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20 MAI 1998
Les traités européens n'ont jamais été accueillis avec beaucoup d'enthousiasme. Le Traité d'Amsterdam, que je vous soumets aujourd'hui, ne constituera certainement pas une exception à la règle. Pourtant, il apporte une série d'améliorations notables à la construction européenne. C'est aussi un traité complexe, qui contient une série de dispositions transitoires, et qui, avouons-le, n'est pas tout à fait satisfaisant à plusieurs points de vue.
Jusqu'à présent, ni les milieux politiques ni les milieux universitaires n'ont réagi de manière unanimement positive au traité. Faut-il dès lors le rejeter ? Pas du tout. L'on peut certainememt critiquer ce nouveau traité et encore y déceler des imperfections. Il est en effet le résultat d'un accord entre quinze États membres qui n'ont pas nécessairement la même vision de la finalité du projet européen. Le Traité d'Amsterdam est une étape nouvelle, certainement pas le stade final. L'intégration européenne se fait progressivement. C'est pourquoi toute évaluation de ce traité devra tenir compte de la situation antérieure à sa conclusion. Les questions que nous devons nous poser sont : comment l'Union était-elle avant le Traité d'Amsterdam ? Était-elle plus démocratique ? Était-elle plus transparente ? Était-elle plus sociale ? Était-elle plus intégrée ?
Je vais essayer de faire ici une synthèse de ce traité, en donnant une présentation aussi équilibrée que possible. Je rappelerai les positions des États membres, car cela aide à comprendre l'évolution des négociations. Permettez-moi tout d'abord de rappeler quelles étaient nos attentes au début des négociations. Elles figuraient dans la note de politique débattue avec le Parlement, et aussi avec les gouvernements communautaires et régionaux.
D'une part, nous voulions approfondir l'Union (c'est-à-dire veiller à ce que la construction européenne soit plus légitime, plus démocratique et donc plus proche du citoyen et que l'Europe fédéraliste continue à croître) et, d'autre part, nous souhaitions la préparer à l'élargissement (non seulement sur le plan du contenu, mais également au niveau institutionnel).
Comme vous pouvez le constater à la lecture du traité et de l'exposé des motifs du projet de loi d'approbation, une satisfaction modérée est permise en ce qui concerne l'approfondissement. Celui-ci s'est avéré plus prononcé dans le premier pilier, comme cela avait été souhaité par la Belgique, que dans le deuxième et troisième piliers malgré le fait que, là aussi, un progrès se dessine. La préparation institutionnelle à l'élargissement, quant à elle, se limite à des amorces : un premier pas vers des votes à la majorité, une flexibilité étroitement délimitée et une nouvelle C.I.G. pour des questions institutionnelles. Il est clair que, sur le plan institutionnel, l'Union est loin d'être prête pour l'élargissement.
Je ne pense pas qu'il faille entrer ici dans les détails. J'ai veillé, comme vous le savez, à tenir les membres du Parlement informés tout au long de ces négociations. Je suppose donc que les surprises sont modestes.
La complexité du Traité d'Amsterdam résulte de plusieurs facteurs. Ainsi, l'objectif politique des négociations n'était pas aussi clairement défini par une large majorité d'États membres que celui des négociations qui ont mené à la conclusion de l'Acte Unique de 1986 ou du Traité de Maastricht de 1992. Dans pareil contexte, atteindre l'unanimité des États membres, toujours exigée pour la révision des traités européens, constituait déjà un exploit.
De plus, les négociations ont été compliquées par le maintien de la structure des piliers. Vous savez que la Belgique défendait l'abandon de ce système. Hélas, elle est restée dans la minorité. Nous avons néanmoins obtenu qu'on donne un caractère plus communautaire aux deux piliers intergouvernementaux. Nous avons renforcé à de nombreux endroits le rôle de la Cour de justice, du Parlement européen, et de la Commission. Il est vrai que ces compromis rendent le traité parfois plus difficile à comprendre.
Évoquons tout d'abord l'approfondissement. Celui-ci était nécessaire pour mieux équilibrer la construction européenne et mieux répondre aux préoccupations quotidiennes du citoyen, et ce en vue d'apporter une réponse au septicisme croissant à l'égard de l'Europe. À cet effet, la contribution de la Belgique et de ses partenaires du Benelux a été d'une importance capitale.
C'est ainsi que le Traité d'Amsterdam accorde davantage d'importance au respect des droits de l'homme. La Cour de justice pourra donner une interprétation directe de ces droits et l'on pourra prendre des sanctions à l'encontre d'un État membre qui ne les respecte pas. Ces dispositions visent indéniablement à préserver la dimension démocratique d'une Europe élargie.
Ensuite, l'on a complété le traité par des dispositions visant à renforcer la non-discrimination, l'égalité entre les hommes et les femmes, la protection des données à caractère personnel et la transparence des institutions. Désormais, il sera plus facile au citoyen d'avoir accès aux documents et d'obtenir des informations sur la manière dont les décisions ont été élaborées.
Sur la proposition de la Belgique, l'on a également reconnu au citoyen le droit de s'adresser aux institutions communautaires dans sa propre langue et de recevoir une réponse dans celle-ci.
Cependant, l'approfondissement le plus notable a été réalisé dans le domaine social.
L'importance des modifications qui ont été apportées en la matière aux dispositions originelles du Traité de Rome, est surprenante. Dans l'esprit d'une majorité d'États membres, la C.I.G. de 1996 avait pour objectif principal de reformer la coopération judiciaire et policière, la politique étrangère et les institutions, dans la perspective d'élargissements futurs.
Or, c'est dans le premier pilier que se situent les modifications les plus visibles. Ce pilier est, depuis le début, une priorité pour la Belgique.
Un grand nombre de dispositions témoignent de la volonté de dépasser la logique pure du marché. Tout d'abord, on a renforcé plusieurs objectifs qui s'inscrivent dans le cadre de la priorité à la libre circulation et à la libre concurrence, à la santé publique, aux consommateurs et à l'environnement, priorité qui, à ce jour, n'a pas encore été contestée. La politique sociale ainsi que la politique de l'emploi reflètent également cette préoccupation.
