3-417/3 | 3-417/3 |
14 FÉVRIER 2006
Le CONSEIL D'ÉTAT, assemblée générale de la section de législation, saisi par la Présidente du Sénat, le 25 novembre 2005 et le 12 décembre 2005, d'une demande d'avis, dans un délai de trente jours prorogé jusqu'au 31 janvier 2006 (1) , sur:
1º une proposition de loi « relative aux mères porteuses » (doc. Sénat, session 2003-2004, nº 3-417/1) (39.474/AG);
2º une proposition de loi « réglementant la maternité de substitution » (doc. Sénat, session 2004-2005, nº 3-1230/1) (39.475/AG);
3º une proposition de loi « relative aux mères porteuses » (doc. Sénat, session 2004-2005, nº 3-1271/1) (39.476/AG);
4º une proposition de loi « complétant le Code pénal par des dispositions relatives à la commercialisation de la maternité de substitution et à la médiation aux fins de celle-ci » (doc. Sénat, session 2004-2005, nº 3-1319/1) (39.477/AG);
5º une proposition de loi « interdisant la maternité de substitution et le recours aux mères porteuses » (doc. Sénat, session 2005-2006, nº 3-1399/1) (39.478/AG);
6º une proposition de loi « relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes » (doc. Sénat, session 2005-2006, nº 3-1440/1) (39.525/AV),
après avoir examiné les affaires en ses séances des 17 et 24 janvier 2006, a donné à cette dernière date l'avis suivant:
1. En application de l'article 84, § 3, alinéa 1er, des lois coordonnées sur le Conseil d'État, la section de législation a fait porter son examen essentiellement sur la compétence de l'auteur de l'acte, le fondement juridique et l'accomplissement des formalités prescrites.
2. Le présent avis comporte également un certain nombre d'observations sur d'autres points, notamment sur certains aspects de la cohérence interne des propositions et de leur articulation avec le droit en vigueur.
Il ne peut toutefois s'en déduire que, dans le bref délai qui lui a été imparti, la section de législation a pu procéder à un examen exhaustif des propositions et des amendements. Le silence du présent avis sur certaines questions ne peut signifier que le texte n'appellerait pas des observations. Un examen complet aurait nécessité un délai plus long, eu égard spécialement aux questions qui peuvent se poser quant à la compatibilité des textes envisagés avec des normes supérieures et quant à leur insertion dans le droit existant, notamment en droit international privé.
Pour le même motif, il ne pourra, sauf exception, être tenu compte du projet de loi modifiant des dispositions du Code civil relatives à l'établissement de la filiation et aux effets de celle-ci, adopté par la Chambre des représentants le 20 octobre 2005 (2) et évoqué par le Sénat le 9 novembre 2005 (3) . Il appartient au législateur, le cas échéant, de vérifier l'articulation entre les dispositions des propositions à l'examen qu'il adopterait et le droit de la filiation qui résulterait de l'adoption du projet de loi examiné par les Chambres législatives.
Plan de l'avis
Nos | |
INTRODUCTION | 1 et 2 |
I. LA PORTEE DES PROPOSITIONS | 3 à 16 |
A. La proposition de loi nº 417/1 | 6 |
B. La proposition de loi nº 1230/1 | 7 |
C. La proposition de loi nº 1271/1 | 8 |
D. La proposition de loi nº 1319/1 | 9 |
E. La proposition de loi nº 1399/1 | 10 |
F. La proposition de loi nº 1440/1 | 11 à 16 |
II. LA COMPETENCE DU LEGISLATEUR FEDERAL | 17 à 22 |
A. Considérations générales | 17 et 18 |
B. La proposition nº 1230 | 19 et 20 |
C. La proposition nº 1440 | 21 et 22 |
III. LA COMPATIBILITE DES PROPOSITIONS AVEC LES NORMES SUPERIEURES | 23 à 104 |
A. Considérations générales | 23 à 33 |
1º) L'objet des propositions à l'examen et les situations de fait susceptibles d'être rencontrées | 23 à 25 |
2º) Le contexte général des propositions à l'examen et la compétence de la section de législation du Conseil d'État | 26 à 30 |
3º) Les règles supérieures de droit pertinentes — la Constitution et le droit international | 31 à 32 |
4º) Le droit international privé, la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale | 33 |
B. Les droits fondamentaux principalement en cause | 34 à 65 |
1º) Les principes d'égalité et de non-discrimination | 34 à 36 |
2º) Le droit à la dignité humaine et l'interdiction des traitements inhumains et dégradants | 37 |
3º) Le droit au respect de la vie familiale | 38 à 48 |
4º) L'obligation de prendre en considération l'intérêt de l'enfant — Le droit de l'enfant de connaître ses parents et d'être élevé par eux | 49 à 55 |
5º) Le droit au respect de la vie privée | 56 à 62 |
6º) La Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine | 63 à 65 |
C. L'application aux propositions relatives à la gestation pour autrui et à la procréation médicalement assistée des règles supérieures examinées | 66 à 104 |
1º) Introduction | 66 à 68 |
2º) L'admissibilité de l'interdiction de la gestation pour autrui | 69 à 72 |
3º) L'admissibilité de la gestation pour autrui et de la procréation médicalement assistée — Considérations générales | 73 à 82 |
4º) L'admissibilité de la gestation pour autrui et de la procréation médicalement assistée — Questions spécifiques en rapport avec les droits fondamentaux | 83 à 104 |
a) La rupture entre la mère porteuse et l'enfant porté — Le refus des commanditaires d'accueillir l'enfant | 83 à 92 |
b) L'anonymat de la mère porteuse et des donneurs de gamètes ou d'embryons | 93 à 95 |
c) L'établissement de relations personnelles entre les parents génétiques et l'enfant | 96 |
d) L'ouverture du droit à la procréation médicalement assistée et du recours à la gestation pour autrui à des personnes seules | 97 et 98 |
e) L'exigence de stabilité du couple commanditaire ou de celui faisant appel à la procréation médicalement assistée | 99 |
f) L'ouverture du droit à la procréation médicalement assistée et du recours à la gestation pour autrui à des couples homosexuels ou à des homosexuels vivant seuls | 100 à 102 |
g) La comparaison avec les règles relatives à l'adoption | 103 |
h) La prise en compte des intérêts légitimes de la personne qui partage la vie de l'adulte concerné | 104 |
IV. OBSERVATIONS PARTICULIERES | 105 à 189 |
Introduction et observations communes aux propositions nos 417, 1230 et 1271 | 105 à 107 |
A. La proposition nº 417 | 108 à 118 |
B. La proposition nº 1230 | 119 à 132 |
C. La proposition nº 1271 | 133 à 145 |
D. La proposition nº 1319 | 146 à 148 |
E. La proposition nº 1399 | 149 à 151 |
F. La proposition nº 1440 | 152 à 189 |
1º) Observations générales | 152 à 160 |
a) La compatibilité avec la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine | 152 et 153 |
b) La relation entre le régime proposé et la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient | 154 |
c) La relation entre le régime proposé et la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro | 155 à 158 |
d) La relation entre le régime proposé et la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine | 159 |
e) La relation entre le régime proposé et la réglementation sur les centres de fécondation | 160 |
2º) Observations particulières | 161 à 189 |
I. LA PORTÉE DES PROPOSITIONS
3. La section de législation du Conseil d'État est saisie de six propositions de loi portant d'une part, pour cinq d'entre elles, sur la gestation pour autrui, et, d'autre part, pour l'une d'entre elles, sur la procréation médicalement assistée.
4. Il est utile de préciser, dès à présent, quelques conventions de vocabulaire pour la suite de l'avis.
La notion de « gestation pour autrui » concerne toute situation dans laquelle une femme, appelée la « mère porteuse », accepte de mener une grossesse pour une ou plusieurs personnes et accepte de se détacher de l'enfant à la naissance au profit de ces dernières, qui seront qualifiées de « parents commanditaires ».
Lorsque la mère porteuse est également la mère génétique de celui-ci, elle sera qualifiée de « mère porteuse génétique ». Lorsque l'ovule fécondé n'est pas le sien, elle sera appelée la « mère porteuse non génétique ».
Les personnes ayant fourni leurs gamètes, leurs embryons, leurs gonades ou leurs fragments de gonades (4) seront désignées comme les « parents génétiques » (« mère génétique » ou « père génétique »). Lorsque ces personnes sont en outre commanditaires, au sens mentionné ci-avant, elles seront qualifiées de « parents commanditaires génétiques » (« mère commanditaire génétique » ou « père commanditaire génétique »).
Afin de pouvoir comparer les propositions, cette terminologie sera utilisée pour toutes les propositions, même si elles en utilisent une autre. Lorsque ce sont les termes des propositions qui sont utilisées dans le présent avis, cela résultera du texte, soit en raison d'une précision expresse, soit en raison du contexte.
5. Pour l'essentiel, la portée des propositions à l'examen peut être résumée comme suit.
Cette présentation n'est pas exhaustive. Certains aspects plus particuliers peuvent être mentionnés dans la partie IV de l'avis qui comprend des observations particulières sur chaque proposition examinée séparément.
La description de la portée des propositions est basée sur le dispositif des propositions elles-mêmes et ne tient pas compte d'éléments distincts éventuels qui seraient relatés dans les développements.
Un tableau comparatif des cinq propositions relatives à la gestation pour autrui, comprenant une synthèse plus complète, figure aux pages 44 à 86 du rapport fait au nom du groupe de travail « bioéthique » du Sénat sur la proposition de loi nº 417 (5) .
A. La proposition de loi nº 417/1 relative aux mères porteuses, déposée par Mme Defraigne (doc. Sénat, 2003-2004, nº 3-417/1) (6)
Cette proposition est inscrite sous le numéro 39.474/AG du rôle de la section de législation du Conseil d'État. Elle sera qualifiée comme suit dans la suite de l'avis: « proposition nº 417 ».
6. Selon la proposition nº 417, toute convention ayant pour but ou effet indirect de réaliser une gestation pour autrui (dans la proposition « une gestation pour le compte d'autrui ») est nulle (article 3). Par dérogation à ce principe, un couple stérile (composé « [d]'un homme et [d]'une femme concubins ou mariés et non séparés de fait, [et] qui ne sont pas aptes à la génération ») peut avoir recours à la gestation pour autrui dans les conditions fixées par la proposition (article 5, § 1er).
Une des conditions consiste en la constatation écrite par un gynécologue de l'impossibilité physiologique pour la mère commanditaire d'être enceinte du père commanditaire ou du très grand risque d'une grossesse pour sa santé ou pour celle de l'enfant; d'autres conditions concernent l'état civil et l'âge de la mère porteuse et le lien éventuel de parenté avec les parents commanditaires, l'obligation pour la mère porteuse d'avoir un entretien avec un psychiatre, l'information par un gynécologue et un certificat d'absence de risques prévisibles (article 5, §§ 1er et 2).
Préalablement à la mise en œuvre du processus de fécondation in vitro ou d'insémination artificielle, les parents commanditaires et la mère porteuse concluent une convention constatée par un notaire dans un acte authentique, qui doit être remise au centre de médecine de la reproduction (7) (article 5, § 3). Le non-respect des obligations découlant de la convention est sanctionné par le paiement (éventuel) de dommages et intérêts (article 5, § 3, alinéa 4). Les frais afférents à la grossesse et aux examens médicaux imposés par la proposition sont à charge des parents commanditaires (article 5, § 4).
En ce qui concerne l'origine des gamètes à partir desquels l'enfant est conçu, la proposition est ambiguë. D'une part, il est dit que la convention prévoit que l'enfant sera conçu à partir des gamètes des parents commanditaires (article 5, § 3, alinéa 2), mais d'autre part, il est question tant d'une mère porteuse génétique que d'une mère porteuse non génétique (dans la proposition: « mère porteuse traditionnelle », qui est une mère porteuse inséminée artificiellement avec le sperme du père commanditaire ou d'un donneur, ou « mère porteuse gestationnelle », qui est une mère porteuse d'un enfant conçu par fécondation in vitro à partir des gamètes des parents commanditaires) (article 6 et les définitions de l'article 2).
La proposition règle également les effets d'une gestation pour autrui régulière sur la déclaration et l'acte de naissance (ce sont les parents commanditaires qui sont mentionnés dans l'acte comme étant les père et mère, du moins selon l'article 6 de la proposition; l'article 8 donne plutôt le sentiment que tant les parents commanditaires que la mère porteuse sont mentionnés) et détermine dès lors également les effets de la filiation juridique (articles 6 à 8) ainsi que les possibilités de contestation de la maternité et de la paternité (articles 9 et 10).
Le recours à la gestation pour autrui dans des circonstances ne répondant pas aux conditions fixées n'est ni expressément interdit, ni érigé en infraction pénale. En revanche, l'interdiction de rétribuer une personne de sexe féminin pour qu'elle agisse à titre de mère porteuse est prévue, de même que celle de l'offre de verser une telle rétribution ou de faire de la publicité pour une telle rétribution, ainsi que celle de l'intervention en qualité d'intermédiaire ou du fait de faire appel à un intermédiaire en vue de la conclusion d'une convention visée à l'article 3 de la proposition (article 4). Sauf si les conditions prévues à l'article 5 sont remplies, inciter une mère porteuse à abandonner son enfant à naître, soit dans un but lucratif, soit par don, promesse, menace ou abus d'autorité, et le fait de s'entremettre dans un but lucratif entre des parents commanditaires et une mère porteuse sont érigés en infraction pénale (article 11).
B. La proposition de loi nº 1230/1 réglementant la maternité de substitution, déposée par M. Vankrunkelsven (doc. Sénat, 2004-2005, nº 3-1230/1) (8)
Cette proposition est inscrite sous le numéro 39.475/AG du rôle de la section de législation du Conseil d'État. Elle sera qualifiée comme suit dans la suite de l'avis: « proposition nº 1230 ».
7. La proposition nº 1230 prévoit également que toute convention relative à la gestation pour autrui (« convention ayant pour but ou effet direct ou indirect de réaliser une grossesse pour le compte d'autrui ») est nulle (article 3 de la proposition), mais « une femme stérile » peut recourir à une mère porteuse moyennant le respect d'un certain nombre de conditions (article 4).
Une déclaration écrite par un gynécologue de l'impossibilité physiologique de la grossesse de la femme ou du danger de celle-ci pour la vie de la femme ou de l'enfant est requise. La proposition distingue les cas de recours à une mère porteuse génétique (appelée la « maternité de substitution de basse technologie » dans la proposition) de ceux où il est recouru à une mère porteuse non génétique (« maternité de substitution de haute technologie »). D'autres conditions ont trait à l'âge de la mère porteuse et de la mère commanditaire, au fait que la mère porteuse doit avoir donné naissance à au moins un enfant vivant et à l'absence de risque accru de complications lors de la grossesse. La mère commanditaire et la mère porteuse doivent s'adresser à un « centre de la maternité de substitution » (voir ci-après) chargé d'un accompagnement médical, psychologique, social et juridique, et les « deux parties » doivent être disposées « à se soumettre [...] à un accompagnement approprié durant la période précédant la réalisation de la grossesse, au cours de la grossesse et pendant la première année qui suit la naissance de l'enfant ». Les parents commanditaires et les « parents porteurs » sont de nationalité belge ou ont une résidence fixe en Belgique (article 4, §§ 1er à 3).
Le(s) parent(s) commanditaire(s) et la mère porteuse concluent une convention constatée par un « acte notarié authentique ». La proposition détermine les éléments que doit au minimum contenir la convention et charge le Roi d'en fixer le contenu. Si une partie ne respecte pas la convention, elle s'expose à devoir payer des dommages et intérêts. Le(s) parent(s) commanditaires supportent tous les frais liés à la grossesse et aux examens médicaux imposés par la loi proposée (article 4, §§ 4 et 5).
L'article 6 de la proposition charge le Roi de créer un centre pluraliste francophone et un centre pluraliste néerlandophone de la maternité de substitution, liés à un ou plusieurs hôpitaux universitaires. Ces centres doivent publier tous les deux ans un rapport relatif à la pratique de la gestation pour autrui et faire une étude de suivi à long terme « d'un maximum d'enfants nés dans le cadre d'une maternité de substitution.
La proposition règle le droit à l'intervention de l'assurance maladie (article 7).
La proposition modifie la législation en matière d'adoption contenue dans le Code civil et dans le Code judiciaire en ce sens que la convention vaut « déclaration d'adoption préalable », que le consentement à l'adoption peut être donné dès la naissance et que la procédure judiciaire en matière d'adoption est adaptée (articles 8 à 12). La proposition règle aussi les conséquences de la gestation pour autrui en ce qui concerne la recevabilité des actions en contestation de maternité et de paternité (articles 13 à 15).
Il est interdit de rétribuer une personne pour qu'elle agisse à titre de mère porteuse, de faire une proposition ou de la publicité pour une telle rétribution, de servir d'intermédiaire ou de faire appel à un intermédiaire en vue de la conclusion d'une convention (article 5). Prêter son concours à la réalisation d'une gestation pour autrui sans respecter les conditions fixées est érigé en infraction pénale. Il en va de même pour le fait d'inciter une mère porteuse à abandonner son enfant à naître, dans un but lucratif, par don, promesse, menace ou abus d'autorité, sauf s'il est satisfait aux conditions fixées, ainsi que pour le fait de s'entremettre dans un but lucratif entre des parents commanditaires et une mère porteuse (article 16).
C. La proposition de loi nº 1271/1 relative aux mères porteuses, déposée par Mmes Vanlerberghe et De Roeck (doc. Sénat, 2004-2005, nº 3-1271/1) (9)
Cette proposition est inscrite sous le numéro 39.476/AG du rôle de la section de législation du Conseil d'État. Elle sera qualifiée comme suit dans la suite de l'avis: « proposition nº 1271 ».
8. Comme les propositions nos 417 et 1230, la proposition nº 1271 prévoit que toute convention qui a pour objet une gestation ou un accouchement pour le compte d'autrui est nulle (article 3). Par dérogation à ce principe, un parent commanditaire (« [un] homme, [une] femme ou [un] couple pour qui la mère porteuse conçoit l'enfant et qui assume l'autorité parentale sur l'enfant et son éducation ») peut recourir à une mère porteuse selon les modalités définies par la proposition (article 4, § 1er).
Les conditions sont, outre la constatation écrite par un médecin de l'impossibilité physiologique « du parent commanditaire » de procréer ou du trop grand risque d'une grossesse pour la santé de la femme ou de l'enfant, l'existence d'un lien de parenté génétique entre l'enfant et au moins un parent commanditaire (article 4, §§ 1er et 2) et le fait que les gamètes ne peuvent être ceux du partenaire de la mère porteuse (article 7), l'obligation de résidence en Belgique du parent commanditaire et de la mère porteuse, des conditions d'âge, l'obligation pour la mère porteuse d'avoir déjà donné naissance à un enfant sans complication, le test « MST » négatif de la mère porteuse, de son partenaire et du (des) parent(s) commanditaire(s) dont les gamètes sont utilisés et l'obligation imposée à la mère porteuse et aux parents commanditaires d'avoir eu au moins deux entretiens avec un psychiatre ou avec un psychologue (attaché à un centre de fertilité en ce qui concerne la mère porteuse) (articles 5 et 6).
Le parent commanditaire et la mère porteuse concluent « un accord » constaté dans un acte authentique; une copie en est envoyée au centre de médecine reproductive concerné (article 4, § 3). La proposition n'envisage pas les conséquences du non-respect de la convention. Les frais sont à la charge du parent commanditaire (article 8).
L'acte de naissance mentionne le nom du parent commanditaire. Les effets en matière de recevabilité des demandes « de contestation de la filiation maternelle ou paternelle » sont sommairement traités (article 9).
Enfin, la proposition érige en infraction pénale l'exercice de toute forme de contrainte sur une personne en vue de l'obliger à devenir mère porteuse (article 10), la rétribution d'une (candidate) mère porteuse, la proposition d'une telle rétribution ou la publicité pour celle-ci ou encore la proposition de biens ou de services en échange de l'acceptation de devenir mère porteuse (article 11). La proposition interdit et sanctionne le fait d'intervenir en tant qu'intermédiaire ou de recourir à un intermédiaire, le fait de mettre sur pied une organisation incitant les femmes à la gestation pour autrui, la publicité pour la gestation pour autrui et le fait de faire connaître son désir de devenir parent commanditaire par la voie d'annonces ou d'autres médias (article 12).
D. La proposition de loi nº 1319/1 complétant le Code pénal par des dispositions relatives à la commercialisation de la maternité de substitution et à la médiation aux fins de celle-ci, déposée par Mme De Schamphelaere et consorts (doc. Sénat, 2004-2005, nº 3-1319/1) (10)
Cette proposition est inscrite sous le numéro 39.477/AG du rôle de la section de législation du Conseil d'État. Elle sera qualifiée comme suit dans la suite de l'avis: « proposition nº 1319 ».
9. La proposition nº 1319 introduit un chapitre relatif à la gestation pour autrui dans le titre VII du livre II du Code pénal. Sont interdits et punis, lorsqu'ils sont commis « dans le but d'obtenir les droits parentaux sur un enfant », la rétribution d'une personne pour qu'elle agisse à titre de mère porteuse, l'offre de verser une telle rétribution ou le fait de faire, de charger de faire, d'éditer, de distribuer ou de diffuser de la publicité pour une telle rétribution (article 3), le fait de se faire connaître publiquement ou de se proposer comme mère porteuse et de se faire rétribuer pour cette gestation pour autrui (article 4), le fait de servir d'intermédiaire en vue de la conclusion d'une convention et le fait de s'entremettre entre un (des) parent(s) commanditaire(s) et une mère porteuse (article 5) et le fait d'inciter une femme, soit dans un but lucratif, soit par don, promesse, menace ou abus d'autorité, à abandonner son enfant à naître (article 6).
E. La proposition de loi nº 1399/1 interdisant la maternité de substitution et le recours aux mères porteuses, déposée par Mme Nyssens (doc. Sénat, 2004-2005, nº 3-1399/1) (11)
Cette proposition est inscrite sous le numéro 39.478/AG du rôle de la section de législation du Conseil d'État. Elle sera qualifiée comme suit dans la suite de l'avis: « proposition nº 1399 ».
10. La proposition nº 1399 qui, dès lors que ses dispositions ne sont pas inscrites dans le Code pénal, conduirait à une loi pénale spéciale, contient les dispositions répressives: « prohibition formelle » de recourir à une mère porteuse, qu'elle soit une mère porteuse génétique ou une mère porteuse non génétique, « pour quelque cause que ce soit » (article 3), interdiction de servir d'intermédiaire, de faire appel à un intermédiaire ou de rétribuer sous quelque forme que ce soit une personne en vue de conclure une convention relative à la gestation pour autrui (article 4, alinéa 2), interdiction de la publicité sous quelque forme que ce soit aux fins de conclure une convention relative à la gestation pour autrui ou incitant les femmes à servir de mère porteuse (article 5), interdiction de rétribuer une femme, de quelque manière que ce soit pour qu'elle serve de mère porteuse (article 6). Outre une peine de prison ou une amende, une condamnation peut également entraîner l'interdiction d'exercer toute activité médicale et de recherche pendant cinq ans (articles 7 et 8).
La proposition prévoit en outre que toute convention ayant pour but ou pour effet direct ou indirect de réaliser une gestation pour autrui est nulle (article 4, alinéa 1er).
F. La proposition de loi nº 1440/1 relative à la procréation médicalement assistée et à la destination des embryons surnuméraires et des gamètes, déposée par Mme Defraigne, M. Vankrunkelsven, Mme De Roeck, M. Mahoux et Mme Durant (doc. Sénat, 2004-2005, nº 3-1440/1) (12)
Cette proposition est inscrite sous le numéro 39.525/AG du rôle de la section de législation du Conseil d'État. Elle sera qualifiée comme suit dans la suite de l'avis: « proposition nº 1440 ».
11. La proposition nº 1440 entend fixer les conditions dans lesquelles il peut être fait usage de techniques médicales de procréation médicalement assistée, soit par insémination artificielle, soit par fécondation in vitro (FIV) (articles 3 à 9). Elle réglemente également les cas dans lesquels le diagnostic génétique pré-implantatoire est permis (articles 66 à 72). La proposition vise aussi à réglementer le don et la conservation des embryons et gamètes surnuméraires de même que l'utilisation de gamètes à des fins de recherche scientifique (articles 10 à 65).
12. En ce qui concerne la procréation médicalement assistée (PMA), la proposition de loi prévoit que seuls les centres de fécondation sont autorisés à pratiquer la fécondation in vitro et la cryoconservation (de gamètes, embryons surnuméraires, gonades et fragments de gonades). Le Roi est habilité à fixer des conditions de qualité et de sécurité relatives à une série d'actes portant sur les gamètes, les embryons surnuméraires, les gonades et fragments de gonades (article 3).
Les centres de fécondation peuvent établir eux-mêmes les modalités de la procédure suivie dans le cadre de leur mission (article 4). Pour certains actes relatifs à la procréation médicalement assistée, des conditions d'âge minimal et maximal sont fixées (article 5). Moyennant certaines conditions, les centres de fécondation peuvent refuser d'accéder à la demande du (des) parent(s) commanditaire(s) (article 6).
Le centre de fécondation a certaines obligations de vérification et d'information à l'égard des parents commanditaires (article 7). Une convention est conclue avec les parents commanditaires (article 8) qui, à certaines conditions, peut être modifiée par la suite (article 9).
13. Les embryons surnuméraires qui résultent d'une fécondation in vitro peuvent être cryoconservés, détruits, utilisés à des fins de recherche scientifique ou être donnés (article 10). Aussi longtemps que les parents commanditaires disposent d'embryons cryoconservés sains, il ne peut être constitué de nouveaux embryons (article 11).
Les centres de fécondation doivent informer les parents commanditaires au sujet de la cryoconservation (article 13) et conclure avec eux une convention portant sur la destination des embryons cryoconservés (article 14). Dans l'intervalle, il ne peut être disposé des embryons déjà cryoconservés (article 12). Sous certaines conditions, la convention peut être modifiée par la suite (article 15).
La proposition règle les conditions dans lesquelles les embryons cryoconservés peuvent être implantés postérieurement au décès d'un parent commanditaire (articles 16 et 17). Elle règle également le délai de conservation des embryons cryoconservés et les conditions de prolongation de ce délai (articles 18 et 19).
En ce qui concerne l'utilisation à titre gratuit des embryons surnuméraires à des fins de recherche médicale, la proposition fixe un certain nombre de conditions complétant sur ce point la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro (articles 20 à 22).
Le don anonyme et gratuit d'embryons surnuméraires est autorisé, sauf dans un certain nombre de cas (articles 23 à 26). La proposition règle la filiation (article 27) et garantit l'anonymat des donneurs (article 28). Certaines données relatives aux donneurs sont cependant mises à la disposition de la Commission de la protection de la vie privée (article 35) et peuvent être communiquées moyennant certaines conditions (article 36). Les centres de fécondation doivent informer les donneurs d'embryons (article 29) et conclure avec eux une convention concernant le don (article 30). La procédure suivie doit également être portée à la connaissance des receveurs (article 31) avec qui il y a également lieu de conclure une convention (article 33) après qu'ils ont introduit une demande écrite (article 32). Le centre de fécondation fixe le délai de conservation des embryons éventuellement cryoconservés qui sont destinés à être donnés (article 34).
14. La proposition contient un certain nombre de dispositions relatives au prélèvement, à l'utilisation et à la conservation des gamètes. Elles s'appliquent également aux fragments de gonades (article 39).
Les gamètes ne peuvent être prélevés qu'en vue d'un projet parental, d'une recherche scientifique ou d'un don (article 37). Leur usage requiert l'autorisation des personnes concernées (article 38).
Lorsque les gamètes ne sont pas utilisés immédiatement, ils peuvent être cryoconservés en vue d'une utilisation pour un projet parental futur, d'une recherche scientifique ou d'un don (article 40).
Les centres de fécondation doivent informer les parents commanditaires sur le prélèvement, la conservation et l'utilisation des gamètes (article 41) et conclure avec eux une convention relative à la conservation et la destination future des gamètes (article 42). Sous certaines conditions, la convention peut être modifiée par la suite (article 43).
La proposition règle les conditions dans lesquelles l'insémination de gamètes après le décès d'un parent commanditaire est permise (articles 44 et 45). Elle règle également le délai de cryoconservation et les conditions de prolongation de celui-ci (articles 46 et 47).
Les gamètes peuvent être utilisés gratuitement pour la recherche scientifique (article 48). Les centres de fécondation ont certaines obligations d'information à l'égard des personnes chez qui les gamètes ont été prélevés (article 49) et concluent avec elles une convention (article 50). Le centre de fécondation fixe le délai de conservation de ces gamètes (article 51).
Le don anonyme et gratuit d'embryons surnuméraires est autorisé, sauf dans certains cas (articles 52 à 55). La proposition règle la filiation (article 56) et garantit l'anonymat des donneurs (article 57). Certaines données relatives aux donneurs sont cependant mises à la disposition de la Commission de la protection de la vie privée (article 64) en peuvent, sous certaines conditions, être communiquées (article 65). Les centres de fécondation doivent informer les donneurs de gamètes (article 58) et concluent avec eux une convention concernant le don (article 59). Les receveurs doivent également être informés de la procédure suivie (article 60) et une convention doit également être conclue avec eux (article 62) après l'introduction d'une demande écrite (article 61). Le centre de fécondation fixe le délai de conservation des gamètes éventuellement cryoconservés, destinés à être donnés (article 63).
15. Le diagnostic génétique préimplantatoire est interdit, sauf dans certains cas (articles 67 et 68). Les centres de fécondation doivent informer les parents commanditaires (article 66) et conclure avec eux une convention (article 69). La proposition garantit le droit à la protection de la vie privée des parents commanditaires (article 70).
Un diagnostic génétique préimplantatoire ne peut être opéré qu'en collaboration exclusive avec un centre de génétique humaine (articles 71 en 72).
16. Les transgressions des interdictions sont érigées en infractions pénales (article 73) et peuvent donner lieu à une interdiction d'exercer toute activité médicale ou de recherche pendant cinq ans (article 74).
II. LA COMPÉTENCE DU LÉGISLATEUR FÉDÉRAL
A. Considérations générales
17. D'une manière générale, les propositions à l'examen se situent dans le cadre des compétences fédérales.
18. Sur quelques points, certaines des propositions empiètent toutefois sur les compétences des communautés ou des régions, comme il est exposé ci-après, sous les nos 19 à 22.
B. La proposition nº 1230
19. L'article 6 de la proposition nº 1230 charge le Roi de créer un centre pluraliste francophone et un centre pluraliste néerlandophone de la maternité de substitution liés à un ou plusieurs hôpitaux universitaires. La mission de ces centres consiste à assurer
« l'accompagnement médical, psychique, social et juridique du (des) parent(s) demandeur(s) et de la mère porteuse ».
Ils doivent, en outre, publier tous les deux ans un rapport relatif à la pratique de la gestation pour autrui et faire une étude de suivi à long terme
« d'un maximum d'enfants nés dans le cadre d'une maternité de substitution ».
Une des conditions de régularité d'une gestation pour autrui est que la mère commanditaire et la mère porteuse s'adressent à un de ces centres (13) . Les « deux parties » doivent également être disposées à
« se soumettre [...] à un accompagnement approfondi durant la période précédant la réalisation de la grossesse, au cours de la grossesse et pendant la première année qui suit la naissance de l'enfant » (14) .
À propos de ces dispositions et par analogie avec la répartition des compétences en matière d'interruption de grossesse (15) et en matière d'adoption (16) , on peut soutenir que l'autorité fédérale est compétente pour fixer les conditions (civiles et pénales) d'une gestation pour autrui régulière mais que l'aide, l'accompagnement et l'assistance aux (candidates) mères porteuses et aux (candidats) parents commanditaires relèvent des communautés en vertu de leur compétence en matière de santé (17) (18) et en matière d'aide aux personnes, en particulier en ce qui concerne de la politique familiale (19) et la protection de la jeunesse (20) .
L'autorité fédérale peut ainsi faire du recours à un centre dispensant un accompagnement médical, psychologique, social et juridique, une condition de régularité de la gestation pour autrui.
Les communautés sont, en revanche, compétentes pour établir des règles relatives à ces centres, ainsi que pour leur constitution et leur agrément. Si l'autorité fédérale souhaite toutefois être certaine que des centres soient créés ou agréés, mieux vaudrait qu'elle s'attache à tenter de conclure un accord de coopération à ce sujet avec les communautés.
20. En ce qui concerne la mission des centres en matière de rapport et d'étude de suivi à long terme (21) , le Conseil d'État est d'avis que celle-ci peut assurément être confiée à un service à établir et à réglementer par l'autorité fédérale, dans la mesure où l'intention est de collecter l'information et de faire réaliser des études sur l'application de la loi fédérale proposée relative à la gestation pour autrui qui découlerait de la proposition (22) .
C. La proposition nº 1440
21. Dans la mesure où la proposition nº 1440 concerne la recherche scientifique sur les gamètes et les embryons surnuméraires, le Conseil d'État doit émettre une réserve.
Dans les avis 28.369/3 du 5 janvier 1999 et 33.641/3 du 18 septembre 2002 (23) portant respectivement sur un projet de loi et sur une proposition de loi devenus la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons, le Conseil d'État fait observer ce qui suit:
« Le régime proposé contient des dispositions relatives à la recherche scientifique. Une première question qui se pose en l'occurrence est de savoir si l'autorité fédérale est compétente pour légiférer dans ce domaine.
À défaut d'une attribution de compétence en matière de protection des embryons aux communautés ou aux régions, c'est en principe l'autorité fédérale qui est compétente pour réglementer la recherche scientifique dans ce domaine (voir, a contrario, l'article 6bis, § 1er, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles).
