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24 MARS 2011
La loi du 1er mars 1958 relative au statut des officiers de carrière des Forces armées fixait, comme l'indique son intitulé, le statut des officiers de carrière et des officiers de réserve des forces armées en ce qui concerne le grade, l'emploi, la position, la formation, les corps et spécialités, l'ancienneté et l'avancement.
Ces règles s'appliquaient en principe à toutes les personnes qui étaient intégrées en qualité d'officier dans les forces armées, à quelques rares exceptions près. Une de ces exceptions été formulée à l'article 46 de la loi, qui disposait que « les dispositions de la présente loi ne sont pas applicables aux princes de la Famille royale ».
La loi du 1er mars 1958 a été abrogée par l'article 208 de la loi du 28 février 2007 fixant le statut des militaires du cadre actif des Forces armées, laquelle loi contient, en son article 2, alinéa 2, une disposition analogue: « Sauf disposition contraire, les dispositions de la présente loi ne sont pas applicables aux membres de la Famille royale. »
Conformément à la combinaison de ces deux lois, le Prince Philippe a été promu, le 25 mars 2010, lieutenant-général et vice-amiral, soit les grades les plus élevés qui existent respectivement dans l'armée, dans la Force aérienne et dans la Force navale. Le Prince Laurent, pour sa part, s'est vu conférer, le 26 juin 2004, le grade de capitaine de vaisseau, c'est-à-dire le grade le plus élevé des officiers supérieurs de la Force navale. Enfin, la Princesse Astrid est devenue membre des forces armées le 22 mai 1997 en qualité de colonelle à la composante médicale, soit le grade le plus élevé des officiers supérieurs du service médical. Le grade qui a été conféré à la Princesse Astrid n'existe d'ailleurs pas à strictement parler, puisque la dénomination exacte est « médecin colonel », mais il était assez évident que ce grade ne pouvait pas être conféré sous cette dénomination à l'intéressée, celle-ci n'ayant pas la qualification requise pour porter le titre de médecin.
Ce dernier exemple montre on ne peut plus clairement que les dispositions d'exception prévues à l'article 46 de la loi de 1958, juncto l'article 2, alinéa 2, de la loi de 2007, ont permis aux princes de la Famille royale de se voir conférer des grades militaires sans disposer des qualifications et des mérites requis à cet effet par la loi. En effet, il ne fait aucun doute que les Princes Philippe et Laurent et la Princesse Astrid n'auraient jamais revêtu ces grades sans le statut princier qui est le leur, vu l'absence de toute aptitude à accéder à un niveau aussi élevé de la hiérarchie militaire.
S'il est vrai qu'à l'époque féodale, rien n'était plus naturel que de conférer aux princes des grades et des titres militaires ronflants qui ne correspondaient en rien aux qualifications ni à l'aptitude militaire de ces personnes à exercer concrètement de telles fonctions, nous vivons aujourd'hui depuis longtemps dans un État de droit démocratique, et de telles pratiques devraient avoir été clairement reléguées dans les oubliettes du passé.
L'octroi arbitraire de grades militaires à des personnes dépourvues des qualifications requises constitue en outre une offense à celles et ceux qui, pour accéder à de tels grades, doivent faire des études difficiles et suivre des formations intensives.
Enfin, on peut se demander dans quelle mesure une telle disposition est conforme à plusieurs dispositions constitutionnelles. Ainsi, l'article 10 de la Constitution dispose qu'il n'y a dans l'État aucune distinction d'ordres et que les Belges sont égaux devant la loi. L'article 11, de son côté, prévoit que les droits reconnus aux Belges doivent être accordés sans discrimination.
Aussi la présente proposition vise-t-elle à supprimer cette disposition féodale d'un autre âge, afin de faire en sorte que les princes de sang royal abandonnent, sur ce plan au moins, les usages de l'ancien régime au profit de ceux d'un État de droit démocratique digne du XXIe siècle.
Jurgen CEDER. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
L'article 2, alinéa 2, de la loi du 28 février 2007 fixant le statut des militaires du cadre actif des Forces armées est abrogé.
Art. 3
La présente loi entre en vigueur le jour de sa publication au Moniteur belge.
Tous les grades militaires qui ont été conférés en vertu de la disposition visée à l'article 2 deviennent caducs concomitamment avec l'entrée en vigueur de la présente loi.
15 février 2011.
Jurgen CEDER. |