Le chapitre social a été étoffé par une référence explicite au souci de garantir l'exercice des droits sociaux fondamentaux. Le « Protocole social » a été entièrement intégré dans le traité et a également été renforcé sur un certain nombre de points. Il prévoit désormais la possibilité de lancer des programmes pour lutter contre l'exclusion sociale. Le nouveau chapitre sur l'emploi met en place un système qu'on peut comparer à celui qui est en vigueur pour la politique économique : obligation pour les États membres d'harmoniser leur politique, mise en place d'un contrôle multilatéral, correction des « mauvais élèves » par le biais de recommandations individuelles, création d'un comité consultatif pour l'emploi, auquel les partenaires sociaux sont associés, et même possibilité d'incitations financières dans la lutte contre le chômage. L'Union européenne passe ainsi du rôle de spectateur passif à celui de coordonnateur.
Enfin, la volonté d'éviter qu'une application trop stricte des règles de la concurrence ne remette en question certains services d'intérêt général a mené à l'adoption d'un article spécifique. Cet article vise à protéger les services publics qui répondent à une série d'objectifs qui ont été reprise dans une déclaration. Un protocole distinct rédigé en termes plus clair prévoit la possibilité pour les États membres de financer les organismes publics de radiodiffusion et de télédiffusion, étant entendu qu'il faut bien tenir compte que ceux-ci remplissent une mission publique.
Au début des négociations, les modifications susvisées ne bénéficiaient guère de soutien. Prenons le cas de l'emploi. La Belgique, le Danemark, l'Autriche et la Suède ont été les seuls pays à disposer des propositions formelles. Plusieurs facteurs ont exercé une influence dans ces matières. Tout d'abord, les exigences de nombreux groupes de pression ont rappelé aux gouvernements que l'Europe devenait de plus en plus impopulaire au sein d'une grande partie de la population. Ensuite, il y a eu le fait que la participation des partis sociaux démocrates dans les gouvernements européens a augmenté pendant les négociations.
Enfin, les nouveaux États membres (Finlande, Autriche et Suède) ont des traditions bien ancrées dans le domaine de la politique sociale et de la protection de l'environnement.
Il est vrai que le souci de protéger la souveraineté nationale, de même que la crainte de voir augmenter la contribution nationale au budget communautaire ont empêché une révision importante des mécanismes de prise de décision dans les domaines précités. Tout comme le Traité de Maastricht, celui d'Amsterdam a cependant aussi un caractère d'appel pressant. Il y a donc encore des choses à faire à l'avenir.
Dans le domaine des personnes, les progrès réalisés sont également significatifs, quoi qu'ici aussi des compromis aient dû être conclus, jusqu'à la dernière minute.
Les questions de sécurité intérieure constituaient pour de nombreux États membres un aspect essentiel de la C.I.G. Pour certains d'entre eux, il s'agissait même du principal aspect, en dehors des questions institutionnelles.
Ce chapitre est ainsi devenu le premier des textes de négociation. Au cours des dernières semaines, un concours d'événements a rendu un accord plus difficile. Nous nous sommes heurtés, dans la dernière ligne droite, à une opposition de la part du Royaume-Uni et du Danemark. Bien que, notamment grâce à la Belgique, cette opposition ait pu être surmontée, celle-ci a laissé des traces particulièrement au niveau de la communautarisation (l'unanimité sera appliquée pendant plus longtemps : l'intégration de Schengen risque de rester plus longtemps dans le domaine de l'intergouvernemental).
De plus, à force de compromis, les textes ne témoignent pas toujours d'une clarté exemplaire.
Néanmoins, le résultat obtenu constitue un pas en avant qui répond, ne fût-ce que partiellement, aux objectifs que le Gouvernement s'était fixés au début de la C.I.G. :
a) Une partie importante des questions de sécurité intérieure est transférée au premier pilier. Certaines sont liées à la circulation des personnes, comme l'immigration, l'asile politique, ou la coopération judiciaire civile. D'autres concernent la fraude au budget communautaire ou douanière. Néanmoins, ces matières feront l'objet de particularités institutionnelles importantes, par comparaison aux mécanismes communautaires classiques du premier pilier.
Après une période de cinq ans, le Conseil décidera, en ce qui concerne la politique d'immigration, d'asile et de visa ainsi communautarisée, de l'introduction de la majorité qualifiée dans la procédure décisionnelle (toutefois, la décision de passer d'un système à l'autre doit être prise à l'unanimité).
Grâce à l'élaboration d'une politique commune d'asile, de visa et d'immigration, les conditions peuvent être créées pour abolir définitivement le contrôle aux frontières intérieures. Le Royaume-Uni et l'Irlande sont autorisés à garder leur propre contrôle des passeports et des frontières. En effet, il existe une différence objective entre les conditions de contrôle dans une région insulaire par rapport à une région continentale.
b) Dans la partie restante du troisième pilier, la coopération policière et judiciaire est renforcée. Des formes concrètes de coopération policière sont mises en place autour d'Europol. L'U.E. reçoit des instruments législatifs supplémentaires pour mener la lutte contre la criminalité. La Cour de Justice veillera à l'application uniforme et à la sauvegarde de la sécurité juridique dans les actions de l'U.E. La Commission et le Parlement sont dotés d'un rôle plus grand.
c) La coopération Schengen parmi les treize pays continue et est intégrée dans les Traités selon des modalités spécifiques. La répartition de la matière Schengen entre les premier et troisième piliers doit encore être définie (à l'unanimité). S'ils le veulent, le Royaume-Unie et l'Irlande peuvent participer à un certain nombre d'aspects de cette matière. Cela peut représenter un rapprochement important de ces pays à la coopération Schengen.
Un mot encore sur les raisons qui expliquent la complexité des dispositions du traité d'Amsterdam dans le domaine de la sécurité interne. Certains gouvernements restaient par principe hostiles à la communautarisation, et à l'accroissement des compétences de la Cour de Justice (Royaume-Uni et Danemark, par exemple). D'autres souhaitaient éviter l'intervention de la Cour dans les questions liées au maintien de l'ordre (France). D'autres, enfin, même très favorables à la communautarisation de certaines matières et à l'intégration de Schengen, souhaitaient éviter la multiplication des recours juridictionnels dans le domaine des demandes d'asile (Pays-Bas).