Dans l'exercice de cette compétence, l'autorité fédérale doit veiller à ne pas rendre impossible ou exagérément difficile l'exercice des compétences des communautés et des régions (24) . En l'espèce, il s'agit notamment de la compétence des communautés en matière d'enseignement, dès lors que la recherche visée dans la proposition est effectuée, pour une large part, dans des établissements universitaires. Il est à noter à ce sujet que les dispositions proposées ne concernent qu'un type précis de recherche scientifique, que la proposition n'interdit pas complètement cette recherche et qu'elle associe des représentants des centres de recherche universitaires au travail de la Commission. Il peut dès lors en être conclu que, par la proposition de loi, l'autorité fédérale respecte le principe de proportionnalité et reste par conséquent dans les limites de ses compétences. »
La question se pose cependant de savoir si l'arrêt nº 164/2005 de la Cour d'arbitrage du 16 novembre 2005 n'apporte pas un éclairage nouveau sur cette analyse des compétences. Dans cet arrêt la Cour a estimé que l'autorité fédérale était en partie incompétente pour légiférer en matière d'expérimentation humaine en se fondant sur les considérations suivantes:
« B.4.2. Le législateur fédéral est compétent pour la réglementation en matière de médicaments (doc. Sénat, 1979-1980, 434-1, p. 7, doc. Sénat, 1979-1980, 434-2, p. 125, et doc. Chambre, 1979-1980, 627/10, p. 52). Sur la base de cette compétence, il peut édicter une réglementation pour des essais sur la personne humaine, réalisés dans le cadre de la recherche scientifique biomédicale portant sur les médicaments, visée à l'article 2, 7º, de la loi entreprise, et il ne viole pas les règles qui déterminent les compétences respectives de l'État, des communautés et des régions en matière de recherche scientifique.
B.4.3. Comme le fait apparaître l'article 2, 11º, de la loi attaquée, la réglementation critiquée ne s'applique cependant pas uniquement aux expérimentations à l'aide de médicaments mais également de manière générale à d'autres études ou investigations sur la personne humaine en vue du développement des connaissances biologiques ou médicales, qui sont effectuées par un médecin ou une autre personne visée à l'arrêté royal nº 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions des soins de santé.
B.4.4. Certaines matières sur lesquelles peut porter cette recherche scientifique sont incontestablement de la compétence du législateur fédéral. C'est ainsi, entre autres, que les thérapies expérimentales propres à l'exercice de l'art de guérir visé à l'arrêté royal nº 78 du 10 novembre 1967 relèvent de la compétence du législateur fédéral.
B.4.5. En raison de la manière fort large dont la loi définit son champ d'application à l'article 2, 11º, elle peut toutefois également s'appliquer dans des matières qui relèvent de la compétence des communautés et des régions. Ainsi, il ressort des pièces déposées par le gouvernement flamand que la loi est censée s'appliquer, entre autres, soit à des études et investigations menées dans le cadre des soins de santé préventifs ou de la pratique sportive dans le respect des impératifs de santé, lesquelles relèvent, en vertu des articles 5, § 1er, I, 2º, et 4, 9º, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles, de la compétence des communautés, soit à des études et investigations réalisées dans le cadre de la protection de l'environnement, ce qui constitue une compétence régionale en vertu de l'article 6, § 1er, II, 1º, de cette même loi spéciale.
De surcroît, il ne saurait être exclu que la loi puisse s'appliquer dans d'autres domaines relevant de la compétence des communautés ou des régions.
B.5.1. Sans doute l'article 6bis, § 3, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles permet-il au législateur fédéral, à certaines conditions, de prendre des initiatives, de créer des structures ou de prévoir des moyens financiers en vue de la recherche scientifique dans les matières qui relèvent de la compétence des communautés ou des régions.
B.5.2. Indépendamment du fait que, dans un tel cas, l'autorité fédérale doit, préalablement à sa décision, soumettre une proposition de coopération aux communautés et aux régions, ce qui n'a pas eu lieu en l'occurrence, il n'est pas satisfait aux exigences posées par le législateur spécial en ce qui concerne les expérimentations menées sur la personne humaine.
B.6. Il découle de ce qui précède que le législateur fédéral a excédé sa compétence en édictant une réglementation relative à des expérimentations sur la personne humaine qui va au-delà des essais cliniques visés à l'article 2, 7º et 11º, de la loi attaquée. »
Sur la base des considérations précitées, la Cour d'arbitrage a dès lors annulé, à l'article 2, 11º, de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine, les termes « étude ou investigation ». Par cette disposition, l'autorité fédérale excédait ses compétences en matière de politique de santé et de recherche scientifique dès lors que cette disposition était formulée en des termes trop larges et n'était pas circonscrite aux compétences fédérales en matière de politique de santé. Ainsi, selon la Cour d'arbitrage, la loi était également applicable aux matières qui relèvent de la compétence des communautés et des régions, par exemple en matière de médecine préventive.
Il peut se déduire de l'arrêt qu'une réglementation concernant la recherche scientifique, visant le développement des connaissances biologiques ou médicales, doit être spécifiquement axée sur les compétences fédérales en matière de soins de santé, telles que l'exercice de la médecine, pour pouvoir relever complètement de la compétence de l'autorité fédérale.
C'est pourquoi l'article 117 de la loi du 27 décembre 2005 portant des dispositions diverses a adapté comme suit la définition de l'expérimentation que donne l'article 2, 11º, de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine:
« 11º Expérimentation: essai, étude ou investigation menée sur la personne humaine qui a pour objectif le développement des connaissances propres à l'exercice des professions de soins de santé tel que visé à l'arrêté royal nº 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions de soins de santé. »
Dans son avis 39.466/3 du 29 novembre 2005 sur l'amendement qui a donné lieu à cette disposition légale, le Conseil d'État a formulé l'observation suivante concernant un texte légèrement différent proposé initialement:
« Sur la base du texte proposé par l'amendement, la loi du 7 mai 2004 s'appliquerait aux essais menés sur la personne humaine, aux études ou investigations qui ont pour objectif « le développement des connaissances propres à l'exercice des professions de soins de santé tel que visé à l'arrêté royal nº 78 du 10 novembre 1967 relatif à l'exercice des professions de soins de santé.
L'intention des auteurs du projet d'adapter la définition figurant à l'article 2, 11º de la loi du 7 mai 2004, compte tenu de l'arrêt nº 164/2005 de la Cour d'arbitrage, serait mieux exprimée dans le texte néerlandais de cette disposition (25) en écrivant, sur l'exemple du texte français, « met het oog op de ontwikkeling van kennis gericht op de in het koninklijk besluit nr. 78 ... (date et intitulé) bedoelde uitoefening van de gezondheidszorgberoepen ». Ainsi, il ne fera pas de doute que la loi du 7 mai 2004 n'est pas applicable aux expérimentations qui relèvent de la compétence des communautés ou des régions, comme par exemple en ce qui concerne la pratique du sport dans le respect des impératifs de santé ou la protection de l'environnement ».
22. La réserve de compétence que la Cour d'arbitrage a formulée dans son arrêt nº 164/2005 à l'égard du régime légal en matière d'expérimentation sur la personne humaine a également des conséquences pour la compétence en matière de recherche scientifique sur les embryons et les gamètes. Il est concevable en effet que cette recherche sur les embryons ou sur les gamètes porte sur des matières qui relèvent, en tout ou en partie, des compétences matérielles des communautés ou des régions. Citons par exemple la recherche relative à l'influence de la pollution environnementale sur la qualité des spermatozoïdes.
Force est de constater, toutefois, que la proposition nº 1440 ne règle que fort succinctement sur le fond la recherche scientifique en tant que telle. En fait, la proposition se borne à régler la provenance du matériau (gamètes et embryons), le principe de l'affectation gratuite, la fourniture de l'information et la convention entre les donneurs et le centre de fécondation.
Il paraît pourtant souhaitable, comme cela a été le cas en ce qui concerne la législation relative aux expérimentations sur la personne humaine, d'insérer une réserve de compétence expresse dans le régime proposé. À cet effet, on pourrait s'inspirer de l'article 2, 11º, de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine (26) qui vient d'être modifié.
III. LA COMPATIBILITÉ DES PROPOSITIONS AVEC LES NORMES SUPÉRIEURES
A. Considérations générales
1º) L'objet des propositions à l'examen et les situations de fait susceptibles d'être rencontrées
23. La gestation pour autrui est susceptible de se pratiquer dans un nombre assez important d'hypothèses, que l'on peut présenter comme suit, étant entendu que cette classification n'est pas exhaustive, compte tenu des évolutions en la matière, notamment sur le plan technique, et sous la réserve d'un examen plus approfondi résultant d'une meilleure connaissance des réalités sociales en ces matières, au sujet desquelles le Conseil d'État ne dispose pas d'informations suffisantes.
Ces distinctions sont faites principalement:
a) selon que la mère porteuse est génétique ou non;
b) selon l'identité du ou des commanditaires;
c) en fonction de la question de savoir si le commanditaire peut agir seul ou doit le faire en couple;
d) en fonction de l'origine des gamètes utilisées.
24. Les commanditaires peuvent former un couple hétérosexuel ou homosexuel.
Il peut s'agir d'un homme seul ou une d'une femme seule.
Ensuite, si la mère porteuse est la mère génétique, les gamètes femelles proviennent de la mère porteuse mais les gamètes mâles ne doivent pas nécessairement provenir du commanditaire; ils peuvent provenir d'un tiers donneur. L'embryon qui sera implanté dans l'utérus de la mère porteuse peut avoir été conçu soit avec les gamètes du couple commanditaire soit avec des gamètes provenant pour partie du commanditaire et pour partie d'un tiers, soit avec des gamètes provenant uniquement de tiers.
Enfin, les donneurs peuvent être anonymes ou non et apparentés ou non aux commanditaires. La mère porteuse peut, elle aussi, éventuellement, être apparentée aux commanditaires et aux donneurs et, partant, à l'enfant.
Lorsque les gamètes proviennent de tiers, l'enfant pourrait avoir un père et une mère génétiques (ceux qui ont fourni les gamètes), un père et une mère sociaux (les commanditaires) et une mère gestatrice (la mère porteuse, qui en outre peut être mariée). De plus, le père ou la mère génétiques de l'enfant ainsi que la mère porteuse pourraient en même temps être son oncle, sa tante, ses grand-parents, ou avoir encore un autre lien familial.
Peut également être considérée comme gestation pour autrui l'hypothèse où une femme et un homme s'engageraient à faire un enfant de manière tout à fait naturelle en vue de le confier aux commanditaires.
25. D'autres distinctions doivent être envisagées, par exemple selon que la mère porteuse ou le ou les commanditaires vivent en couple ou non, que ce couple dispose d'un statut issu du mariage, de la cohabitation légale ou d'une simple cohabitation de fait, ou selon le degré de stabilité de cette cohabitation de fait.
D'autres différences peuvent provenir de ce que la mère porteuse a déjà d'autres enfants ou non, du nombre de ces enfants antérieurs, de leur âge, etc.
2º) Le contexte général des propositions à l'examen et la compétence de la section de législation du Conseil d'État
26. Les propositions de loi à l'examen soulèvent des questions d'ordre éthique, anthropologique, symbolique, philosophique, sociologique, psychologique et autres, difficiles et fondamentales, qui en outre invitent le législateur, comme il sera exposé plus bas (27) , à mettre en balance la protection d'intérêts légitimes, voire de droits fondamentaux parfois difficilement conciliables.
Dans son avis portant les nos 38.817/AG et suivants, donné sur des propositions de loi et des amendements relatifs à l'adoption monosexuée et la beau-parenté, le Conseil d'État a fait observer ce qui suit:
« 51. Certaines des pratiques évoquées ci-avant, au nº 49, soulèvent des questions éthiques, mais aussi juridiques importantes.
Plus particulièrement, le recours à la maternité de substitution ou maternité « d'emprunt » appelle de sérieuses objections quant au principe de l'indisponibilité du corps humain, de la dignité de la femme « porteuse » et du respect des principes résultant de la Convention relative aux droits de l'enfant quant à la continuité entre la parentalité, en ce compris la maternité, et la responsabilité des parents à l'égard de l'enfant » (28) .
En ce qui concerne le principe de l'indisponibilité du corps humain et la dignité de la femme porteuse, ces considérations se fondaient sur l'état du droit positif actuellement en vigueur, tel qu'il résulte en effet des articles 6, 1128, 1131 et 1133 du Code civil et des principes généraux du Code civil.
Selon les articles 6, 1131 et 1133 du Code civil, sont nulles les conventions qui dérogent aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs, les obligations fondées sur une cause illicite, c'est-à-dire contraire aux bonnes moeurs ou à l'ordre public, ne pouvant avoir aucun effet.
L'article 1128 du Code civil est une disposition législative intéressant l'ordre public et les bonnes moeurs, qui dispose:
« Il n'y a que les choses qui sont dans le commerce qui puissent être l'objet de conventions. »
Selon l'assemblée plénière de la Cour de cassation de France, statuant le 31 mai 1991 sur l'application des articles 6 et 1128 du Code civil, dont le texte est identique à ceux en vigueur en Belgique,
« la convention par laquelle une femme s'engage, fût-ce à titre gratuit, à concevoir et à porter un enfant pour l'abandonner à sa naissance contrevient tant au principe d'ordre public de l'indisponibilité du corps humain qu'à celui de l'indisponibilité de l'état des personnes » (29) .
Cette jurisprudence se situe dans la continuité de celle qui se déduisait d'un arrêt du 13 décembre 1989 (30) ; elle a été confirmée récemment par un arrêt du 9 décembre 2003 qui, indépendamment même de la disposition particulière qui, dans le Code civil français, règle la question (31) , considère que
« le caractère illicite [de la maternité pour autrui] se déduit des principes généraux du Code civil » (32) .
Ces solutions peuvent être transposées en droit belge actuel, comme le confirme la doctrine (33) .
Il est vrai que deux jugements de tribunaux de la jeunesse ont accepté, dans l'intérêt de l'enfant, d'homologuer des adoptions faisant suite à des gestations pour autrui (34) .
Leur portée doit toutefois être fortement relativisée.
Le premier ne se place que du point de vue de l'intérêt de l'enfant, sans se prononcer sur la validité de la convention ayant précédé la gestation et la naissance.
Quant au second, s'il considère en effet que
« [h]et draagmoederschap, dat een uiting is van de vrije wil en tot de verantwoordelijkheid behoort van degene die er zich zonder winstbejag toe leent, is niet strijdig met de openbare orde » (« la gestation pour autrui, qui est une expression du consentement libre et qui relève de la responsabilité de la personne qui s'y prête sans être motivée par l'appât du gain, n'est pas contraire à l'ordre public » — traduction libre),
et s'il se réfère à un arrêt de la Cour d'appel de Paris du 15 juin 1990 se prononçant dans le même sens (35) , force est de constater que ce dernier arrêt a été cassé par l'arrêt de l'assemblée plénière de la Cour de cassation de France du 31 mai 1991, dont il a été question ci-avant.
Ce jugement peut aussi être compris comme ne se prononçant pas sur la licéité de la convention portant sur la gestation pour autrui mais comme ayant décidé que cette gestation n'est pas contraire à l'ordre public et, implicitement, que la licéité ou l'illicéité de la convention n'a pas d'incidence sur la possibilité d'homologuer l'adoption en cause par les parents commanditaires, rejoignant ainsi la première décision.
Ceci étant, quelle que soit l'importance des règles et des principes actuels du droit civil belge en la matière, ils résultent de dispositions législatives et il relève de la responsabilité du législateur de les modifier ou de les aménager s'il l'estime opportun, pour autant bien entendu qu'aucune règle supérieure de droit ne s'y oppose.
Or, ainsi qu'on l'observera, sur le principe en tout cas du recours aux procédés de gestation pour autrui, aucune règle supérieure ne fait obstacle à l'adoption des propositions.
Quant aux règles relatives à la continuité de la parentalité, dont il a également été fait état dans l'avis précité du Conseil d'État, qui se déduisent de la Convention relative aux droits de l'enfant, il est renvoyé à l'exposé qui leur est consacré, lequel tend à montrer qu'elles doivent être appréhendées de manière nuancée et comme ne s'opposant pas de manière absolue à toute prise en compte législative de la gestation pour autrui (36) .
C'est en définitive la dimension éthique du débat qui doit guider principalement le législateur, et le conduire à se déterminer en fonction de la conception qu'il dégagera de l'ordre public et des bonnes moeurs.
Or, il est incontestable que la société belge n'est plus homogène sur ces questions et que le débat éthique fait apparaître des conceptions divergentes (37) , ainsi qu'en témoigne spécialement l'avis nº 30, du 30 juillet 2004, du Comité consultatif de bioéthique.
Cet avis procède du principe commun que
« la solidarité avec les personnes qui sont atteintes dans leur désir d'enfant est un bien »
et que
« la gestation pour autrui est éthiquement acceptable en principe »,
encore qu'il
« [faille] faire montre [...] d'une particulière prudence afin d'éviter, dans la mesure du possible, tous les problèmes prévisibles ».
Par ailleurs, il semble, du point de vue de l'éthique, exister des visions différentes sur les conditions et les effets de la conclusion de conventions relatives à la gestation pour autrui. Il appartient au législateur de faire les choix éthiques dans le contexte juridique exposé dans le présent avis sur la base des conventions internationales en matière de droits de l'homme et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme.
27. Sur la question de la responsabilité du législateur pour faire les choix d'ordre éthique, on peut se référer à l'attitude de la Commission européenne des droits de l'homme dans une affaire concernant la législation norvégienne sur l'avortement, dans laquelle elle s'est ralliée aux considérations suivantes de la Cour suprême norvégienne:
« Il n'appartient pas aux tribunaux de décider si la solution à un problème législatif difficile, et que le législateur a choisie lorsqu'il a adopté la loi de 1978 sur l'interruption de grossesse, est ou non la meilleure. Sur ce point les juges, tout comme d'autres membres de notre société, auront des opinions divergentes. La conciliation d'intérêts opposés que nécessitent les lois sur l'avortement est une tâche qui incombe au législateur et qui relève de sa responsabilité. [...] Il est clair que les tribunaux doivent respecter la solution retenue par le législateur » (38) .
Quant à l'examen de la conformité de la loi norvégienne à l'article 2 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (39) , la conclusion de la Commission européenne fut, en l'espèce, la suivante:
« [À] supposer que la Convention puisse être considérée comme ayant quelque influence à cet égard, la Commission estime que, dans un domaine aussi délicat, les États contractants doivent jouir d'un certain pouvoir discrétionnaire » (40) .
L'appréciation du caractère légitime ou non des propositions à l'examen requiert également de partir du principe que c'est au législateur qu'il appartient de concilier des conceptions éthiques opposées. Le juge doit à cet égard respecter le pouvoir d'appréciation du législateur et ne peut se substituer à lui. Il va sans dire que c'est en tenant compte de ces considérations que le présent avis a été conçu.
Le Conseil d'État estime néanmoins qu'il appartient en premier lieu au législateur de considérer, au regard du principe de précaution, s'il dispose de suffisamment d'éléments pour apprécier d'une manière suffisante les conséquences de la gestation pour autrui à l'égard de l'enfant à naître et de toutes les autres personnes concernées, ce qui s'impose afin d'élaborer un régime équilibré qui tient compte de l'ensemble des droits et intérêts en cause.
28. Avant d'examiner les propositions de loi à la lumière des normes juridiques supérieures, il conviendra de s'attarder sur le statut de l'enfant à naître, tel qu'il ressort de la jurisprudence de la Cour européenne et de la Commission européenne des droits de l'homme ainsi que de la législation belge.
Il est renvoyé sur ce point à l'arrêt Vo, du 8 juillet 2004, de la Cour européenne des droits de l'homme, qui, après un examen de la jurisprudence antérieure de la Commission européenne des droits de l'homme et de la Cour elle-même, de la pratique des États et de textes internationaux comme la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine, le Protocole additionnel prohibant le clonage humain ou le projet de Protocole relatif à la recherche biomédicale, conclut à « l'absence de statut juridique clair de l'enfant à naître » (41) . La Cour se dit
« convaincue qu'il n'est ni souhaitable ni même possible actuellement de répondre dans l'abstrait à la question de savoir si l'enfant à naître est une « personne » au sens de l'article 2 de la Convention » (42) .
Dans une affaire mettant en cause une décision juridictionnelle nationale limitant le recours à l'interruption volontaire de grossesse, la Commission européenne des droits de l'homme a certes qualifié la femme qui s'en plaignait de « victime » au regard de l'article 8 de la Convention, garantissant le droit au respect de la vie privée, mais elle a précisé
« que l'on ne saurait dire que la grossesse relève uniquement de la vie privée [et que,] lorsqu'une femme est enceinte, sa vie privée devient étroitement associée au foetus qui se développe ».
Elle a ajouté qu'il n'est pas
« nécessaire d'examiner, à ce propos, si l'enfant à naître doit être considéré comme une « vie » au sens de l'article 2 de la Convention, ou s'il doit être considéré comme une entité qui puisse, sur le plan de l'article 8, par. 2, justifier une ingérence pour la protection d'autrui ».
Elle a considéré aussi que
« toute réglementation de l'interruption des grossesses non désirées ne constitue pas une ingérence dans le droit au respect de la vie privée de la mère »,
tout en soulignant que
« rien ne prouve que les Parties à la Convention entendaient s'engager pour telle ou telle solution » (43) .
Il résulte de ce qui précède qu'aucune conclusion juridique ne peut être tirée de la jurisprudence de la Cour et de la Commission européenne des droits de l'homme quant au statut de l'enfant à naître. En conséquence, le Conseil d'État estime qu'il n'y a pas lieu d'examiner les propositions sous cet angle.
29. On peut relever d'ailleurs que le législateur a déjà tranché un certain nombre de questions en rapport avec cette problématique, ainsi qu'il résulte de la loi du 3 avril 1990 relative à l'interruption de grossesse, modifiant les articles 348, 350, 351 et 352 du Code pénal et abrogeant l'article 353 du même Code, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro et de l'article 318, § 4, du Code civil, y inséré par la loi du 31 mars 1987.
Selon cette dernière disposition,
« [l]a demande [de contestation de la paternité de l'enfant résultant de la présomption légale de paternité d'un homme marié avec la mère de l'enfant] n'est pas recevable si le mari a consenti à l'insémination artificielle ou à un autre acte ayant la procréation pour but, sauf si la conception de l'enfant ne peut en être la conséquence ».
30. En conséquence, le droit n'impose pas une solution sur ce point. Il renvoie donc aux conclusions auxquelles aboutissent les appréciations éthiques.
Celles-ci doivent être menées en tenant compte des incidences des procédés autorisés sur les personnes concernées, spécialement l'enfant, la femme qui le porte, l'homme ou la femme qui partage sa vie et les commanditaires ou ceux qui ont fourni les gamètes ou l'embryon ayant permis de recourir à la procréation médicalement assistée.
C'est aux limites éventuelles au pouvoir d'appréciation du législateur, qui résulteraient d'un certain nombre de droits fondamentaux, qu'est consacré l'exposé qui suit.
Comme les données juridiques disponibles ne concernent pas directement la problématique de la gestation pour autrui, il sera fait état des textes pertinents et de la jurisprudence qui les interprète, principalement l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, tant au point de vue de la vie privée que du point de vue de la vie familiale, en ayant en vue la transposabilité éventuelle par analogie de ces textes et de cette jurisprudence à ladite problématique. S'agissant de la procréation médicalement assistée, il existe un instrument juridique plus spécifique, qui est la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine; il en sera fait état plus bas (44) mais elle ne couvre pas, loin s'en faut, toutes les questions dans lesquelles les règles et les principes déduits de la jurisprudence générale relative à l'article 8 précité pourraient s'appliquer par analogie ou servir de cadre de réflexion aux problématiques juridiques pertinentes en l'espèce.
3º) Les règles supérieures de droit pertinentes — la Constitution et le droit international
31. Compte tenu de l'objet des propositions, les règles supérieures de droit pertinentes résultent principalement de la Constitution belge, de la Convention européenne des droits de l'homme (45) et de la Convention relative aux droits de l'enfant.
La Constitution belge et la Convention européenne des droits de l'homme doivent être lues de manière conjointe en ce qui concerne les droits et les libertés qu'elle consacrent. En effet, sous la réserve de l'application de l'article 53 de la Convention (46) , la portée des dispositions de droit interne qui les concernent est appréciée selon les mêmes critères que ceux qui sont fixés par la Convention, telle qu'elle est interprétée par la Cour européenne des droits de l'homme (47) .
La Cour d'arbitrage s'est exprimée comme suit à ce sujet:
« Lorsqu'une disposition conventionnelle liant la Belgique a une portée analogue à une ou plusieurs [...] dispositions constitutionnelles [...], les garanties consacrées par cette disposition conventionnelle constituent un ensemble indissociable avec les garanties inscrites dans les dispositions constitutionnelles en cause. Par ailleurs, la violation d'un droit fondamental constitue ipso facto une violation du principe d'égalité et de non-discrimination.
Il s'ensuit que, lorsqu'est alléguée la violation d'une disposition du titre II ou des articles 170, 172 ou 191 de la Constitution, la Cour tient compte, dans son examen, des dispositions de droit international qui garantissent des droits ou libertés analogues. » (48)
Par ailleurs, il ressort des travaux préparatoires de l'article 22 de la Constitution, relatif notamment au droit au respect de la vie privée et familiale (49) , que le Constituant a entendu chercher
« à mettre le plus possible la proposition [tendant à insérer cette disposition constitutionnelle] en concordance avec l'article 8 de la Convention européenne [...], afin d'éviter toute contestation sur le contenu respectif de l'article de la Constitution et de l'article 8 de la (Convention) » (50) .
Les considérations qui précèdent, relatives au lien interprétatif qui unit la Constitution belge et le droit international, peuvent être transposées en principe aux dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant.
32. Compte tenu de l'objet des propositions, les développements qui suivent portent essentiellement sur le droit au respect de la vie privée et familiale et sur les principes d'égalité et de non-discrimination, tels qu'ils sont inscrits aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, et sur les droits de l'enfant. On verra toutefois qu'incidemment d'autres dispositions de la Convention européenne peuvent trouver à s'appliquer.
Pour les motifs qui viennent d'être exposés, sous le nº 31, l'interprétation de ces règles internationales qui est exposée ci-après peut valoir pour les dispositions correspondantes de la Constitution belge, soit principalement les articles 10, 11 (51) , 22 (52) et 22bis (53) de la Constitution.
Cet exposé ne tentera de cerner la portée de ces règles internationales qu'en tant qu'elles sont pertinentes, eu égard à l'objet des textes à l'examen.
4º) Le droit international privé, la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale
33. Il a été précisé, dans l'introduction du présent avis, au nº 2, que le délai imparti au Conseil d'État ne lui permettait pas d'examiner les questions de droit international privé suscitées par les propositions à l'examen. À ces questions sont liées celles qui peuvent surgir quant à l'incidence de la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, signée à La Haye le 29 mai 1993, sur l'admissibilité du recours à la gestation pour autrui dans le cadre d'une opération pouvant recevoir la qualification autonome d'adoption au sens de cette Convention (54) . Indépendamment même de cette qualification internationale, on verra plus loin que l'opération par laquelle des commanditaires confient à une femme, avec son accord, la gestation d'un enfant à leur profit peut s'apparenter à certains égards, malgré des différences, à une adoption, même au sens du droit interne (55) ; deux des trois propositions autorisant conditionnellement la gestation pour autrui s'alignent d'ailleurs sur cette qualification, la proposition nº 1230 (56) plus clairement que la proposition nº 1271 (57) .
Pour le même motif que celui exposé sous le nº 2, il n'a pas été possible au Conseil d'État d'examiner l'incidence de cette Convention.
On se limitera, pour illustrer la pertinence de la réserve qui vient d'être formulée, à rappeler le texte des articles 1er et 2 de cette Convention:
« Article 1. La présente Convention a pour objet:
a) d'établir des garanties pour que les adoptions internationales aient lieu dans l'intérêt supérieur de l'enfant et dans le respect des droits fondamentaux qui lui sont reconnus en droit international;
b) d'instaurer un système de coopération entre les États contractants pour assurer le respect de ces garanties et prévenir ainsi l'enlèvement, la vente ou la traite d'enfants;
c) d'assurer la reconnaissance dans les États contractants des adoptions réalisées selon la Convention.
Art. 2. 1. La Convention s'applique lorsqu'un enfant résidant habituellement dans un État contractant (« l'État d'origine ») a été, est ou doit être déplacé vers un autre État contractant (« l'État d'accueil »), soit après son adoption dans l'État d'origine par des époux ou une personne résidant habituellement dans l'État d'accueil, soit en vue d'une telle adoption dans l'État d'accueil ou dans l'État d'origine.
2. La Convention ne vise que les adoptions établissant un lien de filiation. »
B. Les droits fondamentaux principalement en cause
1º) Les principes d'égalité et de non-discrimination
34. Les règles supérieures de droit garantissant des droits fondamentaux doivent se lire en combinaison avec celles qui consacrent les principes d'égalité et de non-discrimination, qui constituent également des droits fondamentaux.
L'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose:
« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ».
Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme,
— « dans la jouissance des droits et libertés reconnus par la Convention, l'article 14 interdit de traiter de manière différenciée, sauf justification objective et raisonnable, des personnes placées dans des situations comparables » (58) ;
— « une distinction se révèle discriminatoire si elle « manque de justification objective et raisonnable », c'est-à-dire si elle ne poursuit pas un but légitime ou si fait défaut un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé » (59) ;
— « [l]e droit de jouir des droits garantis par la Convention sans être soumis à discrimination est également transgressé lorsque, sans justification objective et raisonnable, les États n'appliquent pas un traitement différent à des personnes dont les situations sont sensiblement différentes » (60) .
La Cour européenne des droits de l'homme développe comme suit les implications de l'article 14 de la Convention:
« [B]ien que l'article 14 n'ait pas d'existence indépendante il peut jouer un important rôle autonome en complétant les autres clauses normatives de la Convention et des Protocoles: dans la jouissance des droits et libertés qu'elles reconnaissent, il protège contre toute discrimination les individus placés dans des situations analogues. Enfreint donc l'article 14, combiné avec l'article de la Convention ou des Protocoles consacrant tel droit ou liberté, une mesure conforme en elle-même aux exigences du second mais revêtant un caractère discriminatoire incompatible avec le premier. Tout se passe comme si l'article 14 faisait partie intégrante de chacune des dispositions garantissant des droits et libertés » (61) .
Pour apprécier le rôle autonome du principe de non-discrimination inscrit à l'article 14 de la Convention par rapport aux droits et aux libertés reconnus par ce texte et ses protocoles, il faut tenir compte de l'évolution jurisprudentielle selon laquelle il suffit que les mesures se rattachent à l'exercice d'un droit garanti (62) ou se situent dans le domaine de ce droit (63) , ou encore que les faits du litige se situent sous l'emprise de l'une au moins des dispositions de la Convention (64) , ou que la matière du litige n'échappe pas entièrement à l'empire du texte qui se combine avec l'article 14 (65) , le lien opéré avec les droits substantiels étant, au gré de l'évolution jurisprudentielle, de plus en plus ténu (66) .
En tout état de cause, compte tenu de ce lien, même limité, l'examen, ci-après, de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme intégrera les exigences résultant des principes d'égalité et de non-discrimination.
35. On sait que c'est en se fondant notamment sur la jurisprudence de la Convention européenne des droits de l'homme en la matière que la Cour d'arbitrage a interprété les articles 10 et 11 de la Constitution belge, qui garantissent également ces principes (67) . Selon la jurisprudence constante de la Cour d'arbitrage,
— « Les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé » (68) .
— « Les mêmes règles s'opposent, par ailleurs, à ce que soient traitées de manière identique, sans qu'apparaisse une justification raisonnable, des catégories de personnes se trouvant dans des situations qui, au regard de la mesure considérée, sont essentiellement différentes.
L'existence d'une telle justification doit s'apprécier en tenant compte du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause; le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé » (69) .
Pour que soit mis en œuvre le contrôle des principes constitutionnels d'égalité et de non-discrimination, il suffit que deux catégories se trouvant dans des situations comparables soient traitées différemment ou que deux catégories de personnes se trouvant dans des situations différentes soient traitées de manière comparable, sans qu'il soit nécessaire qu'un droit soit en cause; contrairement à ce que l'on vient de voir en ce qui concerne l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme, il n'est donc pas nécessaire, lorsque les articles 10 et 11 de la Constitution peuvent être invoqués, d'examiner si les différences portent sur la jouissance d'un droit fondamental.
36. Comme les dispositions constitutionnelles précitées, l'article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques garantit, lui aussi, le respect du principe d'égalité de manière autonome par rapport aux droits et aux libertés proclamés dans cet instrument:
« Toutes les personnes sont égales devant la loi et ont droit sans discrimination à une égale protection de la loi. À cet égard, la loi doit interdire toute discrimination et garantir à toutes les personnes une protection égale et efficace contre toute discrimination, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique et de toute autre opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation ».
2º) Le droit à la dignité humaine et l'interdiction des traitements inhumains et dégradants
37. L'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose:
« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »
Aux termes de l'article 23, alinéa 1er, de la Constitution,
« Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité humaine. »
Le procédé de la gestation pour autrui en tant que tel ne peut être regardé comme constituant un traitement inhumain ou dégradant, à l'égard ni de l'enfant à naître, ni de la mère porteuse et des parents commanditaires.
En effet, ce procédé vise non seulement à réaliser le projet parental des parents commanditaires concernés, mais il s'agit souvent également de l'expression d'un sentiment de solidarité de la mère porteuse qui offre temporairement ses services pour la réalisation de ce projet parental (70) . C'est d'ailleurs en partant de la constatation qu'il existe des offres émanant de personnes animées en principe d'un tel sentiment de solidarité que les propositions autorisant la gestation pour autrui et celle qui autorise le don de gamètes ou d'embryons sont conçues. La valorisation de ce sentiment fait partie des éléments que le législateur peut promouvoir.
Le législateur peut, dans l'exercice de son pouvoir, estimer, en fonction des considérations qu'il juge pertinentes, que des procédés de gestation pour autrui et de procréation médicalement assistée peuvent être autorisés, mais à la condition qu'ils le soient dans des circonstances compatibles avec la dignité humaine. C'est à cette condition qu'il ne pourra pas non plus être estimé que les mesures envisagées enfreignent l'interdiction de traitement inhumain ou dégradant prévue notamment par l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme.
Toutefois, lorsque la gestation pour autrui revêt essentiellement un caractère commercial, résultant de ce que le transfert de l'enfant et des droits parentaux qui le concernent est le résultat d'une convention passée par la mère porteuse dans un but lucratif, il pourrait être question d'un traitement inhumain et dégradant à l'égard de l'enfant. En effet, en reconnaissant la validité de conventions de l'espèce, fût-ce tacitement, le législateur permettrait que, dès avant sa naissance, un enfant fasse l'objet d'une convention commerciale, dans un but lucratif, qui dont l'exécution — forcée ou non — se fera au moment où l'enfant est déjà né. Un tel traitement de la part de l'État peut être considéré comme contraire à l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme. À cet égard, on peut également faire référence à l'article 21, d), de la Convention relative aux droits de l'enfant qui dispose que les États doivent prendre
« toutes les mesures pour veiller à ce que, en cas d'adoption à l'étranger, le placement de l'enfant ne se traduise pas par un profit matériel indu pour les personnes qui en sont responsables ».
