3-1843/3

3-1843/3

Sénat de Belgique

SESSION DE 2006-2007

29 NOVEMBRE 2006


Proposition de résolution relative aux alternatives scientifiques à l'expérimentation animale dans le domaine de la recherche biomédicale


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES PAR

MME DE ROECK


I. INTRODUCTION

La proposition de résolution relative aux alternatives scientifiques à l'expérimentation animale dans le domaine de la recherche biomédicale a été introduite le 26 septembre 2006. La commission des Affaires sociales a discuté cette proposition au cours de ses réunions des 8 et 29 novembre 2006.

II. EXPOSÉ INTRODUCTIF DE M. PHILIPPE MAHOUX

M. Mahoux explique que sa proposition tente de faire prendre en compte les alternatives à l'expérimentation animale qui peuvent exister en fonction des progrès scientifiques. L'expérimentation animale évalue soit la toxicité en général (industrielle, atmosphérique ...), soit l'innocuité des produits cosmétiques, soit celle des médicaments. Jusqu'à présent, on justifie l'expérimentation animale par la recherche de la méthode la plus performante possible, même si celle-ci fait l'objet de réserves. Il est évident que si une autre forme d'expérimentation est possible par rapport à l'expérimentation animale, cette autre forme doit être privilégiée.

Au cours des dernières années, les avancées scientifiques ont été telles qu'elles permettent de prévoir des alternatives. Non seulement, elles permettraient d'éviter l'expérimentation animale mais en plus, elles seraient peut-être plus performantes en termes de qualité des résultats. Il s'agirait d'une part des techniques ADN et, d'autre part, de l'expérimentation sur cellules.

La proposition de résolution vise à lancer le débat au Sénat et à demander au gouvernement de faire réaliser une étude scientifique de fiabilité et une étude de faisabilité pour la création d'un centre de toxicogénomique. Pour alimenter le débat, l'auteur propose d'entendre quelques personnes spécialistes de la matière.

III. DISCUSSION

M. Vankrunkelsven se demande s'il est justifié d'organiser des auditions préalablement à l'adoption d'une résolution. Soit le Parlement entame un travail législatif sur base de la résolution, soit il invite le gouvernement, par la résolution, à recueillir les informations nécessaires pour aller plus loin. Pour le reste, il soutient la proposition de résolution sans réserve.

Le ministre des Affaires sociales et de la Santé publique se réjouit de cette proposition qui met à l'agenda un thème extrêmement important. Il signale que l'adoption du programme REACH au niveau européen aura certainement un impact sur le nombre d'animaux pouvant être utilisés dans la recherche.

Depuis 2005, tout test de produit cosmétique sur animaux est interdit en Belgique. On applique le plus souvent le principe des 3R (Raffinement, Remplacement et Réduction du nombre d'animaux) en utilisant une grille d'évaluation appelée matrice éthique. Le développement et surtout la validation des méthodes alternatives au niveau européen demande énormément de temps. Dès qu'une méthode est validée, elle est rendue obligatoire en Belgique.

M. Mahoux propose d'une part d'adopter la proposition de résolution demandant au gouvernement d'entreprendre déjà des démarches, en collaboration avec le Parlement, et, d'autre part, d'organiser des auditions au Parlement afin de mieux s'informer sur le dossier.

Mme Durant se dit tout à fait d'accord avec cette méthode de travail. Elle suggère toutefois d'ajouter un point à la résolution pour demander au gouvernement de porter la même demande au niveau européen afin que chaque pays fasse réaliser de telles études, ce qui devrait permettre de multiplier le nombre de centres afin de répondre aux exigences qui seront posées par la directive REACH. La membre dépose l'amendement nº 1 à cet effet (Doc. Sénat, nº 3-1843/2).

Le ministre des Affaires sociales et de la Santé publique signale que la toxicogénomique est inscrite dans la liste des méthodes alternatives prévues dans le cadre de la directive REACH. De plus, au Centre européen pour la validation de méthodes alternatives (ECVAM), une task force traite exclusivement de la toxicogénomique qui semble très prometteuse. La présente proposition de résolution s'inscrit donc parfaitement dans le contexte européen actuel.

IV. VOTES

L'amendement nº 1 est adopté par 11 voix et 1 abstention.

L'ensemble de la proposition de résolution amendée a été adopté par 11 voix et 1 abstention.


Confiance a été faite à la rapporteuse pour la rédaction du présent rapport.

La rapporteuse, La présidente,
Jacinta DE ROECK. Annemie VAN de CASTEELE.

ANNEXE 1

Mercredi 28 février 2007

Audition de:

— M. Georges Potelle, président de l'Association nationale des sociétés de protection animale (A.N.S.P.A.);

— M. Claude Reiss, président d'Antidote Europe;

— M. Erwin Annys, Sr. advisor Product and Innovation Policy, Fedichem;

— Mme Kirsty Reid, Policy Officer for Research Animals, Eurogroup for Animals — GAIA.

M. Georges Potelle. — Je suis président de l'Association nationale des sociétés de protection animale, qui regroupe trente sociétés. Je suis aussi vice-président de Veeweyde, qui est probablement la plus importante société protectrice des animaux du pays. Enfin, pendant douze ans, j'ai présidé une association combattant la vivisection et, par la suite, l'expérimentation.

Je ne suis pas toxicologue mais, au fil des années, nous avons participé à de nombreux groupes de travail et à de multiples symposiums. Nous côtoyons beaucoup de scientifiques et nous ne sommes plus tout à fait des profanes. Je tiens à préciser — c'est important — que les protecteurs des animaux sont d'abord concernés par l'humain et, ensuite, par l'animal.

Je voudrais rendre hommage à M. Mahoux, qui a fourni un travail remarquable. Les membres de la commission ne s'y sont d'ailleurs pas trompés puisqu'ils ont voté quasiment à l'unanimité en faveur de son texte. Depuis lors, sa proposition de résolution a été entérinée.

Je ne vais pas me lancer dans une fastidieuse nomenclature de dates et de numéros de directives européennes ou d'arrêtés royaux belges. Il me semble préférable de vous faire part du point de vue des protecteurs des animaux. J'aimerais que vous gardiez à l'esprit qu'en raison de nos activités, nous sommes très proches du public. Nous entendons et percevons beaucoup de choses qui échappent peut-être à un certain nombre de gens. Je crois vraiment que l'opinion du public est un élément majeur. Vox populi, vox dei.

Je procéderai à un petit survol de la mentalité des gens. Pendant longtemps, il a été difficile de leur faire comprendre que l'homme n'est pas l'animal et vice versa. Se livrer à des expérimentations sur l'animal en espérant pouvoir transposer à l'homme n'est pas une bonne idée. Très souvent, cela s'est mal terminé. Je fréquente depuis longtemps le professeur Roberfroid, toxicologue et professeur d'université, qui a formé pendant des années des pharmaciens à l'UCL. Il dit souvent: « L'homme est un très mauvais modèle pour le rat et vice versa ». En ce qui me concerne, je vais vous décrire ce qui est resté dans la mémoire collective.

Bien entendu, il y a eu bien des développements — par exemple, la fécondation in vitro — depuis les découvertes dont je vais vous parler, mais sans retracer tout l'historique, je voudrais évoquer la découverte de la pénicilline. Le public a parfaitement compris que nous devons cette découverte à deux hasards. Premier hasard: Fleming ignorait complètement ce qui allait lui arriver lorsqu'il a trouvé dans ses coupelles une culture qui avait évolué. Second hasard: l'animalerie dans laquelle il s'est rendu pour se procurer un cobaye n'en avait pas et il a pris un chien à la place. Heureusement pour nous, cela a très bien fonctionné sur le chien. Il est très heureux — d'aucuns le rappellent encore maintenant — qu'il n'y ait pas eu de cobaye, car tout le monde sait que si l'on inocule de la pénicilline à un cobaye, il meurt.

Mais le public qui avait des doutes quant à la valeur de l'expérimentation animale en a conclu alors que l'on ne pouvait pas utiliser n'importe quel animal, en d'autres termes, qu'il y avait en quelque sorte de « bons » et de « mauvais » animaux, ce qui n'est évidemment pas le cas. En effet, il avait constaté qu'après la découverte de Fleming, le chien avait remplacé le cobaye.

Vous connaissez tous le professeur Barnard, ce chirurgien sud-africain qui a réussi la première transplantation cardiaque. On peut lire dans ses mémoires que 500 chiens sont morts en cours d'expérimentation. Ensuite, on n'a plus voulu du chien dans les laboratoires. Il faut reconnaître qu'en plus de ses autres qualités, M. Barnard était têtu: là où vous et moi, nous aurions abandonné après le cinquantième chien, il est allé jusqu'au cinq centième ... Sang et oxygène ne font pas bon ménage chez le chien. C'est une vérité élémentaire, mais il a fallu sacrifier cinq cent chiens pour s'en apercevoir.

N'êtes-vous pas, messieurs, fiers et un peu émus des efforts accomplis par nos délicieuses compagnes pour être encore plus jolies et plus attractives en se maquillant ? Mais si, bien sûr. Mais si elles utilisent du fond de teint et que le lendemain, elles sont couvertes de boutons ? Enfer et damnation ! Quand elles appliquent du rimmel sur leurs cils, il est bien sûr important que le produit ou les constituants de ce produit ne soient ni toxiques ni corrosifs. Nous avons connu le test de Draize, remplacé depuis lors par sept ou huit autres méthodes. Le public garde en mémoire toutes ces petites boîtes contenant des lapins maintenus à l'étroit pour les empêcher de se frotter les yeux avec leurs pattes. Et le public se souvient de ce qu'on lui a dit: les chiens et les chats sont des bavards, mais le lapin est un taiseux, sauf dans ces salles-là, où ils poussent des cris tellement aigus que certains laborantins doivent sortir. Mesdames, sans parler de ce qui a été découvert depuis lors, vous êtes-vous senties rassurées à l'époque du test de Draize, qui, soit dit en passant, a été appliqué pendant des années ?

