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Sénat de Belgique

SESSION DE 1996-1997

14 DÉCEMBRE 1996


Projet de loi instituant le collège des procureurs généraux et créant la fonction de magistrat fédéral


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE LA JUSTICE PAR MM. COVELIERS ET VANDENBERGHE


I. EXPOSÉ INTRODUCTIF DU MINISTRE DE LA JUSTICE

Le présent projet constitue une des priorités du Gouvernement, non seulement une priorité politique, mais également une priorité en ce qui concerne l'approche globale de la politique de la justice et la réalisation d'une politique criminelle.

En exécution de l'accord de gouvernement, le Gouvernement vise, par le projet de loi en discussion, à consacrer dans la loi l'existence du collège des procureurs généraux et la fonction des magistrats nationaux, et à fournir une base juridique appropriée au fonctionnement de ces nouveaux organes du ministère public.

La définition légale des instruments utiles que sont indéniablement le collège des procureurs généraux et les magistrats nationaux constitue un premier pas important sur la voie de l'élargissement du champ d'action du ministère public. Le collège doit jouer un rôle de pionnier dans ce mouvement et prendre ses responsabilités.

La « responsabilisation » du collège dans le climat actuel de nouveau profilage du ministère public est donc une chose très importante et elle doit être assurée à divers niveaux.

L'on peut songer, par exemple, à une redéfinition des relations entre les parquets généraux et les parquets de première instance. À cet égard, l'on a décidé, au cours de la réunion du collège avec le ministre à la fin septembre - début octobre, que le collège devait examiner la question de savoir comment les procureurs généraux devraient développer leurs relations à l'égard des parquets. Il faudra bientôt débattre de ce sujet. Le collège doit d'ores et déjà se préparer à en discuter.

Le collège devra, en outre, prendre en considération, pour définir sa politique, la coopération avec d'autres services comme le Service de la politique criminelle, le Service général d'appui policier et l'Institut national de criminalistique et de criminologie.

Il faut en outre évoquer le rôle important que le collège est appelé à jouer dans l'explication et la redéfinition des tâches administratives du ministère public. Le ministre a demandé au collège de dresser un inventaire des missions d'avis et de contrôle des parquets qui peuvent être supprimées, simplifiées (par exemple par le biais de contrôles par sondage) ou confiées au personnel administratif des parquets. Le ministère public pourra alors se concentrer sur sa véritable tâche de recherche et de poursuite des infractions.

Enfin, aux yeux du ministre, le collège doit également s'attaquer à l'arriéré en matière d'examen des dossiers répressifs. Il a demandé au collège de procéder à une analyse des points sensibles et d'élaborer un plan stratégique en vue d'initiatives législatives et d'autres mesures nécessaires. Cette question concerne entre autres l'article 136bis du Code d'instruction criminelle, qui règle le contrôle de la progression des instructions judiciaires. L'application de cet article de loi soulève des difficultés de procédure et des difficultés pratiques, si bien qu'il y a lieu de prévoir des systèmes simplifiés et moins formels. L'application d'un système d'évaluation permettant de mieux suivre le travail du magistrat du parquet cadre également avec le développement d'un système de contrôle plus effectif.

Ce ne sont là que quelques points au sujet desquels le collège devra montrer ce qu'il est capable de faire; il devra contribuer à donner un nouvel élan à la politique de recherche et de poursuite, par des actions efficaces et décidées. Le projet de loi à l'examen vise à lui donner, à cet effet, une solide base juridique, mais il appartiendra au collège lui-même de répondre à l'attente qu'on met en lui.

Dans cet exposé introductif, je tiens également à donner quelques commentaires à propos des lignes de force et des principes les plus importants qui figurent dans le projet de loi.

Le premier chapitre concerne le Collège des procureurs généraux

Tout d'abord, l'on y pose le principe et l'on y fixe la composition du collège. Le collège, tout comme les procureurs généraux pris individuellement, est sous l'autorité du ministre de la Justice. La compétence du collège s'étend à l'ensemble du territoire du Royaume. Les décisions du collège engagent ses membres et tous les autres membres du ministère public placés sous leur surveillance et leur direction.

Le même article énumère les missions attribuées au collège. Ces missions sont de trois natures et portent sur, d'une part, la coordination et le développement cohérent de la politique criminelle, d'autre part, le fonctionnement du ministère public et, enfin, l'obligation d'informer le ministre de la Justice et de lui donner des avis. La mission essentielle du collège consiste indéniablement à coordonner et à veiller au développement cohérent de la politique criminelle, laquelle est définie par le ministre de la Justice en concertation avec le collège.

Pour exécuter ces missions, le collège statue par consensus. La loi prévoit que, si aucun consensus ne se dégage et que l'exécution des lignes directrices du ministre de la Justice en matière de politique criminelle est ainsi mise en péril, le ministre peut prendre des mesures. L'on prévoit cette possibilité pour éviter que l'absence de consensus au sein du collège n'ait pour conséquence que les directives arrêtées ne puissent plus faire l'objet d'une exécution coordonnée et cohérente. Le ministre peut à ce moment éclaircir ou préciser ses lignes directrices, ou convoquer à nouveau le collège pour une concertation ultérieure, ou exercer son autorité sur un ou sur plusieurs procureurs généraux individuellement si ceux-ci continuent à refuser, après une nouvelle concertation, de mettre ces lignes directrices à exécution. Il est cependant clair que le ministre de la Justice ne peut jamais, lui-même, exercer l'action publique.

La loi prévoit également que, lors de l'exécution de ses missions, le collège peut faire appel aux magistrats des parquets généraux. Ces magistrats restent attachés à leur parquet général, mais apportent leur soutien à la politique du collège. Ils veillent, chacun pour son domaine, à définir une approche identique, des directives identiques, une conception analogue et uniforme et une politique de poursuite identique pour tous les arrondissements judiciaires du Royaume, à chercher des solutions identiques pour les problèmes de fait et juridiques. Ils procurent ainsi une certaine compétence matérielle au collège, auquel il appartiendra ensuite, sur la base de ladite compétence, de coordonner et d'élaborer la politique criminelle et de la traduire en directives. Déjà maintenant, l'avocat général M. Timperman est chargé d'un rôle semblable de soutien à la politique en ce qui concerne le problème des hormones.

Le chapitre en question règle ensuite la fréquence des réunions, la présence à celles-ci du ministre de la Justice, la présidence, et les modalités de fonctionnement du collège.

Le projet prévoit également que le collège fait annuellement rapport de ses activités au ministre de la Justice. Ce rapport contient le bilan de la politique de recherche et de poursuite pour l'année écoulée et les priorités pour l'année à venir. Le ministre de la Justice communiquera ensuite ledit rapport aux Chambres.

Enfin, le projet prévoit, d'une part, que le Roi peut charger les membres du collège de tâches spécifiques et, d'autre part, qu'il règle également la façon dont le collège collabore avec les autres services qui se trouvent sous l'autorité du ministre de la Justice. L'on entend, par l'attribution de tâches spécifiques, que chaque procureur général est responsable, au sein du collège, de la préparation et du suivi de certaines matières, missions dont il s'acquitte en recueillant des informations et de la documentation et en s'occupant de la coordination.

Actuellement, l'on débat du contenu de ces tâches spécifiques.

L'on propose de créer cinq groupes de compétences. Le premier concernerait l'ensemble de la politique pénale, y compris l'organisation des cours et des tribunaux; le deuxième, le terrorisme et les relations internationales; le troisième, l'ensemble des services de police et la sécurité du citoyen; le quatrième, la protection de la jeunesse dans son ensemble et les problèmes généraux de droit civil; et le cinquième, la criminalité économique et sociale.

L'on n'a toutefois encore pris aucune décision définitive concernant ces groupes de compétences.

Un deuxième chapitre règle la politique criminelle

Ce chapitre confirme la responsabilité du ministre de la Justice pour ce qui est de la définition des lignes directrices de la politique criminelle en concertation avec le collège des procureurs généraux. Ces lignes directrices sont contraignantes pour l'ensemble des membres du ministère public. Les procureurs généraux sont responsables de la mise en oeuvre de ces lignes directrices au sein de leur juridiction.

Un troisième chapitre important traite des magistrats nationaux

Depuis qu'ils existent, les magistrats nationaux ont prouvé suffisamment leur utilité.

En mettant à la disposition des divers parquets leurs connaissances et leur expérience dans des matières complexes, et ce dans les limites de leur mission de coordination, les magistrats nationaux ont apporté une plus-value évidente aux enquêtes. Il est clair qu'ils pourront eux aussi contribuer au développement ultérieur du ministère public.

Le paragraphe premier prévoit l'existence des magistrats nationaux et précise que ceux-ci assistent le collège des procureurs généraux.

Leur mission s'étend à l'ensemble du territoire du Royaume. Ils sont à cet égard sous l'autorité du collège et sous la surveillance et la direction du membre du collège que le Roi aura désigné à cette fin. Plutôt que de charger un seul membre du collège des contacts avec les magistrats nationaux, il convient de prévoir, pour ces derniers, la possibilité de s'adresser au membre du collège dans le cadre des compétences duquel ils opèrent. Il s'agira, bien sûr, souvent d'un même procureur général, étant donné que les matières dont les magistrats nationaux ont à connaître généralement (la criminalité organisée, la coopération internationale) sont à ce point connexes qu'elles sont confiées la plupart du temps à un seul membre du collège.

Le § 2 fixe le mode de désignation des magistrats nationaux, les conditions d'accès à la fonction et la durée de leur mandat.

Le paragraphe le plus important de cet article est sans nul doute le § 3, qui énumère les missions confiées aux magistrats nationaux.

Une première mission consiste à assurer la coordination de l'exercice de l'action publique et de faciliter la coopération internationale. En principe, ils agissent en la matière en concertation avec le procureur du Roi. Néanmoins, si, à un certain moment, leur mission de coordination leur impose de donner des instructions contraignantes à un procureur du Roi, ils peuvent le faire après en avoir informé le procureur général territorialement compétent. Ce dernier peut en apprécier l'opportunité et éventuellement s'y opposer.

Une deuxième mission consiste à prendre toutes les mesures urgentes qui sont nécessaires dans le cadre de l'exercice de l'action publique, aussi longtemps qu'aucun procureur du Roi n'a été saisi. C'est ainsi qu'ils reçoivent la qualité d'officiers de police judiciaire, qu'ils disposent de tous les pouvoirs du procureur du Roi et qu'ils peuvent procéder ou faire procéder à tous les actes de recherche ou d'instruction relevant de leurs attributions sur l'ensemble du territoire du Royaume.

Enfin, un quatrième chapitre contient une série de dispositions relatives au secrétariat du collège et des magistrats nationaux, à leur siège (à Bruxelles) et aux conditions de leur nomination.

Le ministre espère avoir suffisamment souligné, dans cette première présentation du projet de loi, l'importance du collège des procureurs généraux et de la fonction de magistrat national. Au moment où la justice criminelle est au centre des préoccupations des citoyens et du monde politique, on peut dire que le collège et les magistrats nationaux seront les instruments qui permettront de satisfaire les besoins de la société en matière de lutte contre la criminalité. La loi en projet devra donner au collège et aux magistrats nationaux une base légale et leur fournir les moyens dont ils ont besoin pour pouvoir assumer leurs responsabilités et s'acquitter convenablement des missions attachées aux positions-clés qui leur ont été confiées.

Ce projet est un pas très important vers une politique criminelle plus efficace.

Les auditions des gens du terrain, notamment des magistrats nationaux, nous donneront une vue plus détaillée sur l'organisation pratique de leur fonction. Les compétences reprises dans le projet de loi à l'examen ont été fixées à la suite de leurs remarques et de leur souhait de jouer surtout un rôle de coordination.

Cette fonction sert de référence pour d'autres pays européens.

Il est également important d'entendre les membres du collège des procureurs généraux.

Bien que les postes en question existent déjà et fonctionnent bien, il est important de leur donner les moyens afin de prendre des décisions impératives.

Il sera important de créer un réflexe national, de chercher l'équilibre entre la compétence nationale et le pouvoir territorial.

Cela demande un changement de mentalité sans pour autant laisser tomber l'aspect territorial. Aux Pays-Bas par exemple, on a fait totalement abstraction du pouvoir territorial, mais cela n'a pas réussi.

Le ministre a une grande responsabilité dans ce projet. Il faut bien entendu laisser le temps au collège des procureurs généraux de réaliser cette mission nationale et d'avoir la possibilité de mener une politique criminelle.

La collaboration entre le judiciaire et la politique est un élément nouveau, mais indispensable pour mener une politique criminelle dont nous avons tellement besoin.

II. DISCUSSION GÉNÉRALE

Un membre confirme que l'on se trouve face à un débat très important.

Malgré que le projet s'inscrive dans une continuité apparente, un élément nouveau s'y ajoute, notamment le fait qu'une politique contraignante peut intervenir pour l'ensemble des procureurs généraux.

Un débat s'engage sur le pouvoir du ministre d'intervenir par injonctions négatives s'opposant à force contraignante des décisions prises par consensus.

Le projet va donc bien au-delà d'une régularisation de la situation existante.

Une autre membre reconnaît la nécessité du projet, mais se demande s'il a l'ampleur nécessaire pour répondre à l'absence d'une politique criminelle que l'on connaît depuis plusieurs années, si la réponse ne demeure donc pas à l'état embryonnaire.

L'institutionnalisation du collège des procureurs généraux, qui fonctionne déjà, mais sans démontrer une efficacité signifiante, ne lui semble pas suffisant.

Si les procureurs généraux sont indispensables dans la politique criminelle, la question se pose de savoir s'ils sont les seuls et les mieux indiqués pour exercer cette mission. Ne doit-on donc pas impliquer d'autres personnes dans un organe plus large de politique criminelle ? Elle constate, par exemple, une absence de réunions avec les procureurs du Roi.

Face à toute la problématique policière, il serait peut-être opportun d'associer les deux et, parallèlement, de renforcer la tutelle judiciaire sur les différents services de police.

Elle se demande également quel va être le rôle et le statut du Service de politique criminelle; il lui semble en effet nécessaire de consacrer un service permanent au service du collège ou du ministre. Ne devrait-on pas élargir l'institutionnalisation du collège et instaurer une sorte de « procureur fédéral », donc créer un service opérationnel permanent, en liaison avec les magistrats nationaux, les procureurs et les services de police ?

Par ailleurs, l'intervenante se demande s'il ne serait pas utile d'instaurer une mission supplémentaire pour les magistrats nationaux et de leur donner un rôle d'arbitrage, en cas de problème entre juges d'instruction, services de police, procureurs, etc.

L'intervenante a l'impression que ce projet arrive de manière inachevée et prématurée pour faire face à une problématique qui implique une réforme des services de police et du contrôle entre eux.

Le premier intervenant réplique qu'il faut quand même être attentif à l'intégration du ministre de la Justice dans la politique criminelle.

Il attire également l'attention sur le fait que les remarques de l'intervenante précédente soulèvent la question de l'indépendance des pouvoirs.

Les conflits entre juges ne peuvent pas être tranchés par un collège des procureurs généraux.

L'intervenante précise qu'elle visait plutôt un rôle de coordination.

Un troisième membre s'associe à l'énumération des problèmes qui a été faite par la préopinante et le texte à l'examen lui inspire dès lors des sentiments mêlés.

Un autre membre approuve entièrement ce qui a été dit au sujet des magistrats nationaux et il propose même d'étendre encore leur champ d'action.

Les expériences du passé l'incitent cependant à exprimer des réserves au sujet des procureurs généraux. Il se réfère notamment aux dissensions qui existent entre eux, aux conflits de personnes, au fait qu'ils répugnent à se départir de leur pouvoir, quel qu'il soit, etc.

Il faudrait effectivement réformer le ministère public en fonction d'une réforme des services de police. Pour lui, la politique de recherche et la politique de poursuite des infractions sont si étroitement liées que tout décalage entre les deux services précités tourne à l'avantage des auteurs d'infractions.

Le ministre a procédé à une comparaison avec la situation qui existe aux Pays-Bas. L'intervenant estime que cette comparaison doit être relativisée, car aux Pays-Bas, les rapports entre le procureur général (qui est un officier de justice) et le ministre sont réglés autrement que chez nous, y compris au niveau constitutionnel.

Il admet cependant que les Pays-Bas ont recouru au principe de la compétence territoriale.

L'on pourrait s'interroger sur la valeur ajoutée qu'apporterait un parquet général. Ne pourrait-on pas imaginer un système dans lequel les parquets locaux seraient conservés et un système de magistrats nationaux chargés de traiter les problèmes qui dépassent le niveau local ?

Nous maintenons l'étape intermédiaire.

Par analogie avec ce qui se passe dans les services de police, les rapports hiérarchiques régissant les relations entre les fonctionnaires chargés des poursuites devraient être horizontaux plutôt que verticaux.

Grâce à cela, l'on pourrait regrouper les personnes qui sont chargées d'une affaire déterminée mais qui appartiennent à des parquets différents.

L'on pourrait évidemment arguer contre cette manière de voir que nous avons tendance actuellement à surévaluer l'importance de la criminalité organisée et des « entreprises criminelles », alors que c'est surtout la petite criminalité, c'est-à-dire la criminalité courante, qui influence le sentiment de sécurité relatif du citoyen.

Il est probable qu'une action contre la criminalité organisée ne permettra guère d'améliorer ce sentiment de sécurité.

Or, l'appareil que nous sommes en train de mettre sur pied ne tient pas compte des petits délits.

Le membre poursuit en expliquant ce qui le gène dans le système du collège des procureurs généraux.

Le rapport de la commission d'enquête sur le banditisme contenait un plaidoyer pour une politique criminelle. En son temps, ce rapport a d'abord été soumis aux procureurs généraux, qui ont vivement réagi au passage relatif à la politique criminelle, estimant qu'il leur appartenait à eux-mêmes de définir la politique criminelle dans leur ressort. Il va de soi que cela ne correspond pas à l'intention des auteurs du rapport. Il y a lieu d'établir une distinction entre la politique criminelle et la politique des poursuites.

Pour l'intervenant, la politique criminelle, qui consiste à fixer les priorités que la société doit respecter et à définir les fondements sur lesquels l'on va structurer l'appareil de recherche, relève de la responsabilité politique, et plus précisément de la responsabilité du ministre de la Justice, qui exerce celle-ci sous le contrôle du Parlement. Il estime que les procureurs généraux n'ont qu'une fonction consultative en la matière.

Par contre, la politique en matière de poursuites est du ressort du ministère public et, plus précisément, du magistrat qui requiert des poursuites. Le législateur et le pouvoir exécutif ont cependant leur mot à dire en la matière et ils peuvent justement intervenir par l'intermédiaire du collège.

Le membre souligne également qu'un certain nombre de critiques ont été émises à l'égard du projet de loi, notamment par Mme Liekendael, en ce qui concerne la violation flagrante du principe de la séparation des pouvoirs qu'il entraînerait.

À titre subsidiaire, le membre s'interroge également sur l'utilité du ministère public près la Cour de cassation. Aucune cour suprême au monde ne possède de ministère public.

Le membre se demande ensuite s'il ne faut pas réexaminer la durée des mandats des procureurs généraux. Il estime que le système des procureurs généraux ne peut fonctionner de manière adéquate que si les procureurs généraux jouissent tous d'une légitimité absolue par rapport à leurs collaborateurs. Il estime qu'il leur est impossible de fonctionner de manière optimale pendant une très longue période.

Il faudrait dès lors se demander s'il ne conviendrait pas de limiter la durée des mandats des procureurs et des procureurs généraux; si l'on peut nommer les magistrats nationaux pour une durée limitée, pourquoi ne pourrait-on pas en faire autant pour ce qui est des procureurs généraux ? La question est d'autant plus pressante qu'il est extrêmement difficile de contrôler les procureurs généraux.

Bien entendu, ce caractère provisoire est lié au point de vue relatif au principe de la séparation des pouvoirs. Initialement, l'on pensait, selon ce membre, à une coopération des pouvoirs, le premier étant le pouvoir législatif, l'exécutif étant le pouvoir dérivé et le pouvoir judiciaire, un pouvoir attribué (cf. L.P. Suetens).

Enfin, l'intervenant fait encore une remarque marginale concernant l'âge de la mise à la retraite des procureurs généraux. Il estime que l'âge de la retraite doit être fixé à 65 ans pour chaque fonctionnaire et chaque magistrat.

Il estime, en outre, qu'il y a lieu de préciser la relation d'autorité. Les procureurs généraux, qui se sont vu attribuer chacun une matière spécifique, peuvent-ils également dialoguer avec un procureur d'un autre ressort et lui demander de prendre des mesures ? Qu'en est-il de leurs rapports avec les magistrats nationaux ? Faut-il des rapports hiérarchiques ? Il faut savoir que le magistrat national assume de nombreuses tâches, par exemple la direction de la 23e brigade. Cette 23e brigade pourrait, par exemple, constituer le service opérationnel, mais pour cela il faudrait définir différemment la relation d'autorité entre la 23e brigade et le commissaire général de la police judiciaire.

Qu'en est-il, par exemple, de la relation avec le magistat national, le collège et le B.C.R. ? Et qu'en est-il de la relation entre le S.G.A.P. et les magistrats nationaux, entre le S.G.A.P. et l'Intérieur, le collège et les magistrats nationaux ?

Le même problème se pose en ce qui concerne les officiers de liaison (officiers qui se trouvent dans les capitales du monde), car les magistrats nationaux étaient les coordinateurs des officiers de liaison; les magistrats nationaux restent-ils également compétents en la matière ?

Qu'en est-il de la relation avec l'O.C.D.E.F.O. (délits économiques), et des problèmes concernant Schengen ?

L'intervenant renvoie à cet égard au rapport des magistrats nationaux, qui énumère toutes ces tâches.

Il conclut qu'il serait bon, au cas où on légiférerait à propos du statut des magistrats nationaux, que l'on tienne compte également des problèmes qui se sont posés dans le passé.

En résumé, il juge qu'il serait positif que l'on réglemente une série de choses sans tomber dans l'excès à cet égard et en tenant compte des expériences du passé.

Il faudrait tout d'abord disposer d'une vision globale. En effet, le projet ne pourra être utile que si le ministre de l'Intérieur décide, lui aussi, de procéder à une restructuration similaire des services de police.

Il estime utile pour l'heure d'achever l'examen du projet et il considère que le législateur devra se préparer à réagir à une série de critiques qui lui seront adressées, dans le cadre de la séparation des pouvoirs.

Un autre intervenant renvoie à l'avis du Conseil d'État en ce qui concerne les missions des magistrats nationaux. Il y a notamment une discussion en ce qui concerne l'interférence de la concurrence qui peut exister entre le rôle de magistrat national et le rôle du parquet au niveau des différents arrondissements judiciaires. La conclusion du Conseil d'État plaide pour une clarification de ce texte.

La question qu'un membre se pose se situe au niveau de la compétence identique à celle donnée au parquet. Sur le plan international, cela ne pose pas de problème, mais qu'en est-il des problèmes intérieurs ?

De manière très précise, il veut savoir jusqu'où la compétence en tant que membre du parquet est exercée.

De plus, si cette compétence n'est pas déterminée de manière extrêmement précise, quid de la relation entre les magistrats nationaux et le juge d'instruction ?

L'intervenant suivant trouve que le projet en discussion est un projet de loi intéressant, dont les ambitions sont limitées, en ce sens qu'il ne touche pas aux problèmes qu'il ne souhaite pas régler. Il est évident que les problèmes relatifs à la politique criminelle, à la politique en matière de poursuite et aux services de police et à leur fonctionnement dépassent nettement le cadre qui correspond à celui de l'institution d'un collège des procureurs généraux. L'on peut poser bien des questions à l'occasion de l'examen de ce projet, mais il ne faut pas perdre de vue qu'il n'a pas pour objet de répondre à ces questions. Les réponses devront être apportées par le biais d'autres initiatives législatives et dans une large mesure par le biais d'une refonte du Code d'instruction criminelle.

La discussion relative à ce projet de loi peut donc évoluer dans deux sens différents. L'on peut s'en servir pour émettre toutes sortes de considérations sur la situation dans laquelle se trouve la justice ou pour examiner les problèmes juridico-techniques en tenant compte de l'avis négatif du Conseil d'État concernant le projet initial.

Le membre déclare qu'il se contentera d'évoquer une série de questions posées par le Conseil d'État et de faire part, ensuite, de quelques considérations générales. Ce projet fait suite au rapport de la commission chargée d'enquêter sur la lutte contre le banditisme et le terrorisme, et l'on peut déplorer qu'il se soit fait attendre si longtemps.

Cette commission est partie du principe que la stratégie en matière de poursuites et de recherche doit être une stratégie politique, puisqu'il y a lieu de préciser des priorités et des objectifs.

Aussi la Commission sur le banditisme estimait-elle que la responsabilité incombait au pouvoir exécutif, qui, à son tour, doit rendre des comptes au Parlement. L'intervenant estime qu'en ce qui concerne les procureurs généraux, le projet à l'examen tient compte, dans une grande mesure, de ce principe arrêté par la Commission sur le banditisme, puisqu'en fin de compte la politique de poursuite revient en grande partie au ministre de la Justice, qui est politiquement responsable devant le Parlement.

Nous touchons là en effet à l'un des aspects du débat relatif à la séparation des pouvoirs, c'est-à-dire que la responsabilité politique du ministre de la Justice doit avoir un sens et que, dans une démocratie, toute constitution de pouvoir ou prise de décision doit nécessairement aller de pair avec une responsabilité politique. Une des caractéristiques de la démocratie représentative est que le pouvoir exécutif doit rendre des comptes au pouvoir législatif. Si l'on parle de politique criminelle ou de politique de poursuite, l'on pose d'office la question de la responsabilité politique.

À cet égard, le Conseil d'État a formulé quelques observations, qui semblent s'inspirer de la notion de la séparation des pouvoirs. L'intervenant saurait gré au ministre de bien vouloir répondre à certaines de ces observations.

L'intervenant renvoie d'abord à l'article 2 du projet, visant à insérer un article 143bis , § 1er , libellé comme suit :

« Un article 143bis , rédigé comme suit, est inséré dans le Code judiciaire.

« Art. 143bis. § 1er . Les procureurs généraux près les cours d'appel forment ensemble un collège, appelé collège des procureurs généraux, qui est placé sous l'autorité du ministre de la Justice. La compétence du collège s'étend à l'ensemble du territoire du Royaume et ses décisions engagent les procureurs généraux près les cours d'appel et tous les membres du ministère public placés sous leur surveillance et leur direction. »

À ce propos, le Conseil d'État donne l'avis suivant (Doc. Sénat, nº 1-447/1, p. 23) :

« Toutefois, le législateur ne peut abandonner au collège des procureurs généraux le pouvoir de prendre des règles déterminant ou aboutissant à déterminer le statut et les attributions des membres du ministère public, ces matières devant être réglées par la loi.

De même, le législateur abdiquerait des compétences qui lui reviennent en chargeant le collège des procureurs généraux d'édicter des mesures à caractère contraignant qui sont susceptibles d'influer sur la situation des tiers et d'opérer, à leur égard, comme de véritables règles de droit. »

Un autre membre renvoie également aux observations du Conseil d'État concernant l'article 143bis , §§ 2 et 3.

L'article 143bis , § 2, du projet initial (Doc. Sénat, nº 1-447/1, p. 17), était libellé comme suit :

« § 2. Le ministre de la Justice détermine en collaboration avec le collège des procureurs généraux les lignes directrices de la politique criminelle et notamment de la politique de recherche et de poursuite. À défaut de consensus, le ministre statue. »

Ce texte a été modifié et est désormais libellé comme suit :

« § 3. Le collège des procureurs généraux statue par consensus. Si aucun consensus ne peut être dégagé au sein du collège concernant les compétences visées au § 2, 1º et 2º, et si l'exécution des lignes directrices du ministre de la Justice en matière de politique criminelle est ainsi mise en péril, le ministre de la Justice prendra les mesures nécessaires. »

L'intervenant se demande tout d'abord quelles règles de droit l'on suivra pour la prise de décision, si aucun consensus ne peut être dégagé concernant les compétences qui ne sont pas visées au § 2, 1º et 2º.

Il se demande, en deuxième lieu, quelle est la teneur des « mesures nécessaires » mentionnées à cet article. Ces termes ne peuvent-ils pas signifier que c'est le ministre qui statue, comme le prévoyait le projet dans sa version initiale ?

L'intervenant cite ensuite l'article 3 :

« Un article 143ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :

« Art. 143ter . Le ministre de la Justice soumet à la discussion du collège des procureurs généraux les projets de lignes directrices de politique criminelle, en ce compris les lignes directrices en matière de politique de recherche et de poursuite. Il arrête les lignes directrices. Ces lignes directrices sont contraignantes pour tous les membres du ministère public. Les procureurs généraux près les cours d'appel veillent à l'exécution de ces lignes directrices au sein de leur ressort. »

Le Conseil d'État a formulé des remarques à propos de cet article à la lumière d'un certain nombre de dispositions constitutionnelles.

L'intervenant demande ­ et c'est une question intéressante d'un point de vue politique ­ si le ministre pense pouvoir déduire, à la lecture de l'article 143ter proposé, qu'il serait possible de concevoir, en Belgique, une « politique de tolérance » (comme aux Pays-Bas). Dans une politique de tolérance, le ministre peut décider de ne pas appliquer une loi, c'est-à-dire qu'il peut, en quelque sorte, adresser une injonction négative à caractère général.

L'on peut dès lors se demander s'il serait possible que le ministre de la Justice mène une politique d'injonction négative à caractère général, puisque c'est lui qui arrête en fin de compte les lignes directrices.

D'après le Conseil d'État, le recours à des injonctions négatives est exclu.

D'après l'intervenant, il est nécessaire de donner une réponse claire à ces observations techniques.

Enfin, l'intervenant formule un certain nombre de remarques générales.

D'après lui, il est clair que, dans le cadre de la séparation des pouvoirs, la notion de « séparation des pouvoirs » a toujours été considérée comme signifiant un équilibre des pouvoirs. Chaque pouvoir a sa propre tâche et les pouvoirs s'équilibrent. Le pouvoir judiciaire intervient en effet quotidiennement dans les affaires du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif; c'est ainsi, par exemple, que le Conseil d'État contrôle la légalité et l'opportunité des actes publics, que la Cour d'arbitrage apprécie la constitutionnalité de la loi et que la Cour de cassation se prononce sur le caractère judicieux ou non des interventions des pouvoirs publics en matière civile.

La démocratie ne peut exister sans cet équilibre des pouvoirs.

L'intervenant estime que, même à la lumière de la responsabilité politique, il faut que la responsabilité finale de la politique de poursuite incombe au ministre de la Justice, sous le contrôle des Chambres.

L'intervenant ne peut dès lors faire sienne la remarque selon laquelle l'on aurait porté atteinte au principe de la séparation des pouvoirs.

En ce qui concerne la légitimité des mandats, l'intervenant convient que ce genre de mandats importants devrait être renouvelable et limité dans le temps, par exemple à une période de cinq ans.

Enfin, l'intervenant se demande s'il faut déduire du projet à l'examen que, dans le passé, les procureurs généraux ont fait preuve en général d'incompétence. D'après lui, il y a un certain nombre de dysfonctionnements et l'on risque de proposer aujourd'hui des solutions très simplistes qui n'auront qu'une influence marginale sur la politique de poursuite. En Belgique, 20 p.c. des crimes sont élucidés. L'objectivation des nominations elles-mêmes n'augmentera pas sensiblement ce pourcentage d'élucidation.

Il en va de même pour les dysfonctionnements individuels au niveau des magistrats du parquet. En soi, ceux-ci n'ont pas d'incidence globale.

C'est pourquoi l'intervenant estime que les interventions structurelles sont bien plus intéressantes; il juge que la loi en projet constitue un bon point de départ pour une telle intervention, laquelle doit viser à clarifier davantage la politique de poursuite, à accorder plus de responsabilités de façon à permettre de procéder à des évaluations en connaissance de cause.

Un autre membre est d'avis que le projet s'imposait, étant donné qu'il vise l'institutionnalisation d'un organisme existant de facto , le collège des procureurs généraux, et des magistrats nationaux.

Il ne faut donc pas surestimer ce projet, qui ne constitue pas une révolution.

Ce membre souhaite faire deux remarques générales en ce qui concerne le collège des procureurs généraux.

L'intervention officielle du ministre dans la coordination et le développement de la politique criminelle dans le cadre du collège des procureurs généraux lui semble un élément positif.

Par contre, il craint que l'intention de confier des matières spécifiques aux procureurs généraux ne puisse poser problème. L'intervenant voudrait que le ministre précise de quelle façon il conçoit cette spécialisation des tâches des procureurs généraux.

