4-1235/3

4-1235/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2008-2009

6 MAI 2009


Projet de loi modifiant, en ce qui concerne les contrats d'assurance maladie, la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre et la loi du 20 juillet 2007 modifiant, en ce qui concerne les contrats privés d'assurance maladie, la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre


Procédure d'évocation


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES ET DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES PAR

M. MAHOUX


I. Introduction

Le projet de loi qui fait l'objet du présent rapport relève de la procédure bicamérale facultative et a été déposé initialement à la Chambre des représentants par le gouvernement le 11 décembre 2008 (doc. Chambre, nº 52-1662/001).

Il a été adopté par la Chambre des représentants le 19 mars 2009, par 72 voix contre 25 et 9 abstentions.

Il a été transmis au Sénat le 20 mars 2009 et a été évoqué le 26 mars 2009.

La commission l'a examiné au cours de ses réunions des 31 mars, 28 avril et 6 mai 2009.

II. Exposé introductif du secrétaire d'État à la Modernisation du SPF Finances, à la Fiscalité environnementale et à la Lutte contre la fraude fiscale, adjoint au ministre des Finances

Le secrétaire d'État expose que, voici plus d'un an, entrait en vigueur une loi importante. La loi du 20 juillet 2007 devait en effet apporter certaines garanties importantes dans un secteur important des assurances, celui de l'assurance-maladie privée.

Cependant, cette législation n'a pas eu tous les effets escomptés. Or, une loi qui est bonne sur le plan des principes mais qui s'avère difficile à appliquer ou facile à contourner, doit être réécrite.

Le projet de loi à l'étude ici est donc essentiellement, et concrètement, une loi de réparation. Il entend mettre en œuvre un certain nombre de principes auxquels tous les contractants de pareille assurance tiennent beaucoup:

— la garantie de pouvoir bénéficier, à vie, d'un contrat d'assurance hospitalisation;

— le droit de poursuivre individuellement (pour soi et les membres de sa famille) une assurance collective dont on perd le bénéfice (par exemple, avec l'arrivée à la pension);

— le droit à un contrat d'assurance pour les personnes handicapées ou malades chroniques;

— la couverture sans limitation des éventuelles affections préexistantes qui ne seraient pas manifestées au moment de la conclusion du contrat;

— et enfin, la création d'un index limitant strictement les éventuelles augmentations de primes à l'augmentation du coût réel des prestations effectuées; ceci afin d'éviter des hausses brusques aux conséquences souvent ravageuses.

Les constats qui nous ont poussé, au Parlement et au sein du gouvernement, à nous interroger et à réagir, sont les suivants:

1. Un certain nombre de distinctions prévues par la loi existante sont inadéquates. C'est d'abord le cas de la distinction la plus fondamentale, qui distingue entre les contrats dits collectifs et les contrats dits individuels: de nombreux contrats parmi lesquels certains posent d'ailleurs problème ne se plient pas à cette distinction, notamment les assurances dites « affinity ».

2. Les délais prévus initialement ont fait l'objet d'interprétations divergentes et préjudiciables à la sécurité juridique nécessaire du dispositif mis en place. Ainsi, l'interprétation selon laquelle les contrats ne devaient être adaptés aux nouvelles règles que deux ans après l'entrée en vigueur du ou des indices d'augmentation des primes, doit-elle être démentie fermement.

3. Le système qui devait aboutir à la création d'un ou de plusieurs indices représentatifs de l'évolution des coûts de ces assurances, s'est avéré avoir été construit précipitamment, sans tenir compte de la spécificité des organismes et institutions qu'il impliquait, et sans donner aucune indication concrète de la méthodologie à employer.

Le projet qui est présenté aujourd'hui, et qui a été adopté par la Chambre, a fait l'objet de deux passages en Conseil des ministres.

Compte tenu de ce qui précède, ainsi que des avis exprimés, — notamment par des membres de la Chambre et du Sénat —, et suite aux auditions qui ont eu lieu en commission de 1'Économie de la Chambre voici quelques mois, il a semblé plus opportun au gouvernement de présenter ce projet de façon distincte, et non pas,- même s'il s'agit essentiellement de dispositions réparatrices —, dans une loi de dispositions diverses.

Voici donc les grandes lignes de ce projet:

1. La distinction de base entre les différents contrats privés, est opérée selon qu'on se trouve dans le cadre d'une relation professionnelle ou non. Entrent donc désormais clairement dans le champ d'application de la loi, tous les types de contrats d'assurance, en ce compris les contrats liés à la possession d'un compte en banque, ou d'autres contrats dits « affinity groups ». Très clairement, ce projet de loi ne modifie pas la portée de la loi de 2007 en soumettant rétroactivement certains types de contrats à de nouvelles dispositions. Au contraire, il ne fait qu'exprimer clairement ce qui était déjà le souhait politique largement partagé dès la conception de la première loi.

2. La prime résultant des contrats qui ne sont pas liés à un cadre professionnel pourra désormais être adaptée à l'indice des prix à la consommation normale et, seulement dans la mesure où celui-ci dépasse cet indice, à un indice reflétant l'évolution des coûts de l'assurance.

II est évidemment essentiel de s'assurer de la solidité méthodologique et de la validité scientifique de ces indices. Il n'était pas opportun, en l'occurrence, de faire fixer ces indices par la CBFA. Cela aurait été clairement contraire à sa mission première: celle d'un contrôle prudentiel, qui s'effectue a posteriori.

Cela ne signifie pas que la CBFA sera absente de ce dossier: elle devra contrôler la conformité des données de sinistralité fournies par les entreprises d'assurances, à partir desquelles le SPF Économie calculera l'indice.

Ceci rejoint le souci de garantir l'objectivité des données.

Le Centre fédéral d'Expertise en Soins de Santé (le « Kenniscentrum »), n'interviendra donc plus non plus dans un rôle politique et décisionnel. Cependant, il se voit confirmé dans un rôle de conseil scientifique. Il a d'ailleurs, suite à une demande du Conseil des ministres de l'an dernier, effectué une étude et proposé (dans son rapport du 16 décembre 2008) le choix entre deux méthodologies visant à construire un index autour des différents facteurs qui influent sur les coûts de l'assurance maladie, plus exactement sur la prime pure.

Les résultats de cette étude KCE ont été examinés. La cellule stratégique du ministre des Finances et celle de la ministre de la Santé, préparent ainsi, sur cette base, un projet d'arrêté royal déterminant les paramètres utilisés, les données nécessaires et le mode de calcul des indices. Enfin, il reviendra au SPF Économie de calculer l'indice ou les indices sur la base des chiffres qui lui seront fournis, et de procéder à la publication semestrielle de ceux-ci. Très logiquement, les ministres en charge des assurances et des affaires sociales seront habilités à procéder à une révision des indices.

Quant à l'applicabilité de la loi aux contrats existants, le projet fixe bel et bien l'entrée en vigueur de la loi au 1er juillet 2007, mais prévoit une période transitoire de 2 ans pour adapter les contrats en cours.

Par contre, l'idée de prévoir un délai de 2 ans pour l'entrée en vigueur de la loi en tant que telle lui semble clairement abusif.

De même, le projet de loi prévoit une prolongation d'un an du régime transitoire de 2 ans au bénéfice des personnes handicapées ou malades chroniques et leur garantissant ainsi un accès plus adapté à leur situation à l'assurance-santé.

La meilleure définition de l'index mettra un terme à la critique légitime émise par certaines organisations de consommateurs par le passé. Ceux-ci ont pointé du doigt la pratique de certaines compagnies, qui ont pratiqué des hausses aussi importantes qu'inattendues, le plus souvent d'ailleurs en s'appuyant sur des failles de la loi de 2007. Ceci ne constitue heureusement pas un phénomène majoritaire sur le marché. Les compagnies sérieuses, qui ont régulièrement adapté leurs tarifs en s'abstenant de pratiquer des prix de lancement intenables sur le long terme, ont d'ailleurs dénoncé ces pratiques. Une série de procédures sont d'ailleurs en cours, notamment auprès du médiateur du secteur des assurances.

Bien sûr, le jeu de la concurrence sera préservé, et chaque compagnie restera libre de garder des prix attractifs ... mais elle ne pourra plus, en aucun cas, pratiquer de « rattrapage ». Désormais, chaque assuré, quel que soit son âge, se verra garantir une réelle sécurité tarifaire.

L'application correcte de cet index donnera aussi aux compagnies d'assurance la possibilité de se conformer, dans des conditions économiquement réalistes, aux nouvelles obligations issues de cette loi-ci et de la loi de 2007, et notamment l'obligation de couverture à vie. Du reste, le projet de loi encadre beaucoup plus strictement, sans l'interdire, la possibilité de faire face à des circonstances exceptionnelles: l'assureur pourra, lorsqu'une perte menace ou se présente dans cette branche de son activité, introduire un dossier auprès de la CBFA, qui aura toute latitude pour en décider.

Aujourd'hui, il est essentiel de fixer des bases incontestables. Parce que les bases existantes ne sont pas suffisamment univoques, elles ont donné lieu à certaines pratiques peu souhaitables dans le secteur de l'assurance hospitalisation. Nous voulons que cette loi soit un signal fort. Nous voulons que les indices, que nous sommes en train d'élaborer, aboutissent à garantir à l'assuré une réelle sécurité tarifaire. Et ce, quel que soit son âge.

Le gouvernement souhaite d'ailleurs que les garanties prévues par les produits distribués par les mutuelles (assurances dites complémentaires), à l'avenir, protègent tout autant le consommateur. C'est d'ailleurs ce à quoi, avec ma collègue en charge de la Santé, nous allons veiller dans les prochains mois.

Le présent projet de loi, en conclusion, est essentiel pour la protection de l'assuré.

Comme il l'a déjà été rappelé à la Chambre, il faudra toutefois aller plus loin encore, en mettant en place de façon progressive, l'individualisation des réserves constituées en assurance-hospitalisation, et leur portabilité. Le ministre y travaille en ce moment avec ses services.