On peut également faire référence à l'article 21 de la Convention européenne sur les droits de l'homme et la biomédecine qui dispose que le corps humain et ses parties ne doivent pas être, en tant que tels, source de profit (71) . Même si cette Convention ne lie pas la Belgique (72) , elle peut constituer un important élément d'interprétation de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme. La même observation, en ce qui concerne l'article 21 de la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine en tout cas, vaut pour le don de gamètes ou d'embryons à caractère commercial.
3º) Le droit au respect de la vie familiale
38. L'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose:
« 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.
2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention desinfractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ».
39. La portée de cette disposition est examinée ci-après en tant qu'elle concerne le droit au respect de la vie familiale, eu égard aux questions qui sont susceptibles de se poser au sujet des propositions de loi à l'examen (73) .
D'une manière générale, comme l'expose la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme,
« en garantissant le droit au respect de la vie familiale, l'article 8 [de la Convention] présuppose l'existence d'une famille » (74) .
Comme l'a exposé notamment l'arrêt Fretté, du 26 février 2002, de la Cour européenne des droits de l'homme,
« la Convention ne garantit pas, en tant que tel, un droit d'adopter (Di Lazzaro, décision de la Commission précitée (75) ; X. c. Belgique et Pays-Bas, nº 6482/74, décision de la Commission du 10 juillet 1975, DR 7, p. 75). Par ailleurs, le droit au respect d'une vie familiale présuppose l'existence d'une famille et ne protège pas le simple désir de fonder une famille (arrêts Marckx [...], 13 juin 1979, [...], § 31, et Abdulaziz, Cabales et Balkandali [...], 28 mai 1985, [...], § 62) » (76) .
Dans cet arrêt, la Cour considère également que
« l'adoption est « donner une famille à un enfant » et non « donner un enfant à une famille » (77) .
40. Il n'y a pas lieu de distinguer entre la famille « légitime » et la famille « naturelle » (78) , et
« le concept de « vie familiale » [...] ne se borne pas aux seules familles fondées sur le mariage mais peut englober d'autres relations de facto » (79) .
La relation entre un enfant adultérin et son géniteur est également protégée.
Ainsi, dans son arrêt Johnston du 18 décembre 1986, la Cour européenne des droits de l'homme a estimé que
« l'absence d'un régime juridique approprié reflétant les liens familiaux naturels de [l'enfant] constitue un manque de respect pour la vie familiale de l'intéressée » (80) .
Ainsi encore, dans l'affaire Kroon e.a., une femme avait eu un enfant avec un autre homme que son mari et la législation nationale ne permettait pas que la paternité du père légal puisse être contestée et remplacée par la paternité du père génétique qui était également le « père social » puisque, bien que ne vivant pas avec la mère, il s'occupait régulièrement de l'enfant et avait eu avec la mère trois autres enfants après la naissance de l'enfant adultérin. Selon la Cour,
« le « respect » de la « vie familiale » exige que la réalité biologique et sociale prévale sur une présomption légale heurtant de front tant les faits établis que les voeux des personnes concernées, sans réellement profiter à personne » (81) .
Cet attachement à la réalité génétique et biologique implique toutefois, comme les mots « réalité biologique et sociale » et « sans réellement profiter à personne » (82) le confirment au demeurant dans l'arrêt qui vient d'être cité, que la relation entre un enfant et un adulte ne jouira de la protection accordée à la vie familiale que si elle s'extériorise, sinon par une cohabitation (83) , au moins par une « relation [qui] a suffisamment de constance » (84) .
Ainsi, dans son arrêt X., Y. et Z. c. Royaume-Uni, du 22 avril 1997, la Cour met l'accent sur la considération suivante:
« Pour déterminer si une relation s'analyse en une « vie familiale », il peut se révéler utile de tenir compte d'un certain nombre d'éléments, comme le fait de savoir si les membres du couple vivent ensemble et depuis combien de temps, et s'ils ont eu des enfants ensemble, de manière naturelle ou autre, preuve de leur engagement l'un envers l'autre » (85) .
De même, dans sa décision Nylund, la Cour déclare irrecevable une requête introduite par un homme se déclarant le père génétique d'un enfant à la suite de relations sexuelles qu'il avait eues avec la mère de cet enfant, qui s'était mariée entre-temps avec un autre homme se prétendant lui aussi être le père génétique et bénéficiant en outre de la présomption légale de paternité, le requérant s'étant vu refuser à établir sa paternité. Alors même que le requérant et la mère avaient été fiancés et avaient vécu ensemble, la Cour se base sur l'absence de lien affectif entre le requérant et l'enfant pour conclure à l'absence de vie familiale (86) .
41. L'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme prescrit des obligations positives [aux États] inhérentes à un « respect » effectif de la vie familiale (87) .
En conséquence, l'État doit prendre, à l'égard des familles, telles qu'elles sont qualifiées en fonction de la jurisprudence de la Cour, les mesures aptes à permettre « aux intéressés de mener une vie familiale normale », ce qui implique en particulier une protection juridique rendant possible dès la naissance, l'intégration de l'enfant dans sa famille (88) .
Toujours au sens de l'article 8 de la Convention,
« la « vie familiale » [...] englobe pour le moins les rapports entre proches parents, lesquels peuvent y jouer un rôle considérable, par exemple entre grands-parents et petits-enfants. Le « respect » de la vie familiale ainsi entendue implique, pour l'État, l'obligation d'agir de manière à permettre le développement normal de ces rapports » (89) .
42. Compte tenu de ce que les procédés de gestation pour autrui et de procréation médicalement assistée peuvent conduire à des relations entre l'enfant, d'une part, et les parents génétiques, la mère biologique (résultant de ce qu'elle a porté l'enfant) ou les parents légaux, d'autre part, la question se pose de savoir quelles sont les relations qui, dans ce contexte, tombent sous le champ d'application de l'article 8 de la Convention au titre de la vie familiale, étant entendu que, comme le paragraphe 2 de cette disposition le montre, le droit au respect de la vie familiale peut faire l'objet de restrictions à la condition qu'elles soient prévues par la loi, qu'elles poursuivent un but légitime et qu'elles respectent le principe de proportionnalité (90) .
La jurisprudence ne nous présente aucun cas portant spécifiquement sur l'applicabilité de l'article 8 de la Convention à des situations telles que celles qui sont réglées par les propositions, sauf une décision de la Commission européenne des droits de l'homme sur les effets d'une procréation médicalement assistée (91) (92) . Toutefois, deux affaires sont actuellement pendantes devant la Cour européenne des droits de l'homme, qui pourraient conduire à des clarifications sur la portée de la Convention dans des situations telles que celles visées par les propositions à l'examen. Dans l'affaire Evans, il s'agit de l'impossibilité pour une femme vivant seule de se faire implanter des embryons faits de ses ovules et du sperme d'un homme qui avait été son fiancé, mais avec qui le lien avait entretemps été rompu (93) . Dans l'affaire Haller, il s'agit de l'interdiction pour un couple d'avoir recours à certaines techniques de procréation médicalement assistée (94) .
Dans la discussion qui suit, portant sur des exemples tirés de la jurisprudence, il s'agit donc nécessairement de cas ne présentant qu'une analogie plus ou moins directe avec les cas qui constituent l'objet spécifique des propositions à l'examen. Les solutions jurisprudentielles ne sauraient dès lors être transposées qu'avec prudence.
43. Il convient d'observer en premier lieu que même des liens fort ténus peuvent convaincre de l'existence d'une « vie familiale ».
Ainsi, dans son arrêt Keegan, la Cour européenne des droits de l'homme a considéré que, puisqu'il y avait eu une vie familiale entre la mère et le père de l'enfant,
« [ce dernier] issu d'une telle relation s'insère de plein droit dans cette cellule « familiale » dès sa naissance et par le fait même de celle-ci. Il existe donc entre l'enfant et ses parents un lien constitutif d'une vie familiale même si à l'époque de sa naissance, les parents ne vivaient plus ensemble ou si leurs relations avaient alors pris fin » (95) .
La simple intention d'établir une famille dans le futur peut être suffisante pour faire entrer la situation dans la notion de vie familiale.
L'arrêt Pini et csts du 22 juin 2004 de la Cour européenne des droits de l'homme contient à cet égard les considérations suivantes:
« Certes, en garantissant le droit au respect de la vie familiale, l'article 8 présuppose l'existence d'une famille (Marckx c. Belgique, arrêt du 13 juin 1979, [...] § 31; Johnson c. Royaume Uni, arrêt du 24 octobre 1997, [...] § 62), condition qui ne semble pas remplie en l'espèce, en l'absence de cohabitation ou de liens de facto suffisamment étroits entre les requérants et leurs filles adoptives respectives, avant ou après les décisions d'adoption. Il n'en résulte pas pour autant, de l'avis de la Cour, que toute vie familiale projetée sorte entièrement du cadre de l'article 8. En ce sens, la Cour a déjà considéré que cette disposition pouvait aussi s'étendre à la relation potentielle qui aurait pu se développer, par exemple, entre un père naturel et un enfant né hors mariage (Nylund c. Finlande (déc.), nº 27110/95, CEDH 1999-VI), ou à la relation née d'un mariage non fictif, même si une vie familiale ne se trouvait pas encore pleinement établie (Abdulaziz, Cabales et Balkandali c. Royaume Uni, arrêt du 28 mai 1985, [...] § 62) » (96) .
Dans cette affaire, la Cour a admis l'existence d'une vie familiale entre des parents adoptifs et les enfants adoptés qu'ils n'avaient cependant vus que sur des photographies et auxquels ils avaient fait parvenir des lettres.
Dans sa décision Nylund du 29 juin 1999, la Cour a estimé que:
« l'article 8 ne saurait être interprété comme protégeant uniquement une « vie familiale » déjà établie, mais qu'il doit s'étendre, quand les circonstances le commandent, à la relation qui pourrait se développer entre un enfant né hors mariage et son père naturel. À cet égard, les facteurs à prendre en compte comprennent la nature de la relation entre les parents naturels, ainsi que l'intérêt et l'attachement manifesté par le père naturel pour l'enfant avant et après la naissance » (97) .
On rappelle toutefois, comme exposé au nº 40 que, dans cette affaire Nylund, compte tenu des circonstances, l'absence de lien affectif entre l'enfant et le père se prétendant tel a conduit la Cour à décider que le requérant ne pouvait se prétendre atteint dans sa « vie familiale », et que la Cour a déclaré en conséquence la requête irrecevable.
44. La décision X. c. Royaume-Uni du 11 juillet 1977 de la Commission européenne des droits de l'homme concerne une situation qui présente de fortes analogies avec celles qui se présentent en cas de gestation pour autrui. On en retiendra spécialement la considération suivante:
« En l'espèce, il est vrai, la requérante a confié son enfant, dès sa naissance, en vue de son adoption par des tiers. Elle ne l'a pas revu depuis. De par son fait, il n'y a pas eu entre elle et son fils, dans les premiers mois, une vie de famille. Toutefois, alors qu'elle avait manifesté le désir de reprendre son enfant, ou de s'en réserver la possibilité, la requérante s'est trouvée privée pour l'avenir, par décision judiciaire, de toute possibilité d'établir avec lui des relations familiales (98) .
Dans cette affaire, qui concernait une mère s'étant séparée volontairement de son enfant à la naissance en vue d'une adoption et qui, s'étant ravisée, ne pouvait plus ultérieurement s'y opposer, la Commission a déclaré la requête manifestement mal fondée, principalement sur la base des deux considérations suivantes: une nouvelle vie familiale avait été créée autour de l'enfant dans un autre environnement et des psychiatres avaient conclu au danger de répercussions négatives sur le développement de la personnalité de l'enfant. Les « intérêts primordiaux de l'enfant » justifiaient au regard de l'article 8, paragraphe 2, de la Convention en l'espèce que la mère ne puisse intervenir dans la procédure d'adoption et ne puisse plus entretenir de relations avec son enfant.
45. S'agissant des techniques de procréation médicalement assistée, une seule décision semble avoir été rendue, par la Commission. Le requérant avait donné son sperme à un couple de lesbiennes et avait eu des contacts hebdomadaires avec l'enfant pendant huit mois avant que le couple de lesbiennes ne mette fin à ces contacts. Selon la Commission,
« les contacts du requérant avec l'enfant, considérés en eux-même et en liaison avec le fait qu'il a donné son sperme, ne constituent pas une base suffisante pour conclure qu'ils ont mené à des rapports personnels tellement étroits qu'ils relèveraient de la notion de « vie familiale » visée à l'article 8 de la Convention » (99) .
46. Lorsqu'une situation familiale vient à être modifiée en manière telle que l'enfant né ne puisse plus vivre en permanence avec ses deux parents, plus particulièrement par l'effet de la séparation de ces derniers, la Cour européenne des droits de l'homme se montre attentive au maintien des relations entre l'enfant concerné et chacun des parents séparés, par exemple lorsque le père séparé a fondé un autre ménage, homosexuel (100) .
Dans une affaire concernant la situation d'une personne vivant avec une femme ayant eu un enfant par insémination artificielle par donneur, cette personne n'ayant donc ni lien biologique ni lien génétique avec l'enfant mais ayant soutenu la mère pendant la période de l'insémination et s'étant comportée comme le père depuis la naissance de l'enfant, la Cour constate « que des liens familiaux de facto unissent les trois requérants , en ce compris l'enfant et le « père », et que l'article 8 [de la Convention] trouve à s'appliquer (101) .
C'est dans le même sens que s'est prononcée la Cour d'arbitrage dans son arrêt nº 134/2003 du 8 octobre 2003, qui concernait également le maintien refusé par la loi des liens entre une belle-mère et l'enfant de la personne avec laquelle elle partageait la vie; l'hypothèse était celle
« où un enfant n'a qu'un seul parent à l'égard duquel la filiation est établie mais a vécu de manière durable au sein du ménage formé par ce parent et par un tiers qui assument tous deux la charge de l'entretien de l'enfant » (102) .
La Cour a considéré, sur la base de la notion juridique de « l'intérêt de l'enfant », qu'il n'était pas admissible qu'un tel enfant ne
« puisse voir consacrer juridiquement son droit à la protection et au bien-être, alors même que les personnes qui l'éduquent s'engageraient à les lui fournir durablement » (103) ,
et qu'
« [i]l s'ensuit que cette catégorie d'enfants fait l'objet d'un traitement différent sans justification admissible. Mais c'est au législateur qu'il appartient de préciser sous quelle forme, à quelles conditions et selon quelle procédure l'autorité parentale pourrait, dans l'intérêt de l'enfant, être étendue à d'autres personnes qui n'ont pas un lien de filiation avec lui » (104) .
Cet arrêt rappelle notamment que,
« depuis la loi du 31 mars 1987, l'autorité parentale n'est plus attachée à la situation matrimoniale des parents ».
La motivation de l'arrêt n'est pas affectée par le fait qu'il concerne une affaire dans laquelle la personne qui partageait la vie de la mère était une femme ayant entretenu des relations homosexuelles avec elle.
Ceci étant, le droit au respect de la vie familiale dans des situations telles que celles qui viennent d'être abordées, n'est pas absolu. Ainsi, dans l'arrêt X., Y. et Z. c. Royaume-Uni, présenté ci-avant, de la Cour européenne des droits de l'homme, compte tenu des circonstances de l'espèce, le « père » en question étant un transsexuel, la Cour a considéré que
« les questions soulevées en l'espèce touchent à des domaines où il n'y a guère de communauté de vues entre les États membres du Conseil de l'Europe et où, de manière générale, le droit paraît traverser une phase de transition, il y a lieu d'accorder à l'État défendeur une large marge d'appréciation (voir, mutatis mutandis, l'arrêt Rees [, 27 septembre 1990] [...], par. 37, et l'arrêt Cossey [, 27 septembre 1990] [...], par. 40) » (105) .
Dans la même affaire, elle a déclaré ce qui suit:
« [É]tant donné que le transsexualisme soulève des questions complexes de nature scientifique, juridique, morale et sociale, ne faisant pas l'objet d'une approche généralement suivie dans les États contractants, la Cour estime que l'article 8 [de la Convention] ne saurait passer pour impliquer que l'État défendeur est dans l'obligation de reconnaître officiellement comme le père de l'enfant une personne qui n'en est pas le père biologique. Dans ces conditions, le fait que le droit britannique ne permette pas une reconnaissance juridique spéciale de la relation unissant X et Z [, soit l'enfant et son beau-père,] ne constitue pas un manque de respect de la vie familiale au sens de cette disposition » (106) .
47. La Cour européenne des droits de l'homme est attentive à la stabilité des décisions prises quant au statut d'un enfant par rapport aux personnes qui se sont vues confier une responsabilité à son égard.
Ainsi, nonobstant ce qui a été exposé plus haut au sujet de la qualification attachée par la Cour au lien génétique entre un enfant et ses géniteurs, au moins lorsqu'ils ont été prolongés par une relation affective ou sociale suffisamment durable (107) , la Cour veille-t-elle, lorsque les intérêts de ces géniteurs sont susceptibles d'entrer en conflit avec ceux qui se déduisent d'une situation familiale présentant certains caractères de stabilité, à ne pas troubler celle-ci. Il est renvoyé sur ce point au nº 61, spécialement à la décision Nylund de la Cour européenne des droits de l'homme qui y est présentée (108) .
Dans son arrêt Keegan du 19 avril 1994, par lequel l'État mis en cause a été condamné pour violation du droit à la vie familiale en raison de l'impossibilité qui avait été faite à un père d'entretenir des relations avec son enfant, la Cour montre bien l'enjeu qui résulte de ce que d'autres relations de type familial peuvent se créer, qu'il pourrait être adéquat de préserver également:
« La Cour note que le droit irlandais offrait au requérant la possibilité de réclamer la tutelle et la garde de sa fille et que, en appréciant le bien-être de celle-ci, la High Court a pesé équitablement les intérêts du père. Le problème essentiel en l'espèce ne réside toutefois pas dans cette appréciation, mais plutôt dans le fait que la législation irlandaise autorisait à placer l'enfant en vue de son adoption peu après sa naissance à l'insu et sans le consentement de son père. La Cour l'a relevé dans un contexte analogue: un enfant confié à d'autres personnes que ses parents peut nouer avec elles, au fil du temps, de nouveaux liens qu'il pourrait ne pas être dans son intérêt de perturber ou de rompre en revenant sur une décision antérieure relative à la garde (voir, entre autres, l'arrêt W. c. Royaume-Uni du 8 juillet 1987, [...], par. 62). Cet état de choses a non seulement nui au bon développement des liens de M. Keegan avec sa fille, mais a mis en branle un processus risquant de devenir irréversible, désavantageant ainsi sensiblement le requérant dans sa lutte avec les candidats à l'adoption pour la garde de l'enfant » (109) .
Il faut aussi retenir de cet arrêt que les décisions relatives au sort d'un enfant, portant notamment sur le fait de le faire adopter, intéressent également la personne qui partage la vie de la mère de cet enfant, et pas exclusivement celle-ci.
48. En conclusion, la notion de « vie familiale » est appréhendée très largement par la jurisprudence européenne, incluant les relations qui naissent de situations de fait, voire celles qui résultent d'un simple lien biologique ou génétique.
Elle peut même s'appliquer à des projets d'adoption à l'égard d'un enfant déjà né.
Pour la mère séparée volontairement de son enfant à la naissance, le droit à la vie familiale s'applique aussi, même si les causes de restrictions prévues à l'article 8, paragraphe 2, paraissent pouvoir être retenues de manière assez large.
Toutefois, il y a un point commun entre les arrêts examinés, qui doit être souligné: ils concernent des situations dans lesquelles l'enfant était déjà né et à l'égard duquel les personnes concernées avaient eu un comportement, en raison de leur mariage, de leur vie commune, de leur projet d'adoption, voire d'une relation non durable devant conduire normalement, que chacun l'ait voulu ou non, à l'établissement d'une relation de type familial avec l'enfant.
La situation se présente de manière différente lorsque la relation est purement potentielle.
Ainsi, lorsque le lien n'est que de nature génétique, comme dans le cas d'un don de sperme, il ne fait pas naître une vie familiale (110) ; il en va de même lorsque le parent et l'enfant ne se sont jamais vus et n'ont établi aucun lien affectif (111) .
Ceci étant, il faut rappeler que, même lorsqu'une situation tombe sous l'empire du droit au respect de la vie familiale, ce droit n'est pas absolu et qu'il peut être limité dans les conditions de l'article 8, paragraphe 2, de la Convention européenne des droits de l'homme.
4º) L'obligation de prendre en considération l'intérêt de l'enfant — Le droit de l'enfant de connaître ses parents et d'être élevé par eux
49. Il résulte aussi de l'examen qui précède que la notion « de vie familiale » ne peut être détachée de la place toute particulière que joue l'intérêt de l'enfant dans l'admissibilité de restrictions au droit au respect de la vie familiale.
Cette notion, si elle résulte de la jurisprudence européenne, n'est pas consacrée comme telle dans le texte de la Convention européenne des droits de l'homme.
Elle est en revanche clairement consacrée dans la Convention relative aux droits de l'enfant, adoptée à New York le 20 novembre 1989.
50. La Convention précitée comporte les dispositions suivantes qui présentent quelque pertinence pour apprécier le cadre dans lequel l'environnement d'ordre familial d'un enfant peut être configuré sur le plan juridique.
La disposition fondamentale et générale quant à la portée des droits de l'enfant est l'article 3, paragraphe 1er, de la Convention, aux termes duquel,
« [d]ans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ».
Le paragraphe 2 de la même disposition énonce:
« Les États parties s'engagent à assurer à l'enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées ».
51. D'une manière générale, la Convention appréhende l'intérêt de l'enfant dans le cadre de son milieu familial, conçu autour de la cellule constituée par ses parents. En témoignent notamment les dispositions suivantes de la Convention précitée, pertinentes pour l'examen des propositions:
Art. 7, § 1er: « L'enfant est enregistré aussitôt sa naissance et a dès celle-ci le droit à un nom, le droit d'acquérir une nationalité et, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux. »
Art. 8, § 1er: « Les États parties s'engagent à respecter le droit de l'enfant de préserver son identité, y compris sa nationalité, son nom et ses relations familiales, tels qu'il sont reconnus par loi, sans ingérence illégale. »
Art. 9, §§ 1er, 2 et 3: « 1. Les États parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins que les autorités compétentes ne décident, sous réserve de révision judiciaire et conformément aux lois et procédures applicables, que cette séparation est nécessaire dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Une décision en ce sens peut être nécessaire dans certains cas particuliers, par exemple lorsque les parents maltraitent ou négligent l'enfant, ou lorsqu'ils vivent séparément et qu'une décision doit être prise au sujet du lieu de résidence de l'enfant.
2. Dans tous les cas prévus au paragraphe 1er du présent article, toutes les parties intéressées doivent avoir la possibilité de participer aux délibérations et de faire connaître leurs vues.
3. Les États parties respectent le droit de l'enfant séparé de ses deux parents ou de l'un d'eux d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant ».
Art. 18, § 1er: « Les États parties s'emploient de leur mieux à assurer la reconnaissance du principe selon lequel les deux parents ont une responsabilité commune pour ce qui est d'élever l'enfant et d'assurer son développement. La responsabilité d'élever l'enfant et d'assurer son développement incombe au premier chef aux parents ou, le cas échéant, à ses représentants légaux. Ceux-ci doivent être guidés avant tout par l'intérêt supérieur de l'enfant ».
Art. 27, § 2: « C'est aux parents ou autres personnes ayant la charge de l'enfant qu'incombe au premier chef la responsabilité d'assurer, dans les limites de leurs possibilités et de leurs moyens financiers, les conditions de vie nécessaires au développement de l'enfant » (112) .
D'autres dispositions que celles citées appliquent également ce principe, comme par exemple l'article 10 sur l'éloignement des enfants par rapport à leurs parents et le regroupement familial, l'article 14 sur le rôle des parents ou des représentants légaux en matière de liberté de pensée, de conscience et de religion, et l'article 24 sur le rôle des parents en ce qui concerne la santé des enfants.
Les dispositions citées ci-avant font de la prise en charge de l'enfant par ses parents le principe de base à prendre en considération, mais sans avoir un caractère absolu puisque la Convention prend en compte par ailleurs les situations dans lesquelles l'enfant est séparé de ses parents. Il importe de souligner toutefois que, selon la Convention, ces situations doivent rester exceptionnelles et que c'est à nouveau le critère de l'intérêt de l'enfant qui doit guider l'attitude à adopter (113) .
Lorsque les parents sont séparés ou que l'enfant est séparé de ses parents, le droit est proclamé
« d'entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec ses deux parents, sauf si cela est contraire à l'intérêt supérieur de l'enfant » (114) .
52. La Convention n'écarte pas le recours à l'adoption mais, dans ce cas de figure, c'est à nouveau l'intérêt de l'enfant qui apparaît comme central, comme le montrent ses articles 20 et 21, ainsi rédigés:
Art. 20: « 1. Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciale de l'État.
2. Les États parties prévoient pour cet enfant une protection de remplacement conforme à leur législation nationale.
3. Cette protection de remplacement peut notamment avoir la forme du placement dans une famille, de la kafalah de droit islamique, de l'adoption ou, en cas de nécessité, du placement dans un établissement pour enfants approprié. Dans le choix entre ces solutions, il est dûment tenu compte de la nécessité d'une certaine continuité dans l'éducation de l'enfant, ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique. »
Art. 21: « Les États parties qui admettent et/ou autorisent l'adoption s'assurent que l'intérêt supérieur de l'enfant est la considération primordiale en la matière, et:
a) veillent à ce que l'adoption d'un enfant ne soit autorisée que par les autorités compétentes, qui vérifient conformément à la loi et aux procédures applicables et sur la base de tous les renseignements fiables relatifs au cas considéré, que l'adoption peut avoir lieu eu égard à la situation de l'enfant par rapport à ses père et mère, parents et représentants légaux et que, le cas échéant, les personnes intéressées ont donné leur consentement à l'adoption en connaissance de cause, après s'être entourées des avis nécessaires;
b) reconnaissent que l'adoption à l'étranger peut être envisagée comme un autre moyen d'assurer les soins nécessaires à l'enfant, si celui-ci ne peut, dans son pays d'origine, être placé dans une famille nourricière ou adoptive ou être convenablement élevé;
c) veillent, en cas d'adoption à l'étranger, à ce que l'enfant ait le bénéfice de garanties et de normes équivalent à celles existant en cas d'adoption nationale;
d) prennent toutes les mesures appropriées pour veiller à ce que, en cas d'adoption à l'étranger, le placement de l'enfant ne se traduise pas par un profit matériel indu pour les personnes qui en sont responsables;
e) poursuivent les objectifs du présent article en concluant des arrangements ou des accords bilatéraux ou multilatéraux, selon les cas, et s'efforcent dans ce cadre de veiller à ce que les placements d'enfants à l'étranger soient effectués par des autorités ou des organes compétents ».
53. Si, comme il a été vu plus haut, le droit au respect de la vie familiale, qui présuppose l'existence d'une famille et ne protège pas le simple désir d'en fonder une, peut inclure certaines situations dans lesquelles il n'y a pas de lien génétique entre un enfant et une personne mais bien un lien de nature sociale (115) , il n'empêche, que, toujours en vertu de ce droit, la protection de la vie familiale a pour principale portée, en ce qui concerne les enfants, de consacrer les droits de ces derniers de voir leur filiation établie dès la naissance, de mener une vie familiale normale et d'être élevés par leurs parents d'origine (116) . Sauf circonstances particulières liées à l'intérêt de l'enfant, telles qu'elles sont traduites en droit belge, dans les conditions limitatives de leur mise en œuvre, par exemple par les institutions de l'adoption ou de la tutelle officieuse, ce droit pourrait faire obstacle à la reconnaissance d'un lien familial entre un enfant et d'autres personnes que ses parents.
54. Ceci étant, comme pour l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, il convient d'être prudent dans la lecture des dispositions précitées de la Convention relative aux droits de l'enfant au regard des situations visées par les propositions à l'examen. Ceci vaut spécialement pour son article 7, qui garantit le droit pour un enfant de connaître ses parents et d'être élevé par eux.
Cette dernière disposition pourrait être interprétée comme interdisant les procédés par lesquels des enfants peuvent être conçus et naître dans des conditions qui ne leur permettent pas de connaître leurs deux parents et d'être élevés par eux, sous la réserve des protections de remplacement envisagées par les articles 20 et 21 de la Convention.
Telle n'est toutefois pas la lecture que fait le Conseil d'État de ces dispositions, au regard de la gestation pour autrui.
Les articles 7 et 20 de la Convention garantissent à chaque enfant, dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux (117) ou, si nécessaire, le droit à une protection de remplacement (118) . Toutefois, ces dispositions n'excluent pas que des enfants soient conçus dans des circonstances où les deux parents sont inconnus, par exemple en cas de fertilisation in vitro ou d'accouchement dans l'anonymat. Dans le même sens, ces dispositions n'excluent pas non plus que des enfants soient conçus et naissent dans le cadre d'une gestation pour autrui. En revanche, les dispositions précitées garantissent que tous les enfants, quelle que soit la manière dont ils ont été conçus ou dont ils naissent, bénéficient de certains droits.
On aura observé d'ailleurs que c'est « dans la mesure du possible » que le texte garantit ce droit. Si cette formule ne peut évidemment être interprétée comme permettant aux États de se délier des obligations prévues par cette disposition, elle leur permet de tenir compte de situations dans lesquelles il est impossible d'y satisfaire; ces situations doivent être objectivement et raisonnablement identifiées, compte tenu notamment de l'intérêt de l'enfant.
Sans doute les États signataires de la Convention ont-ils pris en compte, en inscrivant à l'article 7 le droit qu'a chaque enfant de connaître ses parents et, dans la mesure du possible, le droit d'être élevé par eux, la situation qui prévalait lors de l'adoption de la Convention, à savoir que les « parents » sont également toujours tous deux les parents génétiques. La Convention n'a pas pris en compte la situation où il serait convenu que, dès la naissance, l'enfant serait confié à d'autres parents qui ne seraient pas les parents résultant de la relation biologique entre la mère et l'enfant qu'elle porte, ainsi que de celle qui existe entre la mère et la personne qui partage sa vie; l'environnement créé par les autres parents qui sont les seuls à avoir conçu un véritable projet parental pourrait être qualifié comme étant de nature familiale et comme constituant même la famille d'origine de l'enfant. Dans cette hypothèse, il n'apparaît pas du tout clairement si, au sens de l'article 7 de la Convention, les « parents » sont les « parents biologiques », c'est-à-dire la mère porteuse et éventuellement la personne qui partage sa vie, ou les parents commanditaires.
55. En tout état de cause, le critère central qui doit être pris en compte par le législateur lorsqu'il organise certains aspects de la vie familiale qu'il lui appartient de respecter et de protéger est celui de l'intérêt supérieur de l'enfant. L'adjectif « supérieur », qui se lit dans plusieurs dispositions de la Convention relative aux droits de l'enfant, confirme qu'en cas de conflit avec d'autres intérêts en cause, c'est celui de l'enfant qui doit primer.
Cette considération s'applique au regard des autres droits fondamentaux en présence, comme par exemple le droit au respect de la vie privée. Il échet d'examiner de plus près les implications de ce dernier droit.
5º) Le droit au respect de la vie privée
56. L'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, dont le texte figure ci-avant, sous le nº 38, protège également le droit au respect de la vie privée. Cette disposition impose également des obligations positives à l'État (119) .
La vie privée couvre non seulement la sphère intime des relations personnelles mais aussi « le droit pour l'individu de nouer et développer des relations avec ses semblables (120) et inclut le droit à l'identité (121) , ainsi que le droit au développement personnel (122) .
Le souhait d'avoir des enfants et de réaliser ce voeu par le recours, le cas échéant, à des techniques comme celle de la procréation médicalement assistée ou de la gestation pour autrui peuvent être considérées comme tombant sous le champ d'application de l'article 8 au titre du droit à la vie privée, ce droit pouvant — il convient de le rappeler — être limité sur la base du paragraphe 2 de cette disposition.
57. On a vu plus haut (123) que la notion de vie familiale au sens de l'article 8 de la Convention impliquait qu'un lien familial avait été établi en fait entre un enfant et une personne.
En l'absence d'une vie familiale, lorsque le seul lien éventuel est celui qui résulte de la génétique, l'article 8 peut trouver toutefois à s'appliquer, mais au titre du droit au respect de la vie privée.
Dans l'affaire Mikulic, dans laquelle une personne se plaignait d'avoir eu des difficultés à faire établir judiciairement, sur la base notamment de tests génétiques, qu'elle était la fille d'un homme ayant eu des relations sexuelles avec la mère de cette fille, et affirmait en conséquence
« que son droit au respect de sa vie privée et familiale a[vait] été violé du fait que les tribunaux internes [s'étaient] montrés incapables de statuer sur son action en recherche de paternité et l'[avaient] donc laissée dans l'incertitude quant à son identité personnelle (124) ,
la Cour commence par constater que, même si, comme on l'a exposé plus haut, des liens familiaux de facto pouvaient tomber sous le champ d'application du droit à la vie familiale, tel n'était pas le cas en l'espèce, « dans la mesure où aucun lien familial n'a été établi entre la requérante et son père prétendu » (125) .
Elle ajoute toutefois les importantes considérations qui suivent:
« 52. [...] La Cour rappelle toutefois que l'article 8, pour sa part, protège non seulement la vie « familiale » mais aussi la vie « privée ».
53. La Cour estime que la vie privée inclut l'intégrité physique et psychologique d'une personne et englobe quelquefois des aspects de l'identité physique et sociale d'un individu. Le respect de la « vie privée » doit aussi comprendre, dans une certaine mesure, le droit pour l'individu de nouer des relations avec ses semblables (voir, mutatis mutandis, Niemietz c. Allemagne, arrêt du 16 décembre 1992, [...], § 29).
Il paraît d'ailleurs n'y avoir aucune raison de principe de considérer la notion de « vie privée » comme excluant l'établissement d'un lien juridique entre un enfant né hors mariage et son géniteur.
