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16 DÉCEMBRE 2005
INTRODUCTION
Le présent projet de loi tend à l'assentiment du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996 et du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996.
L'exposé des motifs reprend dans une large mesure le commentaire fait par le bureau international de l'OMPI, des deux traités de l'OMPI, intitulé « The advantages of adherence to the wipo copyright treaty (WCT) and the WIPO Performances and Phonograms Treaty (WPPT) » et qui se trouve sur le site Internet: http://www.wipo.int/copyright/en/activities/wct_wppt/pdf/wct_wppt.pdf).
Il est toutefois fait référence à différents endroits aux dispositions pertinentes des règlementations européenne et belge. Il s'agit en particulier, d'une part, de la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonistation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, laquelle traduit en droit européen les deux traités de l'OMPI, et, d'autre part, la loi du 22 mai 2005 transposant en droit belge la Directive européenne 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information (Moniteur belge du 27 mai 2005, p. 24997), ci-après denommée loi du 22 mai 2005 transposant en droit belge la Directive 2001/29/CE. Dans un objectif de clarté, il a été décidé de procéder à un commentaire séparé des articles du WCT et de ceux du WPPT.
I. TRAITÉ DE L'ORGANISATION MONDIALE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE SUR LE DROIT D'AUTEUR (WCT)
Depuis son adoption en 1886, la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques (dénommée ci-après Convention de Berne) a été révisée à intervalles réguliers jusqu'aux deux révisions jumelles (« twin revisions ») qui ont eu lieu à Stockholm en 1967 et à Paris en 1971. Ces révisions ont été dites jumelles, au motif que les dispositions substantielles de l'Acte de Stockholm ne sont pas entrées en vigueur mais ont été incorporées (à l'exception du protocole de cet Acte). Seule l'Annexe à l'Acte de Paris concernant les licences obligatoires dans les pays en voie de développement comportait de nouvelles modifications substantielles.
Les conférences de révision avaient, en général, pour objectif de trouver des réponses aux nouveaux développements technologiques (tels que la technologie d'enregistrement du son, la photographie, la radio, la cinématographie et la télévision).
Dans les années 70 et 80, de nombreuses avancées technologiques ont vu le jour (reprographie, vidéo-technologie, systèmes de cassettes compactes facilitant le « home taping » (reproduction de cassettes à la maison), radiodiffusion par satellite, télévision par le câble, importance croissante de programmes d'ordinateur, œuvres générées par ordinateur et bases de données électroniques, etc.).
Pendant un certain temps, la communauté internationale du droit d'auteur a préféré suivre une stratégie basée sur des principes directeurs plutôt que d'essayer d'établir de nouvelles normes internationales.
Les recommandations, dispositions types et principes directeurs qui ont été élaborés par les différents organes de l'OMPI ont servi de lignes directrices à l'attention des gouvernements quant à la manière de répondre aux défis posés par les nouvelles technologies. Ces différentes instructions se basaient, en général, sur l'interprétation des normes internationales existantes et plus particulièrement, de la Convention de Berne (par exemple, en ce qui concerne les programmes d'ordinateur, les bases de données, le « home-taping », la radiodiffusion par satellite, la télévision par le câble), mais elles comportaient également quelques nouvelles normes (relatives notamment à la distribution et à la location d'exemplaires d'œuvres).
Les lignes directrices ainsi proposées ont eu un impact considérable sur les législations nationales, contribuant de la sorte au développement du droit d'auteur dans le monde entier.
À la fin des années 80, il est néanmoins apparu que ces principes directeurs ne pourraient suffire à eux seuls; de nouvelles normes internationales contraignantes étaient devenues indispensables. La préparation de celles-ci a débuté au sein de deux forums: celui du GATT dans le cadre des négociations de l'Uruguay Round et celui de l'OMPI au sein de comités d'experts.
L'adoption de l'Accord sur les aspects du droit de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) a donné lieu à l'émergence d'une situation nouvelle. Cet accord contenait certains acquis de la période des principes directeurs, mais ne répondait pas à tous les défis posés par les nouvelles technologies. Bien que l'Accord TRIPS a un champ d'application couvrant diverses questions soulevées par l'explosion de l'utilisation de la technologie numérique, spécialement Internet, cet accord ne traitait pas vraiment de certains autres problèmes.
Les travaux préparatoires visant à élaborer de nouvelles normes en matière de droit d'auteur et de droits voisins menés au sein des comités de l'OMPI ont été activés pour cette raison. Cela a eu pour conséquence, la convocation relativement rapide d'une Conférence diplomatique ad hoc de l'OMPI à Genève, du 2 au 20 décembre 1996. Lors de celle-ci, deux traités ont été adoptés: le Traité de l'OMPI sur le droit d'auteur (WTC) et le traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT).
Article 1er
La 1ère phrase de l'article 1er du WCT énonce que « le présent traité constitue un arrangement particulier au sens de l'article 20 de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, en ce qui concerne les Parties contractantes qui sont des pays membres de l'Union instituée par cette convention ». L'article 20 de la Convention de Berne dispose que « les Gouvernements des pays de l'Union se réservent le droit de prendre entre eux des arrangements particuliers, en tant que ces arrangements conféreraient aux auteurs des droits plus étendus que ceux accordés par la Convention, ou qu'ils renfermeraient d'autres stipulations non contraires à la présente Convention. Les dispositions des arrangements existants qui répondent aux conditions précitées restent applicables ». La disposition de l'article 1er, alinéa 1er du WCT a une importance particulière pour l'interprétation de ce traité. Elle précise qu'aucune interprétation du WCT résultant en un abaissement du niveau de protection offert par la Convention de Berne n'est acceptable.
L'article 1er, alinéa 4 du Traité offre une autre garantie quant au plus grand respect possible de la Convention de Berne en faisant référence à toutes les dispositions substantielles de cette Convention et prévoit que « les Parties contractantes doivent se conformer aux articles 1er à 21 et à l'annexe de la Convention de Berne ». Selon l'article 1er, alinéa 3 du Traité, il faut entendre par les termes « Convention de Berne » l'Acte de Paris de 1971 de cette Convention.
L'article 1er, alinéas 3 et 4, doit être considéré à la lumière des dispositions de l'article 17 du Traité: outre les signataires de l'Acte de Paris de 1971 et les signataires de chaque Acte de la Convention de Berne en général, tous les États membres de l'OMPI, qu'ils soient ou non parties contractantes, peuvent devenir parties au Traité, de même que certaines organisations intergouvernementales.
L'article 1er, alinéa 2 du Traité comporte une disposition de sauvegarde de nature identique à celle de l'article 2, 2 de l'Accord sur les ADPIC: « Aucune disposition du présent traité n'emporte dérogation aux obligations qu'ont les Parties contractantes les unes à l'égard des autres en vertu de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques ». La portée de cette disposition de sauvegarde du WCT diffère cependant de celle de la disposition semblable de l'accordTRIPS. Cette disposition de sauvegarde prévue par l'article 1er, alinéa 2, du WCT renvoie également à l'article 6bis de la Convention de Berne qui a trait aux droits moraux, alors que l'Accord sur les ADPIC n'y fait aucune référence.
L'article 1er, alinéa 2 du WCT a surtout de l'intérêt par rapport aux articles 22 à 38 de la Convention de Berne (dispositions administratives et finales), auxquels ni le WCT, ni l'Accord sur les ADPIC ne renvoient.
La deuxième phrase de l'article 1er, alinéa 1 du WCT traite du lien entre le WCT et des traités autres que la Convention de Berne. Elle dit en substance qu' « il n'a aucun lien avec d'autres traités que la Convention de Berne et s'applique sans préjudice des droits et obligations découlant de tout autre traité ». L'Accord sur les ADPIC ainsi que la Convention universelle sur le droit d'auteur sont des exemples de ces « autres » traités.
Il est à noter qu'il n'existe pas non plus de lien spécifique entre le WCT et le WPPT, ce dernier étant également l'un des « autres » traités visés dans la seconde phrase de l'article 1er, alinéa 1er du WCT. Il convient d'indiquer qu'il n'y a pas davantage de lien entre le WCT et le WPPT qui soit similaire à celui existant entre la Convention de Berne et la Convention de Rome. D'après l'article 24, alinéa 2, de la Convention de Rome, seuls les pays signataires de la Convention universelle sur le droit d'auteur ou de la Convention de Berne peuvent adhérer à cette convention. En principe, tout État membre de l'OMPI peut devenir partie au WPPT, sans obligation d'adhérer au WCT (ou à la Convention de Berne ou encore à la Convention universelle sur le droit d'auteur).
Article 2
Cette disposition indique clairement que le Traité utilise le même concept d'œuvres littéraires et artistiques que la Convention de Berne.
Le Traité inclut, à cet égard, quelques précisions de même nature que celles insérées dans l'Accord sur les ADPIC.
Tout d'abord, l'article 2 du Traité spécifie que « la protection au titre du droit d'auteur s'étend aux expressions et non aux idées, procédures, méthodes de fonctionnement ou concepts mathématiques en tant que tels ». Ceci correspond, en fait, à l'éclaircissement donné à l'article 9, 2 de l'Accord sur les ADPIC. Le principe énoncé à l'article 2 correspond à ce qui est prévu dans le contexte de la Convention de Berne. Ainsi qu'il ressort des rapports des Conférences diplomatiques qui ont approuvé et adapté la Convention de Berne, les pays parties à cette Convention ont toujours conçu l'étendue de la protection offerte dans ce sens.
Article 3
L'article 3 règle les questions relatives aux conditions à remplir pour bénéficier de la protection, au pays d'origine, au traitement national, à la protection sans formalités, à la limitation éventuelle de la protection (« Backdoor ») ainsi qu'à la protection des œuvres des ressortissants de certains pays qui ne sont pas parties au Traité.
Le WCT règle les questions précitées de manière simple: il prévoit, en son article 3, une application mutatis mutandis des articles 3 à 6 de la Convention de Berne.
L'application mutatis mutandis de ces dispositions peut donner lieu à un certain nombre de problèmes. C'est pourquoi la Conférence diplomatique a adopté la déclaration commune suivante: « Il est entendu qu'aux fins de l'article 3 du présent traité, l'expression « pays de l'Union » qui figure dans les articles 2 à 6 de la Convention de Berne désigne une Partie contractante du présent traité, pour ce qui est d'appliquer ces articles de la Convention de Berne à la protection prévue dans le présent traité. Il est aussi entendu que l'expression « pays étranger à l'Union » qui figure dans ces articles de la Convention de Berne désigne, dans les mêmes circonstances, un pays qui n'est pas Partie contractante du présent traité, et que les mots « la présente Convention » qui figurent à l'article 2, 8), à l'article 2bis, 2), et aux articles 3, 4 et 5 de la Convention de Berne désignent la Convention de Berne et le présent traité. Enfin, il est entendu que, dans les articles 3 à 6 de la convention, les mots « ressortissant à l'un des pays de l'Union » désignent, lorsque ces articles sont appliqués au présent traité, en ce qui concerne une organisation intergouvernementale qui est Partie contractante du présent traité, un ressortissant d'un des pays qui est membre de cette organisation ».
En ce qui concerne l'objet et le champ d'application de la protection des programmes d'ordinateur et des bases de données, l'article 3 du Traité prescrit, par ailleurs, une application mutatis mutandis des articles 2 et 2bis de la Convention de Berne. Lors de la Conférence diplomatique, il y a eu quelque hésitation quant à la réelle nécessité de faire référence à ces articles, vu que l'article 1er, alinéa 4 du Traité oblige déjà les Parties contractantes à respecter les articles 1er à 21 de la Convention de Berne et par là même, les articles 2 et 2bis de la Convention. Certaines délégations ont toutefois estimé que les articles 2 et 2bis de la Convention de Berne étaient de nature similaire aux articles 3 à 6 du Traité au sens où ils régissent un aspect déterminé du champ d'application du Traité, c'est-à-dire l'étendue de la matière couverte.
Article 4
L'article 4 du Traité fournit des précisions concernant la protection des programmes d'ordinateur en tant qu'œuvres littéraires. Ces éclaircissements sont similaires à ceux contenus dans l'article 10 de l'Accord sur les ADPIC. C'est ce que souligne la Déclaration commune relative à l'article 4 qui a été adoptée par la Conférence diplomatique. Selon cette Déclaration, l'étendue de la protection des programmes d'ordinateur au titre de l'article 4 du Traité est compatible avec l'article 2 de la Convention de Berne de même qu'avec les dispositions pertinentes de l'Accord sur les ADPIC.
La seule vraie différence entre l'article 4 du WCT, d'une part, et l'article 10 de l'Accord sur les ADPIC, d'autre part, réside dans l'usage de termes plus généraux pour les dispositions du WCT. L'article 10, 1 de l'Accord sur les ADPIC prévoit la protection des programmes d'ordinateur, qu'ils soient « exprimés en code source ou en code objet », tandis que l'article 4 du WCT parle de la même protection pour les programmes d'ordinateur « quel qu'en soit le mode ou la forme d'expression ». Il est entendu que l'étendue de la protection est identique pour les deux dispositions, le texte du WCT étant néanmoins moins spécifique d'un point de vue technologique.
Cette disposition est mise en œuvre au niveau européen par la directive 91/250/CEE du Conseil du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur, notamment son article 1er.
En ce qui concerne la Belgique, l'article 1er de la loi du 30 juin 1994 transposant en droit belge la directive européenne du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur prévoit ce qui suit: « Conformément à la directive 91/250/CEE du Conseil du 14 mai 1991 concernant la protection juridique des programmes d'ordinateur, les programmes d'ordinateur, en ce compris le matériel de conception préparatoire, sont protégés par le droit d'auteur et assimilés aux œuvres littéraires au sens de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques. » Il ressort de cette disposition que la législation belge est déjà conforme, sur le fond, à l'article 4 du WCT.
Article 5
L'article 5 du Traité fournit des précisions concernant la protection des bases de données. Ces éclaircissements sont similaires à ceux contenus dans l'article 10 de l'Accord sur les ADPIC. C'est ce que souligne la Déclaration commune relative à l'article 5 qui a été adoptée par la Conférence diplomatique. Selon cette Déclaration, l'étendue de la protection des compilations de données (bases de données) au titre de l'article 5 est compatible avec l'article 2 de la Convention de Berne de même qu'avec les dispositions pertinentes de l'Accord sur les ADPIC.
La seule réelle différence entre l'article 5 du WCT et l'article 10 de l'Accord sur les ADPIC réside dans l'usage de termes plus généraux pour les dispositions du WCT. L'article 10, 2 de l'Accord sur les ADPIC parle de « compilations de données ou d'autres éléments, qu'elles soient reproduites sur support exploitable par machine ou sous toute autre forme », alors que l'article 5 du WCT fait référence en général aux « compilations de données ou d'autres éléments, sous quelque forme que ce soit ».
Au niveau européen, cette disposition est mise en œuvre par la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données, et plus précisément, son article 3.
Au niveau belge, l'article 20bis, alinéas 1er et 2, de la loi relative au droit d'auteur énonce ce qui suit:
« Les bases de données qui, par le choix ou la disposition des matières, constituent une création intellectuelle propre à leur auteur sont protégées comme telle par le droit d'auteur ».
« La protection des bases de données par le droit d'auteur ne s'étend pas aux œuvres, aux données ou éléments eux-mêmes et est sans préjudice de tout droit existant sur les œuvres, les données ou autres éléments contenus dans la base de données ».
Il ressort de cette disposition que la législation belge est, sur le plan du contenu, déjà conforme à l'article 5 du WCT.
Article 6
L'article 6, alinéa 1er, du WCT concerne le droit exclusif de distribution:le droit exclusif d'autoriser la mise à la disposition du public de l'original et d'exemplaires d'œuvres par la vente ou tout autre transfert de propriété. La Convention de Berne ne confère un tel droit que pour les œuvres cinématographiques. Certains experts sont d'avis qu'un tel droit, survivant au moins jusqu'à la première vente d'exemplaires, peut être considéré comme le corollaire indispensable du droit de reproduction. En fait, certains systèmes juridiques, parmi lesquels le système belge, reconnaissent le droit de distribution sur cette base. D'autres experts, en revanche, partagent un point de vue différent. De nombreuses législations nationales n'optent pas pour la reconnaissance implicite du droit de distribution.
L'article 6, alinéa 1er du WCT devrait être perçu, pour le moins, comme une clarification utile des obligations imposées par la Convention de Berne (et également au titre de l'Accord sur les ADPIC, qui renvoie aux dispositions pertinentes de la Convention). Il semble cependant plus indiqué de concevoir que l'article 6, alinéa 1er comporte un élément « Berne-plus-TRIPS-plus ».
