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29 NOVEMBRE 2005
Il résulte des dispositions du Code judiciaire interprétées par la jurisprudence que si un juge a oublié de statuer sur un point évident d'une demande, par exemple comme les intérêts de retard, il ne peut revenir sur son jugement et le rectifier.
L'interdiction d'ajouter quoi que ce soit à une décision qui a été prononcée est interprétée de manière extrêmement restrictive. Le jugement qui a omis de statuer sur un chef de demande sans le réserver, tout en statuant sur les dépens, ne peut plus être attaqué que par la voie de l'appel. En effet, l'omission de statuer sur un chef de demande ne constitue pas une erreur matérielle au sens de l'article 794 du Code judiciaire. Par conséquent, il faut saisir la juridiction supérieure, avec tous les inconvénients que cela comporte (frais, délai, etc.) (Voyez: Cass., 3 avril 1998, Bull., 1998, p. 441).
Dans une publication intitulée « Dire le droit et être compris » (2003, Ed. Larcier) de l' « Association syndicale des magistrats » réclame l'intervention du législateur sur cette question en proposant comme modèle les dispositions du Nouveau Code de procédure civile français qui prévoient que « la juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs de demande » (article 463).
La présente proposition de loi introduit dans le Code Judiciaire une disposition inspirée de cette disposition afin de permettre à un juge de revenir sur son jugement lorsqu'il a omis de statuer sur un chef de demande.
Il existe également une controverse quant au juge compétent pour connaître de l'interprétation d'un jugement. Ainsi, outre le juge qui a rendu la décision et le juge d'appel, la jurisprudence reconnaît au juge des saisies une compétence pour interpréter les décisions connaissant une difficulté d'exécution (A. Fettweis, Précis de Droit judiciaire, Tome II, La compétence, Larcier, Bruxelles, 1971, p. 238, n 412). Par ailleurs, la jurisprudence aurait développé une vision très restrictive des conditions d'exercice de l'action en interprétation devant le juge qui a rendu un jugement obscur (Association syndicale des magistrats, Dire le droit et être compris, 2003, Larcier, p. 89).
Afin de rencontrer ces difficultés, la présente proposition de loi apporte quelques modifications aux dispositions du Code judiciaire inspirées par les dispositions du Nouveau Code de procédure civile français.
Clotilde NYSSENS. |
Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 78 de la Constitution.
Art. 2
Dans la Quatrième partie, Livre II, Titre II, du Code judiciaire, l'intitulé de la section IX du Chapitre II est remplacé comme suit:
« Section IX. Interprétation et rectification du jugement et réparation de l'omission d'un chef de demande ».
Art. 3
L'article 794 du même Code est remplacé par la disposition suivante:
« Art. 794. — Les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré.
Le juge de l'exécution peut corriger les erreurs de calcul ou les erreurs matérielles dont les éléments de solution résultent du texte même du titre exécutoire. ».
Art. 4
Un article 794bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code:
« Art. 794bis. — La juridiction qui a omis de statuer sur un chef de demande peut également compléter son jugement sans porter atteinte à la chose jugée quant aux autres chefs, sauf à rétablir, s'il y a lieu, le véritable exposé des prétentions respectives des parties et de leurs moyens.
La demande doit être présentée un an au plus tard après que la décision soit passée en force de chose jugée ou, en cas de pourvoi en cassation de ce chef, à compter de l'arrêt d'irrecevabilité. ».
Art. 5
À l'article 795 du même Code sont apportées les modifications suivantes:
A) les mots « d'interprétation ou de rectification » sont remplacés par les mots « d'interprétation, de rectification ou de réparation de l'omission d'un chef de demande »;
B) les mots « à interpréter ou à rectifier » sont remplacés par les mots « si celle-ci n'est pas frappée d'appel ».
Art. 6
L'article 796 du même Code est remplacé par la disposition suivante:
« Art. 796. — Le juge est saisi par simple requête de l'une des parties, ou suivant les règles de la comparution volontaire, sinon dans la forme ordinaire des citations.
Le juge statue après avoir entendu les parties ou celles-ci appelées. ».
Art. 7
À l'article 799 du même Code les mots « ou statuer sur l'omission d'un chef de demande » sont insérés entre les mots « rendue » et les mots « que dans la mesure ».
Art. 8
À l'article 800 du même Code sont apportées les modifications suivantes:
A) à l'alinéa 1er, les mots « interprétative ou rectificative en marge de la décision interprétée ou rectifiée » sont remplacés par les mots « interprétative, rectificative ou statuant sur l'omission d'un chef de demande en marge de la décision initiale »;
B) à l'alinéa 2, les mots « interprétée ou rectifiée » sont remplacés par le mot « initiale »;
C) à l'alinéa 2, les mots « ou rectificative » sont remplacés par les mots « , rectificative ou statuant sur l'omission d'un chef de demande ».
Art. 9
À l'article 801 du même Code les mots « ou en rectification » sont remplacés par les mots « , en rectification ou en vue de voir statuer sur l'omission d'un chef de demande ».
Art. 10
Un article 801bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code:
« Art 801bis. — Si la décision rectifiée est passée en force de chose jugée, la décision rectificative ne peut être attaquée que par la voie du recours en cassation. ».
13 septembre 2005.
Clotilde NYSSENS. |