54. La Cour a déjà déclaré que le respect de la vie privée exige que chacun puisse établir les détails de son identité d'être humain et que le droit d'un individu à de telles informations est essentiel du fait de leurs incidences sur la formation de la personnalité (Gaskin c. Royaume-Uni, arrêt du 7 juillet 1989, [...], § 39).
55. En l'espèce, la requérante est une enfant née hors mariage qui cherche, par la voie judiciaire, à établir qui est son géniteur. En quête de la vérité biologique, son action en recherche de paternité vise à déterminer ses liens juridiques avec HP [, le père supposé]. En conséquence, il existe une relation directe entre l'établissement de la filiation et la vie privée de la requérante.
Il s'ensuit que les faits de la cause tombent sous l'empire de l'article 8 de la Convention ».
Sur le fond, la Cour a jugé ce qui suit:
« Selon la Cour, les personnes qui se trouvent dans la situation de la requérante ont un intérêt vital, défendu par la Convention, à obtenir les informations qui leur sont indispensables pour découvrir la vérité sur un aspect important de leur identité personnelle. D'un autre côté, il faut garder à l'esprit que la nécessité de protéger les tiers peut exclure la possibilité de les contraindre à se soumettre à quelque analyse médicale que ce soit, notamment à des tests ADN.
Les États parties à la Convention ont retenu des solutions différentes face au problème qui se pose lorsqu'un père présumé refuse d'obtempérer à la décision d'un tribunal lui enjoignant de subir les tests voulus pour établir les faits. Dans certains États, les tribunaux peuvent condamner l'intéressé à une amende ou à une peine d'emprisonnement. Dans d'autres pays, la résistance à une telle injonction peut faire naître une présomption de paternité ou constituer une atteinte à l'autorité de la justice passible de poursuites pénales.
Un système tel que celui de la Croatie, qui ne prévoit pas de moyens de contraindre le père prétendu à se conformer à un ordre du tribunal lui enjoignant de se soumettre à des tests ADN, peut en principe être jugé compatible avec les obligations découlant de l'article 8, eu égard à la marge d'appréciation de l'État. La Cour estime toutefois que, dans le cadre d'un tel système, les intérêts de la personne qui cherche à déterminer sa filiation doivent être défendus lorsque la paternité ne peut être établie au moyen de tests ADN. L'absence de toute mesure procédurale de nature à contraindre le père prétendu à se plier à l'injonction d'un tribunal n'est conforme au principe de proportionnalité que si le système en question offre d'autres moyens grâce auxquels une autorité indépendante peut statuer rapidement sur l'action en recherche de paternité. Or aucune procédure de ce type n'était prévue en l'espèce (voir, mutatis mutandis, Gaskin précité, p. 20, § 49).
65. En outre, pour trancher une action tendant à faire établir la paternité, les tribunaux doivent tenir compte de l'intérêt supérieur de l'enfant. La Cour estime que la procédure existante ne ménage pas un juste équilibre entre le droit de la requérante de voir dissiper sans retard inutile son incertitude quant à son identité personnelle et le droit de son père présumé de ne pas subir de tests ADN; elle considère que la protection des intérêts en jeu n'est pas proportionnée.
66. En conséquence, l'inefficacité des tribunaux a maintenu la requérante dans un état d'incertitude prolongée quant à son identité personnelle. Les autorités croates ont donc failli à garantir à l'intéressée le « respect » de sa vie privée auquel elle a droit en vertu de la Convention.
Il s'ensuit qu'il y a eu violation de l'article 8 de la Convention. »
Cet arrêt montre l'importance toute particulière pour une personne de connaître ses parents génétiques, comme touchant à la détermination de son « identité personnelle ».
Ce droit n'apparaît toutefois pas comme absolu. La condamnation de l'État mis en cause en raison de l'impossibilité pour un enfant de faire établir la paternité qui le concerne tient compte du droit reconnu au père supposé, sur la base, lui aussi, de l'article 8 de la Convention, de ne pas subir de test ADN forcé. Comme les paragraphes 65 et 66 de l'arrêt le laissent apparaître (126) , le droit de l'enfant pourrait être mis en œuvre par le recours à une « autorité indépendante » ménageant, dans une certaine mesure, le droit mentionné ci-avant, reconnu au père supposé.
58. L'arrêt Mikulic poursuit l'enseignement de l'arrêt Gaskin de la Cour européenne, mais dans un contexte axé davantage sur la relation familiale directe que l'enfant voulait faire constater entre elle et l'un de ses parents génétiques. Dans l'affaire Gaskin, il s'agissait également de la recherche d'informations concernant le passé personnel d'un enfant, devenu majeur, mais dans ce cas ces informations étaient détenues par les services sociaux municipaux auxquels l'intéressé avait été confié pendant son enfance. Face au refus de lever la confidentialité qui entourait les dossiers contenant les informations en cause, la Cour a jugé ce qui suit, en substance:
« [L]es personnes se trouvant dans la situation du requérant ont un intérêt primordial, protégé par la Convention, à recevoir les renseignements qu'il leur faut pour connaître et comprendre leur enfance et leurs années de formation. Cependant, on doit aussi considérer que le caractère confidentiel des dossiers officiels revêt de l'importance si l'on souhaite recueillir des informations objectives et dignes de foi; en outre, il peut être nécessaire pour préserver des tiers. Sous ce dernier aspect, un système qui subordonne l'accès aux dossiers à l'acceptation des informateurs, comme au Royaume-Uni, peut en principe être tenu pour compatible avec l'article 8, eu égard à la marge d'appréciation de l'État. Il doit toutefois sauvegarder, quand un informateur n'est pas disponible ou refuse abusivement son accord, les intérêts de quiconque cherche à consulter des pièces relatives à sa vie privée et familiale; il ne cadre avec le principe de proportionnalité que s'il charge un organe indépendant, au cas où un informateur ne répond pas ou ne donne pas son consentement, de prendre la décision finale sur l'accès. Or il n'en allait pas ainsi en l'espèce.
Partant, les procédures suivies n'ont pas assuré à la vie privée et familiale de M. Gaskin le respect voulu par l'article 8, lequel a donc été enfreint » (127) .
Dans cet arrêt, c'est l'absence de procédure permettant à un organe indépendant de trancher le conflit d'intérêts qui est au cœur de la critique de la Cour. En même temps, la Cour souligne l'importance de l'intérêt, qualifié de « primordial » et « protégé par la Convention », pour une personne de recevoir les renseignements qu'il lui faut pour connaître et comprendre son enfance.
59. L'arrêt Odièvre, du 13 février 2003, de la Cour européenne des droits de l'homme procède également à la pesée des intérêts en présence en validant, au regard de l'article 8 de la Convention, l'anonymat de l'accouchement qui peut se pratiquer en France, dit l'« accouchement sous X ».
La Cour y rappelle qu'à ses yeux,
« les personnes « ont un intérêt primordial protégé par la Convention à recevoir des renseignements qu'il leur faut connaître, à comprendre leur enfance et leurs années de formation » (128) .
La Cour poursuit, en mentionnant les différences entre les affaires Mikulic et Gaskin, dont il vient d'être question, et l'espèce jugée, touchant essentiellement au fait que, dans celle-ci, la recherche de l'enfant concernait une
« mère [...] biologique qui [...] a abandonné [l'enfant] dès sa naissance et qui a expressément demandé le secret de celle-ci » (129) ,
et en observant que l'anonymat de la naissance rencontrait des intérêts légitimes de la mère (130) , ainsi que « l'intérêt général » résultant du
« souci de protéger la santé de la mère et de l'enfant lors de la grossesse et de l'accouchement, et d'éviter des avortements, en particulier des avortements clandestins, ou des abandons « sauvages » (131) .
Compte tenu notamment de la marge d'appréciation des États en la matière (132) , la Cour conclut comme suit:
« 48. En l'espèce, la Cour observe que la requérante a eu accès à des informations non identifiantes sur sa mère et sa famille biologique lui permettant d'établir quelques racines de son histoire dans le respect de la préservation des intérêts des tiers.
49. Par ailleurs, le système mis en place par la France récemment, s'il conserve le principe de l'admission de l'accouchement sous X, renforce la possibilité de lever le secret de l'identité qui existait au demeurant à tout moment avant l'adoption de la loi du 22 janvier 2002. La nouvelle loi facilitera la recherche des origines biologiques grâce à la mise en place d'un Conseil national pour l'accès aux origines personnelles, organe indépendant, composé de magistrats, de représentants d'associations concernées par l'objet de la loi et de professionnels ayant une bonne connaissance pratique des enjeux de la question. D'application immédiate, elle peut désormais permettre à la requérante de solliciter la réversibilité du secret de l'identité de sa mère sous réserve de l'accord de celle-ci de manière à assurer équitablement la conciliation entre la protection de cette dernière et la demande légitime de l'intéressée, et il n'est même pas exclu, encore que cela soit peu probable, que, grâce au nouveau conseil institué par le législateur, la requérante puisse obtenir ce qu'elle recherche.
La législation française tente ainsi d'atteindre un équilibre et une proportionnalité suffisante entre les intérêts en cause. La Cour observe à cet égard que les États doivent pouvoir choisir les moyens qu'ils estiment les plus adaptés au but de la conciliation ainsi recherchée. Au total, la Cour estime que la France n'a pas excédé la marge d'appréciation qui doit lui être reconnue en raison du caractère complexe et délicat de la question que soulève le secret des origines au regard du droit de chacun à son histoire, du choix des parents biologiques, du lien familial existant et des parents adoptifs.
Partant, il n'y a pas eu violation de l'article 8 de la Convention. »
Dans cet arrêt, la Cour confirme la très haute importance, en principe, de la connaissance, par une personne de son histoire personnelle, en ce compris les aspects de celle-ci touchant à ses origines, mais elle admet qu'il peut y avoir des motifs justifiant qu'il n'y ait pas une transparence totale sur ces derniers éléments. Le Conseil d'État estime toutefois qu'il ne peut être tenu compte de cet arrêt, quant à l'importante question de l'anonymat de la mère ayant porté l'enfant, qu'en ayant égard aux particularités de cette affaire et aux motifs tirés de l'intérêt général dont il est fait état dans l'arrêt.
60. Il résulte de la jurisprudence des arrêts Gaskin, Mikulic et Odièvre, recensée ci-avant, sous les nos 57 à 59, qu'un enfant puise dans son droit à la vie privée un intérêt devant être protégé par l'État tendant à ce que son histoire personnelle et notamment ses liens génétiques puissent être établis et que le droit qui en découle ne peut être limité que sur la base d'un test de proportionnalité particulièrement rigoureux, même lorsqu'il entre en conflit avec un droit d'une importance telle que le droit à l'intégrité physique. Ce test peut également mettre en balance des intérêts généraux de la société.
Face aux conflits d'intérêt qui surgissent, la Cour montre l'importance qu'il y a à organiser des procédures permettant la prise en compte de ces derniers par un organe indépendant, notamment lorsque l'anonymat de la mère a été organisé par la loi pour des motifs admissibles.
La Cour valide toutefois le maintien de cet anonymat, moyennant la procédure qui doit permettre en tout cas qu'une demande de levée de l'anonymat puisse être introduite auprès de la mère d'origine.
61. Dans la situation inverse, s'agissant de l'intérêt de l'adulte à l'égard d'un enfant avec lequel il n'a pas encore entamé une relation familiale au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, la Cour européenne, rappelant son arrêt Rasmussen du 28 novembre 1984, a jugé que
« la détermination du régime juridique des relations du requérant avec sa fille putative concernait sans nul doute sa vie privée » (133) .
Dans son arrêt Odièvre, précité, la Cour relève, en ce sens, que
« [l]a naissance, et singulièrement les circonstances de celle-ci, relève de la vie privée de l'enfant, puis de l'adulte, garantie par l'article 8 de la Convention. » (134) .
Toutefois, dans la décision Nylund, qui concernait le refus fait à un homme d'établir sa paternité à l'égard d'un enfant qu'il disait avoir conçu avec une femme avec laquelle il avait cohabité avant leur séparation et un mariage subséquent de cette femme avec un autre homme, père légal de l'enfant, la Cour déclare la requête irrecevable. Après avoir considéré que la relation avec l'enfant ne tombait pas sous la qualification de « vie familiale », en raison de l'absence de liens affectifs entre les deux êtres (135) , elle admet que le droit à la vie privée pouvait être limité en l'espèce. Elle motive sa décision en ayant égard aux « raisons tenant à la sécurité des rapports juridiques et familiaux » et à la considération selon laquelle
« [i]l se justifie que les tribunaux internes donnent plus de poids aux intérêts de l'enfant et de la famille dans laquelle il vit qu'à ceux d'un demandeur cherchant à faire établir un fait biologique » (136) .
Cette décision, qui concernait pourtant un homme qui s'était fiancé avec la mère avant leur séparation et avait vécu avec elle, mais sans avoir vécu avec l'enfant, explique sa différence d'approche par rapport avec celle de l'arrêt Kroon e.a., précité (137) , par la circonstance
« que contrairement à l'affaire Kroon et autres, dans laquelle l'obstacle à l'action en contestation de paternité contrecarrait les désirs des intéressés, il va en l'espèce dans le sens des souhaits du couple marié pendant le mariage duquel l'enfant est né. En fait, l'obstacle résulte de leur opposition. En outre, dans l'affaire Kroon et autres, la Cour a constaté que la présomption légale de paternité ne profitait en fait à personne (arrêt Kroon et autres précité, [...], § 40) » (138) .
Cette décision est d'autant plus remarquable que le requérant, dans cette affaire, ne souhaitait pas établir une filiation juridique avec l'enfant concerné mais simplement établir officiellement sa paternité, en invoquant d'ailleurs l'intérêt de l'enfant sur ce point.
La Cour s'appuie aussi sur la limite de cette demande pour dénier un véritable intérêt du requérant puisque
« l'établissement de la paternité biologique n'aurait créé en soi aucun droit ou devoir pour les intéressés » (139) .
Par ailleurs, la Cour confirme sa préoccupation relative à l'intérêt qu'a l'enfant de déterminer qui est son père génétique. Si elle écarte l'argumentation du requérant sur ce point, elle ajoute néanmoins ceci:
« [L]a Cour constate qu'en vertu du droit interne, l'enfant pourra, lorsqu'elle aura atteint l'âge de quinze ans, décider elle-même s'il est ou non dans son intérêt d'engager une procédure en recherche de paternité. Néanmoins, cette possibilité ne permet pas de conclure qu'il convient d'autoriser une personne extérieure à la famille à saisir les tribunaux, surtout lorsqu'une telle conclusion, dans les faits, empêcherait l'enfant de prendre ultérieurement une décision elle-même. » (140)
62. Ces arrêts montrent à nouveau, comme il a été exposé en conclusion de l'examen de jurisprudence sur le droit à la vie familiale (141) , que, même si des liens très ténus entre un enfant et son parent génétique ou biologique peuvent fonder, au titre du droit à la vie privée, le maintien ou le rétablissement de certaines relations juridiquement protégées, il n'en demeure pas moins que les espèces ayant donné lieu à ces arrêts concernent, elles aussi, des situations dans lesquelles la relation de départ entre l'enfant et l'adulte résultait d'actes devant avoir normalement pour conséquence l'établissement d'un lien durable, même si celui-ci a été rompu rapidement. Lorsque la relation familiale est rompue rapidement et définitivement, des restrictions au droit à connaître ses origines sont admises en fonction des objectifs poursuivis, la jurisprudence tenant compte aussi de la nécessité d'une procédure devant une instance indépendante prenant en considération les intérêts des personnes concernées.
Par ailleurs, c'est assez largement qu'est accueillie la restriction faite à l'intérêt du parent putatif d'établir qu'il est le père d'un enfant, lorsque, comme dans l'affaire Nylund, la demande vient troubler une relation familiale au bénéfice d'une simple prétention fondée sur un lien génétique, sans prolongement social.
On peut aussi déduire de cet examen de jurisprudence que la Cour européenne des droits de l'homme attache plus d'importance à la nécessité d'établir l'existence d'une relation génétique ou maternelle lorsqu'elle bénéficie à l'enfant que lorsqu'elle profite au parent supposé.
6º) La Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine (142)
L'intitulé exact de cette Convention est le suivant: « Convention pour la protection des droits de l'homme et de la dignité de l'être humain à l'égard des applications de la biologie et de la médecine », en abrégé « Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine ». Elle a été signée à Oviedo le 4 avril 1997.
63. La Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine n'a pas encore été signée par la Belgique mais, lorsque la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro a été adoptée, l'intention avait été exprimée de procéder à cette signature et à la ratification, moyennant éventuellement l'émission de réserves par rapport à certaines dispositions de la Convention, notamment à ses articles 13 et 18 (143) .
Il est donc opportun de faire état des principales règles pertinentes de cette Convention pour les propositions à l'examen, spécialement pour la proposition nº 1440.
64. Les articles 1er, 2, 12 à 14, 16, 18, 21 et 22 méritent particulièrement d'être cités:
« Article 1 — Objet et finalité
Les Parties à la présente Convention protègent l'être humain dans sa dignité et son identité et garantissent à toute personne, sans discrimination, le respect de son intégrité et de ses autres droits et libertés fondamentales à l'égard des applications de la biologie et de la médecine.
Chaque Partie prend dans son droit interne les mesures nécessaires pour donner effet aux dispositions de la présente Convention.
Article 2 — Primauté de l'être humain
L'intérêt et le bien de l'être humain doivent prévaloir sur le seul intérêt de la société ou de la science.
Article 12 — Tests génétiques prédictifs
Il ne pourra être procédé à des tests prédictifs de maladies génétiques ou permettant soit d'identifier le sujet comme porteur d'un gène responsable d'une maladie soit de détecter une prédisposition ou une susceptibilité génétique à une maladie qu'à des fins médicales ou de recherche médicale, et sous réserve d'un conseil génétique approprié.
Article 13 — Interventions sur le génome humain
Une intervention ayant pour objet de modifier le génome humain ne peut être entreprise que pour des raisons préventives, diagnostiques ou thérapeutiques et seulement si elle n'a pas pour but d'introduire une modification dans le génome de la descendance.
Article 14 — Non-sélection du sexe
L'utilisation des techniques d'assistance médicale à la procréation n'est pas admise pour choisir le sexe de l'enfant à naître, sauf en vue d'éviter une maladie héréditaire grave liée au sexe.
Article 16 — Protection des personnes se prêtant à une recherche
Aucune recherche ne peut être entreprise sur une personne à moins que les conditions suivantes ne soient réunies:
i. il n'existe pas de méthode alternative à la recherche sur des êtres humains, d'efficacité comparable;
ii. les risques qui peuvent être encourus par la personne ne sont pas disproportionnés par rapport aux bénéfices potentiels de la recherche;
iii. le projet de recherche a été approuvé par l'instance compétente, après avoir fait l'objet d'un examen indépendant sur le plan de sa pertinence scientifique, y compris une évaluation de l'importance de l'objectif de la recherche, ainsi que d'un examen pluridisciplinaire de son acceptabilité sur le plan éthique;
iv. la personne se prêtant à une recherche est informée de ses droits et des garanties prévues par la loi pour sa protection;
v. le consentement visé à l'article 5 a été donné expressément, spécifiquement et est consigné par écrit. Ce consentement peut, à tout moment, être librement retiré.
Article 18 — Recherche sur les embryons in vitro
1. Lorsque la recherche sur les embryons in vitro est admise par la loi, celle-ci assure une protection adéquate de l'embryon.
2. La constitution d'embryons humains aux fins de recherche est interdite.
Article 21 — Interdiction du profit
Le corps humain et ses parties ne doivent pas être, en tant que tels, source de profit.
Article 22 — Utilisation d'une partie du corps humain prélevée
Lorsqu'une partie du corps humain a été prélevée au cours d'une intervention, elle ne peut être conservée et utilisée dans un but autre que celui pour lequel elle a été prélevée que conformément aux procédures d'information et de consentement appropriées. »
65. Dans son avis 33.641/3 donné le 18 septembre 2002 sur la proposition devenue la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro, la section de législation du Conseil d'État a fait observer ce qui suit:
« 5. La proposition à l'examen se limite à régler la recherche scientifique sur les embryons. Elle ne contient pas, par exemple, de dispositions concernant le droit de disposer des gamètes, la conservation des gamètes et embryons ou les interventions sur des embryons in utero. Ces matières ne sont pas non plus réglementées par d'autres textes.
Il appartient au législateur de s'interroger sur la nécessité d'également légiférer dans ces matières. S'il est vrai qu'après la ratification par la Belgique de la Convention européenne sur les droits de l'homme et la biomédecine, citée ci-après, un nombre de normes seront applicables (144) , il n'en demeure pas moins que quantité d'aspects ne seront toujours pas réglés.
6. Vu l'origine humaine de l'embryon et sa capacité à se développer en un être humain, il est permis d'attendre de l'autorité qu'elle accorde à l'embryon une certaine protection, laquelle s'accroît en fonction du degré de développement de l'embryon.
En principe, il appartient au législateur de déterminer l'étendue de cette protection. Il peut considérer que la recherche scientifique et d'autres pratiques sur les embryons sont légitimes, même si celles-ci peuvent en définitive conduire à la destruction des embryons ou si ces derniers ne peuvent pas, pour quelque autre motif, donner naissance à un être humain. Cependant, il y a des motifs valables pour considérer que les pratiques en matière d'embryons ne sont pas toutes légitimes. C'est donc à juste titre que la proposition fixe des limites.
Le fait que le législateur prévoit une protection des embryons, ne signifie pas en soi qu'il doit concrétiser cette protection pour tous les aspects sous forme de dispositions pénales, comme c'est par exemple le cas pour l'euthanasie et l'interruption de grossesse. Au contraire, le législateur dispose en principe d'une marge d'appréciation pour décider si des actes posés en violation des conditions prescrites par la loi, doivent ou non être soumis à l'application du droit pénal. En l'occurrence, l'article 25 de la Convention européenne sur les droits de l'homme et la biomédecine dispose que des « sanctions appropriées » doivent être prévues dans les cas de manquement aux dispositions de la convention.
À la lumière de cette dernière disposition, les articles 3 et 8 de la proposition nécessitent un examen plus détaillé.
L'article 3 fixe les conditions auxquelles doit satisfaire la recherche sur les embryons in vitro. L'article 8 contient des dispositions relatives au consentement qui doit être donné par une personne pour que ses gamètes ou ses embryons puissent être utilisés in vitro à des fins de recherche.
La proposition ne prévoit pas de pénalisation générale des actes contraires aux articles 3 et 8. Les amendements visant à sanctionner toute violation des dispositions de ces articles, ont d'ailleurs été expressément rejetés en première lecture par la Commission spéciale (145) . Selon l'article 13 de la proposition, seule une infraction à l'article 3, 5º (interdiction d'exécuter une recherche sur un embryon ayant plus de 14 jours, période de congélation non incluse) est punissable.
Manifestement, la Commission spéciale choisit de confier, pour l'essentiel, l'exercice du contrôle du respect des dispositions des articles 3 et 8 à d'autres autorités que les autorités judiciaires, en particulier aux comités locaux d'éthique et à la Commission fédérale. La sanction qui peut résulter de ce contrôle, est l'arrêt de la recherche si la Commission constate qu'elle est menée en violation des dispositions de la loi proposée (article 10, § 2, alinéa 3).
Cette mesure peut être considérée comme étant une « sanction appropriée » (146) (147) .
C. L'application aux propositions relatives à la gestation pour autrui et à la procréation médicalement assistée des règles supérieures examinées
1º) Introduction
66. L'exposé qui suit, après avoir examiné l'admissibilité de l'interdiction de la gestation pour autrui (2º — nos 69 à 72), portera sur le pouvoir d'appréciation du législateur dans les matières concernées et les conditions générales auxquelles son intervention est subordonnée (3º — nos 73 à 82), avant d'aborder des questions plus spécifiques qui se posent au sujet des propositions de loi, de nature à éclairer le législateur quant aux arbitrages qu'il sera appelé à effectuer (4º — nos 83 à 104).
Ce sont les questions touchant aux droits fondamentaux qui sont ici discutées. Les observations plus particulières concernant chaque proposition de loi font l'objet de la partie IV de l'avis. Les questions portant sur la compatibilité de la proposition nº 1440 avec la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine seront toutefois également abordées dans cette partie IV, sous les nos 152 et 153, et ce en raison des liens existant entre ces questions et celles qui surgissent quant à l'articulation de la loi proposée avec la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro.
67. Les propositions à l'examen n'autorisant pas le clonage reproductif d'embryons ou d'autres recherches dérogatoires à celles autorisées dans le cadre de la loi précitée du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro, les questions qui portent sur l'admissibilité de ces techniques ne sont pas pertinentes en l'espèce et ne seront donc pas abordées dans le présent avis.
68. De même, la question de l'admissibilité éventuelle d'une interdiction générale de la procréation médicalement assistée ne se posant pas en l'espèce, elle ne sera pas davantage examinée.
2º) L'admissibilité de l'interdiction de la gestation pour autrui
69. Aucune règle supérieure de droit ne fait obstacle à l'adoption d'une mesure générale d'interdiction de la gestation pour autrui.
Le souhait d'avoir des enfants et de le voir réaliser par le recours à la gestation pour autrui tombe sous le champ d'application de l'article 8, paragraphe 1er, de la Convention européenne des droits de l'homme au titre du droit au respect de la vie privée (148) . Toutefois, compte tenu spécialement des questions sérieuses qui se posent sur le plan éthique (149) , du large pouvoir d'appréciation des États en la matière et de ce que certains de ces États au sein même du Conseil de l'Europe, disposent d'une législation interdisant de manière absolue le recours à ce procédé, pareille interdiction est admissible sur la base de la disposition par laquelle l'article 8, paragraphe 2, de la Convention autorise des ingérences de l'autorité publique dans l'exercice du droit précité, en tant que ces ingérences
« [constituent] une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à [...] la protection de [...] la morale ».
Il n'est pas nécessaire, de vérifier si d'autres objectifs légitimes mentionnés à l'article 8, paragraphe 2, ne pourraient également justifier l'interdiction absolue de la gestation pour autrui.
Le législateur dispose donc de la faculté, en vertu de son pouvoir d'appréciation non limité sur ce point, d'interdire la gestation pour autrui.
70. A fortiori en va-t-il ainsi en ce qui concerne l'interdiction des différents aspects de la commercialisation de ces procédés, comme leur rétribution, leur publicité et l'intermédiation en la matière.
71. La proposition nº 1399 ne soulève donc aucune objection sur ce point. Elle peut renforcer l'interdiction actuelle, résultant des principes généraux aujourd'hui en vigueur du Code civil et des articles 6, 1128, 1131 et 1133 du même Code (150) , par un dispositif exprès et plus précis en ce sens, complété par des dispositions pénales.
72. Il en va de même à l'égard de la proposition nº 1319 pour ce qui concerne la commercialisation de la gestation pour autrui, qu'elle tend à incriminer pénalement.
Toutefois, si les développements de cette proposition confirment l'illicéité de la gestation pour autrui en droit civil actuel, le dispositif n'en contient pas la confirmation expresse, ses auteurs considérant sans doute que pareille disposition serait inutile. La matière étant toutefois en pleine évolution et sujette à controverses (151) , il serait préférable que le législateur apprécie s'il souhaite consacrer l'interdit civil, s'il demeure dans cette conviction, voire le renforcer par une incrimination pénale.
Il y a lieu toutefois de faire observer que l'illicéité actuelle des conventions ayant pour objet la gestation pour autrui, telle qu'elle serait maintenue par la proposition nº 1319, n'implique pas nécessairement qu'une demande d'adoption émanant des parents commanditaires doit être refusé (152) . Sur ce point aussi, le législateur pourrait prendre clairement position (153) .
3º) L'admissibilité de la gestation pour autrui et de la procréation médicalement assistée — Considérations générales
73. Trois propositions admettent de manière conditionnelle la gestation pour autrui et règlent un certain nombre d'aspects concernant la conclusion de la convention en la matière.
74. Il a déjà été observé précédemment dans le présent avis qu'autoriser la gestation pour autrui n'est pas contraire en soi à l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme qui porte sur l'interdiction des traitements inhumains et dégradants (154) , mais que le règlement de ses conséquences doit respecter les droits fondamentaux en matière de protection de la vie privée et familiale des intéressés.
Le Conseil d'État examinera dès lors les propositions de loi à la lumière de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, concernant l'article 8 de la Convention, qui a été analysée plus haut.
75. En outre, le Conseil d'État garde très présent à l'esprit qu'à ce jour la Cour n'a pas encore été amenée à se prononcer formellement sur la gestation pour autrui et que, dès lors, la prudence s'impose pour tirer des enseignements de la jurisprudence de la Cour. Bien que les cas traités par la Cour présentent une certaine analogie avec la situation de la gestation pour autrui, il existe quand même des différences par rapport aux situations dans lesquelles des enfants sont privés des contacts avec leurs parents et pour lesquels la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme conclut à la violation du droit au respect de la vie familiale ou de la vie privée: dans ces affaires, il s'agit souvent de situations de conflit familial ou de ruptures non souhaitables dans le lien unissant un adulte et l'enfant qu'il a élevé, voire conçu dans une perspective apparaissant normalement comme familiale, ce qui n'est pas le cas d'une gestation pour autrui ou d'un don de gamètes ou d'embryons en ce qui concerne la mère porteuse, la personne qui partage sa vie et les donateurs de gamètes ou d'embryons (155) .
76. La même prudence s'impose d'ailleurs par rapport aux règles déduites de la Convention relative aux droits de l'enfant, malgré la priorité nette que cette Convention confère à la continuité entre le milieu familial d'origine de l'enfant et celle de sa croissance et de son développement, spécialement par rapport à l'adoption et aux autres situations dans lesquelles un enfant est séparé de sa famille d'origine.
77. L'examen de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, de la jurisprudence qui tend à l'interpréter, ainsi que de la Convention relative aux droits de l'enfant, spécialement de ses articles 7 et 20, conduit à la constatation que, en ce qui concerne la gestation pour autrui et la procréation médicalement assistée, plusieurs intérêts légitimes sont susceptibles d'entrer potentiellement en conflit: principalement ceux de l'enfant né de la mère porteuse et ceux des commanditaires, sans oublier ceux des personnes partageant la vie des personnes concernées.
Les textes examinés ne conduisent à aucune conclusion claire, en droit, quant aux intérêts devant nécessairement prévaloir.
L'analyse de l'article 8 a montré qu'une vie familiale est créée dès qu'une relation est née entre un enfant et les personnes ayant pris soin de lui, même sans lien génétique (156) . Inversément, l'existence d'un lien génétique a conduit la Cour européenne des droits de l'homme et la Commission européenne des droits de l'homme à admettre en principe l'existence d'une vie familiale (157) . Le simple don de sperme (158) ou l'existence d'une relation antérieure entre la mère et un homme non accompagnée d'une relation affective entre cet homme et l'enfant (159) ne suffisent toutefois pas. En revanche, un projet d'adoption avec un enfant né établit la « vie familiale », même sans contacts directs entre les demandeurs et l'enfant concerné (160) .
Au titre du droit au respect de la vie privée, l'article 8 tend par ailleurs à protéger la mère gestatrice et le foetus qui se développe en elle (161) .
Le droit au respect de la vie privée tend à permettre à un enfant de savoir qui sont ses parents biologiques et génétiques (162) . Quant à l'intérêt pour des parents génétiques d'établir cette réalité, s'il tombe bien sous l'empire du droit au respect de la vie privée, il nécessite, pour être protégé au point de troubler une relation familiale établie par ailleurs, qu'il ait existé une relation affective entre l'enfant et le parent se prétendant tel (163) .
En cas de rupture familiale, par l'effet par exemple de la séparation des personnes s'étant occupées de l'enfant, le droit au maintien des relations familiales doit être assuré, même en l'absence de lien biologique ou génétique avec l'enfant (164) .
La synthèse sommaire qui précède tend simplement à rappeler qu'à divers titres, le droit au respect de la vie privée ou familiale a vocation à s'appliquer. Ceci n'empêche évidemment pas que les situations concernées peuvent donner lieu à des limitations conformément au paragraphe 2 de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, allant parfois jusqu'à des restrictions quasi absolues que peuvent établir les États par la loi (165) .
Pour les hypothèses concernées par les propositions, les indications fournies par les textes internationaux et la jurisprudence ne permettent aucune conclusion définitive.
78. Il importe toutefois que, lorsque le législateur intervient, il le fasse d'une manière telle que puissent être tranchées les questions importantes qui se posent quant aux conflits d'intérêt susceptibles d'apparaître, en ayant pour principale préoccupation l'intérêt de l'enfant concerné, qui prime celui qui pourrait résulter, en ce qui concerne les commanditaires ou les personnes recourant à la procréation médicalement assistée, de leur désir légitime d'enfant.
Ces questions importantes sont tout cas celles qui concernent en:
a) en ce qui concerne la procréation médicalement assistée: la qualité des personnes habilitées à y recourir et de celles qui peuvent offrir leurs gamètes ou leurs gonades, spécialement au regard de l'état de santé des personnes concernées ainsi que de la situation familiale de ces bénéficiaires et de ces donneurs, en ce qui concerne la nécessité ou non pour les bénéficiaires de former un couple, la stabilité présumée de celui-ci et son orientation sexuelle;
b) en ce qui concerne la gestation pour autrui: la qualité des commanditaires et des femmes offrant leurs services de gestatrice, spécialement au regard de l'état de santé des personnes concernées ainsi que de la situation familiale de ces commanditaires et de ces femmes, en ce qui concerne la nécessité ou non de former un couple, la stabilité présumée de celui-ci et son orientation sexuelle;
c) le caractère obligatoire de la convention tendant à la gestation pour autrui et de l'engagement qu'il contiendrait de remettre l'enfant au moment de la naissance;
d) pour la procréation médicalement assistée et pour la gestation pour autrui:
— l'anonymat des personnes concernées, cette question pouvant être réglée différemment selon les personnes à l'égard desquelles l'anonymat serait requis;
— les effets de la naissance de l'enfant concerné sur sa filiation et sur d'autres aspects de la relation familiale que l'enfant et les personnes concernées seraient habilitées à maintenir, moyennant éventuellement un statut particulier, différent de celui de la filiation;
— le règlement des conflits entre les personnes concernées, par exemple, s'il est requis que les commanditaires forment un couple, les effets de leur séparation quant au sort de l'enfant porté par la gestatrice.
