son collègue les informations nécessaires à la formulation de son avis dans le cadre d'une procédure de nomination. Le secrétaire d'État renvoie à l'article 25 du projet de loi.

À la question de savoir pourquoi un tiers de bilingues suffit à Bruxelles et s'il ne serait pas préférable que tous les magistrats possèdent au moins une connaissance passive de l'autre langue nationale, de manière à ce qu'ils soient capables de lire des documents établis dans l'autre langue, le secrétaire d'État répond que l'accord part d'un bilinguisme fonctionnel d'un tiers sur l'ensemble.

Le secrétaire d'État confirme que la règle d'un tiers de bilingues vaut pour l'ensemble des magistrats bruxellois.

Il insiste sur le fait que les magistrats de parquet détachés font partie du cadre du parquet de Bruxelles. Il renvoie à cet égard à l'article 57, 1º, du projet de loi. Il signale en outre qu'un tiers des juristes de parquet et des autres employés, à l'exception du personnel de niveau D, devront dorénavant aussi être bilingues fonctionnels. Aujourd'hui, il n'y a pas d'obligations linguistiques pour le personnel du parquet; le projet prévoit dès lors des obligations supplémentaires, à savoir qu'un tiers du personnel du parquet doit être fonctionnellement bilingue, à l'exception du personnel de niveau D.

Il demandera les chiffres relatifs aux connaissances linguistiques du personnel au SPF Justice et les transmettra à la commission (voir annexe).

Concernant la disposition selon laquelle le procureur de Bruxelles doit toujours être un francophone, le secrétaire d'État renvoie à l'explication qu'il a donnée lors de la discussion en commission de la Chambre (doc. Chambre, nº 53-2140/005, p. 104).

En ce qui concerne les compétences respectives du procureur de Bruxelles et de celui de Hal-Vilvorde, le secrétaire d'État répond que l'on part du principe d'une délimitation territoriale.

Pour ce qui est de la composition du conseil fédéral des procureurs, le secrétaire d'État répond que cette question sera examinée avec la ministre de la Justice.

Concernant le nombre de magistrats de parquet, le secrétaire d'État confirme que les chiffres cités par M. Laeremans sont exacts.

À propos de la différence entre l'évaluation et la mesure de la charge de travail, le secrétaire d'État précise que l'évaluation dans les trois ans à la demande d'un des procureurs concerne la proportion en vigueur au parquet de Hal-Vilvorde (20 %) par rapport au parquet de Bruxelles, alors que la mesure de la charge de travail consistera à voir combien de magistrats/membres du personnel sont nécessaires. Cette mesure de la charge de travail ne peut conduire à une réduction du nombre de magistrats.

Le secrétaire d'État estime que la question de savoir si le nombre de magistrats sera comparable avec celui qui prévaudra dans d'autres arrondissements est un aspect qu'il faudra aborder lors de la mesure de la charge de travail, qui pourra notamment prendre en compte des éléments démographiques.

En ce qui concerne le nombre de magistrats de parquet pour Bruxelles, le secrétaire d'État confirme que, selon les chiffres du SPF Justice, il est question de 96 magistrats de parquet, dont 19 néerlandophones. Le secrétaire d'État confirme également les chiffres cités pour l'auditorat; pour les mandats inférieurs, aucune décision n'a encore été prise.

Pour ce qui est des questions relatives à la taille des diverses catégories du personnel auprès des parquets et des auditorats et la répartition par rôle linguistique, tant à Bruxelles qu'à Hal-Vilvorde, le secrétaire d'État renvoie à l'annexe.

Il répond en outre que l'arrêté visé à l'article 59 du projet n'a pas encore été préparé.

En ce qui concerne les 90 % du parquet de Hal-Vilvorde, le secrétaire d'État répond que la réforme entrera en vigueur de la même façon pour le parquet que pour le siège, conformément à l'article 61 du projet.

Quant à savoir s'il y aura une maison de justice à Hal-Vilvorde, un laboratoire de police scientifique ou un conseil d'arrondissement pour l'assistance aux victimes, ce sont des questions qui, selon le secrétaire d'État, concernent l'exécution de la loi; elles relèvent donc de la compétence de la ministre de la Justice.

Le secrétaire d'État indique que les réformes institutionnelles se déroulent toujours en trois phases. La première phase est celle des négociations, qui aboutissent à un accord. Dans la deuxième phase, l'accord est transposé en textes légaux. Enfin, la troisième phase est celle de la mise en œuvre de l'accord sur le terrain. La présente réforme de l'État n'échappe pas à la règle. Les différents ministres partagent la responsabilité de sa mise en œuvre, dans leur domaine de compétence respectif. Pour cet aspect de la réforme de l'État, c'est la ministre de la Justice qui est compétente. Elle sera évidemment pleinement soutenue par le premier ministre et les deux secrétaires d'État. Il paraît logique, pour l'intervenant, qu'il y ait une maison de justice dans un arrondissement judiciaire de 600 000 habitants. Quant à savoir quand exactement, c'est à la ministre de la Justice d'en décider. Il faudra d'ailleurs se concerter sur ce point avec les ministres de Communauté compétents, afin de garantir la continuité du service.

Les magistrats néerlandophones actuels à Bruxelles ne disparaîtront évidemment pas du jour au lendemain, pas plus que le personnel d'ailleurs. Ceux qui sont nommés le resteront et les contractuels sous contrat à durée indéterminée ne seront pas licenciés. L'adoption du projet de loi aura pour conséquence que des néerlandophones seront en surnombre et que des francophones seront engagés. Concernant ces néerlandophones, le secrétaire d'État entend plaider pour une mobilité volontaire ou imposée, mais personne ne sera contraint à des déplacements excessifs. Des mutations interviendront lorsque des places seront vacantes près du domicile, afin de limiter l'impact budgétaire de l'opération. Si un poste se libère à Louvain, par exemple, et qu'une personne à Bruxelles possède les qualifications requises, celle-ci se verra proposer la place vacante. Qui plus est, si les besoins du service, hors Bruxelles et Hal-Vilvorde, permettent d'engager du personnel supplémentaire, le personnel néerlandophone en surnombre pourra être déplacé s'il se rapproche ainsi de son domicile. Il a également été convenu que, si les textes de loi sont adoptés, le personnel néerlandophone bilingue en surnombre qui travaille dans des chambres francophones pourra conserver son emploi jusqu'au moment où des remplaçants francophones remplissent les conditions légales. Ils peuvent d'ailleurs être inclus dans le calcul pour cette norme de 90 %. Les huit partis de la majorité ambitionnent en effet de faire entrer cette norme en vigueur dans les plus brefs délais.

Le recrutement du personnel supplémentaire sera entamé dans les meilleurs délais, en concertation avec Selor et le Conseil supérieur de la Justice. Une task-force sera chargée du suivi et des évaluations auront lieu à la fin de cette année ainsi qu'à la fin du mois de juin 2013.

À la question de savoir par quel moyen objectif on pourra s'assurer que 90 % de l'ensemble des cadres seront remplis, le secrétaire d'État renvoie à l'habilitation donnée au Roi (cf. article 61, alinéa 2, du projet).

En ce qui concerne le cadre extinctif, le secrétaire d'État souligne qu'il n'y aura pas de licenciements secs. Dans l'accord, il est précisé que ceux qui partiront ne seront pas remplacés (« non-remplacement des départs »), pour autant que les places laissées vacantes se situent au-delà des limites des clés de répartition temporaires. Les intéressés ne seront pas désignés personnellement.

En ce qui concerne le nombre de juges d'instruction et leur bilinguisme, le secrétaire d'État renvoie aux chiffres du SPF Justice. Par ailleurs, il fait remarquer que le nombre de juges d'instruction néerlandophones est fixé par le Roi (article 79 du Code judiciaire) dans le cadre du tribunal néerlandophone à créer, ce qui ne sera fait que lorsque l'ensemble de la réforme entrera en vigueur.

En ce qui concerne le nombre de juges pénaux néerlandophones restants, le secrétaire d'État renvoie une fois encore aux articles 76 à 79 du Code judiciaire et à la répartition concrète des fonctions qui devra encore être effectuée par la ministre de la Justice et par le législateur lors du « phasage » de la réforme. Il n'a pas connaissance de l'existence d'une note spécifique concernant les juges pénaux. En revanche, le « stuurgroep BHV » a transmis une note aux membres de la commission de la Chambre, qui reprend les termes d'une lettre que la présidente du tribunal du travail a adressée à la ministre de la Justice le 5 avril 2012.

Le secrétaire d'État confirme qu'il y a seulement deux niveaux de connaissance linguistique. Il va sans dire que les magistrats pourront toujours participer à l'examen de connaissance approfondie.

Il s'engage à fournir à la commission les chiffres précis au sujet des juges néerlandophones et francophones qui remplissent cette obligation.

À la question de savoir pourquoi seuls deux juges d'instruction devront justifier d'un bilinguisme approfondi, le secrétaire d'État répond que cette exigence concerne deux juges d'instruction par groupe linguistique. Étant bilingues, ils pourront aussi, par exemple, rédiger eux-mêmes des apostilles en français et en néerlandais à Hal-Vilvorde, sans avoir besoin de traduction. Cette proportion s'explique par le dédoublement de chaque tribunal en deux tribunaux unilingues.

Les autres juges d'instruction ne devront pas nécessairement justifier d'un bilinguisme fonctionnel. Le secrétaire d'État renvoie à cet égard au régime 1/3.

Le projet prévoit que les juges de complément seront intégrés dans le cadre, auprès de chaque nouveau tribunal unilingue, ce qui est positif à la fois pour le cadre néerlandophone et pour le cadre francophone.

Les tribunaux de police de Bruxelles-Capitale seront également dédoublés et suivront donc la règle générale.

À la question relative à la connaissance linguistique passive dans une ville bilingue, le secrétaire d'État répond que le choix opéré résulte de la création de tribunaux unilingues.

En ce qui concerne la question relative aux exigences linguistiques actuelles pour les greffiers, le secrétaire d'État renvoie à l'article 53, § 6, alinéa 3, de la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire qui prévoit que les connaissances linguistiques des greffiers sont établies par un examen portant sur la connaissance orale et écrite, tant passive qu'active, de l'autre langue.

La diminution de la proportion de bilingues parmi les greffiers, qui passe de 100 % à 30 %, est également la conséquence du dédoublement des tribunaux bilingues en tribunaux unilingues.

Les chiffres demandés concernant le tribunal de police seront transmis à la commission, pour autant qu'ils soient disponibles.

La clause de sauvegarde de 27 % tiendra compte du nombre de magistrats à un moment qui se situera entre le 1er janvier 2012 et l'entrée en vigueur des cadres provisoires. Dans les différents tribunaux, la condition imposant un cadre néerlandophone rempli à 27 % est satisfaite de sorte que le relèvement temporaire — si des places devaient devenir vacantes — sera de toute façon possible à partir du moment où la réforme entrera en vigueur (90 %). La condition des 27 % équivaut à une clause de sauvegarde en attendant que la mesure de la charge de travail soit réalisée. À la fin de l'année où les 90 % de l'ensemble des cadres seront remplis, la mesure de la charge de travail devra également être prête, ainsi qu'il est prévu dans le projet.

La réalisation de la mesure de la charge de travail et la méthodologie relèveront de la responsabilité de la ministre de la Justice, conformément à l'article 57, 8º, du projet. Le secrétaire d'État indique qu'elle soumettra sous peu une proposition dans ce sens au gouvernement.

Il revient à la critique selon laquelle il n'aurait pas répondu de manière satisfaisante à certaines observations du Conseil d'État lors du débat à la Chambre.

Concernant l'article 15 (l'ancien article 12) du projet, le Conseil d'État a formulé l'observation suivante:

« 20. Dans le paragraphe 3 du texte proposé, il y a lieu de supprimer, à la première phrase, les mots « de changement de langue ou », la seule hypothèse envisageable étant celle d'un renvoi, ce que confirme d'ailleurs la deuxième phrase du même paragraphe où il est seulement question de renvoi. »

Le secrétaire d'État indique toutefois que le Conseil d'État semble avoir perdu de vue que l'article 16, § 2, de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire dispose aussi que le changement de langue peut également avoir lieu au stade de l'information. Dans ce cas, il n'y a pas de « renvoi » puisqu'aucune juridiction n'a encore été saisie.

Sur l'ancien article 15bis (nouvel art. 19), le Conseil d'État a fait la remarque suivante:

« 23. À l'article 186bis, nouvel alinéa 2 proposé, la disposition à la fin doit être définie plus précisément, comme suit:« et des juges de paix et des juges de paix de complément dans le tribunal de police néerlandophone ayant son siège au sein de l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale. »

Le secrétaire d'État fait observer qu'il n'a pas été tenu compte de cette observation parce que le tribunal de police est en effet composé de « juges » ou de « juges de complément », et non de « juges de paix » ou de « juges de paix de complément ».

L'article 45 initial a donné lieu à l'observation suivante de la part du Conseil d'État:

« 45. À l'article 23quater proposé, de la loi précitée, il est prévu, à l'alinéa 1er, que les tribunaux d'arrondissement statuent comme en référé. Il appartient aux Chambres législatives d'examiner dans quelle mesure les articles 1035 à 1038, ainsi que les articles 1040 et 1041 du Code judiciaire doivent être déclarés mutatis mutandis applicables, et ce dans l'intérêt de la sécurité juridique. »

Le secrétaire d'État répond qu'il n'a pas été tenu compte de cette observation parce que les mots « une procédure comme en référe » sont suffisamment clairs et existent déjà dans d'autres dispositions légales (voir, par exemple, l'article 32 decies de la loi du 4 août 1996 sur le bien-être au travail ou l'article 130, alinéa 3, du Code des sociétés).

À propos de l'ancien article 47 (désormais l'article 57), le Conseil d'État a formulé l'observation suivante:

« 51. Les notions de connaissance approfondie et de connaissance fonctionnelle ne sont pas des notions consacrées par la loi précitée. Son article 43quinquies se limite à prévoir deux types d'examen en vue de la vérification de la connaissance de l'autre langue et n'exige, dans sa version actuelle, la réussite du deuxième examen que dans un nombre de cas limitativement énumérés. Il suffit dès lors de se référer sans plus à la disposition relative au premier ou au deuxième examen selon le niveau d'exigence requis.

Cette observation vaut également pour l'article 48 de la proposition examinée. »

Le secrétaire d'État répond qu'il n'a pas été tenu compte de cette observation étant donné que la référence aux notions de « connaissance approfondie » et de « connaissance fonctionnelle » favorise la visibilité du texte et ne nuit pas à la sécurité juridique, puisqu'il y a également une référence aux dispositions de loi qui établissent une distinction entre ces deux types de connaissances linguistiques.

Le secrétaire d'État conclut en disant qu'une fois la loi votée, il restera beaucoup à faire sur le terrain. Cette tâche incombera principalement à la ministre de la Justice, qui pourra compter pour ce faire sur le soutien de l'ensemble du gouvernement. L'opération nécessitera évidemment des efforts budgétaires. Enfin, l'intervenant trouve que les choix qui ont été faits par les huit partis sont très équilibrés.

Répliques

M. Laeremans constate que le secrétaire d'État confirme les chiffres avancés par les magistrats « contestataires » et que les négociateurs disposaient en fin de compte de chiffres plus exacts que ce qu'ont laissé supposer les déclarations citées dans la presse. Cela signifie aussi que l'on a délibérément accepté la règle 80/20, ce qui constitue une énorme différence par rapport à la situation actuelle à Bruxelles. Même un rapport de forces de 73/27 constitue un important changement par rapport à la situation globale actuelle. La règle 80/20 est maintenue, consacrant ainsi une victoire éclatante des francophones aux dépens des magistrats flamands à Bruxelles. Le secrétaire d'État tente de dissimuler la réalité en mettant l'accent sur les 27 % décidés à titre temporaire, mais ce n'est que de la poudre aux yeux.

En ce qui concerne les tribunaux de police, M. Laeremans réfute l'affirmation selon laquelle il accepterait que le besoin en personnel néerlandophone soit fixé à 13 personnes (magistrats et personnel du greffe). Il existe en effet une différence de charge de travail entre les affaires pénales et les affaires civiles. D'après ses informations, la clé de répartition serait même actuellement supérieure à 25/75. En ce qui concerne le nombre de juges de police, on s'oriente vers une clé de répartition 20N/80F, alors que la proportion actuelle est de 79N/21 F (11 juges sur 14 sont néerlandophones). Il s'agit là d'un réel revirement de situation.

En ce qui concerne le bilinguisme, M. Laeremans maintient l'opinion selon laquelle deux régimes distincts peuvent s'appliquer aux tribunaux unilingues, d'une part, et bilingues, d'autre part. Toutefois, ce raisonnement ne peut être étendu au parquet car celui-ci doit rester bilingue. Pour ce qui concerne l'assouplissement du régime linguistique des tribunaux bilingues, il rappelle qu'il conviendrait de tendre vers une connaissance obligatoire, minimale et passive de la seconde langue pour l'ensemble des magistrats.

Il souligne encore que sa proposition reste différente du présent projet de loi dès lors que l'arrondissement de Bruxelles serait limité aux 19 communes. Dans le même temps, il est incompréhensible que la situation à Hal-Vilvorde soit assimilée à la situation de Bruxelles en terme d'exigences linguistiques. Si on exige un tiers de magistrats bilingues à Hal-Vilvorde, il faut à tout le moins prévoir un 1/2 ou 2/3 de magistrats bilingues à Bruxelles. A défaut, l'arrondissement de Hal-Vilvorde deviendra bilingue, ce qui est inacceptable. En tout état de cause, l'orateur estime que les francophones ont réussi à imposer leur suprématie sur Hal-Vilvorde.

Les juges de complément n'y changeront rien. Aujourd'hui, il y a cinq juges de complément néerlandophones et trente et un francophones. Mais ces derniers sont utilisés afin de contourner la loi sur l'emploi des langues. Les néerlandophones qui ont donc toujours assuré que la proportion de 2/3 de bilingues soit atteinte, bénéficieront de ce système de juges de complément afin de pouvoir continuer à exister. C'est le monde à l'envers.

Pour ce qui concerne le personnel du tribunal de première instance, M. Laeremans estime n'avoir pas reçu de réponse de la part du secrétaire d'État. L'intervenant rappelle qu'un engagement supplémentaire de près de 92 personnes est prévu alors que le besoin ne s'en fait pas ressentir. Alors que des restrictions budgétaires sont mises en œuvre au sein du SPF Justice, il est aberrant de constater que, dans le même temps, la presse annonce l'engagement de près de 40 magistrats et 200 personnes pour les greffes. Cet engagement se fera d'ailleurs exclusivement au profit des francophones. L'intervenant attend donc avec impatience de la part du secrétaire d'État des chiffres définitifs sur cette question.

M. Laeremans souligne que la réforme contribuera à accorder de nouvelles facilités linguistiques aux francophones. Il constate, par exemple, que la requête en comparution volontaire pourra à l'avenir être introduite en français malgré le fait qu'on habite Hal-Vilvorde et ce sans aucun contrôle de la connaissance de la langue. Des néerlandophones de l'arrondissement de Hal-Vilvorde pourront ainsi introduire une action en français devant le tribunal francophone. C'est une aberration et il ne fait aucun doute que des abus seront rapidement constatés.

Enfin, M. Laeremans relève que les cinq magistrats du parquet détachés à Hal-Vilvorde feront toujours partie du cadre général prévu pour Bruxelles (en ce y compris pour la prise en compte du rôle linguistique et la clé de répartition 1/3-2/3). Compte tenu du fait que le cadre du parquet de Bruxelles comptera 96 magistrats du parquet, 32 magistrats devront être bilingues. Or, si 5 de ces 32 magistrats doivent être détachés vers Hal-Vilvorde, il n'y aura plus que 27 magistrats bilingues à Bruxelles. L'arrondissement de Bruxelles sera donc moins bilingue que l'arrondissement de Hal-Vilvorde.

M. Vanlouwe estime que les réponses du secrétaire d'État étaient parfois inexactes. Il relève notamment l'inexactitude de la réponse donnée quant au nombre de juges d'instruction néerlandophones et francophones à Bruxelles; données qui entretemps seront rectifiées par le cabinet.

Le secrétaire d'État précise toutefois que les chiffres exacts o,t été communiqués par le SPF Justice au secrétariat de la commission à l'attention des commissaires (il s'agit de 6 bilingues — connaissance approfondie et de 6 bilingues — connaissance fonctionnelle sur un total de 22 juges d'instruction bruxellois. Connaissance approfondie: 3F, 3N. Connaissance fonctionnelle: 5 F, 1 N).

À la suite des réponses formulées par le secrétaire d'État, M.Vanlouwe relève que:

— quant aux données chiffrées qui ont abouti à la clé de répartition 20/80, il appert maintenant que les négociateurs étaient finalement en possession des chiffres exacts. Il constate toutefois qu'un acteur majeur du débat, Mme Van den Bossche, présidente du tribunal du travail de Bruxelles, a communiqué d'autres chiffres tant au secrétaire d'État qu'aux médias, ce qui a engendré un débat sur le fond et une modification desdits chiffres;

— toutefois, eu égard à la confirmation par le secrétaire d'État que les négociateurs disposaient de chiffres exacts, la question essentielle doit porter sur les raisons pour lesquelles la clé de répartition finale n'est pas de 30/70 mais de 20/80. S'il s'agit d'un accord politique, celui-ci est très mauvais car les négociateurs flamands ont réduit le chiffre exact de 26 % à 20 % et ce au préjudice des néerlandophones;

— même avec la correction de 27 % annoncée, il n'en reste pas moins vrai qu'en ce qui concerne le tribunal du travail, l'arriéré judiciaire (un arriéré de 1 638 dossiers pour l'année 2011) s'amplifiera du côté néerlandophone. Par contre, du côté francophone, les mesures prévues auront pour effet de réduire l'arriéré judiciaire;

— quant à la volonté du gouvernement d'atteindre, par le biais d'engagements supplémentaires, des cadres remplis à concurrence de 90 %, M. Vanlouwe s'interroge sur les raisons pour lesquelles la même proactivité n'est pas de mise pour finaliser le projet de la mesure de la charge de travail;

— cette mesure de la charge de travail est en effet essentielle et indissociable du présent dossier. Aussi, il importe de lancer dès à présent les appels d'offres afin d'espérer des résultats en 2014. Il ne peut être question d'engagements supplémentaires alors qu'il n'y a pas encore d'outils pour mesurer la charge de travail. Quand l'appel d'offres sera-t-il lancé ? Quels budgets ont été prévus ?

— le procureur de Hal-Vilvorde qui sera chargé de déterminer la politique criminelle à mener dans son arrondissement n'aura toutefois pas autorité hiérarchique sur les cinq substituts francophones détachés. Quels seront alors ses moyens d'action et de sanction lorsqu'un des substituts ne partagera pas la vision dudit procureur ou estimera devoir mettre l'accent sur d'autres priorités ? Le risque est réel de créer des « éléments dissidents » dans ce parquet.

M. Vanlouwe estime par ailleurs que le bilinguisme de l'ensemble des magistrats à Bruxelles est un must absolu. Cela devrait être une évidence, mais on conclut à présent un accord en vertu duquel ce ne sont plus deux tiers, mais seulement un tiers des magistrats qui doivent être bilingues. La législation actuelle prévoit qu'au moins un tiers des magistrats doivent être titulaires d'un diplôme en langue néerlandaise, un tiers des magistrats doivent être titulaires d'un diplôme en langue française et les deux tiers des magistrats doivent être bilingues. Dans les faits, il s'avère que les néerlandophones remplissent cette exigence, ce que l'on ne peut pas dire des francophones. C'est pour cette raison que l'exigence de deux tiers de magistrats bilingues est ramenée à un tiers. Dans les faits, ce seront tous des néerlandophones: le bilinguisme vient en effet principalement d'un seul côté. L'on assiste donc à un assouplissement des lois linguistiques, sans qu'aucune mesure soit prise pour promouvoir le bilinguisme chez les magistrats francophones.

En ce qui concerne la mesure de la charge de travail, l'accord prévoit que des aspects démographiques seront également pris en compte, avec en point de mire l'explosion démographique que l'on prévoit à Bruxelles, étant entendu que d'autres villes seront également touchées par ce phénomène. L'intervenant reconnaît qu'une ville qui accueille un grand nombre de nouveaux arrivants et dont la population ne cesse d'augmenter est confrontée à des défis spécifiques. Reste à savoir si ce point est pertinent pour ce qui est des équilibres linguistiques. Les magistrats actifs sur le terrain prétendent que non. Chaque cause dirigée contre l'autorité fédérale, l'autorité bruxelloise ou une entreprise dont le siège est établi à Bruxelles relève de la compétence des tribunaux bruxellois. Il en va de même pour tous les litiges ayant trait au droit du travail quand la procédure est engagée par des travailleurs dont l'employeur est établi à Bruxelles et pour toutes les infractions de roulage commises sur le territoire de Bruxelles et, partant, pour les nombreux navetteurs qui n'habitent pas à Bruxelles. La situation démographique de Bruxelles n'a rien à voir avec cela et pourtant, il en est question dans l'accord sur la mesure de la charge de travail, ce qui veut dire qu'elle influencera donc les équilibres linguistiques entre les magistrats néerlandophones et francophones. La mesure de la charge de travail ne s'effectuera donc pas sur la base de paramètres objectifs, mais les négociateurs flamands n'osent pas l'avouer.

Enfin, M. Vanlouwe se réjouit que M. Anciaux reconnaisse que les tribunaux de Bruxelles-Hal-Vilvorde ne sont pas du tout scindés mais bien dédoublés et que l'accord conclu n'est pas parfait. M. Anciaux considère cependant que les problèmes seront traités par le parquet qui sera quant à lui bel et bien scindé. L'action publique qui est engagée par le parquet doit toutefois être suivie d'une condamnation par le tribunal, mais comme le nombre de magistrats du côté néerlandophone n'est pas suffisant, cela sera très difficile et la politique en matière de poursuite restera un vain mot. L'arriéré judiciaire au civil comme au pénal ne fera donc qu'augmenter.

L'intervenant se réfère aussi à la déclaration de M. Anciaux selon laquelle la situation actuelle reste ce qu'elle est, même si elle n'est pas idéale, et qu'il n'y aura qu'un petit nombre d'adaptations. En fait, pareille attitude ne fait qu'aggraver les choses car on « bétonne » une mauvaise situation.

M. Anciaux remercie M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, pour les réponses fournies. Il souligne en particulier la réponse du secrétaire d'État à propos de la mesure de la charge de travail. Le secrétaire d'État a en effet rappelé que le Conseil supérieur de la Justice n'a pas du tout dit, dans son avis émis d'office sur la scission de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, qui a été approuvé par l'assemblée générale le 30 mai 2012, que la mesure de la charge de travail ne pourrait pas être mise en œuvre avant 2014, voire avant 2017, et ce contrairement à ce que d'aucuns ne cessent de prétendre.

Le secrétaire d'État a très justement relevé que le Conseil supérieur de la Justice se borne à déclarer que « des informations recueillies de la Commission de Modernisation de l'Ordre judiciaire, il appert que celle-ci n'envisage la finalisation complète de la mesure de la charge de travail qu'en 2017 ». Mais le Conseil supérieur de la Justice va encore plus loin en énumérant de manière détaillée les diverses possibilités dont on dispose pour établir des critères en vue de réaliser cette mesure de la charge de travail. Il fait donc des propositions permettant de respecter la date butoir fixée et donc de réaliser la mesure de la charge de travail au plus tard pour la fin du premier semestre de 2014. Ce dernier élément n'a pas vraiment été mis en relief dans tout le débat et M. Anciaux considère qu'une mesure de la charge de travail est de l'ordre du possible d'ici 2014.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, se réfère aux réponses données précédemment, étant donné qu'il n'a entendu aucun argument nouveau.

V. DISCUSSION ET VOTE DES ARTICLES

A. Projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles (doc. Sénat, nº 5-1674/1)

M. Laeremans demande à M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, les réponses du SPF Justice et le compte rendu écrit des réponses du secrétaire d'État aux 63 questions qu'il a posées le 26 juin au sein de cette commission.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, explique que les réponses du SPF Justice ont été transmises (les données chiffrées concernées seront annexées au rapport) et qu'il tentera d'apporter des réponses les plus complètes possibles en concertation avec les deux rapporteurs, Mme Targnion et M. Anciaux.

M. Vanlouwe souhaite également obtenir les chiffres exacts du juge d'instruction. Les données mentionnées par le secrétaire d'État diffèrent de celles du juge d'instruction. Ces données ont été renvoyées au cabinet du secrétaire d'État et il a été promis que les données exactes seraient communiquées par courriel.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, dément avoir dit cela. Selon lui, la manière d'agir de M. Vanlouwe n'est pas correcte. Les données du SPF Justice ont été communiquées aux membres de la commission via le secrétariat de cette dernière.

Amendement nº 1

MM. Vanlouwe et Boogaerts déposent l'amendement global n 1 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à remplacer les articles 1er à 72.

M. Vanlouwe explique que cet amendement global se base sur la proposition de loi du 7 août 2007 de M. Hugo Vandenberghe et consorts modifiant diverses dispositions en vue de créer des tribunaux de première instance francophones et néerlandophones et de scinder le ministère public près le tribunal de première instance dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde (doc. Sénat, nº 4-133/1). Cette proposition de loi avait déjà été déposée en 2003 par M. Vandenberghe (doc. Sénat, nº 3-159/1), mais a fait l'objet de légères modifications en 2007.

À la Chambre des représentants, M. Verherstraeten et consorts avaient d'ailleurs déposé, le 28 novembre 2003, une proposition de loi identique, modifiant diverses dispositions en vue de créer des tribunaux de première instance francophones et néerlandophones et de scinder le ministère public près le tribunal de première instance dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde (doc. Chambre, nº 51-0506/1).

M. Vanlouwe souligne que la proposition de loi nº 4-133/1 avait, à l'époque, été signée à la fois par des partis de la majorité et des partis de l'opposition, ce qui montre, selon lui, qu'il s'agissait d'une proposition de loi très sérieuse. On y plaidait pour une scission horizontale asymétrique (doc. Sénat, nº 4-133/1, p. 5). L'amendement nº 1 se base également sur une telle scission et non sur un simple dédoublement.

L'arrondissement judiciaire de Bruxelles est le plus grand du pays et compte déjà actuellement 1,6 million d'habitants. À titre de comparaison, l'arrondissement judiciaire d'Anvers compte 1,1 million d'habitants et les autres grands arrondissements tels que ceux de Gand, Louvain et Charleroi comptent de 600 000 à 700 000 justiciables.

Actuellement, tant le parquet que le tribunal de première instance de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles disposent d'un cadre d'environ 100 magistrats et de plus de 200 collaborateurs. Le gros problème, c'est que cet arrondissement s'étend sur deux régions linguistiques, à savoir la région de langue néerlandaise et la région bilingue de Bruxelles-Capitale. L'arrondissement judiciaire se subdivise donc en deux Communautés et en deux Régions.

On a constaté que la proposition de loi de M. Hugo Vandenberghe (doc. Sénat, nº 4-133, ci-après « la proposition Vandenberghe et consorts ») prévoyait également un régime très complexe concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. Les exigences en matière de connaissances linguistiques des magistrats sont aussi déjà très complexes.

Non seulement l'arrondissement judiciaire de Bruxelles compte un très grand nombre de justiciables, mais il est en outre confronté à un problème structurel, car le cadre actuel ne peut pas toujours garantir une administration de la justice qui soit optimale et efficace.

Les problèmes concrets de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde sont connus. Ils se situent principalement au niveau du tribunal de première instance et du tribunal du travail, en particulier au sein du parquet. La situation est moins grave dans les justices de paix et les tribunaux de commerce, et les cadres de la cour d'appel sont, quant à eux, complets. Dans le système actuel, les exigences légales relatives aux connaissances linguistiques des magistrats sont définies à l'article 43 de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. Cet article sera fondamentalement modifié par le projet de loi à l'examen portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles.

Dans la proposition de loi de M. Vandenberghe et consorts (doc. Sénat, nº 4-133), il était précisé que la réglementation prévue dans cet article 43 en ce qui concerne le bilinguisme du corps de magistrats à Bruxelles n'est pas optimale.

La législation existante pose un certain nombre de problèmes majeurs. Ainsi, il est difficile de compléter les cadres et surtout de garantir la présence d'un tiers de magistrats francophones. Ils représentent de facto deux tiers de l'ensemble du corps de magistrats et il y a donc un problème pour répondre à l'exigence relative à la présence de deux tiers de magistrats bilingues. Ce problème se pose depuis plus de vingt ans déjà. Il y a donc longtemps que l'on aurait pu prendre des mesures structurelles afin d'améliorer le bilinguisme de ces magistrats. Mais on préfère assouplir plus encore la législation linguistique et compromettre ainsi une administration efficace de la justice au détriment des néerlandophones, tant à Bruxelles qu'à Hal-Vilvorde.