S'agissant de l'Europe, l'article 6 du WCT est mis en œuvre par la directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, notamment son article 4,1.
En Belgique, le droit de distribution est traditionnellement considéré comme un élément du droit de reproduction. Toutefois, la loi du 22 mai 2005 transposant la directive 2001/29/CE opte pour l'inclusion explicite du droit de distribution pour les auteurs dans la loi relative au droit d'auteur. Quant aux bénéficiaires des droits voisins, la loi précitée prévoit depuis quelque temps déjà une reconnaissance explicite du droit de distribution, notamment aux articles 35, 39 et 44.
La Conférence diplomatique a adopté la Déclaration commune suivante à propos des articles 6 et 7 du Traité: « Aux fins de ces articles, les expressions « exemplaires » et « original et exemplaires », dans le contexte du droit de distribution et du droit de location prévus par ces articles, désignent exclusivement les exemplaires fixés qui peuvent être mis en circulation en tant qu'objets tangibles ».
La question peut se poser de savoir si cette Déclaration commune est en contradiction avec la solution parapluie adoptée pour les transmissions dans le cadre des réseaux numériques interactifs, visée à l'article 8 du WCT.
La « solution parapluie » implique, en effet, que les États contractants peuvent également avoir recours au droit de distribution (outre le droit de communication au public) pour mettre en œuvre le droit exclusif de l'auteur d'autoriser la mise à disposition du public de ses œuvres de manière à ce que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit (on peut penser à cet égard aux formes d'exploitation dans le contexte d'Internet). On peut dès lors se demander si la Déclaration commune exclut ou non l'application du droit de distribution pour de telles transmissions. En d'autres termes, la question est de savoir si la Déclaration commune, selon laquelle le droit de distribution porte sur les exemplaires tangibles, pourrait mener à ce qu'un État contractant ne puisse plus opter pour le droit de distribution en tant qu'instrument de mise en œuvre du droit visé à l'article 8 du WCT.
La réponse est de toute évidence négative. La Déclaration commune définit seulement le champ d'application minimal du droit de distribution et n'empêche pas les Parties contractantes d'aller au-delà de ce minimum.
L'article 6, alinéa 2 du Traité porte sur l'épuisement du droit de distribution. Il n'oblige pas les Parties contractantes à opter pour l'épuisement national/régional ou international — ni à régler le problème de l'épuisement — du droit de distribution après la première vente ou autre opération de transfert de propriété de l'original ou d'un exemplaire de l'œuvre (effectuée avec l'autorisation de l'auteur).
Il est à noter, dans un souci d'exhaustivité, que la question de l'épuisement en ce qui concerne les auteurs est réglée, dans le cadre européen, par l'article 4, 2, de la directive 2001/29/CE (doc Chambre, 2003-2004, 1137/1), qui prévoit un épuisement communautaire.
La loi belge du 22 mai 2005 transposant la directive 2001/29/CE choisit, quant à lui, de faire explicitement mention du principe de l'épuisement communautaire pour les auteurs, à l'article 1er de la loi relative au droit d'auteur. Pour les bénéficiaires des droits voisins, la loi prévoit également de manière expresse le principe de l'épuisement communautaire, plus précisément aux articles 35 (artistes exécutants), 39 (producteurs de phonogrammes et de premières fixations de films) et 44 (organismes de radiodiffusion) de cette même loi.
Article 7
L'article 7 du Traité prévoit le droit exclusif d'autoriser la location commerciale au public de certaines catégories d'œuvres originales ou d'exemplaires de ces œuvres, à savoir des programmes d'ordinateur, des œuvres cinématographiques et des œuvres incorporées dans des phonogrammes, telles que définies dans les législations nationales des Parties contractantes et telles que visées aux articles 11 et 14, 4 de l'Accord sur les ADPIC. Il prévoit, en outre, les mêmes exceptions que les articles 11 et 14, 4, de l'Accord sur les ADPIC. Il s'agit plus précisément des exceptions relatives aux programmes d'ordinateur lorsque ces derniers ne constituent pas l'objet essentiel de la location et aux œuvres cinématographiques, à moins que la location commerciale n'ait mené à la réalisation à grande échelle d'exemplaires de ces œuvres, ce qui représente une atteinte substantielle au droit exclusif de reproduction. En outre il est prévu que dans le cas où une Partie contractante appliquait, au 15 avril 1994, un système de rémunération équitable pour la location d'exemplaires d'œuvres incorporées dans des phonogrammes, au lieu d'un droit exclusif, cette Partie contractante peut maintenir ce système, à condition que la location commerciale ne constitue pas une atteinte substantielle au droit exclusif de reproduction.
Article 8
L'article 8 concerne le droit de communication au public.
Les travaux préparatoires menés par les Comités de l'OMPI ont permis d'arriver à un accord selon lequel la transmission d'œuvres via Internet et d'autres réseaux similaires devrait faire l'objet d'un droit exclusif d'autorisation de l'auteur ou de ses ayants droit, en prévoyant bien évidemment les exceptions adéquates.
Néanmoins, aucun consensus n'a pu être trouvé quant à la manière de mettre en œuvre ce droit exclusif, autrement dit quant au(x) droit(s) applicable(s). Le droit de communication au public et le droit de distribution ont été présentés comme les deux principales possibilités. Il est également à noter que la Convention de Berne ne couvre pas entièrement ces droits; le droit de communication au public ne s'étend pas à certaines catégories d'œuvres alors que la reconnaissance explicite du droit de distribution dans la Convention de Berne ne porte que sur une seule catégorie d'œuvres, à savoir les œuvres cinématographiques.
Les différences en matière de qualification légale des transmissions numériques s'expliquent, en partie, par la complexité de leur nature et par le fait que les divers experts ont choisi de privilégier un aspect plutôt qu'un autre. Il y a toutefois une raison plus fondamentale à ces divergences: la grande disparité des législations nationales du point de vue de la couverture des deux droits susmentionnés. Il est dès lors apparu, de façon évidente, qu'il serait difficile de s'accorder sur une solution fondée sur l'un de ces droits plutôt que sur l'autre.
On a donc opté pour une solution spécifique, à savoir une définition neutre du traitement de la transmission numérique, indépendamment de toute qualification légale particulière, c'est-à-dire sans spécifier lequel des deux droits « traditionnels » précités couvre la transmission numérique. Cette description doit être spécifique d'un point de vue technologique et doit également exprimer la nature interactive des transmissions numériques. Il importe, eu égard à la qualification légale du droit exclusif, de laisser suffisamment de marge de manœuvre aux législateurs nationaux. Cette solution a été dite « solution parapluie ». Enfin, il convient de combler les lacunes de la Convention de Berne relatives à l'application des droits concernés, soit les droits de communication au public et de distribution.
Le WCT met en pratique cette solution parapluie de manière particulière. Étant donné le nombre apparemment plus important des États qui ont choisi d'appliquer, en général, le droit de communication au public, le Traité étend l'applicabilité de ce droit à toutes les catégories d'œuvres et spécifie qu'il couvre également les transmissions dans le cadre des systèmes interactifs décrits sans avoir recours à une qualification légale. Cette disposition est inscrite à l'article 8 du Traité, qui dit en substance: « Sans préjudice des dispositions des articles 11, alinéa 1), 2º), 11bis, alinéa 1), 1º) et 2º), 11ter, alinéa 1), 2º), 14, alinéa 1), 2º) et 14bis, alinéa 1), de la Convention de Berne, les auteurs d'œuvres littéraires et artistiques jouissent du droit exclusif d'autoriser toute communication au public de leurs œuvres par fil ou sans fil, y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit de manière individualisée ». Toutefois, dans un second temps, lors de la discussion de cette disposition, la Commission principale I de la Conférence diplomatique a déclaré — et aucune délégation ne s'est opposée à cette déclaration — que les Parties contractantes sont libres de mettre en œuvre l'obligation d'octroi d'un droit exclusif en vue d'autoriser la « mise à disposition du public », également par le biais de l'application d'un droit autre que le droit de communication au public ou encore en combinant différents droits. Par « autre » droit, on entend d'abord le droit de distribution, mais aussi éventuellement un nouveau droit spécifique, tel que le droit de mise à disposition du public prévu aux articles 10 et 14 du WPPT.
À l'échelon européen, le droit des auteurs de mettre leurs œuvres à la disposition du public de manière à ce que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit est régi par la directive 2001/29/CE, notamment son article 3,1. La directive 2001/29/CE recourt en vue de l'application de ce droit au droit de communication au public. Cette solution a, ainsi que mentionné ci-dessus, également été choisie par la plupart des Parties contractantes.
Pour ce qui est de la Belgique, la loi du 22 mai 2005 transposant la directive 2001/29/CE insère le droit précité dans la loi relative au droit d'auteur, notamment aux articles 1er (auteurs), 35 (artistes exécutants), 39 (producteurs de phonogrammes et de premières fixations de films) et 44 (organismes de radiodiffusion).
L'article 8 a fait l'objet de la déclaration commune suivante: « Il est entendu que la simple fourniture d'installations destinées à permettre ou à réaliser une communication ne constitue pas une communication au public au sens du présent traité ou de la Convention de Berne. Il est entendu en outre que rien, dans l'article 8, n'interdit à une Partie contractante d'appliquer l'article 11bis.2) ». Sur la base des débats qui ont eu lieu au sein de la Commission principale I à ce propos, il est apparu que la Déclaration commune avait pour objectif de clarifier la responsabilité des fournisseurs de services et d'accès dans le contexte des réseaux numériques, tels qu'Internet.
En fait, la Déclaration commune contient une évidence. Il va de soi que, lorsqu'une personne accomplit un acte non couvert par un droit prévu par le Traité (et les législations nationales correspondantes), cette personne n'est pas directement responsable pour l'acte qui est couvert par un tel droit. Par contre, il s'agit de tout autre chose lorsque, en fonction de circonstances, l'intéressé peut toujours être responsable sur une autre base, telle que la responsabilité pour faute commune ou faute partagée ou la responsabilité pour le fait d'autrui (« contributory or vicarious liability »). Les questions de responsabilité sont extrêmement complexes. En effet, pour pouvoir juger une affaire donnée, la connaissance d'un large volume de législation et de jurisprudence est requise dans chaque pays. C'est la raison pour laquelle les traités internationaux portant sur la propriété intellectuelle ne couvrent pas, à juste titre, ces questions. Il en va de même pour le WCT.
Article 9
L'article 9 du WCT met fin à la discrimination injustifiée touchant les œuvres photographiques pour ce qui est de la durée de leur protection. Il impose aux Parties contractantes de ne pas appliquer l'article 7, alinéa 4 de la Convention de Berne à l'égard des œuvres photographiques. Cet article prescrit, pour les œuvres photographiques de même que pour les œuvres des arts appliqués, un délai plus court — 25 ans — que la durée générale de 50 ans.
Article 10
L'article 10 du Traité se divise en deux alinéa's. Le premier définit les types de limitations ou d'exceptions pouvant s'appliquer aux droits conférés par le Traité, tandis que le second détermine les critères d'application des limitations ou exceptions aux droits octroyés par la Convention de Berne.
Les deux paragraphes ont recours au test à trois étapes figurant à l'article 9, alinéa 2 de la Convention de Berne. Celui-ci définit les conditions dans lesquellesdes limitations et exceptions sont autorisées: (i) dans certains cas spéciaux, (ii) à condition qu'il ne soit pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre, et (iii) ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur. Selon l'article 9, alinéa 2 de la Convention de Berne, ces critères s'appliquent uniquement au droit de reproduction, tandis que les deux paragraphes de l'article 10 du Traité embrassent tous les droits prévus par le Traité et la Convention de Berne. Dans cette optique, les dispositions contenues dans l'article 10 sont de même nature que celles de l'article 13 de l'Accord sur les ADPIC, qui soumet à ces mêmes critères tous les droits visés par l'accord en question, soit directement, soit indirectement, en faisant référence aux dispositions substantielles de la Convention de Berne.
De même, la directive 2001/29/CE fait référence à ces trois critères, plus particulièrement en son article 5,5. Les exceptions belges au droit d'auteur et aux droits voisins figurent actuellement aux articles 21 à 23 (auteurs) et 46 à 47bis (titulaires des droits voisins) de la loi relative au droit d'auteur.
Articles 11 et 12
Les travaux préparatoires ont permis d'établir qu'il n'était pas suffisant d'accorder des droits appropriés concernant l'usage numérique des œuvres, en particulier sur Internet. Dans un tel environnement, les droits ne peuvent s'appliquer de manière effective sans mesures techniques de protection et sans information concernant la gestion des droits requise pour l'octroi de licences et le contrôle de l'usage qui en est fait. Il a été convenu que l'application de telles mesures devrait être laissée aux intéressés, titulaires des droits, mais qu'il importerait également de prendre des dispositions adéquates afin de protéger l'usage de ces mesures et de ces informations. Ces dispositions sont contenues dans les articles 11 et 12 du Traité.
L'article 11 du Traité énonce que les Parties contractantes doivent « prévoir une protection juridique appropriée et des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques efficaces qui sont mises en œuvre par les auteurs dans le cadre de l'exercice de leurs droits en vertu du présent traité ou de la Convention de Berne et qui restreignent l'accomplissement, à l'égard de leurs œuvres, d'actes qui ne sont pas autorisés par les auteurs concernés ou permis par la loi ».
L'article 12, alinéa 1er du Traité oblige les Parties contractantes à « prévoir des sanctions juridiques appropriées et efficaces contre toute personne qui accomplit l'un des actes suivants en sachant, ou, pour ce qui relève des sanctions civiles, en ayant des raisons valables de penser que cet acte va entraîner, permettre, faciliter ou dissimuler une atteinte à un droit prévu par le présent traité ou la Convention de Berne: (i) supprimer ou modifier, sans y être habilitée, toute information relative au régime des droits se présentant sous forme électronique; (ii) distribuer, importer aux fins de distribution, radiodiffuser ou communiquer au public, sans y être habilitée, des œuvres ou des exemplaires d'œuvres en sachant que des informations relatives au régime des droits se présentant sous forme électronique ont été supprimées ou modifiées sans autorisation ». L'article 12, alinéa 2 définit l'expression « information sur le régime des droits » comme les « informations permettant d'identifier l'œuvre, l'auteur de l'œuvre, le titulaire de tout droit sur l'œuvre ou des informations sur les conditions et modalités d'utilisation de l'œuvre, et de tout numéro ou code représentant ces informations, lorsque l'un quelconque de ces éléments d'information est joint à l'exemplaire d'une œuvre ou apparaît en relation avec la communication d'une œuvre au public ».
S'agissant de l'article 12 du Traité, la Conférence diplomatique a adopté une déclaration commune, composée de deux parties. La première stipule qu' « il est entendu que l'expression « atteinte à un droit prévu par le présent traité ou la Convention de Berne » vise aussi bien les droits exclusifs que les droits à rémunération ». La seconde, quant à elle, dit en substance qu' « il est entendu en outre que les Parties contractantes ne se fonderont pas sur cet article pour concevoir ou mettre en œuvre un régime des droits qui ait pour effet d'imposer des formalités non permises en vertu de la Convention de Berne ou du présent traité, interdisant le libre mouvement des marchandises ou empêchant la jouissance des droits reconnus par le présent traité ».
Dans le cadre européen, la directive 2001/29/CE, notamment ses articles 6 et 7, met en œuvre les articles 11 et 12 du WCT. Quant au contexte national, la loi du 22 mai 2005 transposant la directive 2001/29/CE insère dans le chapitre VIII de la loi relative au droit d'auteur une section 1bis intitulée « Protection juridique des mesures techniques et de l'information sur le régime des droits ».
Article 13
L'article 13 du WCT renvoie simplement à l'article 18 de la Convention de Berne afin de déterminer les œuvres auxquelles s'applique le Traité.
Article 14
L'article 14 du Traité comprend deux alinéas. Le premier est une version mutatis mutandis de l'article 36, alinéa 1er de la Convention de Berne: « Les Parties contractantes s'engagent à adopter, en conformité avec leur système juridique, les mesures nécessaires pour assurer l'application du présent traité ».
Le second, quant à lui, est la version mutatis mutandis de la première phrase de l'article 41, 1 de l'Accord sur les ADPIC, qui stipule que « les Parties contractantes feront en sorte que leur législation comporte des procédures destinées à faire respecter les droits prévus par le présent traité, de manière à permettre une action efficace contre tout acte qui porterait atteinte à ces droits, y compris des mesures propres à prévenir rapidement toute atteinte et des mesures propres à éviter toute atteinte ultérieure ».