79. Il appartient au législateur de trancher lui-même, dans la loi, ces questions importantes.
On a vu toutefois que, dans certaines hypothèses mettant en jeu des conflits d'intérêts particulièrement difficiles à trancher, comme ceux qui sont liés à la confidentialité de certaines données, la Cour européenne des droits de l'homme s'est montrée attentive à la possibilité qu'offrirait la loi de déroger, moyennant les procédures appropriées, aux principes qu'elle énonce (166) .
Aussi, il peut être souhaitable que la loi envisagée, sur des questions limitées pour lesquelles aucune solution claire ne se dégage, comme celle qui vient d'être évoquée de l'anonymat ou celle du maintien de certaines relations familiales entre l'enfant concerné et la mère porteuse, organise pareilles procédures faisant appel à des instances, judiciaires ou non, bénéficiant de l'indépendance et de l'expertise nécessaires à apprécier l'intérêt de l'enfant dans ces circonstances, et aptes à déroger, dans des circonstances appropriées, aux règles de principe établies par la loi. Il va de soi que, s'il devait être fait appel à un organe non judiciaire, des voies de recours judiciaires devraient être ménagées (167) .
Ces procédures ne pourraient toutefois porter sur les questions fondamentales, telles celles qui sont mentionnées aux litteras a) et b) du nº 78, ci-avant, ni sur les questions liées à la filiation.
Sur le problème du caractère obligatoire de la convention (littera c), ci-avant, sous le nº 78), il est renvoyé aux observations faites plus bas, sous les nos 83 à 92.
Il est en tout cas exclu que le législateur laisse aux parties à la convention le soin de régler les questions essentielles mentionnées ci-avant, sous le nº 78.
80. Sur les questions en rapport avec l'aménagement du droit de la filiation et des autres aspects de l'encadrement juridique de la relation entre les enfants concernés et les personnes ayant participé, à un titre ou à un autre, à la procréation, il se recommande que les modifications de la loi figurent dans le Code civil lui-même (168) plutôt que dans des dispositions autonomes de la loi proposée. Elles gagneraient à se présenter comme clairement dérogatoires aux textes concernés, de préférence au sein même (169) ou à proximité de ceux-ci (170) .
Dans deux des trois propositions qui autorisent la gestation pour autrui sous certaines conditions, il est question de l'adoption. Ainsi, l'article 8 de la proposition nº 1230 fait expressément mention d'une déclaration d'adoption préalable et l'article 9 modifie l'article 348-4 du Code civil en ce qui concerne le consentement à l'adoption. La proposition nº 1271 conçoit également la convention de gestation pour autrui comme une forme d'adoption d'un enfant avant sa conception (171) , à cette différence que les parties sont liées par le contrat. Dans la mesure où les auteurs entendent que les droits parentaux se constituent par l'adoption, les dispositions concernées devront être inscrites dans le titre VIII du Code civil qui porte sur l'adoption.
81. Il appartiendra au législateur, lorsqu'il réglera certaines situations, de prendre en considération également celles qui leur sont comparables, conformément aux exigences résultant des principes d'égalité et de non-discrimination (172) (173) .
Il va de soi que, conformément aux règles jurisprudentielles en la matière, il appartiendra au législateur d'identifier d'abord les situations comparables (174) ; dans la mesure où il entend maintenir ou introduire des différences de traitement entre celles-ci, il devra être en mesure de les justifier raisonnablement, le cas échéant dans les travaux préparatoires.
Ainsi, le législateur pourrait aménager des situations voisines pour tenir compte des particularités qui les caractérisent, en prévoyant des modalités de mise en œuvre ou des procédures qui pourraient être propres à chaque situation. Il pourrait aussi considérer que certaines situations, en raison des particularités qu'elles présentent, ne doivent pas être favorisées ni bénéficier de la protection de la loi.
82. Les propositions à l'examen qui autorisent la gestation pour autrui et la procréation médicalement assistée seront revues à la lumière de ces recommandations, examinées elles-mêmes à la lumière de la jurisprudence de la Cour et de la Commission européenne des droits de l'homme exposée plus haut, sous les nos 38 à 62.
Compte tenu du pouvoir d'appréciation du législateur en la matière, l'exposé qui suit ne vise pas à envisager chacune des hypothèses susceptibles de subir le test de compatibilité aux principes d'égalité et de non-discrimination, mais se bornera à faire état de quelques situations qui sont de nature à susciter des questions et pouvant être éclairées sur le plan juridique.
4º) L'admissibilité de la gestation pour autrui et de la procréation médicalement assistée — Questions spécifiques en rapport avec les droits fondamentaux
a) La rupture entre la mère porteuse et l'enfant porté — Le refus des commanditaires d'accueillir l'enfant
83. La question se pose tout d'abord de savoir quelle règle appliquer, à la lumière de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme, lorsque la mère porteuse s'oppose, après la naissance, à ce que l'enfant soit remis aux parents commanditaires.
Il résulte de l'article 8 de la Convention que la vie familiale naît dès la naissance d'un enfant « et par le fait même de celle-ci » (175) . Compte tenu des spécificités de la gestation pour autrui par rapport aux espèces jugées par la Cour européenne des droits de l'homme relatives à cette disposition, on ne saurait en déduire que, selon la jurisprudence, la mère porteuse devrait être autorisée à garder l'enfant. Comme cependant, durant les neuf mois de la grossesse, des liens plus importants ont été noués entre la mère porteuse et l'enfant qu'entre les commanditaires et celui-ci, il appartient au législateur d'apprécier s'il n'y a pas lieu d'empêcher l'exécution de la convention contre le gré de la mère porteuse.
La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme attache une importance particulière au maintien de la relation entre l'enfant et ses parents lorsqu'il existe un lien génétique entre eux, sans — il est vrai — en faire une exigence absolue, notamment en l'absence de lien affectif entre les parents génétiques et l'enfant (176) . Les liens de la mère porteuse avec son enfant sont plus forts que ceux des parents commanditaires avec l'enfant. Il ressort des éléments de la jurisprudence de la Cour que, lorsque la mère porteuse est également la mère génétique, il est très probable que ces liens seraient considérés par la Cour comme constitutifs d'une « vie familiale » au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. Dès lors, l'appréciation du législateur doit tenir compte de manière spécifique de l'hypothèse dans laquelle la mère porteuse est également la mère génétique de l'enfant, qui ne peut être assimilée à celle où l'ovule a été fourni par une autre femme; la différence entre les situations est encore plus grande lorsque l'ovule provient de la mère commanditaire elle-même. Il faudrait une justification particulièrement rigoureuse pour que soit admise, au titre de l'article 8, paragraphe 2, de la Convention européenne des droits de l'homme, la possibilité d'exécution forcée d'une convention entre des parents commanditaires et une mère porteuse génétique (177) .
84. Les observations qui suivent se placent dans l'hypothèse où, malgré les considérations émises ci-avant, le législateur opte pour la possibilité d'une exécution forcée de la convention, ce qui cadrerait avec le système même de la gestation pour autrui, dès lors qu'il est admis en soi et qu'il se fonde sur un accord donné librement par chaque partie.
Dans cette logique, il y aurait lieu de partir du principe selon lequel l'engagement pris par la mère porteuse de céder l'enfant après la fin de la grossesse doit prévaloir, le recours aux voies d'exécution forcée ne pouvant bien entendu résulter que d'un titre exécutoire procuré par une décision judiciaire.
85. Le système de la gestation pour autrui suppose évidemment que l'engagement des parties ait été donné, conformément d'ailleurs aux principes qui gouvernent le droit médical et le droit à la libre disposition de son corps, de manière libre et éclairée. Les propositions n'appellent aucune critique sur ce point, chacune prévoyant même l'intervention de médecins ou de psychologues avant la conclusion de l'accord et celle d'un notaire pour l'instrumenter.
La proposition nº 417 ne prévoit toutefois pas d'intervention médicale sur le principe même du recours à la gestation pour autrui en ce qui concerne le couple commanditaire: selon son article 5, § 1er, le médecin, qui doit être un gynécologue, se limite à constater chez la femme « l'impossibilité physiologique d'être enceinte du mari non séparé de fait ou du concubin » ou « le très grand risque qu'une grossesse ferait courir à sa propre santé ou à celle de l'enfant ». Même si cette consultation médicale pourra également donner l'occasion au médecin d'entourer la démarche projetée de ses conseils, le législateur appréciera s'il ne faudrait pas prévoir plus spécifiquement que ces conseils doivent porter sur le recours à une gestation pour autrui.
86. Si le législateur opte pour la possibilité d'une exécution forcée de la convention, il y aurait lieu, en cas de refus de la part de la mère porteuse, d'organiser un recours permettant d'obtenir à très bref délai une décision judiciaire autorisant l'exécution forcée. À défaut d'une telle procédure rapide, des liens plus intenses pourraient s'installer entre la mère biologique et l'enfant en manière telle que l'intérêt de ce dernier ne pourrait plus conduire à une autre solution que le maintien dans la famille de celle-ci.
87. Si les commanditaires refusent d'accueillir l'enfant et qu'il en va de même pour la mère porteuse, la loi doit exposer les conditions requises pour que ce refus soit certain.
Elle doit aussi déterminer quel sera alors le sort de l'enfant. On peut supposer que ce seront les règles relatives à l'adoption qui s'appliqueront. Il y aura lieu d'articuler les règles à prendre avec ces dernières. Ainsi par exemple, se pose la question de savoir s'il est adéquat de maintenir, dans l'hypothèse ici examinée dans laquelle l'accord donné à la gestation pour autrui impliquait dès l'origine l'intention d'abandonner l'enfant, le délai de deux mois pendant lequel les parents de l'enfant ne peuvent consentir à l'adoption, tel qu'il est prévu par l'article 348-4 du Code civil, de même que les autres garde-fou prévus par cette disposition (178) .
88. Compte tenu de ce que le législateur ne peut prévoir l'ensemble des hypothèses que la diversité des situations peut susciter, il pourrait se recommander que les solutions légales soient considérées comme supplétives de celles qui, dans l'intérêt de l'enfant, seraient confiées à un juge en cas de litige. La procédure devrait alors en être organisée.
89. Enfin, lorsque la décision judiciaire constitue le titre permettant l'exécution forcée, il sera également nécessaire, toujours afin de sauvegarder, autant que faire se peut, l'intérêt de l'enfant, de l'organiser en manière telle que ne se crée pas une situation irréversible au sein de la famille de la mère porteuse et que les modalités de l'exécution forcée ménagent les considérations d'humanité aptes à ne pas traumatiser l'enfant.
90. Ceci étant, rien n'interdit au législateur de prévoir un régime par lequel l'intérêt de l'enfant pourrait donner lieu à une nouvelle prise en considération, en principe judiciaire à défaut d'accord des parties, au moment de la naissance. Aucune des propositions à l'examen ne l'envisage; il n'est donc pas nécessaire d'examiner plus complètement cette option, dès lors qu'elle ne s'impose en vertu d'aucune règle supérieure de droit.
On relèvera toutefois que la solution suggérée ci-dessus, sous le nº 88, par laquelle la loi consacrerait le caractère obligatoire de la convention d'origine sous la réserve d'un recours judiciaire rapide, pourrait constituer une formule alliant de manière équilibrée la nécessité d'une force obligatoire de cette convention et les impératifs déduits de l'intérêt de l'enfant (179) .
91. Dans les procédures qui seraient prévues sur la base des observations qui précèdent, il y aura lieu de tenir compte également des personnes partageant la vie des personnes concernées, dont l'intérêt doit également être pris en considération (180) .
92. Il conviendra enfin d'articuler les dispositions qui seront adoptées à la lumière des observations qui précèdent aux règles relatives à la filiation, voire à l'adoption, lesquelles pourraient devoir être adaptées en conséquence.
b) L'anonymat de la mère porteuse et des donneurs de gamètes ou d'embryons
93. On a vu plus haut combien la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme attachait de l'importance à la possibilité pour une personne de connaître son histoire personnelle, en ce compris quant à ses origines biologiques ou génétiques (181) .
C'est donc avec beaucoup de réticence que l'on peut admettre l'anonymat des personnes qui, en leur qualité de donneurs de gamètes ou d'embryons ou en celle de mère porteuse, ont établi un lien biologique ou génétique avec l'enfant. Même si elle concerne des situations qui ne sont pas les mêmes que celles visées par les propositions à l'examen, la jurisprudence montre que l'anonymat doit être dûment justifié, le contrôle sur ce point se montrant particulièrement strict (182) .
Cette réticence ne peut conduire à condamner entièrement l'anonymat, mais il faut alors que de justes motifs soient avancés.
94. Il faut noter, en outre, que, dans son arrêt Odièvre, du 13 février 2003, la Cour tient compte de ce que l'enfant concerné
« a eu accès à des informations non identifiantes sur sa mère et sa famille biologique lui permettant d'établir quelques racines de son histoire dans le respect de la préservation des intérêts des tiers »,
et de l'existence de procédures qui, si elles maintiennent le principe de l'anonymat, rendent possible d'au moins demander son renversement ainsi que l'accès à des données liées à l'histoire personnelle de l'intéressé (183) . Sur ce dernier point, c'est en ce sens aussi que s'est prononcé l'arrêt Gaskin, du 7 juillet 1989 (184) .
95. Il faut conclure de ceci que, si, après avoir pesé les arguments d'ordre anthropologique et psychologique en considération de l'enfant, le législateur opte, malgré tout, pour l'anonymat, il doit le justifier et il ne peut donner en tout cas à ce système un caractère absolu. Il doit au moins permettre à l'intéressé, toujours dans le respect de principe de cet anonymat et par le recours à une instance indépendante, de solliciter sa levée. Compte tenu en outre de l'importance de certaines données génétiques, notamment pour la santé de l'intéressé, l'accès à ces données non identifiantes doit également être rendu toujours possible.
c) L'établissement de relations personnelles entre les parents génétiques et l'enfant
96. Du point de vue des parents génétiques, lorsqu'aucune relation affective n'a été établie en fait entre un enfant et ses parents génétiques, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme se montre nettement moins exigeante quant à la nécessité de tenir compte de l'intérêt de ces derniers d'établir un lien après la naissance, même sans prétention à l'établissement de la filiation au sens juridique du terme (185) . Il semble donc que, dans l'hypothèse où des personnes ont donné leurs gamètes ou leurs embryons pour procréation médicalement assistée par donneur ou pour une gestation pour autrui, il soit admissible de maintenir à leur égard l'anonymat de l'enfant.
d) L'ouverture du droit à la procréation médicalement assistée et du recours à la gestation pour autrui à des personnes seules
97. La proposition nº 1230 semble requérir, dans une première interprétation, que la mère commanditaire, appelée « mère demandeuse » à l'article 2, 2º, de la proposition, vive en couple (186) puisqu'aux termes de son article 2, 3º, « le partenaire » de cette femme « fournit son sperme pour féconder l'ovule de sa partenaire ou de la mère porteuse ». Par ailleurs, que la mère porteuse soit ou non la mère génétique de l'enfant, seule une femme peut agir comme commanditaire (187) , par dérogation à l'interdit mentionné à l'article 3.
En ce qui concerne le recours à une mère porteuse génétique, appelée par la proposition la « maternité de substitution de basse technologie », il se vérifie que la commanditaire doit vivre en couple puisque le sperme doit nécessairement être fourni par le « partenaire » de la commanditaire (188) , lequel sera donc considéré également comme commanditaire (le « père demandeur » selon l'article 2, 3º, de la proposition).
En revanche, pour le recours au procédé de la mère porteuse non génétique, appelée par la proposition la « maternité de substitution de haute technologie », la proposition ne requiert pas que la demande émane de deux personnes. Selon l'article 2, 5º, il est possible que l'ovule seul émane « d'un parent demandeur » (189) et dans la suite de la proposition, le mot « commanditaire » est mentionné au singulier comme au pluriel, par l'usage de la formule « demandeur(s) » (190) . Il semble donc que le membre de phrase « fournit son sperme pour féconder l'ovule de sa partenaire ou de la mère porteuse » à l'article 2, 3º, vise, non pas à faire de cet apport de sperme par le « partenaire » une condition mise au recours à la gestation pour autrui dans l'hypothèse du recours à la mère porteuse non génétique, mais signifie simplement que, lorsqu'il y a pareil apport par un homme, celui-ci doit également être considéré comme commanditaire (« demandeur »). Ces questions devraient en toute hypothèse être clarifiées dans le texte de la loi proposée.
La proposition nº 1271 ne semble pas limiter l'accès à la gestation pour autrui aux couples (191) , rendant donc possible qu'une femme seule ou un homme seul fasse appel à la gestation pour autrui. Toutefois, l'article 4 de cette proposition visant à plusieurs reprises les « parents demandeurs » et les développements évoquant le « couple » et « les parents demandeurs », le texte devrait également être clarifié.
Les observations qui suivent se fondent, en ce qui concerne ces deux propositions, sur l'interprétation selon laquelle certaines demandes de gestation pour autrui peuvent émaner d'une femme seule, voire, en ce qui concerne la proposition nº 1271, également d'un homme seul; leur pertinence devrait être adaptée en fonction des précisions qui seraient apportées au texte.
Dans la proposition nº 1440, le projet parental conçu par procréation médicalement assistée ne suppose pas qu'il émane d'un couple (192) .
98. Le Code civil admet qu'un homme ou une femme ne vivant pas en couple peut adopter un enfant (193) . Une femme seule peut avoir un enfant par les voies naturelles sans vivre en couple. Il appartient au législateur d'apprécier si les similitudes et les différences entre l'adoption et la gestation pour autrui et les similitudes et les différences entre la conception naturelle et la procréation médicalement assistée recommandent de confirmer les solutions ainsi proposées ou au contraire commandent, comme dans la proposition nº 417, que la gestation pour autrui soit réservée à des couples.
Si, après justification, il est choisi de permettre à des femmes seules d'accéder à la parentalité avec l'aide d'une mère porteuse ou par le recours à la procréation médicalement assistée, il appartiendra en toute hypothèse au législateur d'apprécier si cette possibilité ne devrait pas être offerte également à un homme vivant seul, comme en matière d'adoption.
Pour chacune des options ainsi prises, une justification devra être fournie, à la lumière des principes d'égalité et de non-discrimination.
e) L'exigence de stabilité du couple commanditaire ou de celui faisant appel à la procréation médicalement assistée
99. Lorsque les propositions nos 417, 1271 et 1230 se réfèrent à l'existence d'un couple, elles ne précisent pas le degré de stabilité exigé de ce couple, tel qu'il pourrait résulter par exemple du mariage ou de la durée d'une cohabitation, qu'il s'agisse de la cohabitation légale au sens des articles 1475 à 1479 du Code civil ou d'une cohabitation de fait.
La proposition nº 417, qui n'ouvre le recours à la gestation pour autrui qu'aux « couples », vise — il est vrai — expressément les couples « mariés non séparés de fait » et les « concubins » (194) , sans autre précision, semblant ainsi avoir oublié les couples vivant maritalement sous le statut de la cohabitation légale.
Un pareil dispositif paraît peu admissible, dès lors qu'outre les couples mariés, les cohabitants ne peuvent adopter que s'ils ont
« fait une déclaration de cohabitation légale »
ou s'ils
« vivent ensemble de manière permanente et affective depuis au moins trois ans au moment de l'introduction de la demande en adoption, pour autant qu'elles ne soient pas unies par un lien de parenté ou d'alliance entraînant une prohibition de mariage dont elles ne peuvent être dispensées par le Roi » (195) .
Les différences entre l'adoption et la convention de gestation pour autrui ne semblent pas pertinentes pour justifier raisonnablement cette différence.
Les mêmes observations s'appliquent au recours à la procréation médicalement assistée lorsqu'il est constaté que la demande émane d'un couple.
f) L'ouverture du droit à la procréation médicalement assistée et du recours à la gestation pour autrui à des couples homosexuels ou à des homosexuels vivant seuls
100. Il résulte de l'analyse faite de la proposition nº 1230, ci-avant, sous le nº 97, qu'elle semble permettre à une femme seule mais pas à un homme seul de demander à une femme de porter un enfant pour elle lorsqu'il s'agit de recourir à une mère porteuse non génétique, selon une interprétation du texte. Ainsi lue, la circonstance que cette femme soit homosexuelle ne fait pas l'objet d'une restriction dans le dispositif envisagé. Cette proposition ne semble pas exclure non plus l'hypothèse où un couple de lesbiennes est commanditaire (196) .
Quant à la proposition nº 1271, ainsi que ses développements l'explicitent (197) , elle est rédigée en manière telle que des homosexuels, féminins comme masculins, vivant seuls ou non, puissent recourir à la gestation pour autrui, sauf si sa rédaction devait être revue à la suite de l'exposé fait plus haut, au nº 97, sur les difficultés d'interprétation de ce texte (198) .
101. Sur la question de l'admissibilité des homosexuels à la parenté, il est renvoyé à l'avis portant les nos 38.817/AG et suivants, donné le 20 septembre 2005 sur des propositions de loi et des amendements relatifs à l'adoption monosexuée et la beau-parenté, spécialement aux considérations suivantes qu'il contient:
« 53. [...] Si le législateur choisit de permettre l'adoption aux couples homosexuels, il doit alors, toujours conformément aux critères généraux d'appréciation de la compatibilité des règles de droit avec les principes d'égalité et de non-discrimination, être en mesure de justifier que l'identité de traitement applicable à des situations différentes est raisonnablement justifiée, dans le respect du principe de proportionnalité [...], en ayant égard tout spécialement à l'intérêt de l'enfant [...]. En effet, en élargissant la possibilité d'adopter aux couples homosexuels, la proposition nº 664 place sous une figure juridique identique, l'adoption, des situations de fait comportant des différences essentielles: celles dans lesquelles les adoptants sont de sexe différent et celles dans lesquelles ils sont de même sexe, alors spécialement que les enfants sont nécessairement et naturellement issus de gamètes mixtes et que l'adoption réduit, dans le cas de l'adoption simple (199) , ou annihile de manière presque complète, dans le cas de l'adoption plénière (200) , la relation juridique établie au départ entre l'enfant et ses parents; dans les deux cas, l'adoption a au minimum pour effet de conférer l'autorité parentale aux adoptants (201) et instaure les obligations prévues par l'article 203 du Code civil et des obligations alimentaires entre les adoptants et l'adopté, ces dernières étant réciproques (202) . La proposition a donc pour effet de réunir sous une même institution les situations dans lesquelles les enfants concernés disposent d'une référence de type parental bisexuée, issue de l'adoption, prolongeant celle résultant de leur conception, et celles dans lesquelles les enfants concernés voient cette référence fondamentalement modifiée.
54. En soi, l'identité de traitement de ces situations différentes qui vient d'être caractérisée demande à être justifiée au regard des critères précités de compatibilité avec les principes d'égalité et de non-discrimination. Comme la différence de situation porte sur une donnée importante de la nature même de la conception de la vie et de l'histoire de la société humaine, soit l'origine bisexuée d'un enfant et son appartenance de principe à un ménage de même nature, elle doit faire l'objet d'une justification particulièrement exigeante » (203) .
Toutefois, si la proposition nº 51-664/1 modifiant le Code civil afin d'autoriser l'adoption par les couples homosexuels, votée après amendements par la Chambre des représentants et devenue un projet de loi évoqué par le Sénat (204) , est adoptée par le pouvoir législatif, une situation juridique nouvelle sera créée. Dès lors que le Code civil aurait été ainsi modifié, il appartiendrait au législateur d'apprécier si les similitudes et les différences entre l'adoption et le recours à la gestation pour autrui recommandent de suivre l'option qui aurait été prise en matière d'adoption monosexuée ou au contraire commandent, comme dans la proposition nº 417 que la gestation pour autrui soit réservée à des couples hétérosexuels; il devrait aussi être en mesure de justifier l'option prise.
102. Si les couples de lesbiennes se voient reconnaître le droit de recourir aux techniques envisagées par les propositions, il appartiendra au législateur d'apprécier si la gestation pour autrui ne devrait pas être également accessible aux homosexuels masculins, vivant seuls ou en couple; ici aussi, il devra être en mesure de justifier l'option prise.
g) La comparaison avec les règles relatives à l'adoption
103. Il a été fait état ci-avant, sous les nos 83 à 102, de la comparaison entre certaines règles actuellement en vigueur ou qui pourraient l'être prochainement en matière d'adoption et celles qui résulteraient des propositions à l'examen, et des questions juridiques que cette comparaison appelle. Il est renvoyé aux observations formulées à cet égard.
Une question supplémentaire doit être soulevée.
Dès lors que les personnes recourant à la gestation pour autrui et à la procréation médicalement assistée se verraient conférer les pleines attributions résultant de la qualité de père ou de mère de l'enfant concerné, attachées à leur autorité parentale et aux obligations d'hébergement, d'entretien, de surveillance, d'éducation et de formation de l'enfant qui en découlent, les exigences prévues par le Code civil et le Code judiciaire en matière d'adoption pour garantir la qualification et l'aptitude de l'adulte concerné à la prise en charge d'un enfant (205) paraissent, pour les mêmes motifs que ceux qui ont commandé le vote de ces dispositions, devoir être transposées aux situations ici envisagées.
À tout le moins, l'absence de ces exigences ou leur atténuation doit pouvoir faire l'objet d'une justification particulièrement approfondie, compte tenu de ce que ces exigences trouvent fondamentalement leur source dans l'obligation de faire prévaloir l'intérêt de l'enfant et qu'au demeurant elles visent à prévenir également, dans l'intérêt des adoptants eux-mêmes, d'éventuelles difficultés entre ceux-ci et les enfants concernés (206) .
h) La prise en compte des intérêts légitimes de la personne qui partage la vie de l'adulte concerné
104. La décision de concevoir un enfant, de commencer une grossesse, de la mener à son terme, de garder l'enfant né, de le céder à d'autres personnes anticipativement à la naissance, et, de manière générale, de participer à toutes les décisions envisageables dans le cadre de la procréation médicalement assistée et de la gestation pour autrui, intéressent au premier chef la femme appelée à mener la grossesse, mais elle concerne aussi la personne qui partage la vie du commanditaire ou de la mère porteuse.
Tel est plus particulièrement le cas lorsque cette personne est aussi le donateur de la gamète ayant contribué à former l'embryon.
Il n'appartient pas au Conseil d'État, mais bien au législateur, d'examiner toutes les situations envisageables.
Au regard du droit à la vie familiale, il se conçoit difficilement que, lorsqu'une personne concernée vit en couple, elle puisse, sans impliquer, d'une manière ou d'une autre, la personne qui partage sa vie, décider de proposer ses services comme mère porteuse ou faire appel à la procréation médicalement assistée ou à la gestation pour autrui pour avoir un enfant (207) .
Il revient au législateur de déterminer jusqu'à quel point doit aller l'implication de la personne partageant la vie des intéressés et selon quelle modalité procédurale elle sera mise en œuvre.
IV. OBSERVATIONS PARTICULIÈRES
Introduction et observations communes aux propositions nos 417, 1230 et 1271
105. Les questions paraissant les plus importantes, au regard des droits fondamentaux et des principes d'égalité et de non-discrimination, ont été traitées ci-avant, dans la partie III de l'avis.
Les observations qui suivent, sans être exhaustives, tendent à les compléter, essentiellement sur des questions de clarté du texte, de sécurité juridique, de cohérence interne ou d'articulation avec d'autres législations en vigueur (208) .
106. Préalablement, il convient de faire état de questions non réglées par les propositions nos 417, 1230 et 1271, qui autorisent le recours conditionnel à la gestation pour autrui.
107. La question se pose ainsi de savoir ce qu'il adviendra si l'une des parties à la convention portant sur la gestation pour autrui souhaite y mettre fin (209) .
Les cas de figure suivants peuvent être notamment envisagés:
a) Si la mère porteuse met fin au contrat avant son insémination artificielle ou avant l'implantation de l'embryon dans son utérus, le commanditaire ne pourra réclamer l'exécution forcée en nature en vertu du principe « nemo potest cogi ad factum ». On voit mal comment le législateur pourrait déroger à ce principe en l'espèce. Le commanditaire ne pourra donc réclamer que des dommages-intérêts.
b) Si les commanditaires ou le donneur mettent fin à la convention avant d'avoir donné leurs gamètes ou l'embryon, la mère porteuse ne pourra demander l'exécution forcée en nature en vertu du même adage. Elle pourra cependant demander des dommages-intérêts couvrant, par exemple, les dépenses qu'elle aurait déjà exposées en vue de sa gestation future.
c) Une fois la mère porteuse inséminée ou l'embryon implanté dans son utérus, le commanditaire ne peut plus rompre le contrat: sa filiation envers l'enfant qui naîtra sera automatique, à tout le moins dans le cadre des propositions nos 417 et 1319, sous la réserve de ce qui est exposé plus haut, sous les nos 83 à 92. En effet, l'interdiction absolue de porter atteinte à la dignité de la mère porteuse, à son intégrité physique, à sa liberté de conscience et de religion ainsi que le principe « nemo potest cogi ad factum » interdisent bien évidemment de la contraindre à avorter. Par ailleurs, si les commanditaires pouvaient refuser de voir leur filiation établie à l'égard de l'enfant, cela aurait pour conséquence que la mère porteuse, même si elle n'en est pas la mère génétique, serait en conséquence sa mère légale, ce qu'elle n'a, en principe, pas voulu. Une telle conséquence serait inacceptable, non seulement pour la mère porteuse mais également pour l'enfant qui aurait pour mère une femme qui n'en a pas voulu. À partir du moment où le contrat est signé, rien ne peut plus faire obstacle à la paternité des commanditaires à l'égard de l'enfant à venir, même contre la volonté de ces derniers, sauf le recours à l'adoption au profit de tiers (210) .
d) Une fois la mère porteuse inséminée ou l'embryon implanté dans son utérus, celle-ci peut-elle rompre le contrat, en recourant à l'avortement ?
Au point de vue pénal, il n'y a pas d'infraction en cas d'interruption de grossesse pratiquée sur une « femme enceinte » dans les conditions prévues par l'article 350 du Code pénal. Le droit pénal étant d'interprétation restrictive, la « femme enceinte » est, dans tous les cas, la porteuse et non la mère commanditaire. C'est à la femme enceinte seule à décider, l'article 350 précité ne prévoyant pas le consentement du père de l'enfant (211) .
Mais qu'en sera-t-il au point de vue civil, dès lors que l'enfant que la mère porte est celui des commanditaires soit au point de vue légal soit au point de vue légal et génétique ? Il semble que seule la possibilité pour les commanditaires de demander des dommages-intérêts à la mère porteuse soit ouverte.
A. La proposition nº 417
108. À l'article 2, les définitions appellent les observations suivantes:
a) Les définitions du « couple stérile » et des « père et mère » précisent que, s'il s'agit de personnes mariées, elles doivent être « non séparées de fait ». On suppose que la notion de séparation de fait doit s'entendre de la même manière qu'en matière de divorce: il s'agirait non seulement de la séparation de fait mais aussi de la séparation de droit, c'est-à-dire une séparation faisant suite à une décision judiciaire ou une séparation de corps. On suppose également que le recours à la gestation pour autrui ne sera pas possible lorsque les époux, bien que non encore séparés, sont engagés dans une instance en divorce ou en séparation de corps.
Tous ces éléments devraient être précisés.
La même observation vaut pour l'article 5, § 1er.
b) La définition de la « mère porteuse », au troisième tiret, manque de clarté, notamment en ce qu'elle vise la femme qui porte l'enfant conçu à partir des gamètes « d'un donneur ou de ses propres gamètes ». Elle est également incomplète dès lors qu'elle a pour objet de décrire tous les cas de mère porteuse, même ceux qui sont interdits. En effet, une mère porteuse peut porter un enfant conçu:
— à partir des gamètes du couple stérile;
— à partir de ses propres gamètes et de celles de l'homme du couple stérile;
— à partir de ses propres gamètes et de celles d'un tiers donneur masculin, qui pourrait être son mari;
— à partir des gamètes de l'homme du couple stérile et de celles d'une tierce donneuse;
— à partir des gamètes d'un tiers donneur et d'une tierce donneuse.
Par ailleurs, pour qu'il y ait une « mère porteuse », il n'est pas nécessaire que le contrat soit conclu avec un couple stérile. Il n'est nullement à exclure qu'un couple fécond recoure à une mère porteuse dans le seul but de s'éviter les inconvénients d'une maternité.
Il semble que tous ces cas pourraient êtres subsumés sous l'hypothèse générale d'une femme qui porte un enfant avec l'intention de le remettre à un ou à des tiers après la naissance.
c) Dans la définition de la « mère porteuse traditionnelle » (la « mère de substitution » au sens du présent avis), il n'y a pas lieu de viser uniquement l'insémination « artificielle ». En effet, la situation serait identique en cas d'insémination naturelle, résultant de rapports sexuels.
La suite de la proposition, notamment l'article 5, § 3, sera revue en conséquence.
d) S'il est recouru à la gestation pour autrui par un couple non marié, on suppose qu'aucun des membres du couple ne peut être encore engagé dans un mariage ou une cohabitation légale non dissoute.
Il y a lieu de le préciser.
109. L'article 5, § 1er, de la proposition dispose:
« [...] un couple stérile peut recourir à une mère porteuse si un médecin gynécologue constate par écrit que la femme de ce couple est dans l'impossibilité physiologique d'être enceinte du mari non séparé de fait ou du concubin, ou qu'elle se trouve confrontée au très grand risque qu'une grossesse ferait courir à sa propre santé ou à celle de l'enfant ».
Les développements précisent que l'impossibilité physique d'être enceinte résulte du fait que la femme a subi une hystérectomie ou est atteinte d'une anomalie de l'utérus.
Toutefois, en ne visant que l'impossibilité physiologique d'être enceinte du mari non séparé de fait ou du concubin, elle pourrait être interprétée:
— comme visant une impossibilité physiologique qui ne serait pas due à la femme mais au mari, ce qui n'est manifestement pas l'intention de l'auteur de la proposition puisque, dans ce cas, il suffit de recourir à l'insémination artificielle;
— comme pouvant s'appliquer au couple dont la femme ne peut plus avoir d'enfant en raison de son âge, puisqu'il n'est pas précisé, dans le texte même de la proposition, quelle doit être l'origine de l'impossibilité physiologique. En mentionnant, en page 8 des développements, qu'aucune limite d'âge n'est fixée pour les membres du couple stérile, la proposition accroît l'incertitude quant à la possibilité de recourir à la gestation pour autrui lorsque la stérilité du couple provient uniquement de l'âge de la femme.