III. Procédure

Lors des réunions, plusieurs sénateurs ont demandé d'organiser des auditions notamment à la suite du dépôt d'une pétition de plus de 40 000 signatures, arguant du fait que toutes les interventions des orateurs n'auraient pas été retranscrites dans le rapport de la Chambre des représentants et que plusieurs associations importantes de patients et de consommateurs, ainsi que le Conseil de l'égalité des chances entre hommes et femmes n'ont pas été entendus. Cependant, la commission a finalement préféré prendre connaissance par écrit uniquement des nouveaux avis et des interventions absentes du rapport de la Chambre des représentants (voir annexes). Elle a également décidé de demander au gouvernement de fournir des explications complémentaires sur le code de conduite et sur le projet d'arrêté royal fixant les paramètres utilisés, les données requises et le mode de calcul des indices.

IV. Exposé sur le code de conduite et le projet d'arrêté royal

Le projet de code de conduite sur lequel nous demandons l'engagement sans condition du secteur des assurances, répond à plusieurs objectifs.

Il s'agit tout d'abord de proposer une alternative aux assurés qui ont été amenés à résilier leur police d'assurance hospitalisation depuis deux ans. Concrètement, s'ils disposaient d'une garantie en chambre simple, il faut pouvoir leur proposer une couverture similaire, mais en chambre double. Cette mesure doit donc viser ceux qui ont été confrontés aux pratiques de certains acteurs du marché, pratiques qui ont contourné la loi du 20 juillet 2007, dont nous sommes en train de réparer les failles.

Il s'agit ensuite de faire en sorte qu'une alternative similaire soit également proposée à l'avenir à toutes les personnes qui seraient confrontées à une augmentation significative de leur prime, soit une augmentation en base annuelle supérieure à 5 %.

D'un point de vue politique, je continuerai de plaider, en ce compris auprès de ma collègue en charge de la santé, en faveur d'un meilleur remboursement par l'assurance maladie-invalidité obligatoire, des frais d'hospitalisation pour les maladies chroniques et les personnes handicapées, de même que pour une régulation bien plus efficace des suppléments qui peuvent être demandés dans les hôpitaux. Il faudra aussi renforcer, dans la limite des possibilités budgétaires, l'accessibilité de formes et de contrats d'assurance répondant à des garanties élevées en matière de couvertures.

Proposition de mécanisme d'indexation pour les primes d'assurances des contrats qui ne sont pas liés à l'activité professionnelle

Chaque contrat sera rattaché à une des quatre catégories proposées: hospitalisation en chambre particulière/hospitalisation en chambre double ou commune/soins ambulatoires/soins dentaires.

Les contrats prévoyant une adaptation de la prime en fonction de l'âge de l'assuré en cours de contrat pourront également être rattachés à une classe d'âge: 0-19 ans/20-34 ans/35-49 ans/50-64 ans/65 ans et plus.

La catégorie à laquelle est rattaché le contrat figurera sur la quittance. En cas de rattachement erroné, l'assuré pourra solliciter le remboursement de l'éventuelle adaptation tarifaire.

Les indices seront calculés sur la base du montant des sinistres réglés par les assureurs (factures d'hôpitaux).

Chaque assureur sera tenu de communiquer ses données, de même que la ventilation des contrats par catégorie, à la CBFA et au SPF Économie, sous forme de tableau anonymisé. C'est la certification des chiffres par le réviseur agréé par la CBFA auprès de chaque compagnie qui emportera l'envoi des données. Pour le reste, le processus classique de « reporting » des entreprises et des réviseurs vers la CBFA (article 40 de la loi sur le contrôle des entreprises d'assurances, obligeant les commissaires à informer immédiatement la CBFA de tout fait pouvant constituer une violation de la loi ou de toutes autres prescriptions spécifiques concernant l'exercice de l'activité de l'entreprise d'assurances) servira à traquer d'éventuelles incohérences, erreurs ou falsifications. La charge des sinistres dans le cadre de l'assurance-maladie est en effet un élément des comptes annuels incombant au contrôle révisoral.

Le SPF Économie procédera aux calculs semestriels. Il n'y procédera toutefois que si au moins trois compagnies, représentant au moins 75 % des montants assurés du marché, ont communiqué leurs chiffres, et ce, afin de garantir la représentativité des indices. Faute de quoi, seul le dernier indice connu pourra être appliqué.

Un tableau d'indices sera calculé et publié semestriellement, reprenant l'évolution constatée sur les douze mois précédents.

À l'échéance annuelle du contrat, l'assureur pourra décider d'appliquer à la prime (en tout ou en partie) le dernier indice publié.

L'indexation maximale applicable (en cas d'augmentation) sera donc égale à l'évolution de l'indice spécifique ou à celle de l'indice des prix à la consommation depuis la dernière échéance. En somme, si l'entreprise d'assurances n'exerce pas son droit à l'échéance annuelle de la prime, elle perd ce droit pour l'année concernée. De même, tout rattrapage (application d'un différentiel supérieur à un an) sera interdit, conformément à la loi.

V. Discussion générale

Mme Stevens affirme que le projet à l'examen abandonne une fois de plus les patients à leur sort, en privilégiant amplement les intérêts des assureurs. Certaines mauvaises langues prétendent même que le texte du projet de loi a en grande partie été écrit par les assureurs eux-mêmes. Ce constat n'est pas si saugrenu, comme l'illustre la synthèse des trois principales revendications des associations de patients et organisations de consommateurs. Le projet de loi à l'examen n'y a apporté aucune réponse ou a au contraire fait le jeu des assureurs.

Tout d'abord, le projet de loi ne prévoit toujours rien pour les maladies préexistantes. Dans les deux années de la souscription d'un contrat d'assurance, les assureurs auront toujours la possibilité de justifier un refus d'indemnisation en invoquant une maladie préexistante. Il leur suffit de démontrer simplement qu'avant de conclure le contrat, la personne en question présentait déjà les symptômes d'une affection qui ne devait pas nécessairement avoir été diagnostiquée par un médecin. La question qui se pose ici est celle de l'identification des symptômes précis d'une affection.

Deuxièmement, le projet de loi ne réglemente pas les réserves constituées par les assurés ayant cotisé pendant de nombreuses années. Au fil des ans, les assureurs ont augmenté à leur gré les primes des assurances hospitalisation. Cette hausse traduisait non pas une adaptation à l'inflation ou au coût de la vie mais souvent une simplification de la prime qui ne se justifiait pas. De ce fait, de nombreux assurés ne sont plus capables de payer leur prime et se croient dès lors contraints de résilier leur contrat d'assurance. L'intervenante estime que de tels cas appellent l'élaboration d'un règlement équitable concernant les réserves constituées. Ce règlement devra être appliqué même si l'assuré demande à changer d'assureur.

Troisièmement, il y a la question du calcul de l'indice médical, un indice qui déterminera à l'avenir dans quelle mesure les assureurs peuvent augmenter leurs primes. Le problème fondamental est que cet indice sera calculé en fonction de chiffres fournis par les assureurs eux-mêmes. Le Centre fédéral d'expertise des soins de santé a déjà émis de sérieuses réserves à ce propos.

Par conséquent, la sénatrice déplore que le projet de loi à l'examen, qui trouve sa raison d'être dans les lacunes de la loi Verwilghen du 20 juin 2007, ne parvienne pas à résoudre les manquements susmentionnés de la loi ou à tenir compte des intérêts des patients et des consommateurs. C'est la raison pour laquelle elle renvoie à sa proposition de loi modifiant la loi du 10 mai 2007 tendant à lutter contre certaines formes de discrimination, en vue d'interdire dans les assurances toute segmentation fondée sur le handicap ou l'état de santé (doc. Sénat, nº 4-1224/1), qui règle déjà l'un des problèmes. En ce qui concerne le projet de loi proprement dit, l'intervenante insiste pour que la commission prenne bien le temps d'examiner le projet et pour que l'on intègre les modifications nécessaires au profit des patients et des consommateurs en votant par exemple les 12 amendements qui ont été rejetés à la Chambre des représentants. Est-il possible en outre d'organiser une audition à laquelle les représentants des deux parties seraient invités ?

Par ailleurs, l'intervenante évoque l'avis négatif rendu par le Conseil de l'égalité des chances entre hommes et femmes à propos des dispositions proposées. Il lui semble important d'en tenir compte et de modifier les dispositions proposées en conséquence.

Enfin, l'intervenante indique que le Code de conduite proposé n'a aucune valeur sur le plan légal. Il convient de faire figurer ce Code de conduite dans les dispositions législatives proprement dites.

Mme Vanlerberghe rappelle que plusieurs sénateurs de la majorité ont eux aussi évoqué le projet; elle fait donc part de ses doutes concernant le texte proposé. De plus, ces sénateurs ont promis publiquement de réévaluer le projet. Mieux encore, on a déclaré à la Chambre des représentants que le texte proposé n'était pas bon et qu'il allait être modifié au Sénat. On ne peut donc pas accepter que le projet soit maintenant voté au pas de charge par le Sénat et, qui plus est, sans aucune modification. L'intervenante souligne en effet l'importance du projet de loi. En outre, compte tenu des réactions notamment du Gezinsbond et du Vlaamse Ouderenraad, il importe d'entendre également ces parties et d'adapter les dispositions.

La commissaire ne peut effectivement pas tolérer les fortes hausses de prix du passé, ni leur entérinement en adoptant les dispositions légales à l'examen. Elle souhaite donc concrètement que l'on vote sur la demande d'avis à la commission des Affaires sociales et sur l'organisation d'auditions. Chaque votant devra ainsi préciser la manière dont il veut examiner les dispositions proposées.

Mme Matz indique que l'on ne peut être insensible à la multitude de remarques formulées. À ce propos, il convient de distinguer, d'une part, les dispositions à l'examen et, d'autre part, celles qui doivent encore être examinées et qui concernent la fusion des lois Verwilghen et Demotte. Le secrétaire d'État peut-il fournir quelques précisions sur les perspectives et les principes de cette nouvelle loi de fusion ? S'il existe un danger de marchandisation des soins de santé ou si certaines catégories risquent d'être exclues des soins de santé, c'est au niveau de la loi de fusion en question que le risque se situe. À ce propos, l'intervenante se réfère aux observations des organisations de consommateurs et de patients qui pointent également les risques liés à cette fusion. L'objectif de la fusion ne saurait être de laisser l'ensemble des « gros » risques aux mutuelles.

Mme Crombé-Berton désire rappeler les mérites du texte à l'examen et demande que l'on vote sur celui-ci.