La réglementation existante a eu pour conséquence d'aggraver considérablement l'arriéré judiciaire, mais il y a eu une amorce d'amélioration. La modification proposée en l'espèce créera une asymétrie au niveau de la résorption de cet arriéré.

L'amendement global nº 1 a pour but d'éliminer l'arriéré judiciaire tant du côté néerlandophone que du côté francophone.

L'intervenant conclut, sur la base des données chiffrées qui lui ont été communiquées, que l'arriéré judiciaire se résorbera du côté francophone mais qu'il ne cessera d'augmenter du côté néerlandophone en raison du déséquilibre entre les magistrats francophones et les magistrats néerlandophones.

Par ailleurs, M. Vanlouwe attire l'attention sur un autre problème fondamental, qui a d'ailleurs aussi été épinglé dans la proposition de loi Vandenberghe et consorts, à savoir « la nomination quasi illimitée de juges de complément (francophones), consécutivement à la modification de la loi du 10 avril 1998 par le gouvernement précédent, qui est une manière subtile de contourner la législation relative aux connaissances linguistiques de la magistrature bruxelloise et entraîne de facto une francisation de la magistrature bruxelloise (...). » (doc. Sénat, nº 4-133/1, p. 2).

Le projet de loi à l'examen prévoit la nomination d'un nombre encore plus élevé de juges de complément. Cette « manière subtile de contourner la législation relative aux connaissances linguistiques » sera — de la même façon que d'autres éléments — ancrée légalement.

Le fonctionnement interne des tribunaux et des parquets est, lui aussi, inefficace, en raison notamment du nombre élevé de places vacantes et de la forte mobilité des juges. En outre, le bilinguisme des tribunaux et des parquets vis-à-vis de l'extérieur sera également limité.

Le problème fondamental lié au « préjudice ainsi causé aux justiciables néerlandophones », qui a déjà été mis en exergue par la proposition de loi Vandenberghe et consorts (doc Sénat, nº 4-133/1, p. 2), s'aggravera encore à cause des cadres linguistiques 20/80 fondés sur des données chiffrées erronées ou une interprétation fautive de données chiffrées correctes.

Les membres du personnel néerlandophones qui sont en surnombre seront peut-être mutés à Alost, Hasselt, Louvain ou Anvers, mais le nombre de dossiers néerlandophones n'ira pas en diminuant. Du côté néerlandophone, l'arriéré judiciaire continuera donc à augmenter, ce qui nuira à une administration efficace de la justice au détriment du justiciable néerlandophone. On ne parle toutefois pas d'un excédent d'effectifs du côté francophone.

La proposition de loi Vandenberghe et consorts parle aussi d'une « détérioration de l'image des services judiciaires » (doc. Sénat, nº 4-133/1, p. 2.). Les solutions qu'elle préconise divergent très nettement de celles contenues dans le projet de loi à l'examen.

Les coalitions violettes qui se sont succédé ne sont pas parvenues à améliorer l'image des tribunaux bruxellois. Les mesures louables qui avaient été prises en vue de désigner un contingent supplémentaire de conseillers n'a fait qu'aggraver la situation des tribunaux de première instance.

M. Vanlouwe poursuit en disant que, du point de vue de l'administration de la justice et de l'application du droit dans les communes flamandes extérieures à l'agglomération bruxelloise — l'arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde prétendument « scindé » — on peut également constater que, tant pour les justiciables que pour les fonctionnaires de police dans cette région, le « problème linguistique » de la magistrature bruxelloise a pour conséquence que l'on abandonne de facto le principe qui veut que la langue de la région soit la langue de la procédure. De plus, la politique du parquet en matière de poursuites (principalement orientée vers la capitale) donne l'impression que la région de Hal-Vilvorde est négligée sur le plan de la lutte contre la criminalité, ce qui entraîne en soi un accroissement du nombre d'affaires, surtout francophones, et de l'arriéré judiciaire, et alimente du même coup la demande de magistrats francophones.

M. De Decker a contesté cette thèse, mais M. Vanlouwe maintient que telle est bel et bien la situation.

M. Anciaux pense que si M. De Decker a réfuté ces propos, c'est parce qu'ils laissent entendre que du côté francophone, on aurait tendance à infliger des peines moins sévères. Il est évident, selon l'intervenant, qu'en matière de poursuites, il existe une politique différente entre Bruxelles, d'une part, et Hal-Vilvorde, d'autre part.

M. Vanlouwe remercie l'intervenant précédent d'avoir confirmé que la criminalité à Bruxelles requiert une approche différente de celle de Hal-Vilvorde. Ensuite, il se réfère à nouveau à la proposition de loi Vandenberghe et consorts (doc. Sénat, nº 4-133/1). Le fait que l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde, qui fait partie de la Région flamande et de la Communauté flamande ainsi que de la province du Brabant flamand, dépende de tribunaux bilingues et d'un parquet bilingue est également illogique et intenable sur le plan institutionnel.

Une solution structurelle qui permettrait de sortir de l'impasse dans laquelle se trouvent les tribunaux de première instance et les parquets bruxellois consiste à redéfinir en profondeur la structure organisationnelle. Cette redéfinition doit reposer sur les principes suivants:

— La sécurité juridique pour le justiciable: il doit avoir la garantie légale de pouvoir toujours être servi dans sa propre langue, en matière civile comme en matière pénale (y compris au niveau de l'instruction qui précède la procédure). Selon M. Vanlouwe, le justiciable a aussi le droit de faire instruire son affaire dans un délai raisonnable, également en matière civile. Ce délai raisonnable vaut autant pour les francophones que pour les néerlandophones.

— L'efficacité des services: une structure transparente doit promouvoir la communication interne et permettre une concertation croisée en vue de l'administration du droit dans la capitale. Ainsi, lorsqu'un inspecteur de police est confronté à des faits pénalement punissables en périphérie flamande, il arrive parfois que le substitut du procureur du Roi qu'il joint par téléphone ne comprenne pas le néerlandais. Dans un tel cas, l'efficacité des services n'est cependant pas garantie: en effet, un inspecteur de police doit pouvoir compter sur un magistrat parlant sa langue. L'amendement nº 1 entend mettre cette efficacité pleinement en œuvre, non seulement pour le parquet, mais aussi pour le tribunal.

— L'uniformité de la politique des poursuites: une scission de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles ne peut pas conduire à une approche disparate du maintien des règles de droit. Selon M. Vanlouwe, ce constat vaut d'ailleurs également pour d'autres arrondissements judiciaires.

— Des garanties pour l'administration de la justice en langue néerlandaise sur le territoire de Bruxelles-Capitale: une scission ne peut pas conduire à renforcer l'influence de la magistrature francophone.

— La stimulation du service dans l'administration de la justice en langue néerlandaise: une approche mettant l'accent sur la qualité et l'efficacité doit promouvoir une « saine concurrence ».

— Dans un sens plus général, en droit constitutionnel: la garantie du principe « de fédéralisation à deux et non à trois », dans lequel Bruxelles peut fonctionner effectivement en tant que capitale des deux Communautés. M. Vanlouwe déplore que les partis qui soutenaient hier ce principe l'aient aujourd'hui abandonné. En effet, ils instaurent un autre principe qui, de plus, se voit pour ainsi dire « bétonné » dans la Constitution.

M. Vanlouwe poursuit son exposé en se référant encore à la proposition de loi Vandenberghe et consorts. Le choix d'une scission de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde fait également suite à une législation récente qui a vu la création d'une cour d'assises à Louvain et à la scission de fait de l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde sur le plan fiscal. L'arrêté royal du 25 mars 1999 portant exécution des lois réformant la procédure fiscale habilite un tribunal par province à connaître des litiges fiscaux. Pour la province du Brabant flamand (dont fait partie Hal-Vilvorde), il s'agit du tribunal de première instance de Louvain. Les habitants de Hal et de Vilvorde doivent donc porter désormais leurs litiges fiscaux devant le tribunal de Louvain (si, comme c'est couramment le cas, le bureau de recette est situé en Brabant flamand); mais pour leurs litiges civils, ils continuent à relever du tribunal de première instance de Bruxelles. En outre, la loi modifiée sur le notariat prévoit la création d'une société de notaires au niveau provincial (en l'occurrence Hal-Vilvorde et Louvain réunis), bien que le ressort des notaires, à savoir l'arrondissement judiciaire, reste identique.

La proposition de loi Vandenberghe et consorts partait donc d'une scission fonctionnelle et asymétrique de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde. L'expérience acquise dans d'autres domaines — il suffit de penser à la répartition de compétences effectuée à Bruxelles en matière d'enseignement, où la Communauté française a cédé sa compétence en la matière à la COCOF, contrairement à la Communauté flamande — confirme qu'il s'agit d'une option tout à fait réalisable. Il est donc particulièrement regrettable que ce principe de départ n'ait pas été retenu dans le projet de loi à l'examen. En effet, les affaires néerlandophones seront instruites par un tribunal néerlandophone, territorialement compétent pour le territoire de Hal-Vilvorde et de Bruxelles-Capitale, tandis que les affaires francophones seront instruites par un tribunal francophone, territorialement compétent pour le territoire de Bruxelles-Capitale.

L'intervenant se réfère à la scission de l'ancien barreau unifié de Bruxelles, réalisée par la loi du 4 mai 1984 entre autres parce que les avocats francophones — majoritaires — jugeaient inacceptable qu'un néerlandophone devienne bâtonnier. La manière dont cette scission a été opérée à l'époque devrait pouvoir servir aujourd'hui de référence pour la scission du parquet et des tribunaux. Cette scission a entraîné la disparition progressive des cabinets d'avocats francophones dans les six communes à facilités flamandes de la périphérie bruxelloise puisqu'un scénario d'extinction avait été prévu: en effet, les nouveaux avocats devaient obligatoirement être inscrits à l'Ordre des avocats néerlandophones. La sphère d'influence de l'Ordre francophone fut limitée aux 19 communes bruxelloises. Cette scission du barreau a renforcé la position du barreau et du justiciable néerlandophones à Bruxelles, tout en préservant le lien entre les Flamands de Bruxelles et la Flandre. Il est dommage que cette logique ne trouve aujourd'hui aucun prolongement. En effet, à la suite de la réforme actuelle, des avocats francophones pourront de nouveau être actifs à Hal-Vilvorde et y plaider en français. Les réactions de l'Ordre néerlandophone et de l'Ordre francophone des avocats à la réforme proposée sont donc totalement différentes dans la mesure où elle offre aux francophones la possibilité de se constituer une certaine clientèle en périphérie flamande.

M. Vanlouwe estime que la scission du parquet et des tribunaux aurait dû être basée sur la réforme de 1984. Il énumère les avantages de cette approche en se référant une fois de plus à la proposition de M. Vandenberghe et consorts (doc. Sénat, nº 4-133):

— confirmation du principe selon lequel la langue de la juridiction est la langue de la région en tant qu'expression et garantie d'une bonne administration;

— transparence: elle donne au justiciable la sécurité juridique qu'une affaire sera traitée dans sa langue, tant au civil qu'au pénal;

— elle résout les problèmes de communication au sein des tribunaux de première instance bruxellois;

— le parquet néerlandophone répondra plus efficacement aux besoins du territoire de Hal-Vilvorde, tandis que le parquet bilingue pourra se spécialiser dans la problématique des grandes villes.

Bruxelles n'est pas seulement le centre économique et social des dix-neuf communes bruxelloises; elle a, en outre, d'importantes relations économiques avec la région de Hal-Vilvorde; la symbiose entre la ville et son hinterland doit être préservée;

— le marché juridique de Bruxelles-Hal-Vilvorde constitue une donnée économique importante (avocats, lobbyistes, entreprises, établissements publics, ...), ce qui justifie le maintien de Hal-Vilvorde dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles;

— elle incite à une « saine concurrence » entre les tribunaux néerlandophones et francophones;

— on ne doit pas toucher à la compétence territoriale des huissiers de justice et des notaires. Ils peuvent officier, comme actuellement, dans l'ensemble de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde;

— les structures des barreaux demeurent inchangées.

En ce qui concerne la compétence, M. Vanlouwe pense qu'au sein de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde et au niveau de la première instance, il faut créer des tribunaux néerlandophones pour connaître des affaires néerlandophones sur le territoire de Bruxelles-Hal-Vilvorde et des tribunaux francophones pour connaître des affaires francophones sur le territoire de Bruxelles-19. Le tribunal de première instance, le tribunal d'arrondissement, le tribunal du travail et le tribunal de commerce néerlandophones sont exclusivement compétents pour toutes les affaires dont le ressort est lié à la localisation sur le territoire de Hal-Vilvorde. Le tribunal de première instance, tribunal du travail ou tribunal de commerce néerlandophone est également compétent lorsque le défendeur est domicilié dans la région de langue néerlandaise, (au choix du demandeur) si le défendeur est domicilié dans une commune de l'agglomération bruxelloise ou à l'étranger ou s'il n'a aucun domicile connu. Le tribunal de première instance, tribunal du travail ou tribunal de commerce francophone est, lui, compétent lorsque le défendeur est domicilié dans la région de langue française, (au choix du demandeur) si le défendeur est domicilié dans une commune de l'agglomération bruxelloise ou à l'étranger ou s'il n'a aucun domicile connu.

Selon M. Vanlouwe, la règle du domicile de l'inculpé s'applique intégralement en matière pénale. Si l'inculpé est domicilié dans l'agglomération bruxelloise, la compétence du tribunal francophone ou néerlandophone est déterminée par la langue dans laquelle il a fait sa déposition lors de l'instruction ou de l'information, conformément à la réglementation actuelle. La compétence du tribunal d'arrondissement francophone ou néerlandophone est déterminée par la langue de la procédure de l'affaire en question.

Selon M. Vanlouwe, une scission fonctionnelle des tribunaux de première instance bruxellois ne nécessite pas de modifier au fond les règles existantes de la loi sur l'emploi des langues en matière judiciaire: si un défendeur demande le changement de la langue de la procédure, l'affaire peut être renvoyée au tribunal de l'autre langue (néerlandophone ou francophone). C'est pourtant ce que prévoit malheureusement le projet de loi à l'examen, et cette modification est apportée, une fois de plus, en faveur des francophones, ce qui perturbe totalement l'équilibre.

Pour ce qui est des conditions linguistiques pour la magistrature du siège, l'intervenant renvoie aussi à la proposition Vandenberghe et consorts (doc. Sénat, nº 4-133). Compte tenu de l'hétérogénéité linguistique de la population bruxelloise, il convient que les magistrats connaissent la seconde langue nationale. L'interrogatoire de témoins s'exprimant dans l'autre langue, par exemple, doit ainsi pouvoir se faire aisément; de même, les traductions de pièces du procès, à éviter car retardatrices, ne seront de ce fait plus nécessaires. Outre le bilinguisme légal de chaque chef de corps, tout magistrat siégeant seul doit avoir une connaissance fonctionnelle de l'autre langue, tandis que les chambres à trois juges devront compter au moins un magistrat bilingue ayant cette connaissance fonctionnelle de l'autre langue. Des incitants spécifiques (notamment une prime de bilinguisme substantielle) devront favoriser chez les magistrats cette connaissance fonctionnelle de l'autre langue nationale.

En ce qui concerne le fonctionnement du parquet, M. Vanlouwe estime qu'il faut opter pour une scission territoriale et un lien avec le tribunal néerlandophone ou francophone:

— un parquet (néerlandophone) distinct est compétent pour le territoire de Hal-Vilvorde et exerce la fonction du ministère public auprès du tribunal néerlandophone;

— un parquet (bilingue) distinct est compétent pour le territoire de l'agglomération bruxelloise et exerce la fonction du ministère public auprès du tribunal francophone.

En ce qui concerne la structure et la compétence, le parquet de Hal-Vilvorde doit être dirigé par un procureur; il est territorialement compétent pour la recherche et les poursuites sur le territoire de Hal-Vilvorde. Ce même parquet exerce l'action publique auprès du tribunal néerlandophone pour les affaires pénales renvoyées au tribunal néerlandophone: ce parquet instruit les infractions commises sur le territoire de Hal-Vilvorde et en saisit directement le tribunal néerlandophone; le parquet de Bruxelles-Capitale instruit les infractions commises sur le territoire de Bruxelles-Capitale et en saisit le tribunal néerlandophone sous l'autorité du parquet de Hal-Vilvorde. Le parquet assume la fonction du ministère public (avis en matière civile) pour toutes les affaires néerlandophones (y compris, donc, les affaires dans lesquelles les parties ont leur domicile à Bruxelles-Capitale).

Le parquet de Bruxelles-Capitale est dirigé par un procureur; il est territorialement compétent pour la recherche et les poursuites sur le territoire de Bruxelles-Capitale. Contrairement à ce que prévoit la proposition nº 5-1674/1, il n'est donc pas prévu en l'espèce que ce procureur doit être francophone, alors que la fonction inférieure d'adjoint est attribuée à un néerlandophone. L'intervenant est convaincu que cette disposition de la proposition de loi sera annulée par la Cour constitutionnelle pour violation du principe de non-discrimination.

Ce même parquet exerce l'action publique auprès du tribunal francophone pour les affaires pénales renvoyées au tribunal francophone. S'il est question d'une infraction commise sur le territoire de Bruxelles-Capitale, dont le tribunal néerlandophone doit être saisi, ce même parquet en assure l'instruction et l'action publique devant le tribunal néerlandophone est exercée sous l'autorité du parquet néerlandophone de Hal-Vilvorde.

Ce parquet exerce la fonction du ministère public (avis en matière civile) dans toutes les affaires francophones.

Ce modèle nécessite également une concertation permanente et structurelle entre les deux parquets, étant donné que pour les affaires pénales néerlandophones localisées sur le territoire de Bruxelles-Capitale, le parquet de Bruxelles-Capitale est chargé de la recherche et des poursuites, mais que l'action publique devant le tribunal néerlandophone est finalement exercée sous l'autorité du parquet de Hal-Vilvorde.

S'agissant des garanties linguistiques, l'intervenant déclare ce qui suit.:

Le point de départ est que le bilinguisme du parquet de Bruxelles-Capitale doit être confirmé. Le parquet de Hal-Vilvorde est unilingue néerlandophone.

Tant le procureur du parquet de Hal-Vilvorde que le procureur du parquet de Bruxelles-Capitale sont bilingues.

En outre, le procureur du parquet de Bruxelles-Capitale est assisté par un « adjoint » (premier substitut) bilingue de l'autre rôle linguistique, afin d'assurer le déroulement efficace des contacts avec le procureur de Hal-Vilvorde.

À titre de garantie supplémentaire pour les néerlandophones, chaque section du parquet bilingue de Bruxelles-Capitale devra toujours compter au moins un premier substitut ou un substitut du rôle linguistique néerlandais.

D'après M. Vanlouwe, son amendement va encore plus loin que la proposition de loi de M. Vandenberghe et consorts. Il renvoie en effet expressément à la mesure de la charge de travail sur laquelle sont fondés les cadres de personnel. Son groupe estime que la fixation des cadres et des cadres linguistiques dans cette réforme doit être réalisée sur la base d'une mesure objective de la charge de travail des dossiers dans chacune des langues respectives, au moyen d'un système d'enregistrement uniforme, au plus tard le 1er juin 2014. Il renvoie à l'article 36 du projet.

Une autre modification fondamentale par rapport à la proposition nº 5-1674/1 est la problématique de l'entrée en vigueur. L'intervenant propose un article 37 selon lequel la loi n'entrera en vigueur qu'après la mesure de la charge de travail.

M. Vanlouwe conclut en affirmant que son amendement se base sur l'hypothèse d'une scission horizontale asymétrique de l'arrondissement de Bruxelles-Hal-Vilvorde. La proposition de loi des partis qui ont signé l'accord politique sur la réforme de l'État se limite à un dédoublement, tel qu'il avait déjà été élaboré précédemment par M. Olivier Maingain, le président du FDF.

Il n'y aura pas non plus de magistrats de parquet francophones actifs à Hal-Vilvorde. La langue de la procédure est celle de la région. Il s'agit d'un principe de territorialité fondamental.

La fonction de procureur à Bruxelles ne sera pas confiée d'office à un francophone. L'amendement part du principe que le meilleur candidat doit exercer cette fonction, moyennant le respect des conditions légales.

L'amendement fait également en sorte qu'aucune « belle-mère » francophone n'entre en fonction auprès des tribunaux. Il fait référence, par exemple, au droit de sanction du chef de corps à l'encontre des juges de paix de Hal-Vilvorde.

L'amendement nº 1 est rejeté par 12 voix contre 5.

Amendements nos 6 et 7

En rapport avec ses observations formulées lors de la discussion générale, M. Laeremans dépose un amendement global nº 6 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), tendant à supprimer les articles 1er à 72.

Il renvoie à la justification écrite de cet amendement.

M. Laeremans dépose également l'amendement nº 7 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), subsidiaire à l'amendement nº 6, tendant à remplacer les articles 1er à 72.

Ici encore, il renvoie à la justification écrite de son amendement.

Il conclut en affirmant que son groupe soutiendra l'amendement de la N-VA, même s'il n'a été déposé que pour des raisons tactiques et malgré le fait que la solution proposée n'est selon lui qu'une demi-solution. Son amendement propose une meilleure solution.

Les amendements nos 6 et 7 sont rejetés par 12 voix contre 5.

Article 1er

L'article 1er est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 2

Amendement nº 8

Dans la lignée de ses observations formulées dans le cadre de la discussion générale, M. Laeremans dépose l'amendement nº 8 (doc. Sénat 5-1674/2), tendant à supprimer l'article 2.

Non seulement le rôle d'un procureur du Roi adjoint est superflu, par suite de la scission verticale souhaitée de Bruxelles-Hal-Vilvorde, mais selon lui, la constellation proposée dans le projet de loi à l'examen, basée sur un procureur francophone et un procureur adjoint néerlandophone, consacre en outre la suprématie francophone. Un système d'alternance du rôle linguistique du procureur est plus sain.

À ce propos, il souhaite que le secrétaire d'État précise certains points.

Quel sera le statut pécuniaire du procureur adjoint ? Comment celui-ci devra-t-il fonctionner au sein de ce parquet ? M. Laeremans a l'impression qu'il s'agit d'une fonction de seconde zone, avec des compétences insuffisantes.

Quelle sera la teneur exacte du statut de ce mandat d'adjoint ?

Quelle est la situation à l'heure actuelle ? Pendant combien de temps le procureur actuel de Bruxelles pourra-t-il encore rester en place et quand s'achèvera son mandat ? Le gouvernement envisage-t-il de le désigner en qualité de procureur adjoint de Hal-Vilvorde étant donné qu'il est néerlandophone ?

Aux questions concernant le procureur adjoint, le secrétaire d'État répond que la fonction de procureur adjoint est un mandat d'adjoint. Le droit commun est dès lors d'application.

Il percevra les mêmes rémunérations que celles allouées aux autres mandats d'adjoint qui sont énumérés à l'article 58bis, 3º, du Code judiciaire. Pour ce qui concerne les compétences du procureur adjoint, il se réfère à l'article 15 du projet de loi à l'examen.

M. Laeremans fait remarquer que ledit article 58bis, 3º, énumère les mandats d'adjoint, mais ne dit rien sur leur statut pécuniaire. D'ailleurs, il y a une grande différence entre la rémunération d'un mandat d'adjoint auprès d'une cour d'appel et celle d'un procureur adjoint.

Le projet de loi prévoit que le procureur adjoint est un premier substitut. Un premier substitut reçoit déjà une rémunération complémentaire. Le procureur adjoint percevra-t-il la même rémunération ou un cumul des deux ?

Le secrétaire d'État répond que le futur procureur adjoint néerlandophone sera un premier substitut du procureur du Roi exerçant la fonction de procureur du Roi adjoint de Bruxelles. Il bénéficiera du même statut pécuniaire qu'un premier substitut du procureur du Roi. D'ailleurs, le mandat de premier substitut est également un mandat d'adjoint, comme le prévoit l'article 58bis, 3º, du Code judiciaire.

M. Anciaux déclare que le traitement d'un procureur du Roi est fixé à 46 960,31 euros (à indexer) et que celui d'un premier substitut est fixé à 44 620,84 euros (à indexer).

M. Laeremans insiste: le procureur adjoint (néerlandophone) devrait être traité sur le même pied que le procureur du Roi (francophone) afin qu'ils puissent être tous deux membres du Conseil fédéral des procureurs. Il convient de créer une fonction à part entière, qui ne soit pas une fonction de seconde zone pour un premier substitut qui porterait seulement un autre titre.

L'amendement nº 8 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 2 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 3

Amendements nos 9, 10 et 11

Selon M. Laeremans, l'article 3 casse la logique. La fonction de procureur de Hal-Vilvorde et celle de procureur du Roi de Bruxelles devraient être totalement mises sur un pied d'égalité, mais ce n'est malheureusement pas le cas. Le procureur de Bruxelles, qui est toujours un francophone, exerce les fonctions du minitère public près tous les tribunaux francophones et toutes les justices de paix, en ce compris les justices de paix néerlandophones de Bruxelles. Le procureur de Hal-Vilvorde exerce ses fonctions après les tribunaux de police et les justices de paix de Hal-Vilvorde. Ils doivent rendre, conjointement, des avis aux tribunaux néerlandophones de Bruxelles et aux tribunaux de police. Il serait dès lors logique que le procureur flamand de Hal-Vilvorde puisse également rendre des avis à l'intention des tribunaux francophones de Bruxelles. Pourquoi l'un peut-il le faire et l'autre pas ? Pourquoi le procureur francophone a-t-il plus de droits ?

M. Laeremans dépose ensuite les amendements nos 9, 10 et 11 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), visant tous à modifier l'article 58 proposé.

L'intervenant renvoie à la justification écrite de ces amendements, qui visent principalement à réaliser une scission verticale de l'actuel arrondissement judiciaire de Bruxelles en un arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde à part entière et un arrondissement judiciaire de Bruxelles-Capitale.

Dans l'hypothèse où l'amendement nº 9 ne serait pas adopté, l'amendement nº 10 vise à faire en sorte que le procureur adjoint ait une compétence d'avis à part entière pour les tribunaux de police néerlandophones de Bruxelles. L'amendement nº 11, quant à lui, vise à faire en sorte que le procureur adjoint ait, conjointement avec le procureur de Hal-Vilvorde, une compétence d'avis pour les tribunaux néerlandophones de Bruxelles autres que les tribunaux de police, de manière à ce qu'il exerce une compétence propre et ne soit plus le subalterne du procureur du Roi.

Selon M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, une symétrie totale n'a pas été prévue parce que le parquet de Hal-Vilvorde est uniquement attaché aux tribunaux néerlandophones de Bruxelles et aux tribunaux de police et aux justices de paix de Hal-Vilvorde. Le parquet bilingue de Bruxelles, quant à lui, est attaché aux tribunaux tant francophones que néerlandophones de Bruxelles, en ce compris les tribunaux de police.

M. Laeremans en déduit que le procureur du Roi de Bruxelles est beaucoup plus important que celui de Hal-Vilvorde. La fonction de procureur adjoint a été prévue à titre de compensation. Les amendements nos 10 et 11 visent dès lors à élargir les compétences du procureur adjoint.

Selon M. Laeremans, le secrétaire d'État n'a même pas confirmé que le procureur adjoint est spécifiquement compétent pour les tribunaux de police néerlandophones. En fait, le procureur du Roi de Bruxelles peut même déléguer un autre substitut pour exercer la fonction d'avis.

Quand le mandat de l'actuel procureur du Roi de Bruxelles prend-il fin ? Le procureur du Roi deviendra-t-il ensuite procureur du Roi de Hal-Vilvorde ou adjoint du procureur de Bruxelles ?

Le secrétaire d'État conteste qu'une distinction soit faite entre le futur procureur de Hal-Vilvorde et le futur procureur de Bruxelles. Ils ont tous deux une compétence de pleine juridiction sur les tribunaux auxquels ils sont attachés. Pour le procureur néerlandophone, il s'agit des justices de paix et des tribunaux de police de l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde et des tribunaux néerlandophones de Bruxelles.

M. Laeremans constate que le secrétaire d'État n'a pas parlé du procureur adjoint dans sa réponse.

Le secrétaire d'État renvoie à ce sujet à l'article 15 du projet de loi à l'examen.

Les amendements nos 9, 10 et 11 sont rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 3 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 4

Amendement nº 12

M. Laeremans dépose l'amendement nº 12 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à remplacer, dans l'article 60bis proposé, les mots « Dans l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale » par les mots « Dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Capitale ».

L'intervenant renvoie à la justification de cet amendement. La dénomination de « Bruxelles-Capitale » a été choisie délibérément pour éviter toute confusion avec l'arrondissement actuel de Bruxelles, qui se compose de 54 communes.

M. Vanlouwe observe que l'article 4 entend insérer un article 60bis dans le Code judiciaire, en vue d'indiquer qu'il y a un tribunal de police francophone et un tribunal de police néerlandophone dans l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale. Pourquoi ce dédoublement n'est-il pas étendu aux justices de paix de Bruxelles ?

Le secrétaire d'État répond que cette décision s'inscrit dans l'équilibre que les 8 partis ont trouvé. Pour les justices de paix, les partis n'ont pas estimé qu'un dédoublement était nécessaire.

M. Vanlouwe s'interroge ensuite sur la nécessité de dédoubler les tribunaux de police.

Le secrétaire d'État se réfère ici à la discussion générale et à son appréciation des choix équilibrés effectués par les huit partis.

L'amendement nº 12 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 4 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 5

Amendements nos 13 et 14

M. Laeremans dépose les amendements nos 13 et 14 (doc. Sénat, nº 5-1674/2). L'amendement nº 13 vise à supprimer l'article 5. L'amendement nº 14 est subsidiaire à l'amendement nº 13 et est déposé pour remplacer l'article.

M. Laeremans renvoie à la justification de ces amendements.

La compétence du tribunal d'arrondissement est exercée, en ce qui concerne les justices de paix dont le siège est établi à Hal-Vilvorde, par le tribunal d'arrondissement néerlandophone, et en ce qui concerne les justices de paix dont le siège est établi à Bruxelles-Capitale, par le tribunal d'arrondissement francophone et le tribunal d'arrondissement néerlandophone siégeant en assemblée réunie.

Les amendements nos 13 et 14 sont rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 5 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 6

Amendements nos 15 et 16

M. Laeremans dépose les amendements nos 15 et 16 (doc. Sénat, nº 5-1674/2).

L'amendement nº 15 tend à opérer une scission verticale de l'actuel arrondissement judiciaire de Bruxelles. L'amendement nº 16 vise à faire en sorte que le président du tribunal de première instance néerlandophone puisse exécuter ses missions de manière autonome et sans l'intervention du président du tribunal de première instance francophone.

M. Laeremans relève que l'article 6 du projet prévoit que pour les justices de paix de l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde, les missions du président du tribunal de première instance sont effectuées par le président du tribunal de première instance néerlandophone; néanmoins, le président du tribunal de première instance francophone est associé aux décisions prises en exécution de ces missions chaque fois qu'il en fait la demande par simple requête au président du tribunal néerlandophone en vue d'un consensus. Ici aussi, l'on attribue, une fois encore, plus de compétences au président du tribunal francophone. Par ailleurs, à qui le mot « hem » fait-il référence dans le texte néerlandais ? Que signifie le membre de phrase « en vue d'un consensus » ? Pourquoi faut-il chercher un consensus dans des matières qui, en réalité, ne regardent en rien le président du tribunal francophone ?

M. Vanlouwe se réfère à la même disposition, qui est insérée dans la section 2 du Code judiciaire intitulée « Du service », laquelle règle donc l'organisation générale des tribunaux. En vertu de cette disposition, non seulement le président du tribunal francophone est impliqué dans l'organisation des justices de paix, mais il faut même parvenir à un consensus.

Pourquoi prévoir ici une tutelle en matière d'organisation ?

Pourquoi cette tutelle n'est-elle pas au moins limitée aux justices de paix compétentes pour les communes à facilités (c'est-à-dire les justices de paix de Rhode-Saint-Genèse, de Kraainem et de Meise) ? En vertu de la disposition en question, le président du tribunal francophone peut aussi être associé à la tutelle sur la justice de paix de Lennik, par exemple. Pourquoi ? En réalité, il s'agit d'une exception totalement superflue puisqu'il n'y a pas de facilités linguistiques à Lennik.

De surcroît, l'implication est prévue en vue d'un consensus. Cela signifie que le président francophone pourra effectivement influer sur l'organisation de la justice de paix de Lennik et disposera d'un droit de veto. Pourquoi ?

Où est l'équilibre dans ces dispositions ?