110. En vertu de l'article 5, § 2, c), la mère porteuse ne peut être apparentée au couple, sauf s'il s'agit d'une soeur ou d'une parente au quatrième degré du mari, du concubin ou de l'épouse.
Cette disposition appelle les observations suivantes:
a) Elle ne comporte pas d'équivalent aux dispositions qui, en ce qui concerne le mariage, prohibent certaines unions en vue de prévenir des consanguinités préjudiciables.
b) Le principe, à savoir que la mère porteuse ne soit pas apparentée au couple stérile, semble vidé de son contenu puisque la proposition prévoit deux importantes exceptions.
c) Si ces exceptions sont maintenues, on n'aperçoit pas pour quelle raison d'autres exceptions, telle la parenté au troisième degré, ne pourraient être admises.
111. En vertu de l'article 5, § 2, a), la mère porteuse doit être célibataire, divorcée ou veuve. Les développements de la proposition justifient cette condition par le fait que,
« [...] si cette dernière est mariée, on se heurte de front à la loi sur la filiation. En vertu de l'article l'article 315 du Code civil, si la gestatrice est mariée, son mari sera présumé être le père de l'enfant. Ce n'est pas le but recherché puisque ce n'est pas l'homme du couple stérile. De plus, l'article 332 du Code civil n'autorise pas le père biologique à contester la paternité du mari de la gestatrice, l'action en contestation de paternité étant réservée au mari, à la mère et à l'enfant. »
Ces considérations ne sont cependant pas exactes dans le cadre d'une légalisation de la gestation pour autrui telle qu'elle est conçue par la proposition à l'examen. En effet, il résulte de l'article 6 de la proposition que le nom qui sera inscrit sur l'acte de naissance ne sera pas celui de la mère porteuse mais celui de la mère commanditaire. Il n'y a donc pas de risque que la présomption de paternité de l'article 315 du Code civil joue à l'égard du mari de la mère porteuse.
112. Selon l'article 5, § 3, alinéa 2, confirmé par les développements de la proposition (212) , l'enfant ne peut être conçu qu'avec les gamètes provenant des deux membres du couple.
Cependant, d'autre passages des développements et, surtout, certaines dispositions de la proposition impliquent que l'enfant pourrait être conçu à partir de gamètes étrangers au couple. Plus particulièrement:
— l'alinéa 5, troisième tiret, de la page 5 des développements mentionne « l'enfant conçu à partir des gamètes du couple ou à partir de celles d'un proche »;
— l'article 5, § 3, alinéa 1er, de la proposition mentionne à la fois « la fécondation in vitro » et « l'insémination artificielle », alors que, si l'embryon est formé des gamètes du couple stérile, il ne peut qu'être « implanté » dans l'utérus de la mère porteuse et non y être inséminé: une insémination artificielle concerne l'hypothèse où la mère porteuse serait également la mère génétique et serait fécondée, par insémination artificielle, avec le sperme du mari du couple stérile;
— l'article 6 de la proposition donne des effets au recours à une mère porteuse génétique, qualifiée de « mère porteuse traditionnelle » par la proposition; de surcroît, la définition de la notion de « mère porteuse traditionnelle » inclut l'hypothèse d'un donneur de gamète (213) .
La proposition doit être revue afin d'en assurer la cohérence, compte tenu en outre des observations faites plus haut sur l'admissibilité du recours aux procédés en cause par les personnes seules et les homosexuels (214) .
113. L'article 6 dispose:
« En cas de recours à une mère porteuse gestationnelle ou traditionnelle, le nom du père est inscrit dans l'acte de naissance et la convention décrite à l'article 5, § 3, prévoit que le nom de l'épouse ou de la concubine du père figure dans l'acte de naissance comme étant la mère ».
L'article 8 de la même proposition ajoute un second alinéa (215) à l'article 57 du Code civil, afin de prévoir que l'acte de naissance énonce:
« En cas de recours à une mère porteuse conformément à la loi du ... relative aux mères porteuses, l'année, le jour, le lieu de naissance, le nom, les prénoms et le domicile de la mère et du père mentionnés comme tels dans la convention passée devant notaire ».
Ce mécanisme déroge au droit commun lorsque les époux ne sont pas mariés. En effet, le père d'un enfant né hors mariage doit reconnaître ce dernier, sa filiation n'étant pas établie automatiquement.
114. À l'article 5, § 3, alinéa 3, il est procédé par un renvoi à une réglementation résultant d'un arrêté royal.
Le procédé de la législation par référence n'est pas indiqué, étant de nature à susciter des difficultés en cas de modification du texte auquel il est renvoyé. Il est encore moins recommandé lorsque le renvoi se fait d'une loi à un arrêté royal.
115. La proposition opte pour l'établissement direct d'un lien de filiation, dès la naissance, entre l'enfant et les commanditaires.
Cependant, la gestation pour autrui introduit des distorsions entre la filiation paternelle et maternelle légale, la paternité génétique, la maternité génétique et la maternité « gestative ». Il y a lieu de rendre, semble-t-il, la filiation légale inattaquable, sauf cas particuliers. La mère porteuse et les éventuels donneurs de gamètes devraient ne pas pouvoir contester la filiation des commanditaires et ces derniers devraient ne pas pouvoir contester leur propre paternité et maternité. L'enfant, lui non plus, ne devrait pas pouvoir contester la paternité de ses parents commanditaires.
Un cas particulier auquel il vient d'être fait allusion ci-avant est, selon les développements de la proposition, celui où « par exemple le couple [commanditaire] se rend compte que la mère porteuse leur a remis un enfant qui n'a pas été conçu à partir de leurs gamètes », puisque, selon cette proposition, seule l'hypothèse de la femme qui porte l'enfant conçu avec les gamètes du couple est possible.
Dès lors, à l'article 9 de la proposition qui dispose que
« [l]e père et la mère disposent de l'action en contestation de maternité en vertu de l'article 312, § 2, du [Code civil] et de l'action en contestation de paternité en vertu de l'article332 de ce même Code »,
il y aurait lieu de préciser que l'action ne sera recevable que si elle invoque le fait que l'enfant n'a pas été conçu avec les gamètes provenant du couple. Autrement dit, le texte doit être rédigé en manière telle que le seul fait que la mère commanditaire n'a pas été celle qui a mis l'enfant au monde ne pourrait suffire à contester victorieusement sa maternité.
116. Même ainsi modifié, l'article 9 de la proposition appelle par ailleurs les observations suivantes:
a) Cette disposition porte sur « le père et la mère ».
Or, les actions en contestation d'état ne sont pas réservées uniquement au père et à la mère. En vertu de l'article 332, la paternité établie en vertu de l'article 315 peut être contestée par le mari, par la mère et par l'enfant. En vertu de l'article 332bis, les autres actions en contestation d'état appartiennent à toute personne justifiant d'un intérêt qui ne soit pas purement patrimonial.
On peut supposer que l'auteur de la proposition à également entendu viser toutes les personnes qui pourraient contester la paternité ou la maternité. Il y aurait lieu de le préciser.
b) La référence à l'article 332 du Code civil semble insuffisante. En effet, cet article ne concerne que la contestation de la paternité établie en vertu de l'article 315, c'est-à-dire la paternité fondée sur le mariage. Dans le cas d'un couple commanditaire non marié, l'homme ne pourrait donc pas contester sa paternité dans le cas particulier précité, ce qui ne semble pas admissible au regard des articles 10 et 11 de la Constitution.
c) Si les actions en contestation de paternité et de maternité aboutissent, l'enfant se retrouvera sans père ni mère, à moins que, dans l'hypothèse où il serait issu du rapprochement sexuel de la mère porteuse et d'un autre homme que le commanditaire, ces derniers le reconnaissent. Qu'en sera-t-il cependant si le problème ne provient pas de la mère porteuse qui aurait eu des rapports sexuels au moment du « cycle du traitement » mais d'une erreur du laboratoire médical ?
117. L'article 10 appelle les observations suivantes:
a) Le paragraphe 5 en projet de l'article 312 du Code civil dispose que l'action en contestation n'est pas recevable si elle émane de la mère porteuse.
Cependant, dans l'hypothèse visée dans les développements de l'article 9, ne faudrait-il pas ouvrir l'action en contestation à la mère porteuse, à tout le moins tant qu'il n'y a pas possession d'état à l'égard de la mère commanditaire ? En effet cette mère porteuse serait, dans cette hypothèse, un tiers intéressé au sens de l'article 332bis du Code civil.
b) À l'article 312 du Code civil, proposé par l'article 10 de la proposition, l'utilité du paragraphe 4 proposé n'apparaît pas, dès lors que le paragraphe 3 actuel dispose déjà que
« [l]'action en contestation n'est toutefois pas recevable s'il y a possession d'état conforme à l'acte de naissance »,
à moins que l'auteur de la proposition n'entende distinguer la « possession d'état » et le fait « d'avoir élevé l'enfant comme le sien ».
En ce cas, cette distinction devrait être explicitée dans les travaux parlementaires.
118. L'article 11, § 2, est incohérent lorsqu'à sa première phrase il fait de l'existence d'un but lucratif un élément constitutif de l'infraction et qu'à sa seconde il en fait une circonstance aggravante.
B. La proposition nº 1230
119. Il y a contradiction entre plusieurs articles de la proposition en ce qui concerne la détermination du moment où la mère porteuse renonce à sa maternité à l'égard de l'enfant qu'elle a porté.
En vertu de l'article 4, § 4, cette renonciation se fait au moment de la conclusion de la convention. En vertu de l'article 348-4, alinéa 1er, in fine, du Code civil proposé par l'article 9, le consentement à l'adoption peut être donné « dès la naissance ». Enfin, selon l'article 8, la convention est considérée comme une déclaration d'adoption préalable « dès qu'il est constaté que la procédure de maternité de substitution a abouti à une grossesse chez la mère porteuse ».
La cohérence du dispositif devrait être rétablie.
120. L'article 2, 2º et 3º, de la proposition mentionne « une femme qui, pour des raisons médicales, ne peut donner naissance à un enfant ». L'article 4, § 1er, de la proposition dispose qu'
« une femme stérile peut recourir à une mère porteuse si un médecin gynécologue constate par écrit que cette femme est dans l'impossibilité physiologique d'être enceinte en raison d'une absence congénitale ou acquise de la matrice ou d'un dysfonctionnement de celle-ci, que la grossesse met sa vie en danger et est par conséquent tout à fait contre-indiquée ou qu'une grossesse de la femme en question mettrait en danger la vie de l'enfant ».
Le recours à la gestation pour autrui a donc un but « thérapeutique », non pas en ce sens qu'il vise à guérir un problème physiologique mais en ce sens qu'il vise à rendre possible ce qui aurait pu se produire naturellement si une complication physiologique, congénitale ou acquise, ne s'était présenté. Il ne peut donc être recouru à la gestation pour autrui pour des raisons esthétiques ou de convenance, par exemple pour éviter les désagréments d'une maternité et d'un accouchement ou les conséquences qu'ils entraînent au point de vue professionnel. Cette technique n'est pas davantage offerte aux femmes qui ne peuvent plus avoir d'enfant en raison de leur âge. Il ne peut pas non plus être recouru à la gestation pour autrui par un homme seul ou par un couple homosexuel puisque, dans ces cas, ce n'est nullement en raison d'une complication physiologique qu'un enfant ne peut être conçu mais pour des raisons qui tiennent à la nature des choses.
Si l'on se place dans une optique purement thérapeutique, qui vise a rendre possible ce que seul une complication physiologique a empêché, voire des complications (au pluriel) si l'homme est lui aussi stérile, la proposition suscite la question de savoir s'il ne faudrait pas viser « un couple dont la femme au moins est stérile » et non « une femme stérile ». En effet, seul un couple peut concevoir naturellement un enfant et non une personne seule.
121. En cas de recours à une mère porteuse génétique, appelée « maternité de substitution de basse technologie » dans la proposition, les gamètes proviendront nécessairement, selon celle-ci, de la mère porteuse et du « partenaire » de la femme stérile.
En cas de recours à une mère porteuse non génétique, appelée « maternité de substitution de haute technologie » dans la proposition, il se peut, en vertu de l'article 2, 5º, que seul l'ovule de la femme stérile ou seul le sperme de son « partenaire » soit utilisé pour concevoir l'embryon, l'autre élément provenant d'un donneur (216) .
L'article 2, 6º, manque cependant de clarté à cet égard puisqu'il vise une grossesse pour laquelle il a été fait usage « du sperme ou d'un ovule d'un parent demandeur ou d'un embryon provenant de parents demandeurs ». Pour mettre l'article 2, 6º en concordance avec l'article 2, 5º, il faudrait écrire, semble-t-il:
« (...) une grossesse pour laquelle il a été fait usage du sperme du père demandeur ou d'un embryon pour la création duquel l'ovule ou le sperme ou les deux proviennent de parents demandeurs ».
En tout état de cause, ces difficultés confirment que, conformément à ce qui a été exposé plus haut, sous le nº 97, la détermination des personnes pouvant faire appel à la gestation pour autrui doit être clarifiée dans le dispositif.
122. La proposition ne prévoit aucun empêchement lié à la parenté ou à l'alliance entre la mère porteuse et le commanditaire. Il résulte même de l'article 4, § 2, A, premier tiret, que la mère porteuse peut être la mère d'un des parents demandeurs.
La proposition devrait être complétée afin de prévoir des dispositions analogues à celles qui, en ce qui concerne le mariage, prohibent certaines unions en vue de prévenir des consanguinités préjudiciables.
123. À l'article 4, § 2, A, deuxième tiret, il est prévu que, pour être mère porteuse, il faut
« avoir donné naissance à au moins un enfant vivant ».
On peut supposer que ce texte signifie que l'enfant doit encore être vivant au moment de la convention, et non qu'il doit avoir été vivant à sa naissance. Ceci gagnerait à être clarifié.
Il conviendrait aussi de régler l'hypothèse où l'enfant devait mourir entre la convention et le début de la grossesse concernée par celle-ci.
124. L'article 4, § 2, C, cinquième tiret, dispose:
« Les parents demandeurs et les parents porteurs sont de nationalité belge ou ont une résidence fixe en Belgique ».
Il appartient au législateur de justifier, au regard du droit européen, pour quelle raison un citoyen d'un État membre de l'Union européenne, de l'Espace économique européen ou d'un État lié avec l'Union européenne par un traité de libre circulation des personnes ne pourrait recourir à la maternité de substitution en Belgique.
125. L'article 4, § 3, fait état d'un arrêté royal du 4 juin 2003 réglant « le remboursement des frais de fécondation in vitro ». Or, aucun arrêté du 4 juin 2003 ne porte cet intitulé.
En toute hypothèse, le procédé de la législation par référence n'est pas indiqué, étant de nature à susciter des difficultés en cas de modification du texte auquel il est renvoyé. Il est encore moins recommandé lorsque le renvoi se fait d'une loi à un arrêté royal. La même observation vaut pour l'article 7.
126. L'article 4, § 4, alinéa 1er, huitième tiret, dispose que
« c'est la mère porteuse qui décide en dernier ressort, au cas où sa vie ou sa santé viendrait à être menacée au cours de la grossesse ou de l'accouchement ».
La proposition ne précise pas quel est l'objet de la décision.
En ce qu'elle vise la « grossesse », la proposition fait allusion, semble-t-il, à l'avortement. Sur cette question, il est renvoyé au nº 107, d), plus haut.
127. L'article 4, § 4, alinéa 1er, dixième tiret, dispose que
« la question de la responsabilité est clairement réglée en cas de décès de l'un des parents demandeurs ou de divorce de ceux-ci ».
L'usage du mot « responsabilité » n'est pas adéquat.
Si l'un des parents demandeurs décède, dans la logique d'un système admettant la gestation pour autrui, c'est l'autre parent qui sera le père ou la mère, en l'espèce adoptifs, de l'enfant. Il n'y a pas là matière à convention.
Quant au divorce, une convention ne peut intervenir, entre les époux, qu'au moment où ils décident d'entamer une procédure de divorce par consentement mutuel. Cette convention ne peut cependant régler l'autorité sur la personne et l'administration des biens de l'enfant puisque ce dernier, par hypothèse, n'a pas encore été adopté. Dès lors que l'on admet le principe de la gestation pour autrui, les deux commanditaires devraient, semble-t-il, respecter leurs engagements et adopter tous les deux l'enfant, nonobstant leur divorce. La situation de cet enfant ne sera pas différente de celle d'enfants conçus naturellement dont les parents divorcent avant la naissance.
128. L'article 4, § 4, alinéa 1er, dernier tiret, dispose que,
« durant le cycle de traitement, la mère porteuse prend des mesures de contraception ».
Il y a lieu de prévoir que la mère porteuse prend les mesures afin de prévenir une autre grossesse que celle résultant de l'insémination artificielle. En effet, le mot « contraception », dans le texte français, pourrait laisser penser que seules des techniques artificielles peuvent être utilisées. Sous peine de violer le droit au respect de la vie privée de la mère porteuse ainsi que son droit à la liberté de conscience et de religion, il ne peut lui être imposé de telles techniques: elle doit rester libre de choisir le moyen de ne pas tomber enceinte.
129. À l'article 5, alinéa 1er, les mots « voor te stellen » et « de verser » ne correspondent pas. La version française paraît contenir une disposition redondante sur l'interdiction de la rétribution.
Le texte sera revu.
130. Aux termes de l'article 6,
« Le Roi crée un centre pluraliste francophone et un centre pluraliste néerlandophone de la maternité de substitution, liés à un ou plusieurs hôpitaux universitaires. Ces centres ont pour mission d'assurer l'accompagnement médical, psychique, social et juridique du (des) parent(s) demandeur(s) et de la mère porteuse. Tous les deux ans, ils publient un rapport, mentionnant le nombre de demandes de maternité de substitution, les grossesses réalisées, les complications éventuelles et les motifs de refus ou de suspension d'un traitement. Ils entament également une étude de suivi à long terme d'un maximum d'enfants nés dans le cadre d'une maternité de substitution ». (217)
Or, le commentaire de cette disposition précise:
« L'existence de ces centres n'exclut pas la possibilité de pratiquer une FIV à l'extérieur d'un centre, dans le cadre de la maternité de substitution elle-même. Il est indispensable de prévoir un accompagnement aussi bien pour la maternité de substitution de haute technologie que pour la maternité de substitution de basse technologie, car les différents écueils susceptibles de faire échouer les conventions sont identiques dans les deux cas. Ce centre sera de préférence pluraliste et il travaillera en collaboration avec les centres de FIV agréés ».
Le dispositif gagnerait à traduire l'idée ainsi exprimée.
131. La proposition opte pour l'adoption de l'enfant par les commanditaires et modifie, en conséquence, certains articles du Code civil et du Code judiciaire consacrés à l'adoption. Cela suppose donc que l'enfant sera déclaré, à l'officier de l'état civil, comme étant né de la mère porteuse qui sera sa mère légale. Si elle est mariée, son mari sera le père de l'enfant.
Le recours à l'adoption appelle les observations suivantes:
a) Dans l'hypothèse du recours à une mère porteuse génétique, appelée la maternité de substitution de basse technologie dans la proposition, et dans l'hypothèse du recours à la mère porteuse non génétique, appelée la maternité de substitution de haute technologie, lorsque le « partenaire » de la mère a fourni le sperme, le recours à l'adoption par le père commanditaire n'est nullement nécessaire: il suffit qu'il reconnaisse l'enfant, ce qui ne sera possible — il est vrai — que si la mère porteuse n'est pas mariée et que si elle donne son consentement. L'enfant aura donc pour mère la gestatrice et pour père le père commanditaire.
Ce n'est que dans l'hypothèse du recours à la mère porteuse non génétique, lorsque le père commanditaire n'a pas fourni son sperme, qu'une adoption sera inévitable, à défaut, pour la proposition, de prévoir un système de filiation « directe ».
En ce qui concerne la mère commanditaire, le recours à l'adoption ne sera pas non plus nécessaire dans tous les cas. Si la mère commanditaire a fourni ses ovules, une action en contestation de maternité devrait être possible. Ce n'est que si la mère commanditaire n'a pas fourni ses ovules que le recours à l'adoption s'avère indispensable, à défaut toujours de prévoir un système de filiation « directe ».
b) Le recours au mécanisme de l'adoption pose problème dès lors que le tribunal pourrait refuser de prononcer l'adoption. Qu'adviendra-t-il dans ce cas ?
c) L'article 13 dispose:
« Le père et la mère disposent de l'action en contestation de maternité en vertu de l'article 312, § 2, du [Code civil] et de l'action en contestation de paternité en vertu de l'article 332 de ce même Code ».
Selon les développements de la proposition,
« [s]i le(s) parent(s) demandeur(s) constatent que la mère porteuse leur a remis un enfant qui n'a pas été conçu avec leurs gamètes, ils disposent des actions en contestation [précitées] ».
L'article 13 manque de cohérence avec l'économie générale de la proposition puisque celle-ci opte pour l'adoption et non pour l'établissement « direct » d'une filiation à l'égard des parents commanditaires.
Comme exposé ci-avant, au littera a), avant l'adoption ou avant une reconnaissance, il n'y aura, par définition, pas lieu à contester une paternité ou une maternité qui n'existe pas.
Après l'adoption, c'est une procédure de révocation qu'il faudrait introduire et non une procédure de contestation de paternité ou de maternité. La révocation n'est cependant possible qu'en cas d'adoption simple et pour des motifs « très graves » (218) .
Il n'y a donc que dans l'hypothèse d'une reconnaissance qu'une contestation de celle-ci pourrait être introduite, conformément à l'article 330 du Code civil, s'il apparaissait que le consentement du reconnaissant a été vicié, en l'espèce par l'erreur ou le dol, et qu'il n'y a pas de possession d'état. Mais, dans cette hypothèse, on ne se situe pas dans le cadre des articles 312 et 332 qui ne concernent que la mère qui a accouché et son mari éventuel.
La même observation vaut pour les articles 14 et 15 de la proposition, qui semblent impliquer que la filiation ait été établie à l'égard des parents commanditaires, ce qui n'est pas le cas (219) .
d) L'article 1231-9bis du Code judiciaire proposé par l'article 11 déroge à plusieurs dispositions du même Code qui tendent à prévoir le recueil de certains avis avant que le tribunal statue sur la demande d'adoption.
Il est renvoyé sur ce point à l'observation faite au nº 103, plus haut.
Par ailleurs, dans cette même disposition proposée, prévoir une audience « entre le 15e et le 45e jour du dépôt de la requête et du rapport de l'enquête sociale » n'a pas de sens puisque le dépôt de la requête et du rapport de l'enquête sociale ne se font pas à la même date. Il y a lieu de tenir compte également du dépôt de l'avis du ministère public.
132. L'article 16, § 3, est incohérent lorsqu'à sa première phrase il fait de l'existence d'un but lucratif un élément constitutif de l'infraction et qu'à sa seconde il en fait une circonstance aggravante.
C. La proposition nº 1271
133. À l'article 2, second tiret, les mots « et qui assume l'autorité parentale sur l'enfant et son éducation » n'ont pas pour objet de définir la notion de « parent demandeur » mais de prescrire un effet du recours à la gestation pour autrui en ce qui concerne ce parent.
Pareille disposition n'a pas sa place dans un texte qui contient des définitions.
Plus fondamentalement, l'obligation prescrite par le membre de phrase examiné ne doit pas être confirmée dans le dispositif puisque l'autorité parentale et le devoir d'éducation résultent de plein droit de la qualité de parent qui sera attachée, sur la base notamment de l'article 9 de la proposition, à la qualité de parent commanditaire lors de la naissance de l'enfant (220) . D'autres effets sont par ailleurs attachés à la filiation qui résultera de l'exécution de la convention portant sur la gestation pour autrui, qui ne sauraient être restreints comme une lecture a contrario du texte pourrait le laisser entendre.
134. L'article 4, § 1er, dispose qu'
« un parent demandeur (, c'est-à-dire, selon l'article 2, un homme, une femme ou un couple) peut recourir à une mère porteuse (...) lorsqu'un médecin constate par écrit qu'il est physiologiquement incapable de procréer ou, le cas échéant, qu'une grossesse entraîne un risque trop grand pour la santé de la femme ou de l'enfant ».
Ce texte est particulièrement flou, en ce qu'il vise une « incapacité physiologique de procréer », sans préciser ce que recouvre cette notion qui, de plus, peut s'appliquer à un homme, à une femme ou à un couple. Telle qu'elle est rédigée, elle peut être interprétée très largement, comme concernant toute incapacité de procréer, même si elle n'est pas due à des motifs médicaux.
Toutefois, la mention d'un constat médical (221) semble impliquer que seule une complication physiologique pourrait justifier le recours à la gestation pour autrui et non une impossibilité physiologique découlant de la nature des choses, comme pour une homme seul ou un couple homosexuel. On se trouverait alors dans la même hypothèse que celle de la proposition nº 1230 (222) , et ce d'autant plus que les développements font référence à l'absence d'utérus ou à son mauvais fonctionnement.
D'une manière plus générale, les développements de la proposition ne permettent pas de distinguer entre l'ensemble des hypothèses où il pourrait être recouru, en fait, à la gestation pour autrui et les seules hypothèses que la proposition entend légaliser.
Le texte sera clarifié sur ces importantes questions.
135. La proposition ne prévoit aucun empêchement lié à la parenté ou à l'alliance entre la mère porteuse et le commanditaire. Il résulte même de l'article 4, § 2, A, premier tiret, que la mère porteuse peut être la mère d'un des parents demandeurs.
La proposition devrait être complétée afin de prévoir des dispositions analogues à celles qui, en ce qui concerne le mariage, prohibent certaines unions en vue de prévenir des consanguinités préjudiciables.
136. En vertu de l'article 4, § 1er, un parent commanditaire ne peut recourir à une mère porteuse que lorsqu'un médecin constate qu'« il » est physiologiquement incapable de procréer. Ce commanditaire peut, en vertu de l'article 2, être un homme, une femme ou un couple.
La combinaison de ces deux dispositions, dans le cas où c'est un couple qui agit comme parent commanditaire, pose problème. Il est inadéquat de prévoir que le couple doit être stérile. Si tel est le cas, la stérilité doit provenir de la femme: dans le cas contraire, il suffirait de procéder à une insémination artificielle avec donneur. Si la femme est stérile, la fécondité du mari est, au contraire, nécessaire puisqu'en vertu de l'article 4, § 2, le recours à une mère porteuse n'est autorisé que s'il est établi qu'il existera un lien de parenté génétique entre au moins un des parents demandeurs et l'enfant.
Le texte sera revu.
137. À l'article 4, § 3, alinéa 2, il y a lieu d'écrire:
« Outre les obligations ... »
138. À l'article 4, § 4, il est procédé par un renvoi à une réglementation résultant d'un arrêté royal.
Le procédé de la législation par référence n'est pas indiqué, étant de nature à susciter des difficultés en cas de modification du texte auquel il est renvoyé. Il est encore moins recommandé lorsque le renvoi se fait d'une loi à un arrêté royal.
139. Les articles 5, quatrième tiret, et 6, dernier alinéa, utilisent l'acronyme « MST ».
Mieux vaut écrire en toutes lettres: « maladies sexuellement transmissibles ».
140. À l'article 6, ce n'est qu'au quatrième tiret qu'il est précisé que la condition qu'elle impose est requise « avant la signature de l'acte authentique visé à l'article 4, § 3 ».
Il y a lieu de clarifier le texte pour indiquer si cette exigence ne s'applique pas aussi aux autres conditions prescrites ou à certaines d'entre elles. Tel semble être le cas, en toute hypothèse, pour les trois premières conditions énoncées.
141. L'article 6, cinquième tiret, prévoit une limite d'âge pour la mère commanditaire lorsque c'est elle qui demande à une femme d'être porteuse. Elle ne fixe cette limite que dans l'hypothèse où elle donne ses ovocytes, c'est-à-dire celle de la mère porteuse non génétique.
Le dispositif n'empêche toutefois pas que, dans cette dernière hypothèse, le « partenaire » introduise la demande seul, indépendamment de l'âge de la femme qui partage sa vie (223) .
Il résulte également du texte qu'en cas de recours à une femme porteuse génétique, l'âge de la commanditaire n'est pas limité.
142. À l'article 7, l'interdiction faite au « partenaire » de la mère porteuse de « donner des gamètes en vue de la gestation pour le compte du parent demandeur » est justifiée, dans son commentaire, par la nécessité d'exclure « toute action en contestation de paternité par ce partenaire (...) ».
On suppose que le commentaire entend par là qu'il y a lieu d'éviter toute contestation sur la paternité de l'enfant découlant de son attribution aux commanditaires (224) .
Le même objectif pourrait être atteint en complétant de manière expresse le Code civil afin d'éviter qu'en cas de recours aux gamètes du « partenaire » de la mère porteuse, celui-ci puisse se voir attribuer la paternité de l'enfant lorsqu'il est établi qu'il savait que ce don de gamète était conçu dans un contexte de convention de mère porteuse (225) .
La notion de « partenaire » devrait en outre être précisée.
143. La proposition contient des contradictions sur la question du recours à la filiation « directe » entre les commanditaires et l'enfant né par le recours à la gestation pour autrui.
Les développements exposent, en page 4, que
« la présente proposition opte en quelque sorte pour l'adoption d'un enfant avant sa conception et, à cette fin, pour la conclusion d'un contrat par les parents demandeurs avec la mère porteuse » (226) .
Les mêmes développements font un lien entre le recours à la gestation pour autrui par un couple homosexuel et la possibilité donnée à ce dernier d'adopter un enfant. Cependant, dans le texte de la proposition, il n'est nullement question d'adoption et aucun article du Code civil ou du Code judiciaire relatif à l'adoption n'est modifié pour tenir compte de la gestation pour autrui. Au contraire, l'article 9, alinéa 1er, dispose que
« Le nom du parent demandeur est mentionné dans l'acte de naissance. À cet effet, l'acte notarié visé à l'article 4, § 3, est transmis à l'officier de l'état civil ».
On suppose que, si le parent commanditaire (« parent demandeur ») est marié ou vit en cohabitation, son conjoint ou son cohabitant sera obligatoirement également parent commanditaire et que, dès lors, son nom sera également mentionné dans l'acte de naissance, de la même manière que dans la proposition nº 417. Il y aurait lieu de le préciser.
144. La proposition opte pour l'établissement direct d'un lien de filiation, dès la naissance, entre l'enfant et les commanditaires.
Cependant, la gestation pour autrui introduit des distorsions entre la filiation paternelle et maternelle légale, la paternité génétique, la maternité génétique et la maternité « gestative ». Il y a lieu de rendre, semble-t-il, la filiation légale inattaquable, sauf cas particuliers. La mère porteuse et les éventuels donneurs de gamètes devraient ne pas pouvoir contester la filiation des commanditaires et ces derniers devraient ne pas pouvoir contester leur propre paternité et maternité. L'enfant, lui non plus, ne devrait pas pouvoir contester la paternité de ses parents commanditaires.
Sur ces questions, la proposition appelle les observations suivantes:
a) Comme il a été mentionné ci-avant, sous le nº 143, l'article 9, alinéa 1er, première phrase, dispose que le nom du parent demandeur est mentionné dans l'acte de naissance.
Or, l'article 57, 2º, du Code civil dispose que l'acte de naissance énonce notamment
« le nom, les prénoms et le domicile de la mère et du père, si la filiation paternelle est établie ».
Par « nom de la mère », l'article 57, 2º, entend le nom de la femme qui a accouché.
La proposition ne précise pas si la mention qu'elle prévoit remplace une des mentions prévues à l'article 57 du Code civil, et, dans l'affirmative laquelle, ou si elle s'ajoute à celles-ci.
On suppose que l'intention des auteurs de la proposition est de mentionner dans l'acte de naissance le nom de la mère et du père commanditaires, à l'exclusion du nom de la mère porteuse et de son mari, de sorte qu'en vertu de l'article 312, § 1er, du Code civil, ce sera cette mère commanditaire et son mari qui seront les mère et père légaux.
Pour éviter toute interrogation à ce sujet, il y a lieu de modifier directement l'article 57 du Code civil.
b) Selon l'article 9, alinéa 1er, seconde phrase, l'acte notarié est transmis à l'officier de l'état civil.
Il y a lieu de préciser à qui l'obligation visée incombe.
c) L'article 9, alinéa 2, dispose:
« Toute contestation de filiation maternelle ou paternelle élevée en application des articles 312 ou 332 du Code civil par le parent demandeur ou la mère porteuse et, le cas échéant, par le partenaire de la mère porteuse, est irrecevable ».
Les actions en contestation de maternité ou de paternité devraient cependant être maintenues si l'enfant n'a pas été conçu avec les gamètes initialement prévus.
d) L'article 9, alinéa 2, vise « le parent demandeur ou la mère porteuse et, le cas échéant, le partenaire de la mère porteuse ».
Or, les actions en contestation d'état ne sont pas réservées uniquement au père et à la mère. En vertu de l'article 332, la paternité établie en vertu de l'article 315 peut être contestée par le mari, par la mère et par l'enfant. En vertu de l'article 332bis, les autres actions en contestation d'état appartiennent à toute personne justifiant d'un intérêt qui ne soit pas purement patrimonial.
On suppose cependant que les auteurs de la proposition ont également entendu viser toutes les personnes qui pourraient contester la paternité ou la maternité. Il y aurait lieu de le préciser.
e) La référence à l'article 332 du Code civil semble insuffisante. En effet, cet article ne concerne que la contestation de la paternité établie en vertu de l'article 315, c'est-à-dire la paternité fondée sur le mariage. La disposition ne s'appliquerait donc pas aux cohabitants, ce qui ne semble pas admissible au regard des articles 10 et 11 de la Constitution.
f) Enfin, dès lors que la proposition semble permettre le recours à la gestation pour autrui par une personne seule et que, dès lors, la filiation de l'enfant ne sera établie qu'à l'égard de cette seule personne, il y aurait lieu, semble-t-il, de prohiber les reconnaissances ou les actions en recherche de paternité ou de maternité. L'on vise ici la mère de substitution et les donneurs de gamètes.
145. Dans le texte français de l'article 12, alinéa 1er, troisième tiret, il y a lieu de remplacer les mots « maternité de substitution » par les mots « gestation pour autrui » afin de maintenir un vocabulaire homogène dans la proposition. En outre, « la maternité de substitution » pourrait être considérée comme ne concernant qu'une forme de « gestation pour autrui », en fonction du don ou non de l'ovule par la mère porteuse.