M. Mahoux déclare que le problème est abordé actuellement du point de vue des assureurs. Une autre option consisterait à adopter la perspective de la couverture du risque. M. Mahoux propose à cet égard d'introduire au sein de l'index une différenciation entre les hôpitaux qui pratiquent des suppléments dans des limites définies (souvent un maximum de 100 % du prix INAMI) et ceux qui ne se mettent pas de limite. Il ne pense pas qu'il faille demander l'avis de la commission des Affaires sociales.

Le commissaire souhaite aussi souligner la nécessité de porter une attention particulière aux personnes handicapées et à la problématique des maladies préexistantes. Il y a lieu de clarifier davantage ces questions, d'autant que l'on se situe ici dans un système contractuel. Des contrats peuvent-ils vraiment être annulés après leur conclusion ? Ensuite, il considère comme un progrès l'introduction de plusieurs catégories, en fonction du mode d'administration des soins et de l'âge. Cependant, l'intervenant émet des réserves sur le choix visant par exemple à réunir toutes les chambres particulières en une seule catégorie. Il aurait préféré que l'on opère une nouvelle subdivision, de telle sorte que l'indice final corresponde mieux à la réalité. Peut-on y songer ? Peut-on également réfléchir à une solution au problème des suppléments ?

M. Collas est d'avis qu'il faut examiner les dispositions proposées.

Mme Van Ermen constate que l'intervention personnelle du patient dans les frais de santé a énormément augmenté ces dix dernières années, alors que la qualité relative des soins a baissé durant la même période par rapport aux autres pays. L'intervenante demande, elle aussi, que l'on organise des auditions.

En outre, elle relève que les dispositions à l'examen visent à réglementer les contrats privés d'assurance maladie. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que les plus grosses parts de marché de ces assurances sont détenues par les mutualités, pour lesquelles l'âge est aussi un facteur décisif.

M. Van Nieuwkerke indique que la problématique des chambres particulières et de leurs suppléments constitue la base de l'assurance hospitalisation. Il déclare vouloir apporter une série de corrections aux dispositions proposées, car le système est en train de déraper à cause des hausses de primes effrénées depuis le début 2008 qui peuvent encore se poursuivre jusqu'en 2009. Indépendamment de cela, le commissaire est favorable à un régime légal couvrant si possible l'ensemble des frais médicaux.

L'intervenant déclare ensuite qu'il apprécie les précisions données sur le Code de conduite et sur l'arrêté royal, mais il continue de penser qu'une loi doit fixer le cadre dans lequel l'assurance hospitalisation peut être mise en œuvre. Cela n'est cependant prévu nulle part. En outre, la loi reste asociale.

Mme Vienne relève que les maladies préexistantes posent problème. Le secrétaire d'État peut-il confirmer que ce problème sera réglé à l'avenir ?

M. Daras met l'accent sur le fait que l'avis du Conseil d'État sur le texte à l'examen date du 19 juin 2008 et qu'une crise financière et économique fait rage depuis lors à l'échelle mondiale. Nombreux sont ceux qui vivent dans l'incertitude à cause de cette crise et qui veulent encore plus qu'avant qu'on leur offre une certaine sécurité, notamment par le biais de leur assurance hospitalisation. Ils souhaitent qu'une certaine forme de concurrence apparaisse au profit des assurés et qu'il leur soit possible de changer de compagnie à faible coût.

Du reste, l'intervenant déclare qu'un code de conduite est seulement un code et pas une loi. Dans ce sens, il s'agit uniquement d'un instrument destiné à aider à réglementer le tout. Le membre remercie le secrétaire d'État d'avoir fourni un compte rendu succinct de l'arrêté royal susmentionné. Il aurait néanmoins voulu disposer aussi du texte même afin de pouvoir évaluer dans quelle mesure l'arrêté royal rectifie les dispositions légales inacceptables qui ont été proposées. En outre, il signale que la classification en catégories qui a été proposée compliquera très fortement le système. Cette façon de travailler améliorera peut-être l'ensemble mais il est difficile de le comprendre immédiatement. Ce qui est certain en revanche, c'est qu'il aurait été plus opportun de faire également figurer les dispositions relatives, par exemple, à l'indice de référence dans la loi.

M. Daras souhaite également rappeler au gouvernement l'avis du Conseil de l'égalité des chances entre les hommes et les femmes. Vu que la loi antidiscrimination du 10 mai 2007 n'est pas respectée, les dispositions légales à l'examen risquent fortement de susciter des procédures en recours. Compte tenu des temps très incertains que nous connaissons et des lacunes existantes, l'intervenant demande que l'on procède à une réflexion approfondie sur le projet et que l'on ne perde pas de vue les intérêts des citoyens. L'intervenant souhaiterait dès lors que le gouvernement retire le texte proposé et qu'il dépose une nouvelle proposition d'ici quelques semaines. Il soutient également la demande d'organiser une audition.

M. Mahoux déclare que les différences de traitement n'impliquent pas toutes une discrimination, comme le confirment également différentes lois. M. Mahoux exprime sa préoccupation face à l'arrêté royal qui ne sempble prévoir aucune disposition spécifique pour les personnes handicapées. Dans ce sens, il serait intéressant que le Conseil de l'égalité des chances entre les hommes et les femmes s'exprime au sujet de l'arrêté royal proposé qui apporte un certain nombre de précisions. Le membre insiste également sur le fait que les dispositions actuelles représentent une nette amélioration par rapport à la loi Verwilghen. L'intervenant fait également remarquer que le système actuel des mutuelles et de leurs assurances complémentaires a une autre approche et ne crée pas de discrimination. L'intervenant se réjouit que Mme Van Ermen le reconnaisse également. Enfin, M. Mahoux demande, lui aussi, des précisions quant au contenu de la loi de fusion en préparation.

M. Beke met l'accent sur le fait que le projet de loi vise à rectifier une loi votée au cours de la législature précédente. En outre, le code de conduite essaie de définir comment il sera possible à l'avenir d'aider les personnes qui ont été laissées sur le carreau par la loi précédente. En ce qui concerne l'arrêté royal, le président affirme que l'on demande rarement au gouvernement de rendre public l'orientation de l'arrêté royal exécutant une loi avant même que cette dernière n'ait été adoptée. Les deux textes indiquent clairement l'orientation dans laquelle il convient de situer la loi et ont dès lors assurément leur importance.

Quant au calcul des indices, l'intervenant est d'avis qu'il doit être basé sur des composantes de coûts qui reflètent les coûts hospitaliers dans leur totalité et donc pas uniquement sur les composantes de coûts les plus onéreuses. Il souhaite également que la prime de vieillissement soit ancrée dans la réglementation proposée.

M. Van Nieuwkerke déclare que son parti a insisté dès le début de l'année 2008 sur une correction sociale des dispositions. Aujourd'hui, il convient également de restituer les remarques dans ce contexte. Il faut faire en sorte que certaines augmentations exagérées de la prime soient revues à la baisse. Ces augmentations touchent surtout les personnes âgées, les femmes âgées en particulier, mais aussi les petits revenus tels que les chômeurs temporaires, les isolés avec enfants, ... Cependant, le projet de loi ne change rien à cet état de choses et il n'y a pas non plus de consensus social en la matière, comme en témoignent toutes sortes de remarques émanant de plusieurs organisations. Le membre fait aussi remarquer qu'un code de conduite doit en fait être ancré légalement. Il importe également que l'assurance hospitalisation soit située dans le contexte global du système d'assurance. Il faut veiller à ce que ce dernier ne se détériore pas davantage.

M. Clerfayt déclare une nouvelle fois que l'actuelle loi Verwilghen présente plusieurs lacunes importantes et que différentes personnes en ont été victimes. Toutefois, les renchérissements des polices d'assurance qui sont intervenus au cours des deux dernières années se situaient dans le cadre de la loi actuelle. L'objectif est dès lors de mettre un terme aux mécanismes en vigueur et d'y remédier au travers des dispositions à l'examen.

Le secrétaire d'État déclare également que les principaux assureurs, qui détiennent plus de 80 % des parts de marché, n'ont procédé à aucune augmentation de prix exagérée ni à des modifications contractuelles. Dans le contexte actuel, il n'est cependant pas possible de modifier les dispositions légales avec effet rétroactif et il importe dès lors d'introduire dans les plus brefs délais certaines modifications limitant la possibilité de renchérissement par les assureurs. D'où le code de conduite qui, bien qu'il n'ait pas force de loi, constitue un engagement clair de la part des assureurs. Ce texte ne peut pas encore être divulgué pour l'instant étant donné qu'il fait encore l'objet d'ultimes négociations. Le secrétaire d'État a divulgué ensuite les grandes lignes de l'arrêté royal. Il est toutefois inhabituel que le gouvernement communique littéralement un arrêté royal au parlement avant que la loi qui en est à la base n'ait été votée.

Le représentant du gouvernement annonce au sujet de la loi dite de fusion que les deux lois ne fusionneront pas mais que l'intention est d'amener à un niveau supérieur les mécanismes de protection qu'elles prévoient ou prévoiront. En outre, le but est d'enregistrer des progrès sur le plan du transfert des provisions et en ce qui concerne le traitement fiscal attrayant des systèmes les plus avantageux pour les bénéficiaires.

Pour ce qui est de la différenciation plus approfondie dans le cas des chambres particulières, le secrétaire d'État souhaite rappeler que le mécanisme proposé va calculer un indice pour certaines catégories sur la base du coût réel de l'hospitalisation c'est-à-dire telle qu'elle a été remboursée par les organismes assureurs. Il n'indiquera toutefois qu'un montant d'indexation maximum et aucun organisme assureur n'est obligé de s'aligner sur ce maximum. La concurrence pourra jouer pleinement si certains veulent appliquer le maximum et d'autres non. À cet égard, la différenciation plus approfondie proposée par M. Mahoux n'apportera pas nécessairement de valeur ajoutée. Les organismes assureurs dont les clients utilisent surtout les chambres particulières plus coûteuses appliqueront l'indexation dans sa totalité. Les autres, c'est-à-dire ceux dont les clients utilisent les chambres particulières moins onéreuses, n'appliqueront l'indice qu'en partie. De cette manière, ces derniers pourront développer un avantage concurrentiel.