En ce qui concerne le projet sur les magistrats nationaux, le membre souhaite d'abord poser une question concernant le rôle d'instruction du magistrat national pendant une période intérimaire, pendant laquelle le dossier n'a pas encore été localisé et qu'il n'y a donc pas encore de parquet précis qui est saisi. Les magistrats peuvent pendant cette période ordonner des instructions. Les magistrats nationaux ont alors un double rôle, notamment de parquet et d'instruction. Ne faudrait-il pas prévoir une disposition qui comble ce vide ?

L'intervenant exprime enfin le sentiment que les magistrats nationaux devraient être des magistrats du parquet général. Ne serait-il pas bon de modifier le texte sur ce point et prévoir que les magistrats nationaux devraient être issus obligatoirement d'un parquet général ?

Un membre précise qu'il n'a pas compris, contrairement à l'intervenant précédent, que le magistrat national aurait un pouvoir d'instruction au sens strict du terme.

Selon lui, il n'a d'autres pouvoirs que ceux d'un parquet, pendant cette période intermédiaire avant qu'un juge d'instruction soit désigné. L'ambiguïté du texte est évidente.

Le même membre ouvre une autre discussion sur la séparation des pouvoirs en se référant à la thèse de M. Hayoit de Termicourt qui a défini les règles qui régissent les rapports entre le pouvoir politique et les parquets, notamment en ce qui concerne les injonctions négatives. M. Hayoit de Termicourt estimait que le ministre de la Justice n'avait d'autres pouvoirs que de faire des injonctions positives, non seulement au niveau individuel mais également au niveau collectif.

Le procureur général Hayoit de Termicourt n'a cependant jamais clairement défini le statut de tous les magistrats du parquet. En effet, il a fondé la thèse de l'injonction négative sur l'idée que les magistrats avaient une autonomie, une indépendance qui leur permettrait d'avoir une capacité d'appréciation qui ne pouvait pas être supprimée par l'intervention du pouvoir politique. Le procureur général n'a cependant jamais défini le statut des substituts et des procureurs face à leurs supérieurs hiérarchiques.

Le droit d'injonction négative n'existe donc pas dans le chef du ministre, selon le droit prétorien installé depuis longtemps, mais il existerait par contre dans le chef des procureurs généraux à l'égard de leurs propres subordonnés, ce qui est en contradiction avec la thèse selon laquelle « le caractère magistral » des membres du parquet justifie le pouvoir de ne pas suivre les injonctions d'un ministre sous l'autorité duquel ils sont placés.

Un autre membre juge la remarque de l'intervenant précédent très pertinente et croit que le fait de laisser à un magistrat du parquet la possibilité de classer sans suite un dossier constitue également une anomalie par rapport à la théorie de la séparation des pouvoirs telle qu'on la concevait au 18e siècle.

Il serait peut-être utile de faire la comparaison entre le nombre de dossiers que l'on classait sans suite à l'époque de M. Hayoit de Termicourt, d'une part, et le nombre de dossiers classés de nos jours, d'autre part.

L'on invoque, pour motiver le classement sans suite d'un dossier, le principe de l'opportunité. On peut toutefois se demander quelle est l'opportunité prise en considération. Il est indéniable qu'il s'agit de l'opportunité du magistrat qui classe le dossier, laquelle, heureusement, se confond avec celle de la société. Le risque de décalage est cependant très grand. C'est un autre argument qui plaide en faveur de la thèse selon laquelle la politique de classement sans suite et la politique criminelle doivent être déterminées par le ministre de la Justice.

L'intervenant précédent rappelle que « le classement sans suite » a été justifié à l'origine essentiellement par le fait que les poursuites n'étaient pas opportunes, parce qu'il n'y avait pas d'éléments suffisants pour faire aboutir la poursuite.

Par contre, le classement sans suite est souvent réalisé pour des faits qui peuvent aboutir, mais que le magistrat ne trouve pas suffisamment importants pour juger. Il est vrai que la plupart des classements sans suite actuels sont illégaux. Un contrôle s'impose.

Un autre membre souhaite que l'on définisse clairement le fonctionnement des magistrats nationaux par rapport aux parquets et les modifications qu'apporterait éventuellement le texte proposé.

D'après lui, ces magistrats disposent d'un droit d'initiative et de pouvoirs de coordination. On ne voit cependant pas très bien quand ils peuvent exercer ces pouvoirs, s'ils le peuvent vis-à-vis d'un ou de plusieurs parquets ou s'ils ne le peuvent à l'égard de plusieurs parquets que lorsque ces derniers relèvent de juridictions différentes.

Le même membre désire en outre que l'on précise leur compétence définitive dans le cas où c'est un procureur qui devient compétent. Doit-on en conclure que ces compétences sont concomitantes ?

En effet, tant qu'un procureur n'est pas compétent, les magistrats exercent la compétence du procureur du Roi, ce qui signifie, entre autres, qu'ils peuvent requérir un juge d'instruction; que se passera-t-il si toutefois un autre procureur devient compétent ? Ce dernier saisira-t-il un autre juge d'instruction ?

Un autre membre se joint à cette question et demande comment les magistrats nationaux peuvent exercer leurs compétences prévues à l'article 10. S'agit-il de compétences concomitantes ?

Le membre précise que la question des intervenants précédents porte sur la relation qui existe entre le magistrat national et les parquets et, éventuellement, entre lui et le juge d'instruction.

Il juge toutefois utile que l'on précise également la relation qu'ils entretiennent avec l'appareil de recherche et, notamment, la position qu'ils occupent par rapport aux services de police. En effet, les magistrats nationaux ont des contacts avec des services et ils dirigent même la 23e brigade. Quelles relations entretiennent-ils avec les officiers de liaison qu'ils doivent contrôler au moins une fois par an ?

Comment remplissent-ils leur mission de coordination au niveau de la 23e brigade ? Avec quel résultat ?

Un membre renvoie à l'article 4 du projet qui traite de l'autorité du collège des procureurs généraux sur les magistrats nationaux.

Cet article instaure à la fois une relation d'autorité et une concertation. Comment sont fixées les priorités ? Quid en cas d'avis contraire ?

Réponses du ministre

En ce qui concerne la question d'un membre de savoir si ce projet constitue une réponse suffisante à la problématique actuelle, le ministre répond par la négative. Il est clair que ce projet ne constitue qu'un élément d'une réponse générale qui est à formuler. Le ministre se déclare très conscient du fait que la politique criminelle est une politique globale et qu'il faut également tenir compte d'autres projets formulés dans cette optique.

Il formule donc des réserves, mais estimant qu'il n'y a pas d'autres solutions, il considère ce projet comme un élément essentiel pour aboutir à une meilleure politique criminelle.

En ce qui concerne la relation avec les autres services, le ministre se réfère à l'article 2, § 9, du projet à l'examen, dans lequel est prévue une multitude de relations entre le collège des procureurs généraux et les différents services existants.

Ce membre a parlé du Service de politique criminelle; il est clair que le collège installé devra s'organiser dans la globalité.

Il estime par contre qu'il n'est pas nécessaire d'expliciter dans la loi de manière définitive tous les liens possibles entre les divers services; le service de politique criminelle doit être tout d'abord à la disposition du ministre de la Justice. Ce dernier doit établir une politique et doit travailler avec le collège. Le ministre doit également être soutenu par un service qui l'aide à formuler tous les éléments nécessaires en vue d'établir une nouvelle politique. Le premier principe est que le collège assiste au travail du ministre de la Justice.

Le même membre avait également posé la question d'établir une sorte de procureur fédéral, ce que le ministre trouve délicat, ou élargir le collège des procureurs généraux.

Le ministre estime que ceci dépendra de la qualité du travail des cinq procureurs généraux. Il faut d'abord donner la responsabilité aux cinq procureurs généraux et veiller à ce qu'ils fassent un travail nécessaire.

Pour ce qui est des reproches d'un membre concernant des problèmes du passé, le ministre reconnaît que nombreuses ont été les difficultés en ce qui concerne les procureurs généraux et que ces derniers n'ont pas toujours mené la politique la plus efficace.

Fondamentalement, l'on se propose précisément de faire naître une culture du réflexe national, de déterminer ensemble une culture de la coopération et de politique criminelle. La responsabilité du ministre de la Justice est importante à cet égard, surtout dans une première phase. C'est lui qui devra insuffler un dynamisme suffisant au collège pour lui indiquer son orientation. Dès lors, c'est aussi lui qui sera sanctionné si le collège ne travaille pas et si aucune politique criminelle n'est présentée dans le rapport annuel; il devra rendre des comptes au Parlement. Il y a donc une relation triangulaire entre le ministre de la Justice, les procureurs généraux et le Parlement.

Toute structure créée dépend des personnes qui la composent.

Un autre membre avait par ailleurs demandé si le magistrat national ne devait pas avoir un rôle d'arbitrage.

Le ministre estime que la coordination des travaux implique en pratique toujours un rôle d'arbitrage. Il s'agit d'une question de terminologie.

En ce qui concerne la question d'un autre membre, le ministre souligne à nouveau la dépendance à l'égard des procureurs généraux, qui devront tenter de concrétiser les possibilités qui leur sont offertes.

Le ministre est responsable et doit veiller à une approche dynamique de la part des procureurs généraux; c'est un aspect nouveau, mais, simultanément, le Parlement a lui aussi une compétence de contrôle en la matière. Comme cela a été dit ci-dessus, il faut travailler en l'occurrence dans le cadre d'une relation triangulaire.

Une question importante avait trait à la relation entre l'appareil judiciaire et l'appareil policier.

Selon un membre, il ne semble pas possible de développer l'appareil judiciaire sans débattre simultanément de l'organisation et du travail des services de police.

Le ministre estime que la magistrature doit se reprendre rapidement. À court terme, il faut doter le ministère public et le juge d'instruction d'instruments beaucoup plus performants, pour qu'ils puissent prendre leurs responsabilités à l'égard des services de police, et travailler d'une manière plus efficace. En effet, le ministère public assume une responsabilité essentielle : faire en sorte que l'enquête soit menée convenablement du début à la fin.

C'est précisément là que le problème se pose et que la magistrature doit se reprendre. Il faut réaliser les priorités ci-dessus. Tout d'abord, il faut donner le temps au ministère public d'améliorer son organisation.

Le ministre ne peut accepter un débat simultané sur les services de police. Ce n'est qu'au moment où le ministère public disposera des instruments lui permettant de progresser que l'on pourra voir, dans une nouvelle phase, comment associer les services de police au débat. Selon le ministre, un débat simultané serait néfaste et ferait naître la confusion. Il est néanmoins exact que la manière dont le ministère public accomplira sa mission vis-à-vis des services de police doit être clairement définie.

L'on ne saurait davantage perdre de vue qu'une législation particulière existe, qui accorde aux magistrats nationaux une possibilité d'intervention; tout ne figure pas dans ce projet de loi central.

Ainsi le magistrat national peut être chargé, au nom du procureur général, des contacts avec les organes administratifs du S.G.A.P.

Un membre estime que le problème est précisément que tous ces services sont régis par arrêté royal. Il serait préférable de les organiser par le biais d'une loi dont on puisse exiger le respect.

Le ministre préconise lui aussi une organisation légale du S.G.A.P.

Le ministre réagit ensuite à l'attitude négative d'un membre à l'égard des parquets généraux et de sa proposition visant à les supprimer.

Le projet prévoit explicitement que les avocats généraux accompliront certaines missions particulières de soutien. L'on choisit implicitement de confier aux avocats généraux des missions plus larges et de mieux organiser les compétences dans l'ensemble du pays, au sein d'une sorte de réseau d'avocats généraux et de procureurs généraux et d'obtenir un renforcement global du parquet central. Cela signifie que l'on combine d'une part la décentralisation et d'autre part la participation à une politique centralisée.

Ensuite, le ministre renvoie à la discussion concernant la séparation des pouvoirs.

En ce qui concerne la relation entre les magistrats nationaux et l'ensemble des autres institutions, telles que la 23e brigade, le B.C.R. et le S.G.A.P., le ministre propose de soumettre les problèmes aux magistrats nationaux.

Pour ce qui est des officiers de liaison, le ministre insiste sur le fait que ces derniers jouent un rôle crucial dans le travail du magistrat national, lequel reçoit par leur intermédiaire des informations concernant les dossiers internationaux. Le ministre précise qu'il a eu des expériences positives avec ces officiers de liaison. Tous les pays en font l'éloge. Il s'agit d'un réseau qui fonctionne convenablement, et qu'il faut, selon le ministre, conserver.

Un intervenant avait posé quelques questions sur la relation entre le procureur du Roi et le magistrat national.

Il est prévu que le magistrat national peut accomplir la tâche de procureur du Roi, aussi longtemps que le procureur du Roi n'est pas saisi de l'affaire, aussi longtemps donc que le crime n'est pas localisable. Il est clair que cette relation ne peut être réglée intégralement par un texte; il faut une certaine loyauté, une méthode pragmatique pour optimaliser le contact.

Le ministre suggère de poser cette question au magistrat national même.

En ce qui concerne la relation avec le juge d'instruction, le ministre précise que le magistrat national n'a aucun pouvoir sur le juge d'instruction; il doit passer par le procureur du Roi de l'arrondissement.

Le ministre renvoie dans ce cadre au projet « Franchimont », qui prévoit un assouplissement pour le juge d'instruction et le procureur du Roi, pour que ceux-ci puissent aller plus facilement au-delà des frontières de leur arrondissement.

Un membre estime que le texte reste très vague sur les rapports de pouvoir entre le magistrat national et les magistrats des arrondissements judiciaires, plus précisément si l'affaire passe de l'un à l'autre en cas de localisation d'un dossier.

Il n'y a aucune précision sur les rapports hiérarchiques entre ces deux parties, ni sur les rapports avec le juge d'instruction.

Cette imprécision risque d'entraîner, en cours de procédure, des contestations qui bloqueront l'affaire, ce qui est contraire au but poursuivi.

Un membre veut savoir si, à l'heure actuelle, les magistrats nationaux ont des pouvoirs d'instruction.

Le ministre répond que le magistrat national a le même pouvoir que le procureur du Roi et que celui-ci n'a pas le pouvoir de poser des actes d'instruction judiciaire, ce pouvoir étant réservé au juge d'instruction, sauf en cas de flagrant délit.

III. AUDITION DE MM. A. VANDOREN ET P. DUINSLAEGER, MAGISTRATS NATIONAUX

Le président accueille les magistrats nationaux et ouvre le débat en demandant leurs avis circonstanciés sur la fonction qu'ils exercent. Il exprime le souhait de la commission de savoir comment ils ont pu exercer leur fonction jusqu'à présent, quelles sont les relations avec les parquets, quelles sont les insuffisances qu'ils ont pu constater dans l'exercice de leur fonction et dans quels domaines les compétences du magistrat national, d'une part, et les compétences du parquet, d'autre part, se chevauchent.

Le projet de loi introduit en effet un certain rapport hiérarchique entre le magistrat national et le procureur du Roi, le premier ayant le pouvoir de lui donner des injonctions.

M. Duinslaeger tient tout d'abord à préciser les missions du magistrat national, comme prévues dans la circulaire ministérielle de 1990. Il y a deux grandes missions, notamment, d'une part, une mission de coordination, de centralisation, d'assistance et d'avis aux autorités judiciaires localement compétentes concernant les affaires qui dépassent les limites d'un arrondissement judiciaire, et, d'autre part, une mission d'intervention afin de faciliter la coopération internationale dans les affaires où une intervention judiciaire urgente s'impose.

Depuis la création de cette fonction, les magistrats nationaux sont confrontés avec deux points faibles. Il y a d'abord le problème de l'absence de statut. La mission de magistrat national est précisée dans une circulaire ministérielle qui est, de plus, confidentielle.

Le deuxième point faible est le problème des affaires non localisées.

Dans les affaires où il n'est pas possible d'appliquer l'article 23 du Code d'instruction criminelle, qui prévoit les règles de compétence territoriale, l'on se trouve confronté au problème de la nécessité de prendre une décision judiciaire afin de prévoir des mesures conservatoires pour permettre l'exercice de l'action publique.

M. Vandoren confirme les observations de M. Duinslaeger, en précisant que les magistrats nationaux travaillent surtout dans le domaine du terrorisme, où les frontières, même nationales, sont souvent transgressées. De plus, la criminalité organisée, qui est, dans la plupart des cas, transfrontalière, devient de plus en plus importante.

M. Vandoren précise que le dossier des C.C.C. est à la base de la création de la fonction du magistrat national.

Un membre revient sur la question concernant les relations avec le parquet et demande si les magistrats ont déjà été confrontés à des blocages.

M. Vandoren répond par la négative. Même s'il n'a pas toujours été aisé de travailler sans statut, il n'y a jamais eu de blocages par le parquet.

Un autre membre partage cet avis et renvoie à la disposition du projet relative au lien hiérarchique entre le collège des procureurs généraux et les magistrats nationaux. Il demande si ces derniers estiment que ce lien hiérarchique est un lien efficace.

M. Duinslaeger estime qu'il faut faire une distinction entre deux secteurs. Si l'on parle de leurs affaires opérationnelles, il estime qu'il faut nécessairement agir par l'intermédiaire du procureur général qui est territorialement compétent, pour la simple raison que celui qui est responsable en dernier ressort de l'application de la procédure pénale dans l'affaire en question peut être ce procureur général. Il faut donc prévoir la possibilité d'une concertation avec ce procureur général, pour qu'il puisse défendre sa position dans cette affaire spécifique.

L'on peut dire en ce qui concerne l'intégration du magistrat national dans le collège des procureurs généraux qu'il permettait précisément de dépasser les limites territoriales imposées au procureur du Roi. Il y avait moyen ainsi de conclure certains accords au niveau national grâce aux contacts avec les membres du collège.

Le commissaire précise que sa question concerne, non pas le lien avec le procureur individuel, mais le lien avec le collège. Il ajoute qu'à son avis, le lien hiérarchique est superflu, parce que la demande en tant que telle doit émaner du procureur de l'arrondissement et ne venir du procureur général qu'en seconde instance.

Par ailleurs, si le magistrat national devait tirer effectivement jusqu'à présent sa compétence nationale de ses contacts avec les procureurs généraux, il pourra désormais se prévaloir de la loi.

M. Duinslaeger comprend la question sous cet angle nouveau et tient, par prudence, à attirer l'attention sur le fait que le système du magistrat national sera inopérant si l'on crée une situation de concurrence avec le procureur du Roi. Les procureurs du Roi doivent pouvoir accomplir leurs missions dès qu'ils sont en mesure de le faire. Les magistrats nationaux doivent travailler dans le cadre du système existant auquel ils apportent une plus-value.

Un autre commissaire dit admirer la diplomatie de M. Duinslaeger, qui parle, non pas de blocage, mais de «difficultés». Toutefois, pas plus que le préopinant, il ne comprend pas pourquoi les magistrats nationaux, dont le statut légal leur octroie toutes les compétences du procureur du Roi et leur permet d'ordonner tous les actes de recherche et d'instruction judiciaire sur l'ensemble du territoire, doivent rester imbriqués dans la structure existante.

Il se demande si l'on ne donnerait pas aux magistrats nationaux une plus grande marge de manoeuvre en leur accordant parallèlement une compétence dans certaines matières plutôt qu'en les faisant travailler en quelque sorte en concurrence avec les procureurs généraux et le procureur du Roi. Selon l'intervenant, cela pourrait aboutir à des heurts et à d'éventuelles situations conflictuelles à propos de compétence avec, pour conséquence, des vices de procédure qu'il convient absolument d'éviter.

M. Vandoren estime qu'il faut aussi prendre en compte le nouveau statut légal du collège. Les magistrats nationaux ont tout intérêt à être intégrés dans la structure du collège. C'est précisément cela qui évitera la survenance d'une situation de concurrence avec les procureurs du Roi locaux.

À titre d'exemple, il fait référence à la France, où la quatorzième section du parquet de Paris dispose d'une compétence d'évocation qui lui permet de se saisir de tout ce qui a trait au terrorisme. En Allemagne, Karlsruhe a la possibilité de monopoliser tout ce qui concerne le terrorisme et le racisme. C'est ainsi qu'en France, les parquets locaux ne veulent pas transmettre d'informations à la quatorzième section dans certains dossiers importants, de peur que le dossier ne leur soit retiré.

Le projet en discussion crée précisément un équilibre qui exclut toute concurrence avec le procureur local, sauf lorsqu'une affaire n'est pas localisable.

Dès que l'affaire est localisable, le procureur local se charge de l'affaire, mais il reste lié par les mesures qui ont été prises par le magistrat national.

M. Duinslaeger souhaite éclaircir les choses en soulignant les trois points importants suivants :

1. Premièrement, le magistrat national poursuit la même finalité que le procureur du Roi; la logique du système doit également être maintenue en l'espèce;

2. Deuxièmement, il ne faut pas perdre de vue que le magistrat national a les mêmes pouvoirs que le procureur du Roi, mais à cette réserve près qu'il n'en est ainsi que tant qu'aucun procureur du Roi n'est compétent. Les magistrats nationaux n'entrent donc pas immédiatement en concurrence avec le procureur du Roi.

3. La troisème remarque est que s'il subsiste une contestation entre le point de vue des magistrats nationaux, d'une part, et celui du procureur du Roi, d'autre part, le procurerur général territorial ou les procureurs généraux compétents qui contrôlent le procureur du Roi de leur arrondissement sont logiquement les interlocuteurs naturels qui devront trancher en fin de compte.

M. Duinslaeger plaide dès lors pour que l'on s'en tienne à l'intégration dans le nouveau système du collège des procureurs généraux.

Un membre pose la question de savoir si, dans le cadre du projet « Franchimont », il serait envisageable que les magistrats nationaux, dans le cadre de leur rôle de coordination, décident de ne pas évoquer, mais que tel juge d'instruction voit sa compétence étendue à telle spécialisation (voir Neufchâteau - pédophilie).

M. Vandoren précise que cela constitue la technique déjà utilisée. On essaie, en matière de criminalité, de ne plus en arriver à des dossiers « mammouths », en ce sens qu'à partir du moment où l'on sait qu'une organisation criminelle a plusieurs activités dans plusieurs ressorts, on essaie d'organiser une coordination au niveau national de toutes les données, mais on laisse les dossiers chez les différents juges d'instruction.

Le préopinant demande si ceci est possible dans tous les cas, et si, parfois, il n'est pas plus efficace de centraliser, pour le cas par exemple de Neufchâteau, pour éviter des disparités au niveau des informations.

M. Vandoren réplique que pour l'affaire de Neufchâteau justement, l'on a effectué un important travail de coordination et tous les dossiers ne se trouvent pas à Neufchâteau. À Neufchâteau, il y a eu une analyse de la manière dont il convenait de répartir les différents dossiers.

L'attaque contre les fourgons constitue un autre exemple. Toute une coordination a eu lieu à ce sujet; aucun juge d'instruction n'a été dessaisi, mais chaque juge reçoit les informations dont il a besoin pour continuer son enquête, laquelle s'inscrit dans un ensemble; des réunions conjointes ont eu lieu.

D'après l'intervenant, il est impossible de définir une règle en la matière, il faut décider au cas par cas.

Un autre membre demande de quelle façon l'on fixe le moment où, dès qu'une affaire devient localisable, il y a transfert de compétences du magistrat national au procureur du Roi. Cette fixation n'est-elle pas, en pratique, très aléatoire ?

M. Vandoren donne deux exemples. Il cite d'abord l'exemple d'une prise d'otages qui a lieu à la frontière belgo-allemande à Aix-la-Chapelle. L'on craint que les auteurs de la prise d'otages ne prennent la fuite en voiture, mais l'on ne sait bien entendu pas vers où ils se dirigeront. Le magistrat national est compétent jusqu'au moment où l'affaire devient localisable, c'est-à-dire jusqu'au moment de l'intervention effective.

Il cite ensuite l'exemple de la fourniture contrôlée; un camion transportant de la drogue est attendu en Belgique, mais l'on ne sait pas à quel endroit. L'on convient des mesures à prendre et dès que l'intervention est possible et a effectivement lieu, c'est le procureur qui est compétent.

Un membre constate que les magistrats mentionnent que l'information parvient, dans la plupart des cas, aux parquets, alors que le projet voit le problème dans le sens inverse. Le problème de la hiérarchie est, selon lui, très important. Quelle est la hiérarchie entre les magistrats nationaux et les parquets ? Quelle est la continuité de la mission du magistrat national en cas de localisation et quelle est le rapport hiérarchique entre le rôle du magistrat et le procureur ?

La deuxième question concerne le pouvoir du magistrat national par rapport à la livraison d'informations.

Un membre souhaite savoir, dans ce cadre, ce qui se passe en cas où surviendrait un désaccord entre le magistrat national et le procureur local, sur les mesures à prendre.

M. Duinslaeger répond qu'il faut faire une distinction entre différentes hypothèses.

Si l'intervention du magistrat national est requise par le procureur du Roi, il y a bien sûr une concertation préalable et le problème ne se pose pas.

Si, par contre, l'intervention se fait d'office, à l'initiative du magistrat national, elle se fait à nouveau selon le modèle de concertation. S'il y a une divergence de vues entre le procureur du Roi et le magistrat national, il faut nécessairement passer par le procureur général territorialement compétent, qui prendra la décision.

En troisième lieu, il y a l'hypothèse de l'urgence. Le projet de loi prévoit ici une possibilité d'intervention du magistrat national (article 10), qui en avise le procureur général.

L'inertie du procureur général est sanctionnée.

Le même membre demande ce qui se passe en cas de désaccord entre le procureur général et le magistrat national.

M. Duinslaeger répond que le collège intervient dans ce cas.

À la lecture des articles 4 et 10, un autre membre déduit que trois situations différentes sont possibles :

1. Dans l'exercice de leur mission les parquets peuvent avoir besoin du savoir-faire des magistrats nationaux ou de leur compétence en matière de coopération internationale. À ce moment, aucun problème ne se pose. Les magistrats nationaux disposent d'ailleurs d'un droit d'initiative.

2. La coordination entre les différents parquets.

Il s'agit ici de la coordination de l'enquête, et non de la coordination de l'exercice de l'action publique. Il ne comprend pas que l'on ne donne pas un pouvoir de contrôle des procureurs généraux au cas où ceux-ci ne seraient pas d'accord.

3. Urgence.

C'est ici que l'on est confronté aux grands problèmes, d'après l'intervenant. Les magistrats nationaux peuvent prendre des mesures (cette disposition ne figure qu'à l'article 4, et non pas à l'article 10, où il faudra l'insérer), ils se voient toutefois privés de leur compétence dès que l'affaire est localisée.

D'après l'intervenant, il se peut très bien que le magistrat national ne soit pas au courant de certaines affaires, par exemple des différents noms d'emprunt dans le monde de la criminalité organisée. De cette façon, la concurrence peut malgré tout jouer.

Ne faut-il pas dès lors prévoir que les mesures prises par le magistrat national ont priorité sur d'autres mesures ?

La dernière observation de l'intervenant porte sur le fait que l'on ne peut prétendre sans plus que les faits sont localisables lorsque l'on ordonne une enquête, par exemple une écoute téléphonique générale.

Si le magistrat national souhaite procéder à une écoute téléphonique générale ou à une recherche, il doit transmettre le dossier au procureur, même s'il ne sait pas encore exactement à quel procureur il doit s'adresser.

M. Vandoren répond qu'il y a deux possibilités. Ou bien l'on dispose d'un numéro d'appel du réseau Proximus, et, dans ce cas, on peut localiser l'affaire à Bruxelles, puisque Proximus y est établi. Il en va de même en ce qui concerne l'autre opérateur téléphonique.

Ou bien le numéro d'appel est un numéro de Belgacom, et l'on dispose alors d'une adresse, ce qui permet de localiser l'affaire.

Le dossier est alors effectivement transmis. Le magistrat national peut encore exercer un contrôle. Cela s'est d'ailleurs déjà vu et n'a pas causé de difficulté.

En ce qui concerne les affaires dont un procureur s'occupe déjà et pour lesquelles les informations viennent de l'étranger, il est rare que les magistrats nationaux se soient trouvés devant une surprise désagréable.

En effet, le système des observations est élaboré de façon que les magistrats nationaux sont tenus au courant de toutes les observations transfrontalières, tant celles de la gendarmerie que celles de la police judiciaire. Étant donné que ces deux corps doivent également communiquer une action locale d'observation, les magistrats nationaux disposent d'un certain pouvoir de contrôle.

L'intervenant connaît un cas où les choses ne se sont pas passées de cette façon, ce qui était dû au fait que les deux services concernés à l'étranger avaient choisi des partenaires différents en Belgique.

Un membre demande si les magistrats nationaux étaient au courant de l'opération « Othello ».

Le préopinant répond par la négative. Il ne connaît pas ce dossier. Il rappelle que les magistrats nationaux sont informés uniquement des observations transfrontalières.

En effet, il est impossible de les tenir au courant de toutes les observations qui ont lieu chaque jour en Belgique.

L'intervenant répond que, dans le cadre de la première mission du Bureau central de recherche, l'on a adressé à la Tchéquie une série de questions relatives à l'opération « Othello ».

Un autre membre demande quel est le devoir d'information des parquets à l'égard des magistrats nationaux, et quel accès ceux-ci peuvent avoir aux dossiers (éventuellement en vertu du projet à l'examen).

M. Duinslaeger répond qu'il n'existe pas de devoir d'information, dans le chef du parquet, envers le magistrat national.

Le Conseil des ministres a pris une décision après les travaux de la commission parlementaire d'enquête sur la traite des êtres humains. Cette décision prévoyait une telle obligation d'information dans le cadre des affaires relatives à la traite des êtres humains.

Cependant, cette décision n'a pas été formalisée par le collège, parce que l'on attendait les résultats de la Commission Demanet-Vandeputte chargée d'examiner la restructuration du commissariat général.

Toutefois, malgré l'absence d'une obligation formelle d'information, les magistrats nationaux ont des contacts journaliers, aussi bien avec des parquets qu'avec des magistrats instructeurs, qui les informent des affaires d'une certaine ampleur qui nécessitent une coordination.

En outre, les parquets ne sont pas les seules sources d'information des magistrats nationaux. Il existe également des directives à l'égard des deux organes centralisateurs des deux services de police, à savoir le B.C.R. de la gendarmerie et la brigade nationale de la police judiciaire.

Des directives sont également reprises dans la circulaire ministérielle de 1990 sur les techniques particulières de recherche, notamment sur la base des observations transfrontalières.

En outre, les magistrats nationaux sont avisés de tous les dossiers où l'on utilise les techniques « under cover », parce que ce sont eux qui contrôlent les fonds.

Un membre demande si l'on peut conclure qu'il n'y a pas d'insuffisance légale en ce qui concerne cet aspect de la mission des magistrats nationaux.

En effet, si le magistrat national a des doutes sur l'information qui lui est fournie, que peut-il faire pour la contrôler ?

M. Duinslaeger répond qu'une mission de coordination suppose évidemment une information. L'intervenant est donc partisan d'une obligation d'information.

Le membre ajoute qu'il n'est pas certain que le procureur soit toujours parfaitement au fait des éléments d'un dossier.

Des informations erronées peuvent être transmises de bonne foi au magistrat national.

Il est dès lors important de savoir si ce dernier peut vérifier lui-même les informations qui lui sont fournies.

Un autre membre rappelle que les parquets eux-mêmes ne reçoivent pas toujours toutes les informations nécessaires; les équipes d'enquêteurs disposent à cet égard d'un pouvoir important.

À l'heure actuelle, les services de police n'ont pas non plus, semble-t-il, d'obligation d'information.

Une telle obligation ne devrait-elle pas être définie de façon beaucoup plus nette ? Comment les magistrats nationaux centralisent-ils l'information ? Quels sont leurs rapports avec le S.G.A.P. ?

La maîtrise de la centralisation dans le chef des magistrats nationaux est une condition d'efficacité.

Quelles mesures pourraient être prises pour améliorer la situation à cet égard ? Ne peut-on par exemple imaginer de prévoir une structure opérationnelle liée plus étroitement au S.G.A.P. et à la police ?

Un autre membre souligne une fois de plus qu'il faut veiller à réaliser l'équivalence entre l'appareil policier et le ministère public. Ainsi, il est convaincu que le B.C.R. détient des informations qui n'ont pas été communiquées ­ peut-être même de bonne foi.

Dès lors, la question qui se pose est de savoir de quels moyens les magistrats nationaux disposent pour contrôler la communication des informations.

Un membre demande si, sur le plan de l'information, on peut imaginer que le procureur du Roi soit « court-circuité » par rapport au travail du magistrat national et si les magistrats nationaux ont l'obligation de transmettre aux procureurs du Roi l'information dont ils disposent.

Toutes ces questions déterminent une forme de hiérarchisation qui, en l'état actuel des choses, n'existe pas, que l'on veut formaliser, mais dont la formalisation n'est pas parfaitement claire.