Article 15
Les articles 15 à 25 du WCT comportent les dispositions administratives et finales de ce Traité. Celles-ci concernent l'Assemblée, le Bureau international, les conditions à remplir pour devenir partie au Traité, les réserves (exclusion de celles-ci), la dénonciation du Traité, les langues du Traité et son dépositaire.
De manière générale, on peut affirmer que ces dispositions sont identiques ou comparables aux dispositions des autres traités de l'OMPI relatifs aux mêmes matières.
L'article 15 porte sur l'Assemblée générale des Parties contractantes.
Article 16
Le Bureau international de l'OMPI effectue les tâches administratives relatives au Traité.
Article 17
L'article 17 du Traité définit les conditions à remplir pour devenir partie au Traité. Le premier alinéa prescrit que « tout État membre de l'OMPI peut devenir partie au présent traité ». Le second dit en substance que « l'Assemblée peut décider d'autoriser à devenir partie au présent traité toute organisation intergouvernementale qui déclare qu'elle a compétence et dispose d'une législation propre liant tous ses États membres, en ce qui concerne les questions régies par le présent traité et qu'elle a été dûment autorisée, conformément à ses procédures internes, à devenir partie au présent traité ». Le troisième alinéa énonce enfin que « la Communauté européenne, ayant fait la déclaration visée à l'alinéa précédent lors de la conférence diplomatique qui a adopté le présent traité, peut devenir partie au présent traité ».
Article 18
Sauf dispositions expresses contraires prévues par le présent Traité, chaque Partie contractante jouit de tous les droits découlant du Traité de même qu'elle en accepte toutes les obligations.
Article 19
L'article 19 traite de la signature du Traité.
Article 20
Le nombre d'actes de ratification ou d'adhésion requis pour l'entrée en vigueur des traités administrés par l'OMPI est habituellement relativement peu élevé. Il est généralement fixé à 5. L'article 20 du WCT prévoit toutefois un nombre d'actes de ratification ou d'adhésion bien supérieur, à savoir 30.
Article 21
Cet article traite sur la date d'entrée en vigueur du Traité eu égard aux Parties.
Article 22
Aucune réserve au présent Traité n'est autorisée.
Article 23
Toute Partie contractante peut dénoncer le Traité au moyen d'une notification au Directeur général de l'OMPI. La dénonciation prend effet un an après la date de réception de cette notification par le Directeur général de l'OMPI.
Article 24
L'article 24 porte sur les langues du Traité.
Article 25
Le Directeur général de l'OMPI est le dépositaire du présent Traité.
II. TRAITÉ DE L'ORGANISATION MONDIALE DE LA PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE SUR LES INTERPRÉTATIONS ET EXÉCUTIONS ET LES PHONOGRAMMES (WPPT)
S'agissant des droits des artistes interprètes ou exécutants et des producteurs de phonogrammes, les normes internationales existantes ont été fixés par la Convention de Rome. Lors de son adoption en 1961, celle-ci a été saluée comme une « convention pionnière », dès lors qu'elle établissait des normes relatives aux deux catégories de droits susmentionnées ainsi qu'aux droits des organismes de radiodiffusion (dits « droits voisins »), normes encore inconnues dans la plupart des pays.
Les années 70 et 80 ont été marquées par d'importantes avancées technologiques (vidéo-technologie, systèmes de cassettes compactes facilitant le « home taping » (reproduction de cassettes à la maison), radiodiffusion par satellite, télévision par le câble, usages liés à l'ordinateur, etc.), qui ont fait l'objet de discussions au sein du Comité intergouvernemental de la Convention de Rome de même que lors de diverses réunions de l'OMPI (comités, groupes de travail, symposiums) où les « droits voisins » figuraient à l'ordre du jour.
Ces débats ont mené à l'élaboration de recommandations, de principes directeurs et de dispositions types à l'attention des gouvernements et des législateurs. À la fin des années 80, il est apparu, en ce qui concerne le droit d'auteur, que de simples principes directeurs n'étaient plus suffisants; de nouvelles normes contraignantes étaient devenues nécessaires.
La préparation de ces dernières a débuté au sein de deux forums: D'une part, au sein des Comités d'experts de l'OMPI et, d'autre part, au sein du GATT dans le cadre des négociations de l'Uruguay Round.
L'adoption de l'Accord sur les ADPIC a activé les travaux préparatoires des nouvelles normes en matière de droit d'auteur et de droits voisins, qui ont abouti à la convocation de la Conférence diplomatique de l'OMPI sur certaines questions de droit d'auteur et de droits voisins à Genève, du 2 au 20 décembre 1996, lors de laquelle les deux nouveaux traités ont été adoptés.
Article 1er
Au début des travaux préparatoires du WPPT (appelé le « nouvel Instrument »), il a été proposé que ce traité ait, avec la Convention de Rome, le même lien que le WCT (« le Protocole de Berne ») est censé avoir avec la Convention de Berne, c'est-à-dire qu'il constitue un arrangement particulier en vertu de l'article 22 de la Convention de Rome,.
Cette proposition n'ayant toutefois pas rallié suffisamment de suffrages, il a été convenu d'établir entre le WPPT et la Convention de Rome un lien identique à celui existant entre l'Accord sur les ADPIC et la Convention de Rome. Cela signifie que, (i) les Parties contractantes ne sont, en général, pas tenues d'appliquer les dispositions substantielles de la Convention de Rome; (ii) que seules quelques dispositions de cette dernière sont incluses par référence (celles relatives aux critères de protection); et (iii) que l'article 1er, alinéa 2 du Traité contient, mutatis mutandis, pratiquement la même disposition que l'article 2, alinéa 2 de l'Accord sur les ADPIC, qui dit en substance qu'aucune disposition du Traité ne dérogera aux obligations que les Parties contractantes ont les unes envers les autres en vertu de la Convention de Rome.
Quant au lien du WPPT avec d'autres traités, l'article 1er, alinéa 3 comporte une disposition similaire à celle de l'article 1er, alinéa 2 du WCT: « Le présent traité n'a aucun lien avec d'autres traités et s'applique sans préjudice des droits et obligations découlant de tout autre traité ».
Le titre de l'article 1er s'intitule « Rapports avec d'autres conventions ». Son second alinéa, quant à lui, traite d'une question plus large, à savoir la relation entre le droit d'auteur, d'une part, et les « droits voisins » prévus par le Traité, d'autre part.
Cette disposition est la reproduction fidèle de l'article 1er de la Convention de Rome: « La protection prévue par le présent traité laisse intacte et n'affecte en aucune façon la protection du droit d'auteur sur les œuvres littéraires et artistiques. En conséquence, aucune disposition du présent traité ne pourra être interprétée comme portant atteinte à cette protection ». Il est bien connu que, lors de la Conférence diplomatique de 1961 ayant adopté la Convention de Rome, certains experts ont essayé, en dépit d'une certaine résistance, clairement reflétée dans les rapports de cette Conférence, d'interpréter cette disposition de manière telle que non seulement la protection mais également l'exercice du droit d'auteur ne soient affectés d'aucune façon par la protection et l'exercice des droits voisins. Ainsi, si un auteur souhaite autoriser l'utilisation de l'enregistrement d'une interprétation ou exécution de son œuvre, ni l'artiste interprète ou exécutant, ni le producteur de l'enregistrement ne devraient pouvoir empêcher cet usage en invoquant leurs droits voisins. La Conférence diplomatique a rejeté cette interprétation en adoptant la déclaration commune suivante: « Il est entendu que l'article 1, 2) précise la relation entre les droits existant sur les phonogrammes en vertu du présent traité et le droit d'auteur sur les œuvres incorporées dans ces phonogrammes. Dans les cas où sont requises à la fois l'autorisation de l'auteur d'une œuvre incorporée dans le phonogramme et celle d'un artiste interprète ou exécutant ou d'un producteur possédant des droits sur le phonogramme, l'obligation d'avoir l'autorisation de l'auteur ne cesse pas d'exister du fait que l'autorisation de l'artiste interprète ou exécutant ou du producteur est également requise, et vice versa ».
Article 2
Le WPPT respecte la structure de la Convention de Rome, au sens où il comporte, en son article 2, une série de définitions. Les définitions suivantes sont identiques à celles inscrites à l'article 3 de la Convention de Rome: « artistes interprètes ou exécutants », « phonogramme », « producteur d'un phonogramme », « publication », « radiodiffusion ». Le Traité ajoute cependant deux définitions: « fixation » et « communication au public », tout en supprimant celles relatives à la « reproduction » et à la « réémission ».
Les définitions prennent en compte l'impact de la technologie numérique. Il est en effet reconnu que les phonogrammes ne signifient plus forcément la fixation des sons d'une interprétation ou exécution ou d'autres sons. Actuellement ils peuvent également intégrer les fixations de représentations (numériques) de sons qui n'ont jamais existé mais qui ont été directement générés par des moyens électroniques. Il est question de ces fixations éventuelles dans les définitions de « phonogramme », « fixation », « producteur de phonogramme », « radiodiffusion » et « communication au public ». Il convient néanmoins de souligner que la référence aux « représentations de sons » n'étend pas la portée des définitions concernéesdes traités existants. Elle témoigne seulement d'un souhait de clarification eu égard aux nouvelles technologies.
Article 3
L'article 3 WPPT définit qui peut se prévaloir de la protection prévue par le WPPT. L'article 3, alinéa 1er prévoit que la protection doit être accordée aux artistes interprètes et producteurs de phonogrammes ressortissants d'autres Parties contractantes. Les notions d'« artistes interprètes » et de « producteur de phonogramme » sont respectivement définies aux articles 2, a) et 2, d) du WPPT.
La notion de « ressortissants d'une autre Partie contractante » est définie à l'article 3, alinéa 2 du WPPT. À ce sujet, il est renvoyé aux critères de la Convention de Rome (articles 4, 5, 17 et 18).
Article 4
Le présent article concerne le traitement national. À l'instar de l'article 3, 1 de l'Accord sur les ADPIC relatif aux droits voisins, l'article 4 du WPPT dispose que le traitement national ne vise que les droits conférés expressément par le Traité.
L'article 4, alinéa 1er du WPPT stipule également in fine que le traitement national s'applique aussi à la rémunération équitable visée à l'article 15 du WPPT. L'article 4, alinéa 2 du WPPT ajoute toutefois que l'obligation d'appliquer le traitement national n'est toutefois pas d'application dans la mesure ou une autre Partie contractante fait usage des réserves accordées en vertu de l'article 15, troisième alinéa du WPPT.
Article 5
L'article 5, alinéa 1er, énonce ce qui suit: « Indépendamment de ses droits patrimoniaux, et même après la cession de ces droits, l'artiste interprète ou exécutant conserve le droit, en ce qui concerne ses interprétations ou exécutions sonores vivantes ou ses interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes, d'exiger d'être mentionné comme tel, sauf lorsque le mode d'utilisation de l'interprétation ou exécution impose l'omission de cette mention, et de s'opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de ces interprétations ou exécutions, préjudiciables à sa réputation ». Cette disposition suit, dans les grandes lignes, l'article 6bis de la Convention de Berne (relatif aux droits moraux des auteurs), mais elle requiert un niveau de protection quelque peu inférieur. En effet, l'application du droit a été un peu assouplie eu égard au droit pour les artistes interprètes ou exécutants d'être d'identifiés comme tels et la portée du droit au respect de l'exécution ou de l'interprétation est aussi plus limitée. L'article 5, alinéas 2 et 3, relatif à la durée de la protection des droits et aux moyens de recours pour sauvegarder ces droits, sont des versions mutatis mutandis de l'article 6bis, alinéas 2 et 3 de la Convention de Berne.
Au niveau belge, les droits moraux de l'artiste-interprète sont prévus à l'article 34 de la loi sur le droit d'auteur. La législation belge est donc conforme au prescrit de l'article 5 du WPPT.
Article 6
Les droits moraux des artistes interprètes ou exécutants ne s'étendent qu'aux interprétations ou exécutions sonores vivantes et aux interprétations ou exécutions fixées sur un phonogramme. Les droits patrimoniaux sur les interprétations ou exécutions fixées ne couvrent, quant à eux, que les interprétations ou exécutions fixées sur un phonogramme.
La question se pose de savoir si les droits patrimoniaux des artistes interprètes ou exécutants sur leurs interprétations ou exécutions non fixées, prévus à l'article 6, s'étendent à toutes les interprétations ou exécutions ou seulement aux interprétations ou exécutions sonores ? Il s'agit là d'une question d'interprétation. Le texte de la disposition laisse sous-entendre une portée plus large. Néanmoins, si l'on tient compte des définitions des termes « fixation » et « communication au public » (article 2, c) et g)), une interprétation plus restrictive semble justifiée.
Selon l'article 2, c), « fixation » signifie seulement « l'incorporation de sons, ou des représentations de ceux-ci, dans un support qui permette de les percevoir, de les reproduire ou de les communiquer à l'aide d'un dispositif ». L'article 2, g) du WPPT définit la « communication au public » comme « la transmission au public, par tout moyen autre que la radiodiffusion, de sons provenant d'une interprétation ou exécution ou des sons ou représentations de sons fixés sur un phonogramme ». Cependant, l'article 2, f) décrit la « radiodiffusion » comme « la transmission sans fil de sons ou d'images et de sons, ou des représentations de ceux-ci, aux fins de réception par le public ».
La formulation de ces définitions amène à privilégier l'interprétation selon laquelle les droits de communication au public et de fixation sont limités aux interprétations ou exécutions sonores, tandis que le droit de radiodiffusion des interprétations ou exécutions non fixées porte sur les interprétations ou exécutions tant sonores qu'audiovisuelles.
Quant à l'article 14, 1 de l'Accord sur les ADPIC, la possibilité pour les artistes interprètes ou exécutants d'empêcher la fixation de leurs interprétations ou exécutions sonores directes et la reproduction d'une telle fixation ne s'étend qu'à la fixation sur un phonogramme, alors que la possibilité d'empêcher la radiodiffusion et la communication au public d'interprétations ou d'exécutions directes embrasse toutes les catégories d'interprétations ou exécutions directes.
De plus il faut remarquer que bien que les droits des artistes interprètes ou exécutants prévus dans le WPPT ont quasiment le même champ d'application que les droits accordés par l'Accord sur les ADPIC, la nature de ces droits diffère de celle des droits octroyés par l'Accord sur les ADPIC et par l'article 7 de la Convention de Rome. Si l'Accord et la Convention précités prévoient la « possibilité d'empêcher » les actes concernés, le Traité, quant à lui, confère le « droit exclusif » d'autoriser de tels actes.
Articles 7 et 11
Les articles 7 et 11 règlent la portée du droit de reproduction en ce qui concerne le stockage sur un support électronique des exécutions et des phonogrammes sous forme numérique. L'article 7 traite du droit de reproduction des artistes interprètes, l'article 11 du droit de reproduction des producteurs de phonogrammes.
Bien que le projet du WPPT contienne certaines dispositions destinées à clarifier l'application du droit de reproduction au stockage des interprétations ou exécutions et des phonogrammes sous forme numérique sur un support électronique, celles-ci n'ont pas été insérées dans le texte du Traité. Toutefois, la Conférence diplomatique a adopté la déclaration commune suivante: « Le droit de reproduction énoncé aux articles 7 et 11 et les exceptions dont il peut être assorti en vertu de l'article 16 s'appliquent pleinement dans l'environnement numérique, en particulier à l'utilisation des interprétations et exécutions et des phonogrammes sous forme numérique. Il est entendu que le stockage d'une interprétation ou exécution protégée, ou d'un phonogramme protégé, sous forme numérique sur un support électronique constitue une reproduction au sens de ces articles ».
La première phrase énonce une évidence, à savoir que les dispositions du Traité sur les droits de reproduction s'appliquent pleinement dans un environnement numérique. La notion de « reproduction » ne doit pas être restreinte pour la seule raison qu'une reproduction a été réalisée sous une forme numérique, par le biais d'un stockage dans une mémoire électronique, ou que cette reproduction est de nature temporaire. Il découle également de cette première phrase que l'article 16 est aussi pleinement d'application. Cela constitue un fondement approprié pour introduire dans la législation nationale des exceptions justifiées, telles que les reproductions temporaires et occasionnelles conformément au test en trois étapes visé par cet article du Traité.