M. Mahoux fait remarquer que l'indice déterminera comment les prix augmenteront. Il forme la moyenne des prix plus ou moins élevés des chambres et constitue un moins bon indicateur des différentes réalités. En revanche, une classification plus poussée permet de mieux percevoir les différentes évolutions.

Le secrétaire d'État affirme qu'une classification plus détaillée sera peut-être possible à l'avenir. Néanmoins, il existe d'ores et déjà une différenciation en 20 catégories et, partant, 20 indices applicables. Par ailleurs, l'intervenant tient à rappeler que le système proposé diffère, par exemple, de l'indexation automatique des salaires. L'indice indique, en effet, un maximum applicable que les organismes assureurs ne sont pas obligés de suivre.

En ce qui concerne les maladies préexistantes, l'intervenant déclare que cette donnée concerne aussi les mutuelles et que l'on essaiera à l'avenir de remédier à ce problème au moyen de la loi dite de fusion. Cependant, à l'avenir également, les deux parties devront recourir au droit civil pour les cas spécifiques.

M. Clerfayt affirme également être surpris d'apprendre qu'il y aurait des remarques au sujet de l'égalité. En effet, les pensions en moyenne moins élevées chez les femmes font que ces dernières doivent payer une prime d'assurance proportionnellement plus élevée par rapport à leur pension. La cause du problème se situe cependant au niveau des pensions, et c'est là qu'il faut précisément chercher une solution.

M. Mahoux précise que l'information donnée par le Gouvernement sur le contenu de l'arrêté royal et sur la direction que prendra le projet de loi dit « fusion » vers des garanties plus importantes pour les souscripteurs d'assurances lui permet de voter le texte en restant très attentif aux suites qui leur seront données.

M. Clerfayt consent que la loi de réparation à l'examen ne peut résourdre tous les problèmes. Le problème de la transférabilité des réserves, par exemple, demeure entier. À cet égard, le ministre s'est déjà engagé, devant la Chambre des représentants, à trouver à terme des solutions. Dans la pratique, il faudra toutefois encore patienter durant quelques mois. C'est pourquoi il est opportun de voter ladite loi de réparation le plus rapidement possible, de manière à pouvoir mettre en œuvre au plus vite les éléments positifs qu'elle contient.

VI. Discussion des amendements

M. Van Nieuwkerke et consorts dépose l'amendement nº 1 (doc. Sénat, 4-1235/2) visant à prévoir, dans un nouvel article 5/1, un règlement relatif à la réserve qui est constituée pour le vieillissement. De cette manière, un assuré pourra racheter la réserve constituée pour le vieillissement ou la transférer s'il change de compagnie d'assurances. Ainsi les primes de vieillissement ne s'envoleront pas de manière incontrôlée.

M. Daras estime que les amendements sont en mesure de fournir une réponse à une série de questions. Il est dès lors regrettable que ces amendements ne seront pas adoptés au motif qu'ils ont été rédigés par l'opposition. Le premier amendement vise ainsi à remédier au problème du transfert des réserves pour le vieillissement, problème qu'ont reconnu M. Beke et le secrétaire d'État.

Le secrétaire d'État fait remarquer que l'amendement proposé instaure un régime identique à celui qui avait été proposé par l'administration américaine de Bush et que cette solution créera de nouveaux problèmes au détriment des entreprises plus performantes comme des assurés, une fois la « réserve » épuisée. C'est pourquoi il demande que l'on attende l'initiative du gouvernement.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 2 à l'article 6 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui vise à clarifier la manière dont la prime, les franchises et la prestation peuvent être modifiées. C'est pourquoi il est proposé d'établir un indice médical uniforme qui sera publié chaque mois par le SPF Économie.

En ce qui concerne la disposition proposée au § 3, alinéa 3, Mme Stevens souligne que le mode de calcul proposé ne changera rien. En effet, il y aura toujours délibération en Conseil des ministres et les avis du Conseil de la consommation et de la Commission des assurances ne sont pas contraignants. En ce sens, l'intervenante propose que l'on conserve à cet effet la disposition figurant au § 2, alinéa 1er, et que l'on base le calcul sur l'indice des prix à la consommation. Une autre possibilité en l'espèce serait de retenir le volet « dépenses de santé » de l'indice des prix à la consommation. Cet indice est fiable, objectif et transparent. De surcroît, il ne serait pas nécessaire d'élaborer un tout nouvel indice.

S'agissant du système d'indexation, M. Daras est d'avis que la solution proposée par l'amendement permet de remédier à une série de problèmes soulevés ici.

M. Clerfayt indique qu'il n'est pas possible d'utiliser l'indice des prix à la consommation ou une partie de celui-ci comme base pour les éventuelles augmentations de prix étant donné que les membres de la Commission de l'indice ont jusqu'à présent refusé cette solution. C'est pourquoi le gouvernement a proposé une alternative et demande aux membres de l'approuver.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 3 insérant un article 6/1 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui vise à modifier l'actuelle loi Verwilghen en précisant clairement que les données pertinentes qu'un preneur d'assurance doit communiquer à propos de son état de santé ne peuvent porter que sur une maladie ou une affection diagnostiquée.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 4 à l'article 7 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui vise à modifier l'actuelle loi relative aux malades chroniques et aux personnes handicapées.

En ce qui concerne les amendements nos 3 et 4, on peut se demander pourquoi on accorde un délai supplémentaire de deux ans pour adapter les contrats d'assurance. En effet, le diagnostic a déjà été posé au moment de la conclusion du contrat. Comment, dans ces conditions, pourrait-il encore être délibérément passé sous silence ?

M. Daras précise que seuls les coûts qui sont directement liés à une maladie ou à un handicap diagnostiqué au moment de la conclusion du contrat peuvent être exclus. On résout ainsi un certain nombre de problèmes également soulevés par la majorité.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 5 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui insère un article 10/1 visant à préciser ce qu'il advient de la prime complémentaire si l'assuré principal change d'emploi.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 6, qui supprime l'article 12 (doc. Sénat, 4-1235/2) dans le but d'empêcher les assureurs de majorer les primes indépendamment de tout indice objectif.

M. Daras souligne ensuite l'importance de la proposition de suppression de l'article 12 en question. En effet, celui-ci offre aux assureurs une trop grande échappatoire pour majorer leurs primes indépendamment de tout indice objectif.

Le secrétaire d'État fait remarquer que seule la CBFA est habilitée à autoriser pareil mécanisme exceptionnel. Celui-ci est déjà appliqué aujourd'hui pour les mutualités, et étant donné que l'objectif est de procéder à un alignement, l'intervenant demande de ne pas approuver l'amendement. En outre, cette mesure a aussi pour finalité de protéger le consommateur, puisque c'est ce dernier qui pâtirait le plus de la faillite éventuelle de son assureur.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 7 à l'article 13 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui vise à préciser clairement que toutes les adaptations de prime postérieures à l'entrée en vigueur de la loi du 1er juillet 2007 doivent respecter les dispositions de l'article 138bis-4.

Par ailleurs, cet amendement tend à modifier la date limite à laquelle une entreprise d'assurance doit proposer, pour tous les contrats d'assurance maladie existants non liés à l'activité professionnelle, un nouveau contrat d'assurance maladie répondant aux conditions de l'article 138bis-4 de la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre.

M. Daras souligne que les observations du Conseil de l'égalité des chances entre hommes et femmes portent surtout sur la mesure rétroactive prévue à l'article 3, § 2, alinéa 2, proposé. Elle permet en effet de justifier a posteriori toutes les augmentations de prix déjà opérées.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 8 à l'article 14 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui vise à prévoir une sanction pénale en cas d'infraction à la loi.

En ce qui concerne les sanctions, le secrétaire d'État précise qu'il n'est pas nécessaire d'instaurer un système de sanctions séparé. Ce mécanisme sera prévu dans le cadre de la loi existante de 1992, dont les articles 132 et suivants comportent déjà des sanctions.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 9 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui insère un article 14/1 visant à conférer à la direction générale Médiation et Contrôle le pouvoir de rechercher et de constater les infractions.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 10 (doc. Sénat, nº 4-1235/2), qui insère un article 14/2 instaurant une procédure d'avertissement.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 11 (doc. Sénat, nº 4-1235/2), qui insère un article 14/3 prévoyant la possibilité d'infliger des amendes administratives.

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 12 (doc. Sénat, 4-1235/2) concernant l'action en cessation (article 14/4 nouveau).

M. Van Nieuwkerke et consorts déposent l'amendement nº 13 (doc. Sénat, 4-1235/2), qui vise à prévoir une surveillance et un contrôle administratifs du respect de la loi (article 14/5 nouveau).

VII. Votes

Les amendements nos 1 et 2 sont rejetés par 12 voix contre 3.

Les amendements nos 3 et 4 sont rejetés par 9 voix contre 3 et 3 abstentions.

Les amendements nos 5 à 7 sont rejetés par 12 voix contre 3.

Les amendements nos 8 à 14 sont rejetés par 10 voix contre 3 et 2 abstentions.

L'ensemble du projet de loi a été adopté par 12 voix contre 3.


Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 9 membres présents.

Le rapporteur, Le président,
Philippe MAHOUX. Wouter BEKE.

Le texte adopté par la commission est identique à celui du projet transmis par la Chambre des représentants (voir doc. Chambre, nº 52-1662/006).

ANNEXE I (TEST-ACHATS)

Assurances hospitalisations:

Après des hausses de primes indécentes, un indice médical élaboré par et pour les assureurs.

Hausses de primes difficilement supportables ...

Les hausses de prime en assurance hospitalisation se succèdent sans discontinuer: chez Ethias (73 et 30 %, selon les polices) Argenta (du simple au triple), Axa (dans le cas signalé de 430 à 2300 euros et ce pour des personnes de 75 ans ! ! !). Lorsqu'il s'agit de personnes âgées, elles se retrouvent devant le fait accompli et elles n'ont de facto que le droit de payer (ou demander à l'assureur de passer à une formule moins favorable c'est-à-dire couverture des frais dans une chambre à 2 lits ou accepter une franchise très élevée). Certes la loi Verwilghen amènera à moyen et à long terme une (certaine ?) relative amélioration pour les souscripteurs d'une assurance groupe qui accepteront de payer une prime complémentaire pendant la durée de ce contrat.