Même si je devais vous rappeler que le lapin n'a pas de canal lacrymal, contrairement à l'homme ?

Résumons-nous: pas le cobaye, plus le chien, quant au lapin, ça devient douteux ...

Un nouveau produit introduit sur le marché doit disposer d'un numéro d'agréation dont l'obtention est soumise à des tests repris au Moniteur belge. Durant 75 ans, on a utilisé un test appelé la DL50, dose létale 50 — la plupart d'entre vous s'en souviendront. Cela consiste à administrer, à des animaux, des doses croissantes du produit jusqu'à ce que 50 % d'entre eux soient morts. Certains penseront, à tort, que la DL50 tue donc 50 animaux sur 100. En effet, 50 % des animaux meurent à une certaine dose, mais les autres sont agonisants et mourants et doivent être tués. Alors, où se trouve l'homme dans ce processus ? Meurt-il à 50 % ? S'il est plus résistant, se trouvera-t-il parmi les mourants ?

C'est en se basant sur de telles observations que l'on a mis sur le marché, apparemment avec bonne conscience, des choses aussi graves que des médicaments.

Je sais que l'on parle aujourd'hui de produits chimiques dont on se sert couramment, publicité non payée, prenons l'exemple du Vim.

Si vous souffrez, vous allez chez le médecin. C'est un être tout à fait quelconque, au départ — je ne parle pas de M. Mahoux, évidemment. C'est quelqu'un qui va faire des études longues et ardues. Un beau jour, il sort de l'université avec son parchemin à la main. Mais vous savez comme moi que la médecine n'est pas une science mais un art, vous avez donc affaire à un artiste. Mettez-lui donc un pinceau en main. Est-ce un Vermeer, un Velasquez ou un peintre en bâtiment ? Des connaissances vous auront conseillé d'aller voir ce médecin-là, pour la sûreté de son diagnostic. Qu'en est-il alors des autres médecins sortis de la même faculté ? Leurs diagnostics seraient-ils moins sûrs ? Le premier a sans doute un feeling que d'autres n'ont pas. Il a donc cette capacité de synthèse entre ce qu'il a étudié, ce qu'on lui a appris, ce qu'il a vu et parvient à vous dire: « vous êtes atteint de cela ». Il faut saluer cette prouesse car quels sont ses moyens ? Avant, il vous tapait sur la poitrine, vous écoutait, prenait votre pouls, vous faisait dire 33 et des choses de cet ordre.

Aujourd'hui, la médecine s'est modernisée. Il faut que la recherche en fasse autant. Le médecin actuel est toujours le même mais il a désormais deux copains: un photographe et un laborantin. Quand vous allez le voir, il vous envoie chez le photographe prendre quelques clichés, passer aux rayons x ou à la résonance magnétique. Quand vous revenez avec vos clichés, vous assistez à un miracle dont je m'étonne qu'on n'en parle pas à Lourdes. Votre médecin qui était totalement aveugle se met soudain à voir.

Par ailleurs, il vous a envoyé chez un laborantin qui effectue une analyse de sang dont le résultat est détaillé sur deux ou trois pages. Le médecin perçoit alors des choses qu'il devinait peut-être mais qu'il ne connaissait pas, du moins de façon aussi détaillée et intensive.

Le médecin vous prescrit un médicament que vous devez prendre trois fois par jour au moment des repas. Vous avez tout de suite compris que c'est parce ce que ce médicament va vous ronger l'estomac et que par conséquent, il faut le mélanger à la nourriture de façon à diminuer les effets pervers sur la paroi stomacale.

Seulement, étant de nature curieuse, quand vous avez acheté le médicament, vous avez lu, dans la notice, qu'il présentait des effets secondaires. Dans la majorité des cas, ce médicament est très mauvais pour vos reins.

Quel est donc cet individu qui vous prescrit un médicament qui vous ronge l'estomac et vous détruit les reins ? En réalité, il est lui-même une victime, trompée par l'industrie pharmaceutique qui a mis des produits sur le marché. Il croit pouvoir prescrire ces médicaments en toute sécurité à ses patients sans se rendre compte à l'avance des accidents possibles.

Voici quelques années, j'ai trouvé le moyen de me couvrir de ridicule et apparemment, j'ai très bien réussi.

J'étais parti d'une idée un peu idiote: je ne comprenais pas pourquoi les chercheurs qui veulent guérir le cancer, ce qui est une noble cause, s'entêtaient à se servir de petites souris pour leur inoculer le cancer. Certaines d'entre elles avaient des tumeurs tellement grosses que leurs pattes ne touchaient plus le sol. Vous en avez vues comme moi.

Dans ma candeur naïve, je m'étais demandé si les chercheurs ne pourraient pas se procurer, dans les hôpitaux, les tumeurs des personnes — malheureusement nombreuses — ayant été opérées d'un cancer. Ces tumeurs sont à divers degrés de mûrissement et elles ne proviennent pas de l'animal mais de l'homme.

Le chercheur a eu la gentillesse de ne pas me rire au nez. Il m'a dit que c'était impossible parce que le patient à qui on a enlevé la tumeur a pris, durant des années, des médicaments et par effet de rémanence, certains composants chimiques de ces médicaments sont toujours dans son organisme et dans la tumeur. Il est impossible de comparer cela à une autre tumeur d'une autre personne qui a pris d'autres médicaments, et dont l'organisme renferme d'autres composants chimiques.

Il faut au chercheur un terrain neutre, d'où la petite souris, mais on en revient à ce qui a été dit depuis le début. Vous aurez remarqué qu'il ne s'agit plus du cobaye, du chien ou du lapin mais de la souris. J'ignore pourquoi.

Maintenant, on essaie de guérir chez l'homme des maladies naturelles spontanées, en essayant de guérir des maladies artificiellement provoquées sur l'animal en prétendant ensuite que c'est la même chose. Je n'en suis pas du tout sûr.

D'ailleurs si un de ces jours, un médecin devait vous prescrire un médicament qui vous ronge l'estomac et les reins, et que vous deviez suggérer à un ami de prendre ce même médicament, en lui indiquant les effets secondaires potentiels, il va peut-être vous répondre qu'il a pris ce médicament pendant quinze jours voici un mois, qu'il a arrêté le seizième jour, et que depuis lors, il a uriné trois cents fois; par conséquent, ses reins sont rincés.

Les composants chimiques sont pourtant toujours là et si un de ces jours vous souffrez d'une autre maladie, un médecin va vous prescrire un médicament. Êtes-vous bien sûr que les composants chimiques de ce médicament vont se marier harmonieusement avec ceux qui se trouvent encore dans votre organisme ?

Enfin, soyons sérieux !

Je dis que le médecin est une victime car il est abusé par ce qu'on lui communique sur les médicaments.

Vous souvenez-vous de la thalidomide ? On ne va pas s'attarder sur le sujet de ces malheureux enfants nés sans bras et dont les mains s'attachaient aux épaules. Ce médicament avait pourtant été testé sur des animaux. Vous me répondrez, ne revenez pas sur cette question qui remonte à bien des années, depuis on a fait des progrès et maintenant, ce genre d'accident n'arrive plus. En êtes-vous sûrs ?

Là où je suis, d'habitude on ne mentionne pas de noms. Mais je vais le faire parce que ce nom a été publié dans tous les journaux et à la télévision: le Vioxx, un anti-inflammatoire rhumatismal. Il a été retiré précipitamment du marché parce qu'il a provoqué des vagues d'accidents cardio-vasculaires. Il avait pourtant été testé de la même manière. C'est un produit moderne, récent; pourtant il a provoqué des catastrophes. Des centaines de médecins ont prescrit le Vioxx, en toute bonne foi. Le médecin croyait aussi que ce produit était sûr puisqu'il avait été testé. Soyons sérieux !

Vous parlez aujourd'hui de toxicologie scientifique. Vous voulez l'opinion des associations de protection des animaux ? La toxicologie scientifique, nous l'attendons depuis vingt-cinq ans.

Il s'est trouvé des gens comme le professeur Roberfroid, un pionnier, qui s'est battu pour qu'on en arrive à la toxicologie scientifique de manière à ce que nous ayons une méthode qui soit claire, nette et précise, et qu'on en cesse avec le flou, les hésitations et les approximations dangereuses.

Nous sommes en faveur de la toxicologie scientifique !

J'ai trois éléments à ajouter.

Lors de la constitution du gouvernement précédent, il y a eu une déclaration gouvernementale où figuraient deux mots anglais que vous connaissez déjà: best practice. Ils signifient que si on travaille sur quoi que ce soit, on va commencer par se pencher par-dessus l'épaule de son voisin pour voir s'il n'a pas eu une meilleure idée que nous, s'il n'est pas plus avancé dans sa recherche et donc si nous ne pouvons pas bénéficier de son expérience.

C'est en soi une excellente idée. Lors de la sortie de cette déclaration, je me suis rendu au cabinet du ministre de la Santé de l'époque. J'ai dit à ces messieurs: la best practice, c'est parfait. Mais elle doit être belge. Il faut arrêter de copier ailleurs. Il faut que nous soyons à la pointe. Et cela dépend de vous.

Je vais illustrer ma pensée. Avant-guerre et même encore un peu après-guerre, avant la maladie moderne des fusions d'entreprises, il y avait en France un grand fabricant de luminaires pour automobiles, Marchal. Les phares Marchal étaient indubitablement les meilleurs. Cette firme a sorti un jour une affiche routière de 2,8m sur 3,4m. Elle était toute noire comme l'encre, comme la nuit. En bas, à gauche, il y avait le bout du museau d'une voiture et deux phares ... Vous voilà devant la nuit des inconnues à vaincre et la recherche qui doit éclairer le chemin. Ces phares éclairaient la route comme en plein jour. On voyait tout: les fossés, les talus, les virages au fond. Il y avait évidemment en dessous un petit slogan publicitaire. Ce n'était pas « Les phares Marchal sont les meilleurs » ni « Avec Marchal on voit clair », mais « Soyez celui qui mène ! ».

