5-1133/1 (Sénat)
53-1704/1 (Chambre)

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Sénat et Chambre des représentants de Belgique

SESSION DE 2010-2011

30 JUIN 2011


Le Conseil européen des Chefs d'État et de gouvernement des jeudi 23 et vendredi 24 juin 2011


RAPPORT FAIT AU NOM DU COMITÉ D'AVIS FÉDÉRAL CHARGÉ DES QUESTIONS EUROPÉENNES PAR MM. MAHOUX (S) ET FLAHAUT (CH)


I. INTRODUCTION

Chaque réunion du Conseil européen est généralement précédée et suivie d'un échange de vues entre les membres du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes, d'une part, et le premier ministre et/ou un autre membre du gouvernement belge, d'autre part.

Des réunions se sont tenues les mardis 21 et 28 juin 2011 concernant respectivement l'ordre du jour et les résultats du Conseil européen des 23 et 24 juin 2011.

II. BRIEFING DU MARDI 21 JUIN 2011

A. Exposé introductif de M. Yves Leterme, premier ministre

Le premier ministre fait observer que la réunion du Conseil européen des Chefs d'État ou de gouvernement des jeudi 23 et vendredi 24 juin 2011 qui se tiendra à Bruxelles, traitera de plusieurs sujets. En ce qui concerne la thématique socio-économique, le point principal sera probablement le Semestre européen.

Au cours du Semestre européen, qui se terminera le 30 juin, l'Union européenne a avancé un certain nombre de priorités en se fondant sur l'examen annuel de la croissance (Annual Growth Survey). Les États membres avaient jusqu'au 15 avril pour formuler leurs objectifs en matière de plans de réforme nationaux, après quoi la Commission européenne a préparé des projets de recommandation. Après avoir été examinés par les Conseils ECOFIN et EPSCO, ces projets sont à présent à l'agenda en vue de leur ratification, laquelle ne fait aucun doute vu le consensus relativement large qui existe déjà.

Les recommandations concernant les pays spécifiquement ont été transmises sous forme de projet le 7 juin 2011 et, depuis lors, le gouvernement et diverses formations du Conseil comme ECOFIN et EPSCO ont travaillé sur ce document de sorte qu'un projet de recommandations pour la Belgique se trouve sur la table. Celui-ci ne devrait pas poser de problèmes. Un cabinet restreint au niveau du gouvernement se réunira le mercredi 22 juin 2011 et se penchera sur le texte définitif du projet. Le premier ministre y fera part des remarques et considérations sur les recommandations relatives à la Belgique, émises par les parlementaires lors de la présente réunion.

Le programme national de réforme de la Belgique a été déposé auprès de la Commission européenne en même temps que le programme de stabilité.

La recommandation de la Commission européenne a pointé du doigt six faiblesses de notre économie. Le texte initial du point 2 de la recommandation, qui porte sur les retraites, et du point 4, qui traite de l'indexation automatique, qui a également été discuté au sein du parlement, a été modifié comme suit: « prendre des mesures pour améliorer la viabilité à long terme des finances publiques. Conformément au cadre de la stratégie en trois volets de l'Union, il s'agirait avant tout de juguler les dépenses liées au vieillissement, notamment en empêchant la sortie anticipée du marché du travail afin de relever sensiblement l'âge effectif de la retraite. » Le passage suivant a ensuite été ajouté: « Des mesures telles que la liaison de l'âge légal de la retraite à l'espérance de vie pourraient être envisagées. » (1)

Il s'agit de la recommandation qui a trait au système des retraites en Belgique et qui vise surtout à augmenter la moyenne d'âge à partir de laquelle les citoyens se retirent définitivement du marché du travail.

En ce qui concerne le système de l'indexation automatique des salaires, la nouvelle formulation est la suivante: « Take steps to reform, in consultation with the social partners and in accordance with national practice, the system of wage bargaining and wage indexation, to ensure that wage growth better reflects developments in labour productivity and competitiveness » (2) .

Après le Conseil européen de septembre, lorsque le budget sera établi, des mesures devront être prises pour mettre en œuvre les recommandations. Les suites qui auront été réservées aux recommandations feront l'objet d'une évaluation lors du sommet de printemps.

S'agissant du volet du Semestre européen, il importe que le Conseil apporte, en plus des recommandations en projet, des précisions sur les procédures à suivre pour la politique transversale à mettre en place dans l'ensemble de l'Union européenne.

Le premier ministre trouve que l'analyse faite par la Commission européenne est pertinente. Les problèmes pointés par la Commission correspondent à ceux rencontrés par l'économie belge et s'inscrivent dans le droit fil tant des recommandations issues de l'examen annuel de la croissance (Annual Growth Survey) que de celles qui ont été formulées pour tous les États membres de la zone euro.

Le premier ministre souligne néanmoins que la suggestion de mesures pour rencontrer les objectifs fixés pour l'avenir incombe au formateur et aux partis qui négocient pour la formation d'un nouveau gouvernement. Le gouvernement en affaires courantes peut seulement effectuer des travaux préparatoires. C'est ainsi qu'il a demandé au Conseil supérieur de l'emploi de préparer l'évaluation du Pacte de solidarité entre les générations d'octobre 2006 et que lors du Conseil des ministres du 1er juillet 2011, il lancera les préparatifs administratifs du budget 2012, en concertation avec le ministre Vanhengel et le secrétaire d'État Wathelet.

Le deuxième élément du volet socio-économique et financier porte sur la formalisation de la mise en place du Mécanisme européen de stabilité (MES) et du Fonds européen de stabilité financière (FESF), ainsi que le couronnement de toute la procédure concernant le Six Pack. Selon le premier ministre, il est possible que le Parlement européen vote encore au cours de cette semaine le Six Pack. Dans ce cas, sa mise en place devrait être rapide. M. Leterme est d'avis que le Conseil ECOFIN a accompli de l'excellent travail le 20 juin 2011 et qu'il est parvenu à un consensus sur certaines modifications. Il reste à espérer que les procédures de codécision puissent être bien appliquées et aboutissent à de bons résultats.

La situation de la Grèce sera également abordée dans le cadre de la lutte contre la crise financière, deuxième élément du volet économique de l'ordre du jour.

La Commission européenne, le FMI et la Banque centrale européenne ont communiqué une évaluation positive. Ils subordonnent néanmoins le versement de la cinquième tranche de l'aide, qui se monte à 12 milliards d'euros, à l'adoption par la Grèce de quelques mesures supplémentaires.

L'Eurogroupe a insisté sur deux conditions impératives: l'implication du secteur privé et l'adoption de mesures légales en Grèce, conformément aux exigences de la Troïka.

Le deuxième point important de l'ordre du jour est la politique migratoire. Actuellement, nos frontières extérieures sont toujours soumises à la pression de flux migratoires très importants, notamment en provenance d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Il y a également des problèmes au sein même de l'Union.

La discussion se concentrera sur trois éléments:

— la problématique des frontières extérieures et les relations avec les pays tiers: la Belgique recommande de donner de nouvelles impulsions aux propositions visant à renforcer Frontex, comme celle consistant à subordonner l'aide au développement à certains pays du voisinage méridional à une limitation des migrations vers l'Union. La Belgique souscrit également au projet de la Commission à l'examen, qui propose une modification du règlement des visas consistant à suspendre la libéralisation en cas d'afflux massif ou d'abus;

— la problématique à l'intérieur des frontières, l'enjeu politique de la Convention de Schengen: plusieurs États membres plaident pour le rétablissement des frontières intérieures lors de situations d'afflux massifs. La Belgique partage également ce point de vue, à condition qu'une telle mesure s'applique globalement à l'ensemble de l'Union. Cependant, l'élaboration d'une méthode visant à imposer des restrictions ouvre un débat qui touche à l'essence même de l'Union européenne, à savoir la libre circulation des personnes;

—  la politique d'asile: la réalisation de l'objectif escompté, à savoir le parachèvement d'ici 2012 du régime d'asile européen commun, demande encore énormément de travail. Bien entendu, la Belgique réclame une harmonisation maximale des critères de réglementation en la matière.

Dans les projets de conclusions, l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne est jusquà présent le troisième et dernier point de l'ordre du jour. Le Conseil Affaires générales s'est mis d'accord sur la proposition de faire adhérer la Croatie le 1er juillet 2013. Les benchmarks ont rencontré les critères de Copenhague et l'acquis communautaire. Un consensus s'est également dégagé pour avoir un système de suivi renforcé au niveau des quatre derniers chapitres à partir du 22 ou 23 août 2011. Il y a donc encore du travail à accomplir pour pouvoir conclure ces chapitres. Dès que cela sera fait, l'Union européenne vivra un moment historique: celui où l'on décidera de l'adhésion de la Croatie comme 28e État membre de l'Union européenne. Il s'agit là d'une chance historique que saisit l'Union européenne de stabiliser les Balkans occidentaux, non pas sur la base de critères politiques, mais sur la base d'un dossier où la Croatie a accompli des progrès et rencontre actuellement les exigences en matière d'adhésion à l'Union européenne.

B. Échange de vues

M. Herman De Croo, député (Open VLD), fait part de sa satisfaction et de celle de son groupe au sujet de la position que la Belgique défendra du point de vue du droit conventionnel en ce qui concerne l'application des règles de Schengen.

Pour le reste, il aimerait savoir si la préparation du Pacte Euro Plus sera déjà abordée lors de la réunion du 1er juillet et, le cas échéant, si le premier ministre se bornera, concernant la contribution belge, à énumérer les points et à citer le pacte de solidarité entre les générations etc., ainsi qu'il l'a fait lors de réunions précédentes, ou s'il actualisera son intervention.

M. De Croo souhaiterait savoir aussi si l'évaluation des programmes de réforme nationaux sera examinée de manière globale ou si elle le sera par pays et par proposition. Il est possible que plusieurs pays insistent pour que les points de vue adoptés et les programmes déposés soient présentés de manière individuelle.

Mme Olga Zrihen, sénatrice (PS), souligne que ce sommet européen est extrêmement important. Il s'agit d'un moment clé car la stratégie Europe 2020 est largement remise en question dans la mesure où l'on peut se demander si la Commission européenne a changé de méthodologie. Il semble aux personnes qui, jusqu'à présent, ont exercé la fonction de député européen, que la Commission européenne avait plutôt eu l'habitude d'être moins intrusive dans les politiques économiques nationales. L'intervenante est d'avis que, dans les propositions faites, l'on essaie de définir non seulement le « quoi » mais aussi le « comment » il conviendrait de procéder. À cet égard, Mme Zrihen souhaite se référer à deux points très spécifiques, à savoir les aspects que le premier ministre a évoqués sur le volet des pensions. Le texte anglais stipule qu'il faut faire en sorte de réduire ou d'augmenter l'âge légal de la pension, mais sans donner véritablement de limites. En ce qui concerne le volet consacré à l'indexation, on se situe dans un travail d'étapes progressives qui doit être pris en considération étant donné que, jusqu'à présent, le volet de la concertation sociale semblait davantage relever du volet des interventions nationales.

En ce qui concerne le plan national de réforme, Mme Zrihen rejoint la question de M. De Croo. Il s'agit d'un axe fondamental du travail qui s'accomplit, tant au niveau fédéral qu'en association avec les entités fédérées. Elle considère qu'il faudrait que les États membres, même s'ils ont accepté des règles régissant les finances publiques telles qu'énoncées dans le pacte de stabilité et de croissance, puissent évaluer eux-mêmes de quelle manière ils peuvent y répondre. La sénatrice pense qu'il faudrait adopter une attitude assez ferme afin de rappeler à la Commission européenne une méthodologie qui lui a semblé, jusqu'à présent, davantage constructive.

La Grèce connaît cette nécessité contraignante, pour obtenir 12 milliards d'euros supplémentaires, d'impliquer à la fois le secteur privé et également d'appliquer les mesures légales de la Troïka.

D'après ses informations, Mme Zrihen fait observer que l'Irlande évolue dans une situation qui n'est pas tellement différente de celle de la Grèce. En effet, si la Grèce a obtenu 110 milliards d'euros, l'Irlande, quant à elle, en a reçu 85 milliards. L'intervenante remarque que, jusqu'à présent, elle n'a pas vraiment entendu les conditions qui ont été imposées à l'Irlande pour obtenir cette somme. Dès lors, elle est d'avis que le volet de la fiscalité serait peut-être un aspect extrêmement important et intéressant, de manière à ce qu'il n'y ait pas une sorte de dumping qui se poursuivrait au niveau européen.

Mme Zrihen rappelle tout l'attachement de la Belgique à l'Europe; elle pense cependant que des instruments économiques doivent être examinés. En guise de preuve, elle rappelle la réponse de l'économiste Geert Noels, qui affirmait que « comme l'on ne soigne pas un alcoolique en lui donnant de l'alcool, on ne soignait pas un pays endetté en augmentant sa dette ».

M. Bruno Tuybens, député (sp.a), demande dans quel délai l'Europe espère pouvoir engranger des résultats dans sa lutte contre les problèmes économiques actuels.

Pour réduire l'endettement des différents pays européens, il est absolument nécessaire de faire preuve d'orthodoxie budgétaire, mais pour se donner les moyens de sortir de l'impasse économique, il faudrait assortir celle-ci d'un plan d'investissements ambitieux en matière d'économie durable.

Il faut donc faire en sorte que les objectifs Europe 2020 ne restent pas à l'état de simples mentions textuelles mais qu'ils soient réellement mis en œuvre et intégrés dans différents dossiers économiques. Il faut veiller aussi à ce que leur degré de réalisation fasse l'objet d'un suivi très rigoureux de manière à garantir que l'impact des mesures requises sera vraiment visible.

Si l'Europe entend résoudre les problèmes économiques en deux, trois ou quatre ans, elle n'a évidemment d'autre choix que celui de faire preuve d'orthodoxie budgétaire.

Mais si l'Europe ne parvient à atteindre cet objectif qu'à un horizon de dix ans ou plus, elle devra assortir cette orthodoxie budgétaire d'une politique d'investissement très ambitieuse en matière d'économie durable afin de sortir de l'impasse à long terme.

La deuxième question de M. Tuybens concerne les ressources propres de l'Europe. On a déjà plaidé instamment pour que l'Europe puisse se doter de ressources propres, y compris par le biais de l'émission d'euro-obligations. Il faudrait encourager les pays qui assainissent leur budget à gérer leur dette à moindres frais. Dans la pratique, on constate par exemple que les émissions obligataires du mécanisme européen de stabilité financière (MESF) et du Fonds européen de stabilité financière (FESF), qui bénéficient de la garantie des États membres, ont un taux d'intérêt inférieur de 37 points de base. Il est important vis-à-vis des marchés financiers d'exploiter les opportunités qui se présentent. Cela vaut aussi pour la taxe sur les transactions financières. Fixée à un taux de 0,05 % — soit 5 centimes d'euro par transaction de 100 euros —, elle rapporterait 200 milliards d'euros chaque année à l'Union européenne.

M. Tuybens aimerait connaître aussi le point de vue du premier ministre sur les propos tenus par le ministre des Finances qui a déclaré savoir depuis dix ans déjà que la Grèce présente des chiffres falsifiés.