Par ailleurs, les derniers chiffres disponibles (2007) concernant la branche montrent que le solde en pourcentage des primes est positif depuis 2 ans. En tenant compte des résultats financiers, mais hormis la « branche23 », le secteur à investi massivement en obligations (ce qui revient à dire que ces résultats ne devraient pas diminuer durablement), les actions ne représentant que 18 % des placements.

Certes ces augmentations s'expliquent en grande partie par le dérapage des factures en chambre particulière: + 9 % l'an passé. En chambre à 2 ou 4 lits les prix sont par contre assez stables (même si 10 hôpitaux concentrent 70 % de l'augmentation des coûts en chambre à 2 lits). Mais cela est loin de justifier une hausse des primes dans les proportions citées plus haut.

Cela s'explique par la volonté délibérée de certains assureurs de demander au départ un prix très bas puis de facto quand le consommateur n'est plus en âge de changer d'assureur de hausser régulièrement les primes.

Un indice par et pour les assureurs !

Certes, la création d'un (des tableaux d') indice(s) médical(aux) spécifique(s) aux assurances privées, actuellement aurait du permettre d'obtenir une évolution plus modérée et plus uniforme des primes mais:

— l'étude chargée d'aider à la constitution d'un tel index a été confiée à une société d'actuaires travaillant régulièrement (principalement) pour les entreprises d'assurances. Dans le cadre de la création d'un indice des prix, on n'aperçoit pas la compétence particulière d'une société d'actuaires qui prétend pourtant « prendre en compte toutes les dimensions du problème (contraintes économiques, mais aussi juridiques, prudentielles, institutionnelles) » mais qui reconnaît se placer du « point de vue de l'entreprise » ...;

— cette entreprise ne prône évidemment pas dans son rapport la création d'un indice type « indice des prix à la consommation » mais une méthode actuarielle destinée à jeter le brouillard et à permettre aux assureurs de s'abriter derrière un indice légal pour augmenter les primes de la manière la plus adéquate pour eux. De plus, le rapport des actuaires obligés préconise que les augmentations puissent varier selon la classe d'âge (quatre classes). C'est une consécration légale de la segmentation permettant de tailler un peu plus la laine des pauvres moutons. C'est en fait l'arbitraire le plus absolu camouflé sous des formules actuarielles savantes.

Ceci est d'autant plus vrai que les chiffres seront fournis par le secteur et donc invérifiables.

Nous ne sommes pas les seuls à le dire: le centre fédéral d'expertise des soins de santé a dans un communiqué utilisé la même expression: « les chiffres ne sont pas fiables »; le centre espère que la hausse réelle sera inférieure à celle permise par l'indice actuariel (lisez assurantiel).

Un vrai indice existe déjà ... Alors pourquoi réinventer la roue ?

Il existe pourtant dans l'indice des prix à la consommation un sous- poste (la « ligne 6 ») dont un des sous — sous postes est le coût des soins hospitaliers en chambre à 1 lit (et aussi pour les chambres à 2 lits) avec donc une méthodologie toute prête qu'il aurait suffit de compléter, par exemple, en se basant sur les données accessibles au public sur les sites des mutuelles pour pouvoir y inclure les suppléments d'honoraires et de chambres. Signalons à cet égard que Fortis AG, une des compagnies leader dans ce domaine, indexe ses primes en fonction du sous- poste de l'IPC, c'est-à-dire le coût des soins hospitaliers en chambre à une personne. De plus, l'IPC évolue nécessairement avec le temps ce qui permet de tenir compte de l'évolution de la fréquence et notamment quant au type d'opérations pratiquées.

Juridiquement contestable !

Un tel projet nous semble aussi critiquable juridiquement car les États ne peuvent prendre de mesures susceptibles de limiter les effets utiles de la concurrence. Or la création d'une telle série d'index a clairement pour conséquence que les compagnies, nonobstant leurs caractéristiques propres, utilisent la même série d'index.

Un projet sur mesure pour les assureurs ...

Enfin, le projet de loi déposé à la chambre résout le problème des assureurs c'est-à-dire pouvoir s'abriter derrière un « index légal » mais oublie sciemment de résoudre tous les problèmes créés, oubliés par la loi Verwilghen:

— une définition très favorable aux assureurs de la notion de maladies que l'assuré ne connaissait pas, si elles surviennent pendant les deux premières années du contrat;

— faire en sorte que la partie de la prime mise de côté pour les vieux jours (la réserve de vieillissement) appartienne à l'assuré;

— mettre à charge de l'assureur (et non de l'employeur) l'obligation d'informer l'assuré que le contrat groupe prend fin (principalement en cas de départ à la pension).

L'exemple le plus frappant fut celui d'une femme atteint d'un cancer du sein (toujours en traitement au moment de son départ): la personne ne se rendit pas compte qu'elle devait demander une prolongation individuelle dans le délai requis. La compagnie excipa du dépassement du délai pour refuser de couvrir les suites du traitement.

Enfin, à ceux qui seraient tentés de confier des compétences dans ce domaine à la CBFA, il faut rappeler que le rôle essentiel de cette institution est de veiller à la solvabilité financière des entreprises d'assurances. Donc, plus les primes sont augmentées, plus les personnes âgées résilient leur contrat (ou acceptent contraints et forcés de réduire leur couverture d'assurance) plus les entreprises prospèrent financièrement.

ANNEXE II

Construction d'un index médical pour les contrats privés d'assurance maladie

KCE reports vol B

Pierre Devolder, Michel Denuit, Xavier Maréchal, Benoit-Laurent Yerna, Jean-Pierre Closon, Christian Léonard, Arnaud Senn, Imgard Vinck

Centre fédéral d'expertise des soins de santé 2008

KCE reports vol.B

Titre: Construction d'un index médical pour les contrats privés d'assurance maladie

Auteurs: Pierre Devolder (Reacfin), Michel Denuit (Reacfin), Xavier Maréchal (Reacfin), Benoît-Laurent Yerna (Reacfin), Jean-Pierre Closon (KCE), Christian Léonard (KCE), Arnaud Senn (KCE), Imgard Vinck (KCE).

Experts externes: Filip Nicolaï (SPF Economie), Véronique Eeckeleers (SPF Economie), Gerhard Gieselink (CBFA), Philippe Colle (Assuralia), Floris Goyens (Assuralia), René D'Hondt (Assuralia), Karel Coudre (Fortis).

Validateurs: Henk Becquaert (CBFA), Elisabeth Vandermeulen (Ethias), Patrick Vrancken (SPF Economie)

Conflict of interest: Philippe Colle, Floris Goyens, René D'Hondt, Karel Coudré et Elisabeth Vandermeulen travaillent dans le secteur des assurances

Disclaimer: Les experts externes ont collaboré au rapport scientifique qui a ensuite été soumis aux validateurs. La validation du rapport résulte d'un consensus ou d'un vote majoritaire entre les validateurs. Le KCE reste seul responsable des erreurs ou omissions qui pourraient subsister de même que des recommandations faites aux autorités publiques.

Mise en Page: Ine Verhulst

Bruxelles, 16 décembre 2008

Étude nº 2008-58

Domaine: Health Services Research (HSR)

MeSH: Insurance, Health;

Economic Competition;

Cost Control.

LC Headings: Price Regulation;

Price Indexes

NLM classification: (1 Classification code)

Langue: français

Format: Adobe(r) PDF(tm) (A4)

Dépôt légal: D/2008/10.273/XX

La reproduction partielle de ce document est autorisée à condition que la source soit mentionnée. Ce document est disponible en téléchargement sur le site Web du Centre fédéral d'expertise des soins de santé.

Comment citer ce rapport ?

P. Devolder, M. Denuit, X. Maréchal, B.-L. Yerna, J.-P. Closon, C. Léonard, A. Senn, I. Vinck. Construction d'un index médical pour les contrats privés d'assurance maladie. Health Services Research (HSR). KCE Report XXB; Bruxelles: Centre fédéral d'expertise des soins de santé (KCE); décembre 2008

PRÉFACE

Le KCE avait été étonné en juillet 2007 de se voir confier par le législateur, avec la Commission Bancaire, Financière et des Assurances (CBFA), le soin de fixer les taux de croissance maximum des primes des contrats privés d'assurance maladie et de surveiller l'application de cette nouvelle législation.

Après avoir expliqué en Commission de la Chambre que son rôle était d'éclairer les décisions avant qu'elles ne soient prises plutôt que de participer à leur élaboration et à leur mise en œuvre, le KCE a reçu au début de l'été 2008 une nouvelle mission limitée à la méthodologie de construction d'un indice de prix spécifique à ces contrats d'assurance.

Nous nous sommes alors immédiatement mis au travail tout en nous assurant la collaboration de spécialistes dans cette matière très particulière par rapport à nos centres d'intérêt habituels. Des données en provenance du secteur des assurances étaient en outre nécessaires pour étudier la question et simuler des scénarios.

Malgré le temps très court dont nous disposions, le rapport arrive dans les délais impartis par le gouvernement. Nous souhaitons remercier Assuralia qui a rassemblé pour nous les données nécessaires en provenance des principales compagnies d'assurance et Reacfin, spin-off de l'Institut des Sciences actuarielles de l'UCL qui, en un temps record, a pu analyser ces données et construire une méthodologie adaptée au problème.

Nous espérons que ce rapport contribuera à atteindre les buts poursuivis par le législateur.

Gert Peeters Jean-Pierre Closon

Directeur général adjoint a.i. Directeur général a.i.

Executive summary

INTRODUCTION

Des contrats privés d'assurance maladie sont conclus par bon nombre de personnes ou par leurs employeurs pour couvrir des frais résultant de soins de santé et qui ne sont pas remboursés par l'assurance maladie obligatoire. On estime que plus de cinq millions de personnes sont couvertes par de tels contrats en Belgique.

À la suite d'une maladie ou d'un accident, il est fréquent que ces contrats ne soient pas renouvelés par les assureurs ou que leurs conditions contractuelles soient modifiées et en particulier leurs tarifs.

La loi du 20 juillet 2007 modifiant la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre en ce qui concerne les contrats d'assurance maladie vise à protéger les assurés en limitant notamment les possibilités de modification des conditions tarifaires des contrats d'assurance maladie aux cas de réelles augmentations du coût des prestations garanties.