D'autres redoutaient des charges financières incontrôlables, même si leur cause potentielle apparaissait peu claire (Allemagne). Le nouveau traité constitue la résultante de toutes ces préoccupations.
Pour être complet, je dois enfin mentionner le protocole sur l'asile politique, qui détermine les modalités pour le traitement des demandes d'asile introduites dans un État membre par des ressortissants communautaires. Quand un État membre examine une telle demande, il le fera sur base d'une présomption de non fondement, qui peut cependant être renversée. Ce texte a provoqué beaucoup de problèmes. Le protocole résulte, vous le savez, d'une initiative espagnole. La formulation finale a été influencée par la Belgique. Nous avons veillé à la plus grande conformité avec la Convention de Genève de 1951. Ainsi une disposition maintient la possibilité pour chaque État membre d'examiner toute demande d'asile. Pour avoir des certitudes encore plus grandes, et pour suivre intégralement les orientations fixées par le Haut Commissariat des Nations unies aux réfugiés, nous avons de plus formulé une déclaration, jointe au traité, indiquant que la Belgique procédera systématiquement à un examen individuel de toute demande d'asile présentée par un ressortissant d'un autre État membre. Nous sommes d'ailleurs le seul État membre à l'avoir fait. Cette déclaration garantit la protection totale des candidats réfugiés.
J'en arrive à présent au domaine des relations extérieures de l'Union, ce que l'on appelle le deuxième pilier.
La souveraineté nationale y a encore pesé de tout son poids et la portée des modifications est plutôt limitée.
Toutefois, certaines d'entre elles pourraient avoir des conséquences importantes. Le développement du vote à la majorité qualifiée est sans aucun doute la modification la plus importante, même s'il sera toujours possible de bloquer le processus décisionnel, notamment en invoquant l'intérêt national. Pourtant, même dans pareil cas, les autres États membres pourront en appeler au Conseil européen. Seule l'expérience montrera quelle sera l'importance de ce nouveau système de prise de décision.
Par ailleurs, l'on a également apporté une série d'améliorations fonctionnelles. Pour la première fois, l'Union disposera de ce que l'on appelle une cellule d'analyse et de planification, qui, pourra formuler, dans les situations concrètes de crise des propositions longuement mûries et présenter des options. L'on améliorera la mise en oeuvre des décisions en matière de politique étrangère en renforçant le rôle du secrétaire général du Conseil ainsi qu'en systématisant la présence de représentants spéciaux pour les missions extraordinaires.
Une deuxième modification importante concerne la politique de sécurité. Il s'agit de l'intégration au sein de l'Union européenne de ce que l'on appelle les missions de Petersberg, telles qu'elles sont définies dans le cadre de l'Union de l'Europe occidentale (U.E.O.). Ces missions varient de l'assitance humanitaire au maintien de la paix. Eu égard à la tradition de neutralité d'une série de pays membres, l'inscription de ces missions dans le traité constitue une modification importante. Une troisième modification, plus modeste, concerne le rapprochement progressif entre l'Union européenne et l'Union de l'Europe occidentale. L'on renforce la perspective d'une défense européenne commune et une clause de révision prévoit la possibilité de faire à l'avenir les démarches nécessaires à cet effet.
Toujours dans le domaine des relations extérieures de l'Union, qui ne se limite pas au deuxième pilier, nous déplorons que les efforts visant à élargir le champ d'application de la politique commerciale commune efforts que la Belgique a soutenus avec force n'aient pas été couronnés de succès.
En général, les résultats dans le domaine de la P.E.S.C. sont donc plutôt modestes, et ce pour plusieurs raisons. Tout d'abord, les pays neutres freinent tout de même quelque peu cette évolution et le Royaume-Uni ne jure que par une approche strictement intergouvernementale. Plusieurs pays qui étaient auparavant partisans d'une plus grande intégration semblent à présent douter. La France et l'Allemagne n'étaient pas d'accord, ni en ce qui concerne l'utilisation de la majorité qualifiée dans le cadre de la politique étrangère, ni en ce qui concerne le rôle du secrétaire général de la P.E.S.C. Les Pays-Bas n'ont pas soutenu la proposition d'intégrer l'U.E.O. dans l'U.E.
Toutefois, quelque étrange que cela puisse sembler, le point fondamental est l'absence d'un sentiment de menace, tant sur le plan stratégique que sur le plan économique. Malgré l'expérience de l'ex-Yougoslavie, une grande partie des États membres ne souhaitent toujours pas toucher à la structure très intergouvernementale de la P.E.S.C.
Dans le domaine institutionnel, les résultats sont également contrastés. Il a parfois été dit que le Conseil européen avait débouché sur un échec dans ce domaine. Cela n'est pas vrai. Toutes les réformes envisagées n'ont pas été réalisées. Néanmoins, des changements importants doivent être soulignés.
D'abord, le rôle du Parlement européen a été fortement développé. Cela aussi n'était pas évident au début des négociations. Nous avons accompli des progrès importants. La procédure de codécision a été simplifiée, ce qui favorise le rôle du Parlement européen par rapport au Conseil des ministres. Le champ d'application de la procédure de codécision a également été étendu de façon large. En dépit de nombreuses réticences, les États membres souhaitaient satisfaire le Parlement européen, surtout dans la mesure où il exercera un rôle important dans les prochains élargissements. Les nouveaux traités d'adhésion devront recevoir son approbation.
Le rôle du président de la Commission a été accru, surtout dans la désignation des commissaires. Le président, bénéficiant d'une double légitimité du Conseil européen et du Parlement européen, aura maintenant un rôle significatif dans le choix des autres membres de la Commission, et dans la répartition des portefeuilles. Cela devrait contribuer à une plus grande cohésion de la Commission.
La Cour de Justice peut dorénavant statuer sur la mise en oeuvre des droits de l'homme, des droits sociaux, et de nombreuses décisions dans le cadre du troisième pilier et de Schengen. Ceci devrait rassurer les citoyens sur la correction des décisions prises.