Le secrétaire d'État répond que l'actuel président du tribunal de première instance de Bruxelles, M. Hennart, un francophone, exerce aujourd'hui le contrôle et donne un avis sur les jours d'audience et les besoins du service pour toutes les justices de paix et les tribunaux de police néerlandophones à Hal-Vilvorde. Le projet de loi à l'examen change la situation: désormais, le président du tribunal de première instance néerlandophone de Bruxelles exercera ces attributions en disposant de la plénitude de compétence en la matière.

Par ailleurs, au cours de la discussion générale, le secrétaire d'État a explicitement réfuté qu'il s'agissait d'une tutelle. Il s'agit en fait d'un droit d'évocation facultatif qui s'inscrit dans la logique du dédoublement.

M. Laeremans constate qu'actuellement, il n'y a pas de facilités pour les justices de paix de Lennik, Dilbeek ou Hal. Le juge de paix devra-t-il dorénavant poursuivre l'examen de l'affaire en français ? Ou bien l'affaire sera-t-elle renvoyée ?

M. Laeremans cite l'exemple d'un litige entre deux francophones devant la justice de paix de Lennik. Qui choisit le tribunal auquel ce litige est renvoyé si les intéressés demandent que la procédure se déroule en français: la justice de paix de Lennik, le tribunal d'arrondissement ou encore une autre instance ?

Le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles se réfère au Code judiciaire.

M. Vanlouwe demande pourquoi deux magistrats doivent à chaque fois intervenir pour exécuter les devoirs du président du tribunal de première instance vis-à-vis des justices de paix de l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde.

M. Anciaux réplique qu'en principe, seul le président du tribunal de première instance néerlandophone intervient. Ce n'est que dans des circonstances extrêmes que le président du tribunal de première instance francophone interviendra en vue de trouver un consensus. À défaut de consensus, le premier président de la cour d'appel de Bruxelles tranche.

M. Laeremans observe que ce premier président pourra être francophone. Dans ce cas, un magistrat francophone prendra une décision concernant la justice de paix de Lennik.

M. Anciaux répond que dans le régime actuel, la décision incombe d'abord à un président francophone, tout en sachant qu'il s'agit d'un très bon bilingue. De plus, le premier président de la cour d'appel peut également être francophone. À l'avenir, la décision sera en principe d'abord prise par un magistrat néerlandophone. La situation des néerlandophones ne sera donc pas moins favorable, bien au contraire.

M. Laeremans pourrait à la limite tolérer une sorte de « droit d'ingérence », mais pas le droit de veto accordé par le projet de loi. Pourquoi ne dispose-t-on pas qu'en cas de litige persistant entre les deux présidents, le président néerlandophone du tribunal de première instance tranchera la question ?

D'après M. Anciaux, les présidents des tribunaux de première instance ont tellement de travail qu'ils ne perdront pas leur temps à des futilités. De plus, il y a une forte collégialité entre ces présidents et une volonté de trouver un modus vivendi. Ce n'est que dans des cas très exceptionnels que le président du tribunal francophone demandera à être associé à la décision.

M. Laeremans réplique que le régime est unilatéral. Le président francophone pourra intervenir dans des justices de paix qui ont leur siège dans la région de langue néerlandaise, et même dans des communes où il n'y a pas de facilités. En revanche, le président néerlandophone du tribunal de première instance ne pourra pas demander à intervenir dans des décisions concernant le tribunal de police francophone de Bruxelles, même si on peut y demander le renvoi à un tribunal de police néerlandophone. Pourquoi ce droit d'intervention est-il accordé unilatéralement ?

M. Anciaux répond que le président francophone du tribunal de première instance ne peut pas non plus intervenir dans des décisions du tribunal de police néerlandophone.

M. Laeremans aimerait savoir pourquoi il n'y a pas de parallélisme entre le régime des justices de paix et celui des tribunaux de police.

M. Deprez fait remarquer que l'intervention du président francophone consiste essentiellement à émettre un avis, en tenant compte du fait qu'une minorité reconnue habite dans cette commune.

M. Laeremans réplique qu'il n'y a pas de minorité reconnue à Hal-Vilvorde. Il existe tout au plus, dans les six communes à facilités, des facilités individuelles pour les citoyens. Ainsi, il n'y a pas de facilités à Lennik. En revanche, il n'y a pas de présence flamande reconnue à Bruxelles.

M. Vanlouwe confirme qu'il n'y a pas de minorité francophone à Hal-Vilvorde. Pourquoi donne-t-on dès lors au président francophone la possibilité d'intervenir dans des justices de paix établies dans de telles communes ? S'agit-il du prélude à l'extension des facilités ?

M. Moureaux déclare qu'il faut manier avec une grande prudence la notion de « minorité protégée ». Il existe un régime légal pour les six communes à facilités. En matière judiciaire, il ne s'agit cependant pas de la protection de minorités, mais d'un ensemble complexe de droits qui peuvent conduire, dans l'ensemble du pays, à un changement de langue de la procédure. Dans la réforme examinée aujourd'hui, on a tenté, lors de la scission de l'arrondissement judiciaire, de maintenir pour les habitants de Hal-Vilvorde un peu plus de droits que ce que prévoit l'ensemble complexe prévalant dans le reste du pays. La réforme n'apporte que des modifications mineures. Il n'est donc absolument pas question de créer une minorité reconnue.

Le secrétaire d'État souscrit pleinement à la position de M. Moureaux.

M. Deprez s'y rallie également et reconnaît que la notion de « minorité protégée » ne convient pas dans ce contexte.

M. Vanlouwe souligne que les justices de paix de l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde sont soumises à un régime d'exception. Il n'existe nulle part ailleurs dans le pays la possibilité, pour le président d'un tribunal de première instance d'une autre langue, de s'ingérer dans des litiges concrets portés devant une justice de paix.

M. Laeremans se demande pourquoi cette ingérence est organisée pour les justices de paix, mais pas pour les tribunaux de police. Il n'est pas demandeur de l'accorder également pour les tribunaux de police, mais l'incohérence est significative et requiert des éclaircissements.

M. Van Rompuy répond que la différence réside dans le fait que le tribunal de police est dédoublé, ce qui n'est pas le cas des justices de paix.

Selon M. Laeremans, il n'y a qu'une seule explication pour justifier cette différence, à savoir que l'on souhaite soumettre également à la double tutelle les justices de paix non établies dans des communes à facilités.

M. Vanlouwe pointe la différence entre les articles 6 et 19 du projet de loi. Il s'agit essentiellement de matières similaires, qui sont cependant réglées de manière très différente. L'article 19 modifie l'article 186bis du Code judiciaire. D'après le texte de la réglementation en projet, la fonction de chef de corps en ce qui concerne les juges de paix et les juges de paix de complément qui siègent dans les justices de paix du canton judiciaire établi à Kraainem et Rhode-Saint-Genèse, et du canton judiciaire établi à Meise, sera exercée conjointement par les présidents des tribunaux de première instance néerlandophone et francophone. Cette réglementation, qui est encore plus stricte que la procédure d'association, n'est pas prescrite à l'article 6. L'intervenant y voit un manque significatif de logique.

Le secrétaire d'État admet qu'il y a des différences entre les articles 6, 19, 33 et 35 du projet. Les articles 6 et 33 s'articulent de manière symétrique. Ils se rapportent à l'avis qui peut être émis sur l'horaire des audiences et sur les besoins du service (article 72bis du Code judiciaire), et au droit de surveillance (article 398 du Code judiciaire). Cette réglementation s'écarte effectivement de celle énoncée aux articles 19 (article 186bis du Code judiciaire) et 35 (article 410 du Code judiciaire). Dans ces derniers articles, il y a une plus grande implication du président du tribunal de première instance francophone de Bruxelles pour ce qui concerne les cantons judiciaires de Kraainem/Rhode-Saint-Genèse et Meise. Cette différence de traitement s'explique par le fait que les articles 6 et 33 se rapportent davantage à l'organisation des justices de paix, alors que les articles 19 et 35 concernent avant tout la relation personnelle entre le chef de corps et le juge de paix ou juge du tribunal de police concerné.

M. Vanlouwe trouve que les éléments avancés par le préopinant ne répondent pas à la question de savoir quelles sont les raisons objectives qui justifient la mise en place de cette gradation dans la supervision des justices de paix.

L'alinéa 2 proposé prévoit que, pour les justices de paix établies dans l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde, le président francophone peut demander à être impliqué dans les décisions relatives aux horaires des audiences ou aux besoins du service, en vue d'un consensus. Le Conseil d'État a relevé, dans son avis, l'imprécision des textes qui utilisent des notions différentes (« implication », « concertation », « consensus »). C'est source d'incertitude quant à l'intention des auteurs.

L'intervenant note que le fait de prévoir qu'il faut un consensus aboutit à donner un droit de veto au président du tribunal de première instance francophone. L'intervenant se demande pourquoi on ne fait pas au moins la distinction entre les communes à facilités ce qui ne veut pas dire pour autant qu'il soutiendrait le régime proposé — où la procédure proposée peut répondre à une certaine logique découlant des antécédents historiques — et les communes sans facilités. Il n'y a en effet aucun argument objectif justifiant que l'on confie au président francophone une sorte de rôle de « belle-mère » pour les justices de paix situées dans toutes les communes de Hal-Vilvorde.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux réformes institutionnelles, précise que le Conseil d'État a, dans son avis (voir point 16), formulé une remarque de terminologie mais pas de fond.

M. Laeremans pense que la possibilité réservée au président du tribunal francophone de demander à être impliqué dans les décisions doit être limitée aux seuls cantons situés dans les communes à facilités. Dans la mesure où il est possible que l'appel d'un jugement rendu par un juge de paix d'une commune à facilités soit traité par un tribunal francophone, une implication du président du tribunal de première instance francophone peut se comprendre. Pourquoi faut-il cependant étendre ce régime à tout l'arrondissement de Hal-Vilvorde ?

M. Anciaux répond que la différence de traitement entre les justices de paix et les tribunaux de police est liée au fait que les règles d'attribution des affaires ne sont pas les mêmes pour ces deux juridictions parce que le parquet est scindé, d'une part, en un parquet unilingue de Hal-Vilvorde et, d'autre part, en un parquet bilingue de Bruxelles, et aussi parce que le tribunal de première instance de Bruxelles-Hal-Vilvorde est dédoublé en un tribunal néerlandophone de Bruxelles-Hal-Vilvorde et un tribunal francophone de Bruxelles-Hal-Vilvorde, sans dédoublement aucun pour les justices de paix.

Les amendements nos 15 et 16 sont rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 6 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 7

Amendement nº 17

M. Laeremans dépose l'amendement nº 17 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à remplacer l'article. L'auteur estime que le projet de loi se limite à scinder l'arrondissement judiciaire en deux arrondissements administratifs. L'amendement vise à assurer une véritable scission verticale de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

M. Vanlouwe confirme que le projet de loi ne réalise pas de véritable scission de l'arrondissement judiciaire. Comme il est par ailleurs prévu de bétonner une série d'éléments dans la Constitution, la réforme empêchera à l'avenir de réaliser une véritable scission.

M. Laeremans demande si le régime de contrôle des juridictions et l'immixtion du président francophone dans la gestion des justices de paix va être bétonné dans la Constitution. L'intervenant ne le pense pas sur la base des développements qui précèdent la proposition de loi (doc. Chambre, nº 5-2140/1, p. 6).

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux réformes institutionnelles, renvoie à la discussion générale et à son exposé dans le cadre de la proposition d'insertion d'un article 157bis dans la Constitution.

L'amendement nº 17 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 7 est adopté par 12 voix contre 5.

Articles 8 et 9

Les articles 8 et 9 sont adoptés sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 10

Cet article apporte diverses modifications à l'article 88 du Code judiciaire. M. Vanlouwe note que l'alinéa proposé au 2 prévoit que le président de chaque tribunal établi dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles adresse tous les trois ans un rapport au ministre de la Justice sur les besoins du service en fonction du nombre d'affaires traitées. Cette obligation n'est pas neuve.

L'intervenant demande si ces rapports ont été communiqués au ministre de la Justice dans le passé. Les commissaires peuvent-ils disposer de ces rapports officiels ? L'orateur souligne l'importance de disposer de données chiffrées fiables et précises.

Par ailleurs, si cette obligation n'a pas été respectée dans le passé, pourquoi faut-il la maintenir et comment garantira-t-on qu'elle sera respectée à l'avenir ?

M. Laeremans demande si les présidents des tribunaux de police et les juges de paix sont également tenus de fournir des rapports tous les trois ans.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux réformes institutionnelles, précise que l'article 88 du Code judiciaire figure dans le chapitre II qui vise le tribunal d'arrondissement, le tribunal de première instance, le tribunal du travail et le tribunal de commerce. Ce chapitre ne vise pas les tribunaux de police ni les justices de paix.

Les huit partis qui ont négocié l'accord institutionnel ont estimé opportun de maintenir l'obligation d'établir ces rapports. Les discussions récentes sur les chiffres disponibles montrent l'intérêt d'établir de tels rapports.

L'intervenant relève par ailleurs que l'avis du Conseil Supérieur de la Justice montre qu'il faut également assurer une certaine uniformité dans la manière d'établir ces rapports. Il plaide dès lors pour le maintien du texte.

M. Vanlouwe insiste pour que les membres puissent disposer des rapports pour la suite de la discussion.

L'article 10 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 11

Cet article est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 12

Amendement nº 18

M. Laeremans dépose l'amendement nº 18 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à remplacer les mots « l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale » par les mots « l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Capitale ». Cet amendement s'inscrit dans la logique de la scission verticale de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde qu'il défend.

M. Laeremans demande ensuite quelle est la portée, dans l'alinéa proposé, des mots « selon le cas ».

M. Verhesrtaeten, secrétaire d'État aux réformes institutionnelles, renvoie aux développements de la proposition de loi.

M. Anciaux répond que l'expression « selon le cas » renvoie à l'alinéa 1er de l'article 121, lequel précise que la désignation des assesseurs par le premier président de la cour d'appel se fait en concertation avec le président du tribunal de première instance concerné. Pour l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale, cette concertation aura tantôt lieu avec le président francophone, tantôt avec le président néerlandophone.

L'amendement nº 18 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 12 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 13

Amendement nº 19

M. Laeremans dépose l'amendement nº 19 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à supprimer, dans le texte proposé, le renvoi au § 3.

L'intervenant renvoie à la justification écrite de son amendement.

L'amendement nº 19 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 13 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 14

Amendement nº 20

M. Laeremans dépose l'amendement nº 20 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à supprimer l'article. L'intervenant renvoie à la justification écrite de son amendement.

L'amendement nº 20 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 14 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 15

Amendement nº 21

M. Laeremans dépose l'amendement nº 21 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à modifier le § 2 proposé et à supprimer le § 3.

Cet amendement s'inscrit dans la logique de la scission verticale de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde prônée par M. Laeremans. L'intervenant ne peut accepter un régime qui concentre le pouvoir de décision dans les mains du procureur du Roi francophone de Bruxelles alors que son adjoint, néerlandophone, a un simple rôle diplomatique. Il est renvoyé pour le surplus à la justification écrite.

Amendement nº 22

M. Laeremans dépose l'amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), subsidiaire à l'amendement nº 21. Si l'on décide de conserver la fonction de procureur du Roi adjoint de Bruxelles, il faut la revaloriser. C'est le but de l'amendement nº 22.

M. Vanlouwe rappelle que son groupe plaide pour la suppression des magistrats francophones détachés du parquet de Bruxelles vers le parquet de Hal-Vilvorde. Si l'on supprime cette fonction, la structure hiérarchique complexe que le projet crée pour les magistrats détachés devient sans objet.

L'article 150, § 2, 2º, proposé, précise que ces magistrats détachés « restent sous l'autorité hiérarchique du procureur du Roi de Bruxelles mais relèvent de l'autorité du procureur du Roi de Hal-Vilvorde pour ce qui concerne l'application des directives et instructions en matière de politique criminelle ».

Qui est en réalité le supérieur hiérarchique de ces magistrats détachés ? L'intervenant cite l'exemple d'un magistrat détaché qui refuserait de suivre les instructions de politique criminelle du procureur du Roi de Hal-Vilvorde. Que se passera-t-il si le procureur du Roi de Bruxelles estime que le magistrat détaché s'inscrit dans la politique criminelle qu'il a définie pour Bruxelles et qui n'est pas nécessairement la même que celle de son collègue de Hal-Vilvorde ? Qui est compétent pour sanctionner le magistrat détaché ? Comment peut-on l'obliger à suivre les instructions de politique criminelle de Hal-Vilvorde ?

L'intervenant doute que le comité de coordination prévu à l'article 150ter, proposé, dispose d'un pouvoir de sanctionner. Qui peut dès lors intervenir sur le plan disciplinaire ?

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, indique que l'article 15, qui précise aussi les compétences du procureur adjoint, était une réponse aux observations formulées par le Conseil d'État. Au départ, la formulation était plus générale (« assiste le procureur du Roi ») mais elle a été affinée par la suite. Le secrétaire d'État renvoie à ce qui a été dit à ce sujet au cours de la discussion générale.

En ce qui concerne la notion de hiérarchie, M. Verherstraeten renvoie au texte de loi. Les détachés agissent sous l'autorité, c'est-à-dire sous la direction et le contrôle du procureur de Hal-Vilvorde en ce qui concerne leur fonctionnement quotidien dans le cadre de l'exécution de la politique criminelle définie par celui-ci. En revanche, du point de vue fonctionnel et juridique, ils continuent à faire partie du parquet de Bruxelles, ce qui veut dire que, hiérarchiquement parlant, ils restent sous l'autorité du procureur du Roi de Bruxelles. C'est donc lui qui sera chargé de la politique disciplinaire à l'égard de ces détachés ou qui formulera des avis si ceux-ci postulent à une fonction. Il y aura toutefois des contacts entre ces deux niveaux. Ainsi, il est logique que le procureur de Hal-Vilvorde communique à son collègue de Bruxelles des informations susceptibles de l'aider pour la formulation de son avis dans le cadre d'une procédure de nomination.

M. Laeremans estime que l'ambiguité subsiste. Les détachés relèvent de l'autorité du procureur de Hal-Vilvorde, mais ce dernier aura-t-il les moyens d'agir si les détachés n'acceptent pas son autorité ? L'intervenant pense que le régime proposé en l'espèce diffère sensiblement de celui qui s'applique aux chefs de corps. En effet, ceux-ci sont collectivement responsables devant les juges de paix dans les trois cantons à facilités. Or, en l'espèce, le procureur du Roi de Bruxelles sera seul compétent en matière de discipline. Il ne devra même pas y avoir de consensus ni de concertation. Le procureur de Hal-Vilvorde pourra-t-il par exemple adresser une demande en matière de discipline au procureur de Bruxelles, de la même manière que le président du tribunal francophone de première instance peut adresser à celui-ci une demande concernant la problématique des justices de paix ? Est-ce comparable ? M. Laeremans a l'impression que les deux procureurs du Roi pourront fonctionner en parallèle et qu'en matière de discipline, le procureur de Hal-Vilvorde n'aura même rien à dire par rapport au procureur de Bruxelles. Comment les choses seront-elles réglées et comment fera-t-on en sorte que les directives et les instructions en matière de politique criminelle soient respectées ?

Selon M. Anciaux, la situation est claire. Sur le plan hiérarchique, toute discipline, sous quelque forme que ce soit, est attribuée dans tous les cas à une autorité hiérarchiquement définie. Les cinq personnes visées en l'espèce relèveront, du point de vue disciplinaire, de l'autorité du procureur du Roi de Bruxelles. Toutefois, c'est au procureur du Roi de Hal-Vilvorde qu'il reviendra de définir et de donner des instructions en ce qui concerne la politique criminelle menée à Hal-Vilvorde. Si le procureur de Hal-Vilvorde constate qu'un substitut ne respecte pas les règles qu'il a édictées, il pourra mettre fin au détachement de celui-ci. En revanche, pour le suivi disciplinaire de ce dossier, ce sera le procureur du Roi de Bruxelles qui sera compétent. Il se prononcera sur la base d'un dossier global, et il va sans dire que le procureur de Hal-Vilvorde pourra à cet effet lui fournir des informations complémentaires.

M. Deprez demande si le procureur général pourra prendre des mesures si le procureur du Roi de Hal-Vilvorde constate qu'un substitut francophone détaché n'accomplit pas correctement son travail et qu'il demande au procureur du Roi de Bruxelles de prendre une sanction disciplinaire à l'égard de cette personne mais que le procureur de Bruxelles ne donne pas suite.

M. Delpérée partage totalement l'avis de M. Anciaux. De plus, ces problèmes ne sont absolument pas neufs et se posent lors de tout détachement. Un fonctionnaire belge qui est détaché à l'Organisation internationale du Travail à Genève reste sous l'autorité hiérarchique de son supérieur à Bruxelles. L'article à l'examen n'introduit rien de nouveau.

M. Laeremans constate que l'article 19, alinéa 4, prévoit que « par dérogation à l'alinéa 3, en ce qui concerne les juges de paix et les juges de paix de complément qui siègent dans les justices de paix du canton judiciaire dont le siège est établi à Kraainem et Rhode-Saint- Genèse et du canton judiciaire dont le siège est établi à Meise, la fonction de chefs de corps est exercée conjointement par le président du tribunal de première instance néerlandophone et le président du tribunal de première instance francophone. Les décisions sont délibérées en consensus. » La discipline pour les trois juges de paix est donc conjointe. Pourquoi ne pourrait-on pas instaurer un régime comparable pour les cinq détachés auprès du parquet de Hal-Vilvorde ? Quelle est la différence ?

Selon M. Vanlouwe, ce qui est intéressant dans cette discussion, c'est qu'un dossier devra être transmis par le procureur du Roi de Hal-Vilvorde. Cela sera nécessaire pour qu'une sanction disciplinaire éventuelle puisse être prononcées. Il s'agit d'un élément très pertinent, à défaut duquel le procureur général interviendrait manifestement selon la règle générale. Cependant, le texte n'en fait mention nulle part. Il ne contient rien d'autre que des exceptions aux règles générales. Ne serait-il pas utile de le préciser ?

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, constate qu'il y a manifestement une certaine confusion chez plusieurs membres de la commission. Les articles 33, 35, 19 et 6 concernent les justices de paix, et l'article 15 le parquet. Les situations ne sont pas comparables car l'organisation est différente. Il y aura bientôt des parquets scindés et des tribunaux dédoublés. À Bruxelles, il y aura encore un parquet bilingue mais pas de tribunaux bilingues après le dédoublement. La comparaison n'est pas possible en l'espèce.

M. Verherstraeten confirme formellement que le régime prévu dans le texte à l'examen est identique à celui consacré par le Code judiciaire pour d'autres détachements.

Troisièmement, le secrétaire d'État souligne que la proposition à l'examen ne modifie en rien le droit disciplinaire ou les procédures disciplinaires.

M. Laeremans ne peut se rallier à l'interprétation du secrétaire d'État. La situation est évidemment différente, mais cela n'empêche pas qu'une comparaison soit faite. Dans les deux cas, il est question de discipline. Il est frappant de constater que pour les trois juges de paix, dont celui de la commune flamande unilingue de Meise, des magistrats francophones sont aussi déclarés compétents et bénéficient même d'un droit de veto et qu'à un stade ultérieur, l'éventuel président francophone de la cour d'appel soit exclusivement compétent. C'est exactement le contraire qui se produit dans le cas des détachés très contestés à Hal-Vilvorde, où le procureur du Roi de Bruxelles Francophone se voit attribuer un droit d'exclusivité. Cette situation crée des difficultés au parquet. Par son non-interventionnisme ou son laxisme, le procureur bruxellois peut saboter la politique de sécurité du procureur de Hal-Vilvorde. Ce dernier ne dispose d'aucun instrument pour inciter le procureur du Roi de Bruxelles à entamer une procédure disciplinaire. Selon M. Anciaux, le procureur de Hal-Vilvorde peut renvoyer le substitut qui ne donne pas satisfaction. M. Laeremans estime que cela n'est toutefois pas possible car il s'agit, là aussi, d'une sanction disciplinaire.

M. Anciaux affirme que ce point de vue n'est pas exact. Un détachement requiert toujours l'assentiment des deux parties, à savoir la partie qui procède au détachement, et celle qui accueille la personne détachée. On ne peut jamais détacher une personne contre la volonté de la partie qui doit l'accueillir. M. Anciaux insiste sur le fait qu'une autorité hiérarchique est définie dans tous les cas. Il ne s'agit pas nécessairement d'une personne; cela peut aussi être un organe, qui prend évidemment une décision unique.

M. Vanlouwe entend en l'espèce que la règle générale est d'application. Il s'agit en l'occurrence de l'article 401 du Code judiciaire. Cet article dispose ce qui suit: « Quand un magistrat du ministère public s'écarte à l'audience du devoir de son état, le premier président de la cour ou le président du tribunal auprès duquel il exerce ses fonctions en instruit le procureur général près la Cour de cassation ou le procureur général près la cour d'appel ou le procureur du Roi ou l'auditeur du travail suivant que le magistrat relève de la surveillance des uns ou des autres ». M. Vanlouwe considère qu'il n'y a pas conformité avec ce texte, car l'exception vide complètement de son sens la règle générale.

M. Anciaux demande en quoi le texte de l'article 401 du Code judiciaire diffère de celui du projet. Le procureur du Roi de Bruxelles statuera en matière disciplinaire. Le procureur du Roi de Hal-Vilvorde a la possibilité de mettre fin au détachement si un substitut ne suit pas sa politique.

M. Moureaux, bien qu'il partage l'avis de M. Anciaux, souligne qu'il s'agit de deux choses différentes. Dans le système proposé, le procureur du Roi de Bruxelles peut imposer une sanction disciplinaire, contrairement au procureur du Roi de Hal-Vilvorde, qui peut néanmoins mettre fin au détachement. Pour le dossier du magistrat concerné, la différence entre les deux mesures est de taille, puisque la seconde mesure n'a pas un caractère disciplinaire. Si un problème devait effectivement survenir entre les deux procureurs, il est évident que le procureur général interviendrait.

M. Delpérée fait référence à une thèse qu'il a réalisée en 1968 à Paris sur le droit disciplinaire. Il a défendu l'idée que le droit disciplinaire est une véritable branche du droit. Il ne s'agit pas simplement de quelques petites règles que le patron peut appliquer comme bon lui semble. Les autorités disciplinaires, les règles et les procédures sont arrêtées dans le Code judiciaire. Il n'est pas question d'improviser dans chaque cas d'espèce. Les règles pour les magistrats détachés sont appliquées.

M. Vanlouwe souligne que mettre fin à un détachement n'est pas une sanction disciplinaire, mais une mesure d'ordre intérieur. L'article 405 du Code judiciaire donne un aperçu des peines disciplinaires. Il s'agit par exemple d'un avertissement ou d'une réprimande. Les peines disciplinaires majeures sont la retenue de traitement, la suspension disciplinaire, le retrait du mandat, la suspension disciplinaire avec retrait du mandat, la démission d'office, la destitution ou la révocation. Le fait de mettre fin à un détachement n'est donc pas une sanction disciplinaire; l'intéressé retourne tout simplement au parquet de Bruxelles. En outre, M. Vanlouwe ne voit nulle part une disposition prévoyant l'intervention du procureur général.

M. Laeremans comprend que le procureur du Roi de Hal-Vilvorde puisse mettre fin à un détachement. Il y a en effet un risque d'escalade. Supposons qu'un conflit surgisse entre le procureur du Roi de Bruxelles et celui de Hal-Vilvorde, et que ce dernier décide de mettre fin au détachement des cinq magistrats francophones, de ne pas en accepter de nouveaux et de faire tout le travail lui-même. Est-ce possible ? Tout le travail qui doit normalement être accompli par les cinq détachés pourrait-il être pris en charge par les 24 substituts de Hal-Vilvorde ou cela poserait-il un problème en ce sens qu'un certain nombre de dossiers ne pourraient plus être traités ?

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, précise que l'ensemble du titre 5 du Code judiciaire, qui traite de la discipline, n'a pas changé d'un iota. Aucune modification n'a été apportée aux procédures relatives aux magistrats ni à la réglementation sur le fond.

Le secrétaire d'État fait spécifiquement référence à l'article 410 du Code judiciaire qui dispose en son dernier paragraphe que le ministère public peut saisir toute autorité disciplinaire visée à cet article d'une procédure disciplinaire. Il renvoie également à l'article 413. L'intervenant considère par ailleurs que la quasi-totalité des magistrats accomplissent leur travail de manière consciencieuse et respectueuse de leur hiérarchie. Dans les cas rarissimes où un problème se poserait, il y a le comité de coordination et le droit disciplinaire qui relève d'un tiers. Ce tiers est lui-même soumis au droit disciplinaire et se trouve également dans un lien hiérarchique. Le secrétaire d'État est convaincu que la réglementation permettra tout-à-fait de remédier à de telles circonstances exceptionnelles, qui ne se présenteront plus que probablement pas sur le terrain.

M. Moureaux déclare qu'en ce qui concerne la hiérarchie, non seulement on n'y déroge pas, mais on rappelle clairement et explicitement que toutes les actions du procureur du Roi ont lieu sous l'autorité du procureur général.

Les amendements nos 21 et 22 sont rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 15 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 15/1 (nouveau)

Amendement nº 23

M. Laeremans dépose l'amendement nº 23 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 15/1 rédigé comme suit:

« Dans l'article 150bis du même Code, les mots « Les procureurs du Roi forment ensemble un Conseil, appelé Conseil des procureurs du Roi. » sont remplacés par les mots « Les procureurs du Roi et le procureur du Roi adjoint de Bruxelles forment ensemble un Conseil, appelé Conseil des procureurs du Roi. ». ».

Si l'on souhaite effectivement maintenir le système humiliant prévoyant la présence d'un procureur du Roi adjoint, il faut au moins lui permettre de siéger au Conseil des procureurs du Roi.

Cela aurait pour avantage supplémentaire de corriger le déséquilibre que l'on crée aujourd'hui en faisant en sorte que le procureur du Roi de Bruxelles soit toujours francophone, combiné au fait que l'on passe à des arrondissements provinciaux et que l'on prévoit, dans la réforme annoncée, deux procureurs dans le Hainaut. On en arriverait ainsi à une majorité de sept francophones (cinq provinces francophones, dont une, le Hainaut, devrait à l'avenir compter deux procureurs, plus le procureur francophone de Bruxelles) contre six flamands (cinq provinces flamandes, dont une, le Brabant flamand, compte deux procureurs).

M. Anciaux remarque que le précédent orateur omet le procureur fédéral.

M. Laeremans répond qu'il siège au collège des procureurs généraux.

M. Anciaux souligne que le texte de l'article 150bis prévoit que le procureur fédéral peut assister à la réunion du conseil des procureurs du Roi.

M. Laeremans fait observer qu'il ne s'agit que d'une faculté. De plus, le procureur fédéral pourrait être francophone, ce qui porterait le rapport de forces à huit contre six. On installe un système où, en matière de sécurité, les francophones dominent, dans un pays où la majorité est néerlandophone.

M. Delpérée fait observer qu'il faut travailler dans le droit existant, et non en fonction d'une réforme du paysage judiciaire dont nul ne connaît encore ni les tenants ni les aboutissants.

L'amendement nº 23 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 16

Amendement nº 24

M. Laeremans dépose l'amendement nº 24 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 16.

Il n'est pas nécessaire de créer un comité de coordination, composé respectivement des procureurs du Roi et des auditeurs du travail de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, en vue d'assurer la coordination entre le parquet et l'auditorat du travail de Bruxelles et le parquet et l'auditorat du travail de Hal-Vilvorde.

Hal-Vilvorde mérite son propre parquet et son propre auditorat du travail, lesquels doivent fonctionner indépendamment du parquet et de l'auditorat du travail de Bruxelles, sans être « contaminés » par des magistrats de parquet francophones détachés. Le comité de coordination devrait notamment jouer un rôle important dans le cadre de la concertation entre les parquets et les auditorats du travail en ce qui concerne le rôle de ces magistrats de parquet francophones détachés.

L'auteur de cet amendement s'oppose au détachement susvisé et considère que Hal-Vilvorde doit pouvoir développer une politique en matière de poursuites parfaitement indépendante. Ce comité de coordination est donc tout à fait superflu.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux réformes institutionnelles, renvoie aux alinéas 2, 3 et 4 de l'article 16 lui-même, qui répond à ces questions.

Il ajoute que le comité de coordination n'a aucune compétence en matière disciplinaire. Des questions qui ont trait à la discipline peuvent y être évoquées, comme tout autre problème survenant entre les deux parquets, mais cela n'a rien à voir avec une procédure disciplinaire. L'orateur renvoie à ce qu'il a dit précédemment à ce sujet.

M. Vanlouwe indique qu'à la Chambre, le secrétaire d'État aurait déclaré que le comité de coordination avait été créé pour réaliser un équilibre entre le procureur francophone et le procureur néerlandophone. S'agit-il d'un organe paritaire ?