D. La proposition nº 1319
146. Le texte français de l'article 2 de la proposition (intitulé proposé du chapitre II du titre VII du livre II du Code pénal) vise la « maternité de substitution ».
L'article 3 de la proposition (article 354 proposé du Code pénal) vise les « mères porteuses ».
L'article 4 de la proposition (article 355 proposé du Code pénal) vise les « mères porteuses » ainsi que la « maternité de substitution ».
L'article 5 de la proposition (article 356 proposé du Code pénal) vise la « grossesse pour compte d'autrui » ainsi que les « mères porteuses ».
Or, les procédés de la « mère porteuse » et de la « maternité de substitution » peuvent être considérés comme visant des hypothèses distinctes, spécialement selon que la mère gestatrice a offert ou non son ovule (227) .
La proposition doit dès lors être revue afin de préciser quel est exactement son champ d'application et d'uniformiser la terminologie utilisée.
Cette exigence s'impose d'autant plus que la proposition définit des infractions et qu'elle est donc soumise à l'exigence de précision en matière pénale déduite du principe de la légalité des infractions et des peines, inscrit notamment aux articles 12 et 14 de la Constitution et à l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme.
147. On n'aperçoit pas l'utilité des mots « dans le but d'obtenir les droits parentaux sur un enfant ».
Ils pourraient donner à penser que la rémunération de la maternité de substitution ne serait pas sanctionnée si elle était le fait d'une personne autre que le couple commanditaire, par exemple un parent ou un ami de celui-ci ou une ASBL
Par ailleurs, on pourrait imaginer que le couple commanditaire ne veuille pas obtenir les droits parentaux sur l'enfant mais seulement s'en occuper en fait, à temps plein ou en partage avec la mère porteuse.
148. Selon les développements de la proposition, est interdite, notamment, toute
« offre publique de médiation et la publication d'une information faisant savoir qu'une femme se propose comme mère porteuse ou que l'on recherche une mère porteuse ».
Autrement dit, toute publicité en la matière serait interdite, même si la gestation pour autrui n'est pas rémunérée.
Or, l'article 354 proposé du Code pénal ne vise que la publicité « pour le versement d'une [...] telle rétribution » et l'article 355 proposé du même Code ne vise que la publicité suivie de rétribution.
Il y a lieu de clarifier le texte proposé et le commentaire de la disposition.
E. La proposition nº 1399
149. L'article 2 définit la « mère porteuse », qualifiée de « mère de substitution » dans le présent avis (228) , comme étant « la femme qui porte un enfant conçu à partir de ses propres ovules et le sperme du père ou d'un donneur ».
Or, le donneur de sperme sera lui aussi le père.
On suppose que la proposition entend faire la distinction selon que le sperme provient de la personne commanditaire de l'enfant ou d'un homme qui n'est pas le commanditaire de l'enfant.
La rédaction du texte devrait être clarifiée en ce sens.
150. À l'article 7, si le mot « faciliter » entend viser la complicité, il est inutile, compte tenu des articles 67 et 69 du Code pénal, qui prévoient déjà la complicité et la manière de la sanctionner.
S'il entend viser des situations autres que la complicité, il y a lieu de préciser quelles sont ces situations.
151. L'article 7 incrimine
« quiconque aura commis ou facilité des infractions aux articles 3 à 6 ».
L'article 3 dispose que
« le recours aux mères de substitution et aux mères porteuses est formellement prohibé, pour quelle que cause que ce soit »
La combinaison de ces deux dispositions ne permet pas de déterminer avec certitude qui pourra être sanctionné. Il pourra s'agir certainement des commanditaires, mais qu'en est-il de la mère porteuse elle-même ou des éventuels donneurs de gamètes ?
La disposition sera revue.
F. La proposition nº 1440
1º) Observations générales
a) La compatibilité avec la Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine
152. La Convention sur les droits de l'homme et la biomédecine, signée à Oviedo le 4 avril 1997, comporte un certain nombre de dispositions spécifiques qui sont pertinentes pour le texte en projet (229) . Il s'agit d'une convention conclue dans le cadre du Conseil de l'Europe et qui peut être regardée comme une sorte de complément, spécifique à un secteur, de la Convention européenne des droits de l'homme.
Il n'est pas certain que la Belgique signera cette Convention, mais, en tout état de cause, il paraît utile de vérifier la compatibilité de la proposition avec la Convention.
Ce sont principalement les articles 12 et 14 de la Convention qui sont pertinents dès lors qu'ils limitent la recherche génétique prédictive à des fins médicales ou à la recherche scientifique menée à des fins médicales. Les dispositions de la proposition concernant le diagnostic génétique préimplantatoire (DGP) semblent effectivement satisfaire à ces dispositions de la Convention. L'article 68 de la proposition dispose en effet que le DGP est exceptionnellement autorisé dans l'intérêt thérapeutique d'un enfant déjà né du ou des parents commanditaires. En outre, l'article 67 exclut le DGP à caractère eugénique et sexuel, par analogie avec les dispositions de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro, auxquelles cette disposition fait référence.
La protection adéquate de l'embryon in vitro requise par l'article 18, § 1er, de la Convention, en cas de recherche scientifique, est essentiellement offerte par la loi du 11 mai 2003, mais la présente proposition ne porte pas atteinte à ces garanties existantes, bien au contraire.
En revanche, la règle proposée se heurte à l'article 18, § 2, de la Convention, dès lors qu'il est possible qu'un nombre relativement important d'embryons soient constitués et que l'on sait d'avance qu'il est fort probable qu'un certain nombre d'embryons surnuméraires (qui ne sont pas directement implantés) puissent être destinés à la recherche scientifique. Comme ce fut le cas pour la loi du 11 mai 2003, il paraît dès lors souhaitable que la Belgique, si elle devait signer la Convention, émette une réserve sur l'article 18, § 2, de la Convention, sauf à revoir la proposition sur ce point.
153. L'article 11 de la proposition dispose certes qu'il ne pourra être procédé à d'autres prélèvements d'ovules en vue de la constitution de nouveaux embryons tant que le ou les parents commanditaires disposent encore d'embryons cryoconservés.
Compte tenu également de l'article 18 de la Convention, la constitution d'embryons doit se limiter au nombre d'embryons nécessaire du point de vue médical pour obtenir une grossesse. C'est la seule façon d'empêcher autant que faire se peut la destruction d'embryons, soit parce que la cryoconservation n'a pas été effectuée, soit à l'expiration du délai de conservation, soit au terme d'une recherche scientifique (voir l'article 10 de la proposition, ainsi que l'article 5, 2º, de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro).
Pour ce motif, il y aurait lieu de préciser à l'article 11 qu'en cas de prélèvement unique d'ovules également, seuls peuvent être prélevés les ovules et constitués les embryons nécessaires à des fins médicales en vue d'une grossesse.
b) La relation entre le régime proposé et la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient
154. Selon son article 3, § 1er, la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient, est applicable
« aux rapports juridiques de droit privé et de droit public dans le domaine des soins de santé dispensés par un praticien professionnel à un patient ».
On peut considérer que tous les actes réglés par la proposition peuvent être regardés comme des actes de soins de santé. C'est évidemment le cas pour les actes qui visent directement le déclenchement d'une grossesse, tels que l'implantation d'un embryon surnuméraire ou l'insémination de gamètes.
Cela apparaît moins nettement pour le prélèvement de gamètes, certainement lorsque ce prélèvement ne nécessite en soi aucune technique médicale spécifique, tel que le prélèvement de spermatozoïdes. Certainement lorsque les spermatozoïdes ainsi prélevés sont utilisés à des fins de recherche scientifique, on peut s'interroger sur le point de savoir s'il s'agit d'un acte de soins de santé. On peut néanmoins considérer que dans la mesure où ils sont associés au prélèvement de gamètes, les praticiens sont également soumis, pour ces actes, à l'application de la loi du 22 août 2002.
En conclusion, la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient est applicable à tous les actes des praticiens réglés par la présente proposition.
Ceci implique que, pour les actes et techniques réglés par la présente proposition:
— le patient (et donc également les parents commanditaires) a droit, de la part du praticien professionnel, à des prestations de qualité répondant à ses besoins et ce, dans le respect de sa dignité humaine et de son autonomie et sans qu'une distinction d'aucune sorte ne soit faite (230) ;
— le patient a droit, en principe, au libre choix du praticien professionnel auquel il fait appel (231) ;
— le patient a droit à l'information (232) ;
— le consentement éclairé, préalable et libre du patient doit être garanti (233) ;
— un dossier de patient, que le patient peut consulter, doit être tenu à jour (234) ;
— le droit à la protection de la vie privée du patient doit être garanti (235) ;
— une représentation pour certains patients (mineurs, incapables d'exprimer leur volonté, etc.) doit être prévue (236) .
Il est dès lors superflu d'inscrire dans la législation proposée des dispositions qui font double emploi avec le régime légal existant, à moins qu'il ne s'agisse d'élaborer davantage ce régime ou de prévoir des garanties supplémentaires pour les patients concernés.
Ainsi, les articles 7, § 3, 42, § 4 et 66, alinéa 2, de la proposition contiennent par exemple des dispositions qui, parce qu'elles font précisément référence de façon explicite à la loi du 22 août 2002, soulèvent la question de savoir si cette loi s'applique ou non aux autres parties de la réglementation proposée.
Il appartient aux auteurs de la proposition d'examiner une nouvelle fois leur texte à la lumière de ce qui précède.
c) La relation entre le régime proposé et la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro.
155. La loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro règle les essais ou expérimentations scientifiques sur des embryons in vitro (des embryons qui se situent hors du corps féminin). Toutefois, elle comprend aussi:
— des dispositions concernant la constitution d'embryons à des fins de recherche (237) ;
— différentes dispositions énonçant des interdictions concernant l'implantation d'embryons, l'utilisation de gamètes, d'embryons ou de cellules souches embryonnaires, certaines recherches ou certains traitements et le clonage reproductif (238) .
L'article 4 de la loi ne fait pas double emploi avec les dispositions du texte proposé.
L'article 5 de la loi fait partiellement double emploi avec des dispositions de la présente proposition (239) . On peut toutefois admettre que cette disposition conserve une portée distincte parce qu'elle s'applique également de façon spécifique à des fins de recherche.
156. Il peut en outre être relevé que la loi du 11 mai 2003 concerne en fait également la recherche sur les gamètes, comme l'indique l'article 8 de la loi. Le texte proposé considère manifestement que la loi s'applique uniquement à la recherche sur des embryons dès lors que tant à l'article 2, h), que dans la suite de la proposition, il est uniquement fait référence à la loi du 11 mai 2003 dans le contexte de la recherche sur les embryons. Il semble opportun de faire également référence à la loi du 11 mai 2003 dans les dispositions de la proposition qui traitent de la recherche sur les gamètes.
157. Dès lors que la combinaison de l'article 39 et des articles 48 à 51 permet que des gonades et des fragments de gonades soient également destinés à la recherche scientifique, les auteurs de la proposition devront vérifier s'il n'est pas souhaitable de rendre également la loi du 11 mai 2003 explicitement applicable à ces formes de recherche.
158. Il pourrait être remédié beaucoup plus simplement aux problèmes de cohérence de la proposition et la loi du 11 mai 2003 en intégrant la loi du 11 mai 2003 dans la législation proposée.
d) La relation entre le régime proposé et la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine
159. Il est possible qu'une expérimentation au sens de l'article 2, 11º, de la loi du 7 mai 2004 relative aux expérimentations sur la personne humaine concerne des gamètes ou des embryons. Dans ce cas, les dispositions de la proposition et celles de la loi du 7 mai 2004 s'appliquent de façon cumulative.
e) La relation entre le régime proposé et la réglementation sur les centres de fécondation
160. Tels qu'ils sont définis dans le texte proposé, les centres de fécondation sont en fait les programmes de soins agréés de « médecine reproductive ». Pour être agréés, ces centres doivent satisfaire aux critères fixés dans l'arrêté royal du 15 février 1999 fixant les critères de programmation applicables au programme de soins « médecine de la reproduction ». En outre, les centres de fécondation doivent également observer les dispositions du texte proposé. Ces dispositions ne présentent pas le caractère de critères d'agrément, de sorte que leur non-respect ne peut en soi conduire à la perte de l'agrément mais peut néanmoins donner lieu à des sanctions pénales (240) .
2º) Observations particulières
Article 3
161. L'article 3 attribue aux centres de fécondation un monopole en ce qui concerne les techniques de fécondation in vitro et de cryoconservation (d'embryons et de gamètes). Selon les développements relatifs à la proposition,
« [il n'est pas empiété] sur les activités habituelles et les compétences reconnues des gynécologues ».
On n'aperçoit pas quels sont, parmi les aspects que la proposition règle, ceux qui ne relèvent pas du monopole des centres de fécondation. Doit-on considérer que le don et la destruction d'embryons et de gamètes, l'insémination ou l'implantation, ainsi que le prélèvement de gamètes sont uniquement possibles dans un centre de fécondation ? Tel semble bien être le cas, différentes dispositions y afférentes s'adressant tout spécialement aux centres de fécondation. En ce qui concerne le diagnostic génétique préimplantatoire, les articles 71 et 72 de la proposition disposent par contre que les centres de génétique humaine peuvent effectuer ces examens en collaboration avec un centre de fécondation.
La disposition proposée devrait en tout cas indiquer plus précisément pour quels aspects de la proposition les centres de fécondation détiennent un monopole.
Si l'intention n'est pas de concevoir le monopole des centres de fécondation d'une façon aussi générale, les auteurs de la proposition devraient vérifier, pour chacune des dispositions qui n'entrent pas dans le cadre de ce monopole et font référence aux centres de fécondation, si cette référence ne doit pas être étendue à d'autres entités de soins ou être formulée d'une manière générale.
162. Les auteurs de la proposition choisissent à bon droit de transposer, dans le cadre de la présente proposition, la directive 2004/23/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 relative à l'établissement de normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des tissus et cellules humains, pour un certain nombre de cas qui ne relèvent pas de la loi du 13 juin 1986 sur le prélèvement et la transplantation d'organes.
L'article 1er, § 1er, de cette loi prévoit en effet ce qui suit: « § 1er. La présente loi est applicable au prélèvement d'organes, de tissus ou de cellules du corps d'une personne, appelée « donneur », en vue de la transplantation de ces organes, tissus ou cellules à des fins thérapeutiques sur le corps de la même personne ou d'une autre personne, appelée « receveur ».
Le transfert d'embryon, le prélèvement et la transplantation de testicules et ovaires, et l'utilisation des ovules et du sperme, ne sont pas visés par la présente loi ».
Il peut toutefois être également inféré de cette disposition législative que les embryons non surnuméraires (en d'autres termes, les embryons qui, après leur constitution, sont implantés sans avoir été d'abord congelés) échappent au champ d'application de cette loi et ne figurent pas non plus dans l'habilitation au Roi proposée à l'article 3.
L'article 2, paragraphe 2, a), de la directive dispose certes que celle-ci ne s'applique pas « aux tissus et cellules utilisés pour une greffe autologue dans le cadre d'une seule et même intervention chirurgicale », mais cette exception ne semble pas s'appliquer au cas de la fécondation in vitro d'un ovule suivie de l'implantation de l'embryon obtenu.
Il semble dès lors opportun, soit d'étendre en ce sens l'habilitation au Roi, soit d'intégrer dans la présente proposition les mesures nécessaires à la transposition de la directive.
163. La délégation inscrite à l'article 3, alinéa 2, est formulée de façon quelque peu confuse. Plutôt que d'habiliter le Roi « à [fixer] les conditions relatives à l'établissement de normes de qualité et de sécurité (...) », il est préférable d'habiliter directement le Roi à établir les normes de qualité et de sécurité.
164. Le texte néerlandais de l'alinéa 2 doit être aligné sur le texte néerlandais de la directive 2004/23/CE.
Compte tenu de l'observation faite sous le nº 163, le texte suivant est proposé:
« Le Roi établit les normes de qualité et de sécurité pour le don, l'obtention, le contrôle, la transformation, la conservation, le stockage et la distribution des gamètes, des embryons surnuméraires, des gonades et fragments de gonades ».
Article 4
165. La disposition proposée habilite les centres de fécondation in vitro à modaliser la procédure qu'ils souhaitent mettre en place dans le cadre de leur mission.
En premier lieu, la réserve relative au respect des dispositions du texte proposée est superflue. Il va en effet de soi que les centres doivent respecter toutes les normes juridiques pertinentes à leur égard, comme la proposition si elle devenait loi, la loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient, les normes d'agrément qui leur sont applicables, etc. Cette réserve doit dès lors être omise, d'autant qu'elle pourrait donner lieu à des raisonnements a contrario erronés.
Ensuite, l'exercice d'un pouvoir normatif ne peut être simplement conféré à des établissements privés comme les centres de fécondation in vitro, même s'ils sont agréés par les pouvoirs publics. Il va de soi que les centres de fécondation in vitro déterminent librement la manière dont ils exécutent leurs missions dans les limites des normes juridiques qui leur sont applicables. Dans la mesure où les auteurs de la proposition l'entendent ainsi lorsqu'ils font référence dans les développements à la « liberté d'action » des centres, la disposition proposée est superflue et il vaut mieux l'omettre.
Si, toutefois, l'intention est quand même d'habiliter réellement les centres à édicter des règles qui seraient par exemple obligatoires pour les parents commanditaires qui s'adressent à eux, la disposition proposée est contraire à l'article 33 de la Constitution (241) . Sous certaines conditions, cette objection de constitutionnalité peut être levée si une approbation par le Roi est prévue (242) , mais ce procédé ne semble pas très opportun, notamment parce qu'il faudrait ainsi approuver les règles fixées séparément par chaque centre.
Article 5
166. Le Conseil d'État ne dispose pas de l'expertise médicale nécessaire lui permettant de se forger une opinion sur la proportionnalité des limites en termes d'âge utilisées dans la disposition proposée.
Article 7
167. Il est évident que les parents commanditaires ont la possibilité de recourir à une consultation psychologique à tout moment de la procédure. S'il s'agit que les centres de fécondation proposent eux-mêmes cette consultation aux parents commanditaires ou mettent ces derniers, à leur demande, en contact avec un consultant psychologique, il vaudrait mieux le prévoir expressément. Dans le cas contraire, il vaudrait mieux omettre le paragraphe 2.
Article 11
168. Sans doute entend-on par « d'autres prélèvements », les nouveaux prélèvements d'ovules et de spermatozoïdes. Il vaut mieux le prévoir explicitement.
Article 13
169. Les mots « la situation visée à l'article 14, alinéa 4 » font en fait référence à l'hypothèse de deux parents commanditaires. Il vaut mieux le prévoir expressément.
Article 14
170. La mention, à l'alinéa 2, de ce qu'une disposition contractuelle qui est contraire à l'article 17 sera nulle de plein droit soulève la question de savoir si elle ne heurterait pas éventuellement d'autres dispositions de la loi proposée qui, elles aussi, semblent être impératives.
171. Il se recommande de transférer la seconde phrase de l'alinéa 3 à l'article 18, alinéa 3.
Article 19
172. Dans les travaux préparatoires, par exemple dans le rapport de la commission, il serait opportun de préciser, à l'aide de quelques exemples, ce qu'est la portée des « circonstances particulières » visées au paragraphe 1er.
Article 20
173. La condition selon laquelle des embryons surnuméraires ne peuvent être affectés qu'à titre gratuit à la recherche scientifique ne figure pas dans la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro. On peut se demander s'il ne serait pas préférable d'insérer cette condition dans la loi précitée au moyen d'une disposition modificative. Dans ce cas, les auteurs de la proposition devront toutefois s'interroger sur la question de savoir si cette condition doit également s'appliquer aux embryons spécialement constitués à des fins de recherche, qui échappent au champ d'application de la présente proposition mais qui entrent dans celui de la loi du 11 mai 2003 (243) .
Article 21
174. Par souci d'exhaustivité, il serait sans doute préférable que l'alinéa 1er se réfère à la convention visée aux articles 8 et 14.
175. La disposition qui figure à l'alinéa 2 est non seulement nouvelle mais elle déroge même à la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro. L'article 8, alinéa 4, de cette loi prévoit en effet la possibilité d'un refus a posteriori par un donneur. L'article 8, alinéa 3, dispose que les donneurs sont informés de leur droit de retirer leur consentement jusqu'au début de la recherche.
En principe, la disposition proposée et la disposition législative actuelle devraient donc être alignées l'une sur l'autre. La question est toutefois de savoir si la disposition de l'alinéa 2 est bien une mesure proportionnelle. Selon les développements, cette mesure est motivée par le souci d'assurer aux centres de fécondation une plus grande sécurité juridique, mais cela n'empêche pas qu'il faut tenir compte des parents commanditaires qui, pour des motifs déterminés, souhaiteraient encore implanter des embryons. Par ailleurs, il ne faut pas non plus perdre de vue que, par définition, des embryons destinés à la recherche scientifique doivent être détruits par la suite (ou périssent lors de cette recherche même), tandis que des embryons qui sont implantés peuvent se développer pour devenir un être vivant.
Mieux vaudrait réexaminer cette option.
Article 22
176. Il est renvoyé à l'observation faite sous le nº 165, concernant l'article 4 de la proposition. Il peut être admis que dans des cas individuels, les centres de fécondation fixent un délai ou adoptent, à ce sujet, une stratégie générale. Si la portée est uniquement celle-là, cette disposition est superflue et elle devrait être supprimée.
Article 23
177. On n'aperçoit pas comment le don d'embryons surnuméraires peut avoir lieu d'une manière anonyme lorsqu'il est recouru à une mère porteuse non génétique et que l'embryon est issu de gamètes des parents commanditaires; en ce cas, il est implanté chez la mère porteuse mais avec comme objectif final que l'enfant soit cédé ultérieurement à ces derniers. En théorie, l'anonymat des donneurs d'embryons (les parents commanditaires) peut se concevoir à l'égard de la mère porteuse mais c'est peu probable dans la pratique.
Article 25
178. Il pourrait être envisagé d'inscrire cette interdiction sous l'article 5 du titre II. En effet, au moment du don, la manière dont s'effectuera l'implantation des embryons donnés n'est pas encore déterminée.
Article 26
179. Il est renvoyé à l'observation nº 178 faite au sujet de l'article 25. Par rapport à l'hypothèse visée à cette disposition, il est encore moins imaginable que le donneur connaisse l'étendue de la famille du récepteur.
Article 27
180. Dans l'avis nº 27 du Comité consultatif de Bioéthique relatif au don de sperme et d'ovules, il est suggéré d'adapter les dispositions du Code civil relatives à la filiation (244) . Ce procédé est préférable, en effet, à l'insertion d'une disposition autonome dans la présente proposition de loi (245) .
181. La disposition proposée ne tient pas compte de l'hypothèse du don d'embryons en vue de la pratique non génétique de la mère porteuse. Dans ce cas, en effet, un embryon est implanté chez la mère porteuse, mais avec comme objectif final que l'enfant soit cédé ultérieurement aux parents commanditaires.
Naturellement, il est possible de prévoir dans un autre texte relatif aux mères porteuses que la filiation joue dans ce cas en faveur des parents commanditaires mais il faudrait alors une dérogation expresse à la présente disposition afin de ne créer aucune ambiguïté à ce propos.
182. L'alinéa 2 soulève la question de savoir si l'exclusion de l'action ne doit pas non plus être appliquée en sens inverse.
Article 56
183. Il est renvoyé aux observations nos 180 à 182 faites au sujet de l'article 27.
Article 72
184. On n'aperçoit pas les motifs pour lesquels les centres de fécondation et les centres de génétique humaine doivent obligatoirement collaborer sur une base d'exclusivité.
Article 73
185. La référence à des « actes interdits » est mal choisie dès lors qu'elle donne à penser que seules les interdictions sont sanctionnées pénalement. Si tel devait être le cas, une infraction à l'article 5, alinéas 1er et 2, ne serait pas punissable alors qu'une infraction à l'article 5, alinéa 3, le serait. Telle n'est certainement pas l'intention des auteurs de la proposition.
Il est recommandé, dès lors, de prévoir que « les infractions aux articles (...) sont punies d'un emprisonnement (...) ».
186. La règle proposée implique que tout acte non conforme au régime proposé est puni d'un emprisonnement d'un à cinq ans et d'une amende de 1 000 à 10 000 euros.
Conformément à la loi du 5 mars 1952 relative aux décimes additionnels sur les amendes pénales, le montant de cette amende est majoré de quarante-cinq décimes, ce qui consiste à multiplier le montant par 5,5.
Dans son avis 31.441/AG du 20 juin 2001 sur une proposition de loi relative à l'euthanasie, le Conseil d'État a formulé à propos d'une disposition comparable les observations suivantes:
« En vertu de l'article 3 de la proposition de loi relative à l'euthanasie, le médecin qui pratique une euthanasie ne commet pas d'infraction si, d'une part, il s'est assuré qu'il a été satisfait aux conditions de fond définies au paragraphe 1er, premier à troisième tirets, de cet article et si, d'autre part, il a respecté les conditions et procédures prescrites par la proposition.
Cette dernière condition a une portée générale et concerne dès lors tant les conditions et exigences de procédure qui ont pour but de garantir le respect des conditions de fond prévues à l'article 3, que les conditions et exigences de procédure qui ne sont pas de cette nature mais qui comprennent des obligations purement formelles, telles que les obligations relatives à la déclaration imposée par l'article 7 de la proposition.
Le constat qui vient d'être fait implique qu'un médecin qui n'a pas respecté l'une de ces conditions ou exigences de procédure purement formelles ne peut invoquer l'article 3 et que, sauf s'il peut faire valoir la présence d'un état de nécessité, il peut dès lors être condamné en application des dispositions en vigueur du Code pénal en vertu desquelles l'euthanasie peut être punie. Ce médecin est par conséquent traité tout à fait de la même manière que le médecin qui méconnaît les conditions de fond dans lesquelles l'euthanasie est admissible ou les exigences de procédure qui sont étroitement liées à ces conditions ».
La seule méconnaissance d'une obligation purement formelle peut donc conduire à l'imposition d'une peine qui, même si l'on tient compte des peines minimales applicables et à la possibilité de retenir des circonstances atténuantes, peut difficilement être réputée se trouver dans un rapport raisonnable à l'égard de la prévention qui, dans l'hypothèse présentement examinée, revient essentiellement à avoir pratiqué l'euthanasie sans avoir respecté l'exigence purement formelle y afférente.
Afin de respecter le principe de proportionnalité, il est indiqué d'opérer une distinction entre, d'une part, les conditions essentielles qui doivent être respectées pour que l'euthanasie ne soit pas une infraction et, d'autre part, les conditions strictement formelles sans rapport avec ces conditions essentielles.
Pour assurer le respect de ces conditions strictement formelles, il conviendrait de prévoir des peines adaptées et distinctes. » (246)
La loi du 28 mai 2002 relative à l'euthanasie énonce les conditions auxquelles une euthanasie n'est pas constitutive d'une infraction; ces conditions ne peuvent être invoquées que si toutes les règles de fond et de forme sont remplies, y compris celles à caractère formel. La règle proposée se fonde sur un autre principe et sanctionne pénalement tous les actes interdits par la loi proposée. Toutefois, on y trouve également des éléments strictement formels qui sont interdits par la proposition et dont le non-respect est dès lors punissable.
Pour ces motifs, les auteurs de la proposition devraient, s'ils le jugent nécessaire, prévoir une sanction, distincte et adaptée, en ce qui concerne l'infraction aux conditions de forme.
Article 74
187. L'interdiction d'exercer durant un certain temps toute activité médicale est une mesure disciplinaire qui, selon l'arrêté royal nº 79 du 10 novembre 1967 relatif à l'Ordre des Médecins, est prononcée par les instances disciplinaires de cet Ordre. D'ailleurs, selon l'article 16, alinéa 1er, de cet arrêté, la suspension peut être prononcée pour une durée de deux ans. La seule peine plus lourde est la radiation du tableau de l'Ordre.
Il appartient au législateur de vérifier si, malgré ce qui vient d'être rappelé, il a bien l'intention de prévoir l'interdiction professionnelle comme peine accessoire.
188. L'interdiction temporaire d'exercer des activités de recherche paraît difficilement définissable. Qu'est-ce qu'une activité de recherche ? Cela signifie-t-il que l'intéressé ne peut obtenir d'affectation dans un établissement scientifique et qu'il doit être mis fin à un éventuel contrat de travail ? La question se pose aussi si pareille sanction pénale, dans la mesure où elle porte sur l'affectation dans les universités, peut relever intégralement de la compétence de l'autorité fédérale.
Mieux vaudrait, dès lors, réexaminer aussi cette mesure.
189. Subsidiairement aux observations formulées ci-avant, sous les nos 187 et 188, le texte doit renvoyer à l'article 73, et non à l'« article 74 ».
L'assemblée générale de la section de législation était composée de
M. R. ANDERSEN, premier président du Conseil d'État,
MM. Y. KREINS, P. LEMMENS et D. ALBRECHT, présidents de chambre,
MM. P. LIÉNARDY, J. BAERT, J. SMETS, P. VANDERNOOT, J. JAUMOTTE, Mme M. BAGUET, MM. B. SEUTIN et W. VAN VAERENBERGH, conseillers d'État,
MM. H. COUSY, J. KIRKPATRICK, A. SPRUYT, J. VELAERS, M. RIGAUX, H. BOSLY, G. VANDERSANDEN et G. KEUTGEN, assesseurs de la section de législation,
Mme D. LANGBEEN, greffier en chef,
M. M. FAUCONIER, greffier assumé.
Les rapports ont été présentés par Mme R. THIELEMANS, premier auditeur et MM. A. LEFEBVRE et J. VAN NIEUWENHOVE, auditeurs.
Le greffier, | Le premier président, |
D. LANGBEEN. | R. ANDERSEN. |
(1) Par une lettre de la présidente du Sénat du 14 décembre 2005.
(2) Doc. parl., Chambre, 2005-2006, no 51-597/34; CRI, 20 octobre 2005.
(3) Doc. Sénat, 2005-2006, no 3-1402/1.
(4) Dans la suite de l'avis, il ne sera plus question, sauf pour les dispositions qui les concernent plus spécifiquement, des gonades ou des fragments de gonades. Lorsqu'il sera question de gamètes, on visera en principe également les gonades et les fragments de gonades, l'article 39 de la proposition no 1440 disposant que « l'ensemble des dispositions du titre IV [(« Les gamètes »)] s'applique aux gonades et fragments de gonades ».
(5) Doc. Sénat, 2004-2005, no 3-417/2.
(6) Cette proposition est inscrite sous le num‰ro 39.474/AG du rŸle de la section de l‰gislation du Conseil d'Ðtat. Elle sera qualifi‰e comme suit dans la suite de l'avis: « proposition no 417 ».
(7) Visé par l'arrêté royal du 15 février 1999 fixant les critères de programmation applicables au programme de soins « médecine de la reproduction » (article 5, § 3, alinéa 3, de la proposition).
(8) Cette proposition est inscrite sous le num‰ro 39.475/AG du rŸle de la section de l‰gislation du Conseil d'Ðtat. Elle sera qualifi‰e comme suit dans la suite de l'avis: « proposition no 1230 ».
(9) Cette proposition est inscrite sous le num‰ro 39.476/AG du rŸle de la section de l‰gislation du Conseil d'Ðtat. Elle sera qualifi‰e comme suit dans la suite de l'avis: « proposition no 1271 ».
(10) Cette proposition est inscrite sous le num‰ro 39.477/AG du rŸle de la section de l‰gislation du Conseil d'Ðtat. Elle sera qualifi‰e comme suit dans la suite de l'avis: « proposition no 1319 ».
(11) Cette proposition est inscrite sous le num‰ro 39.478/AG du rŸle de la section de l‰gislation du Conseil d'Ðtat. Elle sera qualifi‰e comme suit dans la suite de l'avis: « proposition no 1399 ».
(12) Cette proposition est inscrite sous le num‰ro 39.525/AG du rŸle de la section de l‰gislation du Conseil d'Ðtat. Elle sera qualifi‰e comme suit dans la suite de l'avis: « proposition no 1440 ».
(13) Article 4, § 2, C, premier tiret, de la proposition.
(14) Article 4, § 2, C, quatrième tiret de la proposition
(15) Voir l'avis 18.016/VR du 20 mai 1987 (doc. Sénat, 1985-1986, no 189/2) et l'avis 19.558/AG du 8 janvier 1990 (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, no 950/5) sur les propositions devenues la loi du 3 avril 1990 relative a l'interruption de grossesse, modifiant les articles 348, 350, 351 et 352 du Code pénal et abrogeant l'article 353 du même Code.
(16) Voir l'avis 30.036/2 du 29 mai 2000 sur un avant-projet de loi devenu la loi du 13 mars 2003 modifiant le Code judiciaire en ce qui concerne l'adoption et la loi du 24 avril 2003 réformant l'adoption; voir aussi, notamment, l'avis 38.623/VR/V du 19 juillet 2005 sur le projet de loi portant assentiment à l'Accord de coopération du 6 juin 2005 entre l'État fédéral, la Communauté Germanophone, la Communauté Française, la Communauté Flamande, la Commission communautaire commune, la Commission communautaire française et la Région wallonne relatif à la mise en œuvre de la loi du 24 avril 2003 réformant l'adoption (Doc. parl., Chambre, 2005-2006, no 51-2157/1).
(17) Article 5, § 1er, I, 1o, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles.
(18) L'accompagnement médical tel qu'il est conçu dans la proposition ne semble pas être en relation avec les compétences attribuées à l'autorité fédérale à titre d'exception à la compétence des communautés en matière de dispensation des soins dans et en dehors des institutions de soins. Les dispositions de la proposition ne sont, en tout cas, pas formulées en termes de législation organique, de normes d'agrément, etc. Voir l'avis no 32.299/3 du 4 décembre 2001 sur le projet devenu la loi du 22 août 2003 relative aux droits des patients, en ce qui concerne la répartition des pouvoirs entre les communautés et l'autorité fédérale pour la réglementation des institutions de soins (Doc. parl., Chambre, 2001-2002, no 50-1642/1).
(19) Article 5, § 1er, II, 1o, de la loi spéciale précitée du 8 août 1980.
(20) Article 5, § 1er, II, 6o, de la loi spéciale précitée du 8 août 1980.
(21) Article 6 de la proposition.