Des dispositions sur la transparence ont été introduites. Elles offriront ainsi aux Parlements nationaux, aux médias et à tous les Européens en général une information bien meilleure sur la manière dont les décisions sont prises.
Maintenant, il faut reconnaître que les propositions sur la réforme de la Commission et la pondération des voix ont finalement été renvoyées à plus tard. Est-ce un mal ? À titre personnel, je ne le crois pas. La Belgique avait manifesté son ouverture dans ce domaine. Elle était même le seul État membre de taille modeste à le faire. Mais nous avions dit qu'il fallait pour cela un net approfondissement de l'Union politique. Cela n'a pu être réalisé parce que la plupart des autres États membres ne sont pas prêts. Dès lors, nous avons estimé qu'il ne fallait pas faire des concessions dans ce domaine, pour rester fidèle à la ligne défendue devant ce Parlement. Nous avons préféré prendre les extensions du vote à la majorité qualifiée qui se trouvaient sur la table, et n'accepter aucun autre changement, pour maintenir le débat institutionnel vivant.
Pour cette raison, la Belgique a de plus adopté une déclaration indiquant qu'elle liait son approbation des nouveaux élargissements de l'Union européenne à une réforme institutionnelle plus profonde, passant d'abord par l'extension du vote à la majorité qualifiée.
Cette déclaration n'a pas été populaire à Amsterdam. À ce moment, nous l'avons présentée seuls. Je pense que la suite des événements a montré la justesse de cette stratégie. La déclaration institutionnelle de la Belgique a d'abord été soutenue par l'Italie et la France. Ensuite, elle a été soutenue par le Parlement européen. Enfin, elle a été soutenue par plusieurs autres pays, comme l'Autriche ou la Finlance, qui voient la nécessité de cette réforme, mais ne veulent pas donner l'impression de retarder l'élargissement.
Maintenant, en lisant les derniers discours de Tony Blair, de Robin Cook ou de Helmut Kohl, on aperçoit très clairement le retour des débats institutionnels. Ceci, tout le monde le croyait impossible à Amsterdam. C'est-à-dire il y a seulement dix mois. Ceci vous montre à quel point la situation change vite.
Enfin, je souhaite formuler quelques remarques concernant les dispositions relatives à ce que l'on appelle la « coopération renforcée ». C'était l'un des nouveaux sujets des négociations mais également l'un de leurs aspects les plus complexes.
Tout d'abord, il s'agit d'une révolution copernicienne dans l'histoire de l'intégration européenne. Jusqu'à présent, la Communauté avait pour but la réalisation de projets communs au sein d'une structure unitaire. Subitement, en quelques années, la plupart des pays fondateurs se sont tournés vers un autre concept.
Un autre facteur de complexité réside dans la diversité des buts que l'on s'est fixés. Cette diversité est mise en évidence par différentes appellations que l'on utilise. Pour les uns, il s'agit d'une possibilité, pour les États plus ambitieux, de développer une intégration plus poussée. Les autres États doivent pouvoir s'y joindre en temps utile, même si le moment n'a pas toujours été fixé aussi clairement. C'est cette interprétation qui a été retenue par le mémorandum du Benelux de mars 1996 et par le chancelier Kohl et le président Chirac avant le sommet de Dublin. Pour les autres, par contre, il s'agit de la possibilité de ne pas participer à de nouveaux projets communautaires.
Les négociations ont progressivement emprunté une voie médiane par l'élaboration simultanée de procédures, de directives et de conditions d'accès. Les modalités prévues varient selon les piliers. Une telle disctinction semble normale. Il est aisé d'imaginer des initiatives nouvelles dans les secteurs où jusqu'à présent, l'Union européenne n'a pas réalisé grand-chose, mais il est plus difficile d'imaginer semblables initiatives dans des secteurs où l'on a déjà réalisé beaucoup, comme le marché intérieur. Dans un tel contexte, les initiatives nouvelles pourraient bel et bien déboucher sur une remise en ause des réalisations passées. Ce que l'on a présenté comme un progrès ne saurait finalement se prêter à une régression. Le traité tente de trouver un compromis entre deux nuances : la paralysie et le fractionnement.
Les modalités de la coopération renforcée ont été fixées dans le traité sur l'Union européenne. Par ailleurs, l'on trouve des articles spécifiques dans le premier pilier (l'article 5A du traité C.E.E.) et dans le troisième pilier (l'article K.12).
Toutefois, les règles fixées pour le troisième pilier ne concernent pas l'intégration de Schengen. Finalement, l'intégration renforcée n'a pas été prévue dans le deuxième pilier. L'on a estimé que permettre l'abstention constructive ouvrait suffisamment de possibilités à cet égard. Faisons enfin remarquer que la Cour de justice a pleine compétence pour se prononcer sur la mise en oeuvre des coopérations renforcées (les articles K.12, quatrième alinéa, et 5 A, quatrième alinéa, du Traité C.E.E.).
À titre de conclusion, je tiens à confirmer que ce Traité, nonobstant ses imperfections, représente un pas important dans l'intégration européenne. Il ouvre, notamment dans le premier et le troisième piliers, de nouveaux domaines d'actions E.U., ce qui prouve que l'unification européenne garde une dynamique et un élan. De nouveaux pas peuvent être franchis sur le plan de la justice et de la police. Il en sera de même, et de manière plus remarquable, en matière d'emploi et de cohésion sociale. Elmar Brok qui, avec Elisabeth Guigou, représentait le Parlement européen lors de la C.I.G., n'a pas hésité à évaluer les résultats comme suit : « L'Acte Unique était le traité du marché unique; Maastricht, le traité de l'union monétaire; Amsterdam, c'est le traité du rééquilibre social ».
L'approfondissement du premier pilier et le progrès partiel réalisé dans le troisième pilier permettent à la Belgique d'évaluer d'une manière plutôt positive le résultat final. Qui plus est, la Belgique a atteint ce résultat sans payer un prix institutionnel. Les petits pays n'ont rien perdu mais, au contraire, ils ont gagné quelques votes à la majorité et obtenu un début de flexibilité. À cela s'ajoute que la poursuite de la négociation pour préparer l'Union à l'élargissement sur le plan institutionnel, est formellement prévue.