L'orateur renvoie ensuite à l'avis du Conseil d'État, où l'on peut lire (doc. Chambre, nº 53-2140/2, p. 21, nº 53.):

« À l'article 43, § 4quater, proposé, il est prévu que le procureur du Roi de Bruxelles appartient au « rôle » linguistique français et le procureur du Roi adjoint de Bruxelles, au rôle linguistique néerlandais. Il convient que les chambres législatives puissent justifier de ces exigences linguistiques qui ont pour effet de réserver exclusivement ces fonctions dans la Région bilingue de Bruxelles-Capitale à des magistrats dont la langue de diplôme est, soit le français, soit le néerlandais, dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale. »

À la Chambre, le secrétaire d'État a déclaré à ce sujet que « l'on ne peut pas interpréter la répartition proposée des rôles linguistiques pour le procureur du Roi et son adjoint à Bruxelles et pour l'auditeur du travail et son adjoint comme une interdiction professionnelle » et « qu'il y aura à Hal-Vilvorde un procureur du Roi et un auditeur du travail néerlandophones et qu'à Bruxelles, l'adjoint du procureur du Roi appartiendra également au rôle linguistique néerlandais. » (doc. Chambre, nº 53-2140/5, p. 68).

L'orateur souligne que l'on présente ainsi comme une compensation ce qui n'est qu'une évidence, à savoir l'existence d'un magistrat néerlandophone en territoire flamand.

Dans le rapport des discussions en commission, on peut encore lire ce qui suit:

« Le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, adjoint au premier ministre, M. Servais Verherstraeten, explique comment on peut justifier que le procureur du Roi de Bruxelles et le procureur du Roi adjoint appartiennent obligatoirement, respectivement au rôle linguistique francophone et au rôle linguistique néerlandophone. Il précise ce qui suit à ce sujet.

Ces exigences visent à garantir la composition paritaire du comité de coordination prévu à l'article 150ter du Code judiciaire, tel que proposé. Ce comité de coordination constitue un élément essentiel de la réforme. Il en est d'ailleurs fait mention dans les développements de la proposition d'insertion d'un article 157bis de la Constitution (...).

(...) M. Ben Weyts (N-VA) constate que le secrétaire d'État change son fusil d'épaule. Lors de la discussion générale, il a affirmé que le fait de réserver les fonctions aux francophones à Bruxelles était contrebalancé par le fait que le président du tribunal de première instance néerlandophone serait un néerlandophone, tout comme le procureur du Roi de Hal-Vilvorde. C'est donc le gouvernement lui-même qui a fait la comparaison avec le miroir. L'interprétation en vue de justifier le régime proposé est donc désormais apparemment abandonnée et remplacée par une justification encore plus bancale qui implique le comité de coordination. » (doc. Chambre, nº 53-2140/5, pp. 103-104).

L'orateur estime qu'aucun des raisonnements développés par le secrétaire d'État ne peut valablement justifier le système envisagé pour Bruxelles, qui est tout sauf évident, illégal et même inconstitutionnel.

Il s'agit en fait d'un raisonnement qui relève du cercle vicieux: le procureur et l'auditeur du travail doivent être francophones parce que le comité de coordination doit être paritaire — bien que ce ne soit pas prescrit par la loi —, et le comité de coordination est paritaire parce que le procureur est francophone.

Dans le rapport des travaux de commission à la Chambre, on peut encore lire une intervention de M. Annemans, qui déclarait ceci:

« ... si la parité du comité de coordination est la véritable justification du régime proposé, il doit également être possible que le procureur de Hal-Vilvorde soit un francophone et son collègue de Bruxelles un néerlandophone. Si telle n'est pas la raison véritable, on peut aussi bien ajouter qu'il s'agit purement d'un accord politique, sans lequel on n'aurait pas dégagé de solution. » (doc. Chambre, nº 53-2140/5, p. 106).

La question de l'unilinguisme du procureur à Bruxelles reste donc entière. En réalité, il s'agit d'un cadeau de plus aux francophones, et d'une atteinte de plus au bilinguisme de Bruxelles.

M. Anciaux estime que le précédent orateur attribue au secrétaire d'État des propos qu'il n'a pas tenus. Ce dernier a seulement évoqué une série de faits.

L'intervenant souhaite lui aussi évoquer un fait. Il constate que la législation nouvelle crée deux nouvelles fonctions au niveau du parquet: un procureur du Roi à Hal-Vilvorde, qui n'existait pas auparavant, et un procureur du Roi adjoint à Bruxelles.

M. Laeremans souligne qu'il n'est dit nulle part que le comité de coordination doit être paritaire sur le plan linguistique. Le texte précise qui y siège, mais chacun sait qu'un procureur peut se faire remplacer par un substitut. L'adjoint du procureur, qui est néerlandophone, peut-il remplacer ce dernier au comité de coordination, ce qui pourrait amener à une proportion de trois néerlandophones pour un francophone, voire même de quatre néerlandophones, si l'adjoint de l'auditeur remplace ce dernier ?

M. Anciaux fait une autre lecture du texte, à savoir que le comité de coordination est composé, tantôt des deux procureurs et tantôt des deux auditeurs du travail, selon la matière traitée. Quel est, sinon, le sens du mot « respectivement » ? Dans ce cas, le comité ne serait pas systématiquement composé de quatre personnes.

M. Moureaux fait observer que cette dernière remarque ne change rien à la question de M. Laeremans. Même si le comité n'est composé que de deux personnes, il pourrait s'agir de deux néerlandophones. Le texte permet les situations évoquées par M. Laeremans. Il ne rend pas la parité obligatoire. Dans la mesure où il s'agit de Bruxelles, on peut exprimer le souhait qu'il y ait parité, mais le texte n'exclut pas qu'un jour, en fonction de telle ou telle absence, le comité ne soit composé que de néerlandophones.

L'intervenant soutient la majorité et le compromis, bien qu'il soit, quant à lui, partisan du moins de contraintes linguistiques possibles. En tant que francophone de Bruxelles, il suppose que, si le comité de coordination est composé de quatre néerlandophones, ceux-ci travailleront de bonne foi dans l'intérêt des Bruxellois. Dans sa zone de police, l'orateur travaille avec un chef de corps néerlandophone qui est évidemment parfait bilingue.

En ce qui concerne l'observation du Conseil d'État, le secrétaire d'État renvoie à la réponse qu'il a donnée à la Chambre (doc. Chambre, nº 53-2140/5, p. 104).

À la Chambre, les débats ont également porté sur d'autres points, comme le rôle linguistique du procureur du Roi, de l'auditeur du travail, et des adjoints. Le lien de causalité que M. Vanlouwe a voulu trouver dans les propos du secrétaire d'État n'a pas été exprimé et n'existe pas. On peut en trouver la preuve dans la discussion qui a eu lieu ensuite à propos du rapport.

En effet, un alinéa est ainsi libellé: « Enfin, le secrétaire d'État souligne qu'il y aura à Hal-Vilvorde un procureur du Roi et un auditeur du travail néerlandophones et qu'à Bruxelles, l'adjoint du procureur du Roi appartiendra également au rôle linguistique néerlandais. ». Or, ce sont les représentants de la N-VA qui voulaient remplacer les termes néerlandais « Ten slotte » par le mot « immers », pour introduire dans les propos du secrétaire d'État un lien causal qu'il n'avait pas voulu y mettre. Cette demande n'a pas été acceptée (voir doc. Chambre, nº 53-2140/5, p. 68).

Le secrétaire d'État renvoie à la déclaration qu'il a faite à ce sujet en commission de la Chambre (voir doc. Chambre, nº 53-2140/5, p. 104).Il souhaite toutefois en expliciter le dernier alinéa, relatif à la parité au sein du comité de coordination, qui « participe à l'équilibre communautaire qui est recherché, d'une manière générale, dans l'accord institutionnel du 11 octobre 2011, et en particulier dans la réforme à l'examen. ».

Il s'agit donc bien d'un équilibre communautaire et d'un accord institutionnel. Comme tout texte destiné à devenir loi, il nécessite une majorité, voire une majorité spéciale, à la Chambre et au Sénat.

Le secrétaire d'État renvoie ensuite à la justification de l'amendement nº 6 qui a été déposé à la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 53-2140/3, p. 6). Le principe est donc sans aucun doute celui de la parité, comme il ressort aussi des développements du premier alinéa de l'article 16.

M. Laeremans réplique que le texte de l'article proprement dit ne permet pas de déduire qu'il faille respecter une parité et qu'il doive toujours y avoir un procureur francophone à Bruxelles. Ce sont des points souhaitables que l'on attribue au comité de coordination, mais l'argumentation est faible. De plus, on ne tient pas compte de la remarque du Conseil d'État qui avait demandé d'expliquer pourquoi le procureur de Bruxelles devait toujours être francophone.

Le secrétaire d'État relève que le Conseil d'État n'a formulé aucune remarque concernant le caractère anticonstitutionnel éventuel de la disposition proposée. En ce qui concerne le comité de coordination, le principe est la parité. Comme cela a été précisé à la Chambre des représentants et dans le rapport, cette parité est un principe de base pour la majorité constitutionnelle. Dans la pratique, la parité ne sera pas respectée uniquement en cas d'empêchement du procureur du Roi de Bruxelles ou de l'auditeur du travail et de leur remplacement par leur adjoint. Dans ces circonstances, il est possible que le comité de coordination soit majoritairement néerlandophone.

L'amendement nº 24 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 16 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 17

Amendement nº 25

M. Laeremans dépose l'amendement nº 25 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise d'abord à opérer une scission complète et verticale de l'arrondissement actuel de Bruxelles-Hal-Vilvorde en un arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde et un arrondissement judiciaire de Bruxelles. À ce propos, l'intervenant renvoie à la discussion précédente.

L'amendement proposé tend ensuite à supprimer les mots «  sans préjudice de l'article 150, § 3 ». En effet, Hal-Vilvorde n'a pas besoin d'un détachement de magistrats de parquet francophones; la disposition visée est donc sans objet.

L'amendement nº 25 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 17 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 18

Amendements nos 26 et 27

M. Laeremans dépose l'amendement nº 26 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à supprimer l'article 18. Comme l'auteur l'a précisé, son but est que Hal-Vilvorde devienne un arrondissement à part entière. Le régime prévu à l'article 18 devient donc superflu. L'intervenant renvoie ensuite à sa justification concernant l'article 15 proposé.

M. Laeremans dépose l'amendement nº 27, subsidiaire à l'amendement nº 26 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui tend à remplacer certains mots dans l'article 18, afin de faire en sorte que si la fonction d'auditeur du travail adjoint est maintenue malgré tout, celui-ci soit au moins au même niveau que l'auditeur du travail.

M. Vanlouwe constate que la création de la fonction d'un auditeur du travail adjoint néerlandophone subordonné intervient parallèlement à la création, proposée à l'article 15, de la fonction d'un procureur du Roi adjoint néerlandophone. Ces fonctions sont définies mais elles sont une première dans le Code judiciaire; l'intervenant souhaite dès lors obtenir des précisions à leur sujet. D'autres fonctions au sein ou en dehors de l'arrondissement satisfont-elles aussi à ce descriptif de fonction ? Qui veille au bon fonctionnement dans les autres arrondissements ?

Le secrétaire d'État explique que la description proposée découle d'une observation formulée par le Conseil d'État. À cet égard, l'intervenant renvoie à la justification de l'amendement nº 7 (doc. Chambre, nº 53-2140/003) et à la discussion qui a été menée à propos de l'article 15 proposé.

Les amendements nos 26 et 27 sont rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 18 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 19

Amendement nº 28

M. Laeremans dépose l'amendement nº 28 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à compléter l'article 186bis de telle manière que pour l'application des conditions de nomination, on tienne compte de la scission véritable et verticale de l'arrondissement actuel de Bruxelles-Hal-Vilvorde. Il est proposé de compléter l'article 186bis, alinéa 1er, du même Code par ce qui suit:

« Dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, le président du tribunal de première instance néerlandophone agit en qualité de chef de corps des juges et des juges de complément au tribunal de police néerlandophone. Le président du tribunal de première instance francophone agit en qualité de chef de corps des juges et des juges de complément au tribunal de police francophone. Les présidents des tribunaux de première instance francophone et néerlandophone agissent conjointement en qualité de chef de corps des juges de paix et des juges de paix de complément. »

Amendements nos 29 et 30 (subsidiaire à l'amendement nº 29)

M. Laeremans dépose l'amendement nº 29 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui tend à supprimer les alinéas 3 et 4 de l'article 186bis proposé. L'intervenant n'est pas d'accord sur le fait que le président du tribunal de première instance francophone puisse être impliqué dans les décisions par simple requête. Il n'accepte pas non plus la disposition concernant le chef de corps commun. Le but ne saurait être que la fonction de chef de corps dans les justices de paix du canton judiciaire dont le siège est établi à Kraainem et à Rhode-Saint-Genèse et du canton judiciaire dont le siège est établi à Meise, doive être exercée conjointement et que les décisions fassent l'objet d'une concertation et d'un consensus. L'intervenant refuse cette ingérence qui va beaucoup trop loin et qui n'existe nulle part ailleurs.

M. Laeremans dépose l'amendement nº 30, subsidiaire à l'amendement nº 29 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à faire en sorte que le président du tribunal francophone ne puisse être impliqué dans les décisions par simple requête qu'en ce qui concerne les juges de paix des communes à facilités.

M. Vanlouwe déclare qu'il a déjà posé la question suivante, mais puisqu'il n'a pas obtenu de réponse, il souhaite la poser à nouveau. Il voudrait connaître la raison d'être de l'article 186bis, alinéa 3. Pourquoi une exception encore plus stricte est-elle prévue dans l'alinéa suivant ? En effet, il y aura deux chefs de corps dans la pratique. Pourquoi ? Où est l'équilibre communautaire et institutionnel sur ce point ?

Le secrétaire d'État renvoie à sa réponse et à sa réplique concernant l'article 6 proposé.

Les amendements nos 28, 29 et 30 sont rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 19 est adopté par 12 voix contre 5.

Articles 20 et 21

Les articles 20 et 21 sont adoptés sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 22

Amendement nº 31

À cet article, M. Laeremans dépose l'amendement nº 31 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à faire en sorte que les juges puissent également siéger dans une chambre d'un autre rôle linguistique que la langue dans laquelle ils ont obtenu leur diplôme s'ils ont présenté l'examen linguistique approfondi qui correspond à la fonction de président d'un tribunal ou à celle de juge de paix.

M. Laeremans souligne qu'actuellement, de nombreux magistrats néerlandophones traitent des dossiers francophones en raison du manque de bilingues à la cour d'appel. L'article en question rencontre le souhait des francophones de contrer cette pratique. Au fond, pourquoi prend-on cette mesure ? Existe-t-il des plaintes concernant les magistrats néerlandophones qui traitent des dossiers francophones ? Quelle est la répartition linguistique au sein de la cour d'appel ?

M. Anciaux demande si l'article 22 exclut une personne qui aurait, par exemple, deux diplômes établis dans des langues différentes.

M. Delpérée précise que l'on se réfère en la matière à la langue du diplôme qui donne accès à la fonction. Il s'agit du diplôme final des études de droit qui ouvrent la voie à la magistrature.

Le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, M. Verherstraeten, renvoie à l'article 43, § 5, de la loi linguistique, qui est une disposition purement technique. Il fait également référence en l'espèce aux développements de la proposition de loi (doc. Chambre, nº 53-2140/001, pp. 17-18):

« L'article 206, alinéa 3, du Code judiciaire prévoit que pour être nommé juge social ou juge consulaire, effectif ou suppléant, dans les tribunaux qui connaissent aussi bien d'affaires relevant du régime linguistique néerlandais que d'affaires relevant du régime linguistique français, le juge doit être porteur d'un certificat d'études ou d'un diplôme faisant foi d'un enseignement suivi en langue néerlandaise ou française et que le juge ne peut siéger que dans les affaires dont le régime linguistique correspond à la langue du certificat d'études ou du diplôme dont il est porteur.

À la suite de la création de tribunaux du travail et de tribunaux de commerce francophones et néerlandophones distincts, cette disposition est devenue superflue et peut dès lors être abrogée.

L'article 216, alinéa 3, du Code judiciaire prévoit que l'article 206 est notamment applicable aux conseillers sociaux, effectifs et suppléants. Comme l'article 206, alinéa 3, est abrogé par la présente proposition, il y a lieu de prévoir une disposition analogue pour les conseillers de la cour du travail de Bruxelles. »

L'amendement nº 31 est rejeté par 12 contre 5 voix.

L'article 22 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 22/1 (nouveau)

Amendement nº 32

M. Laeremans dépose l'amendement nº 32 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à insérer un article 22/1 nouveau en vue de réduire le nombre de magistrats dans des proportions de 75 % de francophones et 25 % de néerlandophones. Cette modification est une conséquence logique de la limitation de l'arrondissement judiciaire aux limites de la Région bruxelloise. Le présent amendement doit être lu conjointement avec l'amendement qui vise à créer une cour d'appel pour le Brabant flamand et le Limbourg réunis.

L'amendement nº 32 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 22/2 (nouveau)

Amendement nº 33

M. Laeremans dépose l'amendement nº 33 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 22/2 nouveau qui prévoit que lorsque l'assemblée générale de la cour d'appel rend un avis au ministre de la Justice concernant la nomination d'un conseiller, il suffit de réunir une majorité des deux tiers dans le groupe linguistique concerné.

L'amendement nº 33 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 23

M. Vanlouwe demande si la « liste de jurés » n'est pas contraire à l'interdiction légale d'effectuer des recensements linguistiques à Bruxelles.

M. Verherstraeten souligne que le Conseil d'État n'a formulé aucune observation concernant cet article. Il s'agit d'une adaptation purement technique consécutive au dédoublement du siège et à la scission du parquet. La loi doit être modifiée pour préciser que le destinataire sera désormais le président néerlandophone ou le président francophone.

M. Anciaux souligne qu'il ne s'agit en aucun cas d'un recensement, mais bien de personnes tirées au sort sur la base des listes des électeurs. Aucun recensement n'est jamais effectué.

M. Vanlouwe souligne que les listes des électeurs ne comprennent aucune indication sur la langue de ceux-ci.

L'article 23 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 24

Amendement nº 34

M. Laeremans dépose l'amendement nº 34 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à remplacer, dans l'article concerné, les mots « l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale » par les mots « l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Capitale ». Cet amendement est une conséquence logique de la scission verticale, proposée dans des amendements précédents, de l'actuel arrondissement judiciaire de Bruxelles en un arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde à part entière et un arrondissement judiciaire de Bruxelles limité au territoire de la Région de Bruxelles-Capitale.

L'amendement nº 34 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 24 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 25

M. Vanlouwe souhaite obtenir des précisions quant à la procédure de désignation aux mandats applicable aux magistrats du parquet détachés dans l'arrondissement de Hal-Vilvorde. En effet, le projet de loi prévoit que le procureur du Roi de Hal-Vilvorde doit fournir les renseignements nécessaires au procureur du Roi de Bruxelles, qui donnera son avis.

L'intervenant estime dès lors que le rôle du procureur du Roi de Hal-Vilvorde est subsidiaire puisque c'est au procureur du Roi de Bruxelles de trancher. Par ailleurs, quelle est la nature des informations qu'il est censé donner ? Quelle est la différence de contenu entre lesdites informations et l'avis ?

Le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles précise que le supérieur hiérarchique conserve sa compétence et fournit un avis aux organes compétents. Ainsi, si un magistrat détaché actif dans l'arrondissement de Hal-Vilvorde postule au parquet général de Bruxelles, c'est le procureur du Roi de Bruxelles qui donnera un avis, mais sur la base de renseignements communiqués par le procureur du Roi de Hal-Vilvorde. C'est en effet avec ce dernier que le magistrat détaché travaille au quotidien.

Les informations concerneront les compétences et la qualité du travail du magistrat détaché. Cet aspect relève de l'autonomie du procureur du Roi de Hal-Vilvorde.

Pour le secrétaire d'État, il ne peut être question de subordination, il s'agit simplement de communiquer des informations objectives sur base desquelles un avis sera donné.

L'article 25 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 26

Amendement nº 35

M. Laeremans dépose l'amendement nº 35 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) dont la portée vise à supprimer la règle selon laquelle la fonction de procureur du Roi de Bruxelles sera dans tous les cas attribuée à un francophone.

L'intervenant plaide à cet égard pour l'instauration d'une alternance linguistique entre le procureur du Roi et le procureur du Roi adjoint de Bruxelles.

L'amendement nº 35 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 26 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 27

L'article 27 est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 28

M. Laeremans relève qu'en ce qui concerne les greffiers en chef et les greffiers, leur installation s'effectue en fonction de leurs « connaissances linguistiques attestées ». Que faut-il entendre par cela ? Ne faut-il pas prendre en compte la langue du diplôme ?

Le secrétaire d'État précise que la preuve des connaissances linguistiques se fera conformément au prescrit de l'article 53, § 6, alinéa 2 de la loi sur l'emploi des langues en matière judiciaire. L'intervenant insiste sur la circonstance qu'aucune modification n'est portée à la loi sur l'emploi des langues en matière judiciaire. La situation actuelle est maintenue.

L'article 28 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 29

Amendement nº 36

M. Laeremans dépose l'amendement nº 36 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) dont la portée vise à prévoir l'intervention systématique du procureur du Roi adjoint de Bruxelles aux côtés de celle du procureur du Roi de Hal-Vilvorde.

Il s'interroge d'ailleurs sur les raisons pour lesquelles le projet a prévu l'intervention du procureur du Roi de Bruxelles dans l'organisation du services d'audience des membres du parquet pour les tribunaux néerlandophones de Bruxelles.

Le secrétaire d'État précise que l'article 29 doit être lu avec l'article 15 du projet qui prévoit notamment que le procureur du Roi adjoint de Bruxelles assiste le procureur du Roi de Bruxelles en ce qui concerne les relations avec le parquet de Hal-Vilvorde et le bon fonctionnement des tribunaux néerlandophones à Bruxelles. Pour l'organisation des audiences, il est logique de prévoir l'intervention du procureur adjoint en cas d'empêchement du procureur du Roi de Bruxelles. Il s'agit pour le surplus d'une simple adaptation de terminologie.

M. Laeremans n'est pas convaincu par cette réponse et estime que l'intervention du procureur du Roi de Bruxelles s'apparente à de la méfiance vis à-vis du procureur du Roi adjoint. On aurait pu confier cette tâche de manière exclusive au procureur du Roi adjoint de Bruxelles.

Le secrétaire d'État rappelle que l'article 318 du Code judiciaire énonce que: « Le service d'audience des membres du parquet est déterminé, pour les cours d'appel et pour les cours du travail, par le procureur général, (pour le parquet fédéral par le procureur fédéral,) pour les tribunaux de première instance et pour les tribunaux de commerce, par le procureur du Roi et pour les tribunaux du travail, par l'auditeur du travail ». Dans la mesure où les tribunaux seront dédoublés à Bruxelles, il convient de prévoir pour les tribunaux néerlandophones à Bruxelles, la compétence du procureur du Roi de Hal-Vilvorde et celle du procureur du Roi de Bruxelles ou, à défaut, celle du procureur du Roi adjoint. Il s'agit donc au contraire d'une marque de confiance accordée au procureur du Roi adjoint.

M. Laeremans reste perplexe en entendant l'argumentation développée car il constate que d'autres articles du projet de loi ne prévoient pas expressément l'intervention du procureur du Roi adjoint.

L'amendement nº 36 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 29 est adopté par 12 voix contre 5.

Articles 30 à 32

Les articles 30 à 32 sont adoptés sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 33

Amendement nº 37

M. Laeremans dépose l'amendement nº 37 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à modifier les règles hiérarchiques prévues.

L'intervenant plaide pour une scission nette de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles et estime dès lors qu'il n'y a pas lieu d'accorder au tribunal de première instance francophone un droit de surveillance sur les justices de paix de l'arrondissement de Hal-Vilvorde.

M. Vanlouwe s'interroge sur les raisons pour lesquelles l'exception prévue s'applique à l'ensemble des justices de paix et n'a pas été limitée aux seules justices de paix des communes à facilités.

Le secrétaire d'État renvoie à la justification de l'article 6 du projet et rappelle à nouveau la distinction qui a été opérée. Les articles 6 et 33 du projet de loi portent sur l'organisation des tribunaux alors que les articles 19 et 35 portent sur le rôle des chefs de corps et leurs compétences à l'égard des magistrats de leur arrondissement judiciaire notamment en matière disciplinaire.

L'amendement nº 37 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 33 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 34

Amendements nos 38 et 39

M. Laeremans dépose l'amendement nº 38 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 34.

C'est un des articles qui comporte des dispositions très radicales et qu'il est préférable de supprimer. Elles portent notamment sur le lien entre le procureur et les justices de paix. Ce n'est pas tant le président des tribunaux francophones mais bien le procureur du Roi de Bruxelles qui peut, par simple requête, demander à être impliqué dans les décisions.

M. Laeremans dépose l'amendement nº 39 qui est un amendement subsidiaire à l'amendement nº 38 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) et qui vise à modifier l'article 34. Si l'on veut effectivement maintenir le système de l'auditeur adjoint et du procureur adjoint, on doit leur attribuer une compétence à part entière. L'intervenant souhaiterait donc qu'il en soit ainsi. On propose que le procureur du Roi de Hal-Vilvorde et le procureur du Roi adjoint de Bruxelles exercent conjointement leur surveillance sur le greffier en chef, les greffiers-chefs de service, les greffiers, les experts, les experts administratifs, les experts ICT, les assistants et les collaborateurs du tribunal de première instance néerlandophone, du tribunal de commerce néerlandophone et du tribunal de police néerlandophone de Bruxelles-Capitale.

Les décisions sont délibérées en consensus. À défaut de consensus entre les deux procureurs, le procureur général de Bruxelles décide. M. Laeremans souhaiterait que cette décision revienne non pas au procureur général de Bruxelles mais au procureur du Roi adjoint de Bruxelles.

Le procureur du Roi de Bruxelles lui-même exerce une surveillance sur le greffier en chef, les greffiers-chefs de service et les greffiers du tribunal francophone. En l'espèce, on suit une autre logique puisqu'il s'agit d'un tribunal francophone et que le procureur du Roi peut exercer une surveillance en tant que francophone.

L'intervenant applique la même logique aux justices de paix. Pour les auditorats aussi, on propose que la surveillance soit exercée conjointement par l'auditeur adjoint de Bruxelles et l'auditeur de Hal-Vilvorde.

M. Vanlouwe constate que la logique suivie dans la première phrase de l'article 34 — l'exercice d'une surveillance conjointe par les procureurs du Roi de Hal-Vilvorde et de Bruxelles sur le greffier en chef, les greffiers-chefs de service, les greffiers, ainsi que sur les experts, les experts administratifs, les experts ICT, les assistants et les collaborateurs du tribunal de première instance et du tribunal de commerce néerlandophones — n'est pas appliquée dans la phrase suivante où il est question des tribunaux francophones.

Il souhaiterait avoir des précisions au sujet de cette distinction.

M. Verherstraeten renvoie aux réponses qu'il a déjà fournies précédemment.

Les amendements nos 38 et 39 sont successivement rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 34 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 35

Amendements nos 40, 41 et 42

M. Laeremans dépose l'amendement nº 40 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à remplacer l'article 35.

M. Laeremans explique qu'il s'agit de la compétence du président du tribunal néerlandophone à l'égard des juges de paix et des juges des tribunaux de police dont le siège est établi à Hal-Vilvorde, par analogie aux chefs de corps, au sens de l'article 19. Il y a une compétence conjointe pour ce qui est des trois communes à facilités concernées, que l'intervenant juge tout à fait excessive. D'autre part, il y a aussi la demande d'implication qui peut être introduite sur simple requête pour tous les autres cantons. Mais le contraire n'est pas vrai. Le président du tribunal francophone dispose donc d'une autonomie totale à l'égard du tribunal de police francophone et il y a donc là une absence de réciprocité. Le président francophone est intouchable car il n'a de comptes à rendre à personne, alors que le président néerlandophone est soumis à une surveillance permanente.

Selon l'intervenant, à défaut de consensus, la décision revient au président de la cour d'appel qui, malheureusement, peut encore être un francophone, si bien que l'équilibre risque d'être tout à fait rompu.

L'intervenant applique une logique similaire à celle de l'article 34 du projet de loi. Il propose de déclarer le tribunal néerlandophone compétent à l'égard des juges de paix du rôle linguistique néerlandais et des juges de police néerlandophones, et le tribunal francophone compétent à l'égard des juges de paix du rôle linguistique français et des juges de police francophones, dans le cadre de la scission verticale de l'arrondissement judiciaire actuel de Bruxelles, de sorte qu'il ne faudra trouver un règlement que pour Bruxelles et non pour Hal-Vilvorde.

M. Laeremans dépose l'amendement nº 41, subsidiaire à l'amendement nº 40 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à supprimer les alinéas 2 et 3 en projet de l'article 35.

M. Laeremans explique qu'il est proposé concrètement de supprimer, d'une part, le règlement de la compétence conjointe sur les trois cantons à facilités et, d'autre part, la possibilité d'implication sur simple requête.

M. Laeremans dépose ensuite l'amendement nº 42, également subsidiaire à l'amendement nº 40 (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à remplacer les alinéas 2 et 3 en projet de l'article 35.

M. Laeremans explique qu'il est proposé à titre subsidiaire de ne permettre l'implication que pour les trois justices de paix des communes à facilités concernées. La logique trouve ainsi son prolongement.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que le terme « implication » a été spécifié conformément à l'observation nº 16 de l'avis du Conseil d'État (doc. Chambre, nº 53-2140/2, p. 13).

M. Vanlouwe se réfère à cette observation que le Conseil d'État a formulée dans son avis de la manière suivante:

« L'article 72bis proposé contient un certain nombre d'imprécisions qu'il convient dans un souci de sécurité juridique de supprimer. Il en est ainsi, lorsqu'il est fait état, à l'alinéa 2, de l'implication du président du tribunal de première instance francophone dans les décisions prises par le président du tribunal de première instance néerlandophone en ce qui concerne ses missions à l'égard des justices de paix ayant leur siège dans l'arrondissement administratif de Hal-Vilvorde, à l'alinéa 3, d'une concertation entre les deux présidents s'agissant des justices de paix de l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale et à l'alinéa 4, de consensus en cas d'application des deux alinéas précédents. Ces variations terminologiques — « implication », « concertation », « consensus » —, sont source d'incertitude quant à l'intention réelle des auteurs de la proposition dans la mesure où les termes utilisés ne revêtent pas en droit la même signification. S'agit-il d'une obligation de consulter le président du tribunal de première instance francophone lorsqu'il en fait la demande (alinéa 2) ou d'une codécision (alinéa 3) ? Cette dernière solution semble être la bonne dès lors qu'à l'alinéa 4, le recours à la notion de consensus laisse entendre qu'à défaut d'accord entre les deux présidents, il revient au Premier Président de la cour d'appel de Bruxelles, et ce tant dans l'hypothèse visée à l'alinéa 2 que dans celle prévue à l'alinéa 3, de « prendre les mesures nécessaires ». Quoi qu'il en soit, il appartient aux chambres législatives de lever toute ambiguïté à ce sujet (doc. Chambre, nº 53-2140/02, p. 13). »

M. Vanlouwe estime pourtant que cette ambiguïté reste présente. Le consensus mène à un droit de veto alors que l'implication est informelle et ne conduit qu'à un avis avec voix consultative.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que l'avis du Conseil d'État porte sur le texte initial. Par le biais de l'amendement nº 4 de M. Bacquelaine et consorts (doc. Chambre, nº 53-2140/3, p. 4), la Chambre a donné suite aux remarques formulées par le Conseil d'État. L'intervenant renvoie dès lors à la justification de cet amendement.

M. Vanlouwe estime que seul le terme « concertation » a été spécifié, et non les termes « consensus » et « implication ».

Selon M. Anciaux, l'observation n 16 du Conseil d'État portait uniquement sur les relations réciproques entre les termes « implication », « concertation » et « consensus ». « Le terme « implication » est clair et désigne « le fait d'impliquer, d'associer quelqu'un à quelque chose », et le terme « consensus » signifie que l'on pense la même chose. Seul le terme « concertation » devait encore être précisé.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, explique qu'un choix a été fait entre, d'une part, le droit d'évocation facultatif, qui n'est assorti d'aucune obligation et n'est donc pas contraignant, et, d'autre part, l'exercice conjoint obligatoire d'une compétence.

Tant la procédure facultative que la procédure obligatoire visent l'obtention d'un consensus. À défaut de consensus, le premier président de la cour d'appel de Bruxelles prend la décision.