L'intervenant constate également qu'en ce qui concerne la politique européenne de voisinage, les conclusions du Sommet vont dans le bon sens. Il a pu voir de ses propres yeux qu'à Tunis, par exemple, une communauté démocratique très puissante s'est formée et s'emploie à mettre fin à la dictature. L'Europe occidentale doit admettre que la politique qu'elle a menée n'était pas la bonne. Elle a opté pour la stabilité et la préservation de son propre modèle économique. Elle n'a pas été suffisamment à l'écoute de la population ni attentive au respect des droits de l'homme. L'Europe peut essayer d'y remédier en apportant un soutien effectif aux pays démocratiques ou ceux qui le sont devenus et ce, par le biais de la réalisation de travaux d'infrastructure et d'autres programmes d'investissements.

Pour le reste, M. Tuybens indique que l'Europe se doit, lors du Sommet, d'adresser un signal politique fort montrant que l'exclusion socio-économique de la population rom, qui représenterait 10 à 12 millions de personnes en Europe, est inacceptable.

Mme Christiane Vienne, députée (PS), fait observer, en ce qui concerne le volet socio-économique, que son groupe est extrêmement attaché à l'Europe et à l'impératif d'une meilleure gouvernance économique solide pour la zone euro. Cependant, la députée exprime son inquiétude et son désaccord par rapport à ce à quoi l'on assiste actuellement au sein de l'Union européenne. En effet, la stratégie ambitieuse Europe 2020 qui parlait de diminution de la pauvreté, d'investissements dans la recherche et le développement ou encore d'économies d'énergie, semble devenue inexistante.

Pourtant, le Commissaire Olli Rehn soulignait à l'époque que le Semestre européen devait garantir la stabilité financière de l'Europe et favoriser une meilleure croissance, créatrice d'emploi, en ligne avec les objectifs de la stratégie Europe 2020.

Or, dans les documents, on ne retrouve pas cet esprit et on peut donc se poser la question de savoir si ces recommandations ne sonnent pas tout simplement le glas d'une politique économique européenne équilibrée et centrée sur le social.

Même si le PS est d'accord avec les objectifs à atteindre, il est clair que les moyens d'y parvenir ne lui conviennent pas.

Depuis le 7 juin, la Commission nous dicte des politiques nationales contraires à une « croissance inclusive et durable ». Dès lors, nous devrions diminuer nos dépenses publiques, augmenter l'âge de la retraite, remettre en question notre système de négociation collective, notre indexation des salaires, nos indemnités de chômage ou encore augmenter la TVA, qui est l'impôt le plus injuste qui soit.

Mme Vienne constate que l'on évoque peu le volet des recettes. Le PS a déposé des propositions sur les Eurobonds, sur la taxe sur les transactions financières (TTF). Le PS a donc présenté des alternatives, mais il considère qu'il est fondamental de s'attaquer aux causes de l'inflation, c'est-à-dire aux spéculateurs et non pas de s'attaquer uniquement aux citoyens. En effet, ce n'est pas à eux d'essuyer seuls la débâcle d'un système géré par des spéculateurs peu scrupuleux.

Il faut agir sur le départ effectif à la retraite et non sur l'âge légal de départ.

Les dépenses publiques — maîtrisées — doivent permettre de garantir une continuité indispensable en cas de crise, mais également d'investir en termes d'infrastructures et de recherche et de développement.

L'intervenante rappelle les conclusions du dernier Conseil européen qui précisaient que « les États membres doivent choisir librement les instruments permettant d'atteindre les objectifs convenus ». Choisit-on encore librement quand on parle dans le cadre du Six Pack d'automaticité des sanctions ?

La Belgique pourrait rapidement être sanctionnée pour avoir défendu des politiques socio-économiques qui ont fait leurs preuves alors que les politiques néolibérales — notamment de coupes sombres — sont dangereuses pour l'économie. Le cas britannique, avec une chute de 0,5 % du PIB au début de l'année, en est la preuve.

Face à ces constats, Mme Vienne pose plusieurs questions:

— Les mécanismes de sanctions (automatiques) ne sont, à l'heure actuelle, pas encore réellement déterminés. Comment ces sanctions s'articuleraient-elles ? Alors que les dernières conclusions du Conseil européen laissaient une marge de manœuvre aux États membres pour atteindre les objectifs européens, qu'en sera-t-il après l'adoption du Six Pack ?

— Comment l'échec de la politique d'austérité britannique est-il analysé au sein du Conseil européen ?

— Comment expliquer la disparition de la stratégie Europe 2020, et de ses objectifs ambitieux, au sein des recommandations adressées par la Commission aux États membres ?

En ce qui concerne le volet migration, Mme Vienne fait observer, à l'instar de ses collègues, que Schengen est un accord essentiel devant permettre la libre circulation des citoyens européens et qu'il ne doit, dès lors, pas devenir un outil de fermeture des frontières. Selon l'intervenante, toucher aux accords de Schengen revient à toucher à ce qui constitue le cœur de l'Union européenne.

Ce qu'il faut réellement à l'Europe, c'est une législation commune en matière d'accueil, de séjour et d'asile. On a parlé d'un accord global sur la création d'un régime européen uniformisé d'asile encore possible pour 2012, date fixée par les instances européennes. Est-il réaliste d'imaginer que l'on atteindra cet objectif ? Sera-t-il encore possible de mener ensemble, étant donné l'élargissement futur de l'Union européenne, une politique d'asile en lien avec une politique d'aide au développement des pays du Sud, afin de s'attaquer à la cause de l'immigration — notamment sociale et économique — et non uniquement aux conséquences ? La grande misère du monde se répartit entre pays pauvres. Comment l'Europe gérera-t-elle cette immigration, petite partie de cette misère qu'elle accueille dans ses États membres ?

M. Georges Gilkinet, député (Ecolo-Groen !), souligne que l'on se situe à un moment clé de la construction européenne, mais il ne partage pas l'optimisme du premier ministre ni son adhésion au contenu des documents distribués. Il considère que ces documents révèlent plutôt l'inquiétude qui peut caractériser l'approche d'Ecolo-Groen ! Les recommandations de la Commission à la Belgique et le Six Pack s'inscrivent dans la même logique. Celle-ci ne respecte pas deux balises qu'Ecolo-Groen ! souhaite placer face à la construction européenne. Fédéralistes convaincus, les écologistes essaient de jouer un rôle positif dans la construction européenne là où ils sont représentés, à savoir au Parlement européen, au Parlement fédéral et dans les parlements régionaux. Néanmoins, en matière de construction européenne, une première balise à placer concerne le respect du modèle social européen qui semble, selon M. Gilkinet, de plus en plus remis en cause. La seconde balise à placer concerne la sortie du nucléaire et, dès lors, la création d'une société susceptible de créer de nombreux emplois dans le domaine des énergies renouvelables notamment.

Le modèle que l'Union européenne a mis sur la table ne semble pas respecter ces deux balises puisqu'elle impose un modèle qui vise à l'équilibre budgétaire. Ce dernier est assurément important. D'ailleurs, les entités fédérales et fédérées de la Belgique ont décidé d'une trajectoire à suivre en la matière d'ici 2015. Néanmoins, cet objectif ne pourra pas être atteint si l'on suit les recommandations de la Commission européenne, c'est-à-dire uniquement via une limitation stricte des dépenses avec, pour conséquence, la remise en cause du modèle social belge qui a joué un rôle de stabilisateur au cours de la crise. L'indexation automatique des salaires est une manière d'assurer un financement de notre sécurité sociale et d'éviter un décrochage trop important des salaires par rapport à d'autres types de revenus. En ce qui concerne l'âge de départ à la retraite, de plus en plus de personnes souhaitent le fixer à 67 ans alors que l'on ne s'interroge pas sur les raisons qui poussent les travailleurs à partir de plus en plus tôt à la retraite (stress, pénibilité du travail, niveau des pensions). La question des indemnités accordées aux travailleurs sans emploi et la durée de leur octroi dans le temps devrait également être soulevée dans le document de la Commission européenne.

M. Gilkinet estime que l'on apporte des mauvaises réponses à des vrais problèmes. Ce qui est d'autant plus inquiétant, c'est que l'on prévoit des mécanismes de sanctions financières pour les États qui, dans le cadre du Six Pack, ne respecteraient pas les injonctions de la Commission européenne.

En tant que représentant du gouvernement belge, le premier ministre se montre-t-il favorable à cette dynamique de sanctions qui, pour les États en difficulté, ne pourrait avoir pour conséquence un renforcement de celles-ci ? Quelle est la compatibilité avec, notamment, les clauses sociales qui figurent dans le Traité de Lisbonne ? Quelle place occuperont à l'avenir les partenaires sociaux, qui font la spécificité de l'État belge, au niveau de ces mécanismes ? Les partenaires sociaux assurent une certaine paix sociale et constituent également un outil de lutte contre les situations de grande pauvreté.

Des alternatives existent. Certains constats de la Commission européenne sont intéressants, notamment lorsqu'elle fait observer que l'économie belge n'est pas suffisamment spécialisée et pointue pour jouer un rôle durable en matière d'exportation.

Que met-on en place en matière de recherche et développement ? Lorsque l'on souligne les déséquilibres entre, d'une part, l'absence de fiscalité environnementale et, d'autre part, le poids des charges sur le travail et des cotisations sociales, que propose-t-on comme solution ? Où en sont les discussions en termes d'harmonisation fiscale au niveau européen ? Parle-t-on, entre collègues européens, d'une sorte de « traité de désarmement fiscal » par lequel les pays cesseraient de se concurrencer comme on le fait à l'heure actuelle en Belgique avec le système d'intérêts notionnels sur le plan fiscal, ce qui met en difficulté les États voisins ? La taxe sur les transactions financières, qui a été votée par la Belgique il y a plusieurs années, va-t-elle voir le jour au niveau européen ? Élargira-t-on la vision en matière de compétitivité en ne se concentrant pas uniquement sur les coûts salariaux, mais également sur le coût des matières premières et de l'énergie afin d'essayer de favoriser une compétitivité qui ne se bâtirait pas sur le dos des travailleurs, mais qui permettrait également de répondre aux enjeux environnementaux et de s'inscrire clairement dans l'économie de demain ?

Les écologistes ont l'impression que l'on utilise des recettes anciennes qui ont montré toutes leurs limites dans d'autres pays, que l'on remet en cause un modèle social qui doit être préservé conformément aux traités et que l'on ne pense pas à créer les conditions d'un développement économique durable pour demain.

En ce qui concerne la Grèce, M. Gilkinet constate, au départ, un important déficit des finances publiques qui, chose inacceptable, a été masqué aux yeux des instances internationales. C'est la raison pour laquelle les écologistes soutiennent les dispositions du Six Pack qui veulent doter l'Union européenne d'indicateurs plus performants, afin d'essayer de prévenir ce genre de difficultés.

Derrière l'important déficit financier de la Grèce se cache une fraude fiscale généralisée, d'où l'importance de disposer au niveau de chaque État membre de politiques fiscales plus efficaces tout en renforçant la coordination au niveau de l'Union européenne.

La Grèce a également engagé, au niveau militaire, des dépenses démesurées. Il convient naturellement de replacer tous ces éléments dans le contexte de la finance internationale où des produits comme les Credit Default Swaps (CDS) posent problème et risquent de renforcer les difficultés de la Grèce. Face à cela, une première aide financière a été octroyée, au niveau des États, par l'Union européenne. Néanmoins, des atermoiements se font jour quant à l'octroi d'une nouvelle aide. M. Gilkinet exprime son regret par rapport au fait qu'une décision plus nette ne puisse être prise à cet égard, afin d'afficher une plus grande solidarité au niveau des États européens. De plus, il souhaiterait un plus grand esprit de décision quant à la responsabilisation des acteurs privés. Ces derniers sont également responsables de la situation en Grèce. Il déplore aussi une absence d'ouverture par rapport à une possibilité de restructuration de la dette grecque.

Les exigences imposées à la Grèce en contrepartie des aides qui lui sont octroyées risquent de rendre la situation encore plus invivable. Au plan social, la situation a pour conséquence de contracter le marché de la consommation intérieure en Grèce. Les outils publics sont bradés pour un coût différé important. En outre, aucune économie n'est capable d'assumer un retour à l'équilibre dans les délais tels qu'ils sont fixés par la Commission européenne. Il faut donc trouver une solution pour la Grèce de façon plus volontariste. En effet, lorsqu'on aide la Grèce, on aide également les autres pays, parce que ces derniers sont exposés à la dette grecque via leurs établissements bancaires.

M. Gilkinet souhaite être le porte-parole des Verts et demande une accélération du fonctionnement des mécanismes d'aide à la Grèce et un assouplissement du calendrier qui lui a été imposé, parce qu'il est intenable et risque de conduire ce pays dans une situation pire que celle dans laquelle il se trouve actuellement.

Mme Véronique De Keyser, membre du Parlement européen (PS), souligne que le premier ministre a évoqué la possibilité de voter rapidement le Six Pack. Néanmoins, Mme De Keyser fait remarquer qu'il y a loin de la coupe aux lèvres; en effet, si le Six Pack est voté — ce dont elle doute — il ne le sera pas avec l'appui de la gauche du Parlement européen. Il est clair que ce sera un vote très significatif. Pourquoi cette opposition de la gauche ? Le Parlement européen est d'habitude un lieu de compromis. Depuis des mois, l'on travaille à ce Six Pack avec la volonté de le faire aboutir. L'intervenante est convaincue qu'il faut une gouvernance économique au niveau européen, qu'il faut de la rigueur dans les pratiques budgétaires des États. Elle se déclare partisane de la méthode communautaire, c'est-à-dire d'une méthode forte et contraignante. Néanmoins, elle considère que ce qui est aujourd'hui sur la table s'avère absolument suicidaire.

Mme De Keyser considère, en effet, que le modèle social européen est menacé et souligne qu'il est probable que la stratégie Europe 2020 ne soit pas menée à bien. Or, force est de constater que les Chinois sont en train de l'étudier parce qu'ils voudraient la copier. Mme De Keyser fait observer, à cet égard, qu'il y a quelque chose de difficile à comprendre au niveau européen. Cela ne pourrait être compris que si l'on acceptait ce que dit parfois le président Van Rompuy, à savoir qu'il s'agit de la seule alternative possible. On se trouve face à une politique d'austérité qui pénalise les citoyens qui n'ont pourtant rien à se reprocher en ce qui concerne la crise et qui ménage les systèmes financiers: les taxes sur les transactions financières n'existent pas encore, l'Europe n'a pas de ressources propres, etc. Ce type de modèle d'austérité financière que l'on a qualifié d'orthodoxie élude rapidement les alternatives. Les alternatives que le groupe socialiste a proposées depuis qu'il tente de négocier des compromis expriment un certain accord avec l'application de la rigueur, mais aussi avec le maintien de possibilités de dépenses publiques afin de favoriser la relance économique. Selon Mme De Keyser, dès les premières pages de la stratégie Europe 2020, il est mentionné que si un retard est accusé en matière de croissance et d'emploi, une génération sera sacrifiée. Il s'agit là du pire des scénarios possibles. La gauche, au sens large, ainsi que les Verts ont plaidé pour le respect d'une golden rule, à savoir le maintien de possibilités de dépenses publiques et d'investissements, l'application d'une taxe sur les transactions financières. Il s'agit là d'une alternative qui préserve l'application de la rigueur, mais qui ne tue pas l'ensemble du modèle social européen.