Article 8
Pour ce qui est du droit de distribution, l'article 8, alinéa 1er énonce que « les artistes interprètes ou exécutants jouissent du droit exclusif d'autoriser la mise à la disposition du public de l'original et de copies de leurs interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes par la vente ou tout autre transfert de propriété ». L'article 8, alinéa 2 traite de l'épuisement de ce droit. Il n'oblige pas les États contractants à opter pour l'épuisement national/régional ou international, ni à régler la question de l'épuisement.
Afin d'être complet, on peut signaler que l'épuisement, en ce qui concerne les auteurs, est réglé au plan européen par l'article 4, alinéa 2 de la directive 2001/29/CE qui prévoit un épuisement communautaire.
Au niveau belge, la loi du 22 mai 2005 transposant la directive 2001/29/CE choisit, quant à lui, de faire explicitement mention du principe de l'épuisement communautaire pour les auteurs, à l'article 1er de la loi relative au droit d'auteur. Pour les bénéficiaires des droits voisins, la loi prévoit également de manière expresse le principe de l'épuisement communautaire, plus précisément aux articles 35 (artistes exécutants), 39 (producteurs de phonogrammes et de premières fixations de films) et 44 (organismes de radiodiffusion) de cette même loi.
Article 9
Le présent article prévoit un droit exclusif de location à l'usage des artistes-interprètes relatif à l'original de leurs exécutions fixées sur phonogramme, ainsi qu'à leurs copies. Le deuxième alinéa offre toutefois la possibilité aux Parties contractantes qui, au 15 avril 1994, ont prévu, pour la location commerciale, un système de rémunération équitable, de conserver ce système sous certaines conditions.
Cette disposition est mise en œuvre au niveau européen par la directive 92/100/CEE du Conseil du 19 novembre 1992 relative au droit de location et de prêt et à certains droits voisins du droit d'auteur dans le domaine de la propriété intellectuelle, notamment l'article 2 de la directive.
Au niveau belge, le droit de location pour les artistes-interprètes est réglementé par l'article 35 de la loi sur le droit d'auteur. La loi belge est donc déjà conforme au prescrit de l'article 9 du WPPT.
Articles 10 et 14
Les articles 10 et 14 visent la transmission d'exécutions et de phonogrammes dans des réseaux numériques. La solution qui a été donnée à cette question a été baptisée « solution parapluie » (« umbrella solution »). L'article 10 traite des droits des artistes- interprètes, l'article 14 des droits des producteurs de phonogrammes.
Les travaux préparatoires menés par les Comités de l'OMPI ont permis d'arriver à un accord selon lequel la transmission d'œuvres via Internet et d'autres réseaux similaires devrait faire l'objet d'un droit exclusif d'autorisation de l'auteur ou de ses ayants droit, en prévoyant bien évidemment les exceptions adéquates.
Néanmoins, aucun consensus n'a pu être trouvé quant à la manière de mettre en œuvre ce droit exclusif, autrement dit quant au(x) droit(s) applicable(s). Le droit de communication au public et le droit de distribution ont été présentés comme les deux principales possibilités.
Les différences en matière de qualification légale des transmissions numériques s'expliquent, en partie, par la complexité de leur nature et par le fait que les divers experts ont choisi de privilégier un aspect plutôt qu'un autre. Il y a toutefois une raison plus fondamentale à ces divergences: la grande disparité des législations nationales du point de vue de la couverture des deux droits susmentionnés. Il est dès lors apparu, de façon évidente, qu'il serait difficile de s'accorder sur une solution fondée sur l'un de ces droits plutôt que sur l'autre.
On a opté pour une solution spécifique, c'est-à-dire une définition neutre de la transmission numérique, libre de toute qualification légale particulière. Cette description doit être spécifique d'un point de vue technologique et doit également exprimer la nature interactive des transmissions numériques. Il importe, concernant la qualification légale du droit exclusif (en d'autre termes, la liberté du choix du(des) droit(s) applicable(s)), de laisser suffisamment de marge de manœuvre aux législateurs nationaux. Cette solution a été dite « solution parapluie ».
Pour ce qui est du WPPT, les dispositions pertinentes figurent aux articles 10 et 14, conformément auxquels les artistes interprètes ou exécutants et les producteurs de phonogrammes jouissent « du droit exclusif d'autoriser la mise à disposition du public, par fil ou sans fil », respectivement de leurs interprétations ou exécutions fixées sur des phonogrammes et de leurs phonogrammes, « de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit individuellement ». Il est également évident, dans le cas qui nous occupe, et dans le respect de la liberté de choix des Parties contractantes quant à la qualification légale des actes couverts par certains droits conférés par les traités, que ces Parties peuvent exécuter les dispositions en question, non seulement en appliquant un droit spécifique, mais aussi d'autres droits tels que le droit de distribution ou le droit de communication au public (moyennant le plein respect de leur obligation d'octroyer un droit exclusif d'autorisation des actes décrits).
Quant au WCT, les dispositions visées sont inscrites à l'article 8: « Sans préjudice des dispositions des articles 11, alinéa 1), 2º), 11bis, alinéa 1), 1º) et 2º), 11ter, alinéa 1), 2º), 14, alinéa 1), 2º) et 14bis, alinéa 1), de la Convention de Berne, les auteurs d'œuvres littéraires et artistiques jouissent du droit exclusif d'autoriser toute communication au public de leurs œuvres par fil ou sans fil, y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit de manière individualisée ». Lors de la discussion de cette disposition à la Commission principale I de la Conférence diplomatique susmentionnée, il a été déclaré — et aucune délégation ne s'est opposée à cette déclaration — que les Parties contractantes sont libres de mettre en œuvre l'obligation d'octroi d'un droit exclusif en vue d'autoriser la « mise à disposition du public », également par le biais de l'application d'un droit autre que le droit de communication au public ou encore en combinant différents droits. Par « autre » droit, on entend bien évidemment le droit de distribution (ce qui veut dire que la solution parapluie a aussi été appliquée pour le WCT en matière de transmission numérique).
L'article 8 du WCT a fait l'objet de la déclaration commune suivante: « Il est entendu que la simple fourniture d'installations destinées à permettre ou à réaliser une communication ne constitue pas une communication au public au sens du présent traité ou de la Convention de Berne. Il est entendu en outre que rien, dans l'article 8, n'interdit à une Partie contractante d'appliquer l'article 11bis.2) ». Sur la base des débats qui ont eu lieu au sein de la Commission principale I à ce propos, il est apparu que la Déclaration commune avait pour objectif de clarifier la question de la responsabilité des fournisseurs de services et d'accès dans le contexte des réseaux numériques, tels qu'Internet. Il va également de soi, bien qu'il n'en soit pas fait mention explicitement, que le principe inscrit dans la Déclaration commune s'applique aussi, mutatis mutandis, aux dispositions précitées des articles 10 et 14 du WPPT relatifs à la « mise à disposition du public ».
La Déclaration commune contient une évidence. Il est clair que, lorsqu'une personne accomplit un acte non couvert par un droit prévu par la Convention (et les législations nationales correspondantes), cette personne n'est pas directement responsable pour l'acte qui est couvert par un tel droit. Par contre, il s'agit de tout autre chose lorsque, en fonction de circonstances, l'intéressé peut toujours être responsable sur une autre base, telle que la responsabilité pour faute commune ou faute partagée ou la responsabilité pour le fait d'autrui (« contributory or vicarious liability »). Les questions de responsabilité sont extrêmement complexes. En effet, pour pouvoir juger une affaire donnée, la connaissance d'un large volume de législation et de jurisprudence est requise dans chaque pays. C'est la raison pour laquelle les traités internationaux portant sur la propriété intellectuelle ne couvrent pas, à juste titre, ces questions. Il en va de même pour le WPPT.
Articles 11 et 13
En plus des droits de « mise à disposition » et de distribution, le WPPT prévoit les mêmes droits pour les producteurs de phonogrammes — droit de reproduction et droit de location (articles 11 et 13) — que ceux octroyés par l'Accord sur les ADPIC (article 14, 2 et 4).
Article 12
L'article 12 comporte mutatis mutandis les mêmes dispositions pour les producteurs de phonogrammes pour ce qui est du droit de distribution de leurs phonogrammes que celles inscrites à l'article 8 pour les artistes interprètes ou exécutions concernant le droit de distribution de leurs interprétations ou exécutions fixées sur un phonogramme.
Article 15
L'article 15 offre quasiment le même genre de rémunération aux artistes interprètes ou exécutants et aux producteurs de phonogrammes que l'article 12 de la Convention de Rome avec quasiment les mêmes réserves éventuelles que celles prévues par l'article 16, alinéa 1er, a) de la Convention. Une exception est que l'article 12 laisse au législateur national le soin de décider si ce droit doit être accordé aux artistes interprètes ou exécutants ou aux producteurs de phonogrammes ou aux deux, tandis que l'article 15 du WPPT prescrit que ce droit doit être conféré aux deux catégories, sous la forme d'une rémunération unique équitable.
L'article 15, alinéa 4, du Traité met en exergue une caractéristique spécifique de cet article: « Aux fins du présent article, les phonogrammes mis à la disposition du public, par fil ou sans fil, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit individuellement sont réputés avoir été publiés à des fins de commerce ».
La Conférence diplomatique a adopté la Déclaration commune suivante à propos de cet article: « Il est entendu que l'article 15 n'apporte pas une solution définitive à la question du niveau des droits de radiodiffusion et de communication au public dont devraient jouir, à l'ère du numérique, les artistes interprètes ou exécutants et les producteurs de phonogrammes. Les délégations n'ayant pu parvenir à un consensus sur les propositions divergentes concernant les aspects de l'exclusivité à accorder dans certaines circonstances, ou les droits à reconnaître sans possibilité de réserves, elles ont renoncé pour le présent à régler la question ». Cette Déclaration renvoie à la position selon laquelle, dans le cas de certains services quasi à la demande, l'octroi de droits exclusifs est justifié.
Article 16
S'agissant du WCT, la déclaration commune suivante, relative aux limitations et exceptions, a été adoptée: « Il est entendu que les dispositions de l'article 10 permettent aux Parties contractantes de maintenir et d'étendre de manière adéquate dans l'environnement numérique les limitations et exceptions prévues dans leurs législations nationales qui ont été considérées comme acceptables en vertu de la Convention de Berne. De même, ces dispositions doivent être interprétées comme permettant aux Parties contractantes de concevoir de nouvelles exceptions et limitations qui soient appropriées dans l'environnement des réseaux numériques.
Il est aussi entendu que l'article 10, alinéa 2, ne réduit ni n'étend le champ d'application des limitations et exceptions permises par la Convention de Berne ». La Conférence diplomatique a jugé cette déclaration applicable mutatis mutandis à l'article 16 du WPPT relatif aux limitations et exceptions.
Bien évidemment, les exceptions ou limitations — qu'elles soient nouvelles ou qu'elles existent déjà — dans un environnement numérique ne sont applicables que si elles satisfont au test en trois étapes mentionné à l'article 16, alinéa 2 du Traité.
Conformément à l'article 16, alinéa 1 du WPPT, les Parties contractantes « ont la faculté de prévoir dans leur législation nationale, en ce qui concerne la protection des artistes interprètes ou exécutants et des producteurs de phonogrammes, des limitations ou exceptions de même nature que celles qui y sont prévues en ce qui concerne la protection du droit d'auteur sur les œuvres littéraires et artistiques ».
Cette disposition correspond, en substance, à l'article 15, alinéa 2 de la Convention de Rome. Il existe toutefois une différence importante entre ces deux dispositions: la Convention de Rome prévoit également, en son article 15, alinéa 1er, des limitations spécifiques, indépendantes de celles imposées par une législation nationale donnée en matière de protection du droit d'auteur.
Deux de ces limitations spécifiques (utilisation de courts fragments à l'occasion du compte-rendu d'un événement d'actualité et fixation éphémère pour un organisme de radiodiffusion) sont conformes aux dispositions correspondantes de la Convention de Berne, contrairement à une troisième limitation portant sur l'usage privé, sans autres conditions. La Convention de Berne, quant à elle, comprend, en son article 9, alinéa 2, des dispositions générales couvrant les limitations en cas d'usage privé qui sont dès lors soumises au test à trois étapes.
Si un pays est partie aux WCT et WPPT, ce qui est souhaitable sur la base de l'article 16, alinéa 1er susvisé, il est tenu d'appliquer ces trois critères pour toutes les limitations et exceptions aux droits prévus par le WPPT. L'article 16, alinéa 2 de ce Traité comporte néanmoins une disposition prescrivant directement l'application de ces critères (auxquels il doit donc être satisfait, indépendamment de l'adhésion ou non d'un pays donné au WCT): « Les parties contractantes doivent restreindre toutes les limitations ou exceptions dont elles assortissent les droits prévus dans le présent traité à certains cas spéciaux où il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'interprétation ou exécution ou du phonogramme, ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'artiste interprète ou exécutant ou du producteur du phonogramme ».
Article 17
En vertu de l'article 17 du WPPT, « la durée de la protection à accorder aux artistes interprètes ou exécutants en vertu du présent traité ne doit pas être inférieure à une période de 50 ans à compter de la fin de l'année où l'interprétation ou exécution a été fixée sur un phonogramme ». Cette durée semble être différente de celle prévue par l'article 14, 5 de l'Accord sur les ADPIC, qui fait également référence à l'année où l'interprétation ou exécution a eu lieu en tant que point de départ alternatif pour calculer la durée de la protection. En pratique, cependant, il n'y a aucune différence, dès lors que, dans le cas d'une interprétation ou exécution non fixée, la durée de la protection n'a qu'une importance toute théorique.
La durée de la protection des phonogrammes diffère substantiellement de celle prévue par l'Accord sur les ADPIC. Selon l'article 14.5 de cet accord, la période de 50 ans est toujours calculée à partir de la fin de l'année durant laquelle la fixation a été réalisée, tandis que l'article 17, alinéa 2 du WPPT prévoit que la période commence à courir à compter de la fin de l'année où le phonogramme a été publié et que ce n'est qu'à défaut d'une telle publication, qu'elle est calculée de la manière prévue par l'Accord sur les ADPIC. Étant donné que la publication vient normalement après la fixation, la durée de protection offerte par le Traité est en général un peu plus longue.
Articles 18 et 19
Les travaux préparatoires ont permis d'établir qu'il n'était pas suffisant d'accorder des droits appropriés concernant l'usage numérique des œuvres et des prestations couvertes par les droits voisins, en particulier sur Internet. Dans un tel environnement, les droits ne peuvent s'appliquer de manière effective sans le support de mesures techniques de protection et sans information concernant le régime des droits requis pour l'octroi de licences et le contrôle de l'usage qui en est fait. Il a été convenu que l'application de telles mesures devrait être laissée aux intéressés, titulaires des droits, mais qu'il importerait également de prendre des dispositions adéquates afin de protéger l'usage de ces mesures et de ces informations. Ces dispositions sont contenues dans les articles 18 et 19 du WPPT.
L'article 18 du Traité énonce que les Parties contractantes doivent « prévoir une protection juridique appropriée et des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques efficaces qui sont mises en œuvre par les artistes interprètes ou exécutants ou les producteurs de phonogrammes dans le cadre de l'exercice de leurs droits en vertu du présent traité et qui restreignent l'accomplissement, à l'égard de leurs interprétations ou exécutions ou de leurs phonogrammes, d'actes qui ne sont pas autorisés par les artistes interprètes ou exécutants ou les producteurs de phonogrammes concernés ou permis par la loi ».
L'article 19, alinéa 1er du Traité oblige les Parties contractantes à « prévoir des sanctions juridiques appropriées et efficaces contre toute personne qui accomplit l'un des actes suivants en sachant, ou, pour ce qui relève des sanctions civiles, en ayant des raisons valables de penser que cet acte va entraîner, permettre, faciliter ou dissimuler une atteinte à un droit prévu par le présent traité:
1º supprimer ou modifier, sans y être habilitée, toute information relative au régime des droits se présentant sous forme électronique;
2º distribuer, importer aux fins de distribution, radiodiffuser, communiquer au public ou mettre à la disposition du public, sans y être habilitée, des interprétations ou exécutions, des copies d'interprétations ou exécutions fixées ou des exemplaires de phonogrammes en sachant que des informations relatives au régime des droits se présentant sous forme électronique ont été supprimées ou modifiées sans autorisation ».