En cas de compétence conjointe, les décisions font l'objet d'une concertation en consensus. Cela est facultatif lorsqu'il s'agit d'un droit d'évocation, mais dès que le droit d'évocation est exercé, c'est dans le but de parvenir à un consensus.

En ce qui concerne la procédure disciplinaire prévue à l'article 410 du Code judiciaire, M. Vanlouwe estime que l'article 35 du projet de loi crée trois niveaux différents:

— À l'égard des juges de paix et des juges aux tribunaux de police de Hal-Vilvorde, le président du tribunal néerlandophone est compétent, exception faite de la possibilité d'implication que le président du tribunal francophone peut demander par simple requête en vue d'un consensus (alinéa 1er de l'article 35). L'intervenant fait remarquer au passage que d'un point de vue purement logique et légistique, l'alinéa 3 de l'article 35 devrait suivre immédiatement l'alinéa 1er. La première exception arrive subitement à la fin, alors que ce n'était pas le cas dans les autres articles.

— À l'égard des justices de paix de Kraainem, Rhode-Saint-Genèse et Meise, il existe également une double compétence conjointe des présidents des tribunaux néerlandophone et francophone en ce qui concerne la procédure disciplinaire, ce qui risque de nouveau d'engendrer des conflits dans la pratique (alinéa 2 de l'article 35).

— Les présidents des tribunaux de première instance néerlandophone et francophone sont conjointement compétents à l'égard des juges des justices de paix dont le siège est établi dans l'arrondissement administratif de Bruxelles-Capitale. Les décisions sont délibérées en consenus (alinéa 5 de l'article 35).

L'intervenant est frappé par le fait que les alinéas 2 et 5 de l'article 35 sont identiques, mettant ainsi sur le même pied les communes à facilités et les cantons de Bruxelles.

L'intervenant conclut en disant qu'une double implication est à chaque fois prévue, à savoir pour Bruxelles, pour les justices de paix dans les communes à facilités et indirectement aussi pour les juges de paix flamands. Le président du tribunal francophone de Bruxelles est cependant exclusivement compétent à l'égard des juges francophones des tribunaux de police. Si l'on suivait la logique, il faudrait ici aussi instaurer la possibilité d'implication sur simple requête et le consensus.

Peut-on expliquer cette stratification de la réglementation ?

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, renvoie à sa réponse précédente.

L'amendement nº 40 est rejeté par 12 voix contre 5.

Les amendements nos 41 et 42, subsidiaires à l'amendement nº 40, sont rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 35 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 35/1 (nouveau)

Amendement nº 43

M. Laeremans dépose l'amendement nº 43 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à insérer un article 35, dans lequel on considère que les avocats de Hal-Vilvorde forment un barreau à part, dès lors que Hal-Vilvorde constitue un arrondissement judiciaire à part entière.

L'amendement nº 43 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 36

Amendement nº 44

M. Laeremans dépose l'amendement nº 44 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 36.

M. Laeremans explique que l'article 36 prévoit que dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, l'avis est recueilli auprès des deux procureurs du Roi. Dès lors que l'intervenant est partisan d'une scission verticale de l'actuel arrondissement judiciaire de Bruxelles, il ne voit aucune raison de maintenir cette règle d'exception.

L'amendement no 44 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 36 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 37

Amendement nº 45

M. Laeremans dépose l'amendement nº 45 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 37.

M. Laeremans explique que cette disposition spéciale est superflue, étant donné qu'il propose la création de deux arrondissements judiciaires distincts.

L'amendement nº 45 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 37 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 38

Amendement nº 46

M. Laeremans dépose l'amendement nº 46 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 38.

M. Laeremans explique que, vu la proposition de scinder verticalement l'actuel arrondissement judiciaire de Bruxelles faisant de Hal-Vilvorde un arrondissement judiciaire à part entière, cette disposition est superflue.

L'amendement nº 46 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 38 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 39

L'article 39 est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 40

L'article 40 est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 40/1 (nouveau)

Amendement nº 47

M. Laeremans dépose l'amendement nº 47 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 40/1 (nouveau) rédigé comme suit:

« Art. 40/1

Il est inséré dans le même Code un article 622bis rédigé comme suit:

« Art. 622bis. Le tribunal de police, le tribunal de première instance, le tribunal du travail, le tribunal de commerce et le tribunal d'arrondissement néerlandophones de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles sont seuls compétents pour connaître de toutes les affaires dans le cadre desquelles la langue de la procédure est le néerlandais.

Le tribunal de police, le tribunal de première instance, le tribunal du travail, le tribunal de commerce et le tribunal d'arrondissement francophones de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles sont compétents pour connaître de toutes les affaires dans le cadre desquelles la langue de la procédure est le français. »

M. Laeremans renvoie à la justification écrite de l'amendement.

L'amendement nº 47 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 40/2 (nouveau)

Amendement nº 48

M. Laeremans dépose l'amendement nº 48 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 40/2 (nouveau) rédigé comme suit:

« Art. 40/2

Dans l'article 627 du même Code, les modifications suivantes sont apportées:

1º au 11º, inséré par la loi du 11 avril 1989, les mots « le président du tribunal de première instance de Bruxelles » sont remplacés par les mots « le président du tribunal de première instance néerlandophone ou francophone de Bruxelles »;

2º au 10º et au 14º, insérés respectivement par les lois du 24 avril 1970 et du 10 février 1998, les mots « le président du tribunal de commerce de Bruxelles » sont chaque fois remplacés par les mots « le président du tribunal de commerce francophone ou néerlandophone de Bruxelles ». »

M. Laeremans renvoie à la justification écrite de l'amendement.

L'amendement nº 48 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 41

L'article 41 est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 42

Amendement nº 49

M. Laeremans dépose l'amendement nº 49 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 42.

M. Laeremans renvoie à la justification écrite de l'amendement.

L'amendement nº 49 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 42 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 43

L'article 43 est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 44

Amendement nº 50

M. Laeremans dépose l'amendement nº 50 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à remplacer l'article 44 par ce qui suit:

« Art. 44. — Dans l'article 4 de la même annexe, les modifications suivantes sont apportées:

1º le point 7 est remplacé par ce qui suit:

« Les deux cantons d'Anderlecht, les six cantons de Bruxelles, le canton d'Ixelles, les cantons d'Etterbeek, de Jette, d'Auderghem, les deux cantons de Schaerbeek, les cantons de Saint-Gilles, de Molenbeek-Saint-Jean, de Saint-Josse-ten-Noode, de Woluwe-Saint-Pierre, d'Uccle et de Forest forment l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Capitale.

Les sièges des tribunaux de première instance, des tribunaux du travail et des tribunaux de commerce sont établis sur le territoire de la ville de Bruxelles. »;

2º il est inséré un point 7bis rédigé comme suit:

« Les cantons d'Asse, de Grimbergen, de Hal, de Herne-Leeuw-Saint-Pierre, de Kraainem-Rhode-Saint-Genèse, de Lennik, de Meise, d'Overijse-Zaventem et de Vilvorde forment l'arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde.

Le siège du tribunal de première instance, du tribunal du travail et du tribunal de commerce est établi à Hal. ». »

M. Laeremans renvoie à la justification écrite de l'amendement. Il précise qu'en vertu de cet amendement, le siège des nouveaux tribunaux est établi à Hal pour renforcer la présence flamande dans cette commune et pour empêcher que la francisation ne se poursuive, mais que les tribunaux siégeront aussi à Vilvorde.

L'amendement nº 50 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 44 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 44/1 (nouveau)

Amendement nº 51

M. Laeremans dépose l'amendement nº 51 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 44/1 rédigé comme suit:

« Art. 44/1. L'article 5 de la même annexe est remplacé par ce qui suit:

« Il y a une cour d'appel:

1º à Anvers, dont le ressort comprend la province d'Anvers;

2º à Bruxelles, dont le ressort comprend la Région de Bruxelles-Capitale; cette cour est subdivisée en une section néerlandophone et une section francophone;

3º à Gand, dont le ressort comprend les provinces de Flandre occidentale et de Flandre orientale;

4º à Louvain, dont le ressort comprend les provinces du Brabant flamand et du Limbourg;

5º à Liège, dont le ressort comprend les provinces de Liège, de Namur et de Luxembourg;

6º à Mons, dont le ressort comprend les provinces du Hainaut et du Brabant wallon. »

M. Laeremans renvoie à la justification écrite de l'amendement.

L'amendement nº 51 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 45

Cet article est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 46

Amendement nº 52

M. Laeremans dépose l'amendement nº 52 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à remplacer l'article 46 par ce qui suit:

« Art. 46. Dans l'article 2 de la même loi, remplacé par la loi du 23 septembre 1985, les modifications suivantes sont apportées:

1º dans le texte existant, qui devient le paragraphe 1er, les mots « ainsi que dans la province du Brabant flamand et devant les tribunaux néerlandophones de l'arrondissement de Bruxelles, » sont insérés après les mots « dans l'arrondissement de Louvain, »;

2º il est ajouté un paragraphe 2 rédigé comme suit:

« § 2. Pour les procédures de recours contre des jugements du juge de paix, la procédure devant le tribunal de première instance de Hal-Vilvorde est menée en français si la langue de la procédure en première instance était le français. ».

M. Laeremans renvoie à la justification écrite de l'amendement. Cet amendement s'inscrit dans le prolongement d'amendements précédents tendant à la scission complète de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

L'intervenant signale que l'amendement maintient le régime d'exception pour les communes à facilités en ce qui concerne la procédure d'appel contre les jugements rendus en français. Il est donc possible de réaliser une autre réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde sans toucher à ces droits acquis, et ce bien que M. Laeremans soit en principe opposé à ce régime d'exception pour les francophones dans les communes à facilités.

L'amendement nº 52 vise par conséquent à rendre l'arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde pleinement autonome, ne serait-ce qu'à titre transitoire. La solution la plus souhaitable est de faire correspondre l'arrondissement judiciaire à la répartition en provinces. M. Laeremans est ouvert à d'éventuels sous-amendements qui iraient dans ce sens.

L'amendement nº 52 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 46 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 47

Amendement nº 53

M. Laeremans dépose l'amendement nº 53 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 47.

Aujourd'hui, le juge dispose d'un large pouvoir d'appréciation pour décider dans quelle langue la procédure doit se dérouler. S'il estime que les parties maîtrisent suffisamment le néerlandais, il peut décider que la suite de la procédure se fera en néerlandais. Le projet de loi prive le juge de cette compétence et élargit les facilités pour les francophones, de manière qu'ils puissent exiger d'emblée que leur cause soit traitée en français. Le juge peut refuser de faire droit à cette demande si elle est contraire à la langue de la majorité des pièces pertinentes du dossier ou à la langue de la relation de travail. Cette limitation de la compétence discrétionnaire du juge est inacceptable. La question est d'ailleurs de savoir ce que l'on entend par « pièces pertinentes du dossier ».

M. Vanlouwe constate lui aussi que le pouvoir d'appréciation du juge en matière d'emploi des langues est bridé par la modification proposée de l'article 4 de la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. Cette restriction est opérée non seulement pour les six communes à facilités mais aussi pour les 19 communes de la Région de Bruxelles-Capitale. Selon l'article 47 du projet de loi, le juge peut uniquement refuser de faire droit à cette demande si elle est contraire à la langue de la majorité des pièces pertinentes du dossier ou à la langue de la relation de travail.

Le régime proposé est toutefois particulièrement confus et l'intervenant craint que nombre d'avocats ne soient tentés de faire du « shopping » entre les deux régimes linguistiques, par exemple en versant au dossier toutes sortes de pièces en fonction du régime linguistique visé. Un avocat francophone pourrait par exemple, en rédigeant toutes sortes de lettres, de sommations, de mises en demeure, etc., faire en sorte qu'un dossier essentiellement néerlandophone soit tout de même traité par un juge francophone. Cette façon de procéder sera plutôt une source de conflits qu'un moyen de les résoudre.

M. Vanlouwe se pose la même question que l'intervenant précédent: qu'entend-t-on par « pièces pertinentes du dossier » ? Une mise en demeure, une sommation ou une lettre constitue-t-elle une « pièce pertinente du dossier » ? Qu'en est-il par exemple de l'ajout de vingt preuves de paiement au dossier dont la convention litigieuse, qui a été rédigée dans l'autre langue, ne constitue qu'une pièce parmi d'autres ? Qui jugera du caractère « pertinent » des pièces du dossier: le juge ou les avocats concernés qui, dans la pratique, confectionnent le dossier et numérotent les pièces ?

Le juge peut aussi refuser de faire droit à la demande de changement de langue si elle est contraire à la langue de la relation de travail. S'agit-il en l'espèce du contrat de travail, du règlement de travail, des normes de sécurité, de la correspondance éventuelle ou de la langue parlée sur le lieu de travail ? La « langue de la relation de travail » ne fait en effet pas partie de la terminologie juridique existante et donnera lieu à des interprétations divergentes.

Selon M. Vanlouwe, un néerlandophone qui entame une procédure à Bruxelles a le droit de le faire en néerlandais mais le défendeur francophone a la possibilité de demander le changement de langue. Alors que cette question est aujourd'hui laissée à la discrétion du juge, le projet de loi prévoit que ce pouvoir d'appréciation sera limité et soumis à des conditions. Dans la pratique, cela entraînera une réduction considérable du nombre de procédures menées en néerlandais à Bruxelles. Les demandeurs néerlandophones en seront les victimes, et ce au profit des défendeurs francophones qui, eux, verront leurs facilités élargies.

M. Vanlouwe renvoie ensuite à l'article 4, § 2bis, alinéa 1er, proposé de la loi sur l'emploi des langues en matière judiciaire, qui dispose ce qui suit:

« Lorsque le défendeur est une autorité administrative, le juge peut refuser de faire droit à sa demande de renvoi vers le tribunal de l'autre rôle linguistique ou de changement de langue, si les éléments de la cause établissent qu'elle a une connaissance suffisante de la langue employée pour la rédaction de l'acte introductif d'instance. »

Il est toutefois permis de supposer que, dans la Région de Bruxelles-Capitale, l'autorité administrative concernée est bilingue puisqu'il s'agit d'une région bilingue. En l'occurrence, un renvoi vers un tribunal de l'autre rôle linguistique n'a aucun sens. Lorsque, par exemple, une personne subit un dommage en raison du mauvais état des routes dans l'une des 19 communes et que l'intéressé assigne cette commune en néerlandais pour demander réparation, l'intervenant ne voit pas pourquoi la commune en question introduirait une demande de renvoi vers le tribunal de l'autre rôle linguistique.

M. Anciaux estime que le § 2bis proposé donne précisément au juge la possibilité de refuser cette demande parce qu'il s'agit d'une commune située dans la région bilingue de Bruxelles-Capitale.

M. Vanlouwe réplique qu'il ne devrait pas être possible d'introduire une demande de renvoi vers le tribunal de l'autre rôle linguistique, puisque l'autorité administrative concernée est censée être bilingue. C'est pourtant ce que fait précisément le § 2bis proposé: on crée en l'occurrence la possibilité d'introduire une demande de renvoi vers le tribunal de l'autre rôle linguistique, puis on donne au juge l'occasion de rejeter cette demande.

M. Anciaux répond que les communes ne sont pas les seules autorités administratives présentes à Bruxelles.

M. Vanlouwe considère qu'aucune autorité administrative de la Région de Bruxelles-Capitale ne devrait pouvoir demander un changement de langue de la procédure, car ces autorités sont en principe des institutions bilingues.

Il aimerait également savoir quel régime s'applique aux personnes morales (sociétés, ASBL, associations de copropriétaires, etc.). Une société de la Région de Bruxelles-Capitale ou de la périphérie flamande qui est assignée peut-elle demander un changement de langue ?

M. Anciaux déclare que par pièces « pertinentes » du dossier, on entend les pièces qui sont déterminantes pour le dossier; il peut s'agir, par exemple, d'un contrat de bail ou d'un contrat de travail. Selon lui, il n'y a pas de différence dans le texte néerlandais entre les « pertinente dossierstukken » visés à l'article 47 et les « relevante dossierstukken » visés à l'article 49. Le texte français du projet de loi utilise d'ailleurs, dans les deux cas, l'adjectif « pertinentes ».

M. Deprez se rallie à cette interprétation.

M. Laeremans souligne que les contrats de bail ou de travail non conformes à la législation linguistique ne sont pas rares.

M. Anciaux signale qu'aucun droit ne peut naître de situations illégales. Le contrat de travail sera donc déterminant pour la langue de la relation de travail. Il reconnaît d'ailleurs qu'un avocat ne devrait pas pouvoir déterminer la langue de la procédure en versant des lettres de sommation au dossier. Cela vaut toutefois dans les deux sens: un avocat ne déterminera pas la langue de la procédure à partir de ses propres pièces. En ce qui concerne l'autorité administrative dans la périphérie flamande, un bourgmestre ne pourra pas demander le renvoi d'une affaire au rôle linguistique français. L'intervenant ne voit pas comment il pourrait en être autrement dans la Région de Bruxelles-Capitale, dès lors que les autorités administratives y sont officiellement bilingues.

M. Vanlouwe demande s'il peut en déduire que, dans la Région de Bruxelles-Capitale, une autorité administrative n'a pas la possibilité de demander un changement de langue. Il voudrait savoir clairement si, à l'avenir, un néerlandophone de Bruxelles peut avoir affaire à une autorité administrative qui demande un changement de langue.

M. Anciaux indique qu'une telle autorité peut certes le demander mais que le juge n'accèdera pas à sa demande.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, fait remarquer que l'article 47 est un article important qui transpose en texte de loi un volet de l'accord du 11 octobre 2011. Aussi souhaite-t-il prévenir autant que possible tout malentendu concernant cette disposition.

Le secrétaire d'État insiste sur le fait que les principes fondamentaux de la législation linguistique restent inchangés. Ceux-ci figurent à l'article 622 du Code judiciaire et aux articles 3 et 4 de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. Ces dispositions restent inchangées, sauf en ce qui concerne les règles du renvoi à l'autre rôle linguistique, visées à l'article 4. Cette modification est nécessaire parce que, dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, un tribunal bilingue est dédoublé en deux tribunaux unilingues. Comme les principes fondamentaux sont maintenus par ailleurs, la doctrine et la jurisprudence développées quant à l'application de cette réglementation restent applicables sans réserve.

Le secrétaire d'État renvoie pour le reste au commentaire relatif à cet article dans la proposition de loi initiale (doc. Chambre, nº 53-2140/001, pp. 21-22).

Il en vient ensuite aux questions concrètes qui lui ont été posées.

— Dans le texte néerlandais, les « pertinente stukken » sont en effet la même chose que les « relevante stukken » auxquelles il est fait référence à l'article 49. Le texte français ne laisse aucun doute à cet égard. Ce sont les pièces importantes d'un dossier, comme les pièces de procédure, la citation à comparaître ou la requête, par exemple.

— Pour ce qui est du risque de « shopping » juridique, le secrétaire d'État ne partage pas l'inquiétude de certains membres. Au fil des années s'est développée une jurisprudence qui est maintenant bien établie. Les huit partis de la majorité veulent empêcher tout abus de droit. Dans la pratique, Il est inconcevable que les parties préjugent d'un éventuel choix de langue sur la base d'une correspondance. Le secrétaire d'État souhaite que la justice puisse faire son travail. Il ne croit pas que des mises en demeure puissent ne pas satisfaire à la condition de pertinence.

— Concernant les relations de travail, le secrétaire d'État renvoie à l'arrêt nº 98/10 de la Cour constitutionnelle.

Dans cet arrêt, la Cour constitutionnelle a confirmé que la notion importante pour connaître la langue qui doit être utilisée, est bien la relation entre parties, à savoir le contrat de travail mais également la langue qui est utilisée entre les parties sur la base du contrat de travail et sur la base de la législation linguistique applicable dans le domaine social.

— La dernière question portait sur l'article 4, § 2bis, proposé, de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. Le secrétaire d'État indique qu'en fait, seules les règles en matière de renvoi ont été modifiées, ce qui nécessitait une adaptation du § 2. Il fallait donc insérer une nouvelle disposition concernant l'autorité administrative en tant que défendeur. C'est ce qui est fait au 3º de l'article 47. Cette disposition est cependant identique à celle qui figure dans le texte de la loi actuelle.

M. Vanlouwe constate que les changements seraient très peu nombreux d'après le secrétaire d'État. Il ne comprend dès lors pas pour quelle raison il faut insérer un § 2bis nouveau.

Le secrétaire d'État rappelle qu'il existait déjà par le passé une disposition relative à l'autorité administrative en tant que défendeur. En raison du dédoublement du tribunal de Bruxelles, les règles en matière de renvoi changent. Tel est l'objet du 2º de l'article 47 proposé. De ce fait, il n'y avait donc plus de disposition réglant la situation de l'autorité administrative en tant que défendeur. Il faut donc réinsérer cette disposition et c'est ce qui est fait au 3º de l'article 47.

M. Moureaux stipule qu'il était logique de confirmer cette règle pour éviter toute doute. Comme les autorités de la Région de Bruxelles-Capitale et ses communes sont légalement bilingues, il est tout à fait clair qu'elles ne peuvent pas demander le changement de langue en tant que défendeur. Si elles le demandent, le juge peut refuser cette demande si les éléments de la cause établissent qu'elle a une connaissance suffisante de la langue employée.

M. Vanlouwe constate que c'est une réponse claire. Une autorité administrative peut demander un changement de langue, mais le juge ne l'autorisera pas. Dans ce cas, pourquoi faut-il encore instaurer cette disposition ?

Le secrétaire d'État Verherstraeten renvoie à la jurisprudence existante: le juge peut, dans certains cas, accéder à cette demande. L'article ne modifie en rien la situation actuelle.

M. Laeremans suppose que dans les communes à facilités, on peut partir du principe que la législation linguistique relative aux entreprises doit être respectée et que les relations de travail se déroulent en néerlandais. Un habitant d'une commune à facilités ne peut dès lors pas invoquer un contrat de travail établi en français. L'intervenant demande confirmation du fait que la langue des relations de travail dans les communes à facilités est toujours le néerlandais.

Le secrétaire d'État répond qu'il va de soi que la législation applicable en la matière doit être appliquée et respectée.

M. Vanlouwe souhaite également obtenir une réponse à la question de savoir si des personnes morales peuvent demander un changement de langue.

Ensuite, il constate que le 2º de l'article 47 dispose que le juge statue sur-le-champ. Cette disposition figure également dans la législation actuelle, mais la possibilité de motivation du juge est à présent réduite. Dans sa motivation, il doit en effet tenir compte des pièces pertinentes du dossier et de la langue de la relation de travail. En outre, la possibilité d'interjeter appel est prévue. De plus, toutes les pièces ne sont pas disponibles à l'audience d'introduction. Qu'en est-il s'il peut être établi sur la base de pièces ultérieures qu'il existait éventuellement bel et bien des raisons d'autoriser un changement de langue ?

M. Laeremans a une question à poser concernant l'interprétation du 1º de l'article 47, qui complète l'article 4, § 1er, alinéa 3, de la loi du 15 juin 1935 par une nouvelle disposition.

L'article 4, § 1er, alinéa 1er, dispose: « Sauf dans les cas prévus à l'article 3, l'emploi des langues pour la procédure en matière contentieuse devant les juridictions de première instance dont le siège est établi dans l'arrondissement de Bruxelles (et, si la demande excède le montant fixé à l'article 590 du Code judiciaire, devant le tribunal de police de Bruxelles siégeant dans les matières visées à l'article 601bis du même Code) est réglé comme suit: (...) ».

L'alinéa 3 dispose que la procédure est poursuivie dans la langue employée pour la rédaction de l'acte introductif d'instance, à moins que le défendeur, avant toute défense et toute exception même d'incompétence, ne demande que la procédure soit poursuivie dans l'autre langue.

L'intervenant estime que l'article en question concerne les tribunaux de première instance, tandis que l'ajout proposé à l'alinéa 3 porte également sur les justices de paix et les tribunaux de police.

Pour ce qui est des personnes morales, M. Verherstraeten renvoie au principe général. On ne modifie rien, pas plus en ce qui concerne les personnes morales. Par ailleurs, aucune distinction n'est opérée entre les personnes morales et les personnes physiques.

En ce qui concerne les mots « sur-le-champ », le secrétaire d'État répond qu'ils figurent déjà dans le texte actuel, ainsi d'ailleurs que le mot « motivée ». Sur ce plan non plus, aucune modification n'est apportée, si ce n'est que la marge d'appréciation est modulée.

Le secrétaire d'État répète que le texte proposé ne modifie pas la procédure. La réforme à l'examen ne vise pas à remanier la législation linguistique ni l'application de celle-ci, bien au contraire.

En ce qui concerne la remarque technique de M. Laeremans, le secrétaire d'État renvoie à l'avis du Conseil d'État.

Les justices de paix font également partie des tribunaux de première instance. Une précision technique s'imposait, car il s'agit d'une mise en continuation de l'affaire dans le cas des justices de paix, mais d'un renvoi dans le cas des autres tribunaux.

M. Laeremans fait par ailleurs remarquer que l'article 4 de la loi du 15 juin 1935 fait mention des tribunaux de première instance dont le siège est établi dans l'arrondissement de Bruxelles. Cela vaut-il dès lors également pour les justices de paix des cantons de Hal-Vilvorde ? L'intervenant s'interroge également sur la pertinence des tribunaux de police, compétents à partir d'un certain montant.

Le secrétaire d'État répond que le champ d'application de l'article 4 reste le même. Il n'est pas étendu et reste limité aux dix-neuf communes de Bruxelles.

On ne touche donc pas à l'architecture de la législation linguistique. Il s'agit simplement de modifications techniques qui permettent le renvoi.

M. Vanlouwe ne comprend pas l'intérêt des dispositions à l'examen si l'on ne veut rien modifier. Il est superflu de confirmer et de répéter les dispositions existantes.

L'intervenant juge au contraire que l'on apporte de nombreuses modifications importantes. On prévoit ainsi une procédure de recours, alors qu'auparavant, il était uniquement possible d'introduire un pourvoi en cassation. Il s'agit d'une modification fondamentale.

L'intervenant se demande si l'on n'est pas en train d'essayer de faire passer certaines choses en douce et il est curieux de voir quelles seront les conséquences dans la pratique.

Le secrétaire d'État insiste à nouveau sur le fait qu'il est nécessaire de modifier la législation linguistique en raison du dédoublement des tribunaux à Bruxelles. Le droit de recours est, lui aussi, modifié. Pour le reste, rien ne change. On ne trouvera aucun fondement juridique étayant l'affirmation selon laquelle on vend chat en poche.

M. Vanlouwe réplique qu'il y a encore d'autres modifications, telles que la limitation du pouvoir d'appréciation du juge en ce qui concerne le refus de la demande de renvoi ou de changement de langue.

La procédure est modifiée par le fait que l'on introduit la possibilité d'un débat contradictoire sur le changement de langue, ce qui n'existait pas auparavant.

Le changement de langue est assoupli de manière déguisée.

Selon M. Moureaux, il s'impose d'insérer un paragraphe 2bis à l'article 4 de la loi du 15 juin 1935. En effet, on pourrait affirmer que le juge peut refuser de faire droit à la demande de renvoi ou de changement de langue, lorsque le défendeur est une autorité administrative ayant une connaissance suffisante de la langue de l'acte introductif. L'intervenant estime que le juge est même tenu d'opposer un refus dans ce cas, dès lors que l'autorité administrative à Bruxelles est légalement réputée bilingue. Ce principe est également applicable à l'heure actuelle.

M. Laeremans partage l'avis de M. Vanlouwe et pense aussi que le texte à l'examen modifie la législation linguistique en profondeur. La nouvelle procédure donnera lieu à un grand nombre de conflits et drainera des affaires, y compris des affaires pénales, vers Bruxelles.

L'intervenant renvoie aussi à la problématique de la comparution volontaire grâce à laquelle on pourra, à Hal-Vilvorde, s'adresser sur-le-champ et directement au tribunal francophone. Les effets de ce changement fondamental sont fortement sous-estimés.

L'intervenant souhaite encore que l'on précise le champ d'application de l'article 4. S'étend-il aussi aux justices de paix situées en dehors des communes qui ont un statut linguistique spécial ? Peut-on également y demander de poursuivre la procédure en français ou de renvoyer l'affaire au tribunal bruxellois ?

Le secrétaire d'État répond que le champ d'application n'est pas modifié. L'article 7bis est maintenu.

Enfin, M. Laeremans met l'accent sur l'intention qui est exprimée dans l'accord Papillon, à savoir l'extension au pays tout entier de la possibilité à l'examen, pour un défendeur dans une commune à facilités, de demander un changement de langue. Il a été précisé qu'un groupe de travail serait créé pour examiner cette possibilité. Où en est-on à ce sujet ?

Le secrétaire d'État renvoie au libellé de l'accord précité et répond que l'on n'a pas encore effectué de véritables travaux à cet égard. Le groupe de travail ne s'est pas encore réuni à ce jour.

L'amendement nº 53 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 47 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 48

Amendement nº 54

M. Laeremans dépose l'amendement nº 54 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à abroger l'article 5 de la loi du 15 juin 1935.

Cet amendement permet de supprimer la distinction arbitraire entre le traitement, par les tribunaux de police de Hal et de Vilvorde, des affaires de roulage portant sur une somme inférieure à 1 860 euros et des dossiers dépassant ce montant. Il n'est plus possible de procéder à un renvoi du volet civil d'affaires de roulage à un tribunal francophone de Bruxelles, à la demande d'un défendeur ne maîtrisant pas le néerlandais. Cette possibilité est toutefois maintenue lorsque toutes les parties acceptent ce transfert ou lorsque le défendeur est domicilié dans une commune à facilités.

Le secrétaire d'État se réfère au commentaire initial concernant cet article, qui vise à apporter des précisions purement techniques au sujet du renvoi de la cause des tribunaux de police de Hal-Vilvorde aux tribunaux de police francophones de Bruxelles.

L'amendement nº 54 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 48 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 49

Amendement nº 55

M. Laeremans dépose l'amendement nº 55 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 49.

L'article 49 proposé prévoit une extension considérable des facilités dans les six communes périphériques et une réduction trop radicale du pouvoir du juge de refuser le changement de langue. L'auteur de l'amendement souhaite maintenir la réglementation actuelle et le pouvoir discrétionnaire plus étendu du juge.

L'amendement nº 55 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 49 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 49/1 (nouveau)

Amendement nº 56

M. Laeremans dépose l'amendement nº 56 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à insérer un article 49/1 en vue de compléter l'article 12 de la loi du 15 juin 1935 par un alinéa 2, rédigé comme suit:

« Les officiers du ministère public de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Capitale, pour leurs actes de poursuite et d'instruction, font usage de la langue française si l'inculpé est domicilié dans la région de langue française, de la langue néerlandaise si l'inculpé est domicilié dans la région de langue néerlandaise, de la langue française ou néerlandaise si l'inculpé est domicilié dans l'arrondissement de Bruxelles-Capitale, selon que pour ses déclarations, il a fait usage de l'une ou de l'autre de ces langues dans le cadre de l'instruction ou, à défaut, de l'information. Dans tous les autres cas, il sera fait usage, selon les nécessités de l'affaire, de la langue française ou néerlandaise. »

Pour de plus amples explications, il est renvoyé à la justification écrite de l'amendement.

L'amendement nº 56 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 50

Amendement nº 57

M. Laeremans dépose l'amendement nº 57 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 50.

Les modifications proposées par cet article auraient pour conséquence que la cause serait renvoyée à la juridiction de même ordre la plus proche située dans une autre région linguistique ou à la juridiction de même ordre d'une autre région linguistique désignée par le choix commun des parties. Cette réglementation serait applicable dans l'ensemble du pays et donnerait en outre la possibilité à une personne de demander, par exemple, que la cause soit renvoyée à la juridiction du lieu de sa seconde résidence. Les parties disposeraient ainsi d'une très grande latitude pour demander le changement de langue. À terme, ce dernier sera la règle, et non l'exception.

L'auteur de l'amendement est farouchement opposé à l'assouplissement des règles relatives au changement de langue. Ce régime implique le maintien du droit unitaire belge dans l'ensemble du pays et entrave la mise en place d'une justice flamande autonome.

M. Vanlouwe renvoie au 2º de cet article. Il y est précisé que l'acceptation de la demande de changement de langue est faite soit à l'audience d'introduction, soit au moyen d'un écrit adressé au greffe, dès réception de la signification ou de la notification de l'acte introductif d'instance et au plus tard huit jours avant l'audience d'introduction. Pour cette deuxième possibilité, on prévoit donc un délai. En quoi ce délai est-il utile puisqu'il sera encore possible, à son expiration, d'introduire la demande à l'audience d'introduction ? Pourquoi ne précise-t-on pas simplement que la demande doit être introduite « au plus tard à l'audience d'introduction » ?

En outre, le délai proposé n'est pas conforme au délai de citation habituel. En effet, si l'on est cité à comparaître ou si l'on reçoit une requête, il faut un délai de huit jours entre la citation ou la requête et le moment de la comparution.