La députée européenne mentionne la grande manifestation des syndicats au niveau européen. Celle-ci aura lieu à Luxembourg le mercredi 22 juin 2011. Au sein de l'Union européenne, des personnes que l'on appelle « les indignés » manifestent un peu partout sans savoir ce qu'ils doivent exactement revendiquer. Ce que le groupe socialiste souhaite que le premier ministre sache, c'est qu'il ne soutiendra pas le projet d'une Europe qui tue le modèle social.

L'intervenante souligne que le rapport Ferreira a permis d'obtenir des indicateurs macro-économiques un peu plus sociaux, ce qui constitue le seul acquis.

Il est possible que les mercredi 22 et jeudi 23 juin 2011, on vote des rapports amendés et qu'on suspende le vote jusqu'au mois de juillet 2011. C'est une des hypothèses les plus vraisemblables. Mme De Keyser doute que l'on réussisse au mois de juillet à obtenir davantage qu'aujourd'hui. La gauche n'est, pour l'instant, pas majoritaire en Europe. Lorsque le premier ministre déclare qu'il se réjouit que le Six Pack soit voté, il est bon qu'il sache, afin de tempérer son enthousiasme, qu'il ne pourra se réjouir qu'avec la droite européenne.

La députée européenne demande instamment au premier ministre de se battre pour le maintien du modèle social européen, parce qu'elle considère que celui-ci constitue ce que l'Europe a fait de mieux. La disparition du modèle social européen serait lourde de conséquences sur la manière dont les citoyens européens percevraient l'Europe et constituerait un gaspillage de 50 ans de travail.

M. Hagen Goyvaerts, député (Vlaams Belang), relève que le groupe VB n'était pas favorable au fait que le gouvernement en affaires courantes assume la mission de mettre en œuvre le semestre européen et le plan national de réforme. Lorsqu'il communiquera les décisions à l'Europe, le premier ministre précisera-t-il que le gouvernement en affaires courantes ne peut que confirmer ce qui est formulé dans les recommandations ? Ou indiquera-t-il aussi qu'il appartient à un prochain gouvernement de mettre en œuvre concrètement les recommandations et d'y déroger le cas échéant ? L'on a d'ailleurs déjà constaté que les recommandations ne faisaient pas l'unanimité au sein de la coalition actuelle du gouvernement démissionnaire. Le groupe PS en particulier était opposé aux recommandations. Les libéraux et la N-VA y adhéraient, mais la N-VA ne fait pas encore partie du gouvernement.

M. Goyvaerts aimerait connaître l'opinion du premier ministre sur les déclarations du président de la Banque centrale européenne, M. Trichet. Celui-ci a d'ores et déjà prévenu que, si les banques privées contribuaient au sauvetage de la Grèce, il en résulterait une crise européenne de la dette qui toucherait également la Belgique et l'Italie.

Il aimerait d'ailleurs avoir l'avis du premier ministre sur les déclarations du ministre des Finances qui affirme qu'en 2001, alors qu'il était président du Conseil européen, il était au courant que la Grèce utilisait des chiffres falsifiés. Il n'est pourtant pas intervenu et s'est ainsi rendu complice de fraude, selon l'intervenant. En effet, l'État membre en question a été admis dans la zone euro sur la base de chiffres falsifiés.

M. Goyvaerts demande aussi si le rééchelonnement de la dette constitue une option envisageable pour le gouvernement fédéral belge en affaires courantes. Selon lui, ce mécanisme peut apporter un soulagement à court ou moyen terme, mais d'une manière très limitée. Le ministre allemand des Finances a envoyé à ses collègues, dont le ministre Reynders, un courrier les invitant à réfléchir à cette possibilité. Le ministre Reynders avait déjà déclaré précédement qu'il n'était pas favorable à cette idée a priori.

Le groupe Vlaams Belang préconise pour la Grèce une sortie accompagnée de la zone euro. Le Vlaams Belang est convaincu que la solvabilité de la Grèce est nulle et que le pays ne sera jamais en mesure de rembourser les prêts. C'est ce que pensent également de plus en plus d'économistes qui se penchent sur ce dossier.

Selon l'intervenant, la seule façon d'aider la Grèce serait de lui conseiller de quitter la zone euro. Avec sa propre monnaie, le pays pourra alors réorganiser son économie et définir ses propres taux d'intérêt, au lieu d'attendre les opportunistes comme les Chinois, désireux d'acquérir les ports grecs, ou les Turcs, prêts à racheter plusieurs secteurs stratégiques du pays.

Mme Marie Arena, sénatrice (PS), estime que l'on passe beaucoup de temps, au cours de la présente réunion, à discuter des recommandations formulées dans le document émanant de la Commission européenne. Mme Arena s'est attardée sur les considérants et en particulier sur les considérants nº 7, 8 et 9.

Le considérant nº 7 indique que le travail accompli par la Belgique, jusqu'en 2008, en matière de trajectoire budgétaire était exemplaire. En 2008, la Belgique a été touchée, comme tous les autres pays, par la crise financière. Cependant, ce considérant souligne que les mesures qui ont été prises par ce gouvernement ont permis de limiter les dégâts, voire de se comporter mieux que les autres pays à la sortie de la crise.

Le considérant nº 8 énonce clairement, que, sur la base de l'évaluation du programme de stabilité actualisé, la Commission européenne a pu estimer que les projections budgétaires contenues dans le programme sont tout à fait plausibles.

Le considérant nº 9 commence par les mots suivants: « vu les résultats meilleurs qu'attendus, enregistrés en 2010 ... ». C'est alors, fait remarquer Mme Arena que, comme suite, l'on aurait envie de lire: « il est demandé au gouvernement belge actuel de continuer le travail qu'il a accompli jusqu'à présent ». Or, le considérant 10, vu le résultat meilleur qu'attendu, suggère de procéder à une réduction plus ambitieuse de la dette publique.

Mme Arena souhaite plutôt féliciter le gouvernement en affaires courantes pour le travail qu'il a réalisé avant, pendant et après la crise. On se limite à lire les recommandations — purement idéologiques — de la Commission européenne, alors même que tout le travail qui a été mené par le gouvernement belge en affaires courantes a été un travail difficile, mais qui a permis d'atteindre les objectifs poursuivis avec une réelle politique économique et sociale respectant l'habitude belge de concertation avec les acteurs économiques et sociaux. Or, la Commission européenne propose l'inverse à la Belgique: il faudrait faire fi du dialogue social et casser l'habitude belge de travailler en partenariat avec les partenaires sociaux. La Commission européenne propose de relever de deux ans l'âge de départ à la retraite. Or, ce qui pose problème en Belgique, c'est le taux d'emploi de la tranche des citoyens âgés de 55 à 65 ans. Relever de deux ans l'âge de départ à la retraite règlera-t-il ce problème ? De ce fait, toutes les recommandations qui suivent ne sont absolument pas en conformité avec les félicitations que les fonctionnaires de la Commission européenne ont adressées à la Belgique. Ceci donne l'impression que deux groupes de travail se sont penchés sur le cas de la Belgique: un premier groupe d'experts qui ont considéré que le travail accompli par la Belgique était bon, et un groupe d'idéologues qui ont rajouté de petites touches d'idéologie néolibérale, qui, si elle est suivie, pourrait aboutir à un communiqué de presse tel que celui-ci: « la croissance non pas britannique mais la croissance belge revue à la baisse ». Si la Belgique applique ce que la Commission européenne lui demande actuellement, on appliquera le pire des scénarios de sorte qu'à l'avenir on aboutira au communiqué de presse suivant: « Rien ne va plus en Belgique ».

Mme Arena encourage le premier ministre à plaider auprès des instances européennes en faveur de la poursuite de la politique menée jusqu'à présent. Politique équilibrée du point de vue socio-économique, qui permet de montrer à l'Europe entière que ce n'est pas grâce aux politiques d'austérité que l'on s'en sort, mais par les politiques équilibrées d'écoute et de coordination.

M. Peter Luykx, député (N-VA), souligne que le groupe N-VA est partisan d'une Europe forte et se range non pas dans le camp des eurosceptiques, mais plutôt dans celui des euroréalistes. Le groupe N-VA suit le même cap socioéconomique que l'Europe, dont les recommandations correspondent d'ailleurs très largement au programme du parti. Il en va de même des avis de l'OCDE, du FMI et d'un certain nombre d'organismes d'évaluation de crédit. Ce que les instances internationales demandent correspond exactement aux souhaits de la N-VA et de certains autres partis flamands. En suivant la proposition de Mme Arena de ne pas tenir compte des recommandations et de ne pas procéder aux réformes, on s'expose inévitablement à des problèmes.

M. Luykx aimerait savoir quelle position le gouvernement en affaires courantes adoptera lors du Sommet en ce qui concerne la proposition de la Commission de réformer le système d'indexation automatique des salaires afin que la hausse des salaires suive de plus près l'accroissement de la productivité et de la compétitivité. La réaction du groupe PS consistait à dire que l'indexation des salaires garantit le pouvoir d'achat et qu'on ne peut donc pas y toucher. Le gouvernement va-t-il suivre l'Europe ou va-t-il encore donner un autre signal ?

L'intervenant demande ensuite quelle est la position du gouvernement en matière d'allocations de chômage. Le taux d'emploi en Belgique est encore largement inférieur à l'objectif européen de 75 %, et des mesures s'imposent si l'on veut mettre un maximum de personnes au travail. Le groupe N-VA est favorable à l'idée d'octroyer éventuellement des allocations de chômage plus élevées au cours des premières années. Toutefois, les allocations doivent être limitées dans le temps et il faut attribuer aux entités fédérées les compétences nécessaires pour l'accompagnement et le contrôle des chômeurs, ainsi que pour la politique de sanction en la matière. Le premier ministre suivra-t-il la recommandation ou considérera-t-il que les allocations ne peuvent pas être limitées dans le temps ?

En ce qui concerne le dossier de l'immigration, M. Luykx observe que, si Frontex dispose d'une capacité d'action, il faudrait pourtant intensifier son rôle. On a formulé une série de propositions en vue d'accroître l'autonomie de Frontex, en lui octroyant par exemple des moyens propres (un avion, des hélicoptères), en l'autorisant à collecter des données, etc. Mais avant toute chose, il faut garantir la solidarité européenne afin de mieux contrôler les frontières extérieures. M. Luykx aimerait savoir si le premier ministre soutient les mesures de renforcement de l'agence Frontex.

En ce qui concerne le fonctionnement actuel de l'espace Schengen, la N-VA soutient l'idée fondamentale d'une réalisation européenne qui constitue l'âme de l'Europe, et à laquelle on ne peut pas toucher. Mais les États membres doivent néanmoins pouvoir instaurer des contrôles temporaires aux frontières, comme les règles de Schengen le prévoient d'ailleurs déjà dans certaines situations. Il faut maintenant que cette possibilité soit opérationnelle. Le groupe N-VA ne comprendrait pas que la Belgique, déjà confrontée à une grave crise en matière d'asile, indique une fois de plus qu'elle n'entend pas soutenir la demande de plusieurs États membres de pouvoir instaurer ces contrôles. L'intervenant aimerait savoir quelle attitude le premier ministre adoptera à ce sujet au Conseil.

Il souhaiterait également savoir ce que le premier ministre pense des propos de M. Reynders concernant la Grèce.

C. Réponses du premier ministre

Le premier ministre fait observer que le gouvernement en affaires courantes a examiné plusieurs fois le texte des recommandations et a conclu qu'il n'y avait pas de position commune sur celles-ci. Via les groupes de travail et la négociation, le gouvernement belge essayerait d'aboutir à des dispositions acceptables auxquelles il pourrait souscrire, ce qui est chose faite, mais sans faire valoir un point de vue commun en ce qui concerne les recommandations.

Il confirme que la Belgique peut marquer son accord sur le texte à l'examen pour ce qui est des recommandations relatives à l'index et aux allocations de chômage. Les travaux des Conseils EPSCO et ECOFIN ne feront plus l'objet d'un débat; il en sera pris acte par l'approbation des conclusions.

Il ressort du travail des Conseils EPSCO et ECOFIN une nouvelle formulation des conclusions. En réponse à une remarque de M. Luykx, le premier ministre fait observer que le gouvernement est d'accord de souscrire à la recommandation suivante: « take steps to reform, in consultation with the social partners and in accordance with national practice, the system of wage bargaining and wage indexation, to ensure that wage growth better reflects developments in labour productivity and competitiveness » (3) .

Le texte relatif à l'allocation de chômage est rédigé comme suit: « renforcer la participation au marché du travail en réduisant les charges fiscales et sociales élevées qui pèsent sur les bas salaires d'une manière qui soit neutre pour le budget et en mettant en place un système de diminution progressive des allocations de chômage à mesure que se prolonge la période d'inactivité. » (4)

Comme le niveau des allocations de chômage octroyées en Belgique n'est pas parmi les plus élevés en Europe, un premier pas a été franchi. En effet, l'augmentation prévue est d'application pour la première période de chômage et non pour la période excédant les six mois.

En ce qui concerne Frontex, le premier ministre reconnaît qu'il faudra, à terme, évoluer vers des moyens communs au lieu de réunir des moyens des différentes parties prenantes.

La Belgique est favorable à des contrôles frontaliers temporaires à condition que la décision soit prise à l'échelon communautaire. Il ne se conçoit pas qu'un État membre puisse en prendre la décision unilatéralement, car cela irait à l'encontre de l'idée même de l'accord de Schengen, qui est l'essence de l'intégration européenne.

La réponse de l'UE à la problématique de la fiscalité, la « coordination pragmatique des politiques fiscales », figure au point 6 des conclusions.

En ce qui concerne l'impôt des sociétés, la Belgique veut en outre commencer à appliquer l'ACCIS, l'assiette commune consolidée pour l'impôt des sociétés. Notre gouvernement, comme les gouvernements français, allemand, etc., prône d'examiner de quelle manière les transactions spéculatives ou autres pourraient entrer dans la base imposable, d'une manière techniquement sans faille, à une échelle suffisante pour ne pas entraîner d'invasion fiscale. S'agissant de l'Europe, cela signifie que la City doit en être et que l'Europe, c'est-à-dire l'Europe des 27, est le minimum minimorum. À cela s'ajoutent les éventuels problèmes avec les paradis fiscaux, même si la réglementation de l'OCDE commence lentement à porter ses fruits dans ce domaine.