Voici dix ans environ, nous avions reçu des lettres de la Communauté européenne nous disant que les produits chimiques usuels avaient été vérifiés par le passé selon diverses méthodes et qu'il serait bon de procéder à une nouvelle vérification selon une même méthode. Un mot terrible figurait dans le texte: il serait tout de même « facile » de procéder dorénavant à des comparaisons; en d'autres termes, il fallait tout recommencer.

Si le public savait qu'il avale des produits chimiques lorsqu'il les utilise, il serait évidemment favorable à une analyse approfondie de ces produits. Pour examiner 30 000 produits chimiques, il faudra dépenser 45 milliards d'euros. En outre, cela prendra du temps. On est déjà occupé à discuter de ce que l'on fera en 2018.

Comme l'indique le document qui nous a été soumis, les produits chimiques sont classés par quantités consommées: moins d'une tonne, une tonne, dix tonnes, etc.

Le CEFIC, le Conseil européen de l'industrie chimique, s'est interrogé sur la question de savoir s'il fallait commencer par les produits les plus consommés ou par les plus toxiques. Il a été décidé de commencer par ces derniers.

L'étude s'étalera de juillet 2007 à 2008. L'analyse prendra donc un an. Nous vivons dans une ère moderne, avancée; on nous parle de technologie scientifique et les produits seront testés sur les animaux ! Quinze millions d'animaux seront massacrés la première année, avec pour résultats des choses vagues, approximatives, douteuses, dangereuses. Pour rassurer tout le monde, c'est de nouveau avec des animaux que l'on travaille. N'est-ce pas là un non-sens absolu ? La réponse est évidemment affirmative.

Je vais terminer par une expression estudiantine: « grouillez-vous » car il est plus tard que vous ne le pensez. Il s'agit des produits chimiques d'entretien et de composants de médicaments.

Je conclurai sur une note un peu plus légère, quoique inquiétante. Je me suis récemment entretenu avec un médecin de l'Institut Édith Cavell que je connais personnellement. Il m'avait prescrit un médicament et je lui ai demandé si ce dernier était compatible avec un autre médicament que je prenais régulièrement. Il m'a répondu que je pouvais prendre les deux et que l'on verrait bien. On verrait bien, effectivement, mais à mes frais !

Je connais aussi un cardiologue jouissant d'une certaine réputation.

Lors d'une récente conversation, je lui dis que je l'admire beaucoup, non seulement dans sa rigueur, mais aussi dans sa certitude. Il me répond: « Vous savez, nous pratiquons beaucoup la méthode Coué ». A-t-il recours à la méthode Coué parce qu'il n'est pas sûr de lui ? Pas du tout. Il a recours à la méthode Coué parce qu'il n'est pas sûr des produits chimiques qu'il prescrit à ses clients.

Je ne vais pas abuser de votre patience. Vous vouliez savoir ce que pense la protection des animaux de la toxicologie scientifique: oui, mais vite.

M. Claude Reiss, président d'Antidote Europe — Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de venir vous parler d'un travail que je réalise depuis près de vingt ans. Ce travail consiste en la mise au point de méthodes scientifiques visant à évaluer les risques toxiques.

La première fois que j'ai entendu associer les mots « toxicologie » et « sciences », c'était en 1993 à Baltimore où le professeur Roberfroid, que M. Potelle vient de citer, a fait un exposé dans le cadre d'une grande conférence internationale. Il a dit une chose qui m'a beaucoup marqué: « Jusqu'ici, la toxicologie était un art, nous voudrions maintenant qu'elle devienne une science ».

J'ai eu l'occasion de discuter avec lui et nous avons tracé les grandes lignes de ce que pourrait être une toxicologie scientifique.

Je représente ici l'association sans but lucratif Antidote Europe dédiée à l'application des progrès scientifiques à la santé humaine. Notre première tâche est, bien entendu, de faire de la prévention, autrement dit éviter que les gens ne tombent malades, en mettant de côté les produits chimiques qui pourraient être éventuellement dangereux pour leur santé.

Je voudrais évoquer le communiqué de presse du 7 février dernier de l'IARC, l'Agence internationale de recherche sur le cancer, une filiale de l'OMS, qui a dénombré 3,2 millions de nouveaux cas de cancer en 2006 en Europe contre 2,9 millions en 2004 — soit une augmentation de plus de 10 % en deux ans — et 1,7 million de décès dus à cette maladie. Vous constaterez qu'il s'agit là d'un problème très sérieux.

Compte tenu de l'accroissement de l'espérance de vie de la population européenne, l'augmentation constante des chiffres depuis trente ans montre nettement que le principal facteur responsable de ces tendances est l'environnement. Par environnement, j'entends non seulement l'environnement physique, le style de vie (tabagisme, diètes excessives, alcool, etc.), mais également l'environnement chimique.

Dans notre environnement ont été effectivement introduits de nombreux produits chimiques qui n'ont pas été testés autrement que sur des rongeurs. La Commission européenne estime qu'il y aurait autour de nous environ cent mille produits chimiques dont on ne sait pratiquement rien quant aux effets sur notre santé.

Dorénavant, ces produits doivent être testés dans le cadre du projet REACH. Entre la fin des années 1990 et le début des années 2000, notre objectif a été de développer une évaluation rigoureuse de la toxicité.

Les risques toxiques sont traditionnellement évalués sur des animaux. Il s'agit d'une méthode coûteuse. Selon le National Toxicology Program, qui est une branche de la Food and Drug administration aux États-Unis, le test d'une molécule sur des animaux coûte entre trois et quatre millions de dollars. Ces tests durent entre deux et quatre ans. Ces chiffres sont basés sur l'évaluation de la toxicité d'environ 500 produits. Ils sont donc relativement fiables.

Nous savons très bien que les tests pratiqués sur les animaux, principalement des rongeurs, ne sont pas fiables puisqu'aucune espèce n'est un modèle biologique fiable pour une autre. En outre, ces tests ne sont pas ou peu reproductibles. Il suffit de prendre une lignée de souris comme la C3H, utilisée pour évaluer un produit cancérigène. Au bout de 90 jours d'expérimentation, 90 % des souris développent des tumeurs. Cette souche est spontanément très susceptible de développer des tumeurs. Si vous prenez une souche plus robuste, comme la C57B1, au bout de 90 jours d'expérimentation, il n'y aura que 5 à 10 % des souris qui développeront des tumeurs. Vous pouvez choisir une lignée ou une autre en fonction de ce que vous voulez obtenir. Par conséquent, cette méthode scientifique doit être éliminée.

Enfin, l'expérimentation sur les animaux heurte la sensibilité d'une majorité d'Européens.

Les progrès scientifiques permettent de remédier à toutes ces insuffisances. La toxicologie scientifique consiste à établir la biologie de l'environnement d'un produit. Si vous testez l'impact de la thalidomide ou d'autres produits chimiques sur des animaux, vous vous apercevrez qu'à une certaine dose, les animaux meurent, sont incommodés ou développent des maladies à long terme.

Cela ne veut rien dire pour l'homme. Il faut donc développer des méthodes caractéristiques à l'homme. Cela nous oblige à travailler sur du matériel biologique d'origine humaine, en particulier sur des cellules, sur des organes en perfusion et, éventuellement, sur la personne humaine elle-même avec, bien entendu, les précautions d'usage.

Je limiterai mon exposé à la toxicologie sur les cellules humaines.

La toxicologie étant simplement la biologie dans l'environnement du produit toxique, les méthodes, les outils et les concepts que nous développons depuis trente ou quarante ans en biologie moléculaire et cellulaire sont parfaitement adaptables à l'étude de la toxicologie.

Selon un grand biologiste, E.B. Wilson, « La solution à tout problème de biologie doit finalement toujours être recherchée au niveau cellulaire ». Autrement dit, en commençant par étudier la toxicologie au niveau des cellules humaines en culture, nous avons déjà un premier crible de l'effet toxique de ces molécules.

Je vous présente une coupe d'une cellule de mammifère, une cellule humaine. Vous apercevez un certain nombre d'organelles. En rose, vous distinguez l'usine qui fabrique l'énergie pour la cellule, les mitochondries. En violet, au centre, et en bleu, vous avez le noyau. Le noyau est la salle de commande de la cellule. Cette salle de commande va exprimer des gènes. Si vous tirez sur la partie en bleu, vous sortirez une espèce de grosse ficelle. Cette grosse ficelle est faite d'un roulement en spirales. Si vous tirez un peu plus, vous avez de l'ADN, le patrimoine génétique logé dans le noyau de la cellule. Ce découpage de la cellule en petits morceaux, en particulier dans son patrimoine génétique, nous permet de définir la toxicologie cellulaire, qui est le premier crible de la toxicité.

On connaît environ 23 000 gènes. Pour 18 ou 19 000 d'entre eux, on sait quelle activité biologique ils impliquent dans la cellule; 1 100 gènes sont impliqués dans la réponse à une activité toxique. Ces gènes nous permettent d'interroger la cellule pour essayer de comprendre ce qui se passe à l'intérieur de celle-ci.

Comment s'y prend-on ? Une technique a été développée voici une dizaine d'années aux États-Unis: la génomique, la toxicogénomique, etc. Ces méthodes permettent de déceler simultanément un grand nombre de marqueurs biologiques dans la cellule. Ces reporters, à bord de la cellule, nous permettent de voir quelle est la cible du produit chimique. Attaque-t-il, par exemple, cette usine de fabrication d'énergie que sont les mitochondries ? Attaque-t-il le patrimoine génétique ? Fait-il un trou dans la paroi de la cellule ?

Grâce à ces marqueurs génétiques, nous pouvons voir quelles sont les cibles, quels sont les dégâts occasionnés par le produit chimique, comment la cellule répare ces dégâts et dans quelles limites, si la cellule parvient à survivre ou si elle meurt, etc. Nous pouvons aussi voir si la cellule est poussée dans des voies pathologiques, la prolifération par exemple. Le produit forcera-t-il la cellule à se diviser de façon permanente, ce qui indique généralement une activité cancérigène ? Va-t-elle muter ? Le patrimoine génétique se trouve aussi souvent à l'origine de cancers. Va-t-elle interférer avec la communication neuronale ? Tous ces reporters nous permettent donc de voir comment la cellule réagit à l'agression toxique dont elle est l'objet.