Une deuxième réflexion concerne le 3º. Dans le § 2 proposé, il est précisé que le juge rend une ordonnance dans les quinze jours de l'introduction de la demande. À défaut d'ordonnance dans ce délai, l'absence de décision vaut renvoi ou acceptation du changement de langue. Il s'agit d'une nouveauté fondamentale. On applique en l'espèce le principe « qui ne dit mot consent », ce qui est contraire aux règles de bonne administration et à l'intérêt de la sécurité juridique. Il serait préférable de dire que l'absence d'ordonnance dans ce délai équivaut à un rejet de la demande. L'intervenant indique qu'il existe une règle identique pour la demande de permis de bâtir, par exemple. Le texte à l'examen implique en clair qu'à défaut d'ordonnance, la demande sera acceptée. C'est une procédure sans précédent. L'intervenant craint que cela n'ait pour effet d'inciter les juges qui sont surchargés de travail à ne plus rendre d'ordonnances sur des demandes de changement de langue. En effet, le dossier sera ainsi renvoyé à un autre juge. L'intervenant veut que les juges soient actifs et suivent leurs dossiers de près. En l'occurrence, on opte pour la solution de facilité.

Enfin, l'intervenant a encore une question technique à poser. On instaure en l'espèce toutes sortes de délais, ce qui risque, dans des dossiers simples, de donner lieu à des discussions sur le changement de langue. On permet en effet un débat contradictoire sur le changement de langue à l'audience d'introduction. À cause du délai supplémentaire de quinze jours imparti au juge pour rendre son ordonnance, une affaire simple risque d'être renvoyée aux calendes grecques sans discussion sur le fond.

M. Laeremans s'interroge également sur le délai de huit jours qui ne correspond pas au délai de citation. Qu'adviendra-t-il si, au terme de ce délai, des demandes de changement de langue sont encore introduites, par exemple sur requête conjointe des parties ? L'affaire devra-t-elle alors être remise ?

Quelles sont les conséquences de cette réglementation pour la suite du dossier ? Le paragraphe 2 précise notamment que le juge ordonne d'office le renvoi nonobstant les règles de compétence territoriale. Que se passera-t-il, par exemple, si le juge de paix de Neufchâteau prend une décision concernant un bien immobilier situé à Ostende ? Quelle en sera la conséquence pour l'exécution du jugement ? L'huissier notifiera-t-il et exécutera-t-il le jugement en français à Ostende ? Le jugement devra-t-il être traduit en néerlandais ? L'OVB (Orde van Vlaamse Balies) avait formulé de nombreuses remarques sur ce point.

Le secrétaire d'État précise que la nouvelle procédure ne modifie en rien les possibilités existantes de changement de langue opéré de commun accord devant les tribunaux unilingues situés en dehors de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, ni les possibilités de changement de langue opéré de commun accord devant les tribunaux néerlandophones de Bruxelles en raison d'un critère de rattachement territorial.

En ce qui concerne les procédures pendantes à Bruxelles, les défendeurs bénéficiaient déjà de la faculté de demander le changement de langue. La seule nouveauté réside dans le fait que le juge ne pourra plus refuser ce changement de langue si le demandeur marque son accord sur la demande formulée par le défendeur. Le secrétaire d'État met l'accent sur l'accord unanime des parties en la matière.

Quant à l'article 50, 2º, le secrétaire d'État confirme bel et bien l'existence de deux possibilités pour l'acceptation du changement de langue: soit à l'audience d'introduction, soit au moyen d'un écrit adressé au greffe au plus tard 8 jours avant l'audience d'introduction.

L'article 50, 3º, du projet prévoit en outre une procédure simplifiée par laquelle les parties introduisent de commun accord une demande écrite et conjointe de changement de langue auprès du greffe de la juridiction concernée. Dans ce cas, le juge rend une ordonnance dans les 15 jours de l'introduction de ladite demande.

En ce qui concerne l'exécution des décisions judiciaires, l'intervenant précise encore que le projet ne modifie en rien la situation actuelle. Dès lors, une traduction légale devra être jointe au jugement en cas de signification dans une région d'un autre régime linguistique, conformément à l'article 38 de la loi sur l'emploi des langues en matière judiciaire. Il peut y être dérogé si la partie à laquelle la signification doit être faite a choisi ou accepté pour la procédure la langue dans laquelle l'acte, le jugement ou l'arrêt est rédigé.

L'amendement nº 57 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 50 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 51

Amendement nº 58

M. Laeremans dépose l'amendement nº 58 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 51.

L'intervenant conteste l'assouplissement des règles prévues en faveur des francophones devant les justices de paix de Kraainem, Rhode-Saint-Genèse et Meise. En matière de demande de changement de langue, il ne peut être question de limiter le pouvoir d'appréciation des juges de paix desdits cantons à l'examen des seules pièces pertinentes du dossier ou à la langue de la relation de travail. Par ailleurs, il est question, dans la version néerlandaise du projet, tantôt du terme « pertinente » tantôt du terme « relevante ». Il faudrait harmoniser la terminologie.

Sous réserve d'un accord entre les greffiers des deux assemblées, le secrétaire d'État marque son accord sur l'utilisation du terme « pertinente », ce qui doit être considéré comme une correction technique. Ce sont des synonymes.

L'amendement nº 58 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 51 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 52

Amendement nº 59

M. Laeremans dépose l'amendement nº 59 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui tend à supprimer l'article 52.

À nouveau, l'intervenant estime que l'assouplissement des règles procédurales relatives au changement de langue est trop favorable aux francophones. Il souligne le fait qu'à l'heure actuelle, des parties qui sont domiciliées à Dilbeek par exemple ne peuvent de commun accord introduire leur action en langue française devant le tribunal de première instance de Bruxelles. À suivre la logique des auteurs du projet, la seule différence qui subsistera encore entre les tribunaux francophones et néerlandophones résidera dans l'utilisation de la langue de la citation. Il ne peut être question de considérer Hal-Vilvorde comme un territoire bilingue.

L'amendement nº 59 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 52 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 53

Amendement nº 60

M. Laeremans dépose l'amendement nº 60 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à prévoir, dans la logique du système prôné par l'intervenant, le néerlandais comme langue de la procédure devant les tribunaux de police de Hal-Vilvorde. Toutefois, une exception est maintenue pour le prévenu qui est domicilié dans une des six communes à facilités.

L'amendement nº 60 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 53 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 53/1 (nouveau)

Amendement nº 61

M. Laeremans dépose l'amendement nº 61 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à insérer un article 53/1 (nouveau) qui prévoit, dans l'arrondissement de Bruxelles, la compétence des tribunaux de police et correctionnels néerlandophones et francophones en fonction du lieu où le prévenu a son domicile. Si ce dernier ne comprend aucune des deux langues, il sera fait appel à un interprète.

L'amendement nº 61 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 53/2 (nouveau)

Amendement nº 62

M. Laeremans dépose l'amendement nº 62 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à insérer un article 53/2 (nouveau) afin de déterminer la langue de la procédure applicable devant les tribunaux d'application des peines et ce en tenant compte de la création d'une cour d'appel à Louvain et de deux tribunaux d'application des peines distincts à Bruxelles.

L'amendement nº 62 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 54

Cet article est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 55

M. Vanlouwe relève qu'il sera désormais possible d'interjeter appel d'une décision judiciaire statuant sur une demande de changement de langue. Or, à ce jour, seul un pourvoi en cassation est possible.

Il souhaite des précisions quant au nombre de pourvois en cassation interjetés dans cette matière car cela permettrait de juger de l'opportunité d'instaurer ou non une voie de recours supplémentaire.

En outre, quelle sera la procédure applicable devant les tribunaux d'arrondissement ? Sera-t-elle contradictoire ? Les avocats pourront-ils déposer des conclusions ?

Il s'étonne par ailleurs que le texte prévoit la possibilité d'introduire ce recours par télécopie mais pas par voie électronique. La télécopie est un mode de communication qui est aujourd'hui totalement dépassé.

Le texte prévoit expressément que les procédures d'opposition et d'appel sont exclues. Pour l'orateur, il est évident que la procédure d'appel est exclue puisque la décision contestée est déjà rendue en degré d'appel. Le texte doit donc en tout état de cause être modifié sur ce point. Par contre, le texte est muet quant à la possibilité de former un pourvoi en cassation.

Enfin, dans la mesure où une procédure « comme en référé » est prévue, l'intervenant s'interroge quant à l'application du délai raccourci de deux jours prévu par le droit commun.

Le secrétaire d'État confirme l'application de l'article 1035, alinéa 2, du Code judiciaire selon lequel « le délai de citation est au moins de deux jours ». La procédure sera celle prévue par le présent article 55. Il avait d'ailleurs déjà été répondu dans ce sens suite à une remarque similaire du Conseil d'État.

En ce qui concerne la possibilité d'un recours par voie électronique, il rappelle que la loi du 10 juillet 2006 relative à la procédure par voie électronique n'est toujours pas entrée en vigueur, ce qui empêche l'utilisation de cette voie.

Pour le surplus, l'intervenant précise qu'il ne dispose pas de données chiffrées quant au nombre de pourvois en cassation formés à l'encontre de décisions relatives aux demandes de changement de langue. Il confirme que le pourvoi en cassation reste toujours possible.

L'article 55 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 56

Amendement nº 63

M. Laeremans dépose l'amendement nº 63 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à supprimer l'article 56.

L'intervenant plaide pour une scission complète de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles en deux arrondissements judiciaires distincts (Hal-Vilvorde et Bruxelles). Il ne se satisfait pas de la création d'un arrondissement administratif de Hal-Vilvorde.

L'amendement nº 63 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 56 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 57

Amendement nº 2

MM. Vanlouwe et Boogaerts déposent l'amendement nº 2 (subsidiaire à l'amendement nº 1) (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à imposer la mesure de la charge de travail comme seul instrument pour la fixation des cadres et cadres linguistiques des tribunaux néerlandophones et francophones. Il convient en outre d'obliger les parties prenantes à accepter les résultats de cette mesure de la charge de travail, ce qui n'est pas prévu dans le texte actuel.

L'intervenant renvoie à la justification de son amendement.

M. Vanlouwe fait remarquer que la présence de milliers de navetteurs venu de Flandres ou de Wallonie a des conséquences importantes sur la charge de travail des juridictions de Bruxelles.

Pourquoi partir d'une répartition arbitraire que l'on va ensuite adapter en fonction des résultats de l'étude sur la charge de travail ? On peut d'ailleurs douter de l'utilité de cette étude puisque la mesure de la charge de travail ne peut avoir pour conséquence de réduire le nombre de magistrats dans l'un ou l'autre groupe linguistique. L'intervenant pense qu'il serait préférable de procéder immédiatement à la mesure de la charge de travail et de fixer ensuite, sur la base de résultats objectifs et mesurables, les cadres linguistiques.

Amendement nº 64

M. Laeremans dépose l'amendement nº 64 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à remplacer l'article 57.

L'amendement s'inscrit dans la ligne de la scission verticale de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde défendue par le groupe de l'auteur. M. Laeremans relève que l'article 57 est très controversé car il vise à réaliser une forme « d'épuration linguistique » des juridictions bruxelloises dont de très nombreux néerlandophones seront poussés vers la sortie sur la base de chiffres inexacts.

Dans son avis du 30 mai 2012, le Conseil supérieur de la Justice cite d'autres chiffres qui n'ont pas été contredits. Le CSJ, qui s'est basé sur le nombre de nouvelles affaires (flux entrant), tant civiles que correctionnelles, constate que le pourcentage d'affaires en néerlandais pour le tribunal de première instance de Bruxelles s'élevait à 31,83 % en 2009, 31,43 % en 2010 et 32,27 % en 2011 (voir avis SCJ, p. 16). L'intervenant pense que ces chiffres confirment que la répartition 1/3 — 2/3 qui est appliquée actuellement pour le tribunal de première instance de Bruxelles correspond à la réalité du terrain.

M. Laeremans en déduit que la répartition de 80 % F et 20 % N retenue dans le projet de loi, même si elle est assouplie par la mesure transitoire prévoyant temporairement un minimum de 27 % de magistrats néerlandophones, n'est basée sur aucune justification objective. Au contraire, le fait de prévoir un pourcentage de 27 % durant une période transitoire montre que la répartition 80/20 ne correspond pas à la réalité. L'intervenant plaide par conséquent pour une adaptation de cette clé de répartition.

De nombreux avocats et magistrats ont d'ailleurs plaidé en ce sens et mettent en garde contre les difficultés qu'engendrera la nouvelle clé de répartition. Les justiciables néerlandophones seront fortement pénalisés par cette mesure qui ne manquera pas d'occasionner de l'arriéré judiciaire.

M. Laeremans ne comprend pas pourquoi il pourra être procédé, dès la publication de la nouvelle loi, aux recrutements nécessaires sur la base d'une clé de répartition « provisoire ». Cela aboutira à des engagements massifs de magistrats et de membres du personnel judiciaire francophones. L'orateur renvoie au tableau communiqué par le gouvernement (voir document en annexe). Ce ne sont pas moins de 50 nouveaux postes de magistrats francophones qui seront créés dans l'hypothèse où les cadres sont remplis à 100 % et ce, sans la moindre justification objective. L'intervenant demande quelles seront les conséquences budgétaires de ces engagements massifs.

Une évolution comparable est prévue pour le personnel des greffes et des parquets où des engagements massifs seront également effectués.

M. Vanlouwe souligne que la réforme à l'examen est une bonne nouvelle pour les francophones puisque l'on procèdera, au total, au recrutement de 272 personnes (magistrats, secrétaires de parquets, greffiers, personnel des greffes) côté francophone. Par contre, pour les néerlandophones, c'est une très mauvaise nouvelle. En effet, pas moins de 330 personnes se retrouveront en surnombre lorsque la nouvelle répartition 80/20 sera appliquée !

M. Moureaux s'étonne que ceux qui se plaignent le plus que la justice à Bruxelles ne peut être rendue assez rapidement et que les délinquants profitent de cette situation sont également ceux qui s'opposent à ce que l'on procède aujourd'hui à un rééquilibrage qui devrait permettre de juger plus rapidement et plus efficacement à Bruxelles. L'intervenant ne peut accepter un tel double discours.

M. Laeremans ne comprend pas pourquoi il faut procéder au recrutement immédiat de magistrats francophones et placer des magistrats néerlandophones en surnombre dans des juridictions qui fonctionnent sans problèmes. Les magistrats francophones sont-ils meilleurs que leurs homologues néerlandophones ? L'intervenant ne peut se défaire de l'idée que cette réforme vise à assurer une forme d'épuration en éliminant un grand nombre de néerlandophones des juridictions bruxelloises.

Comment va-t-on procéder au recrutement du nouveau personnel francophone ? La mesure proposée est par ailleurs très onéreuse puisque l'on va gaspiller des moyens en engageant de nouveaux membres du personnel francophones alors qu'au même moment leurs collègues néerlandophones seront en surnombre. C'est un gaspillage de moyens au moment où le département de la justice se voit contraint de réaliser des économies qui pèsent sur son bon fonctionnement. L'intervenant pense par exemple aux économies faites dans le département des maisons de justice où l'on réduit les moyens alloués à l'accompagnement judiciaire et à la surveillance des auteurs d'infractions.

M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux réformes institutionnelles, renvoie aux échanges de vues lors de la discussion générale. Les modifications proposées à l'article 57 y ont été largement débattues.

L'intervenant pense que ceux qui critiquent le projet à l'examen perdent de vue que l'article 152 de la Constitution prévoit que les magistrats sont nommés à vie et que leur déplacement ne peut avoir lieu que par une nomination nouvelle et de leur consentement.

Pour ce qui concerne le personnel des greffes et des parquets, le point de départ de la réforme est que personne ne sera licencié. La mobilité sera encouragée sur une base volontaire, sauf pour les places vacantes ou à pourvoir en fonction des besoins du service lorsque ces places permettent aux intéressés de se rapprocher de leur domicile. Le secrétaire d'État illustre son propos par l'exemple suivant: une personne qui serait domiciliée dans le Limbourg et qui travaillerait à Bruxelles ne sera pas obligée d'accepter un poste dans une juridiction à Bruges.

En réponse aux différents chiffres cités par les intervenants précédents, M. Verherstraeten souligne que ceux-ci se sont basés sur les cadres provisoires prévoyant une répartition « 80/20 », sans tenir compte de la règle transitoire des 27 % de magistrats néerlandophones. L'intervenant précise que cette règle des 27 % sera applicable à tous les tribunaux de Bruxelles et qu'il faut en tenir compte pour calculer le nombre de magistrats en surnombre. Par ailleurs, une mobilité maximale du parquet de Bruxelles vers le parquet d'Hal-Vilvorde sera encouragée. Ce sont pas moins de 81 collaborateurs administratifs et 24 magistrats de parquets qui sont prévus au cadre du parquet de Hal-Vilvorde. L'auditorat se composera de onze collaborateurs administratifs et quatre auditeurs. Il est évident qu'un grand nombre de personnes travaillant actuellement à Bruxelles iront travailler au nouveau parquet de Hal-Vilvorde. Les données avancées quant aux personnes en surnombre doivent par conséquent être nuancées.

L'orateur souligne par ailleurs que même si l'intégralité des membres néerlandophones du parquet et de l'auditorat du travail de Bruxelles va travailler à Hal-Vilvorde, il faudra encore procéder au recrutement de six substituts et deux auditeurs du travail pour compléter les cadres.

Pour apprécier le surnombre dans les greffes, il faut tenir compte du fait que le personnel administratif néerlandophone bilingue pourra occuper des places francophones aussi longtemps que ces postes ne sont pas pourvus par des candidats francophone bilingues.

M. Verherstraeten rappelle également qu'un monitoring de l'exécution des dispositions de la loi relatives aux cadres, en ce qui concerne le remplissage effectif de ceux-ci et l'évolution de l'arriéré judiciaire, est prévu dans l'attente de la mesure de la charge de travail.

L'orateur note que les critiques exprimées au cours de la discussion générale visaient principalement la clé de répartition pour le siège. Aucun sénateur du groupe linguistique néerlandais n'a par contre remis en cause la clé de répartition pour le parquet de Bruxelles, pas plus qu'il n'y a eu de critiques vis-à-vis des cadres pour les tribunaux de commerce ou de police.

Pour ce qui concerne les juridictions du travail, les chiffres disponibles confirment la règle transitoire des 27 % qui s'appliquera lors de l'entrée en vigueur du nouveau régime.

Cela aura certainement des conséquences budgétaires à partir de 2013. Pour le surplus, le secrétaire d'État rappelle la création du comité de monitoring et de la task force, ainsi que la possibilité d'ajouter des magistrats dans l'hypothèse où l'arriéré judiciaire se creuserait davantage.

De la discussion générale, le secrétaire d'État retient que la critique s'est surtout focalisée sur le siège et pas sur le parquet. S'agissant du parquet de Bruxelles, l'intervenant a l'impression que, dans le camp néerlandophone, on était satisfait de la clé de répartition obtenue. L'on a aussi reconnu au cours de la discussion générale que les cadres provisoires, tels qu'ils ont été fixés pour les tribunaux de commerce et les tribunaux de police, ne donnent lieu à aucune controverse. De plus, les chiffres arrêtés pour les tribunaux du travail sont conformes au plancher de 27 % retenu dans le projet de loi.

En réponse aux questions et observations relatives à la mesure de la charge de travail, le secrétaire d'État déclare qu'une mesure de la charge de travail est objective par définition. L'intervenant confirme la déclaration qu'il a faite à ce sujet en commission de la Chambre (voir le rapport fait au nom de la commission de Révision de la Constitution et de la Réforme des institutions par MM. Renaat Landuyt et Christian Brotcorne, doc. Chambre, nº 53-2140/5, p. 122 et suivantes).

L'intervenant poursuit en rappelant que les négociateurs de l'Accord institutionnel pour la Sixième Réforme de l'État ont utilisé le terme « notamment » qui a suscité un certain émoi sur le terrain. Le Conseil d'État a, lui aussi formuler des observations à ce sujet. Voilà pourquoi ce mot a été omis dans les textes en projet. Ce que les négociateurs voulaient dire, c'est que les données sociales, démographiques et économiques pouvaient jouer un rôle. Ce qui compte, c'est que l'on se base exclusivement sur une connaissance objective des besoins réels.

Le secrétaire d'État se réfère ensuite au courrier de M. Lode De Witte, gouverneur du Brabant flamand, dont tous les membres ont eu connaissance. Dans ce courrier relatif au parquet de Hal-Vilvorde, le gouverneur attire l'attention sur les chiffres de la population, l'activité économique et le plancher fixé par la loi.

L'intervenant souhaite également souligner les éléments suivants, qui ont déjà été mis en avant en commission de la Chambre: les cadres définitifs seront arrêtés sur la base d'une mesure de la charge de travail qui sera clôturée au plus tard le 1er juin 2014. Les cadres définitifs seront ensuite arrêtés sur la base des besoins réels, mesurés à partir de données chiffrées objectives. En cas d'accroissement de l'arriéré judiciaire, des mesures correctives seront immédiatement prises. D'où la création du comité de monitoring qui sera convoqué par le ministre de la Justice.

Selon le secrétaire d'État, les conséquences budgétaires de l'opération ne sont pas encore calculables à 100 %, mais il y aura en effet un surcoût à partir de l'exercice budgétaire 2013. Une fois que les dispositions légales seront entrées en vigueur, le gouvernement s'acquittera de sa tâche et dégagera les moyens supplémentaires nécessaires au profit d'une justice plus efficace et plus rapide à Bruxelles.

M. Vanlouwe réplique qu'il a déjà entendu à plusieurs reprises la même réponse du secrétaire d'État. Il ne peut que constater que les textes à l'examen soient interprétés d'une manière radicalement différente par les acteurs de terrain. La vision de ces derniers diverge considérablement de celle du secrétaire d'État. L'intervenant déplore dès lors que la commission ne se soit pas donné la peine d'entendre les magistrats et d'autres acteurs de terrain essentiels. M. Vanlouwe rappelle ensuite le point de vue de plusieurs de ces personnes, dont M. Lode De Witte, gouverneur du Brabant flamand, qui a déclaré: « Nous devons tenir debout sur nos jambes, mais on ne nous donne que les trois quarts de chaque jambe ». Les déclarations, déjà citées précédemment, de Mme Gaby Van den Bossche concernant les tribunaux et les auditorats du travail sont également connues. L'intervenant rappelle encore une fois les déclarations de M. Fernand Keuleneer, avocat éminent et membre honoraire du Conseil de l'Ordre des avocats, qui a dit: « La mesure de la charge de travail est redéfinie d'une manière telle que ce n'est plus une mesure de la charge de travail. L'arbitraire règne donc en maître. » C'est donc une bonne nouvelle pour les francophones, puisque l'on va engager des francophones en plus, et une mauvaise nouvelle pour les magistrats et les justiciables néerlandophones, car une partie passablement importante des magistrats néerlandophones en surnombre devra être mutée. Ce seraient au total 330 magistrats, membres du personnel du greffe, ... qui devront être transférés de Bruxelles vers d'autres arrondissements judiciaires. Cette opération provoquera un arriéré judiciaire supplémentaire pour les dossiers néerlandophones à Bruxelles. En revanche, l'arriéré judiciaire dans les dossiers francophones diminuera grâce aux engagements supplémentaires.

M. Laeremans constate que, bien que le mot « notamment » auquel le secrétaire d'État a fait référence, ait effectivement disparu des textes, il a subsisté sur le plan des idées. Le critère « démographie » continuera à être pris en compte, alors qu'il ne devrait pas l'être.

À la déclaration du secrétaire d'État selon laquelle les conséquences de l'opération pour les parquets sont été accueillies favorablement par la plupart des intéressés, M. Laeremans réplique qu'il a appris dans l'intervalle qu'au moins 65 membres du personnel des parquets seront en surnombre et devront être mutés, pour la seule et unique raison qu'ils sont néerlandophones. Pour l'intervenant, il s'agit d'une épuration sur une base linguistique, voire d'une épuration ethnique. Surtout quand on sait que ces magistrats néerlandophones pourraient parfaitement fonctionner au sein d'un parquet bilingue de Bruxelles correctement pourvu.

M. Delpérée déclare ne pas pouvoir admettre qu'un membre, qui fait partie d'une institution parlementaire comme le Sénat, utilise des notions comme celle d'épuration ethnique. C'est inqualifiable et indécent.

M. Laeremans attire l'attention sur le fait que l'article 57 constitue le cœur de tout le projet.

En ce qui concerne la mesure de la charge de travail, l'intervenant se réjouit que les mots « entre autres » aient été supprimés, comme l'avait suggéré le Conseil d'État. Selon lui, la mesure de la charge de travail ne peut pas s'appuyer sur des éléments subjectifs ou des éléments qui n'ont rien à voir avec le volume de travail de la Justice. L'intervenant a lu dans le rapport de la commission de la Chambre (doc. Chambre, nº 53-2140/5) ce que l'on entendait par « entre autres ». Il y était question, par exemple, de données démographiques. Ces mots ayant été supprimés, il n'est plus pertinent non plus de savoir ce que l'on entendait par là. Les données démographiques sont dès lors un paramètre qui ne peut pas intervenir dans la mesure de la charge de travail. La seule chose qui doit compter, c'est la charge de travail proprement dite, même si celle-ci dépend parfois de facteurs démographiques. Les cadres doivent être établis sur la base de facteurs clairs, objectifs et mesurables. L'intervenant s'inquiète néanmoins de savoir si la mesure de la charge de travail sera effectuée correctement. Selon lui, elle peut être effectuée à très court terme, sans peut-être qu'il soit nécessaire d'arrêter des clés de répartition à l'avance. Elle peut être menée sur la base de rapports annuels existants et d'entretiens avec des magistrats et des avocats.

L'intervenant voit le parquet de Hal-Vilvorde comme une subdivision du parquet de Bruxelles et ne considère pas les personnes qui y travailleront comme étant en surnombre. Même si l'on travaillera dans deux langues, il s'agit d'un seul et même territoire, et il n'est pas question de surnombre. Les personnes qui seront employées à Hal-Vilvorde viendront de Bruxelles et l'intervenant ne les considère pas comme étant en surnombre.

Si l'on compte le nombre de néerlandophones qui seront considérés comme étant en surnombre (23 magistrats, 79,5 membres du personnel près le tribunal de première instance, 29 près le tribunal du travail, 12,5 près le tribunal de commerce et près le tribunal de police et 65 au parquet), on constate qu'il y aura au total 209 personnes, ce qui est énorme. L'intervenant trouve cela absurde: au parquet, par exemple, 65 personnes seront considérées comme étant en surnombre, alors qu'elles pourraient tout à fait continuer de fonctionner dans le nouveau parquet bruxellois bilingue. Pourquoi instaure-t-on immédiatement une proportion de 20/80 pour le personnel du parquet bilingue ?

Sur les quelque 400 membres du personnel du parquet, seuls 11,3 % disposent d'un certificat de bilinguisme. On aurait pu y imposer depuis longtemps des exigences linguistiques. On parle d'y instaurer aussi à l'avenir la règle d'un tiers.

65 membres du personnel expérimentés sont disponibles, qui, s'ils ne disposent peut-être pas d'un certificat de bilinguisme, ont néanmoins démontré qu'ils pouvaient traiter des dossiers établis dans une autre langue. La majorité des Flamands qui travaillent au parquet bruxellois sont probablement suffisamment bilingues pour pouvoir y fonctionner, puisqu'ils le font déjà. Il est quand même absurde de considérer ces personnes comme étant en surnombre au motif qu'elles sont flamandes et titulaires d'un diplôme établi en néerlandais, alors qu'on parle, dans le même temps, d'engager 39 magistrats de parquet francophones et 14 autres membres du personnel francophones. Pourquoi faut-il instaurer le rapport 20/80 au sein du parquet bilingue, alors qu'il n'existe pas de subdivision néerlandais-français ?

L'intervenant comprend comment cela est appliqué au sein des tribunaux, même s'il estime que, là non plus, on ne travaille pas de manière cohérente et que l'on ne fait pas suffisamment d'efforts pour engager les néerlandophones des greffes actuels. Par contre, la logique lui échappe totalement pour ce qui est du parquet. Ne peut-on pas prévoir d'autres proportions pour le parquet ? En analysant le régime proposé, l'intervenant comprend que l'on veut chasser les Flamands du parquet. En d'autres termes, il s'agit d'une épuration.

M. Delperée rappelle un principe fondamental qui implique que l'on n'insulte pas les personnes et que l'on ne déplace pas les personnes. Pour l'intervenant, en utilisant le mot d'épuration ethnique, M. Laeremans insulte les Libanais, les Yougoslaves etc.

M. Laeremans reste d'avis qu'il s'agit d'une épuration puisque les néerlandophones doivent partir pour la simple raison qu'ils sont néerlandophones.

Le secrétaire d'État a déclaré qu'il ne faut pas prendre la proportion 20/80 trop au pied de la lettre et qu'il est probable que l'on s'oriente plutôt vers une proportion de 27 %. Au parquet, cependant, la proportion sera de 20/80 et cela ne changera pas. S'il y a une pénurie de magistrats, il y a en revanche un excédent du côté du personnel auquel on appliquera effectivement la proportion 20/80.

M. Anciaux indique que M. Laeremans avait déjà souligné lors d'interventions précédentes que la proportion 20/80 était acceptable pour le parquet de Bruxelles. Il est quand même logique d'appliquer au personnel la même proportion que pour les magistrats.

M. Laeremans s'inscrit en faux contre cette affirmation. En ce qui concerne le parquet de Hal-Vilvorde, avec ses cinq magistrats de parquet détachés, il a été dit explicitement que ces personnes ne seraient pas rattachées aux effectifs francophones. Dans ce cas, on devrait quand même pouvoir appliquer la même logique à Bruxelles et conserver les 65 membres du personnel néerlandophones dans une phase transitoire.

M. Anciaux part du principe que la mesure de la charge de travail sera réalisée rapidement. Dans le pire des cas, il y aura une phase transitoire de douze mois. Cette mesure de la charge de travail devra montrer si les néerlandophones sont effectivement en surnombre et s'il y a lieu de procéder à un rééquilibrage. On doit pouvoir appliquer à soi-même les principes que l'on applique aux autres.

M. Laeremans souligne une fois encore que la discussion sur les chiffres relatifs aux magistrats de parquet est une première puisque les informations viennent seulement d'être communiquées récemment.

La période transitoire prévue à l'article 64 concerne uniquement les tribunaux francophones de première instance et de commerce, le tribunal du travail francophone et le tribunal de police francophone. Ces tribunaux conserveront des effectifs néerlandophones et un tiers d'entre eux seront bilingues.

Le texte de loi ne dit mot à propos des parquets. Au parquet de Bruxelles, il subsistera donc un excédent de personnel de 65 personnes, mais il sera possible par ailleurs de recruter du personnel francophone. Il propose que l'on applique une autre clé de répartition de manière à atteindre les 90 %. L'intervenant estime qu'il ne serait alors plus nécessaire d'engager et que cela permettrait d'éviter un énorme gaspillage d'argent.

À propos de l'article 57, 8º, M. Vanlouwe précise qu'en ce qui concerne la proportion 80/20, les chiffres relatifs aux magistrats du siège sont connus depuis tout un temps déjà. Il renvoie une nouvelle fois à l'incident suscité par les chiffres erronés concernant le tribunal du travail.

En revanche, les chiffres concernant les magistrats de parquet ne sont connus que depuis le 2 juillet 2012.

Conformément à la disposition transitoire, la proportion 20/80 sera portée à 27/73 pour le siège. Pour le parquet, en revanche, il n'y aura pas de régime transitoire. La proportion 20/80 restera donc inchangée pour les magistrats du parquet.

M. Anciaux souligne que la proportion 20/80 sera d'application durant la phase transitoire. La proportion de 27 % définie à l'article 57, 8º, est valable pour le siège, ce qui est logique puisque le parquet sera non pas dédoublé, mais scindé. S'agissant du parquet, en a, d'une part, réservé 20 % de l'effectif actuel pour le parquet néerlandophone de Hal-Vilvorde et l'on a prévu que les 80 % restants seraient affectés au parquet bilingue de Bruxelles, lequel sera composé de 20 % de néerlandophones et de 80 % de francophones. Cela représente donc au total bien plus de 27 % de néerlandophones puisque 36 % du cadre actuel sera néerlandophone.

Pour ce qui concerne les données démographiques, le secrétaire d'État renvoie à la page 121 du rapport de la commission de la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 53-2140/5).

S'agissant de la proportion 80/20, il renvoie à la réponse de M. Anciaux.

En ce qui concerne le personnel excédentaire, l'intervenant fait remarquer que l'on se base sur un cadre extinctif (les personnes qui partent ne seront pas remplacées). Cela signifie qu'il n'y aura pas de licenciements.