En ce qui concerne le dossier de la Grèce, un rééchelonnement de la dette ne semble pas être la bonne solution. L'initiative de Vienne prévoit désormais un renouvellement des prêts sur une base volontaire, ce qui évite à la Grèce un default trading. À défaut, la Banque centrale européenne pourrait difficilement continuer à mettre des moyens à disposition sous la forme de crédits aux banques. La Belgique a un intérêt dans le sauvetage de la Grèce, d'où son approche équilibrée. Notre pays est prêt, d'une part, à soutenir l'économie grecque. Mais d'autre part, des conditions strictes sont imposées en matière de réformes économiques: le déficit primaire doit diminuer et les finances publiques doivent être assainies. La Grèce a aussi besoin d'investissements, le cas échéant via des organismes européens comme la BERD et la Banque européenne d'investissement.

Le premier ministre constate que les déclarations de M. Reynders n'ont rien de déphasé. D'autres avaient aussi déjà remarqué depuis 2004 que la qualité des statistiques était douteuse. La Grèce avait aussi fait l'objet d'abondantes critiques il y a un an et demi à deux ans de cela. En 2001, le déficit budgétaire était légèrement inférieur à 2 %. Le premier ministre souligne aussi les motifs politiques importants qui ont présidé à la décision de faire entrer la Grèce dans la zone euro. Ce qui compte à présent, c'est de renforcer à l'avenir la qualité du matériel statistique relatif à la Grèce.

En réponse à la question de M. Tuybens concernant l'horizon de temps, le premier ministre déclare que la réponse à cette question est contenue dans le nom « horizon 2020 ». Il faut suivre les étapes successives pour arriver à des réalisations.

Il y a globalement plusieurs horizons de temps:

— La situation macroéconomique requiert un suivi très strict. Les ministres des Finances se réunissent presque chaque mois. Europe Plus sera évalué un an après son élaboration, en décembre 2011. Aucune mesure nouvelle ne sera présentée dans ce cadre. Le premier ministre espère qu'il y aura bientôt en Belgique une volonté politique suffisante pour mettre en œuvre les mesures proposées.

— La stratégie UE 2020 fait l'objet d'un suivi annuel systématique: l'Annual Growth Survey, les programmes de réforme nationaux, les recommandations de la Commission, la mise en place, en septembre-octobre, de la politique pour l'année suivante et, au sommet de printemps, l'évaluation de la politique transversale au niveau européen. Les priorités seront bien sûr fixées chaque année. Le premier ministre confirme qu'il s'impose, dans le cadre du projet européen UE 2020, de dégager des volumes d'investissement suffisants pour donner forme et substance aux initiatives phares ainsi qu'à l'ensemble de cette politique. La Belgique est déjà intervenue à plusieurs reprises à ce sujet et elle demandera à nouveau, lors du prochain sommet, que l'on soit attentif au renforcement de la base industrielle. L'on a besoin d'une industrie qui crée une valeur ajoutée, d'un tissu industriel solide pour pérenniser le modèle social.

— L'horizon de temps du budget est connu: la réduction annuelle de la dette doit atteindre un 20e de la différence entre le taux d'endettement actuel et le taux d'endettement de 60 % du PIB. Le taux d'endettement actuel est de 96, que l'on divise par 20 et l'on obtient une réduction annuelle moyenne du taux d'endettement de l'ordre de 1,8. De plus, des objectifs de réduction ont également été avancés sur le plan des dépenses primaires.

En ce qui concerne la question relative au mécanisme de sanction, le premier ministre répond que le Six Pack n'a pas été approuvé et qu'il ne le sera sans doute pas avant le mois de juillet au plus tôt.

À l'avenir, une possibilité de sanctionner existera. Ces sanctions s'appliqueront surtout en cas de déficit excessif et en cas de déséquilibres macroéconomiques. Si l'on applique ces concepts à la Belgique, le déficit excessif fera partie du passé en 2012, puisque le pays passera sous les 3 %. Quant aux déséquilibres macroéconomiques — compte non tenu des Unit Labour Costs —, il existe des excédents au niveau de la balance des paiements et de la balance commerciale jusqu'à présent. La Belgique ne court donc pas vraiment de grands risques.

En ce qui concerne l'application des sanctions, le Parlement européen demande une majorité qualifiée renversée, entre autres, en ce qui concerne la procédure pour déficit excessif et également pour les éléments préventifs en cas de déséquilibres macroéconomiques. Cette position est soutenue par le Benelux, mais le Conseil est très réticent parce que ce processus porte atteinte à la souveraineté des États membres. Le premier ministre est d'avis que l'on parviendra à un compromis. En tous cas, la majorité renversée proposée est conforme à la méthode communautaire que la Belgique défend par tradition.

Pour maintenir la dimension sociale de l'Europe, nous avons besoin d'une croissance économique rapide de 2 % au moins. C'est pourquoi il faut investir dans la recherche et le développement, il faut éliminer les éléments qui rigidifient le fonctionnement du marché et il faut abaisser la structure des coûts de notre activité économique. Il faut plus d'activité économique et plus de personnes au travail. La situation ne se résume pas à un affrontement entre le modèle social et la recommandation de la Commission européenne. C'est la recommandation de la Commission européenne et sa mise en œuvre qui doivent permettre de préserver le modèle social.

M. Leterme souscrit aux propos de Mme Marie Arena. Il a rencontré ce jour les ambassadeurs de l'Union européenne et des pays candidats à l'adhésion à l'UE. Ces derniers se demandent comment la Belgique a réussi à sortir quasi indemne de la crise. Le premier ministre est convaincu que les éléments stabilisateurs du modèle belge de sécurité sociale, ainsi que le maintien du pouvoir d'achat dans le chef des personnes qui ont eu la garantie qu'elles conserveraient leur emploi — très peu de personnes ont perdu leur emploi en Belgique au cours de la crise — y sont pour beaucoup. Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, la Belgique a été en mesure de sortir de la crise en affichant un taux de chômage inférieur à la moyenne européenne. La Banque nationale annonce plus ou moins 7,4 à 7,5 %, ce qui se situe en dessous des 8,4 % qui constituent la moyenne de la zone euro. Globalement, l'économie belge a réussi parce qu'elle a pris les mesures adéquates, notamment en étant très prudente dans la politique de relance, en faisant jouer au maximum les stabilisateurs économiques et en pratiquant une extension du chômage temporaire permettant aux travailleurs de conserver des liens avec leur employeur et, dès lors, d'être plus facilement réintégrés dans leur poste de travail lors de la reprise. M. Leterme est d'avis que ces mesures devraient être prises dans tous les pays de l'UE, étant entendu que certains pays les appliquent déjà (par exemple, le Kurz Arbeit en Allemagne est comparable au travail temporaire en Belgique). M. Leterme se dit persuadé que le modèle social de la Belgique, du Benelux et de l'Allemagne a joué un rôle important au niveau du maintien de la confiance. Lorsqu'on examine les documents de la Banque nationale, on constate que les prévisions concernant la croissance augmentent de 2,4 à 2,6 %. Ces 2,6 % ne proviennent pas de l'exportation (vers l'Allemagne principalement). L'augmentation de la croissance est la conséquence du regain de l'activité au niveau de la consommation.

La Belgique enregistre actuellement une croissance endogène, et non plus une croissance favorisée de l'extérieur par l'Allemagne (croissance exogène). En langage imagé, on pourrait dire que l'Allemagne est parvenue en quelque sorte à faire démarrer notre moteur avec ses « bougies ». Mais en 2011, la croissance de notre pays est alimentée par la demande intérieure. Toutefois, le fait que notre croissance ne soit plus autant liée aux exportations peut également signifier que la Belgique est mise sous pression par la nécessité de sauvegarder sa position à l'exportation et ses parts de marché.

Avoir une capacité d'exportation (par exemple, vers le marché allemand) se mérite. Il y a certainement un problème à résoudre au niveau des coûts de production. Le premier ministre souscrit aux remarques qui visent à développer le modèle social afin qu'il puisse faire partie de la politique européenne. Le modèle social belge est un des moteurs de la reprise socioéconomique qui fut plus aisée en Belgique que dans d'autres pays.

La discussion sur les ressources propres sera abordée principalement sous les prochaines présidences. Les points de discussion seront le taux et le financement de la croissance. Il s'agira de mener une discussion globale au sujet de la taxe sur les transactions financières et des ressources propres. La Belgique est traditionnellement favorable aux deux options, mais les discussions se déroulent actuellement dans un contexte particulièrement difficile. M. Leterme doit avoir dans quelques jours un entretien bilatéral avec M. David Cameron, premier ministre du Royaume-Uni. Il faut s'attendre à ce que le taux de la croissance et l'instauration de nouvelles recettes européennes constituent des points de discussion délicats.

M. Leterme souligne à l'attention des observateurs critiques que l'économie belge connaît une croissance de 2.6, soit pratiquement le taux le plus élevé de l'Union européenne. Selon les prévisions de la Banque nationale, le déficit public se clôturera sur un solde de financement de 3.4 au lieu des 4.1 prévus initialement, qui ont été ramenés à 3.6 dans le budget déposé pour 2011.

Le budget de la Belgique tient la route. De plus, l'objectif assez ambitieux en ce qui concerne le solde net à financer, sur la base des prévisions modifiées de la Banque nationale relatives à la croissance, sera atteint. À moins que des difficultés majeures ne se fassent jour au cours des mois à venir, la Belgique sera même en mesure d'améliorer ce chiffre et d'arriver à moins de 3,4 % ou moins de 3,5 %. Naturellement, en 2012, il faudra atteindre moins de 2,8 % et faire un effort supplémentaire.

Les prévisions concernant le marché du travail (taux de chômage) sont d'environ de 7,5 % en 2011 et de 7,3 % en 2012. Ces chiffres se situent en dessous tant de la moyenne de la zone euro que de celle de l'Union européenne.

La balance commerciale de la Belgique est excédentaire. La balance des paiements de la Belgique l'est également. Les Belges sont, en moyenne, des gens riches. Ils possèdent un patrimoine qui correspond à plus de deux fois la dette publique. La Belgique possède donc une capacité autonome de financement de la dette publique, qui est une des plus grandes en comparaison avec les pays de la zone euro et des pays de l'Union européenne. La dette publique belge vient d'amorcer une courbe descendante.

En 2010, la Belgique était, après l'Estonie, le pays qui enregistrait la plus faible augmentation de la dette avec 0,6 %. Cette année, le taux d'endettement va encore diminuer. La différence entre le taux d'endettement de la Belgique et la moyenne de la zone euro n'a encore jamais été si ténue. En 2007, la différence de taux d'endettement entre la Belgique et la moyenne de la zone euro atteignait 18 % du PIB contre 6,7 % aujourd'hui. D'autres pays se sont endettés plus rapidement que la Belgique, qui a contracté très peu de dettes. Sur le plan économique, la Belgique suit l'Allemagne.

En ce qui concerne la politique de voisinage, le premier ministre déclare que les choses n'ont commencé à bouger qu'avec une série de premières initiatives de la Commission. Dans le passé, on a effectivement fait preuve de trop de laxisme en ce qui concerne la conditionnalité. Il faut aussi dégager des moyens suffisants, ce qui n'est pas encore tout à fait le cas à l'heure actuelle.

En réponse à une question de Mme Zrihen sur l'allègement de la conditionnalité pour l'Irlande, le premier ministre fait remarquer que celle-ci est liée à un effort à consentir au niveau de la fiscalité et de l'imposition à l'ISOC. Jusqu'à présent, le premier ministre irlandais n'a pas pris de mesures en la matière, ce qui laisse présager que l'Irlande n'obtiendra pas d'assouplissement au niveau du remboursement de l'argent qui a été mis à sa disposition.

D. Répliques des membres

Mme Marie Arena, sénatrice (PS), fait observer que le premier ministre a confirmé qu'il y aurait une réunion concernant le Pacte pour l'euro plus, en décembre 2011. Le PS est d'avis que la tenue de cette réunion vient couper l'herbe sous le pied à une stratégie du second Semestre européen qui démarre début 2012 et vient annuler l'ensemble de la stratégie Europe 2020.

Le premier ministre pourrait-il plaider au niveau européen pour que cette réunion sur le Pacte pour l'euro plus puisse avoir lieu non pas en décembre 2011 mais en mars 2012 afin que le calendrier des deux autres réunions ne soit pas court-circuité par le Pacte pour l'euro plus (appelé Sarkozy — Merkel), auquel le groupe socialiste est beaucoup moins favorable.

En ce qui concerne le dossier migration, Mme Arena évoque les flux migratoires qui seraient dus aux révolutions arabes. Si l'on examine les pays d'origine des flux migratoires, on constate que les pays d'origine ne sont pas les pays en révolution. Ce sera peut-être le cas à moyen et à long terme. Le groupe socialiste a plaidé pour qu'il y ait davantage d'actions et de réponses au niveau du Haut Commissariat pour les Réfugiés (HCR), afin de venir en aide aux pays d'accueil tels que la Tunisie par rapport au mouvement libyen, ou la Turquie par rapport au mouvement syrien. Mme Arena considère qu'à ce niveau, on peut agir de façon humanitaire. Cela s'avère être une meilleure solution que celle qui consiste plutôt à dresser les murs de l'Europe face à un pseudo-flux migratoire qui aurait pour origine des pays en révolution.

Schengen n'est pas l'outil dont il faut se servir pour limiter la migration. En tant que pro-européens, il incombe à la formation politique à laquelle l'oratrice appartient, de défendre la libre circulation des personnes et de plaider pour l'application de stratégies communautaires, et non pas de stratégies nationales en matière de politique Schengen.

L'intervenante se déclare être une farouche adversaire de la conditionnalité de l'aide au développement. Elle est d'avis que dans les programmes d'aide au développement, il convient d'aider les pays pauvres à développer des stratégies de développement économique et social. Il s'agit là de la meilleure garantie par rapport à la lutte contre la migration. En effet, on fuit rarement un pays dans lequel on vit bien. Par contre, conditionner l'aide au développement à un quelconque accord de maintien des populations dans leur propre pays aboutit à l'échec. Il existait un accord entre l'Italie et la Libye qui ne respectait pas les conditions des conventions de Genève. Il est évident que l'on peut pratiquer le co-développement à condition de le faire avec des pays qui reconnaissent les conventions que l'Union européenne a signées en matière de gestion de la migration. Ce co-développement ne peut pas être pratiqué avec des pays qui n'ont pas signé les conventions en matière de droits de l'homme. Par conséquent, Mme Arena invite le premier ministre à observer la plus grande prudence par rapport à la conditionnalité de l'aide.

M. Tuybens, député (sp.a), est ravi d'apprendre de la bouche du premier ministre qu'outre l'orthodoxie budgétaire, on a aussi besoin d'investissements dans le secteur de l'industrie et que l'Union européenne et les États membres s'y attèlent. Il forme l'espoir que l'état d'avancement de ces investissements fera l'objet d'un suivi selon des conditions aussi strictes que celles qui prévalent pour l'orthodoxie budgétaire. Il craint cependant que, si le ministre des Finances examine d'année en année ce qui est décidé, l'on ne soit pas suffisamment attentif aux décisions d'investissement durable. Plus l'horizon décisionnel est rapproché, moins on a de chances que l'on pense à long terme pour ce qui est des investissements et de la croissance.