Un autre membre demande s'il s'est trouvé des cas où le magistrat national a suggéré un certain type d'action à un juge d'instruction, et où cette suggestion n'a pas été suivie d'effet ?

Cette question est provisoirement réservée.

Quant aux questions précédentes, M. Vandoren répond que les sources des informations détenues aux parquets et qui parviennent aux magistrats nationaux sont principalement de deux ordres.

Il s'agit du B.C.R. de la gendarmerie, et de la brigade nationale de la police judiciaire.

Les magistrats nationaux n'ont en principe aucun contact avec une unité territoriale (B.S.R. ou brigade de la police judiciaire).

Avec le B.C.R. et la brigade nationale, et bien que l'on ne puisse jamais être sûr d'être totalement informé, certains mécanismes ont été mis au point en vue de garantir une information maximale :

­ tous les rapports sont transmis par écrit;

­ si un service reçoit une information et la garde pour travailler sur cette base, et qu'un autre service se manifeste, c'est le premier service qui aura l'affaire.

En outre, le magistrat national contrôle toujours les dates et la base du renseignement.

En ce qui concerne le S.G.A.P. :

À l'époque du commissariat général « ancienne mouture », les magistrats nationaux étaient désignés pour avoir un contrôle sur ses activités, notamment de coordination policière internationale.

Acutellement, ils ne l'ont plus, pas plus d'ailleurs que le pouvoir judiciaire (cf. l'arrêté royal de création du S.G.A.P.).

Le ministre de la Justice renvoie à l'article 4, § 3, 1º, qui dispose que les magistrats nationaux peuvent donner des « instructions contraignantes ». Peut-on étendre ces instructions à l'accès au dossier ? Quel est l'usage en la matière ?

M. Duinslaeger répond que l'on a jamais empêché les magistrats nationaux d'accéder au dossier.

Quant à l'échange d'informations, les principes sont simples. « On rend à César ce qui est à César ». Si le magistrat nationaal dispose d'informations qui concernent un parquet déterminé, elles sont communiquées à celui-ci en temps réel.

Un membre souligne que c'est donc le magistrat national qui apprécie à qui l'information doit être transmise.

M. Vandoren répond que cela est généralement très facile à déterminer, car l'affaire est souvent localisable.

Si elle concerne plusieurs parquets, chacun d'eux reçoit l'information, et une coordination est organisée.

Un travail de coordination vient ainsi d'être effectué sur toutes les affaires concernant les attaques de fourgons.

Un inventaire complet a été fait et sera envoyé à chaque parquet. M. Vandoren espère que la même chose sera faite dans d'autres domaines spécifiques importants dans le futur.

L'intervenant précédent demande si c'est au magistrat national d'apprécier ce qui est localisable.

M. Vandoren confirme et précise que toute affaire non localisable sera envoyée au collège.

Le ministre demande pourquoi il est inutile de centraliser tous les dossiers.

M. Vandoren se réfère à l'exemple des attaques de fourgons. Même à Bruxelles, où il y a plusieurs fourgons, les dossiers n'ont pas été regroupés chez un seul juge d'instruction. Ils sont restés chez les différents juges, qui reçoivent chacun toute l'information faite par l'analyse criminelle.

Au point de vue de cette analyse, il faut souligner la nécessité de la symbiose entre les services de police et les magistrats. L'analyse donne une valeur ajoutée aux dossiers et le fait de ne pas les centraliser évite un blocage à cause de l'importance quantitative du dossier.

Ceci ne signifie cependant pas qu'il n'est parfois pas nécessaire de regrouper.

Un membre demande si le magistrat national peut, en cas où le dossier n'est pas centralisé et où différents juges s'occupent de l'affaire, faire des suggestions aux juges d'instruction concernés, en fonction du travail dynamique et efficace de l'un ou de l'autre juge. Comment la capacité de suggestion est-elle appréciée ?

M. Vandoren précise qu'il n'existe pas de problèmes à ce sujet et que les suggestions sont généralement bien suivies.

Un autre intervenant pose la question de savoir si les magistrats nationaux s'estiment suffisamment nombreux et s'ils ne souhaiteraient pas disposer d'une structure opérationnelle permanente directement reliée aux infrastructures policières.

M. Vandoren précise que chaque fois que les magistrats nationaux ont demandé des moyens, aussi bien du côté de la police judiciaire que du côté de la gendarmerie, B.C.R. et escadron spécial d'intervention, ils les ont obtenus en temps réel et qu'ils sont même parvenus à les faire collaborer.

De plus, il constate qu'ils reçoivent plus d'information qu'ils ne le demandent.

Un système direct de liaison existe; dès que le B.C.R. ou la B.N.B. ont un dossier, ils le transmettent au magistrat national.

Le ministre demande si les magistrats nationaux ont un accès direct à toutes les informations se trouvant, par exemple, au sein des services de police.

M. Vandoren répond par la négative. L'accès n'existe, ni du côté judiciaire, ni du côté du S.G.A.P.

Il estime par contre qu'il est tout à fait nécessaire que le ministère public travaille en partenariat avec les services de police, l'un sans l'autre n'est pas possible.

Un autre membre souhaite connaître l'ampleur de la cellule permanente des magistrats nationaux, de quel personnel est-elle composée ?

M. Vandoren répond que les magistrats nationaux ont un secrétaire-adjoint temps plein, un commis-secrétaire mi-temps et un secrétaire mi-temps.

Un membre souligne qu'à l'article 5, le ministre demande que l'on accorde au magistrat fédéral le pouvoir de créer un secrétariat.

Il renvoie ensuite à l'article 2, § 9, qui dispose que le Roi règle le mode de collaboration entre le collège des procureurs généraux et les services qui sont placés sous l'autorité des magistrats fédéraux. Il se demande s'il ne serait pas préférable de régler en même temps la collaboration entre ces services et les magistrats fédéraux et de fournir ainsi une base légale à cette collaboration.

Le ministre est d'avis qu'il faut effectivement donner toute latitude aux magistrats fédéraux. Il craint toutefois qu'en inscrivant tout dans la loi, on ne risque d'en modifier la philosophie judiciaire, avec le danger que les magistrats nationaux ne reçoivent des informations que lorsqu'ils les sollicitent.

Les services et le magistrat national se complètent très bien et un excès d'organisation pourrait anéantir la dynamique qui existe actuellement entre les deux.

L'intervenant précise qu'il ne désire rien changer aux situations qui fonctionnent bien, mais uniquement intervenir dans les dysfonctionnements.

Un membre estime qu'il est exceptionnel de réaliser la fonction de coordination de magistrat national avec si peu de moyens. Dans ce cadre, elle se demande si la 23e brigade travaille bien avec eux et si un renforcement de cette brigade conviendrait aux magistrats nationaux.

M.Vandoren précise que la 23e brigade travaille en effet très bien et qu'elle soutient les magistrats nationaux. De même, les magistrats ont toujours eu un soutien correct du B.C.R. de la gendarmerie. Les magistrats nationaux essayent d'être un pont entre ces deux services et de les faire travailler ensemble. Un renforcement de la 23e brigade serait extrêmement bénéfique pour la police judiciaire à condition que certains commissaires en chef veuillent bien le comprendre.

Un membre revient sur le problème des écoutes téléphoniques et des perquisitions. De manière automatique, les magistrats nationaux doivent, pour ces cas, passer par un juge d'instruction. Ceci signifie que le problème est localisable et que le procureur du Roi est saisi.

Par rapport au but national, qui est d'assurer une coordination et une efficacité plus rapide, c'est le juge d'instruction et le procureur du Roi qui deviennent compétents. L'initiative du magistrat national passe ainsi chez le procureur du Roi et le juge d'instruction. Est-ce que ceci est un frein pour le rôle du magistrat national ?

Un autre membre pose la même question qui vaut aussi pour l'ensemble du problème de la position du juge d'instruction et du ministère public.

Si l'enquête doit être poursuivie par les magistrats nationaux, il convient de modifier la position du juge d'instruction et de faire de lui un juge de l'instruction.

Le ministre estime qu'il est essentiel, pour ce qui est du rôle des magistrats nationaux, qu'ils ne conservent pas une affaire. Il faut qu'ils aient toujours à s'adresser à une personne chargée d'examiner l'affaire.

Un membre précise qu'il s'agit d'un problème d'efficacité. Il existera, à un certain moment, un conflit de compétence, éventuellement réglé par la loi, et une réduction de l'efficacité par rapport à l'initiative du juge d'instruction.

M. Vandoren est d'avis que le procureur du Roi rencontre le même problème, vu que le juge d'instruction peut dire oui ou non. Il croit qu'il faut faire une distinction entre deux sortes d'affaires.

Ou bien l'affaire a, depuis le départ, une certaine ampleur. On essaiera dans ce cas de la concentrer auprès d'un seul juge.

Une seconde hypothèse est qu'il y a certains liens entre ces différentes affaires. Dans ces cas, la possibilité existe d'une part de rassembler les dossiers chez un juge, ou d'autre part de garder les dossiers dans les différents parquets et de donner une valeur ajoutée.

Les magistrats essayent d'appliquer cette deuxième solution.

Le problème du magistrat national vis-à-vis du juge d'instruction est le même que celui du procureur du Roi local.

M. Duinslaeger précise que le juge d'instruction et le procureur du Roi poursuivent la même finalité que le magistrat national et ils disposent des mêmes instruments, prévus par le Code d'instruction criminelle.

La seule chose que le magistrat peut ainsi ajouter est son expérience, sa vue d'ensemble.

Un membre souhaite connaître la portée exacte du terme « actes d'instruction », mentionnée à l'article 10, alinéa 2.

M. Duinslaeger estime que le terme ne couvre pas la possibilité de saisir le juge d'instruction; l'on vise les actes que le procureur du Roi peut accomplir en cas de flagrant délit.

Selon un autre membre, il faudrait adapter le texte sur ce point.

En outre, ce membre renvoie au problème qu'a soulevé le Conseil d'État en ce qui concerne les magistrats coordinateurs. En effet, le statut de ces derniers n'a pas été réglé par la loi.

Ne serait-il pas préférable, pour la sécurité juridique, de régler également le statut des magistrats coordinateurs, comme le conseille le Conseil d'État ?

M. Vandoren confirme que la coopération entre le magistrat national et le magistrat coordinateur est très bonne. Le magistrat coordinateur met au point la stratégie à suivre dans les diverses affaires, tandis que le magistrat national exécute et coordonne.

Le ministre précise qu'il est donc question, non pas de trois magistrats nationaux, mais de deux magistrats nationaux et d'un magistrat coordinateur, et il souligne qu'il faut dissiper l'ambiguïté qui subsiste à cet égard. Le ministre fait allusion au fait que les avocats généraux peuvent se voir confier d'autres missions de soutien.

Il importe de savoir comment le magistrat coordinateur et d'autres magistrats organiseront ces activités de soutien, pour ce qui est de certaines missions, jusqu'à ce que les choses arrivent devant le collège et devant les magistrats nationaux, qui pourront à leur tour y ajouter un volet opérationnel.

Une membre se demande s'il existe un schéma des flux d'informations dont disposent les magistrats nationaux. Pour une bonne administration, il convient, en effet, que ces flux d'informations soient nationalisés. La future loi devrait être rédigée sur la base d'un schéma d'information analysé en profondeur.

M. Duinslaeger répond qu'un tel schéma existe déjà.

Les partenaires des magistrats nationaux sont les services de police. Selon l'aticle 29 du Code d'instruction criminelle, les services de police doivent transmettre l'information qu'ils reçoivent du procureur du Roi en cas de localisation et aux magistrats nationaux en cas de non-localisation. Outre les dispositions légales en question, il existe également des accords avec le B.C.R., la 23e brigade et le S.G.A.P.

Il existe une espèce de carré magique composé de la base de l'unité territoriale et de l'unité centrale supérieure (qui coopèrent au niveau policier); les organes centraux s'adressent au magistrat national, les unités territoriales au procureur du Roi, le procureur du Roi au magistrat national et vice versa.

Le ministre précise qu'il s'agit, en l'espèce, d'un schéma général, qui sera également utilisé, par exemple, pour ce qui est de la criminalité organisée.

Un membre précise que l'article 29 concerne uniquement le procureur du Roi.

Un autre membre estime que le problème principal se situe plutôt au niveau du contrôle des services de police. Le magistrat national reçoit, certes, l'information qu'il demande, mais peut-il encore se faire une idée de la réalité qui existe en dehors de cette information ?

Un membre rappelle que les magistrats nationaux n'ont pas d'accès direct aux informations des services de police et que ce droit devrait être réglé législativement.

M. Vandoren estime qu'il s'agit d'un problème auquel tous les magistrats sont confrontés et que la police judiciaire sait, comme la gendarmerie, que les sanctions suivront si tout n'est pas communiqué.

Un membre demande s'il ne serait pas utile de prévoir des actions disciplinaires dans ce cadre.

Un autre membre se demande s'il n'existe pas de cas où un dessaisissement du juge d'instruction serait nécessaire en vue de la coordination d'une enquête; quels sont les critères qui pourraient être retenus pour le dessaisissement ?

Un membre rappelle qu'il importe d'avoir d'office l'information sur toute enquête entamée (qui, si elle est entamée suite à une enquête proactive de la gendarmerie a nécessairement une ampleur significative), et non seulement à leur demande, ce qui constitue une collaboration minimale avec un échelon supplémentaire.

Un membre constate qu'il s'agit surtout d'un problème de communication entre les forces de police et entre les parquets. Le projet de loi qui établit le statut du magistrat national ne crée cependant aucune obligation de communication et d'information. Le risque de confusion devient encore plus important.

Un autre intervenant se demande si le magistrat national ne peut pas exercer la tutelle de la police judiciaire.

Le président résume les questions posées, la première portant sur le droit de recevoir ou l'obligation d'informer les magistrats de certains types d'enquête, notamment les recherches proactives; la deuxième concernant la possibilité de vérification d'informations données; la troisième concernant le pouvoir disciplinaire éventuel des magistrats nationaux sur la gendarmerie en cas de manquements commis à des instructions données.

M. Duinslaeger répond d'abord sur le dessaisissement du juge d'instruction. Tout comme le procureur du Roi, ils ne peuvent qu'examiner le dossier et le soumettre, sur base d'une réquisition et par l'intermédiaire du procureur du Roi, à la chambre du conseil. Ils n'ont donc qu'une possibilité de suggestions, un droit d'avis.

Un membre demande si leur avis est verbalisé et versé au dossier.

M. Duinslaeger précise qu'il faut distinguer deux hypothèses. La première est que le procureur du Roi suit l'avis du magistrat national. Dans ce cas, l'avis du ministère public, par définition indivisible, apparaît dans les réquisitions écrites. Si le procureur du Roi ne suit pas l'avis du magistrat national, un problème existe.

M. Duinslaeger se déclare diposé à officialiser et formaliser l'avis du magistrat national.

Par ailleurs, ceci est quasi inévitable par le fait que le magistrat national, qui veut imposer sa proposition, en cas de divergence de vue avec le procureur du Roi, doit nécessairement passer par le procureur général. Cette intervention auprès du procureur général est écrite, porte des effets judiciaires et sera dans le dossier répressif.

M. Duinslaeger passe ensuite à la question sur la recherche proactive. Il faut d'abord faire la comparaison entre la position du magistrat national envers le B.C.R et sa position envers la brigade nationale.

En ce qui concerne la brigade nationale, M. Duinslaeger précise que les magistrats nationaux ont, depuis l'arrêté royal du 30 mars 1995 concernant la restructuration du commissariat général, la direction juridique. Une possibilité d'intervention disciplinaire existe à ce sujet.

Il n'y a cependant aucune différence au niveau du résultat des informations reçues entre les interventions de la gendarmerie et de la police judiciaire, malgré la position différente.

Un membre rappelle la question de savoir s'il ne serait pas utile de prévoir une possibilité disciplinaire du magistrat national vis-à-vis de la gendarmerie.

Pourquoi les personnes qui interviennent dans une instruction judiciaire, ne sont-elles pas toutes soumises au même type de statut disciplinaire ?

M. Vandoren demande de ne pas perdre de vue que les moyens en matière de techniques particulières (observation active, passive ou statique) sont limités. Il arrive qu'il n'y a plus de capacité, ni à la gendarmerie, ni à la police judiciaire, pour faire une affaire supplémentaire. Il faut ainsi parfois faire des choix.

Le membre précise qu'il importe de savoir qui fait le choix.

M. Vandoren répond que c'est le magistrat national qui décide en symbiose avec les autres services.

Un membre estime que, sur cette question de définition des priorités, il serait utile d'entendre le ministre de l'Intérieur, Le réel problème se situe au niveau des différences de capacité disciplinaire sur les gendarmes et les polices judiciaires, bien qu'ils puissent être (...) de même type d'infractions par rapport à l'enquête.

Un autre intervenant trouve que les effectifs sont suffisants, mais qu'il y a un problème organisationnel. Il estime, par ailleurs, qu'il faut aborder la question du statut disciplinaire avec beaucoup de prudence, étant donné qu'il s'agit d'un point qui est très sensible au niveau des services concernés. Il lui semble donc préférable de ne pas y toucher.

Un commissaire renvoie à une déclaration de M. Duinslaeger concernant le contrôle judiciaire de l'application des accords de Schengen et il demande comment l'on voit les choses actuellement. Il fait référence, en second lieu, à une observation faite dans le cadre de l'étude concernant la fonction du magistrat national, selon laquelle celui-ci concentre ses contacts sur la police judiciaire et la gendarmerie. Qu'en est-il de la police communale ?

Pourquoi, si la gendarmerie et la police judiciaire disposent pas des capacités suffisantes, ne fait-on pas appel à la police communale ?

M. Vandoren précise que le manque de capacités se situe au niveau des unités spéciales. Il ajoute que la police communale intervient, dans la majorité des cas, dans des affaires parfaitement localisables, qui se situent sur le territoire communal, mais qu'il y a déjà eu des cas de parfaite collaboration avec la police communale (par exemple, police urbaine d'Anvers). Mais, vu la localisation de l'affaire, ce n'est pas le partenaire normal.

En ce qui concerne le contrôle relatif aux accords de Schengen, M. Duinslaeger précise que le magistrat national est effectivement un magistrat de Schengen qui intervient au niveau de chaque observation transfrontalière (art. 40).

AUDITION DE MME ANNE THILY, PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL DE LIÈGE, ET DE M. FRANK SCHINS, PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D'APPEL DE GAND

1. Exposé du procureur général Schins

Permettez-moi avant tout de dire à quel point nous apprécions, mes collègues et moi-même, le fait de pouvoir exposer, devant votre commission, notre point de vue concernant le projet de loi instituant le collège des procureurs généraux.

La société d'aujourd'hui exige, à juste titre, un meilleur fonctionnement de la justice et impose des critères de qualité tels que nous devons oser reconnaître que les structures actuelles nous permettent à peine de faire ce que l'on attend de nous.

Au sein de la magistrature aussi, de plus en plus de voix s'élèvent en faveur d'une modernisation de nos modes de fonctionnement, non pas parce que nous serions d'accord avec toutes les critiques qui sont émises à notre égard, loin s'en faut, même si elles sont parfois justifiées, mais parce que nous sommes convaincus depuis longtemps qu'il convient d'adapter d'urgence nos structures aux besoins de notre époque.

Ces adaptations sont nécessaires, ne fût-ce que si nous voulons réagir plus rapidement, plus efficacement et plus adéquatement aux diverses formes de criminalité cachée et de criminalité parfois brutale qui existaient à peine il y a quelque 20 ans, qui ont un caractère de plus en plus transfrontalier et qui ne peuvent pas être combattues efficacement, au seuil du XXIe siècle, avec les moyens d'une organisation judiciaire mise en place au XIXe siècle.

Si je m'en tiens au ministère public, je puis vous assurer que mes collègues et moi-même sommes prêts à nous engager dans la voie de la rénovation.

La question est de savoir comment nous devons envisager cette modernisation.

À mon avis, il convient de poursuivre un double objectif :

1. Le premier ne nécessite pas de mesures législatives

Les dispositions actuelles du Code judiciaire et du Code d'instruction criminelle autorisent déjà bien des initiatives qui exigent essentiellement un changement d'attitude, une autre disposition d'esprit, une autre manière de remplir le cadre légal qui est à notre disposition.

Voici quelques exemples de mesures qui sont en préparation ou dont l'application a déjà été testée :

­ une revalorisation des administrations du parquet;

­ une autre manière d'envisager les services de police qui doivent devenir plus autonomes, mais qui doivent aussi être mieux contrôlés;

­ une formation des jeunes magistrats du parquet, qui soit plus permanente et axée davantage sur la pratique;

­ une plus grande ouverture à l'égard des autres parties à une procédure pénale et, surtout, un meilleur accueil des parties lésées;

­ l'instauration d'un système d'évaluation permanente des jeunes magistrats du parquet;

­ la transformation des comités d'avis en des institutions pouvant aussi émettre vraiment des avis valables, ce qui suppose la définition, après mûre réflexion, de profils auxquels les candidats doivent répondre;

­ l'amélioration de la qualité des prestations de services publics, par la prise de mesures en vue de rétablir, dans la population, la confiance dans notre fonctionnement, et par le contrôle de l'application de ces mesures.

Toutes ces initiatives peuvent être prises sans qu'il ne faille modifier la loi, mais elles supposent un changement d'attitude de notre part.

2. Le deuxième objectif est d'ordre législatif

Une modernisation par voie législative peut se faire de deux manières :

­ ou bien l'on démantèle de fond en comble la structure existante et l'on reconstruit sur de nouvelles fondations, ce qui suppose de longues années de travail très intensif et complexe; j'ai bien peur que nous n'ayons plus le temps d'accomplir un tel effort;

­ ou bien l'on apporte des améliorations aux structures existantes, ce qui suppose la préservation des principes qui sous-tendent les anciennes structures.

C'est dans le cadre de cette dernière possibilité, qui est, à mon avis, la plus réaliste à l'heure actuelle, qu'il convient de situer le projet de loi instituant le collège des procureurs généraux.

Cela intéressera peut-être votre commission d'apprendre que M. le ministre de la Justice nous a consultés à diverses reprises à propos des problèmes que pose l'institutionnalisation du collège des procureurs généraux.

D'abord pour définir les principes généraux, puis à propos de la rédaction d'un projet de texte et, enfin, à propos de l'avis du Conseil d'État, qui nous a amenés à soumettre au ministre de la Justice un texte retravaillé qui est devenu finalement la base du projet en discussion.

Les principes fondamentaux sont les suivants :

(1) Les cinq procureurs généraux constituent ensemble un collège, qui est placé sous l'autorité du ministre de la Justice.

Le principe d'autorité ne soulève aucune difficulté, puisque les procureurs généraux se trouvent déjà sous l'autorité du ministre de la Justice.

(2) Ce collège a une compétence nationale et ses décisions ont force obligatoire pour tous les membres du ministère public.

Ce principe constitue en réalité l'essence du projet, mais il soulève certaines difficultés technico-juridiques, étant donné qu'actuellement, un procureur général n'est compétent que pour ce qui est de sa propre juridiction.

La disposition en question doit être lue, selon moi, en corrélation avec deux autres principes :

­ selon le premier, les décisions devront être prises par consensus, de sorte que tous les membres du Collège seront censés adopter le même point de vue;

­ selon le second, la participation à une décision consensuelle implique que tous les membres doivent s'engager à exécuter loyalement cette décision, qui a pour effet de lier tous les membres du ministère public.

Néanmoins, le principe de la force contraignante ne doit pas nuire à la règle selon laquelle chaque membre du ministère public restera libre d'y déroger, pour des raisons fondées, lors de son application concrète dans des cas concrets.

Par ailleurs, j'estime que l'article devrait quand même prévoir une réserve en ce qui concerne les problèmes de politique touchant à des matières régionales, comme la chasse et l'urbanisme.

(3) La troisième ligne de force traduit dans le fait que, pour la première fois, les compétences du Collège sont définies dans un texte de loi.

En résumé, il y a quatre groupes de compétences, à savoir celles concernant :

1. la concertation avec le ministre de la Justice concernant les projets de lignes directrices qui définissent la politique criminelle générale;

2. la coordination et le développement cohérent de la politique criminelle générale;

3. l'action en faveur du bon fonctionnement du ministère public;

4. l'information du ministre de la Justice et les conseils à lui donner sur toutes les matières qui concernent le ministère public.

En d'autres termes, il est question, en l'occurrence, de la confirmation légale des matières déjà traitées par le collège.

(4) Un quatrième principe important concerne le processus décisionnel et la relation entre le collège et le ministre de la Justice

J'estime qu'il convient, en l'occurrence, d'établir des distinctions en fonction de la nature des matières traitées :

a) Certes, les règles générales de la politique répressive sont fixées en concertation, mais le ministre de la Justice dispose dès à présent d'une compétence, en ce qui les concerne.

Il est généralement admis que le ministre de la Justice peut faire des recommandations au ministère public ou lui donner des directives générales, étant entendu qu'il doit respecter à cet égard deux principes :

1º Il ne peut pas prendre la place du ministère public.

2º Ses recommandations ou ses directives ne peuvent viser qu'à l'application de la loi pénale et jamais à la non-application de celle-ci.

L'article 143ter du Code judiciaire, tel qu'il figure dans le projet, respecte ces principes et ne constitue qu'une confirmation légale de relations existantes.

b) La définition détaillée et concrète de ces directives générales et de l'exercice du ministère public auprès des cours et tribunaux est un domaine beaucoup plus délicat, parce que l'on risque de mettre en péril les compétences spécifiques des procureurs généraux.

C'est pourquoi le projet prévoit qu'en l'absence d'un consensus au sein du collège, le ministre de la Justice « prendra les mesures nécessaires » si ­ il y a lieu de le répéter ­ l'exécution des lignes directrices du ministre, qui ne peuvent viser qu'à l'application de la loi, est mise en péril.

Cela signifie que, dans de tels cas, le ministre de la Justice n'a pas une voix prépondérante et qu'il ne peut donc pas s'approprier des compétences qui ne lui reviennent pas; il pourra néanmoins prendre toutes les mesures nécessaires pour que l'on puisse sortir d'une impasse.

En ce qui concerne les rapports entre le ministre de la Justice et le collège, je tiens enfin à signaler que le ministre assiste aux réunions et qu'il les préside dans les cas suivants :

­ lorsqu'il se concerte avec le collège sur les lignes générales de la politique;

­ lorsqu'il a convoqué le collège pour se concerter sur la coordination et sur l'application cohérente de cette politique ou, encore, sur les mesures que l'on prendrait éventuellement pour assurer le bon fonctionnement du ministère public.

(5) Le projet de loi contient en outre une série de dispositions importantes concernant divers points que j'énumérerai sans plus, pour être complet :

­ le collège peut charger des membres des parquets généraux de fonctions de soutien;

­ le collège est assisté par des magistrats nationaux;

­ le projet de loi assouplit le fonctionnement interne en permettant au Roi, après concertation avec le collège des procureurs généraux, de confier à chaque procureur général des tâches spécifiques de préparation, de coordination, de constitution et de mise à jour de documentation, etc.;

­ la loi en projet fixe la fréquence des réunions du collège et indique qui en assure la présidence;

­ le collège est assisté par un secrétariat;

­ le collège a l'obligation de faire annuellement un rapport de ses activités;

­ enfin, le Roi pourra régler le mode de collaboration entre le collège et les services qui relèvent de l'autorité du ministre de la Justice.

Pour conclure, Monsieur le Président, chers membres de la commission, j'estime pouvoir affirmer que nous attachons beaucoup d'importance à l'institutionnalisation du collège des procureurs généraux.

C'est à dessein que j'utilise le terme « institutionnalisation », et ce pour souligner à la fois les différences et les parallélismes par rapport à la situation actuelle.

En effet, le collège existe en fait depuis longtemps et il s'est déjà réuni quelque 190 fois, soit à raison d'une réunion par mois en moyenne, pour chercher des solutions à toutes sortes de problèmes qui dépassent le cadre d'un ressort donné.

Toutefois, l'absence de structure juridique et le manque de moyens font qu'il est particulièrement difficile d'être vraiment performant et de traiter efficacement le nombre sans cesse croissant de problèmes auxquels le ministère public se trouve confronté.

L'on a réellement besoin d'une superstructure, d'une organisation coordinatrice, d'une institution unique qui puisse représenter le ministère public, et s'exprimer d'une seule voix, et qui puisse imposer son autorité.

En donnant une base légale au collège, on consacre la situation actuelle et on lui confère une importante valeur ajoutée.

Ce nouveau concept permet d'appliquer désormais jusqu'au sommet le principe de l'unicité et de l'indivisibilité.

Il pose en outre les bases d'une dynamique nouvelle que le ministère public devra développer s'il veut pouvoir relever les défis particulièrement importants que représentent les divers aspects de la lutte contre la criminalité.

L'inscription dans la loi d'une disposition prévoyant l'institution du collège me paraît constituer la première et la plus importante de toutes les mesures que l'on pourrait prendre pour concrétiser cette dynamique nouvelle.

Pour pouvoir diriger efficacement, il faut en effet d'abord concevoir et installer un poste central de commandement à partir duquel l'on puisse ensuite prendre de nouvelles initiatives.

C'est pourquoi nous sommes convaincus, avec le ministre de la Justice, qu'une fois institutionnalisé, le collège pourra contribuer de manière significative, voire déterminante, à l'amélioration du fonctionnement du ministère public.

Nous sommes disposés, quant à nous, si l'on nous donne les moyens et les structures nécessaires, à remplir le mieux possible les obligations que nous avons vis-à-vis de la société.

Le projet à l'examen suscite par conséquent de grandes attentes.

2. Échange de vues

Un membre souhaite des précisions sur les cas où le ministre n'a pas de voix prépondérante, selon le procureur général Schins.

M. Schins renvoie ici aux lignes directrices du projet. Le Collège s'occupera, grosso modo, de quatre matières.

L'un des ensembles de compétences donne lieu à une concertation avec le ministre de la Justice au sujet des lignes générales de la politique criminelle (art. 143ter du projet).

Jusqu'à ce jour, l'on admet que le ministre de la Justice peut fournir des directives générales et adresser des recommandations à tous les agents du ministère public. Le ministre exerce en l'occurrence une compétence qui lui est propre et il continuera à l'exercer à l'avenir. Le ministre consulte donc le collège au sujet de ces directives générales, mais il lui appartient de prendre les décisions. Le collège donne un avis.

Peu importe donc que les cinq procureurs généraux soient ou non d'accord puisque c'est le ministre de la Justice qui dispose finalement du pouvoir de décision.

La situation est différente pour ce qui est de l'application de ces directives générales. À cet égard, les procureurs généraux reprennent leurs compétences spécifiques de responsables de l'exercice du ministère public à l'intérieur de leur ressort.

Sous ce rapport, le ministre de la Justice ne peut pas se substituer à ces procureurs généraux, sinon il s'arrogerait, selon M. Schins, des compétences qui ne lui reviennent pas.

La loi prévoit qu'il faut un consensus pour que l'on puisse prendre des décisions en la matière.

Le ministre ne peut prendre aucune décision au nom du collège s'il constate qu'aucun consensus ne se dégage au sein de celui-ci en ce qui concerne l'exécution de ces directives générales. Il peut essayer, dans ce cas, de se poser en médiateur, il peut faire réexaminer le problème en question par l'administration, formuler de nouvelles propositions, et adapter éventuellement les directives générales qui semblent être inapplicables.

M. Schins illustre ces propos au moyen d'un exemple concret, à savoir celui du retrait immédiat du permis de conduire.

Le ministre de la Justice peut constater qu'une politique générale s'imposer en la matière. Il lui appartient même de charger le collège, en termes généraux, d'élaborer des directives respectant certains critères généraux. Par contre, il ne lui appartient pas ­ selon l'interprétation personnelle de M. Schins ­ de décider qu'il faut retirer le permis de conduire pour une durée de huit jours en cas de dépassement du taux d'alcoolémie de x pour mille. Dans ce cas concret, il y a simplement lieu d'appliquer concrètement la loi pénale, pour laquelle seul le ministère public est compétent.

Le ministre de la Justice n'a pas le pouvoir de définir les modalités concrètes en question, lorsque les procureurs généraux ne parviennent pas à s'accorder sur celles-ci. Il fera, dans ce cas, de nouvelles suggestions qu'il soumettra au collège.

Le membre estime que cette question est fondamentale et qu'elle s'inscrit dans la problématique plus générale de l'injonction négative. C'est une question de principe de connaître les limites du pouvoir d'injonction négative.

Il renvoie à ce sujet à la théorie de M. Hayoit de Termicourt, droit prétorien généralement admis, qui définit cette politique.

Il ressort de l'exemple précis que le ministre de la Justice n'a pas de droit d'injonction négative.

L'intervenant pose la question de savoir si le procureur général a ce droit, s'il a la possibilité d'interdire à un procureur du Roi ou un avocat-général de poursuivre.