Par notre déclaration institutionnelle, nous avons établi un lien clair entre les négociations prévues et la nécessité d'approfondir davantage l'Union par un renforcement de la prise de décision à la majorité. Ce n'est qu'ainsi que nous pourrons mettre définitivement l'Union sur la bonne voie pour le XXIe siècle.
Un membre estime que le ministre a fait un exposé objectif et nuancé de ce traité qui ne mérite cependant ni l'excès d'honneur qu'on lui a accordé à certain moment, ni l'excès d'indignité qu'on lui avait réservé dans les premiers jours qui ont suivi le sommet d'Amsterdam.
Nous avons progressé dans des matières auxquelles on ne s'attendait pas. La création d'un espace unifié de démocratie et de justice est positif.
L'orateur constate que, même si en réalité le Traité d'Amsterdam sera ratifié sans trop de difficultés dans la plupart des pays, il appartient en fait déjà au passé. Les défis qui sont devant nous, comme l'Euro, la réforme institutionnelle, l'élargissement de l'Union européenne et l'agenda 2000, apparaissent tellement importants que ceci modifiera profondemment l'Union européenne dans les années à venir. Il est donc nécessaire de ratifier le Traité d'Amsterdam le plus vite possible.
Il serait inconcevable qu'un pays comme la Belgique n'adopte pas le projet de loi portant assentiment au Traité d'Amsterdam modifiant le Traité sur l'Union européenne, les Traités instituant les Communautés européennes et certains Actes connexes, à l'Annexe, à divers Protocoles et à l'Acte final, faits à Amsterdam le 2 octobre 1997 : cela créerait un précédent pour les États membres qui risquent d'être confrontés à un refus de la population lors d'éventuels référendums.
On a déclaré à plusieurs reprises que ce serait la dernière fois que l'on mènerait des négociations selon la méthode intergouvernementale et qu'il fallait trouver un nouveau moyen de négociation. Est-il possible qu'on revienne à la méthode de négociation employée dans le cadre du Traité de Rome, en chargeant un ou plusieurs hommes d'État d'élaborer un texte qui serait ensuite soumis à une discussion gouvernementale comme à Messine ? Cette méthode de négociation a-t-elle encore une chance, compte tenu du fait que dans le concept actuel il y a plus d'éléments qui séparent les États membres de l'Union qu'il y en a qui les unissent ?
La déclaration institutionnelle faite par trois États membres était opportune. À la lumière des propositions françaises, il est clair qu'il y a autant de divergences de vue entre les trois signataires de cette déclaration qu'il y a de similitudes. Cependant, les projets français en ce qui concerne la réforme des votes semblent écraser complètement un pays comme la Belgique. Quel est l'avis du ministre à ce sujet ?
Une observation qui a été faite par le Conseil d'État sur l'avant-projet de loi, annonçait notamment qu'il faudrait présenter autrement les documents qui sont joints au traité. Y a-t-il des documents que nous n'avons pas encore ratifiés ? Les documents qui sont joints au Traité d'Amsterdam représentent-ils la totalité de ce qui a été conclu ou y a-t-il des documents qui ne se retrouvent pas dans l'annexe du présent projet de loi ?
Un deuxième membre estime qu'il est important de souligner les avancées au niveau social si c'est vraiment à la Belgique qu'on le doit. La formulation reprise dans l'exposé des motifs sur le problème du droit d'asile par rapport aux ressortissants des pays de la Communauté est satisfaisante. La définition de l'organisme public de radiodiffussion et de télédiffussion est également un élément très important qui mérite d'être souligné.
Pourquoi le renforcement de la Commission est-il toujours considéré comme un progrès dans la construction européenne ou dans les avancées de démocratisation ?
Dans le cadre de la politique étrangère de l'Union européenne, on parle souvent du rôle de la troïka européenne. Comment a-t-on amélioré le rôle de cette troïka ?
Un membre est inquiet concernant la lisibilité du Traité d'Amsterdam. La Belgique est soucieux de rapprocher le citoyen du législateur ou de la politique mais on a l'impression que, plus qu'on monte dans les sphères décisionnelles, le jargon devient de plus en plus compliqué. Ce n'est pas ainsi qu'on rapprochera le citoyen par rapport à l'Union européenne.
L'orateur estime qu'il existe une certaine contradiction entre le Traité d'Amsterdam et l'Union monétaire. L'Union monétaire exige énormément de politique budgétaire stricte et des dépenses budgétaires contrôlées. De l'autre côté on parle de l'élargissement de l'Europe qui aura des implications budgétaires énormes. Comment peut-on concilier ces objectifs ?
Les marchés n'ont clairement pas trop pris au sérieux les difficultés qui sont survenues lors de l'élection du premier gouverneur de la Banque centrale européenne. Cependant, ce problème semble avoir affaibli le chancelier allemand Kohl. Quels sont les implications pour l'axe Allemagne-France et comment évoluera cette situation ?
Un membre se réjouit des progrès qui ont été enregistrés dans le premier pilier, à savoir la politique sociale. Il se réjouit surtout du rôle que la Belgique a joué dans la réalisation de ces progrès.
Étant donné qu'on a enregistré peu de progrès sur le plan du processus décisionnel et que la règle de l'unanimité est maintenue, on peut craindre qu'à court terme, les possibilités de mener une politique sociale ne soient peu nombreuses. Ne faudra-t-il pas d'abord faire une percée sur le plan du processus décisionnel ou existe-t-il au sein de l'Union européenne une volonté politique, pour mener une politique sociale effective ?
Le traité contient une disposition autorisant les pays qui le souhaitent à aller plus loin dans l'intégration européenne. Ne risque-t-on pas ainsi d'évoluer vers une Europe à deux vitesses ? Le membre se demande s'il n'existe pas un risque réel de voir certains pays refuser sciemment, dans le but de préserver leur position concurrentielle, de prendre part à une politique sociale ou fiscale commune.