Il exprime aussi la crainte que la crise grecque n'ait dégénéré en véritable crise de la zone euro. Il n'est plus crédible d'imputer les difficultés actuelles aux excès de quelques États méridionaux. Il souligne que, contrairement à l'Allemagne et à la France, l'Espagne a sagement respecté les normes de Maastricht jusqu'à la crise financière et que ce pays est pourtant à son tour dans le collimateur des marchés financiers. Aujourd'hui, la dette publique de l'Espagne est inférieure à celle de l'Allemagne. Et c'est pourtant l'Espagne qui est dans le collimateur des marchés financiers. Voilà pourquoi M. Tuybens trouve étrange qu'en dépit des déclarations du premier ministre sur la situation favorable de la Belgique, M. Juncker fasse dans la presse des déclarations dont il ressort que la Belgique serait une des prochaines cibles des marchés financiers. De telles déclarations qui mettent en péril la réputation de l'Union européenne, au même titre d'ailleurs que les propos de M. Reynders, peuvent être mal interprétées et il est préférable de s'abstenir de tenir ce genre de discours.

M. Tuybens se réjouit aussi d'entendre que le premier ministre a toujours tenu dans les milieux européens un playdoyer pour le recours aux ressources propres. Bien que ce point ne figure pas à l'ordre du jour de ce Conseil, l'intervenant s'inquiète de ce que sera le point de vue de la Belgique lorsque la N-VA fera partie du gouvernement.

Il sera bénéfique pour chaque État que l'Europe crée le plus rapidement possible des ressources propres.

Mme Olga Zrihen, sénatrice (PS), fait observer qu'il est important qu'une stratégie d'aide au développement soit largement maintenue afin de pouvoir mener et assurer une politique de l'immigration beaucoup plus sereine et beaucoup plus juste.

Le groupe PS a souvent évoqué la taxe sur les transactions financières.

Il y a un modèle qu'il ne serait pas inutile d'évoquer: il s'agit de la taxe carbone européenne, parce que celle-ci semblerait plus correcte.

Enfin, il ne faut pas oublier qu'un des principes fondamentaux de l'Europe est l'autonomie des partenaires sociaux et des conventions collectives. Sans ces principes, l'Europe sociale n'aurait guère de sens.

M. Georges Gilkinet, député (Ecolo-Groen !), fait observer que, par rapport à sa question de savoir si le premier ministre représentait le point de vue du gouvernement quant aux recommandations relatives à la Belgique, il avait répondu qu'a priori il n'y avait pas de position commune, mais que finalement le gouvernement avait souscrit aux recommandations en expliquant que le modèle d'orthodoxie budgétaire avait assez bien fonctionné pour la Belgique. Néanmoins, M. Gilkinet rappelle que ce modèle budgétaire est dangereux pour le modèle social belge. Or ce modèle social a une importance économique. Le premier ministre l'a lui-même reconnu lorsqu'il a expliqué le rôle de stabilisateur qu'a joué la sécurité sociale dans la gestion de la crise.

M. Gilkinet est d'avis que le modèle d'orthodoxie budgétaire est incomplet. Selon lui, le premier ministre et ses collègues européens doivent pouvoir mettre sur la table d'autres dimensions, à savoir:

— l'harmonisation fiscale: le traité de désarmement fiscal que les Verts appellent de tous leurs vœux peut y contribuer. La taxe sur les transactions financières peut également constituer une réponse à l'enjeu que représente la constitution de ressources propres pour l'Union européenne;

— la régulation du secteur financier: autant on peut être dur vis-à-vis des États, autant on peut demeurer frileux et extrêmement prudent vis-à-vis des acteurs de la finance qui ont conduit à une partie des difficultés que l'on connaît à l'heure actuelle. Si l'Europe politique veut progresser, elle doit absolument montrer sa force et sa détermination en la matière;

— l'élaboration d'un véritable plan de développement durable: il y a lieu de préparer l'avenir en utilisant autre chose que des recettes extrêmement classiques telles que l'orthodoxie budgétaire. Il faut avoir une vision d'un développement économique durable et différent, un vrai plan de développement durable en mettant en avant un green deal: une autre vision des politiques énergétiques européennes, un modèle sans énergie nucléaire qui peut créer de l'emploi et de la plus-value. À cet égard, M. Gilkinet souligne que la compétitivité ne concerne pas uniquement les coûts salariaux, mais également l'indépendance énergétique. Si, au-delà des travaux sur le Six Pack, on peut avancer sur le plan qualitatif au niveau européen, on parviendra à réaliser l'objectif de construction d'une Europe sociale.

M. Hagen Goyvaerts, député (Vlaams Belang), a encore une observation à formuler concernant la situation budgétaire. Le premier ministre a tenu un plaidoyer en faveur de la bonne situation économique de notre pays. Il reste pourtant beaucoup à faire, sur le plan structurel, s'agissant du budget fédéral. Il faut aussi attendre de voir dans quelle mesure la grande réforme institutionnelle qui s'annonce va contribuer à résoudre les problèmes structurels qui se posent au niveau du budget.

L'intervenant qualifie aussi de creuse la réponse du premier ministre sur la déclaration du ministre des Finances. Ces déclarations qui ont été relayées par un journal francophone, par un site web et par le Tijd n'améliorent pas la situation. La crise grecque n'est plus une crise des Grecs, elle est devenue le problème de tous les dirigeants européens. Didier Reynders a ainsi montré à quel point le Conseil européen est divisé sur la question de la crise grecque.

III. DÉBRIEFING DU MARDI 28 JUIN 2011

A. Exposé introductif de M. Yves Leterme, premier ministre

Le Conseil européen du 23 juin 2011 a été en grande partie consacré à la politique économique européenne. Les recommandations de la Commission européenne au sujet des plans de réforme nationaux ont été ratifiées. Pour ce qui est de la Belgique, aucun changement n'est intervenu par rapport au texte proposé. De surcroît, notre pays a eu droit à des félicitations pour les beaux résultats qu'il a obtenus en matière de croissance économique et qui le hissent à présent au rang des meilleurs élèves de l'Europe.

En ce qui concerne le Semestre européen, la Belgique a demandé quel est le lien avec le Pacte pour l'euro plus. Contrairement à ce qui était prévu initialement, la réunion de l'Eurogroupe, qui se tiendra en décembre, sera exclusivement consacrée à l'examen d'un nombre limité de thèmes. La discussion sur les procédures et le processus décisionnel ne commencera réellement qu'à l'approche du Sommet européen de printemps et ce, dans le cadre d'une réunion complémentaire.

Le premier ministre a insisté sur la nécessité pour l'Europe de déployer une politique économique solide. La Commission européenne dispose des leviers nécessaires à cet effet. À cet égard, il convient également de souligner l'importance de mettre en œuvre une politique industrielle et fiscale européenne incluant, notamment, l'adoption de la réglementation relative à l'assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés (ACCIS).

En ce qui concerne la Grèce, le débat est resté cantonné à l'examen du projet de conclusions. Trois phases y sont définies: tout d'abord, le gouvernement grec doit mettre en œuvre le plan d'économie, puis l'Eurogroupe se réunira le 13 juillet prochain afin d'avaliser l'octroi d'une nouvelle tranche d'aide à hauteur de 12 milliards d'euros et, enfin, de nouvelles impulsions devront être données afin de relancer la machine économique. Il est prévu à cet égard de mobiliser les fonds de cohésion avec davantage de rapidité et d'efficacité.

Le 24 juin 2011, le Conseil européen a nommé M. Mario Draghi président de la Banque centrale européenne.

Le Conseil a également abordé la question de la migration. À cet égard, il a décidé, concernant les frontières intérieures, de renforcer le système Schengen. Ce renforcement doit s'opérer sur la base d'une responsabilité partagée, du principe de solidarité et d'une coopération renforcée. Il est précisé explicitement que les décisions unilatérales sont à bannir.

En ce qui concerne le contrôle aux frontières extérieures, la priorité est de renforcer l'agence Frontex. Un autre objectif qui est réaffirmé est la mise en œuvre d'une politique d'asile commune à l'horizon 2012. Enfin, il y a aussi la discussion concernant la Roumanie et la Bulgarie qui adhéreront bientôt à l'Espace Schengen.

À l'ordre du jour du Conseil figurait aussi l'adhésion de la Croatie dans le courant de l'année 2013.

Enfin, à l'initiative de la Haute Représentante de l'Union pour les affaires étrangères, Mme Catherine Ashton, un échange de vues a été organisé au sujet du Printemps arabe et du rôle militaire de certains États membres dans cette région du monde. Le processus de paix au Moyen-Orient a également été abordé, et il est apparu clairement que la France souhaite y jouer un rôle de pionnier.

En marge de ces discussions, le Conseil européen a également décidé qu'il tiendrait deux autres conseils, à savoir les 17 et 18 octobre 2011 ainsi qu'en décembre 2011. Parmi les points qui seront abordés lors de ce second conseil, il y aura, entre autres, l'organisation du marché du travail.

B. Échange de vues

1. Contrôle aux frontières intérieures — Schengen

Mme Daphné Duméry, députée (N-VA), demande si le fameux mécanisme de contrôle Schengen s'appliquera uniquement aux situations unilatérales dans lesquelles un État membre souhaite contrôler temporairement ses frontières. Ce dispositif peut-il aussi s'appliquer en cas de contrôles temporaires et sporadiques ? Comment se présente ce dispositif ? À qui l'initiative en incombera-t-elle, qui assurera le contrôle et de quelle manière ?

Mme Duméry aimerait également savoir quelles technologies nouvelles seront utilisées pour organiser plus efficacement le contrôle aux frontières. Est-il aussi question de recourir au système de Dublin et à l'échange de données relatives aux empreintes digitales ?

M. Herman De Croo, député (Open VLD), se dit lui aussi préoccupé par la question de savoir à quel niveau sera prise la décision de déroger aux règles contenues dans l'Accord de Schengen. L'on peut lire dans les conclusions que cette décision sera prise sur la base de critères objectifs et dans une optique commune. Appliquera-t-on ici la méthode communautaire ?

Le premier ministre répond qu'aucune proposition concrète n'a encore été faite en ce qui concerne le contrôle du système de Schengen. Mais il est clair que toute dérogation au principe de la libre circulation des personnes devra satisfaire aux critères suivants:

— l'initiative d'accorder des dérogations à la libre circulation doit émaner des institutions européennes (approche par le haut);

— le principe de la libre circulation ne peut être remis en cause;

— l'évaluation du système Schengen doit être confiée à la Commission européenne;

— tout doit être fait sur la base de critères objectifs;

— les exceptions doivent avoir un caractère temporaire.

La question des nouvelles technologies n'a pas été abordée lors du Conseil européen.

2. Contrôle aux frontières extérieures — Frontex

Mme Daphné Duméry, députée (N-VA), dit comprendre la demande permanente de soutien européen formulée par Malte pour pouvoir faire face à l'afflux massif de réfugiés sur son territoire. Toutefois, il s'est également avéré que la coopération avec Frontex n'était vraiment pas optimale. Comment concilier ces deux observations ?

Mme Meyrem Almaci, députée (Groen !), estime qu'il est bien de mettre en exergue, sur le papier, la solidarité avec les États membres confrontés aux afflux de réfugiés les plus massifs. Néanmoins, les faits (voir notamment les relations entre l'Italie et la France) montrent que, sur le terrain, cette solidarité est loin d'être évidente.

Le premier ministre rappelle que Frontex a pour objectif de rassembler et de déployer plus efficacement les moyens existants. Il ne s'agit nullement de créer un corps européen.

En ce qui concerne Malte, il est un fait qu'une coopération s'impose de par la bonne volonté de chacun des États membres. D'autre part, le problème de Malte est relatif: il ne s'agit que de 3000 personnes reconnues comme réfugiés politiques, sur une population de 400 000 habitants. Mais à Malte, il s'agit là d'un problème politique majeur dont il faut absolument tenir compte.

Il est évident que, sur ce plan, la solidarité entre États membres est capitale et doit être garantie.

Mme Meyrem Almaci, députée (Groen !), n'a pas l'intention de relativiser le problème de Malte. Si l'on transposait les chiffres en question à la situation belge, on obtiendrait un nombre de 120 000 réfugiés politiques reconnus sur une population totale de 10 millions d'habitants, ce qui est loin d'être négligeable.

3. Intégration des Roms

Mme Daphne Duméry, députée (N-VA), constate que l'on consacre pas mal d'énergie à l'intégration des Roms dans la société. Les mesures retenues s'appliquent-elles également à la Roumanie et à la Bulgarie, patries d'origine de l'immense majorité des Roms ?

Le premier ministre répond que la situation des Roms n'a pas été explicitement abordée lors du Conseil européen. Certes, le président français a bien affirmé que l'intégration sociale des Roms en Roumanie et en Bulgarie est essentielle pour l'adhésion de ces pays à la zone Schengen.

4. Semestre européen et Pacte pour l'euro plus

M. Herman De Croo, député (Open VLD), se réjouit des conclusions adoptées pour l'occasion mais souligne qu'il ne s'agit que d'un début. Dans le cadre du Pacte pour l'euro plus, il faudra sous peu amorcer dans chaque État membre le débat sur le taux de pensionnement, la fixation des salaires, etc. Il convient de mettre en œuvre les recommandations concrètes que la Commission européenne a adressées individuellement à chaque État membre.

Mme Olga Zrihen, sénatrice (PS), demande si l'on a confirmé le moment de l'évaluation du Pacte pour l'euro plus, qui était initialement prévu pour mars 2012.

Elle aimerait par ailleurs savoir si un travail substantiel a déjà été fourni en ce qui concerne les règles budgétaires communes à tous les pays de l'Union européenne. C'est la condition sine qua non pour parvenir à un monitoring effectif et efficace des budgets nationaux.

M. Peter Van Rompuy, sénateur (CD&V), aimerait savoir de quelle manière les deux modifications ont été apportées aux recommandations de la Commission européenne en ce qui concerne l'indexation automatique des salaires et l'âge légal de la pension. A-t-on adapté la terminologie, le texte a-t-il été annoté, etc., et à quel niveau ?

M. Stefaan Vercamer, député (CD&V), aimerait connaître le calendrier concret du Semestre européen. Quelles étapes devront être franchies et dans quels délais, et comment le premier ministre compte-il s'y prendre pour la Belgique ?

Le premier ministre communique le calendrier suivant:

— au printemps, la Commission européenne publie un « Examen annuel de la croissance » qui fait le point sur la situation dans chaque État membre et fixe des objectifs à atteindre;

— en réponse, les États membres doivent déposer un programme national de réformes pour le 15 avril;

— la Commission européenne formule des recommandations par État membre;

— le Conseil européen confirme ces recommandations (ce qu'il vient de faire);

— en septembre-octobre, les États membres élaborent un budget tenant compte de ces recommandations;

— en décembre, les pays de la zone euro procèdent à une évaluation supplémentaire portant sur des thèmes précis;

— au printemps, un nouvel Examen annuel de la croissance évalue les efforts accomplis par les États membres et formule de nouveaux objectifs.