M. Schins répond qu'il y a deux avis en la matière.

Selon l'avis dominant, la relation entre le ministre de la Justice et les procureurs généraux est identique à la relation entre les procureurs généraux et les procureurs du Roi. Cela signifie concrètement que le procureur général ne peut pas adresser d'injonction négative au procureur du Roi. C'est, toutefois, un point de vue que l'on critique sur la base des arguments suivants.

Aux termes de l'article 143 du Code judiciaire, le procureur général est responsable de l'exercice des fonctions du ministère public près les cours et tribunaux de son ressort. L'on pourrait en déduire qu'il disposerait également, dans certains cas, du pouvoir d'interdire l'exercice de l'action publique.

M. Schins privilégie le point de vue habituel et estime qu'un pouvoir d'interdire ne serait pas une chose saine, étant donné que les procureurs généraux sont en fin de compte responsables de l'application de la loi pénale et non pas de sa non-application.

Le membre étend ce débat aux tâches spécifiques (par exemple toxicomanie) qui peuvent être attribuées à certains membres du collège, ce qui résulte en une interférence du procureur général dans une politique d'extension nationale, qui dépasse donc le cadre de son ressort.

Le procureur général pourrait ainsi prendre des décisions vis-à-vis des magistrats nationaux.

Le membre se demande si le procureur général a besoin d'une décision du collège, par consensus, pour ces interventions. Si cela n'est pas le cas, il aurait des prérogatives que le ministre de la Justice n'a pas.

S'il y a, au sein du collège des procureurs généraux, des répartitions de compétences qui font qu'un procureur général doit veiller à l'application d'une politique nationale, quelles seront exactement les prérogatives de ce magistrat ? Quelles sont les limites de sa compétence ?

Selon Mme Thily, le procureur général reviendrait devant le collège.

La répartition des tâches est uniquement une question de préparation du dossier. Les décisions sont prises par le collège, par consensus.

M. Schins établit un parallélisme avec l'état actuel des choses.

Il n'est plus efficace que chaque procureur général s'occupe chaque jour des mêmes problèmes; il faut dès lors que les cinq procureurs généraux répartissent les divers domaines entre eux. En fait, il leur appartient de recueillir de la documentation, d'élaborer un projet d'avis, d'assurer la gestion journalière, d'accomplir un travail préparatoire.

Le procureur général en question ne dispose cependant pas du pouvoir de décision; il soumettra une proposition élaborée à l'assemblée plénière du collège.

Dans le cas, par exemple, de la politique en matière de stupéfiants, le procureur général chargé de cette matière ne pourra pas se permettre de déterminer à l'extérieur quelle politique le collège suivra en la matière, à moins qu'il n'y ait eu concertation préalable avec le collège et que celui-ci ait donné son accord et ait chargé le procureur général de faire savoir cette politique au public.

Un membre fait ensuite les deux remarques suivantes :

L'intervenant estime en premier lieu qu'il faudra préciser le dernier alinéa de l'article 2, § 5, plus particulièrement les termes « après concertation avec le collège ». C'est surtout le texte français qui est confus parce qu'il donne l'impression que l'arrêté royal peut être pris « après concertation avec le collège ».

Sa deuxième remarque s'adresse à la procureur générale, Mme Thily, à laquelle il précise que le rapport annuel ne constitue qu'un élément documentaire du contrôle externe. D'après l'intervenant, il faudra encore débattre longuement du contenu de ce contrôle externe.

L'intervenant pose encore deux questions spécifiques.

Il remarque en premier lieu que, dans l'énumération des mesures qui peuvent être prises par le ministre de la Justice, M. Schins est passé assez vite sur le mot « nécessaires » (art. 2, § 3). L'intervenant aimerait savoir quelle est, ici, la finalité exacte de ce mot. Selon l'interprétation de M. Schins, ce terme implique que l'on essaie malgré tout d'aboutir à un consensus.

L'intervenant estime cependant que les « mesures nécessaires » peuvent également être des mesures traduisant la finalité des lignes directrices visées à l'article 143ter.

La dernière question que pose l'intervenant concerne les rapports qu'entretiennent le collège des procureurs généraux et le procureur général près la Cour de cassation (voir l'art. R.W. ­ arrêt Vermeulen). De quelle façon les procureurs généraux présents conçoivent-ils ces rapports ?

Selon un autre membre, il s'agit, du point de vue politique, des principes qui sous-tendent la réforme. L'interprétation qu'il donne de l'exposé de M. Schins est que le projet de loi institutionnalise en fait essentiellement la pratique existante, et que cette institutionnalisation fournit une base juridique suffisante et donne davantage de possibilités pour soutenir la mise en oeuvre du processus décisionnel.

C'est sur ce point qu'a lieu la discussion politique : certains estiment en effet que, si le ministre de la Justice est responsable politiquement devant le Parlement, cela signifie qu'il a la responsabilité politique en ce qui concerne la politique de recherche et de poursuite; or, l'on ne peut être responsable d'un point de vue politique si l'on ne dispose pas de la compétence en la matière.

La même discussion a lieu aux Pays-Bas, où elle s'est très largement traduite en un droit d'injonction négative, également à l'égard de cas individuels.

L'intervenant estime qu'il n'est pas nécessaire d'en arriver là et que le ministère public doit conserver, dans les cas individuels, son rôle de magistrat.

Le problème se pose toutefois sur le plan des lignes directrices générales relatives à la politique criminelle et à l'instruction. L'exposé de M. Schins était extrêmement nuancé et l'intervenant a compris que, sur le plan politique, c'est le ministre de la Justice qui détermine la politique générale, mais qu'un consensus doit se dégager au sein du collège des procureurs généraux concernant l'exécution concrète de celle-ci; si aucun consensus ne se dégage, le ministre peut jouer le rôle de médiateur pour essayer d'atteindre ce consensus.

Se pose, inévitablement, le problème de la responsabilité politique. En effet, en l'absence de consensus, une politique de poursuite déterminée ne peut être exécutée, de sorte que le Parlement n'a pas la possibilité de demander des comptes aux procureurs généraux.

L'intervenant est d'accord sur cette conclusion, mais se demande s'il ne faut pas la préciser.

Un autre membre revient sur l'exemple de M. Schins en ce qui concerne le retrait immédiat du permis de conduire.

Qu'est-ce qui se passe en cas de non-accord d'un procureur général sur le degré d'alcool nécessaire pour le retrait; quel en est le suivi ?

Est-ce que chaque ressort suit sa politique ?

Mme Thily réplique que la politique criminelle doit être en danger pour que le ministre prenne des mesures nécessaires (art. 143bis , § 3), donc pas nécessairement s'il n'y a pas de consensus.

Dans le cas de l'exemple cité, un membre pousse plus loin le raisonnement du préopinant et constate que l'on pourrait en arriver à une situation où le ministre définit les lignes directrices générales, selon lesquelles il est nécessaire de retirer le permis de conduire à partir d'un taux à préciser d'alcool dans le sang, sans que ce taux soit défini concrètement; si bien qu'en l'absence de consensus, il se pourrait que, dans le ressort d'un procureur général, il faille un taux d'alcool double par rapport aux autres ressorts avant que l'on ne procède au retrait du permis.

L'intervenant répète que Mme Thily répond à cela que le ministre peut uniquement prendre des mesures si la politique criminelle est en danger. Faisant suite aux propos du préopinant, l'intervenant pose cependant le problème de la responsabilité politique du ministre à l'égard du Parlement, étant donné que l'alcoolisme a une grande influence sur le comportement des conducteurs. Le ministre devra-t-il rendre des comptes au Parlement, et peut-il, dans ce cas, invoquer le fait qu'il a élaboré des lignes directrices générales, qui n'ont toutefois pas été appliquées par manque de consensus ?

D'après le ministre, ce débat est bien entendu crucial, et il estime que l'exposé de M. Schins présente un intérêt tout d'abord en ce qui concerne la méthode. Celle qui consiste à laisser le ministre de la Justice élaborer les lignes directrices générales et à en confier le contenu aux procureurs généraux, est bonne. Il n'appartient pas au ministre de mettre le schéma au point, mais il vaut mieux, dans une vision politique élargie, charger le collège de mettre au point les lignes directrices arrêtées par le politique.

Ici se pose, bien entendu, la question de la ligne de démarcation entre la politique générale et la politique individuelle. Selon le ministre, le fait que le ministre fixe la politique générale et ne doit pas intervenir dans les affaires liées aux dossiers ne donne lieu à aucune discussion. Le problème se situe dans la détermination de la catégorie : générale ou individuelle.

Le ministre estime qu'actuellement deux raisonnements l'emportent. D'une part, l'hypothèse de l'absence de consensus au sein du collège. Le ministre a alors le droit d'initiative, la mission de prendre les mesures nécessaires. D'autre part, il peut également intervenir dans l'hypothèse du consensus, lorsqu'il constate que la politique criminelle est mise en péril.

Il s'agit ici de peser en permanence le pour et le compte, d'appliquer le système des freins et contrepoids, car une règle satisfaisante n'existe pas. Il est, d'après lui, impossible de tracer avec précision la ligne de démarcation exacte; l'ensemble est mouvant.

Le ministre assume alors chaque fois la responsabilité politique.

Le ministre explique ensuite son point de vue concernant la définition des « mesures nécessaires ».

Il estime que cette notion doit être interprétée au sens large, c'est plus qu'une médiation. Le ministre peut aller plus loin et une sanction frappant un des procureurs généraux sur le plan disciplinaire peut même en résulter. L'intervention du ministre peut être active chaque fois qu'elle est nécessaire pour réaliser la politique criminelle.

Mme Thily intervient dans le sens qu'il s'agit ici du pouvoir d'injonction positive du ministre. Il peut intervenir et obliger un procureur général à suivre une certaine directive.

Un membre estime qu'il n'est pas toujours facile de définir le champ d'injonction positive et négative, (par exemple, si le procureur intervient nettement trop vite pour le retrait du permis de conduire en cas d'alcoolémie de, par exemple, 0,5 pour mille).

Enfin, le ministre précise encore qu'il aura une compétence plus explicite si ces « mesures nécessaires » sont rendues contraignantes à l'égard de tous les membres du ministère public.

Un commissaire réitère ensuite sa question relative aux relations entre le collège des procureurs généraux et le procureur général près la Cour de cassation.

M. Schins répond que le projet de loi en discussion ne prévoit aucune modification de l'article 400 du Code judiciaire, ce qui implique que les relations juridiques actuelles subsisteront.

L'article 400 du Code judiciaire ne dispose pas, par exemple, que le procureur général près la Cour de cassation exerce sa surveillance sur le collège des procureurs généraux.

Le même commissaire ajoute une nuance, à savoir que les décisions du collège seront obligatoires pour tous les membres du ministère public et que si l'article 400 reste inchangé, le procureur général près la Cour de cassation ne pourra plus exercer sa surveillance sur les procureurs généraux dans la mesure où ceux-ci exécutent les décisions du collège.

Un autre membre revient sur la répartition des tâches entre les différents procureurs généraux en vue de la préparation des dossiers.

Il craint à ce sujet l'influence prépondérante du procureur général qui prépare le projet : la personnalité de ce dernier va se sentir très fort dans la décision finale. On risque ainsi de méconnaître la diversité de la réflexion.

L'intervenant suivant se réjouit que l'on fasse la clarté sur le fonctionnement du collège des procureurs généraux. Il a par ailleurs le sentiment qu'on laisse passer en l'occurrence une chance d'établir plus clairement les responsabilités du pouvoir exécutif. Il estime que le projet en discussion devrait aller plus loin et que la responsabilité devrait être assumée par un élu, de préférence un membre du pouvoir exécutif, étant donné que la politique en matière de poursuites concerne tous les citoyens. Le contrôle externe à exercer à l'occasion du rapport annuel visé à l'article 2, § 7, ne suffit pas. L'intervenant renvoie, à cet égard, au dossier « Rebel ».

Un sénateur demande des éclaircissements sur ce qui se produirait en cas de tensions entre le ministre et le collège des procureurs généraux.

Il estime qu'il ne sera pas toujours facile, pour le ministre, de prendre des mesures contraignantes.

Il demande d'abord aux procureurs généraux présents s'ils peuvent imaginer que l'on puisse mener, dans une circonscription, une politique différente de la politique qui est suivie dans une autre.

Ensuite, il formule une remarque politique concernant le projet dans son ensemble. Il reste un secteur très étendu dans le cadre duquel les autorités doivent elles-mêmes être contrôlées, d'une part, et les dirigeants, l'ordre judiciaire ou le monde politique peuvent avoir des points de vue opposés, d'autre part. L'intervenant estime qu'il y a lieu de prévoir une exception à cet égard et d'accorder au collège des procureurs généraux une très large compétence, même si elle ne correspond pas en tout point à la vision politique.

Enfin, le sénateur pose une question concernant le domaine des compétences régionales et l'autorité que le ministre fédéral de la Justice peut avoir en ce qui concerne ces matières régionales.

Un membre demande comment les procureurs généraux estiment pouvoir être le mieux informés des éléments de la politique criminelle. Sont-ils en mesure d'avoir tous les éléments pour prendre des mesures en connaissance de cause et quels sont leurs moyens ?

Un autre membre renvoie dans cette optique à sa question sur les possibilités des procureurs généraux d'avoir une information convenable, notamment en matière de classement sans suite des affaires.

Mme Thily répond qu'il existe dans chaque ressort la conférence avec les procureurs du Roi. À Liège, une réunion est prévue chaque mois. Mme Thily confirme que le procureur général reçoit de cette manière également l'information statistique des classements de dossiers.

Un membre demande comment on pourrait assurer une conjonction de toutes les informations au niveau fédéral, vu que le collège des procureurs généraux constitue une structure fédérale.

Le ministre précise que l'information n'est pas seulement transmise par les procureurs du Roi, mais qu'il existe également des statistiques (par exemple au sein des services de la politique criminelle), des études faites par les avocats généraux, etc.

Un membre demande quels sont les rapports du collège des procureurs généraux avec les magistrats nationaux, et plus précisément si cette collaboration se déroule dans de bonnes conditions et si le texte du projet est suffisamment explicite à cet égard.

Mme Thily estime que cetee collaboration ne pose aucun problème et que les magistrats nationaux ont des contacts privilégiés avec le doyen du collège des procureurs généraux.

Le problème le plus crucial était, selon Mme Thily, de connaître les relations entre les procureurs du Roi et les magistrats nationaux. Jusqu'à présent aucun problème ne s'est posé.

Le texte lui semble suffisant au niveau des rapports entre le collège des procureurs généraux et les magistrats nationaux.

Un autre membre souhaite obtenir des précisions concernant l'article 2, § 4, qui prévoit que le collège peut charger des avocats généraux de fonctions de soutien. Il se demande s'il est utile de limiter ces possibilités aux avocats généraux et s'il ne faudrait pas pouvoir charger de ces fonctions d'autres membres du ministère public, au niveau des arrondissements.

M. Schins déclare qu'il ne voit aucune objection à ce que l'on étende le champ d'application du texte à l'ensemble des membres du ministère public. Selon lui, le texte se fonde sur la situation actuelle, et ce paragraphe permet de faire la distinction entre, d'une part, les magistrats nationaux et, d'autre part, une série de personnes ayant une expertise particulière au niveau national (par exemple, M. Timperman en matière d'hormones).

Selon le ministre, l'on a rédigé cet article en tenant compte de la volonté de responsabiliser le personnel des parquets généraux et de le faire participer à cette politique. L'on a fait volontiers une distinction et la prochaine étape sera d'organiser l'enquête et les poursuites au niveau de la première instance.

Le membre comprend les propos du ministre, mais il constate que l'on pourrait tout aussi bien tenir compte de la spécialisation de certains arrondissements, par exemple, dans les trafics des pourvoyeurs de main-d'oeuvre ou dans le trafic d'hormones.

Le ministre répond ensuite au membre qui estime que le présent projet de loi ne va pas suffisamment loin et que le ministre devrait intervenir davantage et plus directement. Tout résulte d'un choix politique selon lequel le ministre ne doit pas suivre de dossiers individuels. Le ministre estime que ce choix est généralement accepté. La référence à « Rebel » est à situer dans le cadre de la législation relative aux services spéciaux de police et le ministre estime que le problème ne peut pas être résolu dans le contexte en question.

Concernant la remarque d'un sénateur relative aux compétences régionales, le ministre précise que le collège conserve sa compétence régionale et qu'il ne doit tenir compte que des divergences qui peuvent apparaître entre les législations des différentes régions.

Le sénateur précise que sa question concerne plutôt la concurrence avec le pouvoir du ministre fédéral de la Justice.

D'après M. Schins, il s'agit évidemment d'un problème technico-juridique.

Les lignes directrices de la politique criminelle sont arrêtées par le ministre de la Justice en concertation avec le Collège des procureurs généraux, et ce, dans tous les domaines. L'article 1er de l'arrêté royal du 14 janvier 1994 créant un service de la politique criminelle consacre également ce principe en ajoutant toutefois « sans préjudice des compétences attribuées aux Communautés et aux Régions ».

Il n'empêche que la voie qui mène au collège devrait quand même passer par le ministre de la Justice, même pour ce qui est des matières d'intérêt exclusivement régional. La politique régional doit en effet pouvoir s'intégrer dans une certaine mesure dans le cadre de la politique fédérale globale en matière de justice. Il doit donc continuer à y avoir une certaine interaction entre la politique fédérale et la politique régionale, pour ce qui est des matières très spécifiques.

Un membre note que l'on est, en fait, en train d'analyser le fonctionnement de la démocratie.

La Constitution définit les compétences et désigne ceux qui sont chargés de les exercer, et la démocratie est organisée au bénéfice de la population au travers des divers pouvoirs exécutifs.

Il ressort de l'analyse de M. Schins qu'il convient d'examiner d'un oeil critique la qualité du travail législatif. En effet, il appert souvent que les hommes de terrain de la justice n'appliquent plus les lois, parce qu'ils n'y croient plus, qu'ils estiment pouvoir se faire une meilleure idée d'une problématique grâce à leur propre expérience, et qu'ils négligent dès lors certaines lignes directrices et adoptent une attitude autonome. C'est ainsi qu'il se pourrait que quelqu'un refuse de se conformer au consensus. Si c'est par entêtement, des sanctions doivent être prises, mais il convient également de se poser des questions à propos du suivi des effets d'une loi. La loi a-t-elle des effets réels sur le terrain ? C'est une question de feed-back. Les hommes de terrain devront rendre compte au collège, qui fera rapport au ministre, et celui-ci devra tirer les conclusions politiques. Si une loi ne correspond pas à ce que l'on en attend, le suivi devra être assuré, sous forme de rapport, jusqu'au niveau du Parlement.

Il appartient au Parlement de faire les lois et nous devons éviter que l'on vide la fonction du Parlement de sa substance. Les flux d'informations sont importants car ils permettent de savoir comment le travail législatif est perçu sur le terrain. Ce feed-back dans le cadre duquel le travail législatif est évalué en fonction de la réalité, devrait être assuré jusqu'au niveau du Parlement. Si tel était le cas, les problèmes de répartition des compétences disparaîtraient.

M. Schins souligne à cet égard qu'il y a lieu de fournir des précisions concernant un aspect important des choses, que constitue la coopération très étroite avec le ministre de la Justice. Il s'ensuit qu'une série de problèmes sont transmis par le Parlement au collège des procureurs généraux et vice versa, par le biais du ministre de la Justice.

Les contacts réguliers que prévoit la loi en projet ne peuvent qu'améliorer le fonctionnement du suivi. Il s'agit d'un aspect secondaire mais important du projet de loi.

Un membre souhaite des précisions sur les mesures non législatives énumérées par M. Schins, dont notamment l'autonomie plus grande des services de police liée à un contrôle plus efficace.

M. Schins attire, à cet égard, l'attention de la commission sur un projet en cours d'expérimentation dans l'arrondissement judiciaire de Bruges depuis avril 1996. Si le bilan est positif, on l'étendra à l'ensemble de la juridiction.

Sa raison d'être est que, pour les formes les plus simples de criminalité, on perd énormément de temps et d'énergie dans les échanges entre parquets et services de police.

C'est par exemple le cas quand, pour une bagarre de bistrot en présence de témoins, il s'avère que les témoins habitent dans d'autres arrondissements. Il faut des mois avant que le magistrat du parquet ne puisse prendre une décision dans un dossier aussi simple. La thèse de M. Schins est que ce genre de problème peut se résoudre facilement dans le cadre de la législation existante et que les services de police peuvent prendre l'initiative d'entendre les témoins, tout en étant tenus d'informer les parquets. On pourrait mener très rapidement à bien les simples informations.

Cette méthode implique toutefois que le magistrat du parquet n'aura plus le contrôle direct de ces enquêtes. C'est pourquoi M. Schins estime que cette plus grande autonomie des services de police doit aller de pair avec une autre conception du contrôle.

Le projet en cours à Bruges prévoit une réunion hebdomadaire entre le responsable de l'enquête dans les services de police et le magistrat du parquet.

Une autonomie plus grande, mais contrôlée davantage, des services de police permettra de libérer le parquet pour d'autres formes, nécessaires, de contrôle, que M. Schins résume par le terme « concertation sur la recherche (par exemple, la recherche « proactive », la discussion des problèmes généraux de criminalité, etc.).

M. Schins a appris par expérience qu'une bonne concertation en matière de recherche empêchait la guerre des polices de se produire.

Une membre est d'accord sur le dégagement des parquets par une plus grande autonomie des services de police et un contrôle plus efficace. Elle se demande si le contrôle mentionné par M. Schins est bien suffisant, étant donné que l'on ne donne que les informations que l'on veut bien donner.

Elle partage également l'opinion de M. Schins concernant les nécessités de concertation et les effets de cette concertation sur les guerres de police.

Elle estime cependant que c'est une lacune du projet de ne faire travailler que le collège des procureurs généraux, alors qu'il y a toute cette implication avec les services de police en ce qui concerne la grande criminalité et la politique criminelle.

Comment travailler avec eux et comment exercer le contrôle sur les services de police ? Comment faire jouer les interactions entre les services de police et le collège des procureurs généraux ?

Mme Thily répond que c'est la tâche du collège de répartir les contrôles et les attributions aux services de police et que cela se fera dans le cadre des réunions du collège.

M. Schins ajoute que l'un des points positifs du projet est justement qu'il ne s'agit plus de cinq individus, mais bien d'un seul organe.

Il est effectivement difficile, dans la situation actuelle, que cinq procureurs généraux soient confrontés par exemple à un seul état-major, à un seul commissaire général, à un seul individu qui porte la responsabilité vis-à-vis de tout un corps.

Selon M. Schins, il faut d'abord que le collège soit doté d'une existence légale et ensuite on pourra établir des liens légalement plus fondés entre le collège et, par exemple, l'état-major de la gendarmerie.

Il va de soi que l'une des missions principales du collège est de s'attaquer à la problématique policière.

C'est un bloc de tâches qui peut être attribué à un seul procureur général, qui organisera alors les contacts entre le collège et les responsables des services de police.

Dès que l'on disposera d'une structure, la coopération s'en trouvera facilitée.

SUITE DE LA DISCUSSION GÉNÉRALE

Selon un membre, l'ambiguïté de toute la discussion est soulignée en permanence par le fait que, d'une part, le ministère public ne peut être un fonctionnaire du pouvoir exécutif et que, d'autre part, le Code judiciaire dispose que ses diverses missions doivent être accomplies sous l'autorité du ministre de la Justice. Dans quelle mesure est-ce conciliable ?

D'après l'intervenant, le ministère public a une double fonction : d'une part, il peut être considéré comme un élément du pouvoir exécutif et, d'autre part, il a également un rôle de magistrat. Cette situation doit être éclaircie si l'on veut connaître la portée des articles 143bis, § 3 et 143ter .

Un membre estime qu'il importe en effet de préciser la portée des « mesures nécessaires », telles que prévues à l'article 143bis , § 3.

Le ministre fixe les lignes directrices, les procureurs généraux doivent les exécuter. S'il y a un consensus à ce sujet au sein du collège, le problème ne se pose pas.

Si, par contre, le consensus n'est pas atteint, quelle est la force des mesures à prendre par le ministre ?

L'exemple cité par M. Schins au sujet du retrait immédiat du permis de conduire est ambigu selon M. Lallemand. Il donne l'impression que les procureurs généraux ont un pouvoir d'appréciation et qu'ils peuvent refuser d'exécuter les lignes directrices du ministre.

Le ministre réplique que, selon lui, par mesures nécessaires, l'on entend des instructions décisives, si la politique criminelle est en danger.

Le membre se réfère dans ce cadre à la comparaison du texte de l'avant-projet et du projet actuel.

L'avant-projet stipulait que le ministre « décide ». Conformément à l'avis du Conseil d'État, ce mot a été remplacé par les mots « prendre les mesures nécessaires ». Il importe de connaître la portée exacte de ces mots.

Un autre membre souligne que le texte initial de l'avant-projet ne comportait pas d'article 143ter . Seul y figurait un article 143bis , rédigé comme suit :

« Le ministre de la Justice détermine en collaboration avec le collège des procureurs généraux les lignes directrices de la politique criminelle et notamment de la politique de recherche et de poursuite. À défaut de consensus, le ministre statue. »

Le Conseil d'État a fait référence, dans son avis, à la séparation des pouvoirs.

L'intervenant a l'impression que l'on a ensuite consacré deux articles à la question, ce qui pourrait soulever un problème en ce qui concerne le champ d'application des lignes directrices. Ce problème pourrait aussi être axé, par exemple, sur la politique en matière de stupéfiants; le ministre ne pourrait pas dire, dans ce cas, que des mesures alternatives doivent être appliquées à partir d'un moment déterminé. Il n'est pas dit clairement que le ministre peut imposer la concrétisation des mesures, s'il n'y a pas de consensus.

Un commissaire constate qu'il existe un consensus général au sein de la commission pour que l'on donne un contenu à l'article 143ter . Selon le Conseil d'État, les lignes directrices dont il y est question ne sont pas suffisamment spécifiées pour qu'une application automatique en soit possible (voir l'avis du Conseil d'État, doc., Sénat, nº 1-447/1, note en bas de page, p. 24). Si c'était possible, les lignes directrices pourraient tenir lieu de textes de loi.

L'intervenant demande s'il s'agirait alors d'une déclaration d'intention.

Il déduit de la discussion et de la manière dont le problème est posé que la commission est unanime à vouloir donner plus de contenu aux lignes directrices, visées à l'article 143ter , qui constituent, en fait, la délimitation de la politique que le ministre développe pour lutter contre la criminalité.

Pour ce qui est du contenu, ces lignes directrices font plus qu'esquisser un cadre ou développer des considérations générales. Selon l'intervenant, ce qui est inscrit dans ce cadre est plus concret que l'exemple donné par M. Schins à propos du retrait immédiat du permis de conduire.

Pour ce qui est du contenu de l'article 143bis , § 3, le membre estime, en tenant compte de l'article 143ter et de l'historique du projet, que le législateur a en vue davantage qu'une simple tentative de médiation du ministre.

Les mesures nécessaires doivent avoir pour finalité une coordination et un développement cohérent de la politique criminelle au sens de l'article 143ter (art. 143bis , § 2, 1º).

Le ministre estime que cette interprétation est effectivement la seule à être exacte et que la seule chose à dire, c'est que l'article 143bis est subordonné à l'article 143ter. La compétence évidente du ministre est définie séparément à l'article 143ter et tout ce qui est purement instrumental et mécanique est inscrit à l'article 143bis, § 2.

Le ministre ne peut pas modifier la règle proprement dite par le biais de la politique criminelle. Le ministre renvoie à cet égard à l'avis du Conseil d'État (doc. Sénat, nº 1-447/1, p. 24) :

« Par ailleurs, on s'interroge sur ce qu'il convient exactement d'entendre par l'expression « les lignes directrices de la politique criminelle ».

La formulation utilisée donne à penser que les auteurs du texte visent par là les directives générales de politique criminelle que le ministre de la Justice a le pouvoir d'adresser au ministère public.

Mais la politique criminelle du ministre ne peut pas non plus être modifiée en cascade par les procureurs généraux. Chacun doit s'en tenir à sa compétence. La fixation des limites auxquelles le ministre est soumis soulève un débat politique permanent et permet d'assurer un contrôle continu ­ matière par matière (par exemple politique en matière de stupéfiants). Il s'agit ici en l'espèce de la création de catégories et non pas d'interventions individuelles dans un dossier.

La finalité est indubitablement la politique criminelle.

Un autre membre cite un exemple concret. Est-ce que le fait de déterminer qu'en matière de consommation de hasj, il est hors de question d'emprisonner et qu'il importe à veiller à des mesures de substitution, constitue une directive générale ?

Selon le ministre, il peut donner, dans le cadre d'une directive générale, des instructions que ces dossiers soient préparés d'une certaine manière pour que des peines alternatives soient appliquées.

Il ne peut, par contre, pas interdire aux procureurs généraux d'appliquer les peines prévues par la loi.

Il ne peut pas changer la loi. Ceci met également en cause la problématique de l'injonction négative.

Le membre rappelle que l'exemple cité par M. Schins en matière de retrait immédiat du permis de conduire est très ambigu.

Le ministre estime que l'exemple n'est pas clair, mais que les procureurs généraux sont bel et bien responsables de l'exécution des lignes directrices, et que le ministre doit chercher en premier lieu un consensus. Il ne faut pas perdre de vue que les lignes directrices du ministre sont contraignantes pour tous les membres du ministère public et que le ministre a beaucoup de moyens de les faire respecter (mesures d'injonction, mesures disciplinaires).

Une membre estime qu'il faut tout simplement tenir compte du fait qu'une directive ne peut pas modifier une règle précise de droit. Fixer des priorités (par exemple appliquer la peine maximale pour l'alcoolémie au volant) et rester ainsi dans les fourchettes de peines prévues par la loi ne constitue, selon elle, nullement la substitution à une règle de droit.

L'intervenante ne juge pas utile d'établir des lignes directrices trop larges et de laisser ainsi trop de liberté aux procureurs généraux dans l'appréciation de l'exécution, d'où le risque de différences entre les ressorts.

Un membre conclut que le débat est en effet de connaître les limites du pouvoir du ministre et donc de savoir, d'une part, ce qu'est une directive générale et, d'autre part, jusqu'où le ministre peut aller dans les mesures nécessaires.

Un commissaire signale une différence entre le texte néerlandais et le texte français de l'article 143ter.

Dans le texte néerlandais, il est question de « richtlijnen », ce qui n'évoque pas l'idée d'un cadre général, du tracé de schémas.

Dans le texte français, par contre, il est question de « lignes directrices », ce qui fait plutôt penser à la fixation de contours généraux.

Le mot « directives » traduirait mieux le mot « richtlijnen ».

L'intervenant demande, par ailleurs, si le ministre peut prendre un arrêté ministériel, dans le cadre des mesures nécessaires visées à l'article 143bis, § 3.

Le ministre répond par l'affirmative.

L'intervenant suivant attire l'attention sur le fait que le Conseil d'État ne part pas nécessairement d'une conception du ministère public qui soit parallèle à la conception dominante au sein de la commission, laquelle estime que le ministre doit obtenir tous les moyens nécessaires pour mettre en oeuvre sa politique criminelle. Il renvoie, à cet égard, au texte où il est clairement question de « lignes directrices de la politique criminelle », ce qui est clair.

Le ministre craint que l'explicitation et la définition des « mesures nécessaires », dans le texte de loi, ne risque d'entraîner une limitation des attributions du ministre. Une énumération pourrait en effet exclure d'autres possibilités.

Il estime qu'il faut interpréter le plus largement possible les mots « mesures nécessaires », notamment, en ce sens que l'ultime mesure nécessaire serait une nouvelle ligne directrice.

À cet égard, le ministre renvoie également à l'exposé des motifs de l'article 2 (doc. Sénat, nº 1-447/1, p. 6), qui dit ceci :

« Le § 3 prévoit que le collège délibère par consensus. Si l'absence de consensus est de nature à mettre en péril l'exécution des lignes directrices fixées par le ministre de la Justice, celui-ci peut prendre les mesures qui s'imposent pour remédier à toute éventuelle carence. Il peut par exemple éclaircir ou préciser ses lignes directrices, convoquer à nouveau le collège, exercer son autorité sur les procureurs généraux individuellement sans toutefois pouvoir exercer l'action publique lui-même. »

Le ministre précise que ce n'est pas à lui d'assigner devant le tribunal, mais que toute autre mesure est possible.

Un membre réplique que l'exposé des motifs cité stipule que le ministre peut prendre les mesures qui s'imposent pour remédier à toute éventuelle carence, donc en cas de déficience; qu'en est-il cependant si le ministre ne constate pas de carence, mais qu'il souhaite imposer certaines mesures en vue de fixer des priorités (par exemple s'il donne, en matière de toxicomanie la préférence aux peines de substitution) ?