Imaginez que vous êtes assis dans la salle de contrôle d'une centrale électrique. Vous êtes entouré de panneaux munis de voyants. Chaque voyant indique le fonctionnement d'un organe particulier de l'installation et l'intensité de la lumière — très brillante, en veilleuse ou éteinte — traduit la manière dont l'organe en question travaille. Vous êtes, en l'occurrence, dans une situation similaire, mais les organes de fonctionnement de la centrale sont remplacés par les gènes; vous pouvez voir quelle est l'activité de chaque gène dans la cellule et vous pouvez comparer cette activité selon que la cellule est, ou non, exposée à un produit chimique. Vous pouvez ainsi voir quels gènes ont été stimulés par l'activité du produit toxique et quels gènes ont, au contraire, été réduits au silence ou atténués.

Ces méthodes dont le nom se termine par « omique » sont nombreuses. Citons, par exemple, la toxicogénomique; j'y reviendrai plus en détail dans un instant.

La toxico-épigénomique concerne les phénomènes épigénétiques, lesquels influent sur l'expression des gènes sans interférer directement ni avec le cycle cellulaire ni avec le patrimoine génétique, donc avec l'ADN. Ce sont souvent des décorations qui placent une molécule — un CH3 ou un phosphate — à certaines parties du fameux chromosome évoqué précédemment et qui permettent de modifier l'expression d'un ensemble de gènes se trouvant sous le contrôle de cette modification.

Nous avons également la pharmacogénomique, c'est-à-dire l'application de la toxicogénomique aux produits pharmaceutiques. Elle permet de viser d'une façon générale les êtres humains, mais aussi un patient en particulier.

Il suffit de prendre le patrimoine génétique d'un patient et de vérifier que ce patrimoine est, ou non, affecté, et de quelle façon, par un produit pharmaceutique que l'on souhaite administrer à ce patient. À l'heure actuelle, aux États-Unis, on peut faire intervenir la pharmacogénomique pour éviter de donner à un patient un médicament qui, soit n'a pas d'effet sur lui, soit a un effet négatif. On peut donc restreindre la délivrance de ces médicaments en fonction des résultats de ces tests.

La toxicoprotéomique vise à analyser non seulement le gène lui-même, mais aussi les produits de ce dernier: les protéines, les enzymes. On peut voir comment ces protéines sont affectées par la présence d'un produit toxique. Parfois, du fait de la présence d'un tel produit, la protéine se replie mal. Et nous savons que certaines maladies très graves, appelées maladies conformationnelles — Alzheimer, Parkinson, maladie de la vache folle, diabète de type 2, etc. — sont dues à ce phénomène.

Nous avons aussi l'application de ces techniques omiques à l'identification des métabolites. En effet, quand un produit entre dans l'organisme, il est modifié, particulièrement par le foie qui est le principal organe de métabolisation. Cette dernière transforme le produit chimique initial en un produit dérivé, moyennant quelques modifications. De ce fait, le produit peut traverser les parois huileuses qui entourent la cellule et les milieux aquatiques qui sont autour et dans la cellule. Cette modification permet au produit de circuler librement dans l'organisme. Souvent, les métabolites sont beaucoup plus toxiques que le produit initial et réciproquement. Il arrive en effet que des produits très toxiques à l'entrée dans l'organisme se révèlent non toxiques une fois métabolisés. Il est donc intéressant d'étudier la métabolisation et la toxicité associée à la métabolisation.

On a aussi la toxicoglycomique qui concerne des modifications de décoration de la protéine quand elle est destinée à certaines activités.

Permettez-moi de vous montrer une expérience qui a été réalisée en toxicogénomique. Nous avons observé une cellule humaine en culture que nous avons mise en présence d'un produit chimique que nous voulions tester. Nous avons utilisé différentes concentrations, divers temps d'exposition, dans diverses lignées cellulaires. Nous avons extrait de cette cellule les gènes qui ont été affectés par le produit chimique. Par des manipulations biochimiques relativement simples, on a coloré en rouge les gènes qui ont été surexprimés du fait de la présence du produit chimique. On a coloré en vert ceux qui, au contraire, ont été réprimés ou dont l'expression a été annulée par le produit chimique. Des couleurs intermédiaires entre le rouge et le vert témoignent d'états intermédiaires entre « stimulés » et « réprimés ». Chacun des points correspond à un gène dont nous connaissons la fonction biologique et en particulier la fonction dans la réponse à l'agression toxique. À partir de cette puce ADN, nous pouvons immédiatement déduire quel est l'effet toxique de ce produit sur la cellule humaine exposée. Voilà donc une technique très simple qui permet de juger très rapidement de l'effet d'un produit.

Par rapport à l'expérimentation animale, cette méthode présente des avantages énormes. D'une part, une expérience toxicogénomique dure quelques heures. On peut bien sûr exposer le produit pendant plusieurs jours mais les résultats sont disponibles quelques heures après la fin de l'expérience. D'autre part, ces méthodes sont relativement bon marché puisqu'une expérience de toxicogénomique coûte de 10 à 20 euros, à condition d'optimiser l'expérience par l'utilisation de petites puces ADN. Nous avons particulièrement travaillé dans cette direction pour mettre la toxicogénomique à la portée des moyens que l'industrie veut consacrer à l'évaluation des risques toxiques. Sur cette projection, l'agrandissement est considérable. Ces puces ADN mesurent environ un centimètre sur un centimètre. Chacun de ces spots fait quelques microns de diamètre. On peut faire un test sur des milliers de produits chimiques en même temps, dans un volume équivalent à celui de cette salle, à condition d'utiliser des systèmes robotisés, avec une informatique qui permet de gérer tout cela de façon simple et sans intervention humaine. Ces résultats sont environ cent fois plus rapides et à peu près cent fois moins onéreux que les tests sur animaux. Pour chacune des expériences, on fait une manipulation pour une concentration et un temps d'exposition. En fait, nous testons une dizaine de temps d'exposition — entre quelques minutes et quelques jours, éventuellement — et des dizaines de concentrations — de très faibles à très fortes, jusqu'à la limite de la mort de la cellule. Par ailleurs, nous pouvons utiliser des cellules qui viennent de divers organes du corps: foie et rein sont en général les premiers organes exposés à des agressions toxiques, mais également des cellules neuronales, des cellules de la moelle épinière, etc. En comptant dix temps d'exposition, dix concentrations et dix lignées cellulaires qui rendent compte d'une observation sur dix tissus différents de l'organisme, vous obtenez mille expériences qui coûtent encore cent fois moins qu'un seul test sur animaux.

L'énorme avantage est que nous avons utilisé cette méthode-là, qui a été inventée aux États-Unis il y a 12 ou 13 ans. Nous l'avons adaptée aux conditions européennes de REACH.

Cet organisme doit évaluer environ 100 000 produits chimiques. Nous nous limiterons d'abord à 12 000. Mais vu le coût des expérimentations animales — 2 à 4 millions de dollars par substance — vous voyez que même avec 10 000 produits, nous attendrions des milliers de milliards et ceci durerait probablement des dizaines, voire des centaines d'années, même si on testait 100 produits simultanément.

Nous avons fait une petite estimation: par toxicogénomique, on pourrait évaluer le risque toxique, pour les cellules humaines, de 100 000 produits en l'espace de trois ans si on voulait bien équiper un laboratoire en institut spécialisé.

Il ne s'agit pas de la seule méthode mais c'est actuellement celle que je connais le mieux car elle nous a servi à tester une trentaine de produits; nous l'avons optimisée pour qu'elle soit la moins chère et la plus rapide possible. Cela donne des chiffres tout à fait acceptables pour l'industrie.

Nous ne sommes pas les seuls à avoir utilisé cette méthode. Aux États-Unis, le National Institutes of Health et l'EPA (Environmental Protection Agency) ont créé un Institut national de toxicogénomique qui effectue actuellement ce type de tests. Le Japon a emboîté le pas.

Nous avons recommandé très fortement à la Commission de Bruxelles, quand elle a proposé le projet REACH, d'inclure la toxicogénomique dans l'évaluation des risques toxiques. Ils ont effectivement utilisé dans le préambule le terme « toxicogénomique » mais je n'ai pas l'impression que cela sera très rapidement implémenté dans le projet REACH.

Outre les avantages que je viens de citer, il y a également, pour les pays qui adopteraient ces méthodes-là, un certain nombre d'avantages: d'une part, une plus grande sécurité pour les consommateurs et, d'autre part, une formation de leurs chercheurs à des méthodes d'avenir.

D'ici 5 ou 10 ans, tout le monde devra utiliser la toxicogénomique ou d'autres méthodes pour évaluer les risques toxiques des produits chimiques.

Pour la Belgique en particulier, la création d'un Institut chargé de réaliser la toxicogénomique des produits chimiques présenterait le gros avantage de montrer la voie à l'Europe et peut-être d'avoir la possibilité de tester les produits chimiques pour d'autres pays européens.

En effet, actuellement, comme c'est le cas en France, les industriels des PME en particulier sont catastrophés par le fait qu'ils sont obligés de satisfaire aux critères de REACH sans avoir les moyens de le faire.

S'il y avait quelque part une institution qui pouvait proposer ce type de tests à l'industrie, elle aurait beaucoup de clients.

Je vous montre la carte de la France de la mortalité par cancer du poumon. Vous voyez que tout l'arc nord-est, qui intéresse directement la Belgique, est effectivement très exposé à la mortalité par cancer du poumon, en particulier pour les hommes.

Vous avez, aux portes de la Belgique, une incidence des cancers du poumon et de la mortalité par cancer du poumon énorme. Cela veut dire que nous ne pouvons pas nous contenter de tester des produits chimiques uniquement dans un pays mais qu'il faut les élargir au niveau européen.