Il y a certainement une nuance entre les versions anglaise et française des conclusions en ce qui concerne le rôle de la réunion sur le Pacte pour l'euro plus de décembre. Le texte anglais, qui est correct, indique que cette réunion abordera « some aspects » (« certains aspects ») alors que le texte français parle de « ces aspects ». Il s'agit de mettre cette réunion à profit pour approfondir un ou plusieurs aspects de l'exercice dans le cadre du Semestre européen. L'on évoque d'ailleurs le thème du marché du travail pour la réunion suivante. Les conclusions de ces discussions seront alors soumises au Conseil européen lors du Sommet de printemps.

Le gouvernement belge et le parlement examinent actuellement les recommandations de la Commission européenne, qui ont été confirmées par le Conseil européen. Ces recommandations devront certainement être mises en œuvre dans un nouvel accord de gouvernement.

Au niveau européen, il a également été confirmé entre-temps qu'il serait utile, à un certain moment, de voir aussi où en sont les initiatives phares prises dans le cadre de la stratégie Europe 2020.

Pour ce qui concerne les thèmes cités par M. De Croo, il y a lieu de se référer au point C. du rapport.

Les adaptations aux recommandations de la Commission européenne ont été apportées lors de la réunion des Conseils EPSCO et ECOFIN. Ces recommandations n'ont pas été examinées spécifiquement lors du Conseil européen. Des amendements formels ont en fait été déposés et les conseils concernés les ont adoptés.

5. La Grèce

Selon M. Herman De Croo, député (Open VLD), relancer le moteur économique de la Grèce en ayant recours notamment aux fonds structurels est une excellente idée. Il se demande toutefois si c'est la seule source de financement utilisable.

Mme Olga Zrihen, sénatrice (PS), estime que l'on est très ferme vis-à-vis de la Grèce mais particulièrement modéré à l'égard de l'Irlande. L'irlande est même félicitée pour les efforts fournis et les réformes menées, alors qu'elle pratique une politique de dumping fiscal. N'y a-t-il pas là un paradoxe ?

M. Richard Miller, sénateur (MR), se félicite des facilités qui sont actuellement accordées à la Grèce pour permettre un recours accéléré aux fonds structurels et de cohésion afin de stimuler l'économie du pays. Pour un pays en crise, il n'est pas simple de formuler des propositions qui peuvent être financées par ces fonds.

M. Bruno Tuybens, député (sp.a), demande si, en marge du Conseil européen, une concertation a été menée avec l'opposition en Grèce (qui est membre du PPE) en ce qui concerne le soutien aux mesures d'économies adoptées par le gouvernement grec.

Le premier ministre confirme que d'intenses concertations ont été menées avec le chef de file de l'opposition grecque, M. Samaras, au sein du PPE dont sont membres 17 des 27 chefs de gouvernement. Bien que M. Samaras ait émis des contre-arguments très intéressants et souvent pertinents, tout le monde s'accordait à dire qu'il serait préférable pour la Grèce que tous les partis politiques soutiennent les mesures d'économies proposées.

Quant à l'avance d'un milliard d'euros octroyée à la Grèce, elle provient non seulement des fonds structurels et de cohésion, mais aussi des fonds destinés à l'agriculture ainsi qu'à la recherche et au développement.

Le prêt octroyé à l'Irlande n'a été soumis à aucune condition. Mais il est un fait que si le gouvernement irlandais voulait changer les conditions, l'on discuterait inévitablement de la politique de dumping fiscal. Le gouvernement irlandais n'est toutefois plus enclin à demander une révision des conditions, étant donné que les mesures adoptées commencent à porter leurs fruits.

6. Politique économique européenne

M. Richard Miller, sénateur (MR), demande quelques précisions sur l'appel que le premier ministre a lancé en faveur du développement d'une politique industrielle européenne. Quel type de politique entend-il par là ?

Mme Meyrem Almaci, députée (Groen !), rappelle qu'une gouvernance économique européenne commune doit respecter toutes les valeurs de l'Union européenne, y compris donc la solidarité, la justice sociale, etc. Il ressort des conclusions du Conseil européen que l'on s'est longuement penché sur l'objectif de stabilité et de croissance, mais que l'on s'est très peu intéressé à la lutte contre la pauvreté, à l'emploi, à la recherche et au développement, à l'Agenda Europe 2020, etc. Des mesures sont pourtant absolument nécessaires dans ces domaines également. C'est la seule manière de redorer quelque peu le blason de l'Union européenne.

Le premier ministre juge qu'il est essentiel de développer une politique industrielle européenne. Il ne faut pas oublier que, dans des pays comme le Royaume-Uni et l'Allemagne, l'industrie joue encore un très grand rôle et a un poids considérable dans l'économie. Après les mesures visant à la sauvegarde de l'euro et à l'assainissement des finances publiques, il est donc très important de mettre en place les conditions propices au bon développement de l'industrie. Ces conditions peuvent concerner les infrastructures, la recherche et le développement, les brevets, etc. Ariane, Galileo, Airbus et le télescope spatial Hubble sont des exemples de projets très réussis. Les initiatives phares définies dans la stratégie Europe 2020 peuvent constituer un bon fil conducteur à cet égard.

Le premier ministre souscrit entièrement aux remarques de Mme Almaci.

Mme Meyrem Almaci, députée (Groen !), souligne qu'une politique industrielle doit être axée principalement sur le développement d'une politique économique durable. En effet, c'est là que se situe l'avenir de l'Europe, et il faut en convaincre non seulement le secteur public mais aussi le secteur privé, en recourant si nécessaire à des mesures contraignantes.

M. Richard Miller, sénateur (MR), se réjouit de l'importance que le premier ministre attache à la politique industrielle; il y voit un grand défi pour les syndicats européens qui sont, jusqu'ici, restés quelque peu en retrait dans ces débats.

7. Ressources propres de l'Union européenne

MM. Herman De Croo, député (Open VLD), et Bruno Tuybens, député (sp.a), demandent si l'on a encore parlé de l'augmentation des ressources propres pour l'Union européenne et de l'émission d'euro-obligations.

Le premier ministre confirme qu'il y a une volonté politique de plus en plus grande au sein de l'Union européenne pour concrétiser les propositions en ce sens. La Commission européenne les intégrera d'ailleurs prochainement dans la publication de son projet de budget pluriannuel. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que des grands pays tels que le Royaume-Uni sont toujours réticents à l'égard de ces propositions.

La Commission européenne ambitionne également de formuler en 2012 des propositions en matière d'harmonisation ou de coordination de la fiscalité dans l'Union européenne. Mais il n'est pas certain du tout que ces propositions recueilleront l'unanimité requise.

M. Herman De Croo, député (Open VLD), demande que l'on définisse clairement la taxe sur les activités financières qui pourrait être instaurée.

Le premier ministre répond qu'il s'agit d'une taxe prélevée sur la valeur ajoutée qui est réalisée par les banques.

8. Élargissement de l'Union européenne — Croatie

M. Herman De Croo, député (Open VLD), demande s'il y a encore des mécanismes de contrôle suffisants dans la dernière ligne droite avant l'adhésion de la Croatie à l'Union européenne, au cas où des difficultés se poseraient ou que les négociations ne se dérouleraient pas comme il faut.

Le premier ministre confirme qu'il y a toujours un monitoring permanent, mais que l'adhésion est irréversible. L'accord à l'adhésion a été donné.

9. Printemps arabe

M. Herman De Croo, député (Open VLD), demande si l'on a déjà identifié un ou plusieurs représentants des courants démocratiques en Libye, pouvant servir d'interlocuteurs.

Mme Olga Zrihen, sénatrice (PS), fait le lien entre le Printemps arabe et la politique européenne d'immigration. Fait-on également le lien entre les deux au niveau européen ou considère-t-on qu'il s'agit de deux choses distinctes ?

M. Bruno Tuybens, député (sp.a), déclare que l'Union européenne et ses États membres portent une grande responsabilité en ce qui concerne la situation au sein du monde arabe. Pendant des années, les dictatures locales ont été soutenues pour assurer la stabilité de la région. Nous avons de ce fait une dette envers la population locale. L'Europe ne peut-elle se rendre utile, comme elle le fit jadis dans d'autres régions du monde, en contribuant à asseoir la « société civile », à réformer la justice, à renforcer le tissu social, etc. ?

Le premier ministre confirme que l'Europe a le devoir d'investir dans cette région pour soutenir la transformation démocratique et la reconstruction économique. La Belgique joue d'ailleurs un rôle essentiel à cet égard en Tunisie. Il faut prendre la balle au bond. Les États-Unis soutiennent pleinement cette politique étant donné qu'ils entendent laisser à l'Europe le leadership dans cette région.

La situation en Libye est évaluée au niveau du groupe de contact et pas au niveau du Conseil européen. Il est cependant apparu au cours d'un débat au Conseil que la France et le Royaume-Uni visent des résultats à court terme. En ce qui concerne la Belgique, l'effort de notre pays reste inchangé, avec le dragueur de mines en mer Méditerranée et les F16 dans les airs. Cet appui est très apprécié par les alliés.

Il va de soi que nous continuons à soutenir entièrement les résolutions des Nations unies. Il a aussi été confirmé que le Conseil national de Transition devra jouer un rôle crucial dans la transformation de la Libye. Cela n'est pas la même chose qu'une reconnaissance. On peut reconnaître un pays, pas un groupe de personnes.

Mme Meyrem Almaci, députée (Groen !), en appelle à resserrer les relations avec la Turquie. Il est clair que la diplomatie turque joue un rôle capital dans la situation actuelle au sein du monde arabe. L'Europe peut tirer profit de cette expérience.

10. Coopération au développement

M. Herman De Croo, député (Open VLD), fait référence aux travaux qui ont été menés notamment au sein de l'OCDE et qui ont débouché sur un objectif chiffré en matière de coopération au développement, exprimé en pourcentage du PIB. L'Union européenne a-t-elle l'intention de s'y conformer ?

Le premier ministre répond que la question de la coopération au développement n'a pas été évoquée lors de ce Conseil européen.

11. Marché numérique unique

M. Herman De Croo, député (Open VLD), s'enquiert de l'état d'avancement dans ce dossier. Des décisions ont-elles déjà été prises en vue de réaliser le marché numérique unique ?

Le premier ministre répond que ce thème n'a pas été abordé.

C. Débat relatif au vieillissement et aux négociations salariales

En réponse aux remarques de M. De Croo, le premier ministre précise ce qui suit.

En ce qui concerne les négociations salariales, il importe de savoir qu'il faut se baser sur le coût salarial unitaire. La Belgique est l'un des pays les plus productifs d'Europe, et ce coût unitaire permet de tenir compte aussi de cette réalité.

S'agissant du débat sur le vieillissement, il n'est pas inintéressant d'évoquer un problème typiquement belge, à savoir l'entrée tardive des Belges sur le marché du travail. Parmi les jeunes de moins de 20 ans, 7 % à peine travaillent. C'est bien en deçà de la moyenne européenne, même si l'on tient compte de l'obligation scolaire et de la poursuite des études. Dans la catégorie d'âge de 20 à 25 ans, le taux d'emploi est aussi inférieur à la moyenne alors que dans la catégorie d'âge de 25 à 50 ans, il atteint 78 %, ce qui est très élevé.

Un autre élement est l'âge de la pension. Alors qu'en Belgique, il est question de porter l'âge de la pension à 65 voire à 67 ans, la Slovénie octroie la pension à l'âge de 58 ans et la France à l'âge de 62 ans.

M. Philippe Mahoux, président du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes (PS), estime que les statistiques relatives à l'emploi des jeunes de moins de 20 ans sont en contradiction avec la conception unanimement admise en Belgique, selon laquelle la formation est essentielle pour les jeunes. Le taux d'emploi des jeunes de moins de 20 ou 25 ans n'est pas un critère pertinent pour mesurer le degré de réussite économique d'un pays. Dans une société de la connaissance comme la nôtre, il est difficilement concevable de mettre beaucoup plus de jeunes au travail que ce n'est le cas actuellement. Mieux vaut se concentrer sur le taux d'emploi des personnes de plus de 50 ans.

À cet égard, on peut d'ailleurs se demander si les jeunes qui possèdent un contrat d'apprentissage relèvent des statistiques des actifs ou de celles des étudiants.

Le premier ministre clarifie ses propos. Un autre problème auquel la Belgique est confrontée spécifiquement, en plus du problème du vieillissement, est celui de l'entrée des jeunes sur le marché du travail. Les jeunes sont en effet trop peu nombreux à intégrer le marché du travail et ils le font trop tardivement. Il s'agit en général de jeunes qui ne fréquentent pas l'école, qui ne possèdent pas de contrat d'apprentissage et qui ne travaillent pas.

Le taux d'emploi chez les jeunes de moins de 20 ans est de 16 % à l'échelon européen et il n'est que de 6 % en Belgique. Dans la catégorie d'âge de 20 à 24 ans, il est de 44 % en Belgique et de 50 % en moyenne au niveau européen.

Il est exact que le développement d'une véritable société de la connaissance implique qu'il faut étudier plus longtemps. En Belgique, 47 % des jeunes sont dans ce cas, ce qui constitue un bon résultat. Le problème se situe plutôt du côté des jeunes qui ne travaillent pas et qui ne font pas non plus d'études.

M. Philippe Mahoux, président du Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes (PS), tient quand même à relativiser fortement les statistiques. Ainsi, en Europe, l'âge fixé pour l'obligation scolaire varie sensiblement d'un pays à l'autre, ce qui peut biaiser les chiffres.

Le premier ministre tient à souligner qu'à Bruxelles, par exemple, il y a un grave problème en ce qui concerne les jeunes qui ne travaillent pas ni ne font des études. On ne prend pas assez de mesures pour les encourager à entrer sur le marché du travail.

Les présidents-rapporteurs,
Philippe MAHOUX (S).
André FLAHAUT (Ch).

ANNEXE


CONSEIL EUROPÉEN

Bruxelles, le 24 juin 2011

(OR. en)

EUCO 23/11

CO EUR 14 CONCL 4

NOTE DE TRANSMISSION

du: Secrétariat général du Conseil

aux: délégations

Objet: CONSEIL EUROPÉEN

23 ET 24 JUIN 2011

CONCLUSIONS

Les délégations trouveront ci-joint les conclusions du Conseil européen des 23 et 24 juin 2011.

Le Conseil européen s'est félicité que la mise en œuvre du vaste ensemble de mesures qu'il a approuvé en mars dernier pour remettre l'Europe sur la voie d'une croissance durable et créatrice d'emplois et renforcer la gouvernance économique soit presque achevée. Il a salué en particulier l'accord intervenu sur le futur Mécanisme européen de stabilité (MES) et sur le Fonds européen de stabilité financière (FESF) modifié, ainsi que les progrès substantiels réalisés en ce qui concerne les propositions législatives sur la gouvernance économique. Il a clôturé le premier semestre européen en procédant à une évaluation collective des programmes des États membres, sur la base de l'évaluation fournie par la Commission, et en approuvant les recommandations par pays qui devront être prises en compte dans les décisions nationales à venir sur les budgets et les réformes structurelles. À cet égard, il a noté que les États membres participant au pacte pour l'euro plus ont promis d'accroître le niveau d'ambition et de précision de leurs engagements l'an prochain. Le Conseil européen a évalué la situation des États membres qui ont un programme d'ajustement. En ce qui concerne la Grèce, les chefs d'État ou de gouvernement des États membres de la zone euro sont convenus d'une voie à suivre et ont engagé leurs ministres des finances à achever les travaux qui doivent permettre de prendre les décisions nécessaires d'ici début juillet.