Un membre fait remarquer que le mot « carence » n'est pas rendu comme tel dans le texte néerlandais qui parle de lacunes (« leemten »).

Le fait qu'il n'y a pas de consensus constitue, selon lui, automatiquement une lacune dans l'exécution.

L'intervenant précédent confirme ce problème de traduction, mais estime que ceci n'empêche que sa question demeure; notamment qu'en est-il du respect des priorités accordées par une politique ? Est-ce que le fait de donner priorité aux peines alternatives en matière de toxicomanie constitue une injonction négative dans ce sens que l'on empêche l'application des peines de prison ?

Pour mener une politique criminelle, il est nécessaire, selon l'intervenant, de pouvoir faire des choix. Est-ce que ceci peut constituer une ligne directrice ou faire partie des mesures nécessaires ?

Selon un membre, il est impossible de demander de ne pas appliquer une norme, mais il est tout à fait envisageable de conseiller, dans un éventail prévu par la loi, d'appliquer une modalité d'exécution.

Le ministre se déclare entièrement d'accord avec cette interprétation.

Le membre pose ensuite une question sur le rôle du procureur général dans l'application des lignes directrices. L'article 3 prévoit que les procureurs généraux veillent à l'exécution de ces lignes directrices au sein de leur ressort. Le commentaire stipule que ces lignes directrices ne sont pas de simples recommandations mais sont contraignantes pour tous les membres du ministère public.

Est-ce que cela implique que le procureur général n'a aucun pouvoir personnel d'appréciation ? Il ressort de l'exposé des motifs que la décision ne dépend nullement de son intervention.

Or, le Conseil d'État donne l'impression de dire que le procureur général doit lui-même établir la norme dans son ressort, pour qu'elle soit opérationnelle.

L'intervenant déclare ne pas partager l'avis du Conseil d'État, mais demande de clarifier.

Selon un membre, lors de la discussion précédente, un consensus s'est dégagé au sein de la commission pour conférer au ministre de la Justice une part plus active dans la définition de la politique criminelle.

D'après lui, il convient dès lors de mieux délimiter le rôle du ministre de la Justice vis-à-vis du collège des procureurs généraux.

L'intervenant partage la critique de certains membres selon laquelle le projet à l'examen présente des lacunes, non seulement sur ce point-ci, mais sur d'autres également.

Il cite l'exemple de l'article 143bis, § 5, quatrième alinéa, proposé, du Code judiciaire, aux termes duquel le Roi peut, dans le cadre de l'exercice des compétences mentionnées au § 2 et à l'article 143ter, et après concertation avec le collège des procureurs généraux, confier des tâches spécifiques aux membres du collège.

À défaut de définition légale, il s'agirait seulement d'une mission d'étude et de recherche, et non de l'exécution de la politique criminelle ou de certains de ses aspects. Le procureur général près la Cour d'appel de Liège n'est donc pas habilité à prendre pour l'ensemble du pays des mesures générales de lutte antidrogue.

L'intervenant souligne qu'il n'a quant au fond aucune objection au projet de loi. Il n'en reste pas moins que le texte doit être précisé sur certains points. Il n'est pas très opportun, du point de vue légistique, de devoir constamment se reporter à l'exposé des motifs ou au rapport de la commission pour interpréter un texte de loi.

Enfin, l'intervenant aimerait encore savoir si le ministre fera partie ou non du collège des procureurs généraux.

Un membre réplique qu'il a été remédié à l'objection de l'intervenant précédent en corrigeant le projet initial en ce sens que l'article 2, § 1er , précise clairement que « ses décisions engagent les procureurs généraux près les cours d'appel ».

Un membre confirme que le problème se situe au niveau du consensus et que l'on retombe dans la même discussion sur la portée des mesures nécessaires et la définition des lignes directrices.

L'interprétation susmentionnée d'un membre est à l'opposé de l'exemple donné par M. Schins.

C'est en effet le ministre qui préside le collège lorsqu'il est question de compétences pour lesquelles il est le responsable final, par exemple les projets de lignes directrices de la politique criminelle (art. 143bis, § 5, deuxième et troisième alinéas, Code judiciaire). A-t-il, dans ces cas, voix consultative ou voix prépondérante au sein du collège, lequel statue par consensus ? Est-il associé ou non à cette procédure de prise de décision par consensus ? Quel rôle attribuet-on exactement au ministre dans cette matière ?

Le ministre répond que le ministre de la Justice ne fait pas partie du Collège des procureurs généraux dont la tâche est définie à l'article 143bis, § 2, proposé, du Code judiciaire. Il ne dispose dès lors pas d'une voix prépondérante au sein du collège, lequel statue par consensus, comme le prévoit le § 3 de ce même article.

Le ministre ne peut pas porter atteinte à la règle du consensus, même lorsqu'il assiste à la réunion et la préside. Ce n'est que lorsqu'aucun consensus ne peut être dégagé au sein du collège et que l'exécution des lignes directrices du ministre de la Justice en matière de politique criminelle est mise en péril qu'il prend les mesures nécessaires.

Il faut faire une distinction claire entre la réglementation visée à l'article 143bis du Code judiciaire et celle qui est définie à l'article 143ter du Code judiciaire.

Conformément à ce dernier article, le ministre consulte le collège à propos des projets de lignes directrices de la politique criminelle. Il lui appartient toutefois de prendre la décision finale, que le collège ait donné un avis positif ou un avis négatif.

La règle du consensus visée à l'article 143bis, § 3, du Code judiciaire ne concerne que les compétences attribuées au collège.

Pour éviter tout malentendu, un membre conseille de prévoir, à l'article 143bis, § 5, proposé, du Code judiciaire, que le ministre ne doit pas être associé au consensus lorsqu'il préside la réunion du collège.

Il y a des exemples d'une telle disposition aux articles 74 à 77 de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux institutions bruxelloises. En vertu de ces articles, le ministre-président du Gouvernement bruxellois préside le collège réuni avec voix consultative. L'on évite ainsi de rompre la parité entre les deux ministres néerlandophones et les deux ministres francophones. Le collège prend ses décisions collégialement selon la procédure du consensus, sans préjudice des délégations qu'il accorde.

Le ministre estime que le texte proposé n'est pas ambigu.

Conformément à l'article 143bis, § 1er , proposé, du Code judiciaire, les procureurs généraux près les cours d'appel forment ensemble le Collège des procureurs généraux. Ce collège statue par consensus. La disposition selon laquelle c'est le ministre de la Justice qui préside la réunion ne change rien à la règle du consensus. Le ministre ne peut donc pas rompre le consensus. Il n'en reste pas moins que le collège est placé sous son autorité.

En ce qui concerne les tâches spécifiques, qui, en vertu de l'article 143bis , § 5, quatrième alinéa, du Code judiciaire, peuvent être confiées aux membres du collège, une membre est d'avis que la charge de travail des cinq procureurs généraux est tellement lourde qu'ils n'auront pas la possibilité matérielle de se spécialiser dans la lutte contre certaines formes de criminalité, comme la traite des êtres humains, la drogue, les pratiques de blanchiment d'argent, etc.

Elle propose dès lors de confier ces tâches aux avocats généraux ou aux magistrats nationaux qui agiraient sous l'autorité du procureur général concerné. L'on pourrait éventuellement créer une structure à placer sous l'autorité du collège, qui leur fournirait le soutien scientifique nécessaire.

Le ministre déclare que l'article précité prévoit que chaque membre du collège est chargé d'une matière déterminé et prépare les décisions de politique. Les décisions définitives, elles, sont prises par le collège.

Pour remplir sa mission, le collège peut faire appel à un secrétariat permanent. Ce secrétariat comprendra des juristes qui se spécialiseront dans le traitement de formes spécifiques de criminalité et assisteront les procureurs généraux compétents. Il ne comprendra pas de personnel détaché au ministère public.

Conformément à l'article 143bis , § 4, proposé, du Code judiciaire, le collège peut, en outre, dans le cadre de l'exécution de ses missions, charger des membres du ministère public près les cours d'appel de fonctions de soutien, consistant, par exemple, à effectuer certaines missions d'étude, à assurer le suivi de problèmes particuliers (la maffia des hormones), etc.

L'on étend de la sorte le réseau du collège aux avocats généraux.

Le ministre déclare qu'il n'est pas favorable à la proposition visant à confier des tâches supplémentaires aux magistrats nationaux.

Ces derniers ont une mission opérationnelle spécifique, qui est définie par l'article 144bis , § 3, proposé, du Code judiciaire. Concrètement, cela veut dire qu'ils coordonnent l'exercice de l'action publique et qu'ils facilitent la coopération internationale, en concertation avec un ou plusieurs procureurs du Roi. Les magistrats nationaux prennent toutes les mesures urgentes qui sont nécessaires dans le cadre de l'exercice de l'action publique, aussi longtemps que la compétence d'un procureur du Roi n'est pas déterminée.

C'est pourquoi le ministre juge qu'il n'est pas opportun de confier de nouvelles missions générales à ces magistrats, car en le faisant on réduit leur rôle à celui d'assistant du collège des procureurs généraux.

Il défend la méthode de travail définie dans la loi en projet et dans le cadre de laquelle les avocats généraux peuvent être chargés du suivi de certaines formes de criminalité. Lorsqu'il y a lieu, dans certaines affaires, d'intervenir, ils peuvent faire appel aux magistrats nationaux qui prendront les mesures nécessaires.

Le ministre est d'avis que les tâches sont réparties de manière équilibrée entre le collège des procureurs généraux et les avocats généraux d'une part, et les magistrats nationaux, d'autre part.

Pour conclure, l'on souligne que, lorsque l'article 143bis , § 5, quatrième alinéa, proposé, du Code judiciaire permet de confier des tâches spécifiques aux procureurs généraux, ceux-ci sont compétents pour l'ensemble du territoire, tout en restant sous l'autorité du collège. Ils ne peuvent prendre aucune initiative sans l'autorisation de celui-ci. C'est le collège qui donne les directives nécessaires. Lorsque des mesures concrètes s'imposent dans des cas spécifiques, ils doivent faire appel aux magistrats nationaux.

En ce qui concerne les fonctions de soutien qui peuvent être confiées en vertu de l'article 143bis , § 4, proposé, du Code judiciaire, aux membres du ministère public près la cour d'appel, une membre souligne qu'il serait judicieux, pour garantir la transparence, d'intégrer ces avocats généraux dans une structure permanente. Elle envisage de déposer un amendement en ce sens.

Le ministre se dit hostile à une telle mesure.

La même membre désire savoir si le collège des procureurs généraux pourra déléguer des compétences aux avocats généraux. Le collège pourra-t-il, par exemple, autoriser un avocat général chargé de suivre une forme de criminalité donnée, de veiller à l'exécution des lignes directrices de la politique criminelle ?

Le ministre répond par la négative. Les avocats généraux préparent les décisions sous l'autorité du procureur général qui est territorialement compétent ou qui est chargé d'une matière déterminée. Le procureur général qui est compétent pour une matière déterminée ne peut transmettre ses compétences et sa responsabilité à un avocat général. Le pouvoir de décision appartient au collège des procureurs généraux.

Il y a encore un manque de précision en ce qui concerne la portée des articles 143bis , § 3, et 143ter , du Code judiciaire.

Le premier de ces deux articles dispose que le collège des procureurs généraux statue par consensus. Si aucun consensus ne peut être dégagé au sein du collège concernant les compétences visées au § 2, 1º et 2º et si l'exécution des lignes directrices du ministre de la Justice en matière de politique criminelle est ainsi mise en péril, le ministre de la Justice prend les mesures nécessaires.

Le deuxième dispose que le ministre de la Justice soumet à la discussion du collège des procureurs généraux les projets de lignes directrices de politique criminelle, en ce compris les lignes directrices en matière de politique de recherche et de poursuite. Il arrête les lignes directrices. Ces lignes directrices sont contraignantes pour tous les membres du ministère public. Les procureurs généraux près les cours d'appel veillent à l'exécution de ces lignes directrices au sein de leur ressort.

Le ministre accepte d'inscrire, à l'article 143bis , § 3, du Code judiciaire, le principe suivant lequel il y a lieu de prendre toutes les mesures nécessaires à l'exécution des directives.

Un autre membre aimerait savoir si, dans le cadre de la lutte contre l'arriéré judiciaire en matière pénale, l'on peut décréter par une ligne directrice que les affaires ne soient plus déférées aux juridictions de jugement ­ pour autant que la loi l'autorise ­ mais qu'on recoure à la conciliation et à la médiation pénale.

Le ministre répond que cette manière de faire s'inscrit parfaitement dans l'éventail des possibilités d'une politique criminelle.

L'on se demande si le ministre peut imposer sa volonté lorsque les parquets font fi des mesures qui ont été prises en exécution des lignes directrices arrêtées par lui, par exemple si une ligne directrice définit des modalités quant à l'application de la loi en ce qui concerne la détention de certains drogués.

Le ministre répond par l'affirmative. En effet, l'article 143ter proposé du Code judiciaire prévoit que les lignes directrices arrêtées par le ministre de la Justice sont contraignantes pour tous les membres du ministère public.

On lui rétorque que, lorsque le ministre de la Justice contraint le ministère public à appliquer, pour certains délits, la conciliation ou la médiation pénale, il modifie en fait la loi parce que sa décision empêche le parquet d'intenter l'action publique en vue de l'application des sanctions pénales.

Le ministre répond que l'on inaugure une ère nouvelle dans l'évolution de notre droit en accordant au ministre de la Justice le pouvoir d'aller, dans cette matière, au-delà de ce qui est admis actuellement, sur la base de sa responsabilité politique vis-à-vis du Parlement et en concertation avec le collège des procureurs généraux.

Deux limites ne sauraient toutefois être dépassées. Premièrement, le ministre ne peut pas modifier la loi (cf. l'art. 108 de la Constitution). Deuxièmement, il ne peut pas intervenir dans les dossiers individuels. Il ne dispose donc pas d'un droit d'injonction négative.

À la lumière de ce qui précède, un membre aimerait sav oir si une politique de tolérance a sa place ou non à l'intérieur des limites précitées. Il cite l'exemple du ministère public auquel on demande, pour certains délits, de ne pas engager de poursuites.

Le ministre se demande si la personne qui contesterait, devant le tribunal, la politique de tolérance en matière de casinos n'obtiendrait pas gain de cause. Le ministre se trouverait dans une position vulnérable si ladite politique était mise à mal.

En ce qui concerne la hiérarchie des textes de loi et des lignes directrices, un membre est tenté ­ afin de préciser la nouvelle ligne adoptée ­ par la suggestion de compléter les articles 398, 399 et 400 du Code judiciaire par une disposition du style « sans préjudice des dispositions des articles 143bis et 143ter ». L'on indique ainsi que ces deux articles continuent à s'appliquer dans les situations visées aux articles 398 à 400 du Code judiciaire.

À ce jour, ces articles constituent le fondement de la théorie de la hiérarchie des cours et tribunaux, ainsi que de l'autorité et de la surveillance du ministre de la Justice sur les membres du ministère public.

Le ministre souligne que, conformément à l'article 399, deuxième alinéa, du Code judiciaire, le procureur général, le procureur du Roi et les auditeurs du travail veillent, sous l'autorité du ministre de la Justice, au maintien de la discipline, à la régularité du service et à l'exécution des lois et des règlements dans les tribunaux.

Un membre attire l'attention sur le fait que, si l'on discute de la nécessité de compléter les articles 398 à 400 du Code judiciaire, c'est parce que l'on fait de ces articles une lecture qui ne correspond pas à leur contenu.

D'après une autre membre, toute la discussion porte sur la question de savoir quelle est la distinction entre les termes « lignes directrices » et « instructions ». Suivant le communiqué de presse distribué après le Conseil des ministres, le ministre de la Justice pourrait, dans le cadre de sa responsabilité politique et après concertation avec le collège des procureurs généraux, donner des instructions, par exemple l'instruction de retirer le permis de conduire en cas de certaines infractions au Code de la route. Ces instructions seraient contraignantes pour tous les membres du ministère public.

Eu égard à leur caractère contraignant, il est absurde, d'après l'intervenante, d'utiliser les termes « lignes directrices ».

C'est uniquement parce que les procureurs généraux peuvent exiger l'application de ces instructions que le ministre de la Justice peut être tenu pour politiquement responsable de sa politique criminelle devant le Parlement.

Il ressort de l'exposé de M. Schins, procureur général près la Cour d'appel de Gand, que l'application des instruments légaux est déficiente, non pas tant en raison de la qualité de ceux-ci que parce que certains domaines n'ont pas de responsable final.

C'est pourquoi la responsabilité finale doit incomber au ministre de la Justice, ce que permet l'article 143ter proposé du Code judiciaire. Le ministre peut, sur la base de cet article, exiger que ses instructions soient mises en oeuvre.

C'est à dessein que l'intervenante utilise le terme « instructions », parce qu'une ligne directrice définit un cadre général à l'intérieur duquel les membres du ministère public conservent leur liberté d'action. Cela ne cadre pas avec l'économie du projet.

Si le Parlement arrête les fondements d'une politique criminelle, il appartiendra au ministre de la Justice, en tant que membre du pouvoir exécutif, d'appliquer cette politique. L'article 143ter proposé du Code judiciaire lui fournit l'instrument approprié pour ce faire et constitue en même temps le fondement juridique de sa responsabilité politique à l'égard du Parlement.

Obliger le ministre à se concerter avec le collège des procureurs généraux sur les projets de lignes directrices de la politique criminelle vise à établir une interaction entre les opinions professées au Parlement et les idées ayant cours sur le terrain.

Si l'on proposait au Parlement de retirer le permis de conduire à toutes les personnes qui se sont rendues coupables d'une infraction routière donnée, on pourrait faire valoir, dans le cadre de la concertation avec le ministre de la Justice, qu'une telle mesure va trop loin, par exemple, parce qu'elle frappe sans distinction toutes les personnes, y compris celles qui ont impérativement besoin de leur voiture pour leur profession. Cette confrontation avec le terrain peut déboucher sur une situation de non-consensus entre le ministre et le collège des procureurs généraux.

On donnerait ainsi un signal comme quoi il doit informer le Parlement des objections formulées à l'encontre de la politique envisagée. Cet échange garantit l'élaboration d'instruments légaux de qualité, applicables et contrôlables.

Le ministre répond que cette vision des choses va dans le sens qu'il souhaite.

Concernant la question de savoir s'il faut préférer le terme « instruction » au terme « directive », il rappelle qu'il a déjà accepté de remplacer, dans le texte français, la notion de « ligne directrice » par le mot « directive ». C'était déjà un durcissement. Faut-il aller plus loin ?

Selon le ministre, une instruction revêt un caractère plus direct et plus concret qu'une directive. Une instruction se rapproche déjà d'un ordre.

Il ne cache pas que la portée du terme directive est déterminée principalement par la signification qu'elle a en droit européen.

Conformément à l'article 189 du traité instituant les Communautés européennes, conclu à Rome le 25 mars 1957, une directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens.

Une directive implique donc que l'on laisse aux responsables une marge d'appréciation pour son exécution. Il s'ensuit que le ministre de la Justice n'est pas obligé d'élaborer chaque mesure jusque dans les moindres détails.

Le ministre juge cette méthode de travail beaucoup plus adéquate. Il appartient au ministre de la Justice de définir l'objectif final et les limites dans lesquelles les membres du ministère public évalueront quelles sont les mesures nécessaires pour atteindre cet objectif.

Il ne faut, en outre, pas perdre de vue que le ministre de la Justice a d'autres moyens à sa disposition pour imposer son autorité et prendre la direction des opérations. Il peut faire usage de son droit d'injonction positive (article 143 du Code judiciaire et article 274 du Code d'instruction criminelle), il peut convoquer quelqu'un, il peut engager une procédure disciplinaire, etc. Le ministre dispose donc de tout un éventail de mesures qui lui permettent de réagir beaucoup plus vite aux événements.

Il souligne enfin que toute directive qui règlera la politique criminelle sera toujours confrontée aux dossiers individuels. Si le ministre donne trop d'instructions, il risque de donner l'impression qu'il s'immisce dans ces dossiers, ce qui n'est évidemment pas le but. C'est pourquoi il préfère au système rigide des instructions celui des directives définissant le cadre dans lequel un objectif bien délimité doit être atteint.

Un membre désire savoir si l'hypothèse suivante peut être considérée comme illustrant bien la vision du ministre.

Le ministre de la Justice émet une directive visant, pour certains délits, à appliquer des peines alternatives. Comme il s'agit d'une directive, le parquet dispose d'une marge d'appréciation lui permettant, dans certains cas, de poursuivre malgré tout en vue de faire appliquer une peine privative de liberté. Si toutefois le procureur général autorisait toujours les membres du parquet à intenter l'action publique et à refuser systématiquement de proposer une transaction ou une médiation pénale, lui comme les membres du parquet saperaient manifestement la directive. Dans cette hypothèse, le ministre pourra difficilement exercer son droit d'injonction positive dans chaque cas. Faut-il en conclure qu'il devra appliquer une politique disciplinaire pour faire respecter par les membres de ce parquet les lignes directrices qu'il a définies ?

L'intervenant rappelle qu'en vertu de l'article 138, premier alinéa, du Code judiciaire, sous réserve des dispositions de l'article 141, le ministère public exerce l'action publique selon les modalités déterminées par la loi.

Or, le présent projet de loi définit précisément ces modalités.

Le ministre clôt la discussion en énumérant les quatre points du projet de loi qui pourraient être modifiés :

1. L'article 143bis, § 3, du Code judiciaire proposé, peut être complété par une disposition qui en précise la finalité.

2. Dans le texte français, les mots « lignes directrices » sont remplacés par le mot « directives ».

3. On examinera si, au vu des articles 143bis et 143ter proposés du Code judiciaire, il y a lieu de modifier les articles 398 à 400 du Code judiciaire.

4. Les mots « magistrats fédéraux » peuvent être remplacés par les mots « magistrats nationaux ».

Un membre signale que, conformément à une observation du Conseil d'État, il y a lieu de remplacer, dans le texte français de l'article 144bis, § 3, 2º, du Code judiciaire, par analogie à la modification apportée au texte néerlandais, les mots « dans le cadre de » par les mots « en vue de ».

Il faudrait également indiquer, dans le texte néerlandais de l'article 186 du Code judiciaire proposé, que le siège du collège des procureurs généraux et des magistrats nationaux est fixé, non pas « in Brussel » mais « te Brussel ».

L'intervenant souligne qu'il s'agit en l'occurrence de la ville de Bruxelles et non la Région de Bruxelles-Capitale.

Il propose par ailleurs de prévoir, à l'article 11, que le nombre des magistrats nationaux peut être porté jusqu'à 5 maximum. On n'est donc pas obliger de porter directement leur nombre de 3 à 5.

Le ministre approuve cette suggestion.

Le préopinant formule également des réserves à propos des conditions à remplir pour pouvoir être désigné à la fonction de magistrat national. Selon l'article 144bis , § 2, proposé du Code judiciaire, les candidats doivent être membres du ministère public auprès des cours d'appel et des tribunaux de première instance et avoir exercé des fonctions de magistrat du ministère public ou du juge pendant au moins cinq ans.

Pour commencer, il ne comprend pas pourquoi les candidats doivent avoir exercé la fonction de juge pendant cinq ans. Cette condition implique que les juges des tribunaux de commerce, qui n'ont aucune expérience en matière pénale, peuvent également entrer en ligne de compte.

Le ministre partage l'avis du membre selon lequel il ne faut prendre en considération que les candidats qui disposent d'une expérience opérationnelle, comme les juges d'instruction. Il faudrait dès lors remplacer le mot « juge » par les mots « juge d'instruction ».

Deuxièmement, d'aucuns ont suggéré de ne requérir qu'une expérience professionnelle de trois ans.

Cette suggestion n'est pas appuyée par plusieurs membres ni par la ministre.

Troisièmement, il y aurait lieu, pour assurer la concordance avec d'autres articles du Code judiciaire, de remplacer les mots « les membres du ministère public/de leden van het openbaar ministerie » par les mots « les magistrats du ministère public/de magistaten van het openbaar ministerie ».

En ce qui concerne le rôle linguistique des magistrats nationaux, un autre membre estime qu'il y a lieu de modifier la deuxième phrase de l'article 43bis , § 4, premier alinéa, de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, proposé à l'article 12.

En effet, selon la disposition qu'elle renferme, un magistrat national au moins doit justifier par son diplôme avoir subi des examens du doctorat ou de licencié en droit en langue française et un magistrat national au moins doit justifier par son diplôme avoir subi ces examens en langue néerlandaise.

Cette proportionnalité n'est acceptable que lorsqu'il n'y a que trois magistrats nationaux. Dès le moment où l'on porte leur nombre à cinq, il faut que deux d'entre eux au moins appartiennent au rôle francophone et deux autres au rôle néerlandophone.

Plusieurs membres jugent cette remarque pertinente.

Un membre propose d'inclure, dans les compétences du collège des procureurs généraux, définies à l'article 143bis , § 2, du Code judiciaire, la coordination des services de police et le contrôle sur le Service général d'appui policier.

Le ministre déclare que ces deux tâches sont incluses dans les compétences attribuées au collège par l'article précité, pour autant qu'il s'agit de l'exécution de la politique criminelle. Pour le S.G.A.P., le collège ne paraît pas, selon le ministre, être l'autorité indiquée.

Si l'on ajoutait ici deux points spécifiques, toutes les compétences seraient énumérées point par point. Cela mènerait trop loin, avec le risque de perdre de vue certains éléments.

III. DISCUSSION DES ARTICLES

Intitulé

Le Gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 10), libellé comme suit :

« Dans l'intitulé du projet de loi, remplacer les mots « magistrat fédéral » par les mots « magistrat national ».

Remplacer l'intitulé du chapitre III par l'intitulé suivant : « Le magistrat national ».

Dans les articles 4 et 6 à 11 du projet, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux ».

À l'article 12 du projet, remplacer les mots « magistrat fédéral » par les mots « magistrat national ».

Justification

Dans la mesure où la qualification de « fédéral » attribuée aux magistrats visés ne reflète pas de façon fidèle l'organisation judiciaire en droit belge, il est préférable de conserver l'appellation actuelle de « magistrats nationaux » qui est plus conforme.

Le ministre précise que l'on remplace, dans l'intitulé, ainsi qu'à d'autres endroits du texte proposé (art. 4, 6 à 11, 12 et intitulé du chapitre III), les mots « fédéral » par « national », étant donné que « fédéral » s'oppose à « régional ».

Le Gouvernement dépose encore d'autres amendements aux articles 4, 6 à 11 et 12 (cf. infra , doc. Sénat, nº 1-447/2 - amendements nºs 34 à 42, et doc. Sénat, nº 1-447/3 - amendement nº 55).

L'amendement et l'intitulé ainsi modifiés sont adoptés à l'unanimité des 9 membres présents.

Article premier

Cet article ne fait l'objet ni d'amendements ni d'observations.

Il est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.

Article 2

Article 143bis , § 1er

Un membre se pose des questions quant à l'emploi du terme « membres » du ministère public, alors que le Code judiciaire emploie le terme « magistrats » du ministère public. Ne vaut-il dès lors pas mieux suivre la terminologie usitée dans le Code judiciaire ?

D'après un autre membre, l'on ne peut considérer cette modification comme une pure correction de forme puisque l'on mène actuellement une discussion importante relative au statut du ministère public, dans laquelle les termes de « magistrats » et de « membres » du ministère public ont valeur de symbole.

Si cet article venait malgré tout à être modifié, l'intervenant estime que tous les autres articles devraient également l'être dans ce sens.

Le ministre souligne que l'on vise, à cet article, un éventail aussi large que possible (par exemple, les stagiaires). Aussi propose-t-il de maintenir le texte initial.

La Commission se rallie à ce point de vue.

Aucun amendement n'est déposé à ce paragraphe.

L'article 143bis , § 1er , est dès lors adopté à l'unanimité des 9 membres présents.

Article 143bis , §§ 2 et 3

Le Gouvernement dépose des amendements (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendements nºs 8 et 9), libellés comme suit :

« Au § 3 de l'article 143bis proposé et à l'article 143ter proposé, remplacer dans le texte français les mots « lignes directrices » par le mot « directives ».

Justification

L'amendement vise à assurer la conformité entre le texte français et le texte néerlandais. Le texte néerlandais contient le terme « richtlijnen », qui est traduit adéquatement par le mot « directives ». Les termes « lignes directrices » donnent à tort une connotation plus vague et moins contraignante à l'instrument visé.

Amendement nº 9 :

« Compléter le § 3 de l'article 143bis proposé par les mots suivants :

« pour assurer l'application de ses directives. »

Justification

L'ajout proposé vise à préciser la portée des mesures nécessaires que le ministre de la Justice peut prendre en cas d'absence de consensus au sein du collège, en indiquant la finalité de telles mesures, qui est l'application des directives du ministre. Toutes les mesures nécessaires à la réalisation de ce but pourront être prises par le ministre conformément à cette disposition.

M. Vandenberghe et consorts déposent un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 3), libellé comme suit :

« Compléter le § 3 de l'article 143bis proposé du Code judiciaire par les mots « pour assurer l'application des lignes directrices. »

Justification

Cet amendement traduit la finalité des « mesures nécessaires » à prendre par le ministre de la Justice. Il précise que le ministre peut, s'il y a lieu, prendre toutes les mesures nécessaires en exécution des lignes directrices arrêtées par lui.

Un membre demande des explications quant à l'utilisation du mot « général » à l'article 143bis , § 2, 2º. Pourquoi ne pas simplement laisser « bon fonctionnement ».

Le ministre précise qu'il est utile de garder ce mot, vu qu'il indique la différence entre le fonctionnement dans tout le pays et le fonctionnement dans un ressort.

Un autre membre envisage de déposer un amendement qui précise que le collège doit également coordonner le travail effectué par les différents services de police et notamment contrôler le bon fonctionnement du Service général d'appui policier.

Un membre estime qu'il serait également utile de préciser la mission du collège d'exercer la direction juridique sur la police judiciaire. Si le collège coordonne et développe la politique criminelle, ne doit-il pas avoir une autorité sur les différents corps de police exerçant une fonction de police judiciaire ?

Un autre membre estime que les deux préopinants ont souligné un point extrêmement important, mais il ne peut se rallier à la suggestion de confier la direction des services de police aux procureurs généraux. Comment va-t-on définir les termes « direction juridique » en ce qui concerne les services de police ? L'intervenant estime qu'il est impossible de le faire.

Il est cependant convaincu de la nécessité de réformer le ministère public en fonction de la restructuration des services de police. Il est vrai que les services de police doivent être réformés, mais cela ne doit pas se faire, selon l'intervenant, dans le cadre de la présente discussion et certainement pas de la façon proposée par la préopinante.

Un autre membre partage le point de vue de l'intervenant précédent. Il faut veiller à restructurer les rapports existants, mais l'intervenant ne souhaite pas glisser dans un système où la responsabilité politique de la direction des services de police par les procureurs généraux incomberait au ministre.

En ce qui concerne le texte de l'article proposé, l'intervenant estime que celui-ci présente une lacune parce qu'il ne mentionne pas la coordination entre les différents parquets.

Il pense ensuite pouvoir donner l'interprétation suivante des termes « bon fonctionnement général » : le collège peut obliger les parquets ou les parquets généraux à charger certains magistrats d'une tâche spécifique, mais ne peut par exemple pas déterminer le nombre de ces magistrats. C'est là que signifient, selon l'intervenant, les termes « fonctionnement général ».

Il souligne une fois de plus qu'il faudrait insérer dans la loi la notion de la coordination entre les différents parquets, ce qui confirmerait également l'autorité du collège sur les membres du ministère public. À cet égard, MM. Erdman et Coveliers déposent un amendement (Doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 17), libellé comme suit :

« Au § 2, 2º, de l'article 143bis proposé, insérer, entre les mots « fonctionnement général » et les mots « du ministère public », les mots « et d'une coordination ».

En ce qui concerne les premières remarques, le ministre estime qu'il serait erroné d'insérer, dans le texte relatif au collège des procureurs généraux, des règles relatives à la structure ayant autorité sur les services de police. Ce problème est réglé et doit être suivi ailleurs (loi sur la fonction de police, loi sur la gendarmerie, loi sur la police judiciaire).

Il convient en effet de faire toute la clarté dans ce débat, mais le projet à l'examen ne constitue pas, d'après le ministre, l'endroit idéal du point de vue de la technique législative. En outre, il n'est aucunement convaincu du fait que le collège des procureurs généraux constituerait l'organe indiqué pour diriger les services de police.

Les relations qui existent entre le ministère public et les services de police sont toutefois fondamentales et l'on peut préciser ce partenariat dans le cadre du projet à l'examen. Font partie de la politique criminelle le rôle que doit jouer le ministère public et la façon dont il collabore avec les services de police.