Par conséquent, si la Belgique voulait bien prendre le leadership de l'évaluation des risques toxiques par des méthodes scientifiques, je pense qu'elle rendrait service également à l'ensemble de l'Europe.

M. Erwin Annys. — Je suis docteur en chimie. Après avoir travaillé pendant quelques années comme chercheur dans des universités et des hôpitaux universitaires, j'ai été actif pendant seize ans dans l'industrie chimique. C'est là que j'ai été confronté à la nouvelle législation européenne sur les substances chimiques REACH, ce qui m'a conduit à travailler pour Fedichem, la fédération de l'industrie chimique de Belgique.

REACH est une forme de mouvement de rattrapage qui demande à l'industrie chimique d'étudier en détail toutes les substances chimiques fabriquées dans des quantités supérieures à une tonne par an. Trois étapes sont prévues: une première série de produits sont enregistrés après 3,5 ans, un deuxième groupe après 6 ans et les autres produits doivent être évalués après 11 ans.

Pour commencer, on a retenu le critère le plus simple, à savoir les substances les plus répandues sur le marché (plus de 1 000 tonnes) et connues comme pouvant avoir des effets néfastes sur la santé, étant cancérigènes, mutagènes ou toxiques pour la procréation. Les substances classées parmi les produits dangereux pour l'environnement par la législation européenne, en particulier le fameux NR-50-53, sont aussi intégrées dans la première phase.

Il existe quatre catégories de tests, parmi lesquels les tests physicochimiques et les tests toxicologiques. Sur le transparent, les tests marqués d'une croix sont ceux qui utilisent des animaux vertébrés.

La législation REACH ne vise pas seulement à établir un lien entre la santé de l'homme et de l'environnement et le maintien d'une économie compétitive en Europe. Elle précise également qu'il est primordial de réduire les expérimentations sur les animaux.

Une firme n'a donc pas le droit de commencer des tests qui ne sont pas encore mis en œuvre et qui relèvent de la catégorie des « plus de 100 tonnes ». Il faut introduire un plan de test et demander une autorisation. L'agence juge alors si les tests sont effectivement indispensables. En outre on constitue une liste de tous les tests proposés et appel est fait aux personnes qui peuvent proposer des solutions de rechange. Celui qui a déjà au moins une fois entrepris ces tests difficiles sait qu'en fait il est souvent fait référence à l'ECVAM, le Centre européen pour les méthodes alternatives, qui reçoit grâce à cette réglementation un encouragement sérieux à développer de nouveaux modèles mathématiques théoriques qui aboutissent à des résultats comparables à ce que donnent les expérimentations.

Comme l'a dit l'intervenant précédent, il existe en ce moment déjà des tests in vitro et la directive REACH en encouragera également l'usage. En outre je dois aussi renvoyer à des techniques comme le grouping. Lorsque des produits chimiques se ressemblent fort, les résultats obtenus pour l'un peuvent s'appliquer à l'autre.

Ce n'est hélas pas toujours aussi simple. Certains tests de rechange sont pour l'instant pleinement acceptés, mais il ne s'agit que d'une petite minorité. C'est dommage car en tant qu'industrie, nous disons aussi que plus les tests sont bon marché, mieux c'est pour nous. Nous sommes toutefois également confrontés au fait que notre secteur industriel dépasse les limites de notre pays et même celles de l'Europe. Nous jouons un jeu mondial avec des législations européennes et mondiales. Dans l'évaluation des produits chimiques et pharmaceutiques, nous devons aussi tenir compte des règles de l'OCDE. L'approbation d'un test prend actuellement un certain temps. En fin de compte, nous ne voulons pas non plus faire un pas en arrière et rejeter les connaissances actuelles pour les remplacer par quelque chose qui n'a pas encore fait toutes ses preuves.

En sommes-nous partisans ? Oui, en tant qu'industrie chimique nous faisons la recherche nécessaire. Fedichem est une fédération belge et est naturellement active au plan européen. On a parlé du Cefic. L'une des actions préférées du Cefic est la Long-range Research Initiative que nous mettons en œuvre non seulement en Europe mais aussi en collaboration avec les États-Unis et le Japon. L'industrie y dépense de l'argent pour approfondir certains thèmes. Outre, par exemple, une étude sur les problèmes des substances de régulation hormonale, beaucoup d'attention est accordée à la recherche de tests alternatifs. L'Europe s'en soucie aussi fortement. Le sixième programme-cadre, comme le septième qui commence cette année, prévoit beaucoup d'argent pour rechercher et promouvoir de tels tests et alternatives. Cela s'inscrit dans ce que nous appelons une « stratégie intelligente de test », un autre programme européen. Cependant, en tant qu'industrie chimique et pharmaceutique — car Fedichem représente la chimie dans son sens le plus large — nous demandons de ne pas entamer un processus de disparition de notre industrie en voulant aller plus vite que le reste de l'Europe et rendre impossible des affaires qui sont demandées dans le monde entier.

Je reviens au texte de base du Sénat qui demande la création d'un centre belge de compétences en toxicogénomique. Comme l'orateur précédent, je veux souligner qu'à côté de la toxicogénomique, il y a bien d'autres « omiques », qui sont sources de connaissances.

C'est probablement une des techniques les plus prometteuses qui existent aujourd'hui. Nous devons réaliser que tout n'est pas encore connu. Si de telles cellules étaient soumises à une solution concentrée en sel, toutes sortes de couleurs apparaîtraient. Dès qu'on ajoute un élément, il se passe quelque chose. Un certain nombre de déclencheurs apparaissent. Le gros problème est que, pour l'instant, nous voyons que quelque chose change mais nous ne savons pas quoi.

Nonante pour cent du matériel génétique ne donne lieu à aucun codage de certaines protéines. L'interprétation est assez difficile. Pour l'instant, nous ne pouvons pas encore dire clairement que tous les tests peuvent être remplacés par ces techniques. Il faut y consacrer l'attention nécessaire. Lors de la journée d'étude du programme REACH de la semaine prochaine, un quart de notre temps sera consacré à la recherche et à des propositions de tests alternatifs. Nous ne pouvons pas répondre par l'affirmative à la demande d'une étude de faisabilité pour la création d'un centre belge de toxicogénomique.

Devons-nous considérer uniquement les tests et les alternatives ? Ne pouvons-nous voir les choses dans un contexte plus large, en tenant compte d'un autre problème dans la législation, à savoir l'analyse de la sécurité chimique qui doit avoir lieu pour toute matière ? Élaborer des scénarios d'exposition est faisable pour les grandes entreprises chimiques mais l'est beaucoup moins pour les très nombreuses PME de notre pays. Ne pouvons-nous intégrer cet aspect dans la législation ? Une commission qui gère les affaires sociales devrait combiner l'évitement de la souffrance animale et celui de la souffrance humaine qui pourrait résulter de la disparition d'une partie de l'industrie belge.

Mrs. Kirsty Reid. — Research Animals works for EuroGroup for Animals, and is an umbrella organisation represented by its Member organisations and observers within all the member states. It works on an EU level to improve animal welfare in the legislation.

In the protocol of Amsterdam Treaty it states that « Animals must be treated as sentient beings » and it says that « full regard must be paid towards the animal requirements when drafting legislation and implementing different legislation ».

In regard to alternatives and animal welfare there is a text in the 6th Community Environmental Action Programme which asks for alternatives to be used as a priority to animal testing.

In the Council Directive 86/609, which is the Animal Experimentation Directive of the EU, it states that an alternative method must be used when available and before an animal test.

The aim today is to give an overview of the importance of alternative methods within Europe and within the different legislation.

The first legislation to be mentioned is the Animal Welfare Action Plan which came into being last year. It focuses on animal welfare in all aspects within the EU but focusing on those used in experimentation it mentions that there must be an increase in the focus on the development, the validation and acceptance of non-animal methods. In this aspect the three R's are referred to, which are initial replacement of animal testing, which is what is ultimately preferred, but also in the refinement, so improving animal tests to ensure that there is less suffering and also in the reduction, where there is a reduction in the number of animals used but not impeding the safety of the test towards humans.

Concerning REACH and the Chemicals Policy, there has been a draft improvement in the number of animal testing from the original commission text that came out to what is now available. However it still calls for millions of animals to be used.

In the text it refers to alternatives, the promotion of alternatives to animal testing and this is brought up in Article 1 where it says as one of the objectives alternative methods must be used.

Throughout the texts reference is made to the use of alternatives before an animal test is used and animal testing should be used only as a last resort.

The Chemicals Agency which has been set up to run REACH, which will be based in Helsinki, has to submit a report every 3 years on the implementation of non-animal test methods.

The European Commission also has to present a report every 5 years on the funding of alternative methods within Europe on a national and an EU level.

The seventh amendment is a famous amendment to the cosmetics directive and it calls for an ending to animal testing. However, there are deadlines set for 2009 and 2013.

If these deadlines are to be met, alternatives have to be available to counteract the animal testing. If the alternative is not available animal testing will still not be allowed. There is however, a clause, allowing the Commission to put forward legislative changes if this is necessary.

The development of these alternatives is extremely important. At the moment Colipa, which is the Cosmetics Industry, is putting a lot of money and time into the funding of these alternatives. Some are being validated at present but others need to be developed and it is unknown if they will be in time. Having the money, the funding available and the centres is also very important.

Directive 86/609 is under revision by the Commission at the moment and looks like it may be totally revised. The proposal is expected to come out in 2007 and then it will go under the Code Decision Procedure of the European Parliament and the Council.

The Commission are hoping to include the 3 R's in the new proposals. They are hoping to include it in all of the articles. Part of the text, at the moment, is expected to encourage research and in this way it looks like there may be an article which will request that cosmetic companies give a certain percentage of their research budget towards the promotion of alternative methods. In relation to Directive 86/609, the ECVAM was set up in 1991. ECVAM is responsible for the validation and partly for the development of alternatives. Since 1991, 26 alternative methods have been validated on a EU level. Within ECVAM there is a task force focusing on toxicogenomics.