À l'issue d'un débat approfondi, le Conseil européen a fixé des orientations en vue de développer la politique migratoire de l'UE, en ce qui concerne la gouvernance de l'espace Schengen, le contrôle des frontières extérieures, la mise en place de partenariats avec les pays du voisinage méridional et l'achèvement du régime d'asile européen commun d'ici 2012.

Le Conseil européen est convenu que les négociations d'adhésion avec la Croatie devraient être menées à bien d'ici la fin du mois de juin 2011, confirmant ainsi qu'il est résolument attaché à la perspective européenne des Balkans occidentaux.

Le Conseil européen a examiné l'évolution de la situation dans les pays du voisinage méridional de l'UE et a adopté une déclaration séparée sur ce sujet.

I. POLITIQUE ÉCONOMIQUE

1. Cette réunion du Conseil européen, qui marque la fin du premier semestre européen, est l'occasion de procéder à une évaluation collective, au niveau de l'UE, des mesures nationales prévues par les États membres. À la lumière de cette première expérience, le Conseil européen considère que le semestre européen peut devenir une méthode de gouvernance efficace pour soutenir, en temps voulu, l'élaboration des politiques européennes et nationales d'une façon intégrée et transparente. La présentation simultanée des programmes de stabilité ou de convergence et des programmes nationaux de réforme permet à l'UE d'évaluer en même temps la croissance d'un pays et ses stratégies budgétaires et de faire face à d'éventuels risques, déséquilibres ou arbitrages.

2. Sur la base de l'évaluation fournie par la Commission, le Conseil européen a examiné les politiques et les mesures présentées par les États membres. Celles-ci constituent un bon point de départ pour inscrire la reprise européenne dans la durée, s'attaquer aux problèmes budgétaires et engager des réformes plus ambitieuses au niveau national. Le Conseil européen note que tous les États membres sont clairement déterminés à faire tout ce qui est nécessaire pour mettre pleinement en œuvre le pacte de stabilité et de croissance. Les États membres ont bien progressé dans la définition des mesures qui permettront d'atteindre les grands objectifs de la stratégie Europe 2020 pour l'emploi et une croissance durable. Certains de ces objectifs sont en bonne voie, mais d'autres (concernant l'emploi, l'efficacité énergétique, la recherche et développement, la pauvreté et l'enseignement supérieur) nécessitent des mesures supplémentaires. Il convient aussi, en priorité, d'assurer un environnement macroéconomique solide, de rétablir la viabilité des finances publiques, de corriger les déséquilibres macroéconomiques et de renforcer le système financier.

3. Le Conseil européen fait siennes les recommandations par pays approuvées par le Conseil et invite tous les États membres à en tenir compte dans leurs décisions nationales en ce qui concerne leurs budgets et leurs réformes structurelles et à combler les lacunes révélées par cet exercice.

4. Les efforts déployés à l'échelon national doivent être soutenus par une action menée au niveau de l'Union européenne, notamment afin de libérer tout le potentiel de l'Europe en termes de croissance économique et de création d'emplois. Dans cette optique, il convient d'accélérer les travaux destinés à concrétiser les initiatives phares de la stratégie Europe 2020 et l'acte pour le marché unique, en mettant l'accent sur les priorités définies par le Conseil le 30 mai 2011. Plus particulièrement, la charge réglementaire pesant sur les PME doit être encore réduite et, le cas échéant, les microentreprises devraient être exemptées de certaines réglementations futures ou du moins être soumises à un régime plus léger. Dans ce contexte, le Conseil européen salue l'engagement pris par la Commission d'évaluer l'impact des futures réglementations sur les microentreprises et d'examiner l'acquis pour recenser les obligations existantes dont les microentreprises pourraient être exemptées. Il est convenu de revenir sur ces questions lors de sa réunion de décembre 2011. La Commission est également invitée à élaborer une feuille de route relative à l'achèvement du marché unique numérique d'ici 2015. Elle est invitée à présenter un rapport en octobre 2011 sur ces domaines favorisant la croissance afin que des progrès soient réalisés d'ici la réunion du Conseil européen du printemps 2012.

5. Les États membres participant au pacte pour l'euro plus ont présenté des engagements représentant au total plus de cent mesures distinctes (5) . Ces engagements constituent une première étape positive vers la réalisation des objectifs du pacte et doivent maintenant être mis en œuvre au niveau national. Les chefs d'État ou de gouvernement reviendront sur ces volets du pacte en décembre 2011, avant le lancement du prochain semestre européen.

6. Lorsqu'ils définiront leurs prochains engagements, les États membres participants veilleront:

— à en étendre la portée: les engagements devraient davantage mettre l'accent sur la réalisation en priorité de réformes favorisant la croissance afin de stimuler la compétitivité, par exemple dans les industries de réseau et dans le secteur des services, et il faudrait accorder une plus grande attention au renforcement de la stabilité financière;

— à adopter une approche plus concrète: les États membres devraient s'employer à ce que leurs engagements futurs soient aussi précis et mesurables que possible, en précisant comment et quand ces engagements seront réalisés, de manière à pouvoir mesurer les progrès dans le temps et à faciliter les évaluations comparatives par rapport à d'autres États membres et aux partenaires stratégiques de l'Europe;

— à élever le niveau d'ambition: lorsque des projets de réforme novateurs ont été lancés dans le cadre du pacte, les États membres devraient le faire savoir, et ils devraient tenir compte des bonnes pratiques;

— à assurer une coordination pragmatique des politiques fiscales: la Commission et les ministres des finances des États membres participants sont invités à rendre compte d'ici décembre 2011 des progrès réalisés dans leurs discussions structurées sur les questions de politique fiscale, notamment afin d'assurer les échanges de bonnes pratiques, la prévention des pratiques dommageables et la présentation de propositions de lutte contre la fraude et l'évasion fiscale. Conformément au pacte, la Commission a présenté une proposition concernant une assiette commune consolidée pour l'impôt sur les sociétés.

7. Les progrès réalisés par les États membres dans la mise en œuvre des recommandations par pays formulées par le Conseil et de leurs engagements au titre du pacte seront évalués par le Conseil européen en mars 2012, sur la base de l'examen annuel de la croissance effectué par la Commission.

8. La conclusion du cycle de Doha pour le développement contribuerait de manière substantielle à stimuler la croissance économique et à favoriser la compétitivité. Le Conseil européen réaffirme que l'UE est déterminée à faire avancer le processus de libéralisation des échanges et de réglementation afin de renforcer le système multilatéral, et qu'elle est prête à étudier toutes les options de négociation pour mener le cycle de Doha à terme, y compris au regard des priorités des pays les moins développés, en accord avec le mandat de Doha.

9. La mise en œuvre du vaste ensemble de mesures approuvé par le Conseil européen en mars dernier est à présent presque achevée. Un accord a été trouvé sur le traité instituant le Mécanisme européen de stabilité et sur la modification du FESF. Les États membres devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la ratification du traité instituant le MES d'ici la fin de 2012 et l'entrée en vigueur rapide du FESF modifié. Des progrès substantiels ont été enregistrés dans les travaux législatifs menés sur le paquet destiné à renforcer la gouvernance économique et l'adoption en première lecture de celui-ci est à portée de main. Des tests de résistance sont actuellement menés dans le secteur bancaire. Il est de la plus haute importance qu'ils soient pleinement crédibles et transparents, qu'ils soient effectués en totale conformité avec la méthode et les orientations définies par l'Autorité bancaire européenne et que tous les participants veillent à ce que les résultats de ces tests soient d'une qualité optimale. Toutes les mesures nécessaires, respectant pleinement les normes internationales, doivent être prises rapidement pour remédier à toute vulnérabilité éventuelle du secteur bancaire mise en lumière par ces tests de résistance.

10. Le Conseil européen salue les progrès réalisés par l'Irlande dans la mise en œuvre de son programme de réformes, qui est en bonne voie. Il se félicite également que le nouveau gouvernement portugais soit fermement résolu à mettre intégralement en œuvre son programme de réformes. S'appuyant sur un consensus entre tous les partis quant à la nécessité des réformes, la mise en œuvre stricte de ces programmes permettra de maintenir l'endettement à un niveau supportable et favorisera le retour de l'Irlande et du Portugal sur les marchés financiers.

11. Les chefs d'État ou de gouvernement des États membres de la zone euro réaffirment qu'ils sont déterminés à mettre tout en œuvre pour garantir la stabilité financière de la zone euro dans son ensemble.

12. La reprise dans la zone euro est en bonne voie et s'achemine durablement vers une croissance solide. L'euro repose sur des bases saines et nous sommes grandement satisfaits des résultats obtenus en matière de stabilité des prix depuis l'introduction de l'euro.

13. En ce qui concerne la Grèce, le Conseil européen note les progrès considérables accomplis au cours de l'année écoulée, notamment en matière d'assainissement des finances publiques. Il se félicite que le gouvernement grec reste fermement déterminé à mettre en œuvre le programme d'ajustement.

14. Le Conseil européen demande aux autorités grecques de poursuivre avec détermination les efforts d'ajustement nécessaires pour que le pays s'achemine vers une situation viable. Il est urgent que le programme de réformes de grande ampleur défini en accord avec la Commission, en liaison avec la BCE et le FMI, soit arrêté définitivement dans les prochains jours, et que, dans le même temps, le Parlement grec achève l'adoption des lois essentielles relatives à la stratégie budgétaire et aux privatisations. Faisant suite à la demande du gouvernement grec annoncée par le premier ministre grec, ces éléments constitueront la base qui permettra à la fois de définir les principaux paramètres d'un nouveau programme soutenu conjointement par les partenaires de la zone euro et le FMI, conformément aux pratiques en vigueur, et de verser les fonds nécessaires à temps pour satisfaire les besoins de financement de la Grèce en juillet.

15. Les chefs d'État ou de gouvernement des États membres de la zone euro sont convenus que, pour le financement supplémentaire nécessaire, il sera fait appel à la fois à des sources publiques et à des sources privées. Ils se rallient à l'approche retenue par l'Eurogroupe le 20 juin visant à obtenir une participation volontaire du secteur privé, sous la forme de reconductions (roll-overs) informelles et volontaires de la dette existante de la Grèce arrivant à échéance, en vue de réduire d'une façon substantielle le financement nécessaire année après année dans le cadre du programme, tout en évitant un défaut de paiement partiel.

16. Les chefs d'État ou de gouvernement des États membres de la zone euro invitent les ministres des finances à achever les travaux sur les éléments en suspens afin que les décisions nécessaires puissent être prises d'ici le début du mois de juillet.

17. Le Conseil européen engage l'ensemble des partis politiques grecs à soutenir les grands objectifs et les principales mesures du programme afin d'en permettre une mise en œuvre rigoureuse et rapide. Étant donné la durée, l'ampleur et la nature des réformes requises en Grèce, l'unité nationale est une condition sine qua non de leur succès.

18. Le Conseil européen se félicite que la Commission envisage de développer les synergies entre le programme de prêts et les fonds de l'UE. Il appuie tous les efforts visant à renforcer la capacité de la Grèce à absorber les aides octroyées au titre de ces fonds afin de stimuler la croissance et l'emploi, ce qui peut se faire en les recentrant sur l'amélioration de la compétitivité et de la création d'emplois. En outre, le Conseil européen salue et soutient l'élaboration, par la Commission et les États membres, d'un vaste programme d'aide technique en faveur de la Grèce.

19. Les chefs d'État ou de gouvernement sont conscients des efforts que les mesures d'ajustement imposent à la population grecque; ils sont convaincus que ces sacrifices sont indispensables pour la reprise économique et qu'ils contribueront à la stabilité et à la prospérité futures du pays.

II. MIGRATIONS

20. La libre circulation des personnes, consacrée par le traité, est l'une des réalisations les plus concrètes et l'une des plus grandes réussites de l'intégration européenne et constitue une liberté fondamentale. Les orientations politiques et la coopération dans l'espace Schengen doivent encore être renforcées pour permettre une plus grande confiance mutuelle entre les États membres, qui ont tous au même titre la responsabilité de garantir que l'ensemble des règles Schengen sont effectivement appliquées, en conformité avec les critères communs adoptés ainsi qu'avec les normes et les principes fondamentaux. Les frontières extérieures de l'Europe doivent être gérées de manière efficace et cohérente, sur la base d'une responsabilité commune, de la solidarité et d'une coopération pratique renforcée.

21. Dans le droit fil des conclusions du Conseil des 9 et 10 juin 2011, l'application de règles communes, notamment par le recours au système d'évaluation Schengen, devrait être encore améliorée et consolidée afin qu'une réponse efficace puisse être apportée aux défis à venir. À cet effet, il est nécessaire de disposer d'un système de suivi et d'évaluation efficace et fiable. Le futur système d'évaluation Schengen permettra de renforcer, d'adapter et d'étendre les critères sur la base de l'acquis de l'UE. L'évaluation devrait se faire au niveau de l'UE avec le concours d'experts des États membres, de la Commission et des organismes compétents. La Commission est invitée à rendre régulièrement compte des résultats des évaluations et, si nécessaire, à proposer des mesures permettant de combler les lacunes recensées.

22. Un mécanisme devrait être mis en place pour faire face à des circonstances exceptionnelles mettant en péril le fonctionnement global de la coopération Schengen, sans porter atteinte au principe de la libre circulation des personnes. Il devrait comporter une série de mesures applicables de manière progressive, différenciée et coordonnée afin d'aider un État membre soumis à une forte pression aux frontières extérieures. Ces mesures pourraient comprendre des visites d'inspection et un soutien technique et financier, ainsi que le recours à l'agence Frontex dans ses fonctions d'assistance, de coordination et d'intervention.

En tout dernier ressort, dans le cadre de ce mécanisme, une clause de sauvegarde pourrait être introduite afin d'autoriser, à titre exceptionnel, le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures en cas de situation véritablement critique, lorsqu'un État membre n'est plus en mesure de respecter ses obligations au titre des règles Schengen. Une telle mesure serait prise sur la base de critères objectifs précis et d'une évaluation commune et aurait une portée et une durée strictement limitées, compte tenu de la nécessité de pouvoir réagir à des situations d'urgence. Cela n'affectera pas les droits des personnes jouissant de la libre circulation en vertu des traités.

La Commission est invitée à présenter une proposition concernant un tel mécanisme en septembre.