À propos de la remarque concernant les précisions à fournir au sujet de la coordination entre les différents parquets, le ministre estime que celle-ci est déjà contenue dans la notion de « fonctionnement général ».

Un membre admet qu'il y a de grands risques à définir la collaboration entre les services de police et le ministère public. Il devra en tout cas ressortir de l'amendement qui sera éventuellement déposé qu'il s'agit d'une collaboration et que l'on ne peut en déduire un lien hiérarchique.

Le ministre insiste sur le fait qu'il faut préciser qu'il s'agit d'une coordination des « missions judiciaires » des services de police. Il ne s'agit pas de guider les services de police en général, mais bien leurs missions judiciaires.

Le membre demande s'il ne serait pas utile d'ajouter au § 2 un 4º et d'ajouter une mission d'organiser les modalités de collaboration entre le ministère public et les services de police en ce qui concerne l'exercice de la fonction de police judiciaire.

Suite à cette discussion, un membre suggère le texte suivant conformément à l'idée du Gouvernement :

« 2º de prendre les mesures utiles en vue d'une bonne coordination des mesures judiciaires des services de police et d'un bon fonctionnement ... »

Un sénateur souhaite que l'on clarifie les choses; les missions de la police judiciaire englobent-elles ou non la politique de recherche proactive ? Dans l'affirmative, le collège peut-il arrêter à ce propos des directives contraignantes, en particulier pour les services de police ? L'intervenant estime qu'il convient de prendre position à cet égard.

Un commissaire se demande s'il y a vraiment lieu de régler les rapports entre le collège des procureurs généraux et les services de police dans le cadre du projet en discussion, et ce en dehors de toute concertation et en l'absence de toute analyse des diverses constructions. En effet, on parle, en l'espèce, de la coordination de services qui possèdent tous des structures distinctes.

Le ministre déclare que c'est justement pour cette raison qu'il essaie d'éviter le terme « coordination ».

Un membre souligne qu'il est particulièrement dangereux de réglementer les rapports entre ces différents corps.

Le ministre fait observer qu'il ne demande pas que l'on modifie le texte existant. Il tient néanmoins à préciser, à la demande générale, que l'aspect criminel concerne, notamment, l'organisation de l'exécution de missions judiciaires, mais ajoute qu'il n'est pas partisan de la chose, quant à lui, parce qu'il part de la mission la plus générale, à savoir la politique criminelle.

À ses yeux, la recherche proactive constitue un élément des missions judiciaires.

Un commissaire signale que même l'interprétation la plus large laisse subsister des zones de problèmes; c'est ainsi que l'on ne dit rien de la relation entre les membres de la police qui participent à la recherche proactive, au contrôle de celle-ci, etc. Il craint de voir l'ensemble de la problématique se compliquer, précisément en raison de la mention fragmentaire de certaines choses.

C'est pourquoi il faut préciser, à son avis, de lege ferende que ces choses doivent encore être réglées par la loi.

Un membre rejoint cette position, qui démontre à quel point le projet en discussion est intimement lié à d'autres réformes et qu'il semble de par ce fait prématuré, étant qu'il devra être intégré dans l'ensemble.

Ceci explique le fait qu'elle est favorable à une formule générale. Suite à cela, Mmes Milquet et Delcourt-Pêtre déposeront un amendement (Doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 18), libellé comme suit :

« Au § 2, 2º, de l'article 143bis proposé, insérer les termes « en vue de superviser et de coordonner l'exercice des missions de police judiciaire des corps de police, et ... » entre les termes « mesures utiles » et les termes « en vue de. »

Justification

Il est indispensable d'exprimer l'importance du rôle du collège des procureurs généraux à l'égard des services de police.

Le ministre estime que le terme « superviser » est difficile à retenir, étant donné qu'il donne l'impression que le collège supervise les corps de police, alors qu'il faut un partenariat.

Mme Milquet précise que cette supervision n'opère que dans l'exercice des missions de police judiciaire.

Le ministre conclut qu'il faut également lire l'article 143ter, qui est plus explicite en mentionnant la politique de recherche et de poursuite, ce qui implique la collaboration avec les services de police. Il se pose donc la question s'il est vraiment utile de tout expliciter ici.

M. Erdman renvoie à son amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 17) et estime que celui-ci répond également à l'inquiétude exprimée dans l'amendement nº 18 de Mmes Milquet et Delcourt.

Il s'agit en effet d'un fonctionnement coordonné des parquets, qui dirigent la police judiciaire en tant que telle.

Un membre estime, en outre, que le texte de l'amendement nº 18 de Mmes Milquet et Delcourt entraîne une révision beaucoup plus poussée des structures existantes. Il faut dès lors prendre en considération le Code d'instruction criminelle, puisque celui-ci prévoit que le procureur du Roi exerce son autorité sur la police judiciaire et les fonctionnaires de police judiciaire. L'intervenant se dit, dès lors, partisan de la coordination plutôt que d'une définition fonctionnelle.

Plusieurs commissaires expriment en tout cas des réserves à propos de l'amendement de Mmes Milquet et Delcourt-Pêtre, à la lumière de la discussion des articles relatifs aux magistrats nationaux.

M. Desmedt demande ensuite une précision concernant les mots « auprès des cours et tribunaux ».

S'agit-il uniquement d'une formule de style ou visent-ils uniquement le travail du ministère public dans une affaire évoquée devant les cours et tribunaux, ce qui constitue une restriction.

Le ministre précise qu'il s'agit d'une formule de style et qu'il s'agit du ministère public sur les différents niveaux.

Afin d'éviter toute confusion, et la spécification étant de nature à réduire le rôle du collège, M. Desmedt dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 19).

« Au § 2, 2º, de l'article 143bis proposé, supprimer les mots « auprès des cours et tribunaux ».

Un membre demande une définition du mot « consensus » au § 3 de l'article 143bis proposé.

Le ministre répond qu'au sens du projet en discussion, le consensus signifie que le collège agit vis-à-vis de l'extérieur en adoptant un point de vue déterminé. Il faut qu'il y ait un point du vue commun, sans quoi il n'y a pas de point de vue du tout.

Il y a consensus, au sens de l'article 143bis , § 3 du présent projet, chaque fois qu'une proposition de décision soumise au collège est adoptée sans qu'une opposition ne soit exprimée par un ou plusieurs des membres. Il y a consensus non seulement dans le cas où il y a un accord unanime, éventuellement tacite, ou abstention de la part d'un ou plusieurs membres, mais également lorsque un ou plusieurs membres du collège qui sont, à titre personnel, en désaccord avec la proposition de décision, choisissent néanmoins de ne pas s'y opposer en prenant en compte d'autres éléments d'appréciation (tels que la nécessité d'une décision rapide par rapport à des circonstances déterminées, l'intérêt du collège ou du ministère public en général).

Un autre membre en déduit que l'on exige pas simplement des procureurs généraux qu'ils soient démocrates; ils doivent s'exprimer en toute unanimité vis-à-vis de l'extérieur. À défaut de consensus, il n'y a en effet pas de décision.

Il constate en second lieu que cette règle du consensus ne vaut que pour le § 2, 1º et 2º. Elle n'est donc pas applicable lorsqu'il s'agit d'informer le ministre et de lui donner avis, d'initiative ou à sa demande. Lorsque le ministre pose une question au collège, la réponse de celui-ci ne doit pas nécessairement faire l'objet d'un consensus.

Le ministre estime que le principe général veut que le collège respecte la règle du consensus, mais qu'il ne peut faire usage de ses possibilités d'action que pour les points 1 et 2. S'il y a des opinions divergentes concernant le point 3, concernant les avis, le ministre en prend acte, mais cela n'influence pas ses possibilités d'action.

Selon un commissaire, le collège doit décider en principe par consensus, mais, à défaut de consensus, le ministre peut poser sa question à un procureur général individuel, conformément au point 3.

Un autre membre rejoint cette opinion et estime que l'avis, mentionné au point 3, ne doit pas nécessairement être unanime. Plusieurs avis sont possibles.

Le ministre confirme cette possibilité, mais attire l'attention sur le fait que la valeur sera différente lorsqu'il s'agit d'un avis unanime ou non.

M. Erdman dépose ensuite un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 21) rédigé comme suit :

« A. Supprimer le 3º du § 2 de l'article 143bis proposé.

B. Compléter le même paragraphe par un deuxième alinéa, libellé comme suit :

« Le collège des procureurs généraux est également chargé d'informer le ministre de la Justice et de lui donner avis, d'initiative ou à sa demande, sur toute question en rapport avec les missions du ministère public. »

Le membre déduit de la discussion que l'idée du consensus est différente de l'accord ou de l'unanimité, puisque des personnes peuvent marquer des réserves ou s'abstenir, à condition qu'elles considèrent que leur abstention n'est pas de nature à empêcher le collège de formuler une décision.

Un autre membre demande ce qui se passe si trois personnes s'abstiennent.

Un membre évoque une difficulté supplémentaire, à savoir la possibilité que le consensus se fasse sur une finalité opposée à celle des directives voulues par le ministre.

S'il y a consensus, en effet, le ministre ne pourrait pas intervenir alors que consensus n'implique pas décision unanime et que, à la limite, ce consensus pourrait être une décision minoritaire, à défaut d'opposition de la majorité. Ne faut-il pas prévoir dès lors que le ministre puisse intervenir en l'occurrence, vu que le respect de la décision est compromis ?

En outre, la décision prise par consensus serait contraignante.

Selon le ministre, une phase conflictuelle est effectivement possible, mais cela fait partie de l'essence même d'un système basé sur l'équilibre par le contrôle mutuel (checks and balances) .

S'il n'y a pas de consensus, il ne peut y avoir de décision et le ministre peut prendre des mesures.

Pour les informations et les avis, le consensus n'est pas nécessaire.

Un membre attire l'attention sur le fait que le recours au consensus affaiblit d'une certaine façon les pouvoirs du ministre.

En effet, si l'on exige l'unanimité, il y aurait plus facilement dissensus, d'où possibilité pour le ministre de prendre des mesures.

Que se passe-t-il lorsque le ministre de la Justice n'est pas d'accord avec le consensus dégagé par le collège des procureurs généraux sur la politique de coordination et de bon fonctionnement des services de police ?

Le ministre estime qu'il est important de donner au collège la responsabilité de chercher le consensus. Si ce consensus mène à une divergence entre le ministre et le collège, le ministre a les possibilités offertes par l'article 143ter (aller plus loin dans les directives) et si l'opposition persiste, le litige sera soumis au Parlement.

Un membre souligne le caractère imprécis et l'incohérence du point de vue législatif. Comment le Parlement va-t-il intervenir ?

Le ministre précise qu'il faudra alors avoir recours à la création d'une loi.

Il précise également qu'il s'agit uniquement de l'exécution des directives, et que la définition de la politique générale est de sa compétence.

Le même membre pose la question précise de savoir ce que le ministre pourrait faire exactement en cas de consensus qui ne lui convient pas; peut-il redéfinir la politique générale, la préciser, et par conséquent courtcircuiter la décision du collège des procureurs généraux en imposant une autre manière d'exécution de cette politique.

Selon le ministre, il s'agirait d'une injonction positive et cette injonction est possible.

Un autre membre s'interroge sur la possibilité d'une injonction négative. Le risque existe surtout là où le ministre ne veut pas de poursuites.

Selon le ministre, ce n'est pas un problème et au niveau de l'exécution, la finalité doit être respectée.

Dans cette optique, M. Erdman dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-477/2, amendement nº 22), rédigé comme suit :

« Au § 2, 1º, de l'article 143bis proposé, remplacer les mots « telle qu'elle est visée à l'article 143ter » par les mots « telle qu'elle est définie dans les lignes directrices visées à l'article 143ter et dans le respect de leur finalité. »

M. Desmedt dépose un autre amendement (doc. Sénat, nº 1-477/2, amendement nº 23) :

« Dans le texte français du § 2, 1º, de l'article 143bis proposé, remplacer les mots « du développement cohérent » par les mots « de la cohérence de la mise en oeuvre. »

Un membre souhaite revenir sur un point déjà soulevé. Ne faudra-t-il pas que les avis des différents procureurs généraux soient recueillis, et explicités s'il n'y a pas de consensus à leur sujet ?

Le ministre renvoie à l'amendement nº 21 de M. Erdman, qui résout partiellement le problème, en prévoyant une autre division du paragraphe.

Un membre propose de prendre pour exemple le système du Conseil économique, qui reflète les différents avis sans que l'on ait à compter les voix.

Un autre membre estime qu'il serait plus clair d'intégrer la procédure d'avis au § 3.

La commission conclut qu'une restructuration du texte doit être faite.

MM. Hotyat et Erdman déposent un amendement en ce sens (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 24) :

« A) Remplacer les §§ 2 et 3 de l'article 143bis proposé par ce qui suit :

« § 2. Le collège des procureurs généraux décide, par consensus, de toutes les mesures utiles en vue :

1º de la mise en oeuvre cohérente et de la coordination de la politique criminelle déterminée par les directives visées à l'article 143ter, et dans le respect de leur finalité.

2º du bon fonctionnement général et de la coordination du ministère public.

Si aucun consensus ne peut être dégagé au sein du collège, et si l'exécution des directives du ministre relatives à la politique criminelle est ainsi mise en péril, le ministre de la Justice prend les mesures nécessaires pour assurer leur application.

§ 3. Le collège des procureurs généraux est en outre chargé d'informer le ministre de la Justice et de lui donner avis, d'initiative ou à sa demande, sur toute question en rapport avec les missions du ministère public.

À défaut de consensus, les avis expriment les différentes opinions exposées au sein du collège. »

B) Au § 5, alinéa 2, de l'article 143bis proposé, supprimer les références « 1º et 2º »

C) À l'article 143bis proposé, remplacer l'alinéa 4 du § 5 par ce qui suit :

« Pour l'exercice des compétences du collège, et après concertation avec celui-ci, le Roi peut confier à chacun de ses membres des tâches spécifiques. »

Justification

A) Il importe de distinguer entre les missions du collège qui doivent faire l'objet d'une décision consensuelle contraignante, et la mission d'information, qui ne peut être paralysée par l'absence de consensus.

Dès lors, en cas de points de vue divergents entre les procureurs généraux dans l'exercice de leur mission d'information, les avis communiqués au ministre doivent refléter l'ensemble des opinions exprimées au sein du collège.

B) et C) Le § 5 de l'article 143bis est adapté aux modifications effectuées aux §§ 2 et 3.

Un membre demande s'il y a une différence entre la coordination et la mise en oeuvre cohérente de la politique criminelle.

M. Erdman précise que la cohérence est globale tandis que la coordination vise les actions individuelles des parquets.

Ensuite, un membre fait remarquer qu'au § 2, 2º, les mots « l'exécution de la politique criminelle » sont remplacés par les mots « l'exécution des directives du ministre relatives à la politique criminelle ».

Le ministre est d'accord avec cette modification, vu que la formulation proposée « directives du ministre » est plus concrète que la notion « politique criminelle ».

Vote sur l'article 143bis, § 2

Les amendements nºs 17, 21, 22 et 23 de M. Erdman (doc. Sénat, nº 1-447/2) sont retirés au bénéfice de l'amendement nº 24A de MM. Hotyat et Erdman.

L'amendement nº 18 de Mmes Milquet et Delcourt-Pêtre est rejeté par 9 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 24A de MM. Hotyat et Erdman et l'amendement nº 19 de M. Desmedt sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

Article 143bis, § 3

L'amendement nº 24A de MM. Hotyat et Erdman (doc. Sénat, nº 1-447/2), adopté, tient compte des amendements nºs 8, 9 et 3, qui deviennent ainsi sans objet (cf. supra, art. 2, art. 143bis, § 2).

Le § 3 ainsi amendé est adopté par 9 voix et 1 abstention.

Article 143bis, § 4

Un membre souhaite savoir ce que le ministre entend par fonctions de soutien.

Le ministre précise qu'il s'agit, en l'espèce, de missions de soutien de la politique à mener, de préparation de la politique (cf. le magistrat coordinateur, qui est supprimé), comme celles qui concernent l'analyse des phénomènes. Il ne s'agit donc pas d'activités opérationelles, pour lesquelles l'on fait appel aux magistrats nationaux.

Un autre membre signale que, lors de la première lecture, il a eu du mal à cerner la relation entre ces magistrats ad hoc désignés et les magistrats nationaux.

Ne vaudrait-il pas mieux dès lors de prévoir explicitement dans la loi que les magistrats nationaux accomplissent les activités opérationnelles et de renvoyer à l'article 144bis ?

Le ministre attire l'attention sur le fait que le collège constitue le lien entre eux et que c'est le collège qui attribue les missions.

Un membre rappelle que le mot « soutien » est une notion très ambiguë, et préférerait l'utilisation du mot « assistance ».

Un membre estime qu'il est souhaitable d'insérer le terme « beleidsondersteunend » dans le texte néerlandais.

Un autre membre renvoie aux observations du Conseil d'État (doc. Sénat, nº 1-447/1, p. 26), selon lesquelles il convient d'instaurer une réglementation légale, étant donné que l'on charge les magistrats concernés de missions à mener en dehors de leur arrondissement; il retient également que la fonction de magistrat coordinateur est supprimée.

Selon lui, le terme « missions » qui figure dans le premier membre de phrase du § 4 suffit, puisqu'il inclut toutes les missions s'inscrivant dans le cadre des missions du collège.

L'aspect fonctionnel est, en effet, réglé par les magistrats nationaux.

M. Lallemand dépose donc un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 27), rédigé comme suit :

« Remplacer le § 4 de l'article 143bis proposé par ce qui suit :

« § 4. Pour l'exécution de ses missions, le collège peut requérir l'aide de membres du ministère public près les cours d'appel. »

Un membre retient de la discussion générale que ces missions sont réservées aux membres du parquet général. Qu'en est-il si le collège désigne un membre dont le procureur général, soit le chef de corps, ne peut pas se passer ?

D'après un autre membre, ce problème se pose moins souvent, puisque le procureur général en question siège au collège et est donc présent lorsque l'on prend la décision de désigner quelqu'un; cette décision sera prise en concertation.

Un membre veut savoir si les personnes désignées aident le procureur général de façon compartimentée ou si elles constituent plutôt un pool général d'aide permanente. Il lui semble logique que ces personnes soient détachées en travaillant dans une structure permanente, qui, à son avis, est indispensable (voir infra, amendement déposé à ce sujet, doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 25).

Un autre membre se rallie à cette observation et se demande s'il faut encore, au niveau de la cour d'appel, organiser le ministère public de façon territoriale ou de façon fonctionnelle. L'intervenant estime que le projet à l'examen offre une solution intermédiaire, avec tous les désavantages qui en découlent.

Le ministre rappelle que le fait de ne mentionner que les membres du parquet général fut un choix délibéré (cf. supra, discussion générale).

Le même membre demande si le collège peut également désigner des membres du ministère public près la Cour de cassation.

Le ministre répond par la négative et répète qu'il s'agit d'un choix délibéré.

Mme Milquet dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/5, amendement nº 42).

« Compléter le § 2 de l'article 143bis proposé par ce qui suit :

« et les détacher auprès du secrétariat visé à l'article 185 du présent Code. »

Justification

Il est indispensable de prévoir le détachement des personnes visées auprès d'un secrétariat permanent.

Vote sur l'article 143bis, § 4

L'amendement nº 48 de Mme Milquet est rejeté par 8 voix et 2 abstentions.

L'amendement nº 27 de M. Lallemand et l'article 143bis , § 4, ainsi amendé, sont adoptés par 9 voix et 1 abstention.

Article 143bis, § 5

Il convient de renvoyer à l'amendement nº 24 précité de MM. Hotyat et Erdman (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 24, points B et C).

Le point B fait suite aux modifications proposées à l'article 143bis, § 2, proposé (point A de ce même amendement).

Le point C vise à reformuler le § 5.

Cet amendement ne suscite pas d'autres observations.

M. Hotyat dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 20) :

« À l'article 143bis, § 5, alinéa 2, insérer les mots « avec voix consultative » entre les mots « assiste » et les mots « aux réunions du collège. »

Justification

Il importe d'éviter toute ambiguïté sur les rapports entre le ministre de la Justice et le collège des procureurs généraux, ainsi que sur sa présence aux réunions du collège.

L'auteur de cet amendement précise qu'il veut éviter toute confusion. Le ministre préside le collège, participe, mais n'est pas membre du collège.

Un membre se demande si cette précision ne risque pas d'affaiblir la position du ministre.

La commission estime qu'il est en effet préférable de ne pas préciser dans le texte que le ministre ne fait pas partie du collège.

Un membre demande quelle est la portée des termes « durant l'année judiciaire ».

L'année judiciaire couvre-t-elle la période du 1er septembre au 30 juin ? Il aimerait qu'on lui donne des précisions quant à la continuité de la fonction.

Un membre renvoie à l'article 334 du Code judiciaire, qui prévoit que l'année judiciaire commence le 1er septembre et se termine le 30 juin.

La commission est d'accord que la fonction doit couvrir l'ensemble de l'année; les membres du collège peuvent en tout cas se faire remplacer (art. 143bis, § 8).

M. Lallemand dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 28), libellé comme suit :

« Au § 5, alinéa 1er , de l'article 143bis proposé, supprimer les mots « durant l'année judiciaire. »

Dans ce cadre, MM. Erdman et Bourgeois déposent également un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 30).

« Remplacer le premier alinéa du § 5 de l'article 143bis proposé par ce qui suit :

« Le collège des procureurs généraux se réunit au moins une fois par mois, de sa propre initiative ou à la demande du ministre de la Justice. »

Ensuite, M. Lallemand dépose lui aussi un amendement visant à améliorer le texte (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 29).

« Au § 5 de l'article 143bis proposé, remplacer l'alinéa 3 par ce qui suit : « Le ministre préside les réunions du collège auxquelles il assiste. »

Le ministre cite quelques exemples de tâches spécifiques que le Roi peut confier aux membres du collège, comme le prévoit l'article 143bis , § 5, troisième alinéa, proposé.

1. Les problèmes généraux en matière de politique criminelle, dont la politique de recherche et la politique de poursuite.

L'organisation des cours et tribunaux.

La politique pénale et carcérale.

La politique relative aux victimes.

2. Le terrorisme et le grand banditisme.

Les relations internationales.

3. Les questions relatives aux services de police et à la sécurité du citoyen.

4. La protection de la jeunesse et les questions connexes relatives aux personnes (comme la traite des êtres humains, les sectes et la bioéthique).

La politique en matière de stupéfiants.

Les questions de droit civil.

5. La criminalité financière, économique et sociale.

Les questions de droit commercial.

En ce qui concerne le quatrième alinéa de l'article 143bis proposé, § 5, M. Desmedt dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 4), rédigé comme suit :

« Au § 5, de l'article 143bis proposé, remplacer le dernier alinéa par ce qui suit :

« Dans le cadre de l'exercice des compétences mentionnées au § 2 et à l'article 143ter et après concertation avec le collège des procureurs généraux, le Roi peut confier des tâches spécifiques de collecte d'informations et d'études aux membres ou à des membres du Collège. »

Justification

Le texte tel qu'il est présenté par le Gouvernement pourrait apparaître comme confiant à des membres du Collège des missions et compétences dépassant leur ressort territorial, ce qui ne pourrait être fait que par la loi. Il paraît donc opportun de préciser dans le texte même que ces missions ne peuvent être que d'information ou de préparation de dossiers.

L'auteur de l'amendement vise à préciser que les « tâches supra-territoriales » confiées au procureur général doivent être des tâches d'étude et rien de plus. Il lui semble qu'il n'est pas dans l'intention du ministre d'élargir par ce texte les compétences des procureurs généraux au-delà de leur ressort.

Le ministre estime qu'il serait dommage de limiter les possibilités en spécifiant les tâches. Il se réfère à la différence entre la gestion journalière et les actes posés par un Conseil d'administration.

M. Desmedt précise que cet amendement est tiré de l'exposé des motifs (doc. Sénat, nº 1-447/1, pp. 6-7), où est stipulé ce qui suit : « Il ne s'agit pas, comme dit le Conseil d'État, de confier aux membres du collège des pouvoirs qui leur seraient propres, ce qui relève de la loi, mais plutôt de leur confier une responsabilité quant à la préparation et au suivi de certaines matières, ceci impliquant un travail de collecte d'informations, documents, coordination, ».

Le ministre estime que ces points sont cités à titre d'exemple, et que la tâche de « gestion journalière » va beaucoup plus loin qu'une simple collecte d'informations. Il est utile de préciser dans ce cadre que la relation du procureur général désigné avec le magistrat national est un point essentiel. Ceci implique que le procureur général désigné ait un pouvoir individuel au-delà du ressort. La compétence nationale collective du collège est ainsi déléguée à un de ses membres.

Un membre constate que ce point de vue confirme que le principe de la territorialité est de plus en plus transgressé.

Pour rendre le texte plus clair, MM. Erdman et Bourgeois déposent un amendement rédigé comme suit (doc. Sénat nº 1-447/2, amendement nº 30) :

« Remplacer le premier alinéa du § 5 de l'article 143bis proposé par ce qui suit :

« Le collège des procureurs généraux se réunit au moins une fois par mois, de sa propre initiative ou à la demande du ministre de la Justice. »

Votes de l'article 143bis, § 5

L'amendement nº 4 de M. Desmedt (doc. Sénat, nº 1-447/2) est rejeté par 9 voix contre 2.

L'amendement nº 20 de M. Hotyat est retiré.

Les amendements nºs 24, B) et C) de MM. Hotyat et Erdman, l'amendement nº 80 de MM. Erdman et Bourgeois, nºs 28 et 29, de M. Lallemand et l'article 143bis , § 5, ainsi amendé sont adoptés par 9 voix et 2 abstentions.

Article 143bis, § 6 (§ 8 du texte adopté)

Cet article organise les travaux.

M. Erdman dépose un amendement sur l'ordre des paragraphes (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 33) libellé comme suit :

« Modifier comme suit l'ordre des paragraphes de l'article 143bis proposé :

­ le § 6 devient le § 8;

­ le § 8 devient le § 9;

­ le § 9 devient le § 6. »

Cet amendement est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.

Le § 6 devient ainsi le § 8.

Mme Milquet dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 31), libellé comme suit :

« Au § 6, alinéa 1er de l'article 143bis proposé, supprimer la première phrase et le terme « Ensuite, » de la seconde phrase. »

Justification

Pour dynamiser le collège, il n'est sans doute pas opportun que ses débats se fassent sous l'égide du procureur le plus âgé.

Cet amendement s'inscrit dans le but de dynamiser le parquet.

Le ministre réplique que le fait de faire assurer la présidence par le procureur général le plus ancien en rang est une solution d'ordre pratique pour la période provisoire entre la publication de la loi qui installe le collège et le 1er septembre.

Un membre se demande si le fait de communiquer l'ordre du jour, comme le prévoit la première phrase du deuxième alinéa, ne constitue pas une publicité excessive.

Le ministre souligne que, dans l'état actuel des choses, cette manière de procéder transparente ne peut être considérée que comme positive.

Un membre fait une remarque relative à la technique législative utilisée pour ce qui est du § 6, la phrase liminaire de celui-ci, ne contenant, comme on l'a déjà dit, qu'une disposition transitoire.

Le Gouvernement dépose ensuite un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 55) :

« 1º Au § 6, alinéa 1er , de l'article 143bis proposé, supprimer la première phrase et le mot « Ensuite » de la deuxième phrase.

2º À l'alinéa 2 du § 6 de l'article proposé, remplacer le mot « fédéraux » par le mot « nationaux. »

Cet amendement vise à supprimer la disposition transitoire dans le cadre de ce paragraphe et de l'insérer sous le chapitre IV « Des dispositions diverses » (voir infra, art. 14 nouveau).

Vote sur l'article 143bis, § 6 (§ 8 du texte adopté)

Ces amendements et le § 6, devenu § 8, ainsi amendé, sont adoptés par 12 voix et 1 abstention.

L'amendement nº 31 de Mme Milquet est devenu sans objet.

Article 143bis, § 7

Le ministre constate que le mot « bilan » n'est peut-être pas le terme qui convient; il s'agit d'un aperçu, d'une évaluation.

Un membre précise qu'il y a trois éléments, notamment le rapport d'activités (un descriptif), le bilan (une évaluation) et les priorités pour l'année à venir.

Un autre membre estime que la première phrase vise un rapport relatif au fonctionnement du collège, un aperçu donné par le collège lui-même.

Par contre, la deuxième phrase concerne des informations qui sont fournies au collège par les parquets et les cours; il s'agirait donc apparemment de collecter des informations. Selon le membre, on vise plus qu'une simple collecte de statistiques et on attend une évaluation. Le texte n'est pas clair et va dans le sens contraire.

Un sénateur objecte que le rapport ne doit pas être une simple analyse de son propre travail par le collège, mais qu'il doit comporter une évaluation du suivi de ce travail dans les différents parquets.

Un membre estime que le texte est trop directif, il serait suffisant de leur imposer la rédaction d'un rapport, sans préciser le contenu de celui-ci.

Un autre membre se réfère à l'exposé de Mme Thily, qui a affirmé que ce rapport était un élément du contrôle externe.

Le rapport doit donc être documenté et ne pas se composer exclusivement de données statistiques.

Un autre membre plaide lui aussi pour plus de précision. Il souhaite un rapport public, dont le contenu puisse servir de base à une discussion sur la politique menée et les priorités fixées.

Un membre souligne que le collège a certaines compétences touchant à des matières communautaires et régionales (par exemple l'environnement) et que le rapport est uniquement envoyé au ministre de la Justice.

Un sénateur demande que l'on prévoie aussi explicitement que le rapport sera rendu public.

D'autre part, il demande si le rapport, qui contiendra une évaluation, devra également faire l'objet d'un consensus. Si oui, il y a de fortes chances que l'on omette les points sensibles.

Un membre a des doutes à ce sujet. La rédaction d'un rapport est-elle une décision relative à la politique criminelle, qui se prend par consensus ?

Selon le ministre, le législateur ne doit pas se prononcer sur la manière d'élaborer le rapport.

Un autre membre fait remarquer qu'aucun problème communautaire ne peut se poser si le rapport est explicitement rendu public. Les conseils des communautés et des régions pourront alors en disposer.

M. Hotyat dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 32), rédigé comme suit :

« Remplacer le § 7 de l'article 143bis proposé par la disposition suivante :

« § 7. Le collège fait annuellement rapport au ministre. Ce rapport contient la description de ses activités, l'analyse et l'évaluation de la politique des recherches et des poursuites pour l'année écoulée, et les priorités pour l'année à venir.

Le rapport est communiqué aux Chambres législatives par le ministre et est rendu public. »

Vote sur l'article 143bis, § 7

L'amendement nº 32 de M. Hotyat et le § 7 ainsi amendé sont adoptés par 12 voix et 1 abstention.

Le Gouvernement souhaite apporter une correction au texte néerlandais et remplacer le mot « onderzoeksbeleid » par le mot « opsporingsbeleid » ainsi que le mot « minister » par les mots « minister van Justitie ».

Cette correction de texte est adoptée.

Article 143bis, § 8 (§ 9 du texte adopté)

Aucun amendement n'a été déposé, sauf l'amendement nº 33 de M. Erdman (cf. supra, § 6).

Vote sur l'article 143bis, § 8

Le paragraphe 8, devenu § 9, est adopté par 11 voix et 1 abstention.

Article 143bis, § 9 (§ 6 du texte adopté)

M. Lallemand propose une correction de texte, notamment de remplacer les mots « le mode de collaboration directe » par les mots « les modalités de collaboration ».

Le § 9, devenu § 6, ainsi amendé et corrigé, est adopté par 10 voix et 1 abstention.

Vote sur l'article 2

L'article 2, ainsi amendé, est adopté par 11 voix et 1 abstention.

Seconde lecture

Le Gouvernement dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 54), libellé comme suit :

« Au § 6, alinéa 2, de l'article 143bis proposé, remplacer la deuxième phrase par la phrase suivante :

« Sous son autorité, le secrétariat est dirigé par un directeur qui participe à toutes les réunions du collège ». Et à la troisième phrase, le mot « il » est remplacé par le mot « celui-ci ».

Un membre demande si le terme « directeur » se réfère à une fonction créée en vertu de l'article 185 du Code judiciaire, tel qu'amendé par le projet. Il s'agit donc d'une fonction nouvelle.

Le ministre répond qu'il en est bien ainsi et souhaite introduire un secrétariat d'une qualité particulière, avec des conditions d'expérience et de formation.

L'amendement est adopté par 7 voix et 1 abstention.

L'article 2, ainsi amendé, est adopté en seconde lecture par le même vote.