The European Partnership for Alternative Approaches plays a very big part in alternative promotion. It was launched by Commissioners Potocnik and Verheugen in 2005. A second conference was held in December 2006. It is a partnership between the Commission and Industry. It is made up of 7 sectors, and another sector is expected to join on. Over 20 companies have signed up.

This consists of a five-year working plan, within 5 different working groups, who are looking at the implementation of alternatives, the validation, how to improve the validation, different legislation which is outdated, calling for animal testing which needs updating.

At the moment it is seen as very effective and shows the importance of the companies who have signed up and are putting in all the efforts to find and improve alternatives.

There is different legislation in the EU which still calls for large amounts of animal testing.

The pesticides directive is being revised at the moment.

Here there is a tickbox approach of animal testing where 6 500 animals are used for each ingredient within a pesticide and then it is tested again in the in the product. Therefore, there are many areas where animal testing is still used. However there is a lot of emphasis on the promotion of alternatives and it is seen as being very important within the EU and the legislation.

M. Philippe Mahoux (PS). — Dans l'industrie chimique, on a un agenda fixé par la directive REACH. C'est clair. Cet agenda oblige à tester sans qu'on n'ait réellement pris en compte l'ensemble des alternatives dans les méthodes de test.

C'est une remarque générale qui concerne deux objectifs que nous poursuivons: garantir l'innocuité des produits et supprimer l'expérimentation animale.

Il y a un télescopage des calendriers, entre celui de notre commission et celui de l'Union européenne contenu dans la directive REACH.

Comment allez-vous procéder ?

Pensez-vous réellement que les méthodes alternatives soient moins onéreuses que les méthodes dites classiques basées sur l'expérimentation animale ? Vous affirmez que c'est moins cher. Il faut maintenant en persuader les industriels. Cependant il est tout à fait possible que les méthodes alternatives nécessitent encore des programmes de recherche. Or ces programmes de recherche coûtent ! Ce serait bien la première fois que l'industrie mette en œuvre des programmes coûteux de recherche sans qu'elle n'y soit obligée et alors qu'il y a déjà des méthodes qu'elle estime pouvoir utiliser et qui seraient actuellement moins onéreuses. Développer dans l'industrie des programmes de recherche dont le coût ampute les profits sans qu'il n'y ait une contrainte, c'est assez peu fréquent, pour recourir à une litote.

Je voudrais savoir quelles sont les perspectives que se donne l'industrie chimique à ce sujet. C'est important.

Je crois que, de manière générale, l'industrie chimique est sensible à l'image qu'elle offre et qu'en tout état de cause, il est important pour elle qu'elle s'engage dans la voie de la recherche de méthodes de test sans recours à l'expérimentation animale.

Je suis très sensible au développement de tests d'innocuité par des méthodes alternatives. Mais dans notre démarche, il devient urgent, à cause des problèmes de calendrier imposé par la directive REACH, que l'ensemble de ces méthodes soient validées.

Pour respecter les calendriers, dont celui de notre commission, il faudra donc se fixer des rendez-vous. En ce qui concerne notre assemblée, je rappelle qu'une résolution a été votée et que les recommandations de cette résolution ne disparaîtront pas avec la fin de la législature. Elles engagent le Sénat pour les législatures suivantes également. Je suis persuadé que tous les sénateurs présents aujourd'hui espèrent pouvoir continuer à soutenir cette résolution au Sénat, pour autant que l'électeur nous en donne le mandat.

Mme la présidente. — Après ce que j'ai entendu aujourd'hui, je pense pouvoir conclure que tout le monde, y compris l'industrie, reconnaît qu'on doit mettre un terme aux expériences animales. Par ailleurs, il semble possible de procéder à des expériences qui ne recourent pas aux animaux et qui sont moins chères. Cela signifie-t-il que pour certains tests, la toxicogénomique ou les autres « omiques » ne sont pas applicables ? Ou est-ce plutôt, comme l'a évoqué M. Annys, une question de non-validation ? De ce fait, ces tests ne sont pas conformes aux normes imposées par l'OCDE, ce qui pose un problème pour la commercialisation de certains produits. Si tel est le cas, comment pouvons-nous y remédier ? L'Union européenne a beau dire qu'elle veut stipuler dans ses directives, autant que possible, que des alternatives doivent être utilisées si elles existent, il se peut que d'autres intérêts s'y opposent. Dans ce cas, des efforts supplémentaires doivent être consentis au niveau supranational pour adapter là aussi les priorités.

Se pose également la question de savoir combien d'expériences animales sont vraiment inévitables à l'heure actuelle. Mme Reiss a cité un certain nombre de secteurs qui utilisent toujours des animaux et où la pression de l'opinion publique n'est manifestement pas aussi importante. Dans certains secteurs, les gens ont changé d'avis, probablement sous la pression des acteurs de terrain, mais ce n'est pas le cas partout.

Il me semble que tout le monde juge aussi souhaitable de réaliser une étude de faisabilité sur un centre belge de toxicogénomique. M. Annys considère que nous devons encore étendre la mission du centre. Peut-il expliquer sa position ? Mme Reiss a laissé entendre, de son côté, que l'Europe dispose de moyens et qu'elle pourrait les utiliser pour une telle étude de faisabilité. Il est en tout cas intéressant pour le gouvernement fédéral de savoir qu'à côté des moyens qu'il veut consacrer lui-même à cette étude, il peut aussi s'adresser aux instances européennes.

M. Georges Potelle. — Un point doit être clarifié dans ce que vous venez de dire, madame la présidente. On a beaucoup parlé de méthodes alternatives, mais on a dû constater que celles-ci doivent être approuvées par ECVAM. Nous dénonçons depuis des années les lenteurs de cet organisme qui a réalisé 26 examens en quinze ans. À ce rythme, si l'on veut connaître le nombre de méthodes dites alternatives qui ont été citées ou dont les listes ont été établies, nos petits-enfants seront grands-parents avant d'en connaître la moitié. C'est ridicule.

Ne pouvons-nous constater ensemble — car c'est la base des travaux de M. Mahoux et de ce que votre commission a entériné — que l'approche scientifique n'est pas une alternative mais une approche totalement différente ? Si vous classez la recherche sérieuse, précise, scientifique parmi les alternatives, et qu'elle à son tour doit être examinée par ECVAM, nous n'aurons jamais fini. C'est une tout autre approche. Je serais très étonné que M. Mahoux ne partage pas mon avis.

M. Claude Reiss. — Dès 2001, nous avons contacté la Commission pour l'informer de l'existence de méthodes scientifiques d'évaluation des risques toxiques. M. Verheugen, le commissaire à l'Industrie, et M. Potocnik, le commissaire à la Recherche, nous ont répondu qu'ils étaient au courant du développement de ces méthodes, particulièrement aux États-Unis, et que l'OCDE faisait pression pour que nous suivions cette voie.

Nous avons ensuite été reçus par le directeur d'ECVAM (European Center for the Validation of Alternative Methods), à Ispra en Italie, également conseiller scientifique de la Commission de Bruxelles en ce qui concerne les méthodes alternatives.

Il estime que les tests réalisés sur les animaux sont une mauvaise science en matière de toxicologie. Il a même écrit des articles dans Nature, une grande revue scientifique. Il compte développer au sein d'ECVAM un département de toxicogénomique. En attendant, comme ils disposent d'un certain nombre d'informations sur la toxicité des produits chimiques sur les animaux, il vont valider ces données.

Cependant, les êtres humains sont différents des animaux. Dès lors, valider des tests effectués sur des cellules humaines en culture et se référer aux données sur des animaux pour dire si un produit est toxique ou non pour l'homme est une stupidité. On peut valider par rapport à une référence, mais celle-ci doit être homogène. On ne peut valider par rapport à des rats ou à des souris ce que l'on observe sur des cellules humaines, en particulier sur des gènes de cellules humaines. Les gènes ne mentent pas, c'est-à-dire qu'ils donnent un résultat.

Contrairement à ce que disait tout à l'heure mon collègue de l'industrie, ce n'est pas la peine de regarder 86 millions de gènes sur une puce ADN parce que les informations sont beaucoup trop nombreuses.

Nous voulons développer une toxicogénomique ciblée. Nous choisissons un certain nombre de gènes dont nous savons qu'ils rapportent que la cellule est poussée par le produit chimique vers certaines pathologies, comme le cancer, des maladies neurodégénératives, des variations hormonales.

Sur la base de ces quelques informations très précises et très explicites, nous pouvons immédiatement décider que le produit chimique pousse la cellule vers telle ou telle pathologie et que ce n'est pas la peine d'étudier un grand nombre de gènes.

Je répondrai à M. Mahoux que la recherche est faite. Depuis 18 ans, on connaît la toxicogénomique. Entre 1996 et 1999, j'ai organisé deux workshops européens de toxicologie moléculaire auxquels j'ai invité des pionniers en toxicogénomique.

Effectivement, à l'époque, il y avait des plâtres à essuyer. Aujourd'hui, c'est chose faite.

Nous avons réalisé ces tests en quelques semaines sur les trente produits dont je vous ai parlé. Ce sont vraiment des expériences très simples. La partie recherche est effectuée. Des perfectionnements doivent encore être apportés, j'en conviens, puisqu'une discipline n'est jamais complètement achevée. En tout cas, l'interprétation de l'industrie qui consiste à dire qu'il faut encore faire de la recherche est mauvaise.

Comme vient de le dire M. Potelle, nous parlons de méthodes scientifiques et non de devinettes. Actuellement, lorsque vous obtenez un résultat sur un rat ou sur une souris, celui-ci peut ou non être valable pour l'homme.

Je vous donne un exemple très simple. Je travaille sur une nouvelle thérapie contre le sida. Si vous inoculez le virus du sida à un chimpanzé, qui est quand même notre plus proche cousin dans l'évolution, il est spontanément immunisé contre ce virus.