(22) Voir l'avis 19.826/10 du 18 avril 1990 sur la proposition de loi devenue la loi du 13 août 1990 visant à créer une commission d'évaluation de la loi du 3 avril 1990 relative à l'interruption de grossesse, modifiant les articles 348, 350, 351 et 352 du Code pénal et abrogeant l'article 353 du même Code (Doc. parl., Chambre, 1989-1990, no 1150/2).
(23) Doc. Sénat, 2001-2002, no 695/16.
(24) Note 1 dans l'avis 28.369/10 et note 10 dans l'avis 33.641/3: voir notamment Cour d'arbitrage, 2 février 1995, no 4/95, B.5.6.
(25) Note 3 de l'avis cité: Ce texte est ambigu dès lors qu'il peut être interprété en ce sens que les mots « zoals bedoeld in [het] koninklijk besluit [nr.] 78 van 10 november 1967 betreffende de uitoefening van de gezondheidsberoepen » se rapportent uniquement aux mots « de gezondheidszorgberoepen. »
(26) Il est d'ailleurs recommandé d'insérer également dans la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro, une disposition similaire qui exprime cette réserve de compétence.
(27) Nos 38 à 62.
(28) Avis du 3 octobre 2005, Doc. parl., Chambre, 2003-2004, not. no 51-393/2.
(29) Cass. fr., ass. plén., 31 mai 1991, La Semaine juridique, 1991, Ed. G., no 45, pp. 377 à 385, et les conclusions de M. H. Dontenwille, Premier avocat général, les obs. de F. Terré, spéc. p. 381; J.T., 1991, p. 767, et les obs. de X. Dijon et J.-P. Masson, pp. 768 à 771.
(30) Cass. fr., 13 décembre 1989, La Semaine juridique, 1990, Ed. G., no 26, no 21526, et les obs. d'A. Sériaux.
(31) Plus spécialement, l'article 16-7 du Code civil français dispose: « Toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle ».
(32) Cass. fr., 9 décembre 2003, Rec. Dalloz, 2004, no 28, pp. 1998 à 2002, et la note d'E. Poisson-Drocourt.
(33) Notamment P. Senaeve, « Juridische implicaties van nieuwe ontstaanvormen van menselijk leven », R.W., 1985-1986, col. 626 à 652, spéc. col. 637; M.-Th. Meulders-Klein, « Le droit de l'enfant face au droit à l'enfant et les procréations médicalement assistées », Rev. trim. dr. civ., 1988, pp. 645 et s., spéc. pp. 657 et s.; H. De Page et J.-P. Masson, Traité élémentaire de droit civil belge, T. I, volume II, éd. 4, Bruxelles, 1990, no 967, p. 933; no 971, p. 935; X. Dijon et J.-P. Masson, loc. cit.; A.-Ch. Van Gysel et N. Massager, « Les limites de l'autonomie de la volonté en droit des personnes » in L'ordre public — Limites et applications, Bruxelles, 1995, p. 210; A. Rouvroy, « Quelques questions relatives aux procréations médicalement assistées », J.T., 1997, p. 774; N. Massager, Les droits de l'enfant à naître, Bruxelles, 1997, nos 385 et s.; E. Montero, « L'adoption consécutive à un contrat de mère porteuse », note sous Trib. Jeun. Bruxelles, 4 juin 1996, Rev. dr. santé, 1997-1998, pp. 124 à 128; A. De Wolf, « Draagmoederschap in België en Frankrijk: een stand van zaken », in K. Boele-Woelki et M. Oderkerk (réd.), (On)geoorloofheid van het draagmoederschap in rechtsvergelijkend perspectief, Antwerpen-Groningen, 1999, p. 89; P. Senaeve, Compendium van het Personen- en familierecht, Leuven, 2004, no 491, p. 22; N. Massager, in A.-Ch. Van Gysel (dir.), Précis du droit de la famille, Bruxelles, 2004, p. 446. Voir toutefois G. Verschelden, Afstamming, A.P.R., Malines, 2004, nos 1273 à 1275, pp. 700 à 702; H. Nys, Geneeskunde — Recht en medisch handelen, A.P.R., Malines, 2005, no 483, pp. 221 et 222.
(34) Trib. Jeun. Bruxelles, 4 juin 1996, Rev. dr. santé, 1997-1998, pp. 124 à 128, et les obs. E. Montero; Trib. Jeun. Turnhout, 4 octobre 2000, R.W., 2001-2002, pp. 206 et 207, et la note F. Swennen.
(35) JT, 1991, p. 767.
(36) No 54, plus bas.
(37) Voir, plus bas, le no 37.
(38) Comm. eur. dr. h., 19 mai 1982, H./Norvège, 17.004/90, DR, vol. 73, (155), pp. 181-182, § 1er.
(39) Dans la suite de l'avis: « la Convention européenne des droits de l'homme ».
(40) Ibid., p. 182, § 1er.
(41) Cour eur. dr. h., Vo, précité, § 86.
(42) Ibid., § 85. L'article 2 concerne le droit à la vie.
(43) Comm. eur. dr. h., Brüggemann et Scheuten, no 6959/75, rapport, 12 juillet 1977, DR., 10, p. 123, §§ 59, 60, 61 et 64 (passages cités dans l'arrêt Vo, du 8 juillet 2004, précité).
(44) Voir, plus bas, les nos 63, 152 et 153.
(45) Par souci de simplification, l'on ne se réfèrera pas aux dispositions correspondantes du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
(46) L'article 53 de la Convention européenne des droits de l'homme dispose: « Aucune des dispositions de la présente Convention ne sera interprétée comme limitant ou portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales qui pourraient être reconnus conformément aux lois de toute Partie contractante ou à toute autre Convention à laquelle cette Partie contractante est partie. »
(47) Voir par exemple, la lecture globale faite par la Cour d'arbitrage, d'une part, des articles 19 et 25 de la Constitution et, d'autre part, de l'article 10 de la Convention, en se fondant plus particulièrement sur l'interprétation résultant de la jurisprudence de la Cour européenne (C.A., no 45/96, 12 juillet 1996, B.7.5 et B.7.6; no 102/99, 30 septembre 1999, B.24.2, B.24.4 et B.24.5; no 10/2001, 7 février 2001, B.4.8.1; no 136/2003, 22 octobre 2003, B.6; no 157/2004, 6 octobre 2004, B.41 à B.45).
(48) CA, no 158/2004, 20 octobre 2004, B.5.2; no 162/2004, 20 octobre 2004, B.2.3 et B.2.4; no 202/2004, 21 décembre 2004, B.2.2 et B.2.3; no 16/2005, 19 janvier 2005, B.2.3 et B.2.4. Ces trois derniers arrêts portent sur la lecture conjointe des articles 22 de la Constitution et 8 de la Convention européenne, outre d'ailleurs l'article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.
(49) L'article 22 de la Constitution dispose: « Chacun a droit au respect de sa vie privée et familiale, sauf dans les cas et conditions fixés par la loi. La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent la protection de ce droit. »
(50) Doc. parl., Chambre, 1993-1994, no 997/5, p. 2; voir CA, no 16/2005, 19 janvier 2005, B.2.4; no 50/2003, 1er mars 2005, B.8.
(51) Les articles 10 et 11 de la Constitution garantissent l'égalité et la non-discrimination.
(52) Voir le texte de cette disposition à la note 48.
(53) L'article 22bis de la Constitution dispose: « Chaque enfant a droit au respect de son intégrité morale, physique, psychique et sexuelle. La loi, le décret ou la règle visée à l'article 134 garantissent la protection de ce droit. »
(54) Voir spécialement l'article 2 de cette Convention.
(55) Voir notamment les nos 76 et 103.
(56) Voir l'article 8 de cette proposition.
(57) Voir, plus bas, les nos 119, 120, 127, 131 et 143.
(58) Cour eur. dr. h., not. Sunday Times, 26 novembre 1991, § 58; Hoffmann, 23 mars 1993, § 31; Salgueiro da Silva Mouta, 21 décembre 1999, § 26.
(59) Cour eur. dr. h., Marckx, 13 juin 1979, § 33 (jurisprudence constante; voir, aussi, notamment, l'affaire « linguistique belge », 23 juillet 1968, § 10; Schmidt, 18 juillet 1994, § 24; Van Raalte, 21 février 1997, § 39; Salgueiro da Silva Mouta, 21 décembre 1999, § 29; Petrovic, 27 mars 1998, § 30; Fretté, 26 février 2002, § 34; Karner, 24 juillet 2003, § 37).
(60) Cour eur. dr. h., Thlimmenos, 6 avril 2000, § 44; Fretté, 26 février 2002, § 39.
(61) Voir, notamment, Cour eur. dr. h., Marckx,13 juin 1979, § 31.
(62) Cour eur. dr. h., Schmidt et Dahlström, 6 février 1976, § 39.
(63) Cour eur. dr. h., Abdulaziz e.a., 28 mai 1985, § 71.
(64) Cour eur. dr. h.,Van Raalte, 21 février 1997, § 33; Petrovic, 27 mars 1998, § 22; Fretté, 26 février 2002, § 27.
(65) Cour eur. dr. h., Van der Mussele, 23 novembre 1983, § 43; Inze, 28 octobre 1997, § 36; Petrovic, 27 mars 1998, § 22; Thlimmenos, 6 avril 2000, § 40; Fretté, 26 février 2002, § 31; Karner, 24 juillet 2003, § 32.
(66) Cour eur. dr. h., Gaygusuz, 16 septembre 1996, §§ 36 à 41; P. Lambert, « Vers une évolution de l'interprétation de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ? », Rev. trim. dr. h., 1998, pp. 497 à 505, spéc. pp. 501 à 503; S.-J. Priso Essawe, « Les droits sociaux et l'égalité de traitement dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme », Rev. trim. dr. h., 1998, pp. 721 et s.
(67) X. Delgrange, « Quand la Cour d'arbitrage s'inspire de la Cour de Strasbourg », note sous C.A., 13 octobre 1989, Rev. rég. dr., 1989, pp. 619 et s.; J. Velaers, Van Arbitragehof tot Grondwettelijk Hof, Anvers — Apeldoorn, 1990, no 205, p. 176; L.-P. Suetens, « Gelijkheid en non-discriminatie in de rechtspraak van het Arbitragehof », in Gelijkheid en non-discriminatie (A. Alen et P. Lemmens, éds.), Anvers, 1991, pp. 100 et 101; M. Verdussen, « La Convention européenne des droits de l'homme et le juge constitutionnel », in J. Velu e.a., La mise en œuvre interne de la Convention européenne des droits de l'homme, Bruxelles, 1994, pp. 17 à 62, spéc. p. 54; R. Ergec, « La Cour d'arbitrage et le juge international et européen », in F. Delpérée, A. Rasson-Roland et M. Verdussen (dir.), Regards croisés sur la Cour d'arbitrage, Bruxelles, 1995, pp. 205 à 227, spéc. no 7, p. 209; J.-C. Scholsem, « La Cour d'arbitrage », Rev. dr. U.L.B., 1999, pp. 205 à 237, spéc. p. 215.
(68) Par exemple, C.A., no 85/2003, 11 juin 2003, B.4.
(69) Par exemple, C.A., no 63/2003, 11 juin 2003, B.5; voir aussi C.A., no 159/2004, 20 octobre 2004, B.4.3.
(70) Voir le no 26, plus haut.
(71) Voir, plus bas, les nos 63 à 65.
(72) Ibid.
(73) En ce qui concerne le droit au respect de la vie privée, protégé également par l'article 8 de la Convention, voir plus bas, les nos 52 à 62.
(74) Cour eur. dr. h., Marckx, 13 juin 1979, § 31; Johnston e.a., 18 décembre 1996, § 55; voir aussi l'arrêt Fretté, du 26 février 2002, § 32, et les références citées.
(75) Il s'agit de la décision dans l'affaire Di Lazzaro de la Commission européenne des droits de l'homme du 10 juillet 1997, no 31924/96, D.R., 90-A, p. 134.
(76) Cour eur. dr. h., Fretté, 26 février 2002, § 32.
(77) Ibid., § 42.
(78) Cour eur. dr. h., Marckx, 13 juin 1979, § 31; Johnston e.a., 18 décembre 1996, § 55.
(79) Cour eur. dr. h., Keegan, 26 mai 1994, § 44; Kroon e.a., 27 octobre 1994, § 30; X., Y. et Z. c. Royaume-Uni, 22 avril 1997, § 36; Nylund, 29 juin 1999; Mikulic, 7 février 2002, § 51; en ce sens aussi: Cour eur. dr. h., Marckx, 13 juin 1979, § 31.
(80) § 75.
(81) Cour eur. dr. h., Kroon e.a., 27 octobre 1994, § 40.
(82) Les italiques ne figurent pas dans le texte.
(83) Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999.
(84) Cour eur. dr. h., Keegan, 26 mai 1994, § 44; Kroon e.a., 27 octobre 1994, § 30; Mikulic, 7 février 2002, § 51.
(85) § 36.
(86) Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999. Voir aussi, plus bas, sous le no 61 les considérations similaires qui conduisent la Cour à admettre qu'en l'espèce il existait des justifications à limiter le droit à la vie privée du requérant qui se déduisait de ce que la détermination du régime juridique d'un homme avec son enfant putatif concerne la vie privée.
(87) Voir, notamment, Cour eur. dr. h., Marckx, 13 juin 1979, § 31; Kroon, 27 octobre 1994, § 36; Johnston e.a., 18 décembre 1996, § 55.
(88) Cour eur. dr. h., Marckx, 13 juin 1979, § 31; Johnston e.a., 18 décembre 1996, § 72.
(89) Cour eur. dr. h., Marckx, 13 juin 1979, § 45.
(90) En vertu de l'article 22, in fine, de la Constitution, la notion de « loi » susceptible d'intervenir doit être comprise comme ne pouvant viser un simple arrêté réglementaire mais comme visant nécessairement un acte du pouvoir législatif fédéral (voir notamment les arrêts suivants de la Cour d'arbitrage: no 50/2003, 30 avril 2003, B.8.10; no 51/2003, 30 avril 2003, B.4.12; no 162/2004, 20 octobre 2004, B.5.2; no 16/2005, 19 janvier 2005, B.5.2), même si le législateur peut déléguer certaines compétences au Roi. Cette question ne demande pas plus de développements dans le cadre du présent avis, aucune difficulté particulière ne paraissant se présenter, sous la réserve de l'exposé fait plus haut, sous les nos 19 à 22, quant aux aspects de certaines propositions relevant de la compétence en principe communautaire.
(91) Voir le no 45, plus bas.
(92) Voir en général, au sujet de la filiation en cas de procréation médicalement assistée et en cas de gestation pour autrui, D. Van Grunderbeeck, Beginselen van personen- en familierecht. Een mensenrechtelijke benadering, Anvers, 2003, nos 651 à 666, pp. 474 à 486.
(93) Affaire Evans c. Royaume-Uni, no 6339/05. La requérante invoque une violation de ses propres droits sur base des articles 8 (droit au respect de la vie privée et familiale) et 14 (interdiction de la discrimination) de la Convention; elle invoque également une violation des droits des embryons découlant de l'article 2 (droit à la vie). L'affaire a été plaidée sur la recevabilité et le fond le 27 septembre 2005 (voir communiqué no 494 du Greffier de la Cour de la même date); au moment où le présent avis est donné, il n'y a pas encore de décision ou d'arrêt de la Cour.
(94) Affaire Haller c. Autriche, no 57813/00. L'affaire a été communiquée au gouvernement, pour observations (note d'information du greffe de la Cour européenne des droits de l'homme, no 79, octobre 2005).
(95) Cour eur. dr. h., Keegan, 19 avril 1994, § 44.
(96) Cour eur. dr. h., Pini et csts, 22 juin 2004, § 143. En l'espèce, l'enfant était né alors que la mère avait épousé un autre homme que le père biologique prétendu.
(97) Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999.
(98) Cour eur. dr.h., X c. Royaume-Uni, no 7626/76, déc. 11 juillet 1977, D.R., 19, (160), p. 162, § 2.
(99) Comm. eur. dr. h., M. c. Pays-Bas, no 16944/90, 8 février 1993, D.R., 74, (120), p. 128.
(100) Comm. eur. dr. h., Irlen, no 12246/86, 13 juillet 1987, D.R., 53, p. 225; Cour eur. dr. h., Hoffmann, 23 juin 1993, § 29; Salgueiro da Silva Mouta, 21 décembre 1999, § 22.
(101) Cour eur. dr. h., X., Y. et Z. c. Royaume-Uni, 22 avril 1997, § 44.
(102) C.A., no 134/2003, 8 octobre 2003, B.1.
(103) Ibid., B.6.
(104) Ibid., B.7.
(105) Cour eur. dr. h., X., Y. et Z. c. Royaume-Uni, 22 avril 1997, § 44.
(106) Ibid., § 52.
(107) Voir plus haut, nos 40, 43 et 44.
(108) Voir aussi la décision du 11 juillet 1977 de la Commission européenne des droits de l'homme, X c. Royaume-Uni, mentionnée au no 44.
(109) Cour eur. dr. h., Keegan, 19 avril 1994, § 55.
(110) Comm. eur. dr. h., M. c. Pays-Bas, 8 février 1993, cité plus haut, au no 45.
(111) Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999. Voir toutefois l'arrêt Keegan du 27 octobre 1994 de la Cour européenne des droits de l'homme.
(112) Le paragraphe 1er de cette disposition porte sur le développement physique, mental, spirituel, moral et social de l'enfant.
(113) Article 9, § 1er, de la Convention.
(114) Article 9, § 3, de la Convention.
(115) Voir, plus haut les nos 39, 40, 43, 46 et 47.
(116) Cour eur. dr. h., Marckx et Johnston, précités (voir le no 41); articles 7 et 9 de la Convention relative aux droits de l'enfant (voir le no 51, ci-avant).
(117) Article 7, paragraphe 1.
(118) Article 20, paragraphe 1.
(119) Voir, notamment, Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999.
(120) Cour eur. dr. h., Niemietz, 16 décembre 1992, § 29.
(121) Cour eur. dr. h., Burghartz, 22 février 1994, § 24.
(122) Cour eur. dr. h., Bensaïd, 6 février 2001, § 47.
(123) Aux nos 39 à 48.
(124) Cour eur. dr. h., Mikulic, 7 février 2002, § 47.
(125) La Cour se prononce exactement comme suit: « Le cas d'espèce se distingue des autres affaires de paternité susmentionnées, dans la mesure où aucun lien familial n'a été établi entre la requérante et son père prétendu » (§ 52). Les « affaires susmentionnées » sont celles dans lesquelles la Cour avait admis, compte tenu de ce dernier élément, qu'il y avait eu une vie familiale au sens de l'article 8 de la Convention.
(126) Voir également l'arrêt Gaskin, examiné au no 58. Dans son arrêt Mikulic, la Cour européenne se réfère d'ailleurs à ce dernier arrêt (§ 65).
(127) Cour eur. dr. h., Gaskin, 7 juillet 1989, § 49.
(128) Cour eur. dr. h., Odièvre, 13 février 2003, § 42. La Cour y renvoie à ses arrêts Mikulic et Gaskin précités.
(129) Ibid., § 43.
(130) Ibid., § 44.
(131) Ibid., § 45.
(132) Ibid., §§ 46 et 47.
(133) Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999.
(134) Cour eur. dr. h., Odièvre, 13 février 2003, § 28, in fine (les italiques ne figurent pas dans le texte).
(135) Voir, plus haut, le no 43.
(136) Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999.
(137) Cour eur. dr. h., Kroon e.a., 27 octobre 1994; voir plus haut le no 40.
(138) Cour eur. dr. h., Nylund, 29 juin 1999.
(139) Ibid.
(140) Ibid.
(141) Au no 48, plus haut.
(142) L'intitul‰ exact de cette Convention est le suivant: « Convention pour la protection des droits de l'homme et de la dignit‰ de l'Štre humain € l'‰gard des applications de la biologie et de la m‰decine », en abr‰g‰ « Convention sur les droits de l'homme et la biom‰decine ». Elle a ‰t‰ sign‰e € Oviedo le 4 avril 1997.
(143) Voir l'avis 33.641/3 du 18 septembre 2002 sur la proposition devenue la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro, spécialement le no 7 de cet avis et les références qu'il mentionne (doc. Sénat, 2001-2002, no 2-695/16, p. 6).
(144) Note 3 de l'avis: Voir les dispositions de la convention concernant le génome humain, notamment les articles 12 et 13.
(145) Note 4 de l'avis: Rapport fait au nom de la Commission spéciale, version provisoire, pp. 211-214 (amendements à l'article 13).
(146) Note 5 de l'avis: Au sein de la Commission spéciale, il a été observé « que la sanction la plus grave pour un chercheur est l'arrêt de sa recherche » (rapport fait au nom de la Commission spéciale, version provisoire, p. 211, lors de l'examen des amendements nos 99, 139, 140 et 141 sur l'article 13).
(147) Avis 33.641/3, précité, pp. 4 à 6.
(148) On a rappelé plus haut, sous le no 39, que, selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, le droit au respect de la vie familiale ne protège pas le simple désir de fonder une famille.
(149) Les développements mêmes des propositions de loi, en ce compris de celles qui autorisent de manière conditionnelle la gestation pour autrui, comprennent des considérations qui en fournissent l'illustration.
(150) Ibid.
(151) Il a été fait mention au no 26, plus haut, d'une décision publiée d'un tribunal de la jeunesse qui peut être interprétée comme ayant décidé qu'une convention de gestation pour autrui n'était pas contraire à l'ordre public: il s'agit du jugement du 4 octobre 2000 du Tribunal de la jeunesse de Turnhout. Même si ce jugement se réfère, pour asseoir sa conclusion, à un arrêt de la Cour d'appel de Paris cassé ultérieurement par l'assemblée plénière de la Cour de cassation de France et que la doctrine se prononce de manière très générale dans le sens de l'illicéité du recours à pareils procédés (ibid.), il n'est pas impossible que d'autres décisions judiciaires puissent se prononcer, en l'absence de texte exprès, dans le même sens.
(152) On a vu plus haut, toujours au no 26, que c'est indépendamment de toute appréciation sur la validité juridique de pareille convention que, par un jugement du 4 juin 1996, le Tribunal de la jeunesse de Bruxelles avait homologué une adoption conclue dans de telles conditions. Le jugement du Tribunal de la jeunesse de Turnhout du 4 octobre 2000, également cité sous le no 26, peut d'ailleurs être interprété en ce sens, comme il y a été exposé.
(153) N'étant pas saisie d'un texte en ce sens, la section de législation du Conseil d'État ne se prononce toutefois pas sur les limites de l'admissibilité de pareille législation, compte tenu des intérêts de l'enfant concerné, cette question devant faire l'objet d'un examen approfondi.
(154) Voir le no 37.
(155) Voir, plus haut, les nos 48 et 62.
(156) Voir, plus haut, les nos 39 à 41, et la jurisprudence citée.
(157) Voir, plus haut, les nos 43 et 44, et les arrêts et décisions cités: l'arrêt Keegan, du 19 avril 1994, et la décision Nylund du 29 juin 1999, de la Cour européenne des droits de l'homme, et la décision X. c. Royaume-Uni, du 11 juillet 1977, de la Commission européenne des droits de l'homme.
(158) Voir, plus haut, le no 45 et la décision M. c. Pays-Bas citée du 8 février 1993 de la Commission européenne des droits de l'homme.
(159) Voir, plus haut, le no 40 et la décision Nylund, du 29 juin 1999. Voir toutefois l'arrêt Keegan, du 19 avril 1994.
(160) Voir, plus haut, le no 43 et l'arrêt Pini et csts de la Cour européenne des droits de l'homme.
(161) Cour eur. dr. h., Vo, 8 juillet 2004 (voir le no 28).
(162) Voir, plus haut, les nos 57 à 59, et les arrêts Gaskin, du 7 juillet 1989, Mikulic, du 7 février 2002, et Odièvre, du 13 février 2003, de la Cour européenne des droits de l'homme. Voir aussi le no 61 et la décision Nylund, du 29 juin 1999, de la Cour.
(163) Voir, plus haut, le no 61, et la décision Nylund, du 29 juin 1999, de la Cour européenne des droits de l'homme.
(164) Voir, plus haut, le no 46 et l'arrêt no 134/2003, du 8 octobre 2003, de la Cour d'arbitrage; voir aussi, plus haut, le no 47.
(165) Voir, plus haut, le no 59 et l'arrêt Odièvre, du 13 février 2003, de la Cour européenne des droits de l'homme.
(166) Voir les arrêts Gaskin et Odièvre de la Cour européenne des droits de l'homme (nos 58 et 59, plus haut).
(167) Si tel n'était pas le cas, ce serait le droit commun en matière judiciaire qui s'appliquerait.
(168) Voir l'avis no 27 du Comité consultatif de bioéthique, p. 45.
(169) Par exemple par des modifications apportées au texte d'un article ou l'insertion d'alinéas ou de paragraphes particuliers.
(170) Par exemple par l'insertion d'articles bis, ter, etc.
(171) Voir le commentaire de l'article 9, page 7 de la proposition.
(172) Voir plus haut, les nos 34 et 35, sur la portée des principes d'égalité et de non-discrimination et sur les critères admissibles de différenciation éventuelle.
(173) Il est renvoyé aux nos 23 à 25 pour un exposé sommaire des situations susceptibles de se présenter. Il va de soi que toutes ces situations ne peuvent être considérées comme comparables; elles ne sont pas nécessairement toutes visées par l'observation qui est ici formulée.
(174) Cette identification, comme les autres éléments de la justification qu'il y aurait lieu d'apporter au regard des principes d'égalité et de non-discrimination, se fait bien entendu sous l'éventuel contrôle de la Cour d'arbitrage pour le cas où elle devait être saisie.
(175) Voir, notamment, Cour eur. dr. h., Keegan, 19 avril 1994, § 44.
(176) Voir le relevé de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme fait sous les nos 40 à 48, plus haut.
(177) On peut rappeler d'ailleurs que le Comité ad hoc d'experts du Conseil de l'Europe sur les progrès de la science biomédicale (CAHBI), après avoir recommandé: « 2. Aucun contrat ou accord entre une mère de substitution et la personne ou le couple pour le compte de laquelle ou duquel un enfant est porté ne pourra être invoqué en droit », a estimé: « 4. Toutefois, les États peuvent, dans des cas exceptionnels, fixés par leur droit national, prévoir sans faire exception au paragraphe 2 du présent principe qu'un médecin ou un établissement pourra procéder à la fécondation d'une mère de substitution en utilisant des techniques de procréation artificielle, à condition: [...] b. que la mère de substitution puisse à la naissance choisir de garder l'enfant » (voir le rapport, rédigé entre 1985 et 1987, sur la procréation artificielle humaine du CAHBI, principe 15, paragraphes 2 et 4, cité et pris à son compte par le Livre Blanc du 15 janvier 2002 « sur les principes relatifs à l'établissement et aux conséquences juridiques du lien de filiation », rédigé par le Comité d'experts sur le droit de la famille (CJ-FA) du Conseil de l'Europe, no 13). Ce texte n'a cependant aucune valeur juridique et a été établi dans une perspective de départ, rappelée ci-avant, qui, au contraire de trois des propositions à l'examen, écarte toute validation juridique d'un contrat ayant pour objet la gestation pour autrui.
(178) Voir, plus bas, un exposé plus général, au no 107, sur les difficultés qui se posent lorsque l'une des parties à la convention tendant à la gestation pour autrui souhaite y mettre fin.
(179) Voir toutefois, sur ces questions, l'incidence éventuelle de l'article 387bis du Code civil.
(180) Voir le no 104, plus bas.
(181) Nos 57 à 60.
(182) Ibid.
(183) Voir les nos 59 et 60, plus haut. Voir aussi, plus haut, sous le no 57, l'arrêt Mikulic de la Cour.
(184) Voir, plus haut, le no 58.
(185) Voir plus haut, le no 61.
(186) C'est ce que laisse entendre également le commentaire de l'article 4 de la proposition.
(187) Article 4, § 1er, de la proposition.
(188) Article 2, 3o et 4o, de la proposition.
(189) Il est fait écho à ce texte à l'article 2, 6o, de la proposition. Ces deux dispositions textes prévoient que le sperme seul peut émaner d'un parent demandeur mais cela ne signifie pas, compte tenu de l'article 4, § 1er, de la proposition, qu'un homme seul puisse demander à une femme de porter un enfant pour lui. Pour le recours à une mère porteuse non génétique (« maternité de substitution de haute technologie » selon l'article 2, 5o, de la proposition), la mention selon laquelle le sperme seul peut émaner d'un parent demandeur signifie que l'ovule est dans ce cas fourni par une femme tierce, qui n'est ni la commanditaire visée à l'article 4, § 1er, ni la mère porteuse.
(190) Articles 2, 7o, 4, § 4, alinéa 1er, premier et troisième tirets, § 5, et 6 de la proposition.
(191) Article 2, deuxième tiret.
(192) Article 8 de la proposition, spécialement son alinéa 4; voir aussi l'article 14, alinéa 4, de la proposition.
(193) Article 313, § 1er, a), du Code civil.
(194) Article 2, premier et deuxième tirets, de la proposition.
(195) Article 343, § 1er, b), du Code civil.
(196) Voir toutefois l'observation faite sous le no 120.
(197) Page 4 des développements de la proposition.
(198) Voir toutefois l'observation faite sous le no 134, à lire en combinaison avec celle faite sous le no 120.
(199) Note no 297 de l'avis: Voir les articles 353-14, alinéa 3, et 353-15, première phrase, portant respectivement sur les obligations alimentaires entre l'adopté et ses parents d'origine et sur les droits héréditaires de l'adopté et de ses descendants dans leur famille d'origine.
(200) Note no 298 de l'avis: article 356-1, alinéa 2, du Code civil (« [...] [L]'enfant qui fait l'objet d'une adoption plénière cesse d'appartenir à sa famille d'origine »), sous la réserve du maintien des empêchements à mariage (même disposition) et de l'hypothèse où l'enfant est adopté par le conjoint ou le cohabitant de son parent ou de son parent adoptif (article 356-1, alinéa 3, du Code civil).
(201) Note no 299 de l'avis: articles 353-8, 353-9 et 356-1, alinéa 1er, du Code civil.
(202) Note no 300 de l'avis: Articles 353-14 et 356-1, alinéa 1er, du Code civil.
(203) Avis 38.817/AG du 20 septembre 2005, Doc. parl., Chambre, 2004-2005, no 51-393/2, pp. 67 à 68.
(204) Doc. Sénat, 2005-2006, no 1460/1.
(205) Voir notamment les articles 346-1 et 346-2 du Code civil.
(206) En ce sens également, l'avis précité portant les nos 38.817/AG et suivants, donné sur des propositions de loi et des amendements relatifs à l'adoption monosexuée et la beau-parenté no 64.
(207) En ce sens notamment, l'arrêt Keegan du 26 mai 1994, § 55 (voir le no 47, in fine).
(208) Voir les considérations introductives au présent avis, sous le no 2.
(209) Voir aussi, plus haut, sous le no 87.
(210) Ibid.
(211) Cette exclusion du père ne viole pas, selon la Cour d'arbitrage, les articles 10 et 11 de la Constitution (C.A., no 39/91, 19 décembre 1991).
(212) Page 5, alinéa 4.
(213) Article 2, quatrième tiret, de la proposition.
(214) Voir les nos 97, 98 et 100 à 102. Il est renvoyé aussi aux nos 23 à 25.
(215) Il devrait s'agir plutôt, semble-t-il, d'un 4o nouveau de l'article 57 du Code civil, sauf à revoir entièrement la rédaction de l'alinéa pour y placer un verbe principal et mieux exprimer que la disposition en projet déroge au 2o actuel de l'article 57, ce qui paraît en toute hypothèse souhaitable.
(216) Sur ces questions, voir le no 97, plus haut.
(217) Voir aussi l'article 4, § 2, C, premier tiret, de la proposition.
(218) Articles 354-1 à 354-3 du Code civil.
(219) Dans ces dispositions, les expressions « mère qui a élevé l'enfant comme le sien » et « s'il a élevé l'enfant comme le sien » sont en outre ambiguës, en ce qu'elles ne permettent pas de distinguer cette situation de celle de la « possession d'état ».
(220) Article 203, § 1er, alinéa 1er, et titre IX du livre Ier du Code civil.
(221) Le commentaire de la disposition précise que le médecin devrait être un gynécologue, ce que le dispositif ne confirme pas.
(222) Voir le no 120.
(223) Voir le no 97, plus haut.
(224) Voir l'article 9 de la proposition.
(225) Voir l'observation suivante; voir aussi, plus haut, le no 104.
(226) Voir également, p. 7, le commentaire de l'article 9.
(227) Dans le présent avis, la notion de « mère porteuse » a été utilisée de manière à viser l'ensemble des hypothèses mais elle pourrait également l'être dans un sens restreint.
(228) Voir plus haut, sous le no 4, la précision relative à la convention de vocabulaire utilisée dans le présent avis.
(229) Voir, plus haut, le no 64.
(230) Article 5 de la loi.
(231) Article 6 de la loi.
(232) Article 7 de la loi.
(233) Article 8 de la loi.
(234) Article 9 de la loi.
(235) Article 10 de la loi.
(236) Articles 12 à 15 de la loi.
(237) Article 4 de la loi.
(238) Articles 5 et 6 de la loi.
(239) Voir notamment les articles 20, alinéa 2, 23, alinéa 3, 24, 48 et 53.
(240) Articles 73 et 74 de la proposition.
(241) Voir notamment l'avis 22.537/2 du 21 novembre 1994 sur un projet de loi modifiant la loi du 25 ventôse — 5 germinal an XI (16 mars 1803) contenant organisation du notariat, pp. 2-15 (F) et 95-110 (N). Cet avis n'a pas été publié dans les documents parlementaires.
(242) Voir l'avis 24.600/AV/2 — 24.601/AV/2 du 6 novembre 1995 sur 1o un projet de loi modifiant la loi du 25 Ventôse an XI contenant organisation du notariat, 2o un projet de loi accordant une compétence disciplinaire aux chambres des notaires et à la Chambre nationale des notaires, pp. 29-32 (F) et 64-68 (N). Cet avis n'a pas été publié dans les documents parlementaires.
(243) Voir l'article 4 de la loi du 11 mai 2003 relative à la recherche sur les embryons in vitro.
(244) Page 46.
(245) Voir aussi l'observation figurant sous le no 80, plus haut.
(246) Avis 31.441/AG du 20 juin 2001 (doc. Sénat, 1999-2000, no 2-244/21, pp. 15-16, no 19).