L'article 64 du projet de loi renvoie explicitement à la mobilité volontaire en cas d'emplois vacants. La mobilité ne pourra être imposée qu'à certaines conditions (voir article 64, § 3). Aucun membre du personnel ne perdra son emploi.

En ce qui concerne la clé de répartition au parquet, l'intervenant confirme que la proportion de 27 % sera également d'application en l'espèce. Par ailleurs, il est clair qu'en termes d'élasticité, cette proportion ne sera pas identique pour le personnel et la magistrature. Au tribunal du travail, par exemple, on parle d'une élasticité 9/8 ou 9/5 (par application de la norme des 27 %).

En ce qui concerne les chiffres relatifs aux greffes bruxellois et au contrôle de leur bilinguisme sur la base de la norme 1/3, le représentant de la ministre de la Justice indique qu'au tribunal de première instance, il y aurait, selon la norme de bilinguisme, un excédent de 65 unités du côté du personnel néerlandophone et un déficit de 55 unités pour le personnel francophone. Cela implique que 55 de ces 65 membres de personnel néerlandophones en surnombre dans le cadre peuvent être rattachés aux tribunaux francophones. Au greffe du tribunal du travail, il y a un excédent de 20 néerlandophones disposant d'un certificat de bilinguisme et un déficit de personnel francophone de 11 unités. Ici aussi, il y a donc 11 néerlandophones qui pourraient être rattachés au personnel francophone.

Au greffe du tribunal de commerce, il y a 12 membres du personnel néerlandophones bilingues en surnombre et il manque 10 unités francophones.

Au greffe du tribunal de police, il y 3 membres de personnel néerlandophones bilingues en surnombre et un déficit de 4 unités dans le cadre francophone bilingue.

M. Vanlouwe fait remarquer que de nouveaux chiffres font régulièrement leur apparition. Il serait utile, selon lui, qu'en plus des chiffres relatifs au cadre bilingue des greffes, on connaisse aussi les chiffres afférents au cadre bilingue des magistrats. Au tribunal de première instance de Bruxelles, on compte environ 140 magistrats, dont 97 francophones et 39 néerlandophones. Au tribunal du travail, il y a 18 magistrats francophones et 9 magistrats néerlandophones. Au tribunal de commerce, on compte 12 magistrats francophones et 10 néerlandophones, tandis qu'au tribunal de police, ces proportions sont respectivement de 11 et 3 unités.

Le parquet compte 65 magistrats francophones, pour 37 néerlandophones; l'auditorat 9 magistrats francophones, pour 5 néerlandophones.

L'intervenant aimerait savoir combien de magistrats bruxellois sont titulaires du certificat de bilinguisme. Selon ses informations, à peine 36 des 97 magistrats bruxellois francophones de première instance disposeraient de ce certificat, contre 32 des 39 magistrats néerlandophones, soit la grande majorité. La disproportion est patente.

Alors que seuls 9 magistrats francophones sur 18 près le tribunal du travail disposent d'un certificat de bilinguisme, 8 magistrats néerlandophones sur 9 en possèdent un.

Alors que seuls 7 magistrats francophones sur 12 près le tribunal de commerce sont titulaires d'un certificat de bilinguisme, 7 magistrats néerlandophones sur 10 en possèdent un.

Le tribunal de police fait figure d'exception, car tous les magistrats francophones sont titulaires d'un tel certificat. C'est également le cas des juges de police néerlandophones.

Seuls 28 magistrats francophones du parquet sur 65 disposent d'un certificat de bilinguisme, contre 28 magistrats néerlandophones sur 37.

Les chiffres parlent d'eux-mêmes: du côté néerlandophone, on fait des efforts pour obtenir le certificat de bilinguisme, ce qui n'est pas le cas du côté francophone.

Pourquoi ramener la proportion de magistrats bilingues de deux tiers à un tiers ? On fait reculer le bilinguisme à Bruxelles, où les tribunaux sont toujours confrontés à des dossiers mixtes sur le plan linguistique.

Quelles sont les mesures envisagées dans le projet de loi pour améliorer effectivement le bilinguisme dans l'intérêt du justiciable à Bruxelles ?

M. Anciaux estime que la logique d'une division et d'une subdivision a pour conséquence que l'on évolue vers davantage d'unilinguisme et par conséquent vers une diminution du nombre de bilingues.

Cette tendance se manifeste également lorsque des compétences sont transférées du fédéral aux entités fédérées.

Le représentant du secrétaire d'État renvoie aux développements détaillés du projet de loi au sujet de la proportion 2/3-1/3, à l'exception du niveau D.

Concernant les dispositions visant à améliorer le bilinguisme, il explique que les membres du personnel du parquet qui ne doivent actuellement pas être bilingues devront l'être à l'avenir.

M. Laeremans estime qu'il est plus que souhaitable qu'un magistrat puisse prendre connaissance de jugements rendus dans l'autre langue dans le même arrondissement. Pour la jurisprudence, cela revêt une importance essentielle.

Si l'on réduit le bilinguisme, il faut prévoir en contrepartie une autre mesure, telle qu'une connaissance passive minimale de l'autre langue. Or, ce n'est pas le cas, et l'unilinguisme ne cessera d'augmenter sur le terrain.

Dans son amendement nº 64 qui vise à remplacer l'article 57, l'intervenant fait explicitement référence au fait qu'au moins un des trois juges du siège doit être bilingue. Lorsqu'un juge siège seul, il doit obligatoirement l'être.

Cela étant, cette logique ne s'applique pas au parquet. En effet, le parquet de Bruxelles n'est pas scindé, mais est un parquet bilingue. Le bilinguisme y est pourtant réduit à un tiers. La proportion d'un tiers est également imposée à Hal-Vilvorde, alors qu'il s'agit d'un territoire néerlandophone. La logique voudrait dès lors qu'au moins 2/3 des magistrats du parquet de Bruxelles soient bilingues, mais ce n'est pas le cas. Pourquoi cette assimilation entre Bruxelles et Hal-Vilvorde ? Cela montre à suffisance que l'on est en train de bruxelliser Hal-Vilvorde.

L'intervenant cite l'exemple des services de police de Bruxelles, où chaque agent doit être bilingue. Cette obligation devrait a fortiori s'appliquer aux magistrats du parquet.

L'absorption des membres du personnel néerlandophones bilingues dans les tribunaux francophones semble réalisable pour les tribunaux de première instance et de commerce. Et encore, il n'est pas rationnel que cela soit limité à 1/3. Pourquoi ne prévoit-on pas 40 ou 50 % ?

Une règle analogue est-elle prévue pour le parquet ? L'article 64, § 4, est muet en ce qui concerne les parquets. En l'occurrence, prévoit-on également un plafond d'un tiers pour les néerlandophones bilingues en surnombre ?

Le représentant du secrétaire d'État répond qu'aucune règle analogue n'est instaurée parce que le parquet de Bruxelles n'est pas scindé. Pour le reste, il fait référence au régime d'extinction prévu à l'article 64, § 4.

M. Laeremans en conclut que toutes les places au parquet de Bruxelles seront occupées par des francophones. Il y aura donc 65 membres du personnel en surplus, sans véritable statut, qui seront considérés comme étant en surnombre.

Le représentant du secrétaire d'État répète que ces membres du personnel resteront pleinement opérationnels, mais dans un cadre extinctif étant donné qu'ils ne seront pas remplacés.

M. Laeremans n'a aucune objection à formuler concernant la répartition des magistrats pour le parquet. La même logique ne peut cependant pas être suivie pour la répartition du personnel, étant donné que le parquet est bilingue. En l'occurrence, il faudrait appliquer le même principe pour le siège.

Amendement nº 66

M. Laeremans dépose l'amendement nº 66, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à remplacer l'article 57, 8º, par une nouvelle disposition qui fixe les cadres néerlandophones et francophones du tribunal de police, du tribunal du travail et du tribunal de première instance sur la base des charges de travail respectives, à savoir 33 % (N) et 66 % (F).

L'auteur se réfère à la discussion générale et à la justification écrite de son amendement.

Amendement nº 79

M. Laeremans dépose l'amendement nº 79, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à remplacer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 4 proposé. Cette modification doit permettre de fixer les cadres linguistiques en fonction de la charge de travail et non sur la base de clés de répartition non fondées. Cet amendement a la même portée que l'amendement nº 66, mais il est plus succinct.

Amendement nº 80

M. Laeremans dépose l'amendement nº 80, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat nº 5-1674/2), qui vise à remplacer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 4 proposé, de manière à ce que les cadres francophones du tribunal de police, du tribunal du travail et du tribunal de première instance soient fixés à 70 % des cadres existant au moment où cette disposition entrera en vigueur, en y ajoutant les magistrats de complément.

Amendement nº 81

M. Laeremans dépose l'amendement nº 81, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à remplacer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 4 proposé, de manière à ce que les cadres francophones du tribunal de police, du tribunal du travail et du tribunal de première instance soient fixés à 75 % des cadres existant au moment où cette disposition entrera en vigueur, en y ajoutant les magistrats de complément.

Amendement nº 82

M. Laeremans dépose l'amendement nº 82, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à remplacer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 4 proposé, de manière à ce que les cadres francophones du tribunal de police, du tribunal du travail et du tribunal de première instance soient fixés à 80 % des cadres existant au moment où cette disposition entrera en vigueur, en y ajoutant les magistrats de complément.

Amendement nº 83

M. Laeremans dépose l'amendement nº 83, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à supprimer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 3 proposé. En effet, les cadres doivent être fixés selon la mesure de la charge de travail.

Le représentant du secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, estime qu'il faut également tenir compte du fait que la garantie inscrite à l'alinéa 3 peut s'appliquer autant du côté francophone que du côté néerlandophone. Elle vise également à garantir un équilibre pour le parquet.

Amendement nº 84

M. Laeremans dépose l'amendement nº 84, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à supprimer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 6 proposé. Il propose de maintenir les cadres jusqu'à ce que la mesure de la charge de travail soit réalisée.

Amendement nº 85

M. Laeremans dépose l'amendement nº 85, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2),qui vise à supprimer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 7 proposé.

Amendement nº 86

M. Laeremans dépose l'amendement nº 86, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à remplacer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 7 proposé par une nouvelle disposition prévoyant une période de transition pour le cas où les cadres néerlandophones ne seraient pas maintenus, mais devraient malgré tout être réduits à 20 % Ce régime s'applique également à tout le personnel.

Amendement nº 87

M. Laeremans dépose l'amendement nº 87, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à supprimer, dans l'article 57, 8º, l'alinéa 8 proposé. Cet alinéa doit assurément être supprimé, étant donné que les cadres néerlandophones ne pourront pas être modifiés jusqu'à la mesure de la charge de travail, qui devra absolument être effectuée. En cas de maintien de cet article, les francophones auront tout intérêt à ce qu'il ne soit pas procédé à une mesure de la charge de travail. L'auteur souligne que « ce délai » n'est en outre pas défini.

M. Anciaux affirme que l'alinéa 1er de l'article 57, 8º, précise le délai dans lequel la mesure de la charge de travail doit être effectuée, à savoir au plus tard le 1er juin 2014.

Selon M. Laeremans, le dernier alinéa de l'article 57, 8º, fait référence à « ce délai », et vise donc le délai énoncé à l'alinéa précédent. Concrètement, il s'agit donc de l'année qui suit la date d'entrée en vigueur de la réforme visée à l'article 61, alinéa 1er, de la loi du ... portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles.

M. Anciaux n'est pas d'accord sur ce point. D'après lui, le délai de la mesure de la charge de travail a bel et bien été fixé.

Le représentant du secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, confirme que l'interprétation des mots « ce délai » porte sur ce qui est précisé à l'alinéa qui précède. Cette disposition indique que la règle d'extinction à laquelle celle des 27 % déroge s'applique durant l'année au cours de laquelle la réforme complète, c'est-à-dire le remplissage à 90 %, sera atteinte. Il faut donc procéder à une lecture conjointe du dernier et de l'avant-dernier alinéas.

Amendement nº 88

M. Laeremans dépose l'amendement nº 88, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui tend à remplacer, dans l'article 57, 8º, proposé, les mots « au plus tard le 1er juin 2014 » par les mots « au plus tard le 1er mars 2014 ». En juin 2014, le parlement sera en période de dissolution. Il n'y aura dès lors plus de possibilité de contrôle parlementaire. C'est la raison pour laquelle l'auteur de l'amendement souhaite avancer la date prévue au 1er mars 2014.

Le représentant du secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, estime que le débat a montré que la formulation employée répond déjà aux préoccupations de M. Laeremans. L'expression « au plus tard » implique que la mesure de la charge de travail pourra aussi intervenir plus tôt.

Amendement nº 4

MM. Vanlouwe et Boogaerts déposent l'amendement nº 4, subsidiaire à l'amendement nº 1, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui tend à remplacer l'article 57, 5º. Cet amendement se rapporte à la disposition qui prévoit qu'à Bruxelles, capitale bilingue, le procureur du Roi et l'auditeur du travail de Bruxelles devront désormais toujours être francophones. Les néerlandophones ne pourront plus occuper ces fonctions. Les auteurs proposent de supprimer cette disposition et de prévoir que le procureur du Roi et l'auditeur du travail de Bruxelles devront justifier d'une connaissance approfondie des deux langues, conformément à l'article 43quinquies, § 1er, alinéa 4.

Cet amendement part du principe que dans une capitale bilingue, le candidat le plus apte doit pouvoir entrer en ligne de compte, quelle que soit la langue de son diplôme ou le rôle linguistique auquel il appartient.

M. Deprez affirme qu'il ne doit pas nécessairement s'agir d'une personne francophone, mais bien d'une personne qui a obtenu le diplôme requis en français.

M. Vanlouwe souligne que la langue dans laquelle le diplôme a été délivré (français ou néerlandais) détermine à quel rôle linguistique (francophone ou néerlandophone) le titulaire sera affecté. Au fond, la loi indique donc que le procureur du Roi et l'auditeur du travail de Bruxelles doivent appartenir au rôle linguistique francophone.

M. Deprez fait remarquer que M. Vanlouwe pourrait parfaitement devenir procureur du Roi à Bruxelles s'il obtient son diplôme en français.

Pour M. Laeremans, cela revient à dire que les néerlandophones qui veulent faire carrière à Bruxelles n'ont qu'à étudier en français.

Pour le sénateur Vanlouwe, il s'agit d'un retour à la mentalité qui prévalait au XIXe siècle. En outre, cela fait apparaître clairement que dans la capitale, un diplôme francophone est supérieur à un diplôme néerlandophone. Le Conseil d'État demande d'ailleurs qu'une justification soit fournie à l'appui de ces exigences linguistiques. Où est cette justification ?

M. Vanlouwe se réfère aux discussions qui ont eu lieu à la Chambre, où le secrétaire d'État Verherstraeten a fait remarquer ce qui suit à cet égard:

— En premier lieu, il a affirmé que la répartition proposée, par rôle linguistique, des fonctions de procureur du Roi et adjoint à Bruxelles et d'auditeur du travail et adjoint ne peut pas s'interpréter comme une interdiction professionnelle parce qu'il y aura à Hal-Vilvorde un procureur du Roi et un auditeur du travail néerlandophones et qu'à Bruxelles, l'adjoint du procureur du Roi appartiendra également au rôle linguistique néerlandais.

Le représentant du secrétaire d'État déclare avoir déjà réagi sur ce point lors de la discussion générale en faisant référence à la discussion sur le remplacement des termes néerlandais « ten slotte » par « immers » (« Enfin » par « En effet »). Il n'y a donc pas de lien causal entre l'avant-dernier alinéa et le dernier alinéa dans le rapport cité.

— En second lieu, le secrétaire d'État a encore essayé de justifier d'une autre manière l'unilinguisme du procureur et de l'auditeur du travail à Bruxelles. Cette discussion est reproduite comme suit dans le rapport:

« Le secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, adjoint au premier ministre, M. Servais Verherstraeten, explique comment on peut justifier que le procureur du Roi de Bruxelles et le procureur du Roi adjoint appartiennent obligatoirement respectivement au rôle linguistique français et au rôle linguistique néerlandais. Il précise ce qui suit à ce sujet.

Ces exigences visent à garantir la composition paritaire du comité de coordination prévu à l'article 150ter du Code judiciaire, tel que proposé. Ce comité de coordination constitue un élément essentiel de la réforme. Il en est d'ailleurs fait mention dans les développements de la proposition d'insertion d'un article 157bis de la Constitution (DOC 53-2141/001, p. 5).

La parité au sein de ce comité de coordination participe à l'équilibre communautaire qui est recherché, d'une manière générale, dans l'accord institutionnel du 11 octobre 2011, et en particulier dans la réforme à l'examen. »

Ce raisonnement n'a, lui non plus, ni queue ni tête.

— En fait, la parité ne s'applique pas à l'intérieur de Bruxelles, mais bien entre Bruxelles et Hal-Vilvorde, donc à Bruxelles, mais par comparaison avec Hal-Vilvorde.

— L'article 150ter en projet du Code judiciaire ne prévoit même pas de composition paritaire.

— De plus, le secrétaire d'État tient un raisonnement circulaire. Le procureur et l'auditeur du travail doivent être francophones parce que le comité de coordination doit être paritaire (bien que la loi ne le prescrive pas), et le comité de coordination est paritaire parce que le procureur et l'auditeur du travail sont francophones ...

Il est clair que les arguments invoqués pour justifier qu'à Bruxelles, le procureur et l'auditeur du travail seront toujours francophones, sont totalement insuffisants. L'on n'a toujours pas répondu à la demande très pertinente du Conseil d'État de justifier une telle première de manière objective et raisonnable.

L'intervenant est curieux de voir comment la Cour constitutionnelle statuera en la matière.

Reste la question de savoir pourquoi les fonctions supérieures à Bruxelles sont réservées à des personnes appartenant au rôle linguistique français. L'intervenant ne peut que le déplorer et maintient que cette réglementation, qui exclut une catégorie donnée de candidats d'une fonction supérieure, est discriminatoire et contraire au principe d'égalité. Conformément à la Constitution, les deux langues sont sur un pied d'égalité.

De plus, il ne faut pas oublier que Bruxelles est la capitale d'un pays dont 60 % de la population est néerlandophone.

Amendement nº 65

M. Laeremans dépose l'amendement nº 65, subsidiaire à l'amendement nº 64, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui vise à remplacer l'article 57, 5º, par une nouvelle disposition en vertu de laquelle, dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, les procureurs du Roi successifs doivent appartenir, selon leur diplôme, à un régime linguistique différent. Bien entendu, cela vaut également pour les auditeurs du travail.

L'auteur se réfère à la discussion générale et à la justification écrite de son amendement.

L'intervenant se dit offusqué par les propos de M. Deprez, qui a prétendu qu'un néerlandophone peut étudier en français et que de ce fait, il peut aussi accéder à ces fonctions supérieures.

M. Deprez répond qu'il a seulement voulu souligner que le critère déterminant est la langue du diplôme et non l'origine éthnique.

Amendement nº 5

MM. Vanlouwe et Boogaerts déposent l'amendement nº 5, subsidiaire à l'amendement nº 1, (doc. Sénat, nº 5-1674/2), qui tend à supprimer les points 9º à 12º, lesquels contiennent des règles instituant des « belles-mères » francophones à Hal-Vilvorde.

Cet accord ne scinde pas l'arrondissement judiciaire, mais permet aux juges francophones de continuer à statuer dans l'ensemble du territoire de Hal-Vilvorde et il permet même à des magistrats de parquet francophones d'officier en Flandre.

Le territoire de Hal-Vilvorde est situé en région de langue néerlandaise, en Région flamande.

Il ressort en outre du projet à l'examen que les partis de la majorité institutionnelle considèrent que les juges flamands qui parlent le français à la perfection sont incapables d'objectivité. Les francophones doivent donc être jugés par des juges francophones, même en Flandre. L'on n'a donc pas confiance dans les juges néerlandophones, même s'ils sont parfaitement bilingues.

Le texte proposé octroie incontestablement des privilèges aux francophones.

Le présent amendement tend à supprimer le régime applicable aux magistrats de parquet francophones détachés de Bruxelles vers Hal-Vilvorde.

Pour de plus amples explications, il est renvoyé à la justification écrite de l'amendement.

M. Laeremans souhaite encore soumettre une série de questions au secrétaire d'État.

1. En ce qui concerne l'avant-dernier alinéa de l'article 57, 8º, proposé, il émet l'hypothèse suivante. Si, à un endroit ou à un autre, par exemple dans un greffe ou au parquet, on n'arrive pas aux 90 % exigés, ou si les arrêtés d'exécution de la loi à l'examen ne voient pas le jour, cela signifie-t-il que la règle des 27 % n'existe pas ? Est-il exact que ces 27 % dépendent de l'entrée en vigueur ?

Le secrétaire d'État considère que l'avant-dernier alinéa du 8 est formulé d'une manière claire et juridiquement correcte et qu'il n'est donc pas de nature à semer la confusion. S'agissant du remplissage à 90 % et de la fixation de l'entrée en vigueur par arrêté royal, comme prévu à l'article 61, alinéa 2, le comité de mise en œuvre des réformes institutionnelles a proposé de prévoir dans la loi une task force chargée de contrôler le recrutement des magistrats et du personnel. Ces activités sont déjà préparées par la ministre de la Justice.

2. S'agissant des exigences linguistiques, M. Laeremans relève qu'il est fait état, par exemple au 3º, d'une connaissance approfondie de l'autre langue. Au 6º, en revanche, il est question d'une connaissance fonctionnelle de l'autre langue.

Il s'agit de notions tout à fait nouvelles.

À l'heure actuelle, la loi dispose uniquement qu'il faut justifier de la connaissance de l'autre langue. Cette preuve est apportée sur la base d'examens organisés à deux niveaux.

Pourquoi introduire ces nouvelles notions ?

L'intervenant souligne le risque que l'expression « connaissance fonctionnelle » ait pour effet de réduire les connaissances linguistiques.

Le représentant du secrétaire d'État confirme qu'il s'agit de notions nouvelles qui sont issues de l'accord de gouvernement. L'observation qui précède a du reste déjà été faite par le Conseil d'État et le secrétaire d'État y avait répliqué en se référant au couplage juridique entre l'examen visé à l'article 43quinquies en ce qui concerne la connaissance orale active et passive et la connaissance écrite passive relativement au bilinguisme fonctionnel. Le bilinguisme approfondi porte sur la connaissance active et passive complète, tant oralement qu'à l'écrit.

En ce qui concerne les motifs qui ont présidé au choix d'un bilinguisme fonctionnel et le fait que ce dernier est la norme dans tous les cas où la loi exige la connaissance de l'autre langue, l'intervenant renvoie à sa réponse à la première question à ce sujet de M. Laeremans.

3. S'agissant de la mesure de la charge de travail, le secrétaire d'État se réfère au rapport de commission de la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 53-2140/5). Le seul passage que l'intervenant a pu retrouver à ce sujet est une intervention de M. Giet, en page 120: « Le député précise que les mots « entre autres », que les 3 et 4 proposés visent à supprimer dans l'article 48 de la proposition de loi à l'examen, veulent dire que pour fixer les cadres définitifs, il faut, quand on mesure la charge de travail, aussi prendre en compte des données économiques, démographiques et sociales, ainsi que le fonctionnement du service en fonction des différentes sortes de juridictions. »

M. Laeremans en infère que la suppression des mots « entre autres » emporte aussi celle de la référence aux données économiques, démographiques et sociales.

Dans la négative, l'intervenant demande des précisions. De quelle manière des données démographiques peuvent-elles jouer dans la mesure de la charge de travail ?

Le représentant du secrétaire d'État pense y avoir déjà répondu, notamment en se référant aux demandes légitimes du gouverneur du Brabant flamand de prendre en compte certaines données démographiques. Cela correspond aussi aux déclarations de M. Giet à la Chambre.

M. Laeremans pense que le facteur démographique n'est pas primordial dans le Brabant flamand. Avec les propositions à l'examen, il y aura plus de magistrats de parquet à Hal-Vilvorde qu'à Leuven. L'évolution démographique aura plus d'effet à Bruxelles où l'orateur s'attend à ce qu'elle serve à faire augmenter la proportion de francophones par rapport aux néerlandophones.

Les amendements nos 2, 4 et 5 de MM. Vanlouwe et Boogaerts ainsi que les amendements nos 64 à 66 et 79 à 88 de M. Laeremans sont successivement rejetés par 12 voix contre 5.

L'article 57 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 57/1 (nouveau)

Amendement nº 67

M. Laeremans dépose l'amendement nº 67 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 57/1 (nouveau) modifiant l'article 43bis de la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, qui traite de la connaissance des langues et des équilibres linguistiques au sein des cours d'appel, étant entendu qu'il est créé à Louvain une cour d'appel distincte pour le Brabant flamand.

La cour d'appel de Bruxelles ne serait plus compétente que pour les 19 communes.

Pour plus de précisions, l'intervenant renvoie à l'amendement et à sa justification.

L'amendement nº 67 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 57/2 (nouveau)

Amendement nº 68

M. Laeremans dépose l'amendement nº 68 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 57/2 (nouveau) qui modifie l'article 43ter de la loi concernant l'emploi des langues en matière judiciaire.

Cet amendement prévoit de remplacer, au paragraphe 2, les mots « et à la cour du travail d'Anvers » par les mots « , à la cour du travail d'Anvers et à la cour du travail de Louvain ».

À la cour du travail de Bruxelles et à l'auditorat général, il est instauré une règle selon laquelle au moins un quart des magistrats justifient par leur diplôme qu'ils ont subi les examens de la licence en droit en langue française, et au moins un quart des magistrats justifient par leur diplôme qu'ils ont subi les examens de la licence en droit en langue néerlandaise.

De plus, les deux tiers des membres doivent justifier de la connaissance de l'autre langue nationale et tous les nouveaux magistrats doivent démontrer leur connaissance passive de l'autre langue nationale.

L'amendement nº 68 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 57/3 (nouveau)

Amendement nº 69

M. Laeremans dépose l'amendement nº 69 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un article 57/3 (nouveau) qui prévoit à l'article 43quinquies un nouvel examen linguistique visant à vérifier la connaissance purement passive, tant écrite qu'orale, de l'autre langue. Il est destiné en premier lieu aux magistrats de parquet bruxellois et aux magistrats près la cour d'appel et la cour du travail de Bruxelles.

Pour plus de précisions, il est renvoyé à l'amendement et à sa justification.

L'amendement nº 69 est rejeté par 12 voix contre 5.

Article 58

Amendement nº 70

M. Laeremans dépose l'amendement nº 70 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à remplacer l'article 58.

M. Laeremans rappelle qu'à l'heure actuelle, tous les greffiers des tribunaux de Bruxelles doivent connaître les deux langues nationales. Le projet à l'examen propose de réduire cette exigence de bilinguisme à un tiers des greffiers. L'amendement nº 70 vise à porter cette exigence à la moitié des greffiers dans les tribunaux francophones et néerlandophones de Bruxelles.

M. Laeremans demande ensuite des précisions quant à la portée du deuxième alinéa proposé au 2º de l'article 58. L'alinéa règle les exigences linguistiques, notamment, pour les greffiers des justices de paix de Bruxelles. Quelles sont les justices de paix visées ? Faut-il déduire de cette disposition que les exigences de connaissances linguistiques s'appliquent également aux greffiers des justices de paix de Dilbeek, Hal ou Vilvorde ?

Le représentant du secrétaire d'État répond que l'interprétation du texte est rendue compliquée en raison de l'insertion d'alinéas dans l'article 53 de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire. Il faut lire le texte de manière consolidée pour bien en saisir la portée.

L'article 53, § 3, alinéa 1er, de la loi du 15 juin 1935 prévoit que, pour être nommé à la fonction de greffier dans l'arrondissement de Bruxelles, l'intéressé doit justifier de la connaissance des deux langues nationales. L'alinéa 2 actuel, qui deviendra l'alinéa 4 à la suite de l'insertion de deux nouveaux alinéas par le projet de loi, précise par ailleurs que, pour les tribunaux de police de Hal et Vilvorde et dans les cantons judiciaires composés exclusivement de communes de la région de langue néerlandaise, seule la connaissance de la langue néerlandaise est exigée.

Le deuxième alinéa proposé à l'article 58, 2º, du projet précise que la nouvelle règle de connaissance linguistique pour les greffiers s'applique « sans préjudice de l'alinéa 4 ». Le futur alinéa 4 correspond à l'alinéa 2 du texte actuel, ce qui exclut le bilinguisme pour les greffiers des cantons tels que Dilbeek, Hal, etc., qui sont situés en région de langue néerlandaise.

M. Laeremans évoque ensuite l'article 58, 4º. L'alinéa proposé prévoit un régime temporaire dérogatoire en faveur de personnes qui s'engagent à présenter un examen linguistique et à suivre des cours. De tels régimes sont dangereux car ils peuvent aboutir à vider de leur substance les exigences de connaissance linguistique. L'orateur renvoie à ce qui s'est passé à Bruxelles dans le cadre des accords de courtoisie linguistique. Ces accords permettaient de recruter des non-bilingues, qui obtenaient un délai pour réussir le test linguistique. Ce régime dérogatoire a abouti à la non-observation généralisée des lois linguistiques. L'orateur ne voudrait pas que le régime dérogatoire proposé dans le texte à l'examen aboutisse à de tels abus.

Le représentant du secrétaire d'État répond que l'alinéa proposé est une mesure transitoire technique qui doit permettre d'arriver à compléter rapidement les cadres à concurrence du seuil de 90 % nécessaire en vue de l'entrée en vigueur de la réforme.

M. Laeremans peut le comprendre mais il faut éviter que l'on pérennise des situations transitoires. L'intervenant constate qu'il sera mis fin à la fonction si les personnes ne présentent pas ou ne réussissent pas l'examen linguistique dans le délai prévu. Le dernier membre de phrase de l'alinéa prévoit cependant une réserve à cette cessation de fonction si « la règle précitée est respectée pour la fonction exercée ». Que faut-il entendre par cette réserve ?

Le représentant du secrétaire d'État répond que cela vise l'hypothèse dans laquelle le quota du tiers de greffiers bilingues est rempli pour le greffe ou le secrétariat concerné grâce à la présence de collègues ayant réussi l'examen.

M. Laeremans regrette que certaines personnes pourront être considérées comme ayant une connaissance fonctionnelle de l'autre langue avant qu'elles n'aient réussi leur examen linguistique.

L'amendement nº 70 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 58 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 59

M. Laeremans note que le 2º vise les secrétaires, les juristes de parquet et les niveaux B, C et D. Pourquoi la disposition ne vise-t-elle pas les référendaires ? De quels cadres les référendaires feront-ils partie ?

Le secrétaire d'État répond que l'article 53 de la loi du 15 juin 1935 (article 58 du projet de loi) vise les cadres pour le personnel du siège, en ce compris les référendaires. L'article 54bis en projet (article 59 du projet de loi) vise le personnel des parquets. Les juristes de parquet sont, au niveau du parquet, ce que les référendaires sont au niveau du siège.

M. Laeremans constate que le 3º, alinéa 2, proposé, prévoit qu'un tiers des secrétaires de parquet de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles doit justifier de la connaissance de la seconde langue. Existe-t-il des exigences de connaissance linguistique pour les juristes de parquet ?

Le secrétaire d'État renvoie à ses déclarations antérieures. À l'heure actuelle, à Bruxelles, il n'y a pas d'exigences linguistiques pour les référendaires et les juristes de parquet. Le projet de loi introduit une exigence de connaissance linguistique pour un tiers des secrétaires de parquet de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles.

M. Laeremans relève que le 3º, alinéa 2, ne vise que les secrétaires de parquet, pas les référendaires.

Le secrétaire d'État répond que c'est l'article 58 du projet de loi qui règle cette question pour les référendaires. Au 1º, il est prévu que les clés de répartition sont applicables pour la fixation des cadres des greffiers, des référendaires et des membres du personnel attachés aux greffes des tribunaux de Bruxelles.

M. Laeremans trouve que les dispositions qui règlent les exigences linguistiques applicables aux différentes catégories de membres du personnel manquent de limipidité et seront complexes à interpréter.

Le secrétaire d'État fait remarquer que l'article 54ter, § 1er, proposé (article 60 du projet de loi) permet de lever toute confusion dans l'interprétation des dispositions. Il y est en effet précisé que les différents articles relatifs aux exigences linguistiques sont applicables aux experts, experts administratifs et assistants, tant aux greffes qu'aux secrétariats de parquet, ainsi que, dans l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, aux référendaires et aux juristes de parquet.