Le KCE a été chargé par le législateur de mettre au point une méthodologie de construction d'un index médical qui traduirait, sur la base de paramètres objectifs, l'augmentation réelle des coûts auxquels doivent faire face les assureurs et qui pourrait donc être utilisé pour limiter l'adaptation annuelle des primes demandées.

QUESTIONS DE RECHERCHE

Il fallait d'abord s'inquiéter de savoir s'il n'existait pas déjà en Belgique ou dans un autre pays européen, un indice qui reflète les modifications de coûts visées par la nouvelle loi belge. Ou à défaut d'un tel indice, existe-t-il ailleurs des règles ou des pratiques utilisées pour contenir l'indexation des contrats d'assurance maladie ? Cette première question doit également s'intégrer dans le cadre de la réglementation européenne: comment cette nouvelle législation nationale pourrait-elle s'insérer dans un éventuel cadre législatif européen ?

La deuxième question était de définir de manière conceptuelle un indice qui devait refléter le coût d'événements aléatoires augmentant avec l'âge.

La troisième question consistait à déterminer les données nécessaires pour calculer cet indice.

Et enfin se posait la question de l'unicité de l'indice. Un seul indice pouvait il couvrir toute la variété des contrats offerts ou bien fallait il définir une liste d'indices par grande catégorie de contrat ?

MÉTHODOLOGIE

Pour répondre à la première question, des enquêtes ont été effectuées auprès d'organismes belges, français, anglais, allemands et néerlandais. En outre, le projet européen « Solvabilité II » sur le secteur des assurances, a été étudié et résumé.

Le concept d'index médical le mieux approprié au cas des contrats d'assurance privés a ensuite été défini.

Les données nécessaires ont été définies en concertation avec Assuralia et puis réunies par Assuralia auprès des entreprises actives sur le marché de l'assurance soins de santé. Elles ont été fournies au KCE de manière agrégée et anonyme.

Enfin, après avoir analysé les différents éléments intervenant dans le processus de tarification des contrats privés d'assurance maladie, des formules actuarielles ont été recherchées pour définir un processus d'ajustement des primes qui tienne compte de tous les paramètres objectifs.

RÉSULTATS

La comparaison internationale

Belgique

L'indice à construire par le KCE ne se substitue en aucune façon aux rubriques de l'indice général des prix à la consommation (IPC) qui ont trait au secteur des soins de santé. En effet, par construction ces rubriques ne tiennent compte que

— des tickets modérateurs et pas des suppléments;

— des cotisations d'assurance complémentaire des mutuelles et pas des primes payées aux compagnies d'assurances privées.

France

Il n'existe ni indice spécifique à ce secteur, ni politique nationale unifiée. Les formules d'indexation utilisées reposent souvent sur des indices extérieurs au secteur de la complémentaire santé, fixés par la puissance publique: indice de revalorisation du plafond de la Sécurité sociale, indice de revalorisation du point de retraite, ...

Allemagne

Il n'existe pas d'indice spécifique à ce secteur mais un encadrement national réglementaire, principalement défini dans une logique de défense des intérêts des assurés mais aussi de protection de la profession. Les mesures d'indexation existantes sont inspirées des techniques de l'assurance vie mais adaptées aux besoins du secteur santé. Les données et méthodologies utilisées par chaque entreprise pour indexer ses contrats, doivent faire l'objet d'une validation systématique a priori par un « administrateur indépendant ».

Royaume Uni

Il n'existe pas d'index spécifique à ce secteur. Les modalités de calcul de l'indexation dépendent avant tout de la politique librement mise en œuvre par chaque entreprise.

Pays Bas

Pas de réglementation contraignante concernant l'indexation des primes d'assurance complémentaire.

Conclusion

Il n'existe pas au niveau des différents pays étudiés de véritable index officiel spécifique aux contrats privés d'assurance maladie. Il faut cependant noter la méthode de surveillance originale mise au point en Allemagne.

Dans chacun de ces pays, il faudra en outre tenir compte des directives européennes en préparation dans le cadre du projet « Solvabilité II » qui a pour objectif de renforcer la solidité financière des compagnies d'assurance, d'améliorer leur gestion du risque et d'exiger plus de transparence vis-à-vis du public.

LES MÉTHODES POSSIBLES D'INDEXATION

Deux approches différentes ont été envisagées et les avantages et inconvénients de chacune ont été analysés.

Un indice de type Indice des Prix à la Consommation

Cela revient à choisir un panier de biens et services représentatif de ce qui est couvert par l'assurance maladie, d'associer un poids à chacun de ces éléments et de relever systématiquement l'évolution de leurs prix. Il faut sans doute en outre choisir des éléments différents selon qu'il s'agit d'une assurance couvrant les dépenses en chambre individuelle ou pas.

Indépendamment de la difficulté d'identifier les biens et services pouvant intervenir dans le calcul de l'indice des prix médicaux (et de leur allouer un poids), la mise en œuvre de cette approche pose trois grands problèmes. L'indice des prix médicaux:

— ne reflète que les changements de prix et pas du tout les changements de fréquence qui peuvent pourtant affecter lourdement les coûts;

— ne prend pas en compte les limites d'intervention et les franchises;

— est indépendant de l'âge de l'assuré. Seuls les assureurs disposant d'un portefeuille dont la pyramide d'âges est similaire à celle du marché seront en équilibre. Quant aux autres, ils seront potentiellement soumis à des pertes (ou des gains) systématiques.

Une approche actuarielle

Cette approche est basée non plus sur l'évolution du prix de certains éléments choisis comme représentatifs mais bien sur l'évolution du montant attendu des dépenses par assuré. La collecte d'informations est donc beaucoup plus simple puisqu'il s'agit de se renseigner sur l'évolution de seulement deux montants, celui du coût total des sinistres payés et de l'exposition au risque correspondante. Bien sûr, il faudra distinguer les coûts totaux moyens par âge et par type d'assurance. Ce montant correspond à ce que la compagnie d'assurance est supposée facturer comme prime de risque. A noter que l'impact automatique du coût total des sinistres payés sur l'évolution des primes pourrait induire des comportements de gestion peu attentifs de la part de certains assureurs.

Contrairement à l'approche précédente, l'approche actuarielle permet de tenir compte de l'évolution des prix, des fréquences, des plafonds, des franchises et de l'âge de l'assuré. C'est donc cette approche qui sera poursuivie ci-dessous.

UN PROBLÈME PARTICULIER DANS L'AJUSTEMENT DES PRIMES D'ASSURANCE

Il faut tout d'abord distinguer la couverture en primes de risque successives de la couverture en primes nivelées et ensuite différencier les nouvelles affaires du portefeuille de contrats déjà existant. Si l'assureur fixe chaque année la prime en fonction du risque couvert (primes de risque successives), cette prime va augmenter avec l'âge et atteindre des niveaux très élevés vers la fin de la vie. En général, les primes sont donc nivelées de sorte que les assureurs accumulent des réserves pendant les premières années du contrat où l'assuré est jeune et peu malade et utilisent ces réserves pendant les dernières années où la prime nivelée n'est pas suffisante pour couvrir toutes les dépenses assurées.

Cette technique de prime nivelée implique cependant que, si les coûts augmentent de x % à un moment donné, il faille augmenter la prime nivelée de plus de x % à partir de ce moment car il faut aussi revaloriser la réserve pour pouvoir faire face à cette augmentation dans le futur.

Cette revalorisation de la réserve sera d'autant plus lourde que le nombre d'années écoulées depuis la souscription est important.

PRÉSENTATION DES DONNÉES RÉCOLTÉES

Ces données se présentent sous forme d'une matrice de coûts annuels moyens des sinistres par assuré, par classe d'âge et par type d'assurance.

Les classes d'âge sont les suivantes:

classe 1: 0 à 17 ans; classe 2: 18 à 44 ans;

classe 3: 45 à 64 ans; classe 4: > 64 ans;

et les types de couverture:

Couverture 1: Hospitalisation, couverture illimitée, toutes chambres;

Couverture 2: Hospitalisation, couverture illimitée, chambres particulières exclues;

Couverture 3: Hospitalisation, couverture limitée, toutes chambres;

Couverture 4: Pré/post hospitalisation;

Couverture 5: Maladies graves;

Couverture 6: Le reste (c'est-à-dire ce qui n'appartient à aucune des autres couvertures).

Les données n'ont pu être obtenues qu'avec un recul de trois ans. En prenant 2005 comme année de référence (2005 = 100), les coûts moyens se présentent comme suit:

Tableau 1: Coûts moyens par assuré (2005 = 100)

2006 Dekking 1 — Couverture 1 Dekking 2 — Couverture 2 Dekking 3 — Couverture 3 Dekking 4 — Couverture 4 Dekking 5 — Couverture 5 Dekking t — Couverture t
Klasse 1 — Classe 1 104,69 124,87 138,79 121,62 156,27 124,40
Klasse 2 — Classe 2 105,86 117,81 138,69 126,64 142,16 114,44
Klasse 3 — Classe 3 103,62 121,26 135,21 138,59 145,65 120,96
Klasse 4 — Classe 4 103,35 93,84 143,79 142,17 165,14 134,46
2006 Dekking 1 — Couverture 1 Dekking 2 — Couverture 2 Dekking 3 — Couverture 3 Dekking 4 — Couverture 4 Dekking 5 — Couverture 5 Dekking t — Couverture t
Klasse 1 — Classe 1 116,58 148,08 130,06 112,88 164,07 109,47
Klasse 2 — Classe 2 112,84 116,16 125,40 122,57 133,37 105,78
Klasse 3 — Classe 3 114,88 124,15 120,90 127,29 142,59 104,54
Klasse 4 — Classe 4 108,40 116,48 132,23 123,21 149,10 112,36

L'observation de ces chiffres montre que les taux de croissance sont fort importants en 2006 qui semble une année atypique. Ces chiffres sont à prendre avec prudence. En effet, il semble que tous les assureurs n'aient pu fournir la même chose, à savoir les coûts des sinistres après application des clauses limitant leur intervention et qu'ils ne tenaient pas tous compte de la même manière des assurés présents seulement une partie de l'année.