Si vous lui injectez le virus de l'hépatite B, un individu sur dix développera une petite hépatite passagère et se remettra très bien. L'homme, par contre, développera souvent une hépatite chronique ou un cancer du foie.

Si vous lui injectez le virus Ebola qui donne des fièvres hémorragiques, il meurt tout comme l'homme.

Vous avez ici l'exemple du meilleur modèle possible. Un comportement opposé pour le sida, différent pour l'hépathite B, identique pour Ebola, et personne n'est capable de le prévoir.

Continuer à jouer avec des modèles animaux revient à jouer à la roulette russe avec la santé des gens.

M. Philippe Mahoux (PS). — Quel est l'objet de la résistance à l'égard de l'utilisation de ces méthodes ? Je souhaiterais connaître votre sentiment en la matière ainsi que celui de l'industrie chimique.

M. Claude Reiss. — Depuis sept ans, je constate que la résistance, en particulier de l'industrie chimique, est due au fait que ces méthodes sont infalsifiables, qu'elles donnent des résultats qui sont reproductibles et qu'elles ne peuvent être interprétées autrement que comme étant valables pour l'homme.

Un grand nombre des produits chimiques que nous avons testés, notamment quinze pesticides, devraient être retirés du marché. Pour l'industrie chimique, ce n'est pas une bonne nouvelle.

Voilà, à mon avis, la principale raison. Mon collègue de l'industrie va peut-être vous donner son sentiment à ce sujet.

M. Erwin Annys — Je n'ai pas fort envie d'entamer une polémique. Nous sommes confrontés à différents points de vue scientifiques. Un groupe de scientifiques estiment que la manière dont certains rassemblent les connaissances n'a aucune valeur, alors que d'autres prétendent le contraire. Je doute qu'on puisse prétendre que nous rejetons certaines techniques sous prétexte qu'elles donneraient moins de résultats favorables sur nos substances. Les gens qui travaillent dans notre industrie ont une famille et des enfants. Ils n'ont pas l'intention d'empoisonner le monde.

De nombreux tests ont été réalisés durant la première phase REACH. La législation n'impose pas uniquement de demander une autorisation pour réaliser certains tests, elle nous contraint également à collaborer car dès qu'un test sur les animaux est disponible, personne n'a le droit de le refaire.

Les résultats des tests de la première phase ne sont peut-être pas tous disponibles pour le grand public, mais ils sont bien connus de l'industrie qui pourra donc les utiliser.

D'autres substances ont été répertoriées officiellement, ce qui implique que de nombreuses données en sont déjà connues. Il y aura donc peut-être un peu moins de tests que prévu. Nous aurons ainsi plus de temps pour développer de nouvelles initiatives en la matière.

On laisse entendre qu'il y aurait des lenteurs, mais lorsque j'entends parler le commissaire européen Verheugen de la DG Entreprise, j'ai l'impression qu'il fait le nécessaire pour trouver des solutions dans les plus brefs délais.

Certains tests sont bien partis. Il n'existe toutefois pas encore de solutions de rechange pour certaines analyses toxicologiques. On les recherche activement mais s'il n'y en a pas, on ne peut introduire une procédure de validation.

Je suis favorable à une validation par une organisation internationale telle que l'OCDE parce que je veux la sécurité. Lorsque la firme Airbus remplace un type d'avion par un autre, elle fait d'abord une étude très poussée et des tests approfondis en matière de sécurité. Tout le monde trouve cela normal. Je trouverais donc également normal que nous ne mettions pas la sécurité de côté tant que nous ne serons pas convaincus de la validité des tests de rechange.

M. Philippe Mahoux (PS). — Au niveau de l'industrie chimique — et ne croyez pas que je vous en veux particulièrement monsieur Annys —, on pourrait tenter d'obtenir des éléments statistiques, notamment pour les tests qui ont été réalisés ou qui seront réalisés dans le cadre de REACH. La directive REACH impose des choses, mais je suppose que vous avez anticipé quelque peu pour certains produits. Combien de fois a-t-on utilisé des méthodes alternatives et des méthodes dites classiques, c'est-à-dire l'expérimentation animale ?

Je ne demande pas une réponse aujourd'hui, mais il serait intéressant que vous puissiez nous donner prochainement ces renseignements statistiquement parlant et que l'on puisse mesurer l'effort qui peut être fait en vue d'utiliser des méthodes dites alternatives.

Que compte faire l'industrie chimique pour lever les doutes que lui inspirent les méthodes alternatives ?

Je présume que cela demanderait des recherches mais ce serait vraiment très intéressant. Sur les deux volets, évidemment: sur le premier, qui est statistique et, à la limite, rétrospectif; sur le deuxième, qui est davantage prospectif, même s'il peut aussi être rétrospectif, à savoir les budgets de recherche pour valider les méthodes alternatives, c'est-à-dire pour dissiper les doutes qui subsistent quant à leur pertinence dans l'industrie chimique. Dans l'hypothèse où ces documents existeraient, nous serions très désireux d'en prendre connaissance.

M. Erwin Annys. — Les techniques toxicogénomiques sont assez récentes. Elles sont encore minoritaires. Par contre, certaines techniques alternatives, telles les fameuses queue sort — des modèles mathématiques établissant une relation entre structure et activité — sont de plus en plus utilisées. Il y a quatre ou cinq mois, l'Environmental Protection Agency américaine est venue présenter à la Commission des méthodes mathématiques pour utiliser ce genre de modèles pour obtenir un effet sur l'environnement. Nous sommes les premiers à participer à tous ces programmes. C'est clair dans le Long-range Research Initiative, qui est financé par l'industrie. Nous payons des chercheurs qui travaillent sur ces questions. Nous collaborons avec l'industrie et avec tous les chercheurs en Europe et dans le monde sur la base des sixième et septième programmes-cadre relatifs aux tests alternatifs. J'ai récemment rencontré un chercheur de l'Université de Liège qui essaie de trouver de l'argent pour développer son produit. Nous ne sommes pas insensibles à cette problématique. Je vous transmettrai un document à ce propos.

M. Claude Reiss. — Je connais les statistiques françaises relatives aux médicaments, qui sont les produits les plus testés. Avant qu'un médicament soit mis sur le marché, 200 000 animaux sont en moyenne sacrifiés et des centaines de millions de dollars sont dépensés. En France, 18 000 personnes décèdent chaque année à cause d'effets secondaires qui n'ont pas été observés chez les animaux. J'ai suivi de près l'affaire du Vioxx. Ce médicament a été testé sur des singes, sur des chiens, sur des chats et sur des rongeurs. En fait, l'homme métabolise ce produit de façon particulière, ce qui a provoqué de sérieux problèmes. Il ne faut jamais faire confiance au modèle animal. Même les produits les mieux testés ont des effets secondaires dévastateurs. En France, cela fait quatre fois plus de victimes que les accidents de la route.

L'industrie devrait se rendre compte qu'elle est en train de rater une opportunité en boudant les méthodes scientifiques d'évaluation des risques toxiques. Aux États-Unis, le National Institute of Health vient d'organiser un grand colloque sur la toxicogénomique auquel assistaient bon nombre de Japonais. Je me suis aperçu que ces gens-là sont occupés à prendre des brevets à tour de bras. Si nous voulons encore vendre des produits chimiques Made in Europe dans ces pays, il faudra que nous passions sous leurs fourches caudines, c'est-à-dire par leurs brevets, pour pouvoir les tester pour qu'ils soient acceptés sur leur territoire.

L'industrie n'a pas intérêt à trop tergiverser, car ici aussi, le temps, c'est de l'argent.

L'animal est supposé être un modèle biologique fiable. Ce n'est pas vrai. La démonstration est aussi simple que rigoureuse. Une espèce se définit par le fait que les individus de celle-ci ne peuvent pas se croiser avec ceux d'une autre espèce. Un chien ne peut pas se croiser avec un chat, ni une vache avec un cheval. En effet, les chromosomes — le patrimoine génétique — d'une espèce lui sont particuliers et ne peuvent pas, au cours de la reproduction sexuée, se coupler à des chromosomes d'une autre espèce. Le patrimoine génétique d'une espèce ne peut donc pas se confondre avec celui d'une autre espèce.

Or, qu'est-ce qui détermine l'activité biologique d'un individu et en particulier la réponse à un test ? C'est son patrimoine génétique, qui contrôle l'ensemble de son activité biologique. Comme les activités biologiques de deux espèces sont différentes du fait que le patrimoine génétique l'est aussi, aucun test mené sur un animal n'est suffisamment fiable pour être transposé à une autre espèce, y compris à l'homme.

Ce qui précède rend une fois pour toutes inepte toute référence au modèle animal. Ce n'est pas la peine de continuer à s'exciter sur le sujet. Jusqu'il y a une bonne dizaine d'années, on ne pouvait pas faire autrement, mais il existe aujourd'hui d'autres méthodes. Il faut les mettre en œuvre sans perdre un instant.

M. Georges Potelle. — Je suis très impressionné par tout ce que j'ai entendu aujourd'hui. Comme l'a dit très justement M. Reiss, nous « pataugeons » dans toutes sortes de considérations concernant des méthodes alternatives. Il est notamment fait état des trois R: reduce, refine, replace. On travaille, là aussi, sur l'animal, à la cadence évoquée précédemment. Or, nous devons beaucoup — je me permets de le répéter — à M. Mahoux et à cette commission. En effet, il s'agit de sortir de toutes ces hésitations et de toutes ces approximations. Il faut à présent une approche scientifique. Ce n'était pas possible, j'en conviens, voici quelques années. À présent, nous travaillons sur l'homme, sur la cellule humaine. C'en est fini de travailler sur l'animal et de croire que cela a une certaine valeur. Nous pouvons actuellement faire ce qui n'était pas possible par le passé: travailler sur la cellule humaine et sur le génome. Des améliorations sont encore prévisibles. C'est une tout autre orientation, d'une importance majeure. M. Mahoux et cette commission l'avaient bien compris. Permettez-moi de profiter de l'occasion pour vous féliciter toutes et tous.

