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M. le président. - M. Karel De Gucht, ministre des Affaires étrangères, répondra.
M. Alain Destexhe (MR). - La manifestation pour Gaza a été marquée par des incidents graves, notamment en matière de sécurité et de dégradation de biens. Des slogans y ont également été prononcés.
Dans la soirée, juste après la manifestation, je me suis personnellement rendu sur les lieux pour constater les dégâts dont l'ampleur, selon moi, n'avait pas été très bien décrite par les médias. Sur place, plus de 400 mètres de vitrines avaient été détruites ou abîmées le long du boulevard Albert II, du World Trade Center jusqu'au ministère de la Communauté flamande. Je ne vois pas comment un petit groupe isolé de manifestants aurait pu s'attaquer systématiquement à toutes les vitrines sur une telle distance. Pour moi, il s'agissait forcément, non pas de quelques manifestants, mais de dizaines de manifestants ayant un certain niveau d'organisation, car je ne vois pas comment de tels dégâts auraient pu être occasionnés de façon spontanée.
Par ailleurs, un certain nombre de slogans ont été scandés au cours de cette manifestation.
Mme Sfia Bouarfa (PS). - Dans quelle langue ?
M. Alain Destexhe (MR). - En arabe et en français.
Mme Sfia Bouarfa (PS). - Je m'y trouvais et je n'ai rien entendu.
M. Alain Destexhe (MR). - Certains disaient « Mort aux Juifs » et d'aucuns brandissaient des pancartes assimilant étoile de David et croix gammée. On entendait également « Hamas, Hezbollah, Djihad ».
J'invite également l'assemblée à lire la carte blanche publiée dans le journal Le Soir d'aujourd'hui par des militants de gauche bien connus, à savoir Claude Demelenne, Manuel Abramowicz et Sam Touzani, dont je vous livre un extrait : « La gauche, les partis démocratiques dans leur ensemble, ne peuvent plus se laisser piéger dans ces manifestations noyautées par des religieux réactionnaires et rejetant les principes élémentaires de la démocratie, du vivre ensemble. »
M. Philippe Mahoux (PS). - Je voudrais savoir comment on peut noyauter une manifestation de 60 000 personnes ! Mais sans doute excellez-vous dans cet art, monsieur Destexhe !
M. Alain Destexhe (MR). - Je vous renvoie aux principes de la guerre révolutionnaire où des noyaux de militants communistes savaient parfaitement comment noyauter de très grands rassemblements de gauche. Je ne dois pas vous parler de Prague 1948.
En l'occurrence, ce n'est pas de moi qu'il s'agit mais de la carte blanche publiée dans Le Soir, qui dit également : « Nous nous adressons à la gauche, notre famille politique : camarades, cessez de fermer les yeux face à la montée en puissance d'un cléricalisme musulman intolérant, impérialiste et antiprogressiste ! ».
M. Philippe Mahoux (PS). - Occupez-vous plutôt de votre camp où vous semblez connaître quelques difficultés ! Laissez-nous le soin de discuter avec les nôtres !
M. Alain Destexhe (MR). - Nous ne sommes plus dans le débat sur Gaza. Je dis simplement que certains slogans scandés lors de cette manifestation sont inacceptables. Libre à vous de penser qu'il s'agit d'un incident anodin.
M. Josy Dubié (Ecolo). - Je n'ai pas la moindre sympathie pour le Hamas ou pour le Hezbollah. Cependant, quand des gens, quels qu'ils soient, s'indignent de faits intolérables, il ne m'appartient pas de décider s'ils ont le droit de le faire ou pas ! Ils s'indignent et moi aussi ! Je ne partage pas leurs idées, mais bien leur indignation.
M. Alain Destexhe (MR). - Vous pourriez vous interroger sur la nécessité de manifester à leurs côtés. Vous auriez été le premier à crier au scandale si certains membres de cette assemblée avaient participé à une manifestation où une étoile de David aurait été assimilée à un symbole nazi. Or c'est ce qui s'est passé dimanche.
J'en arrive à mes questions. Le ministre estime-t-il que ces slogans et débordements sont acceptables ? Combien de personnes ont-elles été arrêtées ? Selon mes informations, l'immense majorité des fauteurs de troubles a été relâchée le jour même. S'agissait-il de personnes issues de Bruxelles et des quartiers avoisinants ou de personnes venues de l'extérieur ? Les riverains qui ont subi des dégâts seront-ils indemnisés ? Les auteurs des faits ou les organisateurs de la manifestation, qui sont clairement identifiés, seront-ils contraints de rembourser ?
M. Karel De Gucht, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères. - Je vous lis la réponse du ministre de l'Intérieur.
Selon les premières informations, aucun récidiviste ne figurait parmi les personnes appréhendées à la suite des actes violents commis après la manifestation du 11 janvier.
Les forces de l'ordre ont arrêté 143 personnes parmi lesquelles se trouvaient 96 habitants de la région de Bruxelles-Capitale, 9 ressortissants étrangers et 39 mineurs d'âge.
Conformément à la législation en vigueur, toutes les personnes ayant fait l'objet d'une arrestation administrative ont été libérées dans les douze heures. Trois des quatre personnes ayant fait l'objet d'une arrestation judiciaire ont été mises à la disposition du parquet. Aucun mandat d'arrêt n'a été délivré.
Les images prises par les caméras de la police sont en train d'être visionnées afin que l'on puisse identifier les auteurs et entamer des poursuites. Les dégâts seront imputés aux casseurs.
M. Alain Destexhe (MR). - Nous verrons ce que donneront les images mais, franchement, quatre personnes arrêtées judiciairement par rapport à l'ampleur des dégradations, c'est vraiment peu. Je crois que les forces de l'ordre devraient revoir leur stratégie lors de ces manifestions, même si je me rends bien compte de la difficulté de leur tâche.