MÉTHODOLOGIE D'ADAPTATION DE LA PRIME

Le calcul d'adaptation de la prime s'effectuerait donc individuellement, contrat par contrat. En effet, à couverture équivalente et à âge équivalent, la prime d'un assuré serait réévaluée à des taux différents en fonction de l'âge à la souscription. Pour pouvoir faire appliquer une matrice d'indices publiée au Moniteur, il faut trouver une manière d'harmoniser ces taux de croissance des primes entre souscripteurs de même âge et de même type de couverture.

Autrement dit, il faut trouver une méthode supprimant l'impact de la réserve de vieillissement. Une telle méthode n'est cependant pas possible. Dès lors, il existerait plusieurs tableaux d'indices selon la méthode de tarification (primes de risque ou primes nivelées) et selon la couverture choisie.

Un premier tableau d'indices serait applicable au cas des tarifs à la prime de risque annuelle.

Ensuite, une série de tableaux d'indices serait nécessaire pour couvrir le cas des primes nivelées; un tableau par couverture.

Concrètement, l'adaptation des primes serait réalisée en deux phases. La proposition serait de permettre aux assureurs qui le souhaitent d'effectuer un premier ajustement avant l'utilisation du nouvel indice. Celui-ci serait calculé police par police en fonction de l'âge atteint au moment de ce premier ajustement, du type de couverture et du délai écoulé depuis la souscription. À noter que ce premier ajustement peut être très significatif pour les contrats conclus depuis longtemps et qui n'ont jamais été réajustés, à moins que des hypothèses fortes de croissance des coûts futurs n'aient été utilisées au départ.

Pour les ajustements suivants, il est alors possible d'utiliser un tableau d'indexation de même structure que le tableau 1 ci-dessus, calculé à partir des données fournies par les assureurs.

CONCLUSIONS

Il est possible de construire et de mettre en œuvre de manière relativement simple un indice dont la progression plafonne l'augmentation des primes des contrats privés d'assurance maladie conformément à la loi du 20 juillet 2007 tout en tenant compte de l'obligation pour les assureurs de conclure des contrats à vie. Cependant, préalablement à la mise en œuvre de cette réforme de manière uniforme pour tous les contrats, il faut permettre aux assureurs qui le souhaitent de réaliser une opération d'ajustement des primes pour les contrats conclus antérieurement.

Cette opération pourrait conduire à un alourdissement significatif des primes pour certains assurés.

Par ailleurs, il convient de porter attention aux points suivants:

RÉCOLTE DES DONNÉES

Le contenu des données à fournir par les assureurs pour construire l'indice doit être clairement précisé. Les données reçues pour réaliser le présent exercice ne semblent pas très fiables, notamment peut être parce que les différents assureurs n'ont pas tous appliqué les mêmes règles de sélection des données. Il faut garantir que les chiffres de dépenses fournis correspondent bien aux sommes payées aux assurés, donc part mutuelle, franchises et limites déduites.

Il faut de plus s'assurer que le dénominateur permettant de calculer le coût moyen des soins de santé par assuré sur une période unitaire corresponde bien à l'exposition au risque qui peut être approximée par le nombre d'assurés au milieu de l'année.

Il faut également vérifier avec le secteur que les classes d'âge et les catégories de couvertures choisies pour former la matrice d'indices sont bien représentatives.

AJUSTEMENT PRÉALABLE

Il faut donner des consignes précises et uniformes pour l'ajustement préalable et notamment au niveau des bases techniques de fixation des primes (taux d'actualisation, tables de mortalité, taux de chute, ...). S'il s'avère qu'il n'est pas possible que tous les assureurs utilisent les mêmes bases techniques, il faudrait au moins, comme en Allemagne, faire vérifier par un tiers indépendant (par exemple la CBFA) que les bases techniques utilisées sont acceptables.

Un délai raisonnable doit être laissé pour procéder à cet ajustement.

MISE EN ŒUVRE PRATIQUE DE LA MÉTHODE ACTUARIELLE

Il convient que les assureurs envoient les données demandées au service compétent du SPF Economie à intervalle régulier d'un an (vers le milieu de l'année). Celui-ci peut alors publier la matrice d'indices dans le courant de l'automne et les compagnies d'assurance pourront alors adapter leur prime à la première échéance de contrat qui suivra la publication au Moniteur. Une question reste toutefois en suspens: Qui devra effectuer les calculs propres à l'indexation ? Les compagnies d'assurances ou un organisme indépendant tel que la CBFA ?

Deux voies sont envisageables:

— Méthodologie « assureur »: publier uniquement la matrice d'évolution des coûts moyens du marché. Cela impliquerait alors que les assureurs eux-mêmes (re)calculeraient le taux d'augmentation des primes à appliquer à chaque police sur base de leur propre méthode de tarification et leurs propres bases techniques.

— Méthodologie « marché »: publier plusieurs matrices de taux d'augmentation des primes. Cela impliquerait de s'accorder d'une part sur des bases techniques uniformes pour tout le marché et, d'autre part, sur une (ou plusieurs) méthodes de tarification.

Quoi qu'il en soit, le(s) tableau(x) d'indexation publié(s) au Moniteur correspond(ent) à l'augmentation du coût des sinistres à indemniser. Or dans les primes payées par les assurés, il y a aussi le chargement des assureurs (frais d'administration, de courtage et marge bénéficiaire). Il serait logique de limiter l'augmentation du chargement à celle de l'indice général des prix à la consommation.

Aspects concurrentiels

Le système favorise clairement les gros assureurs qui auront une influence prépondérante sur l'indice.

L'adaptation fournie par la méthodologie présentée dans cette étude est une adaptation maximale. Les acteurs du marché qui ont une évolution plus favorable de leurs primes de risque pourront donc répercuter une augmentation plus faible sur les primes réclamées à leurs assurés. Par contre, les acteurs présentant une évolution moins favorable de leurs primes de risque que le marché, devront néanmoins se soumettre à cette augmentation maximale. Cela pourrait les amener à améliorer leur efficience opérationnelle ce qui devrait avoir un effet positif à terme sur les augmentations futures qui seront répercutées sur les assurés.

RECOMMANDATIONS

Données à fournir

— Le montant des sinistres payés par les assureurs (déduction faite des franchises et plafonds) ainsi que l'exposition au risque devraient être clairement définis après concertation avec les différentes parties prenantes à ce projet.

— Il faut également clairement définir les classes d'âges et les types de couverture.

— Une fois tous ces éléments clairement éclaircis, un audit externe des données par la CBFA permettrait d'éviter non seulement tout conflit d'intérêt mais également d'assurer une certaine fiabilité des données.

— Il convient de disposer d'un historique suffisamment long sur l'évolution passée du coût des indemnisations. Les seules trois années 2005, 2006, 2007 ne permettent pas de déduire des taux de croissance passés significatifs.

— Il convient de réduire au maximum le délai pour fournir les données souhaitées et peut-être d'augmenter la fréquence de publication, afin de pouvoir répercuter au plus tôt l'augmentation réelle du coût des soins de santé.

MISE EN ŒUVRE PRATIQUE DE LA MÉTHODE ACTUARIELLE

Deux méthodes sont envisagées dans le rapport qui présentent chacune des avantages et des inconvénients.

— La méthode dite « assureur » semble privilégiée par le secteur et est pratiquée en Allemagne sans qu'aucune critique n'ait été relevée par le KCE. Elle présente l'inconvénient que les assurés seraient soumis à des indexations différentes selon les compagnies d'assurance, ce qui ne semble pas correspondre à l'esprit de la loi belge. Il faudra aussi veiller à ce qu'aucune hypothèse de croissance future des coûts ne rentre dans le calcul de la prime nivelée, sous peine de faire subir aux assurés une double indexation.

— La méthode dite « marché » garantit la même augmentation maximale de prime pour tous les assurés ayant les mêmes caractéristiques mais exige que des bases techniques communes à tous les assureurs soient définies. De plus, elle suppose la publication d'un plus grand nombre de tableaux.

CHARGEMENTS DIVERS

— Il faut prévoir une augmentation différenciée pour les chargements et pour les primes pures. En effet, ces chargements ne sont pas tous directement liés à l'évolution du coût de soins de santé mais dépendent plutôt d'indices plus généraux tel que l'Indice Santé.

ASPECTS CONCURRENTIELS

— On peut se demander si la publication d'un indice va conduire à mieux freiner l'augmentation des primes que ne l'aurait fait le jeu de la concurrence. Ce dernier va d'ailleurs vraisemblablement maintenir l'augmentation en deçà de l'indice pour les compagnies les plus efficientes.

— Avant de mettre en œuvre le nouveau système, il faudrait évaluer son influence sur les petits acteurs confrontés à un système où les assureurs disposant de parts de marché importantes ont une influence prépondérante sur l'indice.

ANNEXE IIIA

Assurance hospitalisation: le projet de loi entérine une discrimination sur l'âge et le genre

Le Conseil de l'Egalité des Chances entre Hommes et Femmes, avec le soutien du CRIOC, dénonce le projet de loi dit de « réparation », adopté à la Chambre le 19 mars 2009 et censé remédier aux problèmes posés par la loi Verwilghen du 20 juillet 2007 en matière d'assurance hospitalisation. Le texte n'apporte pas de solution satisfaisante en ce qui concerne les augmentations de primes pratiquées par les assureurs privés. Des pratiques qui pénalisent trop souvent les personnes âgées et les femmes.

Le texte prévoit que les assureurs privés peuvent augmenter leurs primes d'hospitalisation à leur convenance jusqu'au 1er juillet 2009. À cette date, l'indice médical qui servira de base aux augmentations de prime rentre en application. Mais d'ici là, le projet de loi permet à l'assureur de modifier un contrat en cours comme bon lui semble et ne pose donc aucune limite aux hausses de primes éventuelles. À titre d'exemple, en quelques mois, des primes d'assurance hospitalisation ont été au cours des derniers mois multipliées par 3 chez Argenta, ont augmenté jusqu'à 73 % chez Ethias et chez Axa, des pensionnés ont vu leur prime multipliée par 5.

Le Conseil souligne que depuis le 10 juin 2007, la loi « genre » du 10 mai 2007 n'autorise aucune discrimination sexuelle. Par conséquent, la période transitoire de deux ans (jusqu'au 1er juillet 2009) prévue par l'article 11 du projet 1662 (nouvel article 3 de la loi du 20 juillet 2007) ne peut pas servir à valider des discriminations sexuelles qui auraient été maintenues contrairement à la loi du 10 mai 2007.