Le Traité d'Amsterdam doit être lu en corrélation avec la question de l'élargissement. C'est à raison que la Belgique a insisté pour que l'on approfondisse l'Union avant de procéder à celui-ci. Doit-on organiser une nouvelle Conférence intergouvernementale pour analyser attentivement le problème de l'élargissement ? Par ailleurs, est-il possible de le réaliser avant d'avoir résolu le problème institutionnel ?
La Belgique a également pris les devants pour ce qui est d'une fédéralisation plus poussée de l'Europe. L'introduction de l'euro incitera-t-il davantage les États membres à vouloir aller plus loin dans la fédéralisation de l'Europe ?
Un membre estime que le mémorandum du Gouvernement belge constituait un bon point de départ pour la négociation. Par ailleurs, l'information donnée au Parlement par le Gouvernement durant la période de négociations était correcte.
Il est clair qu'une large majorité se dégagera au Parlement belge en faveur de la ratification du Traité d'Amsterdam.
L'exposé du ministre a cependant été trop positif. Le Traité d'Amsterdam est un traité mineur dans l'histoire européenne, dont la négociation se situait en un moment délicat : entre le processus de la monnaie unique qui doit être mené à terme et l'ouverture rapide des négociations sur le nouvel élargissement de l'Union.
On ne réalise pas suffisamment que le courant fédéraliste est devenu minoritaire en Europe. Plusieurs résultats le prouvent : l'introduction de la dimension intergouvernementale dans le premier pilier, la multiplication des protocoles ainsi que l'attitude du chancelier Kohl sur le problème de l'extension des votes à la majorité qualifiée. Ceci sont des indications assez claires d'un renforcement d'une orientation intergouvernementale dans le processus de construction européenne.
L'orateur conteste la thèse selon laquelle le Traité d'Amsterdam représente un pas significatif en matière économique et sociale puisque le chapitre de politique économique n'a pas été changé. Le protocole social a été inséré sans modification dans le traité. Le seul changement significatif a été l'introduction du vote de codécision pour le Parlement européen au sujet des matières sociales à majorité qualifiée.
Le titre sur l'emploi prévoit l'instauration d'une procédure qui a été calquée sur les grandes orientations de politique économique, cependant que les politiques d'emploi resteront nationales. L'exercice européen consistera donc à faire du benchmarking , c'est-à-dire à faire des exercices de comparaison entre pays de l'Union.
Sur le point fiscal on n'est pas arrivé à déclencher la majorité qualifiée, tant pour la fiscalité environnementale que pour la fiscalité de façon générale.
À la fois sur la problématique de l'élargissement de l'Europe et sur la problématique de la politique extérieure et de sécurité ainsi que les relations entre l'Union européenne et les États-Unis et sur le futur institutionnel de l'Europe, Amsterdam ne donne pas de signal clair puisque les 15 membres sont divisés entre eux sur ces questions. L'élargissement ne va qu'accroître l'hétérogénéité d'une vision politique qui se voudrait plus cohérente. La nécessité s'impose de se mettre d'accord sur l'idée de deux Europe. D'un côté, une Europe qui est un marché unique avec une politique d'encadrement du marché et de l'autre côté, un cercle plus restreint qui serait décidé à faire des avances en matière de politique de sécurité et de politique de défense. Ceci suppose qu'on puisse sortir du schéma actuel avec l'élaboration d'un nouveau traité. Quels sont les réflexions du ministre à ce sujet ?
Un membre se demande si la Belgique est vraiment parvenue à faire inscrire un certain nombre de points à l'ordre du jour, comme par exemple le rapprochement entre l'Union et le citoyen et le respect pour les droits de l'homme. Ne pourrait-on pas imaginer que les autres États membres aient accepté d'inscrire ces points à l'ordre du jour pour détourner l'attention des autres problèmes ?
Pour ce qui est de la politique étrangère et de sécurité communes, le vote à la majorité qualifiée est d'ores et déjà possible, mais uniquement à la condition que les États membres se soient accordés au préalable, à l'unanimité, sur la stratégie commune à suivre.
L'Europe sociale à deux vitesses est une source de préoccupation. Le Traité n'apporte cependant pas de solution à ce problème.
Pour conclure, l'intervenant souhaite savoir si tous les documents relatifs à l'Union sont transmis à la Belgique dans les trois langues nationales. Le traité a-t-il déjà été ratifié par les parlements régionaux ?
Un membre estime que le résultat en ce qui concerne la fiscalité est extrêmement faible. La zone euro va-t-elle atténuer la réforme économique et sociale dans l'union européenne à 15 ?
Le texte du projet de loi estime que les nouvelles dispositions sur la P.E.S.C. pourraient empêcher la composition de petits noyaux, qui sur base bilatérale régleraient certains problèmes. Quel est le rôle que les nouvelles dispositions sur la P.E.S.C. peuvent jouer dans l'ex-Yougoslavie ?
Il a parfois été dit que la méthode des conférences intergouvernementales apparaît de moins en moins productive. Les résultats du Conseil européen ont certainement été fort complexes pour cette raison.
C'est la raison pour laquelle il serait utile de mener une réflexion sur le fonctionnement futur de l'Union européenne avec 20 ou 25 États membres. C'est pourquoi l'administration a reçu l'ordre d'explorer des pistes afin de préciser la position belge sur ce point.
Par ailleurs, il faut noter que l'idée de constituer un groupe de quelques sages a été récemment soulevée par plusieurs personnes. Ceci pourrait peut-être donner des résultats positifs. Mais il faut alors que ces personnes puissent travailler dans l'indépendance et qu'elles reçoivent un mandat ambitieux sur le long terme.
L'observation faite sur les positions respectives des États membres reflète la réalité. Néanmoins, le processus d'explication vient seulement de débuter. Il faut aussi insister sur l'importance des contacts entre les Parlements respectifs.
Il faut bien distinguer le protocole sur les institutions qui a été approuvé par les 15 États membres, et la déclaration, présentée par trois États membres. La déclaration met l'accent sur le vote à la majorité qualifiée. Ce que nous devons par conséquent observer, ce sont les propositions envisageables dans ce domaine.