M. Erwin Annys. — Nous croyons aux possibilités des techniques alternatives. Nous considérons que l'étude de différentes lignées de cellules est extrêmement intéressante, mais nous ne pouvons pas oublier que l'être humain est plus complexe que la combinaison d'un nombre x de cellules. Nous devons en effet tenir compte du métabolisme entre les cellules et de nombreuses études sont encore nécessaires pour cela. L'expérimentation animale peut encore donner des indications intéressantes sur une certain nombre de choses qui autrement nous échapperaient. Je connais au moins une substance chimique dont on a découvert qu'elle était cancérogène parce qu'un des chercheurs a fait des tests beaucoup plus approfondis que prévu et a trouvé un certain effet grâce à une biopsie.

M. Philippe Mahoux (PS). — Je ne peux être d'accord. On ne peut pas imaginer qu'un tissu puisse se révéler plus sensible que la cellule qui le compose. Or, c'est ce que vous semblez prétendre. Je veux bien imaginer que les tests cellulaires ou génomiques pèchent par excès, mais imaginer l'inverse — des toxicités tissulaires qui ne seraient pas détectables par un test sur la cellule — me semble difficile. C'est pourtant ce que vous dites. Vous préconisez de continuer à recourir au système des cobayes, non humains par définition, ce que je comprends assez mal.

M. Erwin Annys. — J'y suis forcé, tant que l'on n'est pas sûr des alternatives et en l'absence de validation. Dès que l'alternative sera crédible, plus personne ne doutera. Alors, il ne devrait plus y avoir le moindre problème de compétitivité vis-à-vis du reste du monde. C'est en effet un point important. Que l'on aime ou non les essais sur les animaux, si on ne peut prouver actuellement cette innocuité, on ne peut pas ou plus mettre cette technique sur le marché.

M. Jacques Brotchi (MR). — Il faut éviter de trop généraliser. Beaucoup de progrès ont été faits en matière d'essais toxicologiques, au point que l'on peut, dans beaucoup de cas, se passer de l'expérimentation animale. Les progrès des deux ou trois dernières années sur le génome permettent évidemment des avancées dans ce sens.

Mais il ne faut pas tout mettre dans le même sac. Prenons un exemple dans ma profession de base, la neurochirurgie. Comment voulez-vous remplacer l'expérimentation animale et conserver l'espoir de guérir un jour la maladie d'Alzheimer ou de faire remarcher des paraplégiques ? Il n'y a pas d'autres possibilités que d'utiliser des cobayes. On n'est pas obligé de prendre des animaux de compagnie, mais on ne pourra éviter de recourir à des cobayes, des rats et des souris dans les cerveaux desquels on aura provoqué l'une ou l'autre lésion semblable à celles observées dans la maladie d'Alzheimer, afin de les corriger. Il faudra bien aussi paralyser un rat et essayer de réparer sa moelle épinière, par toutes les techniques d'implantation de cellules, etc.

Nous devons donc nuancer notre réflexion. Si on parle de toxicologie, les choses sont différentes, mais on ne peut pas, aujourd'hui, annoncer la fin des recherches sur les animaux. Je suis favorable à l'utilisation d'une solution alternative chaque fois que c'est possible. Il n'est pas question de se priver du progrès. Mais il reste une série de maladies qui rendent encore l'expérimentation animale incontournable.

M. Claude Reiss. — Il se trouve que je travaille depuis une quinzaine d'années sur les maladies conformationnelles qui sont dues au fait que les cellules produisent spontanément des protéines mal repliées qui finissent par former des agrégats qui, soit empêchent les communications neuronales entre les cellules — c'est le cas d'Alzheimer —, soit tuent les cellules qui fabriquent certaines substances importantes, par exemple pour le contrôle des gestes, c'est le cas de Parkinson.

Ce sont des maladies moléculaires, des maladies cellulaires. Nous connaissons le mécanisme par lequel ces maladies se mettent en place. Je n'ai jamais rencontré de souris ni de singe qui soit spontanément atteint d'Alzheimer ou de Parkinson. Par contre, ces maladies existent chez l'homme.

Par conséquent, nous progressons en étudiant pourquoi une cellule humaine se met à fabriquer — spontanément ou non, parce que ces problèmes peuvent être induits par des mutations ou des produits chimiques — des protéines mal repliées qui finissent par causer des problèmes comme les démences que je viens de citer.

Nous sommes en train de déposer les brevets parce que nous avons trouvé, d'une part, une détection précoce de ces protéines mal repliées et, d'autre part, une immunothérapie possible pour stopper l'évolution de ces maladies. Cela a été fait sur des cellules humaines.

M. Jacques Brotchi (MR). — Je suis tout à fait d'accord qu'il faut aller dans ce sens-là mais nous avons toute une population de malades atteints de diverses maladies dites neurodégénératives, qui attendent que nous arrivions avec des greffes de cellules pour pouvoir remplacer les cellules qui ne fonctionnent plus, qui sont détruites ou dégénérées.

Mais bien sûr, un jour viendra où ce que vous venez de décrire sera certainement le premier choix. En attendant, il nous faudra trouver une solution pour tous ceux qui sont là et pour lesquels il est un peu trop tard. Ce que vous dites va plutôt dans le sens de la prévention, voire d'attaque de première ligne, dès le départ, et ne s'applique pas à un stade avancé de la maladie.

Mme la présidente. — N'oublions pas qu'il y aura toujours des tests sur les êtres humains.

M. Claude Reiss. — Nous avons des méthodes qui permettent de rendre ces tests relativement innocents, non invasifs, notamment toutes les techniques d'imagerie qui permettent effectivement de voir que le cerveau est en train de développer telle ou telle pathologie. Ces méthodes-là existent. Des tests de biochimie nous permettent de voir comment fonctionnent les organes, quelle est la formule sanguine ou autres paramètres, en présence d'une maladie ou d'un produit chimique ou d'une toxicité. Nous avons donc à notre disposition pas mal d'outils non invasifs.

Nous pouvons travailler, par exemple, sur des volontaires humains pour les produits les plus importants, par exemple les additifs alimentaires et d'autres produits que nous consommons de façon massive dans notre alimentation et dans l'air que nous respirons.

Nous pouvons imaginer des tests sur des volontaires en partant de doses extrêmement faibles, en surveillant les organes de l'individu de façon à voir comment ils réagissent et donc avoir une évaluation de ces produits toxiques, d'abord sur les cellules venant de divers organes et tissus de l'organisme et ensuite sur l'organisme entier. C'est une démarche qui sera incontournable.

Vous avez beau passer par des souris, des rats ou même des singes avant de faire ces tests-là, vous serez obligés de les faire si vous voulez savoir avec certitude ce qui se passe chez l'homme.

ANNEXE 2

Toxicogenomics at VIB MicroArray Facility

Prof. Dr. Paul Van Hummelen

Microarray Facility, VIB K.U. Leuven, UZ-Gasthuisberg, Leuven, Belgium

VIB microarray facility is a unique research and service unit for « genomics » in Belgium, with 8 years of experience, state of the art technology and equipment, and at the forefront of using genomics for basic and applied research, including « toxicogenomics » and « pharmacogenomics ».

The completion of the human genome project set off a new race in technological advancements for biological and clinical research. By far, the strongest leader of this race is « transcriptomics », the study of the RNA or gene expression. Indeed, microarray (or DNA chip) analysis is a powerful way to study the human expressed genome in one go, in a variety of normal and pathological conditions. It can help to elucidate gene function, mechanisms of cell/tissue differentiation, cause and diagnosis of human disease such as cancer. Microarray technology is also an ideal tool for chemical safety screening or prediction, « toxicogenomics », or for drug discovery and targeted therapeutics « pharmacogenomics »; two fields of study strongly encouraged by the US Food and Drug Administration (FDA) for drug approval.

VIB has an established service facility for academia and industry, focusing on the use of DNA chips. The facility prides itself in offering personalized and complete services with follow-up assistance and advice. Through agreements with three major commercial microarray producers, Affymetrix, Agilent Technologies, and Nimblegen, and the expertise of in-house microarray production, the facility is able to conduct expression-profiling experiments in a large set of organisms. This includes also other applications like « single nucleotide polymorphism » (SNP), « comparative genome hybridization » (CGH), « chromatine immuno precipation » (ChIP--CHIP) and transcript mapping.

The VIB microarray facility is the only facility in its kind in Belgium with such a significant expertise and track record. Its team currently consists of 8 people mastering the latest state of the art technology and equipment. Since its startup in 1999, the microarray facility has run nearly 5,000 arrays resulting in more than 114 million data-points leading to over 30 papers in peer reviewed scientific journals. To educate and update the scientific community the facility has hosted six « microarray user meetings » featuring international speakers, each time attended by more than 200 scientists from academia as well as from pharma and biotech industries.

Since four years, the facility entered the field of toxicogenomics and pharmacogenomics and started collaborations with academia and the pharmaceutical industry. One such collaboration is with Prof. De Coen (Lab. of Ecophysiology, Biochemistry and Toxicology at University Antwerp, EBT-UA) who is currently on a temporary assignment at the European Chemicals Bureau (European Commission) to assist in the rapidly changing field of the regulatory environment within Europe (e.g. REACH program). In this assignment Prof. De Coen is advising the European Union on the implementation of the best available technologies for the risk assessment of chemicals. EBT-UA has been active in the field of ecotoxicogenomics of the past 7 years, and developed new cell-based screening systems for toxicogenomics as alternative to animal testing.

It is without any doubt that in the future « Omics » will have an important role in the way the adverse effects of substances are evaluated. Within the « Intelligent Testing Strategy » these new technologies are needed to allow cost-effective evaluations of chemical risks. Microarray technology will definitely be a key component of such evaluations and the development of alternatives to animal testing. The VIB microarray facility is unique in Belgium in its set-up, the wideness of its technology platform, the expertise of its team and its experience. This facility has acquired through the years a considerable divergence of capabilities, required to bring Belgium on the forefront of this evolution, certainly, with REACH in mind.