L'augmentation incontrôlée des primes d'assurance hospitalisation entérine une grave discrimination portant à la fois sur l'âge et le genre. En effet, au moment de la pension, les primes augmentent fortement, souvent suite à l'arrêt des assurances souscrites par les entreprises, d'une part, et, d'autre part, comme les femmes reçoivent une pension plus faible que les hommes, elles sont proportionnellement plus discriminées. Le risque est grand, pour de nombreuses femmes de devoir supprimer une assurance devenue impayable alors qu'elles y avaient cotisé pendant toute leur carrière professionnelle.

Coût de l'assurance hospitalisation pour un travailleur salarié Homme Femme
Salaire mensuel moyen 2 846 euros 2 491 euros
Prime d'assurance hospitalisation (contrat entreprise) 15 euros 15 euros
Part du revenu 0,5 % 0,6 %
Prime d'assurance hospitalisation (contrat individuel) 40 euros 40 euros
Part du revenu 1,4 % 1,6 %
Source: Salaires mensuels bruts moyens, direction générale Statistique et Information économique -Enquête sur la structure et la répartition des salaires, CRIOC.

Coût de l'assurance hospitalisation pour un pensionné Homme Femme
Pension mensuelle moyenne (Tous régimes confondus.) 1 148,34 euros 864,14 euros
Prime d'assurance hospitalisation (contrat entreprise) 47 euros 47 euros
Part du revenu 4,1 % 5,4 %
Prime d'assurance hospitalisation (contrat individuel) 57 euros 57 euros
Part du revenu 5,0 % 6,6 %
Source: Statistique annuelle des bénéficiaires des pensions, Office national des pensions (2007), CRIOC.

Par ailleurs, le projet de loi a été adopté alors que les modalités du calcul de l'indice médical ne sont pas encore fixées. Cet indice, à l'instar de l'indice des prix à la consommation, a pour objectif d'encadrer de façon stricte les augmentations des primes en matière d'assurance hospitalisation. La loi Verwilghen du 20 juillet 2007 prévoit sa création.

Afin de centrer le débat autour du principe de solidarité cher à notre système de santé, le Conseil de l'Égalité des chances entre hommes et femmes plaide en faveur d'une mutualisation des risques et demandent au monde politique d'apporter des réponses équitables pour l'ensemble des citoyens.

Contact au Conseil:

Présidente: Karin Jiroflée

Service presse: Veerle Boodts, 02 233 41 76

E-mail: [email protected]

Internet: www.conseildelegalite.be

Conseil de l'Égalité des chances entre hommes et femmes, Rue Ernest Blérot 1-1070 Bruxelles

Contact au CRIOC:

Direction générale: Marc Vandercammen, 02/547.06.51

Service presse: Mélanie Dutat, 02/547.06.04

Internet: www.crioc.be

E-mail: [email protected]

CRIOC, Boulevard Paepsem 20 - 1070 Bruxelles

ANNEXE IIIB

Madame, Monsieur

Le Conseil de l'Egalité des Chances entre Hommes et Femmes, avec le soutien du CRIOC, tient à attirer votre attention sur les discriminations que subissent actuellement de nombreux citoyens en matière d'assurance hospitalisation.

Une discrimination d'âge tout d'abord. Beaucoup de personnes arrivées à la pension ont vu leur prime d'assurance hospitalisation s'envoler de manière vertigineuse. Ils ont dû y renoncer et se priver d'une assurance de première nécessité devenue inaccessible. À titre d'exemple, au cours des derniers mois, des primes d'assurance hospitalisation ont été multipliées par 3 chez Argenta, ont augmenté jusqu'à 73 % chez Ethias et des pensionnés ont vu leur prime multipliée par 5 chez Axa.

Une discrimination de genre ensuite. Les femmes reçoivent une pension plus faible que les hommes, et sont de fait proportionnellement plus discriminées. Le risque est grand, pour de nombreuses femmes de devoir supprimer une assurance devenue impayable alors qu'elles y avaient cotisé pendant toute leur carrière professionnelle.

Les femmes sont donc doublement discriminées en la matière.

Coût de l'assurance hospitalisation pour un travailleur salarié Homme Femme
Salaire mensuel moyen 2 846 euros 2 491 euros
Prime d'assurance hospitalisation (contrat entreprise) 15 euros 15 euros
Part du revenu 0,5 % 0,6 %
Prime d'assurance hospitalisation (contrat individuel) 40 euros 40 euros
Part du revenu 1,4 % 1,6 %
Source: Salaires mensuels bruts moyens, direction générale Statistique et Information économique -Enquête sur la structure et la répartition des salaires, CRIOC.

Coût de l'assurance hospitalisation pour un pensionné Homme Femme
Pension mensuelle moyenne (Tous régimes confondus.) 1 148,34 euros 864,14 euros
Prime d'assurance hospitalisation (contrat entreprise) 47 euros 47 euros
Part du revenu 4,1 % 5,4 %
Prime d'assurance hospitalisation (contrat individuel) 57 euros 57 euros
Part du revenu 5,0 % 6,6 %
Source: Statistique annuelle des bénéficiaires des pensions, Office national des pensions (2007), CRIOC.

La loi Verwilghen

Les assurances hospitalisation sont dans l'œil du cyclone depuis un certain temps déjà.

La loi du 20 juillet 2007, dite loi Verwilghen, avait pour but de répondre au malaise présent dans ce secteur en modifiant, en ce qui concerne les contrats privés d'assurance maladie, la loi du 25 juin 1992 sur le contrat d'assurance terrestre.

Cette loi prévoit entre autres, la continuation individuelle des assurances groupes, le plus souvent conclues dans le cadre du travail, un droit aux personnes handicapées ou atteintes d'une maladie chronique de bénéficier d'une assurance hospitalisation, et la création d'un indice médical, à l'instar de l'indice des prix à la consommation, devant permettre d'encadrer de manière beaucoup plus stricte les augmentations de prime.

Si cette loi a permis de faire un grand pas en avant, elle n'a cependant pas, loin de là, répondu à ces personnes vulnérables pris en otage par leur assureur.

C'est pourquoi, un projet de loi, dit projet de loi « réparation », a tenté d'apporter des solutions.

Projet de loi « réparation »

Ce projet de loi, adopté à la Chambre le 19 mars, est cependant inacceptable.

D'une part, il laisse en suspens de nombreuses questions capitales et, d'autre part, il n'apporte aucune solution à la détresse sociale de personnes pensionnées ne pouvant plus assumer leurs primes d'assurances.

Ce projet de loi est donc très loin de remplir ses objectifs.

En effet, le texte prévoit que les assureurs ont encore jusqu'au 1er juillet 2009 pour augmenter leurs primes comme bon leur semble. L'indice médical sur lequel doivent se baser ces augmentations, comme prévu dans la loi Verwilghen, n'étant d'application qu'à partir de cette date. On offre donc la pleine liberté aux assureurs d'agir selon leurs seuls intérêts jusque là, au lieu de limiter l'hémorragie.

Le Conseil souligne que depuis le 10 juin 2007, la loi « genre » du 10 mai 2007 n'autorise aucune discrimination sexuelle. Par conséquent, la période transitoire de deux ans (jusqu'au 1er juillet 2009) prévue par l'article 11 du projet 1662 (nouvel article 3 de la loi du 20 juillet 2007) ne peut pas servir à valider des discriminations sexuelles qui auraient été maintenues contrairement à la loi du 10 mai 2007.

Ce projet de loi a été adopté alors même que rien n'a encore été fixé sur la méthode de calcul de l'indice médical et sur son contrôle. Cette loi a entériné la possibilité offerte aux assureurs de modifier le contrat en cours de route sans se pencher plus en avant sur les modalités et le contrôle de ces augmentations.

Il prévoit également le renversement de la charge de la preuve opéré en faveur des assureurs. Désormais, il appartient à l'assuré de démontrer qu'il n'y avait aucune manifestation de sa maladie au moment de la souscription du contrat. Preuve impossible à apporter.

En outre, les coûts liés à la maladie ou au handicap restent exclus de manière générale alors que l'exclusion ne devrait concerner que les coûts directement liés à ceux-ci, si l'objectif était de favoriser l'accès à l'assurance pour ces personnes vulnérables.

Discrimination vs Solidarité

Nous sommes actuellement en présence de réelles discriminations.

Les assureurs se basent sur l'âge et le genre des personnes pour fixer des primes totalement prohibitives et inacceptables. La discrimination est illégale et elle doit l'être partout.

Le législateur, censé apporter une réponse à cette problématique, adopte en toute connaissance de cause un projet de loi, qui ne fait qu'entériner un peu plus ces pratiques discriminatoires, aboutissant à l'exclusion des pensionnés, et surtout des femmes pensionnées d'une couverture essentielle pour eux.

Ne faudrait-il pas se pencher avant tout sur un contrôle accru des coûts hospitaliers, où des abus sont constatés quand une personne se déclare être assurée.

Ou encore sur la nomenclature actuelle, sur le financement des hôpitaux, sur l'information des patients, ...

Le Conseil de l'Égalité des chances entre hommes et femmes plaide en faveur d'une mutualisation des risques, pour faire en sorte de redonner à la solidarité la place qui devrait être la sienne dans ce débat. Chacun d'entre nous sera hospitalisé un jour et il serait donc logique que nous soyons égaux face à ce risque. Il n'y a pas de place pour la discrimination quand on aborde la santé des citoyens.

Nous sommes persuadés que toutes ces questions méritent d'être traitées avec attention pour aborder la problématique de manière complète. C'est pourquoi, nous demandons des réponses efficaces et équitables pour l'ensemble des citoyens.

La Belgique est réputée pour donner une accessibilité maximale aux soins de santé. Cette réputation, nous devons en être fiers et nous devons la défendre à tout prix contre toute remise en cause.

La Solidarité doit être le mot d'ordre dans cette réflexion, surtout dans cette période d'austérité économique que nous connaissons.

Le Conseil de l'Égalité des chances entre hommes et femmes demande donc aux sénateurs et sénatrices de ne pas accepter ce projet de loi en l'état et d'y apporter les changements nécessaires pour un meilleur respect du principe fondamental d'égalité cher à notre État de Droit.

Karin Jiroflée

Présidente du Conseil de l'Égalité des chances entre hommes et femmes