L'article 19, alinéa 2 définit l'expression « information sur le régime des droits » comme les « informations permettant d'identifier l'artiste interprète ou exécutant, l'interprétation ou exécution, le producteur du phonogramme, le phonogramme, le titulaire de tout droit sur l'interprétation ou exécution ou sur le phonogramme ou des informations sur les conditions et modalités d'utilisation de l'interprétation ou exécution ou du phonogramme, et de tout numéro ou code représentant ces informations, lorsque l'un quelconque de ces éléments d'information est joint à la copie d'une interprétation ou exécution fixée ou à l'exemplaire d'un phonogramme ou apparaît en relation avec la communication au public ou la mise à disposition du public d'une interprétation ou exécution fixée d'un phonogramme ».
S'agissant de l'article 12 du WCT, la Conférence diplomatique a adopté une déclaration commune, comportant des dispositions similaires à celles de l'article 19 du WPPT. La première partie de cette déclaration stipule qu' « il est entendu que l'expression « atteinte à un droit prévu par le présent traité ou la Convention de Berne » vise aussi bien les droits exclusifs que les droits à rémunération ». La seconde, quant à elle, dit en substance qu' « il est entendu en outre que les Parties contractantes ne se fonderont pas sur cet article pour concevoir ou mettre en œuvre un régime des droits qui ait pour effet d'imposer des formalités non permises en vertu de la Convention de Berne ou du présent traité, interdisant le libre mouvement des marchandises ou empêchant la jouissance des droits reconnus par le présent traité ». La Conférence diplomatique a annoncé que la Déclaration susmentionnée était applicable mutatis mutandis à l'article 19 du WPPT.
Au plan européen, la directive 2001/29/CE met en œuvre les articles 18 et 19 du WPPT, plus précisément dans les articles 6 et 7 de cette directive. Sur le plan belge, la loi du 22 mai 2005 transposant la directive 2001/29/CE prévoit d'insérer au Chapitre VIII de la loi sur le droit d'auteur une section 1bis intitulée « Protection juridique des équipements techniques et information relative à la gestion des droits ».
Article 20
L'article 20 du Traité énonce que « la jouissance et l'exercice des droits prévus dans le présent traité ne sont subordonnés à aucune formalité ».
Article 21
Cet article traite de la possibilité d'émettre des réserves à l'égard du Traité. Il stipule qu'il n'est pas possible de faire des réserves à l'égard du WPPT, sauf dans le cas prévu à l'article 15, troisième alinéa.
Article 22
L'article 22, alinéa 1er du WPPT prévoit, de manière générale, une application mutatis mutandis de l'article 18 de la Convention de Berne, alors que l'article 22, alinéa 2 permet aux Parties contractantes de limiter l'application de l'article 5 traitant des droits moraux aux interprétations ou exécutions qui ont eu lieu après l'entrée en vigueur du Traité à leur égard.
Article 23
L'article 23 est constitué de deux alinéas. Le premier est la version mutatis mutandis de l'article 36, alinéa 1er de la Convention de Berne. Il stipule que « les Parties contractantes s'engagent à adopter, en conformité avec leur système juridique, les mesures nécessaires pour assurer l'application du présent traité ». Le second alinéa est la version mutatis mutandis de la première phrase de l'article 41, 1 de l'Accord sur les ADPIC. Il dit en substance que « les Parties contractantes feront en sorte que leur législation comporte des procédures destinées à faire respecter les droits prévus par le présent traité, de manière à permettre une action efficace contre tout acte qui porterait atteinte à ces droits, y compris des mesures propres à prévenir rapidement toute atteinte et des mesures propres à éviter toute atteinte ultérieure ».
Articles 24 à 33
Les articles 24 à 33 contiennent les dispositions administratives et finales du Traité et portent sur des questions telles que l'Assemblée des Parties contractantes, le Bureau international, les conditions à remplir pour devenir partie au Traité, la signature du Traité, son entrée en vigueur, la date effective de la prise d'effet des obligations découlant du Traité, la dénonciation de celui-ci, les langues du Traité et son dépositaire.
De manière générale, on peut affirmer que ces dispositions sont identiques ou semblables aux dispositions des autres traités de l'OMPI relatifs aux mêmes matières. Seules deux caractéristiques spécifiques méritent d'être soulignées: la possibilité pour les organisations intergouvernementales de devenir parties au Traité et le nombre d'instruments de ratification ou d'adhésion requis pour l'entrée en vigueur du Traité.
L'article 26 du Traité définit les conditions à remplir pour devenir partie au Traité. L'article 26, alinéa 1er prescrit que « tout État membre de l'OMPI peut devenir partie au présent traité ». L'article 26, alinéa 2 dit en substance que « l'Assemblée peut décider d'autoriser à devenir partie au présent traité toute organisation intergouvernementale qui déclare qu'elle a compétence et dispose d'une législation propre liant tous ses États membres, en ce qui concerne les questions régies par le présent traité et qu'elle a été dûment autorisée, conformément à ses procédures internes, à devenir partie au présent traité ». L'article 26, alinéa 3 énonce enfin que « la Communauté européenne, ayant fait la déclaration visée à l'alinéa précédent lors de la conférence diplomatique qui a adopté le présent traité, peut devenir partie au présent traité ».
Le nombre d'actes de ratification ou d'adhésion requis pour l'entrée en vigueur des traités administrés par l'OMPI est habituellement relativement peu élevé. Il est généralement fixé à 5. L'article 29 du WPPT prévoit toutefois un nombre d'instruments de ratification ou d'adhésion bien supérieur, à savoir 30.
Le ministre des Affaires étrangères,
Karel DE GUCHT
Le ministre de l'Économie,
Marc VERWILGHEN.
Roi des Belges,
À tous, présents et à venir,
Salut.
Sur la proposition de Notre ministre des Affaires étrangères et de Notre ministre de l'Economie,
Nous avons arrêté et arrêtons:
Notre ministre des Affaires étrangères et Notre ministre de l'Economie sont chargés de présenter, en Notre nom, aux Chambres législatives et de déposer au Sénat le projet de loi dont la teneur suit:
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.
Art. 2
Le Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, sortira son plein et entier effet.
Art. 3
Le Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, sortira son plein et entier effet.
Donné à Bruxelles, le 9 décembre 2005.
ALBERT
Par le Roi:
Le ministre des Affaires étrangères,
Karel DE GUCHT.
Le ministre de l'Economie,
Marc VERWILGHEN.
de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996.
PRÉAMBULE
Les Parties contractantes,
Désireuses de développer et d'assurer la protection des droits des auteurs sur leurs œuvres littéraires et artistiques d'une manière aussi efficace et uniforme que possible,
Reconnaissant la nécessité d'instituer de nouvelles règles internationales et de préciser l'interprétation de certaines règles existantes pour apporter des réponses appropriées aux questions soulevées par l'évolution constatée dans les domaines économique, social, culturel et technique,
Reconnaissant que l'évolution et la convergence des techniques de l'information et de la communication ont une incidence considérable sur la création et l'utilisation des œuvres littéraires et artistiques,
Soulignant l'importance exceptionnelle que revêt la protection au titre du droit d'auteur pour l'encouragement de la création littéraire et artistique,
Reconnaissant la nécessité de maintenir un équilibre entre les droits des auteurs et l'intérêt public général, notamment en matière d'enseignement, de recherche et d'accès à l'information, telle qu'elle ressort de la Convention de Berne,
Sont convenues de ce qui suit:
Article premier
Rapports avec la Convention de Berne
1) Le présent traité constitue un arrangement particulier au sens de l'article 20 de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques, en ce qui concerne les Parties contractantes qui sont des pays membres de l'Union instituée par cette convention. Il n'a aucun lien avec d'autres traités que la Convention de Berne et s'applique sans préjudice des droits et obligations découlant de tout autre traité.
2) Aucune disposition du présent traité n'emporte dérogation aux obligations qu'ont les Parties contractantes les unes à l'égard des autres en vertu de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques.
3) Dans le présent traité, il faut entendre par « Convention de Berne » l'Acte de Paris du 24 juillet 1971 de la Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques.
4) Les Parties contractantes doivent se conformer aux articles 1er à 21 et à l'annexe de la Convention de Berne.
Article 2
Étendue de la protection au titre du droit d'auteur
La protection au titre du droit d'auteur s'étend aux expressions et non aux idées, procédures, méthodes de fonctionnement ou concepts mathématiques en tant que tels.
Article 3
Application des articles 2 à 6 de la Convention de Berne
Les Parties contractantes appliquent mutatis mutandis les dispositions des articles 2 à 6 de la Convention de Berne dans le cadre de la protection prévue par le présent traité.
Article 4
Programmes d'ordinateur
Les programmes d'ordinateur sont protégés en tant qu'œuvres littéraires au sens de l'article 2 de la Convention de Berne. La protection prévue s'applique aux programmes d'ordinateur quel qu'en soit le mode ou la forme d'expression.
Article 5
Compilations de données (bases de données)
Les compilations de données ou d'autres éléments, sous quelque forme que ce soit, qui, par le choix ou la disposition des matières, constituent des créations intellectuelles sont protégées comme telles. Cette protection ne s'étend pas aux données ou éléments eux-mêmes et elle est sans préjudice de tout droit d'auteur existant sur les données ou éléments contenus dans la compilation.
Article 6
Droit de distribution
1) Les auteurs d'œuvres littéraires et artistiques jouissent du droit exclusif d'autoriser la mise à la disposition du public de l'original et d'exemplaires de leurs œuvres par la vente ou tout autre transfert de propriété.
2) Aucune disposition du présent traité ne porte atteinte à la faculté qu'ont les Parties contractantes de déterminer les conditions éventuelles dans lesquelles l'épuisement du droit prévu à l'alinéa 1) s'applique après la première vente ou autre opération de transfert de propriété de l'original ou d'un exemplaire de l'œuvre, effectuée avec l'autorisation de l'auteur.
Article 7
Droit de location
1) Les auteurs
i) de programmes d'ordinateur,
ii) d'œuvres cinématographiques et
iii) d'œuvres incorporées dans des phonogrammes telles que définies dans la législation nationale des Parties contractantes,
jouissent du droit exclusif d'autoriser la location commerciale au public de l'original ou d'exemplaires de leurs œuvres.
2) L'alinéa 1er n'est pas applicable,
i) en ce qui concerne les programmes d'ordinateur, lorsque le programme lui-même n'est pas l'objet essentiel de la location et,
ii) en ce qui concerne les œuvres cinématographiques, à moins que la location commerciale n'ait mené à la réalisation largement répandue d'exemplaires de ces œuvres, qui compromette de manière substantielle le droit exclusif de reproduction.
3) Nonobstant les dispositions de l'alinéa 1), une Partie contractante qui appliquait au 15 avril 1994 et continue d'appliquer un système de rémunération équitable des auteurs pour la location d'exemplaires de leurs œuvres incorporées dans des phonogrammes peut maintenir ce système à condition que la location commerciale d'œuvres incorporées dans des phonogrammes ne compromette pas de manière substantielle le droit exclusif de reproduction des auteurs.
Article 8
Droit de communication au public
Sans préjudice des dispositions des articles 11, alinéa 1), 2º), 11bis, alinéa 1), 1º) et 2º), 11ter, alinéa 1), 2º), 14 alinéa 1), 2º) et 14bis, alinéa 1) de la Convention de Berne, les auteurs d'œuvres littéraires et artistiques jouissent du droit exclusif d'autoriser toute communication au public de leurs œuvres par fil ou sans fil, y compris la mise à la disposition du public de leurs œuvres de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit de manière individualisée.
Article 9
Durée de la protection des œuvres photographiques
En ce qui concerne les œuvres photographiques, les Parties contractantes n'appliquent pas les dispositions de l'article 7, alinéa 4), de la Convention de Berne.
Article 10
Limitations et exceptions
1) Les Parties contractantes peuvent prévoir, dans leur législation, d'assortir de limitations ou d'exceptions les droits conférés aux auteurs d'œuvres littéraires et artistiques en vertu du présent traité dans certains cas spéciaux où il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur.
2) En appliquant la Convention de Berne, les Parties contractantes doivent restreindre toutes limitations ou exceptions dont elles assortissent les droits prévus dans ladite convention à certains cas spéciaux où il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur.
Article 11
Obligations relatives aux mesures techniques
Les Parties contractantes doivent prévoir une protection juridique appropriée et des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques efficaces qui sont mises en œuvre par les auteurs dans le cadre de l'exercice de leurs droits en vertu du présent traité ou de la Convention de Berne et qui restreignent l'accomplissement, à l'égard de leurs œuvres, d'actes qui ne sont pas autorisés par les auteurs concernés ou permis par la loi.
Article 12
Obligations relatives à l'information sur le régime des droits
1) Les Parties contractantes doivent prévoir des sanctions juridiques appropriées et efficaces contre toute personne qui accomplit l'un des actes suivants en sachant, ou, pour ce qui relève des sanctions civiles, en ayant des raisons valables de penser que cet acte va entraîner, permettre, faciliter ou dissimuler une atteinte à un droit prévu par le présent traité ou la Convention de Berne:
i) supprimer ou modifier, sans y être habilitée, toute information relative au régime des droits se présentant sous forme électronique;
ii) distribuer, importer aux fins de distribution, radiodiffuser ou communiquer au public, sans y être habilitée, des œuvres ou des exemplaires d'œuvres en sachant que des informations relatives au régime des droits se présentant sous forme électronique ont été supprimées ou modifiées sans autorisation.
2) Dans le présent article, l'expression « information sur le régime des droits » s'entend des informations permettant d'identifier l'œuvre, l'auteur de l'œuvre, le titulaire de tout droit sur l'œuvre ou des informations sur les conditions et modalités d'utilisation de l'œuvre, et de tout numéro ou code représentant ces informations, lorsque l'un quelconque de ces éléments d'information est joint à l'exemplaire d'une œuvre ou apparaît en relation avec la communication d'une œuvre au public.
Article 13
Application dans le temps
Les Parties contractantes appliquent les dispositions de l'article 18 de la Convention de Berne en ce qui concerne l'ensemble de la protection prévue dans le présent traité.
Article 14
Dispositions relatives à la sanction des droits
1) Les Parties contractantes s'engagent à adopter, en conformité avec leur système juridique, les mesures nécessaires pour assurer l'application du présent traité.
2) Les Parties contractantes feront en sorte que leur législation comporte des procédures destinées à faire respecter les droits prévus par le présent traité, de manière à permettre une action efficace contre tout acte qui porterait atteinte à ces droits, y compris des mesures propres à prévenir rapidement toute atteinte et des mesures propres à éviter toute atteinte ultérieure.
Article 15
Assemblée
1) a) Les Parties contractantes ont une Assemblée.
b) Chaque Partie contractante est représentée par un délégué, qui peut être assisté de suppléants, de conseillers et d'experts.
c) Les dépenses de chaque délégation sont supportées par la Partie contractante qui l'a désignée. L'Assemblée peut demander à l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (ci-après dénommée « OMPI ») d'accorder une assistance financière pour faciliter la participation de délégations des Parties contractantes qui sont considérées comme des pays en développement conformément à la pratique établie de l'Assemblée générale des Nations Unies ou qui sont des pays en transition vers une économie de marché.
2) a) L'Assemblée traite des questions concernant le maintien et le développement du présent traité ainsi que son application et son fonctionnement.
b) L'Assemblée s'acquitte du rôle qui lui est attribué aux termes de l'article 17, 2), en examinant la possibilité d'autoriser certaines organisations intergouvernementales à devenir parties au présent traité.
c) L'Assemblée décide de la convocation de toute conférence diplomatique de révision du présent traité et donne les instructions nécessaires au directeur général de l'OMPI pour la préparation de celle-ci.
3) a) Chaque Partie contractante qui est un État dispose d'une voix et vote uniquement en son propre nom.
b) Toute Partie contractante qui est une organisation intergouvernementale peut participer au vote, à la place de ses États membres, avec un nombre de voix égal au nombre de ses États membres qui sont parties au présent traité. Aucune organisation intergouvernementale ne participe au vote si l'un de ses États membres exerce son droit de vote, et inversement.
4) L'Assemblée se réunit en session ordinaire une fois tous les deux ans sur convocation du directeur général de l'OMPI.
5) L'Assemblée établit son règlement intérieur, y compris en ce qui concerne sa convocation en session extraordinaire, les règles relatives au quorum et, sous réserve des dispositions du présent traité, la majorité requise pour divers types de décisions.
Article 16
Bureau international
Le Bureau international de l'OMPI s'acquitte des tâches administratives concernant le traité.
Article 17
Conditions à remplir pour devenir partie au traité
1) Tout État membre de l'OMPI peut devenir partie au présent traité.