M. Laeremans rappelle qu'à peine 11,3 % du personnel des parquets — soit 47 personnes sur 416 membres du personnel — satisfont aux exigences de bilinguisme. Vu le manque criant de personnel bilingue au sein des parquets à Bruxelles, comment va-t-on arriver à atteindre le quota d'un tiers de bilingues ? Par ailleurs, pourquoi faut-il prévoir ce quota pour le parquet de Hal-Vilvorde qui est situé dans une région unilingue de langue néerlandaise ? L'orateur demande comment vont se combiner l'exigence d'un tiers de bilingues et la règle des 90 % prévue à l'article 61.

Le secrétaire d'État renvoie à l'article 72 du projet de loi qui rencontre la préoccupation exprimée par le préopinant. L'exigence d'un tiers de bilingues ne s'appliquera qu'aux référendaires et juristes de parquet recrutés après la date d'entrée en vigueur de la réforme. Cette date dépend de la publication par le Roi d'un arrêté constatant que les cadres sont remplis à 90 %.

M. Laeremans en déduit a contrario que, dans tous les autres cas où l'on veut faire entrer le nouveau régime en vigueur, en application du seuil des 90 %, il faut au préalable que l'on ait satisfait à l'exigence du tiers de bilingues.

Le secrétaire d'État confirme que le régime spécifique de l'article 72 ne vise que les référendaires et les juristes de parquet.

Pour que le seuil de 90 % soit atteint plus facilement, il est prévu, de manière temporaire, que des personnes qui s'engagent à présenter l'examen linguistique soient prises en compte comme des personnes ayant une connaissance fonctionnelle de la seconde langue.

L'article 59 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 60

M. Laeremans aimerait savoir en quoi consiste exactement la distinction qui est faite, dans le § 1er proposé de l'article 60, entre les « experts », les « experts administratifs » et les « assistants ».

Le représentant de la ministre de la Justice explique que les effectifs des greffes et des parquets sont subdivisés en plusieurs niveaux: le niveau D se compose de collaborateurs et le niveau C consiste, lui aussi, en un seul grade, à savoir celui d'assistant. Le niveau B correspond à un double grade, qui comprend les experts administratifs et les experts, qui englobent principalement des agents exerçant des fonctions techniques, comme les comptables et les traducteurs.

M. Laeremans estime que ces fonctions n'interviennent pas dans le calcul des 90 % pour les cadres linguistiques. La règle d'1/3 leur est applicable.

Le représentant de la ministre de la Justice explique que seul le niveau D est exclu du champ d'application de la règle d'1/3.

M. Laeremans le regrette, car l'expert qui travaille bien mais qui se trouve être néerlandophone sera ainsi mis en surnombre pour la seule et unique raison qu'il est néerlandophone. L'intervenant ne saisit pas non plus pourquoi il ne peut y avoir que 20 % de néerlandophones.

Le représentant de M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, précise qu'il s'agit d'un cadre extinctif. Il n'y a donc pas de départ obligatoire pour le personnel.

M. Laeremans déplore qu'il faille partir à long terme. Il voit là une forme de racisme anti-flamand.

L'article 60 est adopté par 12 voix contre 5.

Articles 60/1 à 60/3 (nouveaux)

Amendement nº 71

M. Laeremans dépose l'amendement nº 71 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/1 comprenant les articles 60/1 à 60/3 (nouveaux).

L'auteur propose d'apporter diverses modifications à la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire pour tenir compte des modifications proposées dans d'autres amendements qu'il a déposés afin de réaliser une scission verticale de l'arrondissement judiciaire de B-H-V.

Article 60/4 (nouveau)

Amendement nº 72

M. Laeremans dépose l'amendement nº 72 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/2 comprenant l'article 60/4 (nouveau).

L'auteur propose d'apporter des modifications à la loi du 7 juillet 1969 déterminant le cadre du personnel des cours et tribunaux du travail pour tenir compte des modifications proposées à d'autres amendements qu'il a déposés.

Articles 60/5 et 60/6 (nouveaux)

Amendement nº 73

M. Laeremans dépose l'amendement nº 73 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/3 comprenant les articles 60/5 et 60/6 (nouveaux).

L'auteur propose d'apporter une série de modifications à la loi du 15 juillet 1970 déterminant le cadre du personnel des tribunaux de commerce et modifiant la loi du 10 octobre 1967 contenant le Code judiciaire. Il est renvoyé à la justification de l'amendement nº 71 du même auteur.

Article 60/7 (nouveau)

Amendement nº 74

M. Laeremans dépose l'amendement nº 74 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/4 comprenant l'article 60/7 (nouveau).

L'auteur propose d'apporter des modifications à la loi du 14 décembre 1970 déterminant le cadre des juges suppléants dans les tribunaux du travail et les tribunaux de commerce. Il est renvoyé à la justification de l'amendement nº 71 du même auteur.

Article 60/8 (nouveau)

Amendement nº 75

M. Laeremans dépose l'amendement nº 75 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/5 comprenant l'article 60/8(nouveau).

L'auteur propose d'apporter des modifications à la loi du 16 juillet 1970 déterminant le cadre du personnel des tribunaux de police. L'amendement propose des cadres pour les tribunaux de police basés sur une répartition 75 % F et 25 % N.

Article 60/9 (nouveau)

Amendement nº 76

M. Laeremans dépose l'amendement nº 76 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/6 comprenant l'article 60/9 (nouveau).

L'auteur propose d'apporter des modifications à la loi du 2 juillet 1975 déterminant le cadre du personnel des tribunaux de première instance. Il est renvoyé à la justification de l'amendement nº 71.

Articles 60/10 à 60/15 (nouveaux)

Amendement nº 77

M. Laeremans dépose l'amendement nº 77 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/7 comprenant les articles 60/10 à 60/15 (nouveaux).

L'auteur propose d'apporter des modifications à l'arrêté royal du 29 janvier 2007 déterminant la compétence territoriale des tribunaux de l'application des peines. Les modifications de la compétence territoriale sont nécessaires à la suite de la scission verticale de l'arrondissement judiciaire de B-H-V qu'il propose dans d'autres amendements.

Articles 60/16 à 60/18 (nouveaux)

Amendement nº 78

M. Laeremans dépose l'amendement nº 78 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) visant à insérer un chapitre 4/8 comprenant les articles 60/16 à 60/18 (nouveaux).

L'auteur propose d'apporter des modifications à l'arrêté royal du 10 août 2001 relatif à l'institution de sections dans les cours du travail, les tribunaux du travail, les tribunaux de commerce et les tribunaux de police. Ces modifications découlent de la scission verticale de l'arrondissement judiciaire de B-H-V défendue par M. Laeremans.

Les amendements nos 71 à 78 sont rejetés par 12 voix contre 5.

Article 61

Amendement nº 3

MM. Vanlouwe et Boogaerts déposent l'amendement nº 3, subsidiaire à l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui tend à remplacer l'article 61 et à supprimer les articles 62 à 72.

Selon M. Vanlouwe, la majorité institutionnelle aurait pu nettement se simplifier la vie en décidant simplement que la mesure de la charge de travail est effectuée aujourd'hui sur la base des statistiques objectives.

Selon l'intervenant, la mesure de la charge de travail est de la poudre aux yeux qui est jetée pour maintenir le rapport 80/20 des cadres linguistiques à l'avenir.

L'intervenant demande que l'on adopte son amendement afin que la loi n'entre en vigueur qu'une fois que la mesure de la charge de travail aura été réalisée. Elle serait ainsi effectuée correctement, ce qui est dans l'intérêt des francophones comme des néerlandophones, car, comme le veut l'adage, « mesurer, c'est savoir ». La majorité institutionnelle a certes posé le principe, mais elle ne veut pas le mettre en pratique.

M. Anciaux répond que, pour les huit partis de la majorité institutionnelle, il faut travailler sur la base de la mesure de la charge de travail. Cependant, ils sont suffisamment réalistes pour se rendre compte que cela ne peut pas se faire du jour au lendemain. Le délai défini est déjà très serré aujourd'hui. À l'œuvre on connaît l'artisan, et si la mesure de la charge de travail n'est pas terminée dans le délai imparti, il y aura des conséquences qui n'auront pas été voulues par la majorité institutionnelle.

Selon M. Laeremans, bien que cela ne soit pas le but de plusieurs membres de cette majorité, si la mesure de la charge de travail tarde à arriver, on retournera à la répartition 20/80.

M. Anciaux compte sur la bonne volonté à cet égard, et si les tribunaux sont malgré tout en grande majorité néerlandophones, leur collaboration sera très franche. La majorité institutionnelle prendra ses responsabilités politiques en la matière même si les magistrats et les parquets ne coopèrent pas. Dans son avis d'office du 30 mai 2012 concernant la scission de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, le Conseil supérieur de la Justice a indiqué que plusieurs mécanismes ont été prévus en vue de réaliser cette mesure de la charge de travail. Selon l'intervenant, il y a suffisamment de bonne volonté chez les huit partis de la majorité institutionnelle pour mener à bien cet exercice.

Si la majorité institutionnelle est sincère à propos de la mesure de la charge de travail, M. Vanlouwe demande pourquoi elle ne conserve pas les cadres actuels en attendant que cette mesure soit réalisée. Le but n'est-il pas en réalité d'ancrer le rapport 80/20 ?

M. Anciaux répond que le rapport 80/20 présente un double aspect. En ce qui concerne les parquets, il est à l'avantage des néerlandophones. Pour le siège, le nombre de magistrats néerlandophones correspondra à 27 % en attendant la mesure de la charge de travail.

M. Laeremans pense qu'il n'y aura pas un statu quo en ce qui concerne les parquets. Les Flamands obtiennent un ou deux magistrats supplémentaires, tandis que les francophones en obtiennent vingt. Le régime prévu pour la magistrature à Bruxelles est acceptable, sauf en ce qui concerne le régime applicable au personnel en surnombre. Toutefois, le principe du régime 80/20 ne peut pas être étendu à l'ensemble de Bruxelles-Hal-Vilvorde sans qu'il ne soit fondé sur la mesure de la charge de travail. Hal-Vilvorde serait ainsi relégué au rang d'annexe de Bruxelles et perdrait, pour de bon, la possibilité de s'intégrer à un ensemble provincial plus vaste.

M. Moureaux signale qu'au 5e alinéa de l'article 61, une erreur légistique assez classique a été commise. Le comité de suivi reflète la composition actuelle du gouvernement qui comprend à l'heure actuelle deux secrétaires d'État en charge des réformes institutionnelles. Or, cette composition peut être changée.

M. Vanlouwe s'attend à ce qu'un prochain gouvernement soit amené à s'atteler à nouveau à la réforme de l'État.

M. Laeremans aimerait connaître la composition exacte du comité de suivi du processus de mise en œuvre de la réforme. Va-t-on aussi prévoir un cadre à temps plein pour ce comité ?

Le représentant de M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que ce comité sera créé au sein du gouvernement.

Amendement nº 89

M. Laeremans dépose l'amendement nº 89 (doc. Sénat, nº 5-1674/2) qui vise à remplacer l'alinéa 1er de l'article 61 par ce qui suit: « La présente loi entre en vigueur dès que chacun des cadres et chacun des cadres linguistiques fixés conformément aux articles 57 à 60 sont remplis à 90 %, et en tout cas au plus tard le 1er avril 2014. »

M. Laeremans préfèrerait que la loi à l'examen ne soit jamais votée, mais s'il ne peut en être autrement, il souhaiterait à tout le moins qu'une date soit fixée pour son entrée en vigueur. On peut craindre, en effet, que les effectifs des greffes soient loin d'être complets et que cette situation perdure à l'avenir. L'intervenant souhaite donc éviter que l'on se dirige vers une répartition 20/80 définitive, sans mesure de la charge de travail.

L'amendement nº 3 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'amendement nº 89 est rejeté par 12 voix contre 5.

L'article 61 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 62

Cet article est adopté sans discussion par 12 voix contre 5.

Article 63

M. Laeremans renvoie à l'article 63, § 3, alinéa 2, qui prévoit que les magistrats de complément seront intégrés aux tribunaux. Le système des magistrats de complément est instauré à Bruxelles notamment pour contourner l'exigence de bilinguisme. On a également prévu des magistrats de complément dans tout le pays pour remédier à certaines situations problématiques. Est-ce à dire que si l'on procède à 276 nouvelles nominations à Bruxelles — soit par le biais de recrutements, soit par voie de mobilité du tribunal néerlandophone vers le tribunal francophone — on s'engage provisoirement à ne plus recruter de magistrats de complément ?

Le représentant de M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que la question de M. Laeremans sort du cadre de l'article 63, § 3. Ce paragraphe concerne uniquement les magistrats de complément qui sont actuellement désignés par le Roi pour exercer leur charge au tribunal de Bruxelles et qui sont évidemment intégrés dans le cadre. Pour le reste, l'article 86bis est maintenu tel quel, pour le cas où il s'agirait par exemple d'appliquer des mesures spécifiques évoquées au sein du comité de suivi du processus de mise en œuvre de la réforme (comité de monitoring), conformément à l'article 61, alinéa 6.

M. Laeremans souhaiterait que M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, prenne au moins l'engagement de ne plus recruter de magistrats de complément pour l'instant. L'intervenant estime qu'avec ce système, Bruxelles est servie royalement.

L'article 63 est adopté par 12 voix contre 5.

Article 64

M. Laeremans renvoie au § 4 de l'article 64, qui prévoit qu'au tribunal francophone, des néerlandophones ne peuvent être recrutés qu'à concurrence du nombre de bilingues encore à recruter pour atteindre le tiers de bilingues requis (doc. Chambre, nº 53-2140/009, p. 41). Cela équivaut-il à une interdiction d'engager un néerlandophone au greffe francophone dès l'instant où la condition d'un tiers de « prétendus » bilingues est remplie ?

Pour le représentant de M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, le § 4 est très clair. L'alinéa premier, in fine, de ce paragraphe dispose en effet ce qui suit: « (...) à concurrence du nombre de bilingues encore à recruter pour atteindre le tiers de bilingues requis dans le tribunal concerné. » (doc. Chambre, nº 53-2140/009, p. 41). La première partie de l'alinéa 1er du § 4 trouve à s'appliquer dans ce cadre.

M. Laeremans en conclut que cette disposition ne s'applique qu'aux tribunaux, et pas aux parquets.

L'article 64 est adopté par 12 voix contre 5.

Articles 65 à 72

Les articles 65 à 72 sont successivement adoptés par 12 voix contre 5.

B. Projet de loi modifiant la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, à la suite de la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles (doc. Sénat, nº 5-1675/1)

Amendement nº 1

M. Laeremans dépose l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 5-1675/2), qui vise à supprimer l'ensemble des articles du projet de loi à l'examen.

Il déclare ne pas croire à la réforme proposée de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde et demande instamment une scission verticale.

M. Vanlouwe constate que le projet de loi à l'examen a été dissocié du projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles (doc. Sénat, nº 5-1674/1), ce qui l'étonne quelque peu. Il fait référence à l'avis du Conseil d'État, dans lequel on peut lire: « Par souci de sécurité juridique, il est indiqué de scinder la proposition de loi en deux parties, la première regroupant toutes les dispositions concernant les « éléments essentiels » et la seconde toutes les autres dispositions. Ainsi, on pourrait indiquer clairement quelles sont les dispositions qui peuvent uniquement être modifiées par une loi à majorité spéciale, à savoir les dispositions figurant dans la première partie. » (doc. Chambre, nº 53 2140/002). Il n'a pas été tenu compte ici de cette remarque.

Le représentant de M. Verherstraeten, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond qu'il a déjà été répondu à cette question à la Chambre des représentants. Il renvoie à cet égard au rapport fait au nom de la commission de révision de la Constitution et de la réforme des institutions sur la proposition de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles et la proposition de loi visant à créer un arrondissement judiciaire de Hal-Vilvorde et à instituer des tribunaux néerlandophones et francophones dans l'arrondissement de Bruxelles ainsi que la cour d'appel de Louvain (doc. Chambre, nº 53 2140/005, p. 72).

Mme de Bethune répond que la dissociation a été opérée à la Chambre des représentants. L'organisation des cours et tribunaux relève de l'article 77, 9º, de la Constitution, ce qui n'est pas le cas du projet de loi modifiant la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux. Il s'agit donc d'une application de la jurisprudence entre la Chambre des représentants et le Sénat en ce qui concerne les articles 77 et 78 de la Constitution. Cela n'a rien à voir avec la question de M. Vanlouwe.

M. Vanlouwe estime que l'on ne peut pas se contenter de faire référence à la discussion menée à la Chambre des représentants: le sujet doit également être débattu en profondeur au Sénat.

Selon M. Anciaux, le débat est mené de manière très approfondie et même plus large au Sénat.

L'amendement est rejeté par 12 voix contre 5.

C. Projet d'insertion d'un article 157bis dans la Constitution (doc. Sénat, nº 5-1673/1)

Amendement nº 1

M. Laeremans dépose l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 5-1673/2) visant à supprimer l'article unique.

Pour la justification de son amendement, il renvoie à son intervention pendant la discussion générale ainsi qu'à sa justification écrite.

M. Anciaux revient sur des déclarations relatives à un éventuel transfert des compétences en matière de justice aux entités fédérées. Selon M. Laeremans, pareil transfert est rendu impossible parce que le dédoublement de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles est bétonné dans la Constitution.

L'intervenant conteste vivement cette affirmation: si une régionalisation de la justice était envisagée, elle pourrait se faire moyennant l'obtention d'une majorité des deux tiers dans chaque groupe linguistique. Cela vaut également pour le prétendu verrou qui serait mis sur Hal-Vilvorde.

L'intervenant souligne également que M. Laeremans a lui-même déclaré être un fervent partisan du maintien au niveau fédéral de la compétence de la justice en ce qui concerne Bruxelles-19. M. Laeremans aurait-il trouvé « l'argument irréfutable » en faveur du maintien de la Belgique ?

L'argument selon lequel on dresse un obstacle supplémentaire ne tient dès lors pas la route, compte tenu des majorités requises.

Ce que M. Laeremans voulait dire, c'est qu'il est préférable que la compétence de la justice concernant Bruxelles reste fédérale tant que la Belgique existe. La politique judiciaire menée dans une capitale concerne l'ensemble du pays. La mainmise de la Bruxelles francophone sur Hal-Vilvorde est bétonnée dans la Constitution et empêche l'autonomie de la justice dans le Brabant flamand.

M. Vanlouwe souligne que les partis de la majorité veulent modifier à la majorité simple la compétence territoriale des tribunaux dédoublés. À l'avenir, pourrons-nous également modifier la compétence territoriale des tribunaux francophones à la majorité simple ou faudra-t-il réunir une majorité spéciale ? M. Anciaux a lui-même reconnu que le choix de la majorité simple n'était pas idéal.

M. Anciaux fait référence au texte de l'article 157bis de la Constitution.

L'amendement est rejeté par 12 voix contre 5.

VI. DÉCLARATIONS AVANT LES VOTES

Faisant référence au tableau intitulé « Ceci n'est pas une pipe » de René Magritte, M. Vanlouwe affirme que le projet de loi à l'examen est, non pas une scission, mais seulement un dédoublement. Il est en outre créé au profit des francophones une série de compensations, privilèges et exceptions qui portent déjà en eux les ferments de nouveaux problèmes à venir.

En Brabant flamand, les francophones se voient accorder des privilèges et avantages supplémentaires qui sont en outre verrouillés et donc difficilement modifiables. En Brabant wallon, aucun Flamand n'obtient des privilèges et avantages similaires, tandis que le bilinguisme est atténué à Bruxelles.

Les concessions flamandes sont bétonnées, ce qui veut dire qu'elles ne peuvent plus être modifiées que moyennant une loi spéciale.

Ce qui chagrine le plus l'intervenant dans toute la discussion qui a eu lieu, c'est que la majorité va sans doute se targuer d'avoir scindé Bruxelles-Hal-Vilvorde, alors que ce qui se prépare, à savoir le dédoublement, n'a jamais été demandé.

La majorité constitutionnelle n'a pas eu le courage d'organiser des auditions et essaie à présent de parler le moins possible de l'accord dans les médias par peur de critiques fondées. Cette majorité préfère réaliser une réforme qui va à nouveau engendrer des conflits. Cela ne fait l'affaire ni de la magistrature, ni des avocats, ni des justiciables (à l'exception des justiciables francophones).

Bref, l'accord sur le dédoublement de l'arrondissement judiciaire est néfaste pour la démocratie.

Pour M. Laeremans, la réforme décidée est catastrophique pour les néerlandophones, certainement pour les acteurs concernés (magistrats, avocats, Conseil d'État et Conseil supérieur de la Justice) qui ont démontré que la réforme dépasse sérieusement les bornes tant elle est irrationnelle.

Quelque 267 francophones supplémentaires seront engagés à Bruxelles, alors que ces engagements ne sont justifiés par aucun élément objectif sérieux et que la mesure de la charge de travail n'a pas encore été réalisée. C'est incompréhensible, surtout compte tenu des efforts budgétaires demandés et quand on sait qu'à côté de cela, les maisons de justice subissent une cure de dégraissage de personnel pour raison d'économies.

Par-dessus le marché, l'actuelle délimitation claire entre Bruxelles et Hal-Vilvorde est mise à mal et les magistrats francophones reçoivent davantage de pouvoir sur Hal-Vilvorde. Hal-Vilvorde est enchaînée à Bruxelles et ainsi en quelque sorte annexée en vue de permettre à la francisation juridique de se poursuivre, voire de permettre une extension du barreau francophone.

Ce qui pose surtout problème à l'intervenant, c'est que l'opinion publique ne peut pas le savoir, manoeuvre à laquelle nombre de journaux ont participé. L'intervenant rend dès lors hommage à quelques journalistes (tels M. Lars Bové du « Tijd ») qui ont tenté d'attirer l'attention sur les discriminations criantes. L'agence Belga a elle aussi tenté de présenter la situation de manière correcte, mais ce sont des exceptions.

L'intervenant ne comprend pas comment des parlementaires néerlandophones peuvent voter ce projet de loi, sans amendement, en sachant pertinemment qu'il contient des erreurs, des injustices flagrantes et de nouvelles discriminations.

M. Anciaux est convaincu que la majorité n'a pas hésité, au cours des discussions, à entamer le débat avec l'opposition. Opposition et majorité ont débattu de la question en profondeur et le secrétaire d'État a fourni un grand nombre de réponses très éclairantes.

L'intervenant a l'impression que l'on a tenté, tout au long de la semaine écoulée, de présenter le projet de loi à l'examen comme une défaite à plate couture pour les néerlandophones. Rien n'est moins vrai. Cet accord n'est peut-être pas une victoire éclatante pour les néerlandophones, mais elle ne l'est pas non plus pour les francophones. Une série de dispositions seront tout bénéfice, certainement à terme, pour l'administration de la justice. La scission du parquet entre Bruxelles et Hal-Vilvorde est un pas en avant en direction d'un des objectifs poursuivis, à savoir la lutte contre la criminalité à Hal-Vilvorde et l'approche différenciée que nécessite la périphérie flamande autour de Bruxelles.

Soulignons que des garanties suffisantes ont été intégrées dans le cadre du parquet, tant pour les néerlandophones que pour les francophones, afin d'arriver à une politique de poursuites sérieuse. Voilà qui est fort peu critiquable. Des mesures ont en outre été prises qui permettront d'asseoir le bilinguisme plus que par le passé. Le bilinguisme n'est certainement pas démantelé.

S'agissant des tribunaux, il est vrai que le projet à l'examen ne propose pas une scission pure. M. Anciaux se réjouit toutefois qu'un seul et même tribunal néerlandophone restera globalement compétent pour Bruxelles et Hal-Vilvorde. L'on procédera certes à un dédoublement: il y aura un tribunal néerlandophone et un tribunal francophone. Ce dédoublement répond à une demande de longue date et permettra en pratique de fonctionner de manière plus unilingue que jusqu'ici. L'on s'inscrit donc dans la dynamique des propositions de scission de ces dernières années.

La procédure est complexe, en raison des compromis qui ont dû être trouvés. Les partis francophones de la majorité institutionnelle n'étaient en effet pas demandeurs d'une scission de l'arrondissement judiciaire, ni d'une scission de l'arrondissement électoral. Tout doit donc être considéré dans sa globalité. Les Flamands réalisent plusieurs de leurs aspirations et les lois linguistiques ne subissent aucune modification essentielle. En revanche, des simplifications sont prévues pour le renvoi à l'autre langue, à condition, en substance, que les deux parties soient d'accord. M. Anciaux trouve cette solution acceptable étant donné que le projet de loi à l'examen vise à améliorer l'administration de la justice.

Beaucoup de choses dépendront de la mesure de la charge de travail, comme tout le monde s'accorde à le reconnaître. L'on ne soulignera jamais assez l'importance de cette mesure de la charge de travail. Mais l'intervenant a pu observer l'existence d'un grand volontarisme en la matière, tant au sein de la présente commission que de la part du gouvernement, en séance plénière et au sein d'autres commissions. Le secrétaire d'État l'a aussi exprimé au sein de la présente commission en des termes très forts. M. Anciaux a donc confiance. Sans mesure de la charge de travail, ce serait en effet une mauvaise chose et il est donc essentiel, pour lui et pour beaucoup d'habitants de Bruxelles et de Hal-Vilvorde, que cette mesure soit réalisée. S'il s'avère alors que la situation est au détriment des Flamands des parquets et des tribunaux par rapport à la situation actuelle, on disposera d'une justification pour prendre les mesures qui s'imposent.

M. Anciaux se dit satisfait du projet de loi à l'examen qu'il qualifie de pas dans la bonne direction et certainement pas d'« accord maudit ». Il n'est pas correct de le présenter ainsi. Il est normal que des critiques soient formulées, mais rejeter la proposition sans plus paraît excessif. C'est du donnant-donnant, mais on peut ainsi arriver à un bon accord à condition que la mesure de la charge de travail soit effectuée.

M. De Croo souligne que le projet de loi à l'examen ne prévoit en effet pas la scission de l'arrondissement judiciaire, mais les choses n'ont jamais été présentées ainsi. Il a toujours été dit qu'il s'agissait d'une scission et d'un dédoublement.

Certains sont manifestement obsédés par les symboles (il fallait une scission), tandis que la majorité constitutionnelle a recherché une solution et non des symboles.

M. Delpérée formule tout d'abord une observation relative à la méthode de travail suivie. La commission a décidé de ne pas procéder à des auditions, bien que certains l'aient demandé à plusieurs reprises. L'orateur souligne qu'il respecte les juges lorsqu'ils rendent des décisions. Ils sont là pour interpréter et appliquer la loi, et non pour la faire, ce qui relève de la responsabilité du législateur. Dès lors, lorsqu'ils font de la politique, ce sont des citoyens comme les autres, et leurs avis ne sont pas parole d'évangile.

Sur le fond, l'orateur partage le point de vue de M. De Croo sur le fait qu'il ne s'agit pas ici d'une scission. Ceci figurait déjà dans l'accord politique du 11 octobre, et n'a jamais été caché.

L'intervenant ajoute que cette réforme fait partie d'un tout. Il a déjà exposé précédemment qu'il était peu enthousiaste à propos de la scission de l'arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

À ce stade, il se déclare plus satisfait de la réforme de l'arrondissement judiciaire, dans la mesure où elle préserve les droits des francophones dans les 54 communes de BHV.

M. Deprez se réjouit du débat qui a eu lieu et qui a abordé des questions de fond. Il rend hommage à l'opposition pour avoir travaillé à des propositions alternatives. Le jeu démocratique a été entièrement respecté.

Il regrette cependant que, dans un débat portant sur la justice, il n'a entendu l'opposition mettre l'accent que sur les aspects strictement linguistiques. Pratiquement rien n'a été dit sur les possibilités que le texte ouvre en termes d'amélioration de la qualité de la justice, et de proximité pour les citoyens, notamment grâce à l'installation d'un parquet qui pourra mener une politique propre à Hal-Vilvorde, et grâce à des tribunaux qui fonctionneront en néerlandais. On ne pourra pas dire que les Flamands de Bruxelles ont été oubliés. Aux yeux de l'orateur, il existe une fascination excessive pour les aspects linguistiques, qui sont certes importants, mais pas uniques, et qui ne constituent pas nécessairement la préoccupation majeure des citoyens.

L'intervenant rend également hommage à la qualité des réponses fournies par le secrétaire d'État et par ses collaborateurs.

Pour Mme Piryns, le projet de loi à l'examen marque une étape importante dans la réforme de l'État. Le problème a perduré pendant des années, suscitant ainsi beaucoup d'amertume sur le terrain. C'est donc une bonne chose que l'on ait finalement trouvé une solution à ce problème.

Le mot clé de l'accord est « efficacité ». Grâce à la scission du parquet en un parquet de Hal-Vilvorde et un parquet de Bruxelles, ces deux parquets vont pouvoir se concentrer sur les formes de criminalité spécifiques à leur région. Il en résultera une justice plus efficace, une meilleure répression de la criminalité, tant à Bruxelles qu'à Hal-Vilvorde, ce qui ne pourra que profiter à l'ensemble des habitants.

Le fait que le tribunal de Bruxelles reste compétent pour tout le territoire de Hal-Vilvorde en étant dédoublé permettra d'améliorer l'efficacité. L'on à veillé à désigner un nombre suffisant de magistrats bilingues au niveau tant du parquet que du tribunal. Cela permettra certainement de gagner du temps. Lorsque deux parties conviennent d'un changement de langue, la procédure se déroulera aussi de manière plus efficace.

Bref, le projet de loi à l'examen est une étape importante dans la modernisation de la justice.

M. Van Rompuy cite trois points capitaux:

— pour la première fois, une politique spécifique en matière de poursuites pourra être menée à Hal-Vilvorde;

— l'essence des lois linguistiques n'est pas modifiée; on se borne à prévoir une forme d'objectivation;

— tout le monde confirme l'importance de la mesure de la charge de travail.

M. Bousetta se joint, au nom de son groupe, aux remerciements qui ont été formulés par les précédents orateurs, et se réjouit également de la qualité du débat.

Bien que les francophones n'étaient pas demandeurs de la discussion, son groupe a manifesté depuis le début sa disponibilité, a écouté longuement les points de vue exprimés, a contribué à la discussion et a pris ses responsabilités.

Il s'agit évidemment d'un accord global, et il doit être lu comme tel. Il est un pas nécessaire vers un meilleur équilibre entre les deux communautés linguistiques. L'orateur se réjouit dès lors que l'on aboutisse aujourd'hui à une conclusion dans un délai adéquat.

M. Cheron se réjouit qu'un précédent orateur fasse honneur à un grand peintre belge, certes surréaliste.

Cet orateur commet cependant une erreur de métaphore, car on le projet qui va être voté porte « réforme de l'arrondissement judiciaire ». Il ne s'agit donc pas d'un projet organisant la scission de cet arrondissement.

L'orateur espère que le texte qui va être voté contribuera à une réforme de la justice dans ce que l'on appelle aujourd'hui l'arrondissement judiciaire de Bruxelles-Hal-Vilvorde.

Il se joint à tous les orateurs qui ont souligné combien cette réforme, même si elle a été abordée presque exclusivement par l'opposition sous l'angle linguistique, est d'abord une réforme en matière de justice.

Il renvoie à un arrêt de la Cour de cassation déjà cité qui, en 2006, a établi que l'État belge était en défaut par rapport à l'arriéré judiciaire. Le grand défi est de rencontrer cet arrêt et de faire en sorte qu'à l'avenir, pour l'ensemble des justiciables de la zone, il y ait une amélioration significative dans cette matière essentielle qu'est le droit d'avoir accès à une justice rendue dans un délai raisonnable.

VII. VOTES SUR L'ENSEMBLE

— L'ensemble du projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, nº 5-1674/1, est adopté par 12 voix contre 5.

— L'ensemble du projet de loi modifiant la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, à la suite de la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, nº 5-1675/1, est adopté par 12 voix contre 5.

Par suite de l'adoption de ces deux projets de loi, la commission constate que la proposition de loi nº 5-755 de MM. Laeremans et Ceder, devient sans objet.

— Le projet d'insertion d'un article 157bis dans la Constitution, nº 5-1673/1, est adopté par 12 voix contre 5.


Le présent rapport a été approuvé par 13 voix et 1 abstention.

Les rapporteurs, La présidente,
Muriel TARGNION. Bert ANCIAUX. Sabine de BETHUNE.

— Le texte du projet insérant un article 157bis dans la Constitution qui a été adopté par la commission est identique au texte transmis par la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 53-2141/4 et 6).

— Le texte du projet de loi portant réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles corrigé par la commission figure dans le document nº 5-1674/4.

— Le texte, adopté par la commission, du projet de loi modifiant la loi du 5 août 1992 sur la fonction de police et la loi du 7 décembre 1998 organisant un service de police intégré, structuré à deux niveaux, à la suite de la réforme de l'arrondissement judiciaire de Bruxelles, est identique au texte transmis par la Chambre des représentants (doc. Chambre, nº 53-2280/1).

VIII. ANNEXES