Jusqu'ici la Belgique a mené ses réflexions dans la ligne défendue lors de la C.I.G., et qui avait été approuvée par le Parlement. Des compromis sont possibles dans la représentation des populations, mais à conditions que des progrès significatifs soient réalisés dans l'approfondissement.
Il n'y a pas d'autres textes qui ont été conclus à Amsterdam. Tous les textes liés au traité sont repris dans les documents. Néanmoins, il faut rappeler que le Conseil européen d'Amsterdam a également adopté des résolutions sur le pacte de stabilité et de croissance. Elles ne doivent pas être soumises à l'approbation parlementaire même si elles présentent une importance politique significative. Ces textes se distinguent par ailleurs formellement du Traité d'Amsterdam et de ses annexes.
La question sur le renforcement de la commission est extrêmement intéressante puisqu'elle nous place au coeur du futur débat institutionnel. Tout a été mis en évidence afin de renforcer le président de la commission, plutôt que de renforcer la commission elle-même.
La position défendue dans la note du Gouvernement depuis le début de la C.I.G. a toujours été de renforcer la commission, parce que celle-ci constitue un élément supranational, dynamique et souvent protecteur des petits pays. Cette position a été défendue en concertation avec le Parlement. Cela n'interdit pas de souhaiter davantage de coordination dans la commission. C'est pour cela que la Belgique a appuyé le renforcement du président. Cela n'interdit pas de souhaiter davantage de contrôle démocratique. C'est pour cela que la Belgique a poussé vigoureusement en faveur du renforcement du Parlement européen.
La troïka se compose à l'heure actuelle de trois représentants de l'ancienne présidence, de l'actuelle présidence et de la nouvelle présidence. Le système prévu par le traité d'Amsterdam prévoit une combinaison de la présidence, du secrétaire général de la P.E.S.C. et de la Commission.
Cette structure présente au moins un avantage par rapport à la stucture actuelle. Deux acteurs sur trois seront dorénavant des acteurs stables. Ceci permettra sans aucun doute une meilleure continuité dans la mise en oeuvre des décisions de la P.E.S.C.
Il est vrai que le pays en charge de la présidence effectue parfois une confusion entre sa politique propre et celle de l'Union. Il faut réaliser que, précisément, le système du traité d'Amsterdam rendra cette confusion plus difficile à l'avenir. L'Union disposera d'instruments plus stables qui constitueront des instruments de communication plus importants avec les partenaires tiers. Cela n'empêchera pas la présidence de jouer un grand rôle, mais elle devra pour cela avoir reçu un véritable mandat du Conseil des Affaires générales.
Les implications financières de l'élargissement constituent évidemment un dossier complexe. Beaucoup de questions n'ont pas encore été résolues : De quelle Union européenne parlons-nous ? De combien de candidats parlons-nous ? Quelle date envisageons-nous ?
L'élargissement envisagé maintenant est le plus large, le plus ambitieux, le plus complexe aussi sur le plan politique. Il paraît, du point de vue intellectuel, difficile de croire qu'un pareil projet pourra être financé dans le cadre actuel des ressources propres. Cependant, nous constatons que le Conseil européen pense le contraire.
Il faudra attendre la fin des négociations sur Agenda 2000. Une série de réductions de dépenses ont été proposées. Si elles sont adoptées, elles faciliteront certainement la solution du problème budgétaire.
Concernant l'évolution de l'axe franco-allemand, il est clair qu'il y a des problèmes, nous sommes dans un nouveau contexte géopolitique. Ces problèmes expliquent certaines faiblesses du traité d'Amsterdam comme la coopération judiciaire et policière, la coopération renforcée et le vote à la majorité qualifiée.
L'intégration du protocole sociale dans le Traité d'Amsterdam a corrigé l'anomalie de Maastricht. En effet, la politique sociale ne repose plus sur deux bases juridiques distinctes (l'une valable pour 15 États membres et l'autre pour 14). L'intégration met fin à une intégration sociale différenciée et permet de mener une politique cohérente dans un même cadre juridique.
De curcroît, l'on a renforcé quelque peu le contenu des dispositions. À présent, la politique sociale commune comprend également la lutte contre l'exclusion sociale, l'égalité totale des chances entre les hommes et les femmes dans la vie professionnelle et l'égalité de rémunération pour un travail égal ou similaire.
Le Traité pourrait donc avoir une incidence importante sur l'élaboration des normes sociales européennes. Cependant, comme l'on a conservé la règle de l'unanimité dans une série de domaines clés, la volonté politique continuera à jouer un grand rôle.
L'augmentation de la pression exercée par l'opinion publique, les parlements nationaux et surtout les syndicats, en faveur d'une Europe sociale stimulera sans doute cette volonté politique.
Grâce au renforcement de son droit de codécision, le Parlement européen pourra amender en profondeur les propositions de la Commission. L'Europe sociale ne dépendra donc plus uniquement de la volonté des gouvernements.
Eu égard à l'élargissement progressif de l'Europe et au fait que les États membres ne souhaitent pas tous progresser vers davantage d'intégration dans tous les domaines à la même vitesse, la coopération renforcée permettra sans doute de ne pas laisser stagner la construction européenne ni lui faire adopter le rythme de celui qui souhaite avancer le plus lentement.
Dans un certain sens, l'on pourrait créer ainsi une sorte de noyau dur, ce qui pourrait avoir un effet mobilisateur. Les conditions d'application de la coopération renforcée sont toutefois tellement strictes que même si elle devait générer plusieurs vitesses, il semble que l'on ait prévu suffisamment de garanties pour que la construction européenne ne soit pas mise à mal.
Il y a le défi institutionnel qui consiste à préparer l'Union à l'élargissement, processus dans lequel les divers parlements des États membres peuvent jouer un rôle.
À cet égard, le ministre renvoie au compromis qui s'est dégagé et qui a été formulé dans le « Protocole sur les institutions dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne », ainsi qu'à la déclaration en la matière signée par la Belgique, la France et l'Italie.