2) L'Assemblée peut décider d'autoriser à devenir partie au présent traité toute organisation intergouvernementale qui déclare qu'elle a compétence, et dispose d'une législation propre liant tous ses États membres, en ce qui concerne les questions régies par le présent traité et qu'elle a été dûment autorisée, conformément à ses procédures internes, à devenir partie au présent traité.
3) La Communauté européenne, ayant fait la déclaration visée à l'alinéa précédent lors de la conférence diplomatique qui a adopté le présent traité, peut devenir partie au présent traité.
Article 18
Droits et obligations découlant du traité
Sauf disposition contraire expresse du présent traité, chaque Partie contractante jouit de tous les droits et assume toutes les obligations découlant du présent traité.
Article 19
Signature du traité
Le présent traité est ouvert à la signature jusqu'au 31 décembre 1997 et peut être signé par tout État membre de l'OMPI et par la Communauté européenne.
Article 20
Entrée en vigueur du traité
Le présent traité entre en vigueur trois mois après que 30 instruments de ratification ou d'adhésion ont été déposés auprès du directeur général de l'OMPI par des États.
Article 21
Date de la prise d'effet des obligations découlant du traité
Le présent traité lie
i) les 30 États visés à l'article 20 à compter de la date à laquelle le présent traité est entré en vigueur;
ii) tous les autres États à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l'État a déposé son instrument auprès du directeur général de l'OMPI;
iii) la Communauté européenne à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le dépôt de son instrument de ratification ou d'adhésion si cet instrument a été déposé après l'entrée en vigueur du présent traité conformément à l'article 20, ou de trois mois suivant l'entrée en vigueur du présent traité si cet instrument a été déposé avant l'entrée en vigueur du présent traité;
iv) toute autre organisation intergouvernementale qui est autorisée à devenir partie au présent traité, à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le dépôt de son instrument d'adhésion.
Article 22
Exclusion des réserves au traité
Il n'est admis aucune réserve au présent traité.
Article 23
Dénonciation du traité
Toute Partie contractante peut dénoncer le présent traité par une notification adressée au directeur général de l'OMPI. La dénonciation prend effet un an après la date à laquelle le directeur général de l'OMPI a reçu la notification.
Article 24
Langues du traité
1) Le présent traité est signé en un seul exemplaire original en langues française, anglaise, arabe, chinoise, espagnole et russe, toutes ces versions faisant également foi.
2) Un texte officiel dans toute langue autre que celles qui sont visées à l'alinéa 1) est établi par le directeur général de l'OMPI à la demande d'une partie intéressée, après consultation de toutes les parties intéressées. Aux fins du présent alinéa, on entend par « partie intéressée » tout État membre de l'OMPI dont la langue officielle ou l'une des langues officielles est en cause, ainsi que la Communauté européenne, et toute autre organisation intergouvernementale qui peut devenir partie au présent traité, si l'une de ses langues officielles est en cause.
Article 25
Dépositaire
Le directeur général de l'OMPI est le dépositaire du présent traité.
Déclarations communes
Concernant l'article 1er, 4):
Le droit de reproduction énoncé à l'article 9 de la Convention de Berne et les exceptions dont il peut être assorti s'appliquent pleinement dans l'environnement numérique, en particulier à l'utilisation des œuvres sous forme numérique. Il est entendu que le stockage d'une œuvre protégée sous forme numérique sur un support électronique constitue une reproduction au sens de l'article 9 de la Convention de Berne.
Concernant l'article 3:
Il est entendu qu' aux fins de l'article 3 du présent traité, l'expression « pays de l'Union » qui figure dans les articles 2 à 6 de la Convention de Berne désigne une Partie contractante du présent traité, pour ce qui est d'appliquer ces articles de la Convention de Berne à la protection prévue dans le présent traité. Il est aussi entendu que l'expression « pays étranger à l'Union » qui figure dans ces articles de la Convention de Berne désigne, dans les mêmes circonstances, un pays qui n'est pas Partie contractante du présent traité, et que les mots « la présente Convention » qui figurent à l'article 2, 8), à l'article 2bis, 2), 3, 4 et 5 de la Convention de Berne désignent la Convention de Berne et le présent traité. Enfin, il est entendu que dans les articles 3 à 6 de la convention les mots « ressortissant à l'un des pays de l'Union » désignent, lorsque ces articles sont appliqués au présent traité, en ce qui concerne une organisation intergouvernementale qui est Partie contractante du présent traité, un ressortissant d'un des pays qui est membre de cette organisation.
Concernant l'article 4:
L'étendue de la protection prévue pour les programmes d'ordinateur au titre de l'article 4 du présent traité, compte tenu de l'article 2, est compatible avec l'article 2 de la Convention de Berne et concorde avec les dispositions pertinentes de l'Accord sur les ADPIC.
Concernant l'article 5:
L'étendue de la protection prévue pour les compilations de données (bases de données) au titre de l'article 5 du présent traité, compte tenu de l'article 2, est compatible avec l'article 2 de la Convention de Berne et concorde avec les dispositions pertinentes de l'Accord sur les ADPIC.
Concernant les articles 6 et 7:
Aux fins de ces articles, les expressions « exemplaires » et « original et exemplaires », dans le contexte du droit de distribution et du droit de location prévus par ces articles, désignent exclusivement les exemplaires fixés qui peuvent être mis en circulation en tant qu'objets tangibles.
Concernant l'article 7:
Il est entendu que l'obligation prévue à l'article 7, 1) ne consiste pas à exiger d'une Partie contractante qu'elle prévoie un droit exclusif de location commerciale pour les auteurs qui, en vertu de la législation de cette Partie contractante, ne jouissent pas de droits sur les phonogrammes. Il est entendu que cette obligation est compatible avec l'article 14, 4) de l'Accord sur les ADPIC.
Concernant l'article 8:
Il est entendu que la simple fourniture d'installations destinées à permettre ou à réaliser une communication ne constitue pas une communication au public au sens du présent traité ou de la Convention de Berne. Il est entendu en outre que rien, dans l'article 8, n'interdit à une Partie contractante d'appliquer l'article 11bis, 2).
Concernant l'article 10:
Il est entendu que les dispositions de l'article 10 permettent aux Parties contractantes de maintenir et d'étendre de manière adéquate dans l'environnement numérique les limitations et exceptions prévues dans leurs législations nationales qui ont été considérées comme acceptables en vertu de la Convention de Berne. De même, ces dispositions doivent être interprétées comme permettant aux Parties contractantes de concevoir de nouvelles exceptions et limitations qui soient appropriées dans l'environnement des réseaux numériques.
Il est aussi entendu que l'article 10, 2) ne réduit ni n'étend le champ d'application des limitations et exceptions permises par la Convention de Berne.
Concernant l'article 12:
Il est entendu que l'expression « atteinte à un droit prévu par le présent traité ou la Convention de Berne » vise aussi bien les droits exclusifs que les droits à rémunération.
Il est entendu en outre que les Parties contractantes ne se fonderont pas sur cet article pour concevoir ou mettre en œuvre un régime des droits qui ait pour effet d'imposer des formalités non permises en vertu de la Convention de Berne ou du présent traité, interdisant le libre mouvement des marchandises ou empêchant la jouissance des droits reconnus par le présent traité.
de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996.
PRÉAMBULE
Les Parties contractantes,
Désireuses de développer et d'assurer la protection des droits des artistes interprètes ou exécutants et des producteurs de phonogrammes d'une manière aussi efficace et uniforme que possible,
Reconnaissant la nécessité d'instituer de nouvelles règles internationales pour apporter des réponses appropriées aux questions soulevées par l'évolution constatée dans les domaines économique, social, culturel et technique,
Reconnaissant que l'évolution et la convergence des techniques de l'information et de la communication ont une incidence considérable sur la production et l'utilisation des interprétations ou exécutions et des phonogrammes,
Reconnaissant la nécessité de maintenir un équilibre entre les droits des artistes interprètes ou exécutants et des producteurs de phonogrammes et l'intérêt public général, notamment en matière d'enseignement, de recherche et d'accès à l'information,
Sont convenues de ce qui suit:
CHAPITRE PREMIER
DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Article premier
Rapports avec d'autres conventions
1) Aucune disposition du présent traité n'emporte dérogation aux obligations qu'ont les Parties contractantes les unes à l'égard des autres en vertu de la Convention internationale sur la protection des artistes interprètes ou exécutants, des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion, faite à Rome le 26 octobre 1961 (ci-après la « Convention de Rome »).
2) La protection prévue par le présent traité laisse intacte et n'affecte en aucune façon la protection du droit d'auteur sur les œuvres littéraires et artistiques. En conséquence, aucune disposition du présent traité ne pourra être interprétée comme portant atteinte à cette protection.
3) Le présent traité n'a aucun lien avec d'autres traités et s'applique sans préjudice des droits et obligations découlant de tout autre traité.
Article 2
Définitions
Aux fins du présent traité, on entend par:
a) « artistes interprètes ou exécutants » les acteurs, chanteurs, musiciens, danseurs et autres personnes qui représentent, chantent, récitent, déclament, jouent, interprètent ou exécutent de toute autre manière des œuvres littéraires ou artistiques ou des expressions du folklore;
b) « phonogramme » la fixation des sons provenant d'une interprétation ou exécution ou d'autres sons, ou d'une représentation de sons autre que sous la forme d'une fixation incorporée dans une œuvre cinématographique ou une autre œuvre audiovisuelle;
c) « fixation » l'incorporation de sons, ou des représentations de ceux-ci, dans un support qui permette de les percevoir, de les reproduire ou de les communiquer à l'aide d'un dispositif;
d) « producteur d'un phonogramme » la personne physique ou morale qui prend l'initiative et assume la responsabilité de la première fixation des sons provenant d'une interprétation ou exécution ou d'autres sons, ou des représentations de sons;
e) « publication » d'une interprétation ou exécution fixée ou d'un phonogramme la mise à la disposition du public de copies de l'interprétation ou exécution fixée ou d'exemplaires du phonogramme avec le consentement du titulaire des droits, et à condition que les copies ou exemplaires soient mis à la disposition du public en quantité suffisante;
f) « radiodiffusion » la transmission sans fil de sons ou d'images et de sons, ou des représentations de ceux-ci, aux fins de réception par le public; ce terme désigne aussi une transmission de cette nature effectuée par satellite; la transmission de signaux cryptés est assimilée à la « radiodiffusion » lorsque les moyens de décryptage sont fournis au public par l'organisme de radiodiffusion ou avec son consentement;
g) « communication au public » d'une interprétation ou exécution ou d'un phonogramme la transmission au public, par tout moyen autre que la radiodiffusion, des sons provenant d'une interprétation ou exécution ou des sons ou représentations de sons fixés sur un phonogramme. Aux fins de l'article 15, le terme « communication au public » comprend aussi le fait de rendre audibles par le public les sons ou représentations de sons fixés sur un phonogramme.
Article 3
Bénéficiaires de la protection prévue par le présent traité
1) Les Parties contractantes accordent la protection prévue par le présent traité aux artistes interprètes ou exécutants et aux producteurs de phonogrammes qui sont ressortissants d'autres Parties contractantes.
2) Par « ressortissants d'autres Parties contractantes » il faut entendre les artistes interprètes ou exécutants ou les producteurs de phonogrammes qui répondraient aux critères requis pour bénéficier de la protection prévue par la Convention de Rome si toutes les Parties contractantes dans le cadre du présent traité étaient des États contractants au sens de cette convention. En ce qui concerne ces critères de protection, les Parties contractantes appliquent les définitions pertinentes de l'article 2 du présent traité.
3) Toute Partie contractante qui fait usage de la faculté prévue à l'article 5, 3), de la Convention de Rome ou, aux fins de l'article 5 de cette convention, à son article 17 adresse une notification dans les conditions prévues dans ces dispositions au directeur général de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).
Article 4
Traitement national
1) Chaque Partie contractante accorde aux ressortissants d'autres Parties contractantes, au sens de l'article 3, 2), le traitement qu'elle accorde à ses propres ressortissants en ce qui concerne les droits exclusifs expressément reconnus dans le présent traité et le droit à rémunération équitable prévu à l'article 15 de ce traité.
2) L'obligation prévue à l'alinéa 1) ne s'applique pas dans la mesure où une autre Partie contractante fait usage des réserves autorisées aux termes de l'article 15, 3), du présent traité.
CHAPITRE II
DROITS DES ARTISTES INTERPRÈTES OU EXÉCUTANTS
Article 5
Droit moral des artistes interprètes ou exécutants
1) Indépendamment de ses droits patrimoniaux, et même après la cession de ces droits, l'artiste interprète ou exécutant conserve le droit, en ce qui concerne ses interprétations ou exécutions sonores vivantes ou ses interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes, d'exiger d'être mentionné comme tel, sauf lorsque le mode d'utilisation de l'interprétation ou exécution impose l'omission de cette mention, et de s'opposer à toute déformation, mutilation ou autre modification de ces interprétations ou exécutions préjudiciable à sa réputation.
2) Les droits reconnus à l'artiste interprète ou exécutant en vertu de l'alinéa précédent sont, après sa mort, maintenus au moins jusqu'à l'extinction des droits patrimoniaux et exercés par les personnes ou institutions auxquelles la législation de la Partie contractante où la protection est réclamée donne qualité. Toutefois, les Parties contractantes dont la législation, en vigueur au moment de la ratification du présent traité ou de l'adhésion à celui-ci, ne contient pas de dispositions assurant la protection après la mort de l'artiste interprète ou exécutant de tous les droits reconnus en vertu de l'alinéa précédent ont la faculté de prévoir que certains de ces droits ne sont pas maintenus après la mort de l'artiste interprète ou exécutant.
3) Les moyens de recours pour sauvegarder les droits reconnus dans le présent article sont réglés par la législation de la Partie contractante où la protection est réclamée.
Article 6
Droits patrimoniaux des artistes interprètes ou exécutants sur leurs interprétations ou exécutions non fixées
Les artistes interprètes ou exécutants jouissent du droit exclusif d'autoriser, en ce qui concerne leurs interprétations ou exécutions:
i) la radiodiffusion et la communication au public de leurs interprétations ou exécutions non fixées, sauf lorsque l'interprétation ou exécution est déjà une interprétation ou exécution radiodiffusée; et
ii) la fixation de leurs interprétations ou exécutions non fixées.
Article 7
Droit de reproduction
Les artistes interprètes ou exécutants jouissent du droit exclusif d'autoriser la reproduction directe ou indirecte de leurs interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit.
Article 8
Droit de distribution
1) Les artistes interprètes ou exécutants jouissent du droit exclusif d'autoriser la mise à la disposition du public de l'original et de copies de leurs interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes par la vente ou tout autre transfert de propriété.
2) Aucune disposition du présent traité ne porte atteinte à la faculté qu'ont les Parties contractantes de déterminer les conditions éventuelles dans lesquelles l'épuisement du droit énoncé à l'alinéa 1) s'applique après la première vente ou autre opération de transfert de propriété de l'original ou d'une copie de l'interprétation ou exécution fixée, effectuée avec l'autorisation de l'artiste interprète ou exécutant.
Article 9
Droit de location
1) Les artistes interprètes ou exécutants jouissent du droit exclusif d'autoriser la location commerciale au public de l'original et de copies de leurs interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes, selon la définition de la législation nationale des Parties contractantes, même après la distribution de ceux-ci par les artistes eux-mêmes ou avec leur autorisation.
2) Nonobstant les dispositions de l'alinéa 1), une Partie contractante qui appliquait au 15 avril 1994 et continue d'appliquer un système de rémunération équitable des artistes interprètes ou exécutants pour la location de copies de leurs interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes peut maintenir ce système à condition que la location commerciale de phonogrammes ne compromette pas de manière substantielle les droits exclusifs de reproduction des artistes interprètes ou exécutants.
Article 10
Droit de mettre à disposition des interprétations ou exécutions fixées
Les artistes interprètes ou exécutants jouissent du droit exclusif d'autoriser la mise à la disposition du public, par fil ou sans fil, de leurs interprétations ou exécutions fixées sur phonogrammes, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit individuellement.
CHAPITRE III
DROITS DES PRODUCTEURS DE PHONOGRAMMES
Article 11
Droit de reproduction
Les producteurs de phonogrammes jouissent du droit exclusif d'autoriser la reproduction directe ou indirecte de leurs phonogrammes, de quelque manière et sous quelque forme que ce soit.
Article 12
Droit de distribution
1) Les producteurs de phonogrammes jouissent du droit exclusif d'autoriser la mise à la disposition du public de l'original et d'exemplaires de leurs phonogrammes par la vente ou tout autre transfert de propriété.