Article 2bis (nouveau)

Mme Milquet dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 25), libellé comme suit :

« Insérer après l'article 2 un chapitre Ier bis contenant un article 2bis nouveau, et libellé comme suit :

« Chapitre Ier bis ­

De la création d'un Comité fédéral de politique criminelle

Art. 2bis. ­ Un article 143ter, rédigé comme suit, est inséré dans le même code :

« Article 143ter. ­ § 1er . Il est créé, sous l'autorité du collège des procureurs généraux, un Comité fédéral de politique criminelle.

§ 2. Ce comité est dirigé par un procureur général assisté d'un procureur fédéral adjoint nommé sur l'avis du collège des procureurs généraux.

§ 3. Ce comité est composé des magistrats nationaux visés à l'article 4, de représentants du service de politique criminelle, de membres du ministère public près les cours d'appel détachés auprès de ce service par le ministre sur avis du collège des procureurs généraux, de représentants des officiers de police judiciaire des différents services de police désignés par le ministre, d'un représentant du service général d'appui policier et d'un secrétariat permanent.

§ 4. Ce comité est chargé de l'exécution journalière des décisions et lignes directrices établies par le collège des procureurs généraux, de l'aider dans la préparation ou l'exercice de ses missions, de lui soumettre des avis et des propositions de décisions.

Le collège des procureurs généraux peut charger le comité de missions déterminées ou déléguer au comité certaines de leurs missions. »

Justification

Il serait opportun, me semble-t-il, de créer un Comité fédéral de politique criminelle, sous l'autorité du ministre et du collège des procureurs généraux.

Cet organe devrait constituer la structure opérationnelle permanente qui manque cruellement au projet.

Cette structure fédérale opérationnelle permanente est dirigée par un procureur fédéral, ce qui est une nouveauté, comprenant les magistrats nationaux, certaines personnes détachées des parquets d'appel, des responsables du S.G.A.P. (service général d'appui policier), des responsables de la police criminelle (voir infra), de la gendarmerie et de la police communale. Cette structure fédérale opérationnelle devra exécuter les décisions finales prises par le collège des procureurs généraux, sur la base des avis de la structure d'impulsion, et par le ministre. Elle pourrait être chargée de certaines missions de délégation.

Cette structure devrait en outre permettre l'existence d'un partenariat entre les autorités judiciaires et les services de police qui ont un « know-how » et une spécialité en la matière indispensables et induire ainsi une nouvelle mentalité de coopération au-delà des corps et au-delà des frontières d'arrondissement.

À la tête de cette structure de politique criminelle fédérale opérationnelle et permanente, il est indispensable d'avoir un procureur fédéral, compétent pour l'ensemble du territoire, qui dirige, sous l'autorité du ministre et du collège, gère, et coordonne, à temps plein, l'exécution des décisions en matière de politique criminelle.

Ce procureur superviserait les actions notamment des magistrats nationaux.

L'auteur de l'amendement précise que cet amendement part de l'idée d'avoir, sous l'autorité du collège, un service opérationnel permanent, dirigé par un procureur fédéral, qui n'est pas procureur général en même temps et peut donc se consacrer à temps plein à la gestion de ce service.

Ce service serait composé de représentants des parquets et de magistrats nationaux, de membres détachés du ministère public près les cours d'appel, mais également de représentants des différents corps de police, exerçant des fonctions judiciaires, et d'un représentant du service général d'appui policier.

Cette composition pluridisciplinaire vise à répondre au manque de synergie dans le projet à l'examen et vise ainsi à la meilleure coordination possible au niveau de l'action publique entre les parquets et les services de police.

Le procureur fédéral adjoint est instauré pour répondre aux éventuels problèmes linguistiques.

Le ministre accueille la création de cette structure permanente pour l'exécution journalière et l'assistance du collège de façon négative et ceci pour plusieurs raisons.

Il est d'abord d'avis que cet amendement ne s'inscrit pas dans la logique du projet à l'examen, vu qu'il semble attribuer au collège, de par sa formulation et composition, une responsabilité dans l'élaboration de la politique criminelle, alors que le projet à l'examen attribue cette responsabilité au ministre.

Ensuite, le ministre estime que les compétences de la structure polymorphe créée par l'amendement empiètent sur celles des structures existantes ou prévues par le projet à l'examen.

Ces tâches prévues par l'amendement sont réparties par le projet à l'examen, comme suit :

­ l'exécution quotidienne des décisions journalières relève de la responsabilité personnelle de chaque procureur général;

­ l'aide dans la préparation et l'exercice des missions du collège est réalisée par l'attribution aux membres du collège de tâches spécifiques (cf. art. 143bis proposé, § 5, alinéa 4);

­ l'appui logistique du collège est assuré par un secrétariat (cf. art. 6 du texte adopté), qui sera composé de juristes et du personnel d'exécution nécessaire.

En troisième lieu, l'amendement crée, selon le ministre, un nouveau niveau dans l'organisation judiciaire, un « parquet fédéral », qui ne peut s'intégrer dans la structure existante.

Il estime que le procureur fédéral serait dans une position ambivalente vis-à-vis des procureurs généraux, les relations hiérarchiques n'étant pas précisées. Placé sous l'autorité du collège, le procureur fédéral aurait pour mission de mettre en oeuvre des décisions qui seraient contraignantes à l'égard des procureurs généraux à titre individuel.

Le quatrième argument en faveur du rejet de l'amendement est que ce dernier place les magistrats nationaux sous la direction du procureur fédéral et non du membre du collège désigné conformément à l'article 144bis , § 3, proposé.

Enfin, et à titre subsidiaire, le ministre estime que l'amendement subordonne le service de la politique criminelle au collège, alors que ce service est attaché au ministre de la Justice.

Le ministre conclut que l'amendement ne peut être retenu étant donné qu'il prive le collège de ses compétences et qu'il installe une nouvelle structure ambivalente et parallèle.

Un membre estime que l'amendement a en tout cas le mérite de mettre en évidence l'hiatus résultant du fait que le ministère public ne pourra être réformé efficacement que si l'on procède à une réforme similaire et concomitante des services de police.

Le ministre déclare qu'il n'ignore pas que le débat crucial sur la relation entre le ministère public et les services de police reste ouvert et il renvoie à ce sujet à la discussion de l'article 2, au cours de laquelle cette question a déjà été abordée. Il lui paraît cependant exagéré d'intégrer de facto les services de police dans le collège.

Un autre membre rappelle que l'amendement accentue l'élément de permanence, le collège des procureurs généraux se réunissant périodiquement (min. 1 fois par mois). Il faut donc une structure permanente pour assurer le suivi de la politique criminelle édictée par le ministre.

L'auteur de l'amendement estime que la création du procureur fédéral ne change pas la philosophie du projet à l'examen. L'idée est simplement de mettre un outil d'exécution et de coordination dans les mains du collège, dirigé par le ministre. Ce n'est qu'un organe d'exécution. Elle est persuadée que la coordination d'une politique criminelle au niveau fédéral doit nécessairement être intégrée dans une unité de temps et de lieu, composée notamment des magistrats nationaux, qui ont une vue fédérale, et également les corps de police, qui sont indispensables en matière d'échange d'informations.

Elle pourrait cependant, dans un premier temps, concevoir d'écarter les représentants des corps de police de ce comité, en attendant les restructurations des services de police.

Elle persiste à dire que les tâches de ce comité se situent au niveau de l'exécution et souligne l'importance d'un « procureur fédéral », étant donné qu'elle est d'avis que les procureurs généraux donneront plutôt priorité aux préoccupations de leur ressort.

Le ministre rappelle que l'idée d'un secrétariat renforcé est défendable, mais qu'il s'oppose à la composition proposée, notamment en ce qui concerne les représentants des différents corps de police. Selon le ministre, il ne s'agit alors plus d'un secrétariat permanent, mais d'une structure parallèle.

La création d'un secrétariat indépendant, composé de juristes qui n'appartiennent pas au ministère public, fut un choix réfléchi du Gouvernement.

Ceci contribue à éviter la désorganisation au sein des parquets et stimule la stabilité d'une équipe permanente. Ils peuvent bien sûr avoir des contacts avec les avocats généraux ayant des missions spécifiques.

Un membre souligne que cet amendement tient imparfaitement compte du fait que, dans la structure en question, la compétence territoriale du procureur général est maintenue. Les magistrats nationaux font déjà exception au principe de la compétence territoriale.

Si l'on décide d'abandonner le système de magistrats disposant d'une compétence territoriale et d'opter pour un système de magistrats dotés de compétences fonctionnelles, alors il faut revoir l'ensemble du système.

L'auteur de l'amendement confirme que le projet à l'examen nous laisse dans une situation intermédiaire. D'une part, le principe de la territorialité et la structure du parquet sont maintenus, mais on se rend compte que ces éléments ne sont pas suffisants pour avoir une coordination de la politique criminelle.

D'autre part, le projet ne donne pas les moyens d'avoir une structure fédérale.

Il y a quand même une rupture de la territorialité dans le projet, notamment au niveau de la force contraignante des décisions du collège et au niveau des magistrats nationaux.

L'auteur de l'amendement ne peut pas rejoindre l'idée que le comité fédéral créerait une structure parallèle.

L'idée est simplement d'exécuter ce que les procureurs généraux ont décidé, de ne pas créer un échelon supérieur, mais d'avoir une personne disponible à temps plein. Une certaine structure fédérale ne lui semble pas incompatible.

Un membre estime que l'amendement en question est non pas un amendement, mais une nouvelle proposition, une autre option.

L'intervenant estime que l'auteur de l'amendement fait un procès d'intention si elle considère que les procureurs généraux s'occuperont d'autres questions que celles qui leur auront été confiées par la loi en projet devenue loi.

Il constate en outre que, dans tous les pays d'Europe occidentale, les procureurs généraux conservent des compétences territoriales, alors que ces pays sont, eux aussi, confrontés à la criminalité organisée. L'on recherche des formules intermédiaires, mais sans envisager la suppression ni des procureurs généraux, ni des cours d'appel.

L'intervenant estime par contre que la création éventuelle d'un secrétariat au service des procureurs généraux s'inscrirait parfaitement, quant à elle, dans les options de base à l'examen.

Il estime cependant que l'amendement constitue en fait, en tant que tel, une autre proposition.

Il y a tout d'abord l'ambiguïté du paragraphe premier, qui prévoit la création d'un Comité fédéral de politique criminelle « sous l'autorité du collège des procureurs généraux », ce qui signifie que ce comité n'aura rien à dire.

En second lieu, l'intervenant estime que l'initiative en matière de politique criminelle et de poursuite appartient au ministre de la Justice. L'amendement vise en substance à instituer un comité disposant de compétences parallèles. « Le pouvoir, ça se ramasse ».

Face à un comité fédéral permanent, le collège des procureurs généraux, dépourvu de compétences permanentes, ne jouerait aucun rôle au niveau de la politique de recherche et de poursuite, surtout si l'on y associe les services de police.

L'intervenant estime que la création d'un comité fédéral n'est pas conciliable avec le point de vue du Gouvernement. Il peut en revanche partager le souci de doter le collège des procureurs de moyens substantiels pour lui permettre d'exercer ses activités, notamment en créant un secrétariat permanent.

L'auteur de l'amendement insiste sur le fait qu'elle ne souhaite faire aucun procès d'intention aux procureurs généraux, mais qu'elle craint qu'ils ne puissent pas toujours accomplir les tâches prévues par un manque de temps ou d'informations. L'idée était en premier lieu de les aider, de les assister.

Elle souligne que le comité était placé sous l'autorité du ministre, conformément à l'article 3 du projet.

De plus, elle précise qu'il n'était en rien question de compétences parallèles, étant donné que le comité se situe uniquement au niveau de l'exécution.

Enfin, en ce qui concerne la police, l'auteur de l'amendement ne voulait en rien les promouvoir, mais simplement établir un contact, la liaison du collège avec les corps de police concernés.

Un autre membre veut savoir comment vont se rencontrer les magistrats nationaux, les magistrats qui ont une fonction de soutien et le secrétariat permanent proprement dit.

Est-il concevable de créer une structure qui garantit la permanence dans l'exécution de la volonté du ministre ?

Le ministre répond que tous les outils se trouvent dans la loi et que la seule question est de savoir comment l'appliquer (voir possibilité de requérir l'assistance des membres du ministère public, secrétariat avec des juristes, liens entre le collège et les autres services).

Le ministre estime qu'il faut maintenir une certaine flexibilité et par exemple ne pas tout régler par organigrammes.

Ce membre demande si le chef du secrétariat ne devrait pas assister aux réunions du collège des procureurs généraux et si le chef du secrétariat ne devrait pas être un magistrat de la cour d'appel, en vue d'assurer la permanence.

Le ministre est d'accord de créer « un directeur » qui assiste aux réunions du collège, mais rejette l'idée de le choisir parmi les magistrats de la cour d'appel, vu que ceci pourrait impliquer une délégation des procureurs généraux.

L'auteur de l'amendement s'associe à l'idée d'un directeur qui assiste aux réunions.

Elle estime cependant qu'il serait préférable d'avoir, à côté des juristes, des magistrats détachés, qui ont plus d'autorité.

Le ministre n'est pas favorable au détachement, vu qu'il appartient aux procureurs généraux de prendre leurs responsabilités et que l'expérience démontre que les magistrats ont toujours certaines ambitions au niveau de leur carrière et que les relations humaines sont souvent délicates entre eux, ce qui influence souvent le fonctionnement d'un tel secrétariat de façon négative.

L'auteur de l'amendement demande ensuite quelle est la place du service de la politique criminelle au sein du secrétariat, ou conjointement avec celui-ci.

Le ministre réplique que le service de la politique criminelle est créé pour aviser le ministre et qu'il ne peut donc faire partie du secrétariat.

À la suite à cette discussion, M. Lallemand dépose un amendement (Doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 43) à l'article 5 du projet (texte cf. infra art. 5).

Vote de l'amendement nº 25

L'amendement nº 25 du Mme Milquet est rejeté par 11 voix contre 1 et 1 abstention.

Article 2ter (nouveau)

Mme Milquet dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 26), libellé comme suit :

« Insérer après l'article 2bis un Chapitre Ier ter contenant un article 2ter nouveau, et libellé comme suit :

« Chapitre Ier ter ­

Du collège des procureurs du Roi

Art. 2ter. ­ Un article 143quater, rédigé comme suit, est inséré dans le même code :

« Article 143quater. ­ § 1er . Les procureurs du Roi forment un collège appelé « collège des procureurs du Roi », présidé par un procureur élu par ses pairs.

§ 2. Ce collège est chargé d'émettre des avis d'initiative sur les matières visées à l'article 143bis, § 2, au collège des procureurs généraux et au Comité fédéral de politique criminelle. Le collège des procureurs généraux ou le Comité fédéral de politique criminelle peut demander des avis au collège des procureurs du Roi.

§ 3. Le collège des procureurs du Roi statue par consensus.

§ 4. En vue de l'exercice de ses missions, le collège peut organiser les auditions qu'il estime nécessaires.

§ 5. Le collège se réunit au moins une fois par mois, sur convocation de son président, durant l'année judiciaire.

§ 6. Le collège règle son organisation interne dans un règlement d'ordre intérieur. »

Justification

La politique criminelle ne peut se faire qu'entre procureurs généraux, plus détachés du terrain, sans y associer étroitement les 27 procureurs du Roi qui sont les premiers responsables judiciaires en la matière dans leur arrondissement. Jusqu'à présent, il n'existe aucune structure qui leur permette de se rencontrer, d'échanger leurs informations et leurs expériences alors qu'ils devraient tous être les acteurs d'un projet de politique criminelle identique.

L'institutionnalisation de ce collège des procureurs du Roi, ayant un rôle fondamental d'avis vis-à-vis du collège des procureurs généraux, devrait permettre d'améliorer les décisions de ce dernier, de décloisonner les parquets et d'optimaliser les coopérations et les visions.

Ce collège permanent devrait permettre de responsabiliser les procureurs du Roi dans l'élaboration d'une politique cohérente, d'être un lieu de dialogue, d'échanges d'informations et d'expériences indispensables pour l'élaboration d'une politique efficace, ce qui manque cruellement actuellement.

L'auteur de l'amendement estime que les acteurs de base et les responsables sur le terrain sont les procureurs du Roi. Il lui semble donc indispensable que ces procureurs du Roi se rencontrent pour échanger leurs expériences et qu'ils puissent ainsi exprimer des avis en dehors de la présence des procureurs généraux.

Le ministre est conscient du fait que le projet à l'examen instaure une structure décisionnelle verticale et que la concertation horizontale n'y est pas explicitement prévue.

Par contre, la logique du projet ne s'oppose pas à ce que le collège des procureurs généraux favorise les contacts avec les parquets des tribunaux de première instance et organise des réunions périodiques.

De plus, il craint un éventuel antagonisme vis-à-vis du collège des procureurs généraux, notamment que le collège des procureurs généraux pourrait ressentir la création d'un tel collège comme un contre-pouvoir.

Le ministre est d'accord de stimuler les contacts avec les procureurs du Roi, mais estime qu'il n'est pas nécessaire de le prévoir dans le texte de la loi. Si l'explicitation dans la loi est tout de même retenue, la formulation devrait être prévue en profondeur.

Un membre souhaite faire tout d'abord une remarque formelle au sujet de la justification de cet amendement, qui affirme que l'on ne peut confier la politique criminelle aux seuls procureurs généraux. Il est dit dans l'exposé des motifs que la politique criminelle est définie par le ministre de la Justice en concertation avec le collège des procureurs généraux.

L'intervenant déduit dès lors de la justification de l'amendement que l'on créerait un collège des procureurs du Roi qui interviendrait dans la détermination de la politique criminelle. D'après lui, cela n'est pas possible. Le seul organe qui détermine cette politique c'est le ministre, lequel se fait assister par le collège des procureurs généraux et par le Service de la politique criminelle.

Dans sa deuxième remarque, l'intervenant souligne qu'en institutionnalisant un collège des procureurs du Roi, on déroge une deuxième fois au principe de la territorialité.

L'amendement encourage donc à déroger au principe de territorialité en regroupant fonctionnellement un certain nombre de personnes au niveau national.

Selon l'intervenant, c'est le magistrat national qui est la personne indiquée pour désigner telles ou telles membres de différents parquets, en fonction des sujets et des matières à traiter.

Il ne lui paraît en tout cas pas judicieux de créer deux collèges. Plutôt que cette éventualité, mieux vaudrait encore n'instituer qu'un collège des procureurs.

L'auteur de l'amendement maintient qu'il est utile d'inscrire le principe de la concertation avec les procureurs du Roi dans la loi. Même si cette concertation a lieu aujourd'hui, elle n'est pas suffisamment fréquente. Elle ne ressent nullement le collège des procureurs du Roi comme un pouvoir concurrent du collège des procureurs généraux, vu qu'il s'agit d'un organe totalement consultatif. Elle suggère de modérer le nom de celui-ci (p. ex. Conseil consultatif des procureurs du Roi) et de le formuler dans un article 181ter , au lieu d'un article 143quater .

Un membre se demande si l'amendement peut trouver sa place dans la discussion du projet à l'examen, et s'il ne s'agit pas plutôt d'une proposition distincte.

En deuxième lieu, il attire l'attention sur le problème de la praticabilité; il y a 27 procureurs du Roi et il ne sera donc pas évident de les faire statuer par consensus.

L'auteur de l'amendement estime que la discussion se situe bien dans le cadre du projet à l'examen, étant donné que le collège des procureurs du Roi ne serait qu'une modalité d'une meilleure coordination, visée explicitement par le projet. Elle est d'avis que dans le cadre d'une réforme où les mentalités doivent changer, il faut oser émettre des éléments novateurs.

Un membre estime que les arguments de fond avancés par l'auteur de l'amendement sont pertinents. Il craint toutefois que la création de deux collèges ne soit pas une solution et ne fasse au contraire que créer davantage de problèmes.

Un autre membre ne croit pas à un collège des procureurs du Roi. Si on en fait une institution, il faudra prévoir également un soutien administratif. En outre, l'intervenant n'est pas convaincu que cette idée soit accueillie favorablement par les procureurs du Roi eux-mêmes. Enfin, la pluralité d'avis poserait un problème supplémentaire au ministre de la Justice.

Il lui paraît suffisant d'acter que le ministre pourra interroger les procureurs du Roi sur les problèmes de leur ressort ou sur des matières spécifiques et qu'à cet égard leur tâche sera purement consultative.

Le ministre souligne combien il est important, tant pour lui-même que pour le collège et pour le procureur général dans chaque ressort, de pouvoir consulter les procureurs du Roi.

C'est une pratique qui existe (cf. par exemple le dossier des hormones). La prévoir explicitement dans la loi conduirait à une plus grande insécurité.

Un membre souligne que le ministre peut même prévoir par directive que les procureurs du Roi donnent un avis dans une matière bien déterminée. De plus, le Parlement a une certaine responsabilité d'interroger le ministre sur la concertation avec les procureurs du Roi dans certaines matières. Selon cet intervenant, l'idée de l'amendement est intéressante, mais il est également difficile de formaliser la périodicité des réunions.

Le ministre estime toutefois que la flexibilité est importante.

Il serait regrettable que, lorsqu'il souhaite consulter certains procureurs, le ministre doive toujours passer par l'intervention du collège.

Plusieurs commissaires concluent qu'une réglementation légale pourrait avoir un effet restrictif et sont partisans d'une flexibilité.

Vote

L'amendement nº 26 de Mme Milquet est rejeté par 11 voix contre 1 et 1 abstention.

Article 3

M. Desmedt dépose un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 5), libellé comme suit :

« Remplacer cet article par ce qui suit :

« Art. 143ter. ­ Le ministre de la Justice soumet à la discussion du collège des procureurs généraux les projets de lignes directrices de politique criminelle y compris en matière de recherche et de poursuite. Il arrête ces lignes directrices qui sont contraignantes pour tous les membres du ministère public. Les procureurs généraux près les cours d'appel veillent dans leur ressort à leur bonne exécution. »

Justification

Cet amendement ne touche en rien au contenu de l'article 3 mais vise à en assurer une meilleure lecture, le texte français proposé étant fort lourd et reprenant l'expression « les lignes directrices » à cinq reprises en neuf lignes.

L'auteur de l'amendement est d'accord de remplacer le terme « ligne directrice » par « directive », suite à la discussion de tout à l'heure.

Il précise que cet amendement ne vise que le texte français, qui est mal rédigé. C'est un amendement de forme, de style.

Le ministre estime qu'il faudra modifier également la traduction néerlandaise. Il est important de distinguer nettement l'élément de consultation et la décision du ministre.

M. Lallemand dépose à l'amendement nº 5 de M. Desmedt un sous-amendement libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 44) :

« Remplacer l'article 143ter proposé par ce qui suit :

« Art. 143ter. ­ Le ministre de la Justice arrête les directives de politique criminelle, y compris en matière de politique de recherche et de poursuite, après avoir pris l'avis du collège des procureurs généraux.

Ces directives sont contraignantes pour tous les membres du ministère public.

Les procureurs généraux près les cours d'appel veillent à l'exécution de ces directives au sein de leur ressort. »

Vote sur l'article 3

L'amendement nº 5 de M. Desmedt est retiré.

L'amendement nº 44 de M. Lallemand et l'article 3, ainsi amendé, sont adoptés par 11 voix et 1 abstention.

Article 3bis (nouveau) (art. 4 du texte adopté)

M. Vandenberghe dépose un amendement libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 2) :

« Insérer un article 3bis rédigé comme suit :

« Art. 3bis. ­ § 1er . Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143bis et 143ter, » sont ajoutés au début de l'article 398 du Code judiciaire.

§ 2. Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143bis et 143ter, » sont ajoutés au début de l'article 399, premier alinéa, du même Code.

§ 3. Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143bis et et 143ter, » sont ajoutés au début de l'article 399, deuxième alinéa, du même Code.

§ 4. Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143bis et 143ter, » sont ajoutés au début de l'article 400 du même Code. »

Justification

Compte tenu du pouvoir attribué au ministre de la Justice d'arrêter les lignes directrices de politique criminelle (art. 143ter) et de prendre les mesures nécessaires pour assurer l'application de ces lignes directrices (art. 143bis, § 3), il convient d'adapter les articles 398, 399 et 400 du Code judiciaire dans ce sens.

Vote sur l'article 3bis (nouveau) (art. 4 du texte adopté)

L'amendement nº 2 de M. Vandenberghe est adopté par 12 voix et 1 abstention.

CHAPITRE III

Article 4 (art. 5 du texte adopté)

Le Gouvernement présente les amendements suivants (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendements nºs 34 et 35).

Chapitre III ­ Intitulé

« Remplacer l'intitulé du chapitre III par le suivant : « Le magistrat national ».

« À l'article 144bis proposé, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux ».

Pour la discussion, voir l'amendement nº 10 présenté par le Gouvernement (doc. Sénat, nº 1-447/2 concernant l'intitulé du projet de loi).

Article 144bis , § 1er

L'article 144bis , § 1er , ainsi amendé, est adopté par 11 voix et 1 abstention.

Article 144bis , § 2

Le Gouvernement présente un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 11) :

« Au § 2 de l'article 144bis proposé, remplacer le mot « juge » par les mots « juge d'instruction ».

Justification

Vu les responsabilités qui sont attribuées aux magistrats nationaux par le projet, il paraît souhaitable d'être plus exigeant en ce qui concerne les conditions auxquelles doivent satisfaire les magistrats du siège pour être désignés à cette fonction, afin de garantir que ceux-ci disposent d'une expérience de terrain suffisante pour l'assumer adéquatement. Seule l'expérience en qualité de juge d'instruction sera dès lors prise en considération.

Le ministre estime qu'il est absolument indispensable d'avoir une expérience « de terrain ».

M. Desmedt dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 6) :

« Au § 2 de l'article 144bis proposé, supprimer les mots « ou de juge ».

Justification

Les magistrats fédéraux sont des magistrats du ministère public à qui sont confiées d'importantes responsabilités au niveau national.

Il semble donc souhaitable qu'ils soient issus du ministère public lui-même et non de la magistrature assise. Il ne serait pas opportun de désigner des juges d'instruction, la fonction d'instruction n'étant pas une mission du ministère public.

L'auteur de l'amendement souhaite connaître la justification de cette disposition, dérogeant au droit commun, étant donné qu'un magistrat passe du siège au parquet. Quel sera le statut de ce magistrat et quel est l'intérêt de désigner un juge d'instruction, vu que le nombre des magistrats nationaux est limité à 5 ?

Le ministre répond que les mots « ou de juge » s'inscrivent dans la condition supplémentaire d'avoir une expérience.

Les magistrats nationaux sont désignés parmi les membres du ministère public, mais doivent avoir exercé des fonctions de magistrat du ministère public ou de juge d'instruction pendant cinq ans.

À la suite de cette précision, M. Desmedt retire son amendement nº 6.

M. Lallemand dépose l'amendement suivant (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 45) :

« Au § 2, alinéa 1er , de l'article 144bis proposé, supprimer les mots « auprès des cours d'appel et des tribunaux de première instance. »

Un membre pose la question de savoir s'il ne serait pas mieux de préciser la période renouvelable (1 fois, 2 fois), afin d'éviter d'avoir des gens à vie.

Mme Delcourt-Pêtre dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 47) :

« Compléter le § 2 de l'article 144bis proposé par les termes « au maximum deux fois ».

Le ministre explique qu'il importe de faire le choix entre un mandat d'une période assez brève et renouvelable, et un mandat non renouvelable d'une période plus longue.

Le même problème se pose au niveau des mandats des chefs de corps. La Cour de cassation opte plutôt, en ce qui concerne les chefs de corps, pour un mandat de sept ou huit ans, non renouvelable. Ceci stimule effectivement la prise de responsabilité.

Un membre attire l'attention sur le fait que le magistrat national n'est pas un chef de corps et que sa situation est donc fondamentalement différente.

Il est favorable à un mandat renouvelable. Il ne faut pas perdre de vue qu'un magistrat national a une fonction très technique et que l'expérience est primordiale.

Le tout est de savoir s'il faut limiter la durée totale.

L'auteur de l'amendement est d'accord avec la formule de renouvellement du mandat, mais veut préciser la durée des renouvellements, afin d'éviter l'immobilisme ou un monopole éventuel.

Un autre membre partage la crainte d'un éventuel immobilisme et suggère, comme solution possible, de maintenir le mandat d'une durée déterminée, et renouvelable, mais pas immédiatement.

Le ministre estime qu'il est à craindre que le magistrat ne puisse pas acquérir une connaissance suffisante du réseau en un temps aussi bref.

Un autre membre opte également pour la possibilité d'une carrière assez longue, afin que le magistrat national s'investisse à fond et ne prépare pas sa voie de sortie dès son entrée.

L'auteur de l'amendement conclut qu'il importe de choisir le juste milieu entre ces deux risques.

Un membre souligne qu'il est important de prévoir que le mandat ne sera pas renouvelé automatiquement et une évaluation sera nécessaire à la fin des cinq années en question.

Un autre membre estime que la durée du mandat des magistrats nationaux doit être identique à celle des juges d'instruction.

Le ministre répond qu'aucune décision n'a été prise à cet égard, que ce soit pour le juge d'instruction, pour le juge de la jeunesse, le juge des saisies ou pour les chefs de corps. En ce qui concerne les magistrats nationaux, le ministre est partisan d'une grande souplesse et souhaite dès lors que l'on n'introduise pas de limitation de temps, bien qu'il ne s'y oppose pas.

Un membre estime qu'un mandat de 15 ans est plus que suffisant et craint que si aucune disposition n'est inscrite dans la loi à, la limitation du délai ne soit purement formelle.

Un autre membre pose la question de savoir quand le délai prend cours pour les magistrats nationaux actuellement en fonction.

Le ministre répond qu'il prendra cours au moment de l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

Ces limitations ne sont pas rétroactives.

Vote sur l'article 144bis, § 2

Les amendements sont adoptés à l'unanimité par les 13 membres présents.

L'article 144bis , § 2, ainsi amendé, est adopté par un vote identique.

Article 144bis, § 3

Le Gouvernement dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 12) :

« Au 2º de l'article 144bis, § 3, proposé, remplacer, dans le texte français, les mots « dans le cadre de l'exercice de l'action publique » par les mots « en vue de l'exercice de l'action publique ».

Le ministre précise qu'il s'agit en l'occurrence d'une simple correction du texte français.

Un membre demande si l'on peut déduire du point 1, qui prévoit que les magistrats nationaux sont chargés d'assurer la coordination de l'exercice de l'action publique, que les magistrats nationaux peuvent également organiser la concertation entre les parquets du tribunal de première instance sur certains thèmes (par exemple, les transports de fonds), sans nécessairement avoir pour but de faciliter la coopération internationale.

Le ministre répond par l'affirmative.

Un membre souhaite connaître la portée exacte de la notion « déterminée » au point 2. D'un point de vue formel, la compétence du procureur du Roi est déterminée par la loi.

Le ministre précise que l'on veut dire « aussi longtemps que le dossier n'est pas localisé ».

L'article vise principalement à régler les cas où une affaire qui est traitée par une autorité étrangère n'est pas encore localisable en Belgique et que, dès lors, aucun parquet n'a entamé une information. Le magistrat national peut alors prendre toutes les mesures urgentes et nécessaires, il dispose du même pouvoir que le procureur du Roi.

Un membre demande si le ministre vise uniquement les faits commis à l'étranger, qui n'ont pas encore été attribués à un magistrat belge, ou s'il inclut également les faits commis en Belgique.

Le ministre précise qu'une interprétation large doit être donnée. L'application pratique pose moins de problèmes que la description théorique.

M. Desmedt dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 49) :

Au § 3, 2º, de l'article 144bis proposé, insérer le mot « territoriale » entre les mots « aussi longtemps que la compétence » et les mots « d'un procureur du Roi ».

Justification

Afin d'éviter toute équivoque, il est utile de préciser que la compétence du procureur du Roi, qui n'est pas encore déterminée, est uniquement la compétence territoriale, et non une compétence « ratione materiae ».

Un membre demande si le magistrat national reste compétent s'il s'avère que deux procureurs du Roi sont compétents.

Un membre se rallie à ce qui précède et se demande qui va trancher si, en cas de concours de compétences, des avis opposés sont émis.

Ensuite, il se demande si un concours de compétence est tellement inconcevable. Cela signifie que le magistrat national poursuivrait son travail et ferait d'éventuelles réquisitions, alors que le procureur du Roi ferait de même.

Le Collège des procureurs généraux étant chargé de la coordination, aucun problème ne devrait se poser.

Le ministre répète que le magistrat national est compétent tant qu'aucun autre magistrat ne l'est. Selon lui, l'on ne peut régler totalement à l'avance le problème de la destination finale des dossiers « non localisés »; la pratique en décidera.

Le ministre cite alors quelques exemples de compétences du magistrat national, comme le prévoit l'article 144bis, § 3, 2º.