La Belgique, la France et l'Italie constatent que, sur la base des résultats de la Conférence intergouvernementale, le Traité d'Amsterdam ne répond pas à la nécessité, réaffirmée au Conseil européen de Madrid, de progrès substantiels dans la voie du renforcement des institutions. Ces pays considèrent qu'un tel renforcement est une condition indispensable de la conclusion des premières négociations d'adhésion.
L'introduction de la monnaie unique et la création de ce que l'on appelle un Conseil « euro » sont en réalité des applications pratiques de la coopération renforcée. Là aussi, l'on s'attend à ce que cela produit un effet d'encouragement plutôt que de provoquer un démantèlement de l'Union.
Il est clair qu'il est préférable de canaliser pareilles aspirations au sein de l'Union, plutôt que de les laisser naître en dehors de celle-ci, comme cela fut le cas, par exemple, pour Schengen.
En ce qui concerne l'élargissement, une nouvelle conférence intergouvernementale n'est pas nécessaire au point de vue juridique, mais elle l'est au point de vue politique, et ce, surtout pour rendre la prise de décision plus efficace et adapter les institutions.
Il est exact que tout le monde s'attende à ce que l'U.E.M. amorce le renforcement d'une Europe plus fédérale. L'U.E.M. servira en quelque sorte de levier à l'Union politique, notamment parce qu'au sein de la zone de la monnaie unique, il faudra parvenir à une plus grande harmonisation sur les plans social, fiscal et environnemental.
Il est vrai que les idées fédéralistes sont moins populaires que naguère. Le contexte a changé, et l'Union européenne a changé aussi. Néanmoins, il faut se garder d'une description catastrophique de la réalité. La réalité est que l'euro a été réalisé, la politique de l'immigration a été réalisée et le chapitre sur l'emploi a été réalisé.
Il est vrai qu'il faut relativiser quelque peu l'affirmation que le Traité d'Amsterdam est un traité social, ainsi que l'affirmation que le Traité de Maastricht a été un traité monétaire. Pourtant, il est tout aussi clair que le Traité d'Amsterdam réalise une série de changements qui vont tous dans le même sens : une Europe plus favorable au social et à l'environnement. On ne peut pas contester qu'il s'agit là d'une amélioration.
Il n'est cependant pas correct de dire que les dispositions sur l'emploi se résument à un benchmarking . On ne se contente pas de comparer les réalisations des États membres. Les dispositions du Traité d'Amsterdam prévoient l'élaboration d'une stratégie commune pour l'emploi. Elles prévoient aussi l'adoption de dispositions à la majorité qualifiée.
Au début de la C.I.G., l'ensemble de la société civile a insisté, de concert avec le Parlement, pour que le nouveau traité réponde aux besoins véritables du citoyen. En témoignent les nombreux manifestes, déclarations solennelles, plates-formes et autres revendications de groupes d'action et de pression les plus divers, issus de différents secteurs de la société.
Dès lors, il semble normal que les négociateurs aient tenu compte des signaux, des directives ou même des mandats clairs qu'ils avaient reçus de leurs parlements nationaux. C'est donc pour respecter ce contrat social que le nouveau traité répond à toute une série de revendications des citoyens concernant la vie quotidienne : l'emploi, la santé, l'environnement, la consommation, la sécurité, les services publics, etc.
Ces acquis sont moins évidents qu'ils ne le paraissent. C'est pourquoi il ne serait pas correct d'affirmer que l'on a approuvé pareils points de l'ordre du jour pour détourner l'attention d'autres lacunes.
S'il est exact que les stratégies communes doivent encore être approuvées à l'unanimité, le fait qu'elles puissent, une fois approuvées, être mises en oeuvre et concrétisées par des décisions prises à la majorité avec certes une possibilité d'abstention constructive , représente cependant un progrès notable. À cet égard, l'on ne saurait négliger la valeur d'un tel précédent : il contribuera à familiariser en quelque sorte les décisions en matière de politique étrangère avec le vote à la majorité, ce qui, à terme, pourrait influencer la mentalité et la culture de la politique étrangère et de sécurité communes.
Même si c'est un résultat modeste, l'introduction des décisions à la majorité dans un domaine qui est toujours considéré comme le sanctuaire de la souveraineté nationale, frayera sans doute le chemin et il faut espérer que l'on aura ainsi un processus irréversible.
Tous les documents officiels de l'Union sont diffusés dans les langues officielles de l'Union. Tel était déjà le cas auparavant. Depuis le Traité d'Amsterdam, la nouveauté est que lorsque le citoyen s'adresse aux institutions, il doit pouvoir s'exprimer dans sa propre langue et que ces institutions doivent lui répondre dans la même langue.
Concernant la zone euro, il faut faire une distinction entre le court terme et le moyen terme.
À court terme, ce sont les États membres de l'Euroland, comme on dit, qui auront tendance à réaliser des réformes. Cela risque effectivement de détourner l'énergie de l'Europe des Quinze. En même temps, l'euro jouera son rôle en renforçant l'intégration européenne.
À moyen terme la situation évoluera. Si l'euro réussit, il exercera un pouvoir d'attraction considérable. Au Royaume-Uni et en Suède, beaucoup d'entreprises ont déjà décidé d'utiliser l'euro, ce qui va sans doute exercer une pression considérable sur les gouvernements de ces pays. Si la coopération dans l'Euroland se renforce, cela exercera une attraction encore plus grande.
Le rôle des nouvelles dispositions sur la P.E.S.C. dans l'ex-Yougoslavie est une question difficile. Le conflit de l'ex-Yougoslavie a des racines qui plongent dans 1 000 ans d'histoire. Les dispositions sur la P.E.S.C. sont toujours très compliquées.
Néanmoins, les dispositions du Traité d'Amsterdam constitueront tout de même un avantage puisqu'elles donnent une meilleure structure d'exécution. Elles vont aussi inciter le Conseil européen a définir des stratégies. Cependant, un système de sécurité implique la capacité d'intervenir sur le terrain, une capacité que nous n'avons pas encore en ce moment.
Les articles ainsi que l'ensemble du projet de loi ont été adoptés à l'unanimité des 8 membres présents.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 8 membres présents.
Les rapporteurs, | La présidente, |
Paul HATRY. Patrick HOSTEKINT. |
Anne-Marie LIZIN. |