23. Le contrôle et la surveillance des frontières extérieures incombent aux États membres, qui, en s'acquittant de cette fonction, agissent également dans l'intérêt commun de tous les États membres. Afin que les frontières extérieures de l'Europe soient gérées de manière efficace et que les mêmes normes s'appliquent partout, tous les instruments pertinents doivent être utilisés de manière optimale et adaptés en cas de besoin. Le développement du système européen de surveillance des frontières sera poursuivi à titre prioritaire afin que celui-ci soit opérationnel en 2013 et permette aux autorités des États membres chargées de la surveillance des frontières d'échanger des informations opérationnelles et d'améliorer leur coopération.

24. Ces efforts seront également intensifiés en faisant progresser rapidement les travaux concernant les « frontières intelligentes », l'objectif étant que les nouvelles technologies soient mises à profit pour relever les défis liés au contrôle des frontières. En particulier, un système d'entrée/de sortie ainsi qu'un programme d'enregistrement des voyageurs devraient être mis en place. Le Conseil européen salue l'accord intervenu en ce qui concerne l'agence pour la gestion opérationnelle des systèmes d'information à grande échelle dans l'espace de liberté, de sécurité et de justice.

25. Le fonctionnement de Frontex et d'autres agences doit faire l'objet d'un suivi continu afin de garantir l'efficacité constante de l'aide que ces agences apportent aux États membres pour gérer les frontières extérieures, lutter contre l'immigration clandestine et prendre en charge les réfugiés. L'agence Frontex coopérera avec les pays tiers concernés. Le Conseil européen salue l'accord intervenu sur la révision du règlement Frontex, qui permettra d'améliorer l'efficacité des capacités opérationnelles de l'agence. Conformément au programme de Stockholm, le cadre de coopération entre gardes-frontières nationaux sera renforcé, notamment en promouvant les formations communes et l'échange de capacités et de normes. La Commission est invitée à présenter, en étroite coopération avec Frontex, d'autres idées à cet égard d'ici la fin de l'année.

26. Prenant note de la situation difficile à laquelle font actuellement face certains États membres, le Conseil européen réaffirme la nécessité d'une réelle solidarité pratique à l'égard des États membres les plus touchés par les flux migratoires. L'UE et les États membres continueront à apporter le soutien opérationnel et financier nécessaire au vu de l'évolution de la situation, en s'appuyant sur les mesures arrêtées par le Conseil le 11 avril 2011. Les fonds et les ressources techniques et humaines nécessaires seront mis à disposition afin de poursuivre et, s'il le faut, de renforcer les actions engagées pour soutenir ces États membres. Le Conseil européen se félicite de l'extension, sur une base volontaire, du projet-pilote concernant les bénéficiaires d'une protection internationale présents à Malte. Il attend avec intérêt la présentation par la Commission, cette année encore, d'une communication sur la solidarité interne à l'UE.

27. Une politique cohérente et stratégique est nécessaire pour gérer la mobilité dans un environnement sûr. L'objectif doit être de traiter les causes premières des migrations au niveau structurel. À cette fin, dans le cadre de la politique européenne de voisinage, des partenariats seront mis en place avec les pays du voisinage méridional et oriental.

28. Comme la Commission l'a proposé dans une récente communication, la première étape consistera à nouer avec les pays concernés un vaste dialogue structuré sur les migrations, la mobilité et la sécurité, l'objectif étant que des avantages concrets puissent en être retirés tant par ces pays que par l'Union européenne. De tels dialogues devraient commencer de toute urgence avec les pays partenaires désireux et à même d'aborder ces questions de façon constructive. Les partenariats pour la mobilité seront différenciés en fonction de la situation de chaque pays partenaire, sur la base d'un accord séparé avec chacun d'eux; ils seront subordonnés aux efforts et aux progrès réalisés dans tous les domaines (migrations, réadmission, mobilité et sécurité) et prévoiront un mécanisme de contrôle efficace. Il faudrait chercher des moyens permettant d'accroître la part du financement consacrée à ces domaines, dans le cadre des enveloppes existantes.

29. La Commission est invitée à présenter son évaluation de l'approche globale sur la question des migrations, ouvrant la voie à un cadre politique plus cohérent, plus systématique et plus stratégique pour nos relations avec l'ensemble des pays tiers concernés et comprenant des propositions concrètes en vue de renforcer les principaux partenariats de l'Union, la priorité allant à l'ensemble du voisinage de l'UE.

30. Les événements récents ont mis à l'épreuve la politique d'asile européenne. Des procédures sûres et efficaces en matière d'asile sont nécessaires pour les personnes ayant besoin d'une protection. Cela passe par la pleine application de l'acquis de l'UE dans ce domaine. Il est essentiel que le régime d'asile européen commun (RAEC) soit parachevé d'ici 2012, qu'il prévoie des normes exigeantes en matière de protection et qu'il soit assorti de procédures équitables et efficaces permettant de prévenir les abus et d'examiner rapidement les demandes d'asile, de manière à assurer la viabilité du système. Les propositions modifiées que la Commission a récemment présentées en ce qui concerne la directive sur les procédures d'asile et la directive sur les conditions d'accueil devraient fournir une base nouvelle pour les négociations qui vont commencer sur deux composantes importantes du RAEC. Les modifications apportées ne devraient pas avoir pour effet d'encourager la présentation de demandes injustifiées ou d'accroître les coûts globaux pour les États membres. Les négociations devraient à présent progresser rapidement sur la base d'une approche globale équilibrée incluant toutes les propositions qui ont été faites, afin que les grands objectifs énoncés ci-dessus puissent être atteints.

III. CROATIE

31. Le Conseil européen félicite la Croatie pour les efforts intenses qu'elle a consentis et qui ont permis aux négociations d'adhésion d'entrer dans leur phase finale. L'examen des chapitres de négociation restants auquel le Conseil procède actuellement est effectué dans le plein respect d'une stricte conditionnalité et conformément au cadre de négociation. À la lumière des progrès accomplis et de l'évaluation positive faite par la Commission, le Conseil européen a invité le Conseil à prendre toutes les décisions nécessaires pour que les négociations d'adhésion avec la Croatie soient menées à bien d'ici la fin du mois de juin 2011, sur la base des projets de positions communes récemment présentés par la Commission, en vue de la signature du traité d'adhésion avant la fin de l'année. La Croatie devrait poursuivre avec la même énergie ses efforts de réforme, notamment en ce qui concerne le secteur judiciaire et les droits fondamentaux, de manière à pouvoir assumer pleinement les obligations qui incombent à tout État membre à compter du jour de son adhésion. Le suivi, jusqu'à l'adhésion, de ces efforts de réforme fournira les garanties nécessaires à la Croatie et aux États membres actuels. Le Conseil, statuant à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission, peut prendre toutes les mesures utiles.

32. Cette évolution de la situation imprime un nouvel élan à la perspective européenne des Balkans occidentaux, pour autant que ces pays continuent d'avancer sur la voie de la réforme. Le Conseil européen reviendra sur cette question lors de sa réunion de décembre 2011. À cet égard, il salue l'arrestation et le transfert au tribunal de La Haye de Ratko Mladić, qui constituent une étape positive pour la justice internationale ainsi que pour la perspective européenne de la Serbie.

DIVERS

Le Conseil européen:

— a nommé M. Mario Draghi président de la Banque centrale européenne pour la période allant du 1er novembre 2011 au 31 octobre 2019;

— a adopté une déclaration sur le voisinage méridional (annexe), approuvé la nouvelle approche concernant les relations avec les pays voisins de l'Union européenne, telle qu'elle figure dans les conclusions du Conseil du 20 juin 2011, et insisté sur l'importance que revêt le sommet du Partenariat oriental qui se tiendra à Varsovie les 29 et 30 septembre 2011;

— a approuvé la stratégie européenne pour la région du Danube et appelé toutes les parties prenantes à la mettre en œuvre sans tarder, comme le Conseil l'a indiqué dans ses conclusions du 13 avril 2011. Les États membres sont invités à poursuivre les travaux, en coopération avec la Commission, sur d'éventuelles futures stratégies macrorégionales, notamment en ce qui concerne la région adriatique et ionienne;

— a approuvé le rapport de la présidence sur l'intégration des Roms, dont il a relevé l'importance majeure, et demandé la mise en œuvre rapide des conclusions du Conseil du 19 mai 2011 sur un cadre de l'UE pour les stratégies nationales d'intégration des Roms jusqu'en 2020, notamment pour ce qui est d'élaborer, d'actualiser ou d'étoffer les stratégies nationales d'intégration des Roms des États membres, ou les ensembles intégrés de mesures mis en place dans le contexte de leurs politiques plus vastes d'inclusion sociale visant à améliorer la situation des Roms, pour la fin de 2011;

— a salué le rapport annuel sur les objectifs d'aide au développement de l'UE, notant que, si l'UE continuait d'être le principal bailleur de fonds dans le monde en 2010, l'objectif collectif intermédiaire pour 2010 n'a pas été atteint. Le Conseil européen a réaffirmé qu'il était résolu à atteindre d'ici 2015 les objectifs fixés en matière d'aide au développement, conformément à ses conclusions de juin 2005.

ANNEXE

DÉCLARATION CONCERNANT LE VOISINAGE MÉRIDIONAL

1. Le Conseil européen confirme les principes et les objectifs définis dans la déclaration et les conclusions sur le voisinage méridional qu'il a adoptées respectivement les 11 et 25 mars 2011. Il accueille avec satisfaction la communication commune de la Haute Représentante et de la Commission européenne intitulée « Une Stratégie nouvelle à l'égard d'un voisinage en mutation », publiée le 25 mai 2011. Il fait pleinement siennes les conclusions que le Conseil a adoptées le 20 juin 2011 sur la politique européenne de voisinage et demande que des progrès soient réalisés rapidement dans la mise en œuvre de mesures concrètes, conformément aux principes et objectifs approuvés par le Conseil.

2. Le Conseil européen se félicite du soutien apporté par le G8 à la transformation démocratique du voisinage méridional de l'Europe. Il souligne à nouveau l'importance que revêt l'Union pour la Méditerranée et rappelle qu'il importe de lancer rapidement des projets concrets et d'envergure dans le cadre de l'UPM.

3. Le Conseil européen se félicite des mesures prises actuellement sur la voie d'une transformation démocratique dans la région, notamment en Égypte et en Tunisie. Il salue l'annonce des principaux éléments de la nouvelle constitution marocaine, se félicite de l'engagement renouvelé à mener des réformes politiques en Jordanie, y compris une révision de la constitution, et prend note avec satisfaction de la levée de l'état d'urgence et des projets de réforme constitutionnelle en Algérie. Il souligne qu'il est nécessaire que le processus de réforme s'inscrive dans un cadre de dialogue ouvert à tous et il suivra de près la mise en œuvre de ces réformes.

4. Le Conseil européen confirme qu'il soutient sans réserve les résolutions 1970 et 1973 du Conseil de sécurité des Nations unies sur la Libye et les efforts que déploient des États membres de l'UE pour les mettre en œuvre. Il approuve pleinement les conclusions que le Conseil a adoptées sur la Libye le 20 juin 2011 et réaffirme que le colonel Kadhafi doit quitter le pouvoir immédiatement. La transformation démocratique du pays continue de revêtir pour l'Union européenne un intérêt primordial. Le Conseil européen souligne le rôle essentiel que joue le Conseil national de transition (CNT) dans ce processus en tant que représentant des aspirations des citoyens libyens.

5. Le Conseil européen condamne avec la plus grande fermeté la répression exercée par le régime syrien à l'encontre de sa propre population et les violences inacceptables et révoltantes dont elle continue de faire l'objet. Il prend note avec une vive préoccupation des informations faisant état d'opérations militaires syriennes à proximité de la frontière turque, dans la ville de Khirbet al-Jouz, et réitère ses appels à la plus grande retenue. En faisant le choix de la répression plutôt que de tenir les promesses de réformes de grande ampleur qu'il a lui-même faites, le régime sape sa légitimité. Les responsables de crimes et d'actes de violence commis contre des civils auront à répondre de leurs actes. Faisant siennes les conclusions sur la Syrie adoptées par le Conseil le 20 juin 2011, le Conseil européen se félicite de l'adoption de nouvelles sanctions. Il soutient par ailleurs sans réserve les efforts diplomatiques déployés pour faire en sorte que le Conseil de sécurité des Nations unies puisse prendre ses responsabilités et réagir de manière appropriée à la situation en Syrie.

6. Le Conseil européen reste préoccupé par la situation au Yémen et demande instamment à toutes les parties de mettre fin aux violences, de respecter les droits de l'homme et d'observer un cessez-le-feu permanent; il se félicite de l'engagement pris à cet effet par le vice-président. Il rappelle qu'il est urgent d'engager une transition sans exclusive et qui se déroule dans de bonnes conditions, conformément à l'initiative du Conseil de coopération du Golfe. Le Conseil européen s'inquiète du processus dans lequel s'inscrivent les procès et les condamnations de membres de l'opposition à Bahreïn. Il encourage ce pays à veiller à ce que les droits de l'homme et les libertés fondamentales soient pleinement respectés.

7. Le Conseil européen note que la situation à Gaza demeure préoccupante. L'aide humanitaire fournie à la population de Gaza devrait être conforme au cadre défini par les Nations unies et aux décisions adoptées par cette organisation en la matière et il convient de veiller à ne pas mettre des vies humaines en danger.

8. Les changements radicaux que connaît l'ensemble du monde arabe mettent en évidence la nécessité de réaliser des progrès dans le processus de paix au Proche-Orient et de sortir de l'impasse actuelle, tout en respectant les accords et obligations antérieurs. Le Conseil européen appelle toutes les parties à entamer d'urgence des négociations. Seule la reprise de négociations directes pourrait offrir une chance réelle d'améliorer la situation sur le terrain et conduire ainsi à une solution globale durable. Soulignant le rôle central joué par le Quatuor, le Conseil européen salue les efforts déployés à cet effet par les États membres de l'UE et par la Haute Représentante et accueille avec satisfaction les propositions récemment faites par le Président Obama, dans le droit fil des positions adoptées précédemment par l'UE. Il soutient sans réserve la demande de la Haute Représentante visant à ce que le Quatuor crée de toute urgence une perspective crédible de relance du processus de paix. Le Conseil européen appelle l'ensemble des parties à s'abstenir de tout acte unilatéral qui n'irait pas dans le sens d'une solution globale. Il soutient également l'initiative concernant la convocation d'une conférence à Paris en vue de fournir un soutien économique à la construction d'un État palestinien dans le cadre d'une relance du processus de paix. Le Conseil européen se déclare vivement préoccupé par le sort de Gilad Shalit, qui est retenu prisonnier par le Hamas en violation manifeste du droit humanitaire international universel. Le Conseil européen exige la libération immédiate de Gilad Shalit, qui a été enlevé il y a tout juste cinq ans.


(1) Cf. Recommandation du Conseil concernant le programme national de réforme de la Belgique pour 2011 et portant avis du Conseil concernant le programme de stabilité actualisé de la Belgique pour la période 2011-2014, 20 juin 2011, p. 12.

(2) Ibid., p. 13.

(3) Ibid., p. 13, point 4.

(4) Ibid., p. 13, point 5.

(5) Voir doc. EUCO 24/11.