Exemple :

1. Un industriel français est enlevé. On croit qu'il est gardé prisonnier en Belgique. Il s'avère que les contacts se font par téléphone satellite. Des mesures s'imposent (p. ex. des écoutes téléphoniques). Aucun procureur du Roi n'est compétent à ce moment. Il faut que quelqu'un puisse donner les instructions nécessaires aux services de police, et ce, dans le délai le plus court. Les magistrats nationaux pourront donner de telles instructions.

2. Une livraison contrôlée de stupéfiants doit transiter des Pays-Bas vers la France en passant par la Belgique. Un magistrat national est informé. Il doit pouvoir prendre les mesures utiles. À ce moment-là, il n'y a encore aucun procureur du Roi qui soit territorialement compétent, puisque les stupéfiants se trouvent encore aux Pays-Bas.

3. Exemple analogue d'une livraison contrôlée de stupéfiants, mais, en l'espèce, l'on ne peut pas encore déterminer quel est le parquet belge définitivement compétent. L'on sait donc que les stupéfiants sont destinés à la Belgique, mais l'on n'en connaît pas la destination finale précise.

4. Une organisation criminelle néerlandaise règle des transactions de stupéfiants par G.S.M. Les numéros de téléphone sont connus. Il faut localiser les utilisateurs. Or, aucun parquet n'est encore compétent. Quel est le parquet belge qui enverra une commission rogatoire aux autorités judiciaires néerlandaises ? Les magistrats nationaux combleront cette lacune.

5. Un autocar arrive d'Espagne. Le siège social de la société d'autocars se trouve à Anvers. Le chauffeur habite à Nivelles. Il doit déposer des personnes à Gand et à Courtrai. L'autocar renferme des stupéfiants. Les magistrats nationaux sont informés de son arrivée. À ce moment-là il n'y a encore aucun procureur du Roi qui soit territorialement compétent. Les magistrats nationaux doivent pouvoir ordonner des mesures, comme l'observation de l'autocar depuis la frontière et une intervention à Nivelles, et non pas à Anvers, Gand ou Courtrai. Dorénavant, cette mesure sera fondée juridiquement sur la base de la compétence que leur octroie le projet de loi. La mesure doit également être contraignante pour les procureurs du Roi. Sinon, il se pourrait que le magistrat national ait pris toutes les mesures urgentes, mais que le procureur du Roi d'Arlon intercepte l'autocar dès son entrée dans le pays (car il devient territorialement compétent dès ce moment-là) sans se soucier des mesures arrêtées.

6. La justice allemande avertit des magistrats nationaux qu'il va y avoir, dans le cadre d'une instruction allemande, un contact entre un criminel et un informateur à l'hôtel Hilton de Bruxelles. Il y a lieu d'observer ce qui va se passer à l'hôtel Hilton. Qui doit donner son autorisation ? La question se pose car il n'y a pas eu d'infraction en Belgique. Que faut-il faire si des coups de feu sont tirés ? Qui a donné aux Allemands l'autorisation d'opérer chez nous ? Cette lacune sera également comblée par les magistrats nationaux, grâce à la loi en projet.

Un autre membre estime également que le texte est trop vague. Deuxièmement, elle demande quelle est l'instance compétente si un procureur du Roi n'accepte pas l'instruction « contraignante » du magistrat national ou si le magistrat national n'est pas d'accord avec l'avis contraire du procureur général. Ne faut-il pas prévoir que le collège est compétent pour ce type de problèmes ?

Le ministre est conscient du problème. La fixation de limites implique toujours une discussion sur les limites.

Il est cependant d'avis qu'il ne faut pas l'expliciter dans la loi. La pratique est que le magistrat national doit limiter son intervention au minimum nécessaire, il doit chercher dès le début un procureur du Roi responsable.

S'il existe une contestation quant à la compétence entre le magistrat national et le procureur du Roi l'on s'adressera au procureur général du ressort ou au collège des procureurs généraux ou, le cas échéant, au procureur général délégué par le collège en la matière.

La tâche de coordination du magistrat national implique qu'il doit chercher un accord entre les personnes qui s'estiment compétentes, ceci est un travail de complémentarité, plutôt que de s'imposer et d'avoir une hiérarchie.

Un membre demande si le magistrat national peut, dans le cadre des mesures urgentes, procéder à l'arrestation.

Le ministre répond par l'affirmative, mais il souligne qu'il ne peut pas délivrer de mandat d'arrêt et qu'il ne peut pas davantage solliciter directement le juge d'instruction, pour que mandat d'arrêt soit délivré. Il doit en effet s'adresser pour ce faire directement au procureur du Roi compétent.

Ce membre estime que le critère pour indiquer la cessation des compétences du magistrat national n'est pas assez sûr.

Le ministre maintient le point de vue que cela doit se déterminer in concreto .

Il peut rejoindre l'idée de l'intervenant précédent en ce sens que le procureur du Roi qui est saisi de l'affaire doit le notifier au magistrat national, ou vice versa.

Un autre membre estime que toute la discussion est due au fait que l'on utilise une terminologie (« déterminée »/« bepaald » ) inexacte. Il est question de la « compétence non exercée »/« niet-uitgeoefende bevoegdheid ».

MM. Lallemand et Erdman déposent un amendement rédigé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447-3, amendement nº 50) :

« Au § 3, 2º, de l'article 144bis proposé, remplacer les mots « aussi longtemps que la compétence d'un procureur du Roi n'est pas déterminée » par les mots « aussi longtemps qu'un procureur du Roi n'exerce pas sa compétence légalement déterminée. »

M. Lallemand dépose, à l'amendement nº 50 proposé par M. Erdman et lui-même, un sous-amendement, qui est rédigé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447-3, amendement nº 51) :

« Remplacer les mots « n'exerce pas sa compétence déterminée par la loi » par les mots « légalement compétent n'est pas saisi. »

Justification

Le problème pourrait être le suivant :

­ « l'exercice de la compétence » relève d'une appréciation subjective. Qu'en sera-t-il par exemple si un procureur du Roi est saisi du dossier et qu'un magistrat national estime qu'il n'exerce pourtant pas sa compétence. Pourra-t-il dès lors prendre des mesures contraignantes à l'égard du procureur du Roi.

­ la saisine est un moment objectif plus facile à déterminer.

Un membre estime qu'il est préférable d'écrire « aussi longtemps qu'un procureur du Roi n'exerce pas sa compétence légalement déterminée » que « aussi longtemps qu'un procureur du Roi légalement compétent n'est pas saisi ».

En effet, le terme « saisi » soulève de nouvelles questions : saisi par qui ?, etc.

Un membre estime que le texte proposé à l'amendement nº 50 susmentionné pose un problème d'interprétation, à savoir qu'il peut arriver qu'un procureur du Roi exerce sa fonction et qu'après il ne l'exerce plus. Il faut préciser que le magistrat national n'a plus de compétence dès que le procureur du Roi se manifeste, donc depuis le début.

Un autre membre se dit partisan du texte proposé au moyen de cet amendement, étant donné qu'une fois qu'un procureur du Roi aura exercé ses compétences, les mesures urgentes éventuellement nécessaires seront prises en tout cas, non plus par le magistrat national, mais par le parquet général (voir la compétence de coordination).

M. Vandenberghe dépose, à l'amendement nº 50 de MM. Lallemand et Erdman, un sous-amendement (doc. Sénat, nº 1-447-3, amendement nº 57) rédigé comme suit :

« Au § 3, 2º, de l'article 144bis proposé, remplacer les mots « aussi longtemps que la compétence d'un procureur du Roi n'est pas déterminée » par les mots « aussi longtemps qu'un procureur du Roi n'a pas exercé sa compétence légalement déterminée. »

Les mots « n'a pas exercé » indiquent clairement qu'un premier exercice, l'exercice initial, suffit à transférer définitivement la compétence du magistrat national.

M. Lallemand retire son amendement nº 51.

Un autre membre fait remarquer qu'une mesure d'instruction dans un endroit précis (par exemple : perquisition à Anvers) ne détermine pas nécessairement la compétence territoriale de fond.

Le ministre souligne que le magistrat national n'est pas un procureur du Roi qui exerce son métier partout dans le pays pour quoi que ce soit. Il importe de passer par le procureur du Roi territorialement compétent.

Un membre revient sur sa question concernant le 1º de l'article 144bis , § 3, proposé. Qu'en est-il en cas de conflit de compétence, en cas d'avis contraire du procureur général ou en cas de non-suivi d'un ordre contraignant par le procureur du Roi, parce qu'il estime que cet ordre n'est pas opportun ?

Le ministre répond qu'une hiérarchie est installée entre les différents pouvoirs; le procureur général territorialement compétent a le dernier mot.

Un membre demande ce qui se passe s'il y a plusieurs procureurs généraux compétents.

Le ministre répond que dans ce cas c'est le collège qui est compétent.

Par ailleurs, un membre se demande s'il ne serait pas envisageable d'ajouter à l'article 144bis , § 3, 1º, la mission de coordination de l'exercice de l'action policière, ceci en conformité avec l'amendement nº 18 (doc. Sénat, nº 447/2) concernant le rôle du collège des procureurs généraux (discussion cf. supra).

Le ministre répond que le concept de l'action publique est très large et que l'exercice de l'action publique comprend différentes étapes, à savoir l'information, l'instruction, le règlement de la procédure et l'action policière.

Un membre s'étonne de la formulation suivante du 1º : « après en avoir informé le procureur général territorialement compétent ». En effet, il est fréquent que plusieurs procureurs généraux soient compétents. Qu'en est-il en cas de conflits entre deux procureurs généraux ?

Le ministre répond qu'il faut informer les procureurs généraux compétents. Il renvoie à l'article 143bis , § 2, (art. 2 du projet à l'examen) et à l'amendement nº 17 de MM. Erdman et Coveliers (doc. Sénat, nº 1-447-2), dont il résulte que le collège est chargé de prendre toutes les mesures utiles en vue d'un bon fonctionnement général et d'une coordination.

Le mot « coordination » inclut cette compétence en cas de conflit entre les procureurs généraux.

Un membre se demande s'il ne serait pas utile d'ajouter un § 4 à l'article 144bis proposé, qui stipule explicitement « qu'en cas de conflits avec les personnes citées au § 3, 1º et 2º, le collège des procureurs généraux est saisi sans délai de l'affaire et tranche le conflit par une décision prise ... »

Un autre commissaire estime qu'il n'est pas souhaitable que l'on ajoute ce paragraphe, puisque le Code d'instruction criminelle indique comment il y a lieu de régler la question.

Selon ce membre, il faut que le magistrat national reste compétent tant qu'aucun procureur ne se déclare compétent. L'inverse est beaucoup moins fréquent. Le texte peut dès lors être maintenu, car il convient que dans l'intérêt de l'affaire, quelqu'un, en l'espèce, le magistrat national, reste en tout cas compétent.

Vote sur l'article 44bis, § 3

Article 144bis, § 3

Les amendements nºs 50 et 57 sont adoptés par 8 voix et 2 abstentions.

L'article 144bis , § 3, ainsi amendé est adopté par 8 voix et 1 abstention.

Vote sur l'article 4 (art. 5 du texte adopté).

Cet article est adopté à l'unanimité des 8 membres présents.

Article 4bis

M. Coveliers dépose un amendement rédigé comme suit (doc. Sénat nº 1-447/2, amendement nº 1) :

« Sous le chapitre IV « Dispositions diverses » du projet, insérer un article 4bis (nouveau), libellé comme suit :

« Art. 4bis. ­ L'article 143 du Code judiciaire est complété par un second alinéa, rédigé comme suit :

« Il est nommé pour une période non renouvelable de cinq ans. »

Justification

Il convient, pour plusieurs raisons, que les procureurs généraux soient nommés à temps.

Tout d'abord, on évitera ainsi un certain « encroûtement » dans la fonction et l'intéressé pourra se ressourcer sur le terrain ordinaire après sa durée de fonctions.

Il va de soi que le lien avec les collaborateurs sera plus étroit que quand il s'agit d'un procureur général nommé à vie. Des déclarations de magistrats eux-mêmes confirment effectivement qu'un fossé se creuse progressivement entre certains procureurs généraux et leur parquet général.

Ensuite, on aura ainsi, à intervalles plus rapprochés, la possibilité de nommer chaque fois le candidat le plus approprié du moment.

Afin de prévenir les renominations pro forma de la même personne, l'amendement prévoit que la période de fonctions n'est pas renouvelable. Toutefois, rien n'exclut que le procureur général sortant fasse à nouveau acte de candidature après une période de viduité.

Le ministre déclare qu'il n'est pas d'accord, non pas en raison du contenu de l'amendement, mais en raison de la méthode.

Si l'on rejette le principe du mandat, il faut changer tous les principes. En effet, le mandat du procureur général fait partie d'une discussion globale, pour ce qui est du procureur du Roi, du procureur général, du président du tribunal de première instance, etc.

Un membre rejoint l'idée du ministre et estime qu'il est préférable de prévoir une approche cohérente pour toute la fonction judiciaire.

L'auteur de l'amendement émet des réserves pour ce qui est de la manière dont il votera à propos de la loi en projet s'il n'est pas assuré que les procureurs généraux, dont la position est particulièrement forte, ne seront nommés que pour cinq ans.

Vote sur l'article 4bis

L'amendement nº 1 est rejeté par 7 voix contre 1 et 2 abstentions.

Article 5 (article 6 du texte adopté)

Le Gouvernement dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 14) :

« Remplacer l'article 5 du projet par la disposition suivante :

« Il est inséré dans l'article 185 du Code judiciaire un deuxième alinéa rédigé comme suit :

« Le Roi peut également, conformément aux dispositions de l'alinéa précédent, créer des grades de qualification particulière afin d'assurer le secrétariat du collège des procureurs généraux et celui des magistrats nationaux. Les fonctions exercées dans ces secrétariats sont considérées comme des fonctions exercées dans un parquet. »

Justification

Le texte contenu dans le projet de loi à propos de l'article 185 du Code judiciaire est celui proposé par le Conseil d'État dans son avis. Toutefois, ce texte est redondant par rapport au premier alinéa de la même disposition et il ne tient pas compte par ailleurs de la modification apportée à ce premier alinéa dans le cadre des propositions de loi déposées par les sénateurs Erdman et Vandenberghe. Cet amendement propose un texte adapté en conséquence.

Un membre demande si le secrétariat du collège et le secrétariat des magistrats nationaux ne pourraient pas être le même.

Le ministre préfère que non, étant donné que les finalités sont différentes.

Un autre membre désire poser une question théorique. Selon lui, l'article 5 instaure effectivement des fonctions judiciaires. S'il s'agit d'employés, il est incontestable que leur direction est judiciaire. Ces fonctions judiciaires ne peuvent pas être réglementées par arrêté royal, ni sur le plan du traitement, ni sur celui de la nomination ou du cadre.

D'après le ministre, le secrétariat est permanent, et non détaché, et l'objectif n'est pas de créer des fonctions judiciaires.

Le préopinant propose alors de préciser qu'il s'agit de grades « administratifs » particuliers.

L'article 185 traite, en effet, du personnel des greffes et parquets, dont le cadre a été modifié récemment par la loi.

Mme Milquet propose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 46) :

« Remplacer cet article par ce qui suit :

« Art. 5. ­ Ajouter, dans le titre IV du Code judiciaire, un chapitre IV intitulé « Du service permanent du collège des procureurs généraux et des magistrats nationaux, et contenant un article 185bis, rédigé comme suit :

« Art. 185bis. ­ § 1er . Pour assister le collège des procureurs généraux visé à l'article 143bis et les magistrats nationaux visés à l'article 144bis dans l'exercice de leurs missions, il est créé un « service permanent du collège des procureurs généraux et des magistrats nationaux.

§ 2. Ce service est dirigé par un directeur désigné par le ministre soit parmi les magistrats du ministère public, soit parmi les personnes titulaires d'une licence en droit, ayant au moins 5 années d'expérience dans le domaine du droit pénal et ayant réussi un examen dont les modalités sont fixées par arrêté royal. Le directeur assiste aux réunions du collège.

§ 3. Le service est composé des membres du ministère public visés à l'article 143bis, § 4, et de titulaires d'une licence en droit désignés par le ministre, ayant réussi un examen dont les modalités sont fixées par arrêté royal.

§ 4. Le ministre de la Justice crée des grades de qualification particulière, dont il fixe le nombre d'emplois correspondants, le traitement et le statut, afin d'assurer ce service permanent. Les fonctions exercées dans ce service sont considérées comme des fonctions exercées dans un parquet. »

Justification

Afin d'assurer une aide permanente réelle du collège des procureurs généraux et des magistrats nationaux, il est indispensable de prévoir plus précisément l'existence d'une structure permanente composée de personnes compétentes dont une partie provient des parquets d'appel et la présence d'un directeur de ce service qui aura un rôle différent d'un simple secrétariat.

Mme Milquet explique qu'il importe de consacrer la création d'un service permanent du collège des procureurs généraux et des magistrats nationaux dans le Code judiciaire. Le terme « service permanent » est moins réducteur que le terme « secrétariat ». Il ne lui semble pas indispensable de créer deux services permanents distincts. Le service serait dirigé par un directeur, qui peut être un magistrat détaché, ce qui lui donnerait plus d'autorité morale, selon Mme Milquet, ou un fonctionnaire. L'amendement laisse l'option au ministre.

Un commissaire estime que l'on ne peut opter simultanément pour un secrétariat et un service permanent. L'amendement discuté n'est est au fond pas un amendement mais une option tout à fait différente.

Il lui semble être une pure reprise, sous une autre forme, de l'amendement de Mme Milquet insérant un article 2bis (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 25).

En outre, il estime qu'il n'appartient pas au ministre de choisir la composition du service permanent; le Parlement doit prévoir dans la loi quel sera l'encadrement ou le support du collège des procureurs généraux.

Vote sur l'article 5 (article 6 du texte adopté)

L'amendement nº 46 de Mme Milquet est rejeté par 5 voix contre 1 et 1 abstention.

L'amendement nº 14 du Gouvernement et l'article 5, ainsi amendé, sont adoptés par 7 voix contre 1 et 1 abstention.

Le ministre renvoie à la discussion de l'article 2, § 8, (voir supra ) en ce qui concerne l'élaboration d'un secrétariat permanent (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 54).

Article 6

Le Gouvernement dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 36) :

« À cet article, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux. »

La commission n'émet aucune observation.

Dans le texte néerlandais le mot « in » est remplacé par le mot « te » .

Il faut donc lire « De zetel van het college van procureurs-generaal en van de nationaal magistraten bevindt zich te Brussel. »

Vote sur l'article 6 (article 7 du texte adopté)

Cet article, ainsi amendé et corrigé, est adopté par 7 voix et 1 abstention.

Article 7 (article 8 du texte adopté)

Le Gouvernement dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447-2, amendement nº 37) :

« À l'article 327ter proposé, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux. »

Un membre demande ce qu'il faut entendre exactement par « Bruxelles »; s'agit-il de la ville ou de l'arrondissement ?

Le ministre répond qu'il s'agit de la ville de Bruxelles.

Vote sur l'article 7 (article 8 du texte adopté)

Cet article, ainsi amendé, est adopté par 7 voix et 1 abstention.

Article 8 (article 9 du texte adopté)

Le Gouvernement dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447-2, amendement nº 38) :

« À l'article 355bis proposé, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux. »

La commission n'émet aucune observation.

Vote sur l'article 8 (article 9 du texte adopté)

Cet article, ainsi amendé, est adopté par 7 voix et 1 abstention.

Article 9 (article 10 du texte adopté)

Le Gouvernement dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447-2, amendement nº 39) :

« À cet article, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux. »

La commission n'émet aucune observation.

Vote sur l'article 9 (article 10 du texte adopté)

Cet article, ainsi amendé, est adopté par 7 voix et 1 abstention.

Article 10 (article 11 du texte adopté)

Le Gouvernement dépose les amendements suivants (doc., Sénat, nº 1-447/2, amendements nºs 13 et 40) :

« À cet article, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux. »

« Au premier alinéa de l'article 47bis proposé, remplacer les mots « dans le cadre de l'exercice de l'action publique » par les mots « en vue de l'exercice de l'action publique. »

Justification

Ces amendements visent à aligner le texte français de l'article 144bis, § 3, 2º, du Code judiciaire, et le texte de l'article 47bis du Code d'instruction criminelle sur le texte néerlandais de l'article 144bis, § 3, 2º, du Code judiciaire. Les termes « en vue de l'exercice de l'action publique » sont plus judicieux, dans la mesure où l'intervention du magistrat national qui est ici visée se situe en amont de l'exercice de l'action publique.

Un membre souligne avant tout qu'il convient de faire, à cet article, la même adaptation qu'à l'article 144bis, § 3, 2º, proposé, dont il a été question ci-dessus. Le mot « déterminée » doit être précisé.

Il dépose, à cet effet, un amendement (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 52), libellé comme suit :

« À l'alinéa 1er de l'article 47bis proposé, remplacer les mots « aussi longtemps que la compétence d'un procureur du Roi n'est pas déterminée » par les mots « aussi longtemps qu'un procureur du Roi n'exerce pas sa compétence légalement déterminée. »

M. Vandenberghe dépose à l'amendement nº 52 de M. Erdman un sous-amendement rédigé comme suit (doc., Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 58) :

« À l'alinéa 1er de l'article 47bis proposé, remplacer les mots « aussi longtemps que la compétence d'un procureur du Roi n'est pas déterminée » par les mots « aussi longtemps qu'un procureur du Roi n'a pas sa compétence légalement déterminée. »

M. Erdman comprend que le magistrat national a la même compétence que le procureur du Roi.

Dans ce cadre, il renvoie à la discussion générale, au cours de laquelle sa question explicite relative à la possibilité, pour le magistrat national, d'accomplir des actes d'instruction judiciaire a reçu une réponse négative, à l'exception de l'hypothèse du flagrant délit.

M. Erdman peut difficilement tirer la même conclusion de cet article. Il propose, dès lors, de rédiger le texte plus clairement.

Il dépose un amendement, libellé comme suit (doc., Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 53) :

« Au deuxième alinéa de l'article 47bis proposé, remplacer les mots « Dans l'exercice ... et » par les mots « Dans l'exercice des compétences visées à l'alinéa 1er , les magistrats nationaux disposent de tous les pouvoirs que la loi confère au procureur du Roi; dans le cadre de ceux-ci, ils ... ».

Un membre demande s'il est nécessaire de faire la transposition de la disposition de l'article 144bis, § 3, 1º, alors que l'article renvoie explicitement à cet article. Pourquoi cette reprise ?

Le ministre précise que le but est purement pédagogique.

Un autre membre estime que la mention dans le Code d'instruction criminelle n'est pas superflue, si l'on considère les chapitres. Il existe, en effet, un chapitre relatif aux procureurs du Roi et à leurs substituts et une section sur la façon d'agir des procureurs du Roi dans l'exercice de leurs fonctions. Si l'on ne définit pas clairement ici les magistrats nationaux et leurs compétences, un conflit de compétences risque de se produire. En effet, les procureurs du Roi pourraient ne se baser, pour leurs compétences, que sur le Code d'instruction criminelle et prétendre que le Code judiciaire ne règle que la structure des magistrats.

Vote sur l'article 10 (artikel 11 du texte adopté)

Les amendements nºs 52 et 53 de M. Erdman et le sous-amendement nº 58 de M. Vandenberghe sont adoptés à l'unanimité des 8 membres présents.

L'article ainsi amendé est adopté par 7 voix et 1 abstention.

Article 11 (article 12 du texte adopté)

Le Gouvernement présente les amendements suivants (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendements nºs 15 et 41) :

« À cet article, remplacer les mots « magistrats fédéraux » par les mots « magistrats nationaux. »

Cet amendement ne donne lieu à aucune observation.

« À l'article 2 proposé de la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire, remplacer les mots « jusqu'à 5 » par les mots « jusqu'à un maximum de 5. »

Justification

Le but de la modification proposée par cet amendement est de rendre clair le fait que le nombre de magistrats nationaux pourra être porté par le Roi à quatre ou à cinq.

Un membre demande quelle est la ratio legis de la mention explicite du nombre des magistrats nationaux de sa limitation à 5.

Le ministre précise que cette limitation est précise parce qu'un nombre plus élevé de magistrats nous situerait dans une autre philosophie, une nouvelle structure, avec d'autres éléments d'autorité; on aurait alors à faire à un parquet national.

Les derniers mots du texte français sont remplacés par ce qui suit : « jusqu'à 5 au maximum ».

Vote sur l'article 11 (article 12 du texte adopté)

L'article ainsi amendé est adopté par 7 voix et 1 abstention.

Article 12 (article 13 du texte adopté)

Le Gouvernement présente un amendement libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 16) :

« Compléter le § 4, alinéa premier, de l'article 43bis proposé, de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire, par la disposition suivante :

« Ces nombres sont portés à deux si le nombre des magistrats nationaux est augmenté par arrêté royal conformément à l'article 2 de la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire. »

Justification

Cet amendement vise à préserver autant que possible l'équilibre linguistique entre les magistrats nationaux, dans l'hypothèse où le nombre de ceux-ci serait porté par le Roi à quatre ou cinq. Dans ce cas, le texte proposé prévoit que le nombre minimal de magistrats de chaque rôle linguistique sera de deux.

M. Desmedt dépose un amendement, libellé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 7) :

« Compléter cet article par la phrase suivante :

« Si le nombre de magistrats nationaux est porté à cinq, au moins deux magistrats nationaux doivent justifier par leur diplôme avoir subi les examens du doctorat ou de licencié en droit en langue française et au moins deux magistrats nationaux doivent justifier par leur diplôme qu'ils ont subi ces examens en langue néerlandaise. »

Justification

L'article 12 précise qu'au moins un magistrat national doit être du rôle français et un du rôle néerlandais.

Cette exigence est normale s'il n'y a que 3 magistrats nationaux. Cependant, si leur nombre est porté à 5 comme le permet l'article 11, il est logique que chaque rôle linguistique en compte au moins 2.

M. Desmedt retire son amendement, étant donné que l'amendement du Gouvernement répond aux mêmes besoins.

Un commissaire demande que l'on précise si « justifier de la connaissance de l'autre langue » signifie bien réussir l'examen linguistique pour la magistrature.

Le ministre répond par l'affirmative.

Le Gouvernement dépose un amendement rédigé comme suit (doc. Sénat, nº 1-447/2, amendement nº 42) :

« À cet article, remplacer les mots « magistrat fédéral » par les mots « magistrat national. »

Cet amendement ne donne lieu à aucune observation.

Vote sur l'article 12 (article 13 du texte adopté)

L'article ainsi amendé est adopté par 7 voix contre 1.

Article 13 (article 14 du texte adopté)

Le Gouvernement dépose un amendement suivant (doc. Sénat, nº 1-447/3, amendement nº 56), libellé comme suit :

« Insérer, à la place de l'article 13 qui devient l'article 14, un article 13 nouveau rédigé comme suit :

« Le collège des procureurs généraux est présidé par le procureur général le plus ancien en rang, lors de l'année judiciaire pendant laquelle le collège des procureurs généraux est installé. »

Cet amendement vise à insérer la disposition transitoire, supprimée à l'article 2, § 6 (devenue art. 2, § 8).

Cet amendement est adopté par 7 voix et 1 abstention.

Article 14 (article 15 du texte adopté)

Aucun amendement n'a été déposé.

Un commissaire précise que la loi entre en vigueur au plus tard six mois accomplis après sa publication au Moniteur belge .

Cet article est adopté à l'unanimité des 8 membres présents.

IV. VOTE FINAL

L'ensemble du projet de loi amendé a été adopté par 7 voix et 1 abstention.

Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 10 membres présents.

Les rapporteurs,
Hugo COVELIERS.
Le Président,
R. LALLEMAND.

Hugo VANDENBERGHE.


Projet de loi Texte adopté par la Commission
de la Justice du Sénat
Projet de loi instituant le collège des procureurs généraux et créant la fonction de magistrat fédéral Projet de loi instituant le collège des procureurs généraux et créant la fonction de magistrat national
(Nouvel intitulé)
Article 1er Article 1er
La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution. La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution.
CHAPITRE Ier CHAPITRE Ier
Le collège des procureurs généraux Du collège des procureurs généraux
Art. 2 Art. 2
Un article 143bis , rédigé comme suit, est inséré dans le Code judiciaire: Un article 143bis, rédigé comme suit, est inséré dans le Code judiciaire :
« Art. 143bis . § 1er . Les procureurs généraux près les cours d'appel forment ensemble un collège, appelé collège des procureurs généraux, qui est placé sous l'autorité du ministre de la Justice. La compétence du collège s'étend à l'ensemble du territoire du Royaume et ses décisions engagent les procureurs généraux près les cours d'appel et tous les membres du ministère public placés sous leur surveillance et leur direction. « Art. 143bis. ­ § 1er . Les procureurs généraux près les cours d'appel forment ensemble un collège, appelé collège des procureurs généraux, qui est placé sous l'autorité du ministre de la Justice. La compétence du collège s'étend à l'ensemble du territoire du Royaume et ses décisions engagent les procureurs généraux près les cours d'appel et tous les membres du ministère public placés sous leur surveillance et leur direction.
§ 2. Le collège des procureurs généraux est chargé: § 2. Le collège des procureurs généraux décide, par consensus, de toutes les mesures utiles en vue :
1º de la coordination et du développement cohérent de la politique criminelle, telle qu'elle est visée à l'article 143ter ; de la mise en oeuvre cohérente et de la coordination [...] de la politique criminelle déterminée par les directives visées à l'article 143 ter, et dans le respect de leur finalité ;
2º de prendre toutes les mesures utiles en vue d'un bon fonctionnement général du ministère public auprès des cours et tribunaux; 2º [...] du bon fonctionnement général et de la coordination du ministère public [...].
3º d'informer le ministre de la Justice et de lui donner avis, d'initiative ou à sa demande, sur toute question en rapport avec les missions du ministère public. [...] .
Si aucun consensus ne peut être dégagé au sein du collège, et si l'exécution des directives du ministre relatives à la politique criminelle est ainsi mise en péril, le ministre de la Justice prend les mesures nécessaires pour assurer leur application.
§ 3. Le collège des procureurs généraux statue par consensus. Si aucun consensus ne peut être dégagé au sein du collège concernant les compétences visées au § 2, 1º et 2º, et si l'exécution des lignes directrices du ministre de la Justice en matière de politique criminelle est ainsi mise en péril, le ministre de la Justice prendra les mesures nécessaires. lui donner avis, d'initiative ou à sa demande, sur toute question en rapport avec les missions du ministère public.
À defaut de consensus, les avis expriment les différentes opinions exposées au sein du collège.
§ 4. Dans le cadre de l'exécution de ses missions, le collège peut charger des membres du ministère public près les cours d'appel de fonctions de soutien. § 4. Pour l'exécution de ses missions, le collège peut requérir l'aide de membres du ministère public près les cours d'appel [...] .
§ 5. Le collège des procureurs généraux se réunit au moins une fois par mois, durant l'année judiciaire. Il peut se réunir de sa propre initiative ou à la demande du ministre de la Justice. § 5. Le collège des procureurs généraux se réunit au moins une fois par mois [...] , de sa propre initiative ou à la demande du ministre de la Justice.
Le ministre de la Justice, ou en cas d'empêchement, son délégué, assiste aux réunions du collège lorsqu'elles portent sur des compétences visées à l'article 143ter et lorsque le collège se réunit à sa demande dans le cadre de l'exercice des compétences mentionnées au § 2, 1º et 2º. Le ministre de la Justice, ou en cas d'empêchement, son délégué, assiste aux réunions du collège lorsqu'elles portent sur des compétences visées à l'article 143ter et lorsque le collège se réunit à sa demande dans le cadre de l'exercice des compétences mentionnées au § 2 [...] .
Le ministre de la Justice préside s'il est présent lors d'une réunion du collège. Le ministre préside [...] les réunions du collège auxquelles il assiste.
Dans le cadre de l'exercice des compétences mentionnées au § 2 et à l'article 143ter , et après concertation avec le collège des procureurs généraux, le Roi peut confier des tâches spécifiques aux membres du collège. Pour l'exercice des compétences [...] du collège, et après concertation avec celui-ci, le Roi peut confier à chacun de ses membres des tâches spécifiques.
§ 6. Lors de l'année judiciaire pendant laquelle le collège est installé, la présidence de celui-ci est assurée par le procureur général le plus ancien en rang. Ensuite, la présidence est assurée, à tour de rôle, pour chaque année judiciaire, successivement par les procureurs généraux près les cours d'appel d'Anvers, de Mons, de Bruxelles, de Gand et de Liège. Avec l'accord de tous les membres du collège, il peut être dérogé à l'alternance entre procureurs généraux appartenant à un même régime linguistique.
Le procureur général qui assume la présidence fixe l'ordre du jour et l'organisation des réunions. Il dirige le secrétariat du collège des procureurs