2) Aucune disposition du présent traité ne porte atteinte à la faculté qu'ont les Parties contractantes de déterminer les conditions éventuelles dans lesquelles l'épuisement du droit énoncé à l'alinéa 1) s'applique après la première vente ou autre opération de transfert de propriété de l'original ou d'un exemplaire du phonogramme, effectuée avec l'autorisation du producteur du phonogramme.
Article 13
Droit de location
1) Les producteurs de phonogrammes jouissent du droit exclusif d'autoriser la location commerciale au public de l'original et d'exemplaires de leurs phonogrammes, même après la distribution de ceux-ci par les producteurs eux-mêmes ou avec leur autorisation.
2) Nonobstant les dispositions de l'alinéa 1), une Partie contractante qui appliquait au 15 avril 1994 et continue d'appliquer un système de rémunération équitable des producteurs de phonogrammes pour la location d'exemplaires de leurs phonogrammes peut maintenir ce système à condition que la location commerciale de phonogrammes ne compromette pas de manière substantielle les droits exclusifs de reproduction des producteurs de phonogrammes.
Article 14
Droit de mettre à disposition des phonogrammes
Les producteurs de phonogrammes jouissent du droit exclusif d'autoriser la mise à la disposition du public, par fil ou sans fil, de leurs phonogrammes de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit individuellement.
CHAPITRE IV
DISPOSITIONS COMMUNES
Article 15
Droit à rémunération au titre de la radiodiffusion et de la communication au public
1) Les artistes interprètes ou exécutants et les producteurs de phonogrammes ont droit à une rémunération équitable et unique lorsque des phonogrammes publiés à des fins de commerce sont utilisés directement ou indirectement pour la radiodiffusion ou pour une communication quelconque au public.
2) Les Parties contractantes peuvent prévoir dans leur législation nationale que la rémunération équitable unique doit être réclamée à l'utilisateur par l'artiste interprète ou exécutant ou par le producteur du phonogramme, ou par les deux. Les Parties contractantes peuvent adopter des dispositions législatives fixant les conditions de répartition de la rémunération équitable unique entre les artistes interprètes ou exécutants et les producteurs de phonogrammes faute d'accord entre les intéressés.
3) Toute Partie contractante peut déclarer, dans une notification déposée auprès du directeur général de l'OMPI, qu'elle n'appliquera les dispositions de l'alinéa 1) qu'à l'égard de certaines utilisations, ou qu'elle en limitera l'application de toute autre manière, ou encore qu'elle n'appliquera aucune de ces dispositions.
4) Aux fins du présent article, les phonogrammes mis à la disposition du public, par fil ou sans fil, de manière que chacun puisse y avoir accès de l'endroit et au moment qu'il choisit individuellement sont réputés avoir été publiés à des fins de commerce.
Article 16
Limitations et exceptions
1) Les Parties contractantes ont la faculté de prévoir dans leur législation nationale, en ce qui concerne la protection des artistes interprètes ou exécutants et des producteurs de phonogrammes, des limitations ou exceptions de même nature que celles qui y sont prévues en ce qui concerne la protection du droit d'auteur sur les œuvres littéraires et artistiques.
2) Les Parties contractantes doivent restreindre toutes les limitations ou exceptions dont elles assortissent les droits prévus dans le présent traité à certains cas spéciaux où il n'est pas porté atteinte à l'exploitation normale de l'interprétation ou exécution ou du phonogramme ni causé de préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'artiste interprète ou exécutant ou du producteur du phonogramme.
Article 17
Durée de la protection
1) La durée de la protection à accorder aux artistes interprètes ou exécutants en vertu du présent traité ne doit pas être inférieure à une période de 50 ans à compter de la fin de l'année où l'interprétation ou exécution a été fixée sur un phonogramme.
2) La durée de la protection à accorder aux producteurs de phonogrammes en vertu du présent traité ne doit pas être inférieure à une période de 50 ans à compter de la fin de l'année où le phonogramme a été publié ou, à défaut d'une telle publication dans un délai de 50 ans à compter de la fixation du phonogramme, à compter de la fin de l'année de la fixation.
Article 18
Obligations relatives aux mesures techniques
Les Parties contractantes doivent prévoir une protection juridique appropriée et des sanctions juridiques efficaces contre la neutralisation des mesures techniques efficaces qui sont mises en œuvre par les artistes interprètes ou exécutants ou les producteurs de phonogrammes dans le cadre de l'exercice de leurs droits en vertu du présent traité et qui restreignent l'accomplissement, à l'égard de leurs interprétations ou exécutions ou de leurs phonogrammes, d'actes qui ne sont pas autorisés par les artistes interprètes ou exécutants ou les producteurs de phonogrammes concernés ou permis par la loi.
Article 19
Obligations relatives à l'information sur le régime des droits
1) Les Parties contractantes doivent prévoir des sanctions juridiques appropriées et efficaces contre toute personne qui accomplit l'un des actes suivants en sachant, ou, pour ce qui relève des sanctions civiles, en ayant des raisons valables de penser que cet acte va entraîner, permettre, faciliter ou dissimuler une atteinte à un droit prévu par le présent traité:
i) supprimer ou modifier, sans y être habilitée, toute information relative au régime des droits se présentant sous forme électronique;
ii) distribuer, importer aux fins de distribution, radiodiffuser, communiquer au public ou mettre à la disposition du public, sans y être habilitée, des interprétations ou exécutions, des copies d'interprétations ou exécutions fixées ou des exemplaires de phonogrammes en sachant que des informations relatives au régime des droits se présentant sous forme électronique ont été supprimées ou modifiées sans autorisation.
2) Dans le présent article, l'expression « information sur le régime des droits » s'entend des informations permettant d'identifier l'artiste interprète ou exécutant, l'interprétation ou exécution, le producteur du phonogramme, le phonogramme, le titulaire de tout droit sur l'interprétation ou exécution ou sur le phonogramme ou des informations sur les conditions et modalités d'utilisation de l'interprétation ou exécution ou du phonogramme, et de tout numéro ou code représentant ces informations, lorsque l'un quelconque de ces éléments d'information est joint à la copie d'une interprétation ou exécution fixée ou à l'exemplaire d'un phonogramme ou apparaît en relation avec la communication au public ou la mise à la disposition du public d'une interprétation ou exécution fixée ou d'un phonogramme.
Article 20
Formalités
La jouissance et l'exercice des droits prévus dans le présent traité ne sont subordonnés à aucune formalité.
Article 21
Réserves
Sauf dans le cas prévu à l'article 15, 3), aucune réserve au présent traité n'est admise.
Article 22
Application dans le temps
1) Les Parties contractantes appliquent les dispositions de l'article 18 de la Convention de Berne, mutatis mutandis, aux droits des artistes interprètes ou exécutants et des producteurs de phonogrammes prévus dans le présent traité.
2) Nonobstant les dispositions de l'alinéa 1), une Partie contractante peut limiter l'application de l'article 5 du présent traité aux interprétations ou exécutions qui ont eu lieu après l'entrée en vigueur du traité à son égard.
Article 23
Dispositions relatives à la sanction des droits
1) Les Parties contractantes s'engagent à adopter, en conformité avec leur système juridique, les mesures nécessaires pour assurer l'application du présent traité.
2) Les Parties contractantes feront en sorte que leur législation comporte des procédures destinées à faire respecter les droits prévus par le présent traité, de manière à permettre une action efficace contre tout acte qui porterait atteinte à ces droits, y compris des mesures propres à prévenir rapidement toute atteinte et des mesures propres à éviter toute atteinte ultérieure.
CHAPITRE V
DISPOSITIONS ADMINISTRATIVES ET CLAUSES FINALES
Article 24
Assemblée
1) a) Les Parties contractantes ont une Assemblée.
b) Chaque Partie contractante est représentée par un délégué, qui peut être assisté de suppléants, de conseillers et d'experts.
c) Les dépenses de chaque délégation sont supportées par la Partie contractante qui l'a désignée. L'Assemblée peut demander à l'OMPI d'accorder une assistance financière pour faciliter la participation de délégations des Parties contractantes qui sont considérées comme des pays en développement conformément à la pratique établie de l'Assemblée générale des Nations Unies ou qui sont des pays en transition vers une économie de marché.
2) a) L'Assemblée traite des questions concernant le maintien et le développement du présent traité ainsi que son application et son fonctionnement.
b) L'Assemblée s'acquitte du rôle qui lui est attribué aux termes de l'article 26, 2), en examinant la possibilité d'autoriser certaines organisations intergouvernementales à devenir parties au présent traité.
c) L'Assemblée décide de la convocation de toute conférence diplomatique de révision du présent traité et donne les instructions nécessaires au directeur général de l'OMPI pour la préparation de celle-ci.
3) a) Chaque Partie contractante qui est un État dispose d'une voix et vote uniquement en son propre nom.
b) Toute Partie contractante qui est une organisation intergouvernementale peut participer au vote, à la place de ses États membres, avec un nombre de voix égal au nombre de ses États membres qui sont parties au présent traité. Aucune organisation intergouvernementale ne participe au vote si l'un de ses États membres exerce son droit de vote, et inversement.
4) L'Assemblée se réunit en session ordinaire une fois tous les deux ans sur convocation du directeur général de l'OMPI.
5) L'Assemblée établit son règlement intérieur, y compris en ce qui concerne sa convocation en session extraordinaire, les règles relatives au quorum et, sous réserve des dispositions du présent traité, la majorité requise pour divers types de décisions.
Article 25
Bureau international
Le Bureau international de l'OMPI s'acquitte des tâches administratives concernant le traité.
Article 26
Conditions à remplir pour devenir partie au traité
1) Tout État membre de l'OMPI peut devenir partie au présent traité.
2) L'Assemblée peut décider d'autoriser à devenir partie au présent traité toute organisation intergouvernementale qui déclare qu'elle a compétence, et dispose d'une législation propre liant tous ses États membres, en ce qui concerne les questions régies par le présent traité et qu'elle a été dûment autorisée, conformément à ses procédures internes, à devenir partie au présent traité.
3) La Communauté européenne, ayant fait la déclaration visée à l'alinéa précédent lors de la conférence diplomatique qui a adopté le présent traité, peut devenir partie au présent traité.
Article 27
Droits et obligations découlant du traité
Sauf disposition contraire expresse du présent traité, chaque Partie contractante jouit de tous les droits et assume toutes les obligations découlant du présent traité.
Article 28
Signature du traité
Le présent traité est ouvert à la signature jusqu'au 31 décembre 1997 et peut être signé par tout État membre de l'OMPI et par la Communauté européenne.
Article 29
Entrée en vigueur du traité
Le présent traité entre en vigueur trois mois après que 30 instruments de ratification ou d'adhésion ont été déposés auprès du directeur général de l'OMPI par des États.
Article 30
Date de la prise d'effet des obligations découlant du traité
Le présent traité lie:
i) les 30 États visés à l'article 29 à compter de la date à laquelle le présent traité est entré en vigueur;
ii) tous les autres États à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l'État a déposé son instrument auprès du directeur général de l'OMPI;
iii) la Communauté européenne à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le dépôt de son instrument de ratification ou d'adhésion si cet instrument a été déposé après l'entrée en vigueur du présent traité conformément à l'article 29, ou de trois mois suivant l'entrée en vigueur du présent traité si cet instrument a été déposé avant l'entrée en vigueur du présent traité;
iv) toute autre organisation intergouvernementale qui est autorisée à devenir partie au présent traité, à l'expiration d'un délai de trois mois suivant le dépôt de son instrument d'adhésion.
Article 31
Dénonciation du traité
Toute Partie contractante peut dénoncer le présent traité par une notification adressée au directeur général de l'OMPI. La dénonciation prend effet un an après la date à laquelle le directeur général a reçu la notification.
Article 32
Langues du traité
1) Le présent traité est signé en un seul exemplaire original en langues française, anglaise, arabe, chinoise, espagnole et russe, toutes ces versions faisant également foi.
2) Un texte officiel dans toute langue autre que celles qui sont visées à l'alinéa 1) est établi par le directeur général de l'OMPI à la demande d'une partie intéressée, après consultation de toutes les parties intéressées. Aux fins du présent alinéa, on entend par « partie intéressée » tout État membre de l'OMPI dont la langue officielle ou l'une des langues officielles est en cause, ainsi que la Communauté européenne, et toute autre organisation intergouvernementale qui peut devenir partie au présent traité, si l'une de ses langues officielles est en cause.
Article 33
Dépositaire
Le directeur général de l'OMPI est le dépositaire du présent traité.
Déclaration communes
Concernant l'article 1er:
Il est entendu que l'article 1er, 2) précise la relation entre les droits existant sur les phonogrammes en vertu du présent traité et le droit d'auteur sur les œuvres incorporées dans ces phonogrammes. Dans les cas où sont requises à la fois l'autorisation de l'auteur d'une œuvre incorporée dans le phonogramme et celle d'un artiste interprète ou exécutant ou d'un producteur possédant des droits sur le phonogramme, l'obligation d'avoir l'autorisation de l'auteur ne cesse pas d'exister du fait que l'autorisation de l'artiste interprète ou exécutant ou du producteur est également requise, et vice versa.
Il est également entendu qu'aucune disposition de l'article 1er, 2) n'empêche une Partie contractante de prévoir pour les artistes interprètes ou exécutants ou les producteurs de phonogrammes des droits exclusifs allant au-delà de ce que prévoit le présent traité.
Concernant l'article 2, b):
Il est entendu que la définition du phonogramme contenue à l'article 2, b) n'implique pas que l'incorporation dans une œuvre cinématographique ou une autre œuvre audiovisuelle ait une quelconque incidence sur les droits sur le phonogramme.
Concernant les articles 2, e), 8, 9, 12 et 13:
Aux fins de ces articles, les expressions « copies », « copies ou exemplaires » et « original et copies » dans le contexte du droit de distribution et du droit de location prévus par ces articles désignent exclusivement les copies ou exemplaires fixés qui peuvent être mis en circulation en tant qu'objets tangibles.
Concernant l'article 3:
Il est entendu que, appliquée au présent traité, l'expression « ressortissant d'un autre État contractant » figurant aux articles 5, a) et 16, a), iv) de la Convention de Rome renverra, à l'égard d'une organisation intergouvernementale qui est une Partie contractante du présent traité, au ressortissant d'un des pays membres de cette organisation.
Concernant l'article 3, 2):
Aux fins de l'application de l'article 3, 2), il est entendu que par fixation on entend la mise au point finale de la bande mère.
Concernant les articles 7, 11 et 16:
Le droit de reproduction énoncé aux articles 7 et 11 et les exceptions dont il peut être assorti en vertu de l'article 16 s'appliquent pleinement dans l'environnement numérique, en particulier à l'utilisation des interprétations et exécutions et des phonogrammes sous forme numérique. Il est entendu que le stockage d'une interprétation ou exécution protégée, ou d'un phonogramme protégé, sous forme numérique sur un support électronique constitue une reproduction au sens de ces articles.
Concernant l'article 15:
Il est entendu que l'article 15 n'apporte pas une solution définitive à la question du niveau des droits de radiodiffusion et de communication au public dont devraient jouir, à l'ère du numérique, les artistes interprètes ou exécutants et les producteurs de phonogrammes. Les délégations n'ayant pu parvenir à un consensus sur les propositions divergentes concernant les aspects de l'exclusivité à accorder dans certaines circonstances, ou les droits à reconnaître sans possibilité de réserves, elles ont renoncé pour le présent à régler la question.
Concernant l'article 15:
Il est entendu que l'article 15 n'empêche pas l'octroi du droit conféré par cet article aux artistes interprètes ou exécutants du folklore et aux producteurs de phonogrammes incorporant du folklore lorsque ces phonogrammes n'ont pas été publiés dans un but de profit commercial.
Concernant l'article 16:
La déclaration commune concernant l'article 10 (relatif aux limitations et exceptions) du Traité de l'OMPI sur le droit d'auteur est applicable mutatis mutandis à l'article 16 (relatif aux limitations et exceptions) du Traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes.
Concernant l'article 19:
La déclaration commune concernant l'article 12 (sur les obligations relatives à l'information sur le régime des droits) du Traité de l'OMPI sur le droit d'auteur est applicable mutatis mutandis à l'article 19 (sur les obligations relatives à l'information sur le régime des droits) du Traité de l'OMPI sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes.
Avant-projet de loi portant assentiment aux Actes internationaux suivants:
1º Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996.
2º Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996.
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.
Art. 2
Le Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, sortira son plein et entier effet.
Art. 3
Le Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, sortira son plein et entier effet.
39.048/2
Le CONSEIL D'ÉTAT, section de législation, deuxième chambre, saisi par le ministre des Affaires étrangères, le 6 septembre 2005, d'une demande d'avis, dans un délai de trente jours, sur un avant-projet de loi « portant assentiment aux Actes internationaux suivants:
1º Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996;
2º Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996 »;
a donné le 28 septembre 2005 l'avis suivant:
Comme la demande d'avis est introduite sur la base de l'article 84, § 1er, alinéa 1er, 1º, des lois coordonnées sur le Conseil d'État, tel qu'il est remplacé par la loi du 2 avril 2003, la section de législation limite son examen au fondement juridique de l'avant-projet, à la compétence de l'auteur de l'acte ainsi qu'à l'accomplissement des formalités préalables, conformément à l'article 84, § 3, des lois coordonnées précitées.
Sur ces trois points, l'avant-projet appelle les observations ci-après.
Examen du projet
L'exposé des motifs mentionne le projet de loi transposant la directive 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information. Étant donné que ce projet a été adopté, il faut viser la loi du 22 mai 2005 transposant en droit belge la directive européenne 2001/29/CE, précitée, de même que les dispositions pertinentes de celle-ci.
La chambre était composée de
M. Y. KREINS, président de chambre,
M. J. JAUMOTTE et Mme M. BAGUET, conseillers d'État,
M. H. BOSLY, assesseur de la section de législation,
Mme B. VIGNERON, greffier.
Le rapport a été présenté par M. J.-L. PAQUET, premier auditeur.
Le greffier, | Le président, |
B. VIGNERON. | Y. KREINS |
[Art. 78 de la Constitution] [voir le doc. Chambre 51-2158/1]
Projet de loi relatif à l'application aux Belges de certaines dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, et du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996.
Conformément au précédent de la loi du 27 juillet 1953 relative à l'application aux Belges de certaines dispositions de la Convention internationale du 26 juin 1948 pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques (Moniteur belge du 17 septembre 1953), le présent projet de loi a pour objet de permettre aux auteurs belges et aux titulaires belges de droits voisins, de bénéficier en Belgique respectivement des dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), et des dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), qui leur seraient plus favorables que la législation nationale.
À défaut du présent projet de loi, les auteurs belges et les titulaires belges de droits voisins ne pourraient pas directement invoquer les dispositions des deux traités. En effet, les deux traités règlent seulement les situations internationales, et n'ont pas de conséquences directes en ce qui concerne les relations juridiques entre chacune des parties contractantes et leurs ressortissants (article 3 WCT et article 3 WPPT).
Bien que le niveau de protection accordé par la loi belge sur le droit d'auteur et ses arrêtés d'exécution est en règle générale plus élevé au le niveau de protection qui est prévu par le WCT et le WPPT, notamment suite à la loi du 22 mai 2005 transposant en droit belge la Directive européenne 2001/29/CE sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information (Moniteur belge 27 mai 2005, 24997), il n'est pourtant pas à exclure que dans des cas spécifiques le recours direct par les Belges aux dispositions du WCT et du WPPT peut être utile. C'est pourquoi, il a été jugé opportun d'élaborer le présent projet de loi.
Une disposition reconnaissant aux belges le bénéfice de dispositions internationales plus favorables que la législation nationale porte sur une matière qui relève de l'article 78 de la Constitution alors que l'assentiment de traités internationaux est une matière visée à l'article 77 de la Constitution. Pour cette raison, les dispositions reconnaissant aux belges le bénéfice des dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), ou du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), qui leur seraient plus favorables que la législation nationale, ont été disjointes du projet de loi portant approbation de ces Conventions internationales et font l'objet du présent projet de loi.
L'article 3 de cette loi concerne l'entrée en vigueur de cette loi. L'objet de cette disposition est de veiller à ce que les belges ne puissent invoquer les dispositions plus favorables du WCT et du WPPT, qu'à partir du moment ou ces Traités lient la Belgique.
En ce qui concerne l'entrée en vigueur des deux traités, on mentionnera que la loi portant assentiment au WCT et au WPPT, dispose dans sa partie dispositif qu'aussi bien le WCT (art. 2) que le WPPT (art. 3) « sortira son plein et entier effet ». Quant à l'entrée en vigueur, l'article 21, alinéa unique, 2º, WCT dispose que le présent traité lie: « 2º tous les autres États à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l'État a déposé son instrument auprès du directeur général de l'OMPI. ». Le WPPT dispose dans son article article 30, alinéa unique, 2º, WPPT que le présent traité lie: « tous les autres États à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de la date à laquelle l'État a déposé son instrument auprès du directeur général de l'OMPI ».
Le ministre des Affaires étrangères,
Karel DE GUCHT.
Le ministre de l'Économie,
Marc VERWILGHEN.
Roi des Belges,
À tous, présents et à venir,
Salut.
Avant-projet de loi relatif à l'application aux Belges de certaines dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, et du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996.
Sur la proposition de Notre ministre des Affaires étrangères et de Notre ministre de l'Economie,
Nous avons arrêté et arrêtons:
Notre ministre des Affaires étrangères et Notre ministre de l'Economie sont chargés de présenter, en Notre nom, aux Chambres législatives et de déposer au Sénat le projet de loi dont la teneur suit:
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Les auteurs belges peuvent revendiquer l'application à leur profit en Belgique des dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, qui seraient plus favorables que la loi belge.
Les artistes-interprètes ou exécutants et producteurs de phonogrammes belges peuvent revendiquer l'application à leur profit en Belgique des dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, qui seraient plus favorables que la loi belge.
Art. 3
L'article 2, alinéa 1er, de la présente loi entre en vigueur le jour à partir duquel le Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, lie la Belgique.
L'article 2, alinéa 2, de la présente loi entre en vigueur le jour à partir duquel le Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, lie la Belgique.
AVIS DU CONSEIL D'ÉTAT
39.049/2
Le CONSEIL D'ÉTAT, section de législation, deuxième chambre, saisi par le ministre des Affaires étrangères, le 6 septembre 2005, d'une demande d'avis, dans un délai de trente jours, sur un avant-projet de loi « relatif à l'application aux Belges de certaines dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), adopté à Genève le 20 décembre 1996, et du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), adopté à Genève le 20 décembre 1996 », a donné le 28 septembre 2005 l'avis suivant:
Comme la demande d'avis est introduite sur la base de l'article 84, § 1er, alinéa 1er, 1º, des lois coordonnées sur le Conseil d'État, tel qu'il est remplacé par la loi du 2 avril 2003, la section de législation limite son examen au fondement juridique de l'avant-projet, à la compétence de l'auteur de l'acte ainsi qu'à l'accomplissement des formalités préalables, conformément à l'article 84, § 3, des lois coordonnées précitées.
Sur ces trois points, l'avant-projet appelle les observations ci-après.
Selon son exposé des motifs, l'avant-projet
« ... a pour objet de permettre aux auteurs belges et aux titulaires belges de droits voisins de bénéficier en Belgique respectivement des dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur le droit d'auteur (WCT), et des dispositions du Traité de l'Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (WPPT), qui leur seraient plus favorables que la législation nationale »,
et ce
« conformément au précédent de la loi du 27 juillet 1953 relative à l'application aux Belges de certaines dispositions de la convention internationale du 26 juin 1948 pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques (Moniteur belge du 17 septembre 1953) ».
Dans son avis L. 2.757/2 (2) , donné le 12 juillet 1952, sur l'avant-projet duquel est issue cette loi, la section de législation du Conseil d'État formule notamment les observations suivantes:
« L'avant-projet tend à permettre aux Belges de revendiquer en Belgique l'application, à leur profit, des dispositions de la convention de Berne pour la protection des oeuvres littéraires et artistiques, signée le 9 septembre 1886, complétée à Paris le 4 mai 1896, révisée à Berlin le 13 novembre 1908, complétée à Berne le 20 mars 1914, révisée à Rome le 2 juin 1928, révisée, en dernier lieu, à Bruxelles le 26 juin 1948 et approuvée par la loi du 26 juin 1951, chaque fois que les dispositions de cette convention leur seraient plus favorables que celles de la loi du 22 mars 1886 sur le droit d'auteur.
Il est de fait qu'il existe de notables divergences entre la loi du 22 mars 1886 sur le droit d'auteur et la convention de Berne révisée. Celle-ci assure notamment aux auteurs d'oeuvres littéraires et artistiques une protection plus étendue que celle que leur procure la législation belge. La conséquence en est que, faute d'adaptation de la législation nationale, les auteurs étrangers, ressortissants des pays membres de l'union pour la protection des droits des auteurs, jouissent en ce moment en Belgique de plus de droits que les auteurs belges.
Le projet cherche à éliminer cette anomalie en disposant que les Belges pourront, à partir du 26 juin 1951, revendiquer l'application à leur profit, en Belgique, des dispositions de la convention dans tous les cas où ces dispositions seraient plus favorables que la loi belge.
Il participe de la même méthode que celle employée par les lois des 10 juin 1914 et 2 juin 1939 lors de l'approbation des actes internationaux concernant la protection de la propriété industrielle.
Le promoteur de la méthode que l'avant-projet met en œuvre fut la commission de la Chambre des Représentants chargée de faire rapport sur le projet de loi devenu, par la suite, la loi du 10 juin 1914 portant approbation des actes internationaux concernant la protection de la propriété industrielle, signée à Washington le 2 juin 1911 (cf. Chambre des Représentants, session 1913-1914, rapport de la commission, pp. 891 et 892).
La formule en fut empruntée à la loi française du 1er juin 1906 relative à l'application, en France, des conventions internationales concernant la propriété industrielle.
Cette manière de procéder a le mérite essentiel d'écarter, de façon expéditive, toutes discussions quant à l'applicabilité aux Belges, en Belgique, des dispositions de la convention.
Les effets des conventions internationales sur la législation interne des États parties à celles-ci demeurent, en effet, très discutés (Cf. E. NYS, « Interprétation des traités par les tribunaux », Belgique judiciaire, col. 170, 1916; B. JOFFE, « Du droit pour les tribunaux belges d'interpréter les conventions internationales », Belgique judiciaire, 1921; J. VAN HOUTTE, « L'interprétation judiciaire des traités internationaux », Mélanges Maheim, tome II, p. 372; MUULS, « Le traité international et la Constitution belge », Revue de droit international et de législation comparée, 1934, pages 451 à 491; E. ALLARD, « Application en France, à l'égard des Français, des conventions internationales concernant la propriété industrielle », Revue internationale de droit privé, 1906, page 121; LYON-CAEN, « De la non-applicabilité en France, à l'égard des Français, des conventions internationales concernant la propriété industrielle », Revue internationale de droit privé, 1906, page 482; LALLIER, « Revue de droit international privé », 1907, page 123).
Elle n'apporte toutefois qu'une sécurité juridique précaire, car elle abandonne au citoyen en général et aux juges à l'occasion des contestations qu'ils sont appelés à trancher, la tâche éminemment délicate de déterminer quelles sont les dispositions de la convention qui sont plus favorables que celles de la loi et d'en dégager la teneur normative précise, au fur et à mesure où les intérêts des particuliers le rendent nécessaire.
Si des considérations tirées de l'urgence recommandent le recours à la méthode que le projet illustre, il n'en serait pas moins souhaitable qu'intervienne, dans un proche avenir, une révision de la loi sur le droit d'auteur qui ferait disparaître les divergences actuelles entre la loi et les traités et introduirait, d'une manière expresse et précise, dans la législation nationale, les règles nouvelles consignées dans les conventions internationales. »
Le rapport fait au nom de la commission des affaires étrangères et du commerce extérieur de la Chambre des représentants (3) fait écho à cet avis:
« Le présent projet de loi tend à compléter la loi du 26 juin 1951 portant approbation de la convention internationale pour la protection des œuvres littéraires et artistiques signée le 26 juin 1948.
Cette approbation a eu pour effet que, contrairement aux étrangers, les Belges ne bénéficient pas en territoire belge des dispositions de la convention si celles-ci sont plus favorables que celles de la loi nationale du 22 mars 1886.
Il aurait suffi de prévoir ce droit explicitement pour les Belges dans la loi d'approbation du 26 juin 1951.
Le présent projet de loi remédie à cette lacune.
Toutefois, ce projet pose à nouveau le problème de l'incidence des conventions internationales sur la législation interne des États, problème au sujet duquel il existe toujours un grand désaccord.
La procédure suivie dans le cas présent a plus d'un précédent (lois des 10 juin 1914 et 2 juin 1939 ainsi que la convention internationale intervenue récemment au sujet de la déclaration de décès).
Elle dissipe tout doute sur le point de savoir si les dispositions de la convention sont applicables en Belgique aux Belges.
Toutefois, ainsi que le dit le Conseil d'État dans son avis détaillé au sujet du présent projet de loi, cette méthode n'apporte qu'une sécurité juridique relative, car elle laisse entièrement ouverte la question de savoir quelles dispositions de la convention sont plus favorables.
Le Conseil d'État estime qu'il serait utile de mettre incessamment la loi relative aux droits d'auteur en concordance avec la convention. »
Cette dernière recommandation demeure d'actualité, quoique le risque évoqué semble assez minime étant donné que la loi du 22 mai 2005 transpose en droit belge et rend applicable — y compris en conséquence aux Belges — la directive 2001/29/CE, du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, qui tend notamment à mettre en œuvre certaines des nouvelles obligations internationales résultant des traités de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur le droit d'auteur ainsi que sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes. Si ces traités devaient encore comporter, malgré cette transposition, des dispositions « plus favorables que la loi belge », celle-ci devrait donc être expressément adaptée afin d'aligner la protection qu'elle procure sur celle garantie par lesdits traités.
Quant à l'« anomalie » à laquelle la loi du 27 juillet 1953, précitée, entendait remédier, elle n'aurait pas disparu du fait de l'arrêt de la Cour de cassation du 27 mai 1971 « Fromagerie franco-suisse Le Ski », selon lequel
« ... lorsque le conflit existe entre une norme de droit interne et une norme de droit international qui a des effets directs dans l'ordre juridique interne, la règle établie par le traité doit prévaloir; [...] la prééminence de celle-ci résulte de la nature même du droit international conventionnel ».
Conformément à ce principe désormais reçu en droit belge, les dispositions directement applicables des traités ratifiés par la Belgique et y ayant reçu l'assentiment des Chambres doivent être appliquées à l'exclusion des règles légales qui y seraient contraires. Selon les explications fournies par le délégué du ministre qui se réfère à divers auteurs (4) , les ressortissants belges ne peuvent cependant se prévaloir en Belgique de la protection prévue par les deux traités précités de l'Organisation mondiale de la propriété intellectuelle, parce qu'ils sont dépourvus d'effets directs dans les rapports juridiques entre chaque partie contractante et ses propres ressortissants, de sorte que les Belges sont, en Belgique, soumis exclusivement à leur législation nationale, sans pouvoir y revendiquer une éventuelle protection plus étendue en application de ces traités.
Comme telle est la justification de l'avant-projet, qui n'interfère dès lors pas avec l'application des principes résultant de l'arrêt « Fromagerie franco-suisse Le Ski », les explications du délégué du ministre doivent compléter l'exposé des motifs afin d'y faire apparaître plus clairement les raisons nécessitant l'intervention du législateur.
La chambre était composée de
M. Y. KREINS, président de chambre,
M. J. JAUMOTTE, conseillers d'État,
Mme M. BAGUET,
M. H. BOSLY, assesseur de la section de législation,
Mme B. VIGNERON, greffier.
Le rapport a été présenté par M. J.-L. PAQUET, premier auditeur.
Le greffier, | Le président, |
B. VIGNERON. | Y. KREINS. |
(1) Voir ‰galement: doc. Chambre no 51-2158/1 (article 78 de la Constitution).
(2) Documents parlementaires, Sénat, session 1952-1953, nos 224, pp. 4 à 6.
(3) Documents parlementaires, Chambre des représentants, session 1952-1953, no 572.
(4) W. Nordeman, K. Vinck et P. Hertin, Droit d'auteur international de droits voisins dans les pays de langue allemande et les États membres de la Communauté Européenne, Brussel, Bruylant, 1983, p. 79; F. Brison, Het naburig recht van de uitvoerende kunstenaar, Gent Larcier, 2001, p. 37, nr. 69 en p. 164, nr. 421. Voir également A. Berenboom, « Le nouveau Droit d'Auteur », Bruxelles, Larcier, éd. 2, 1997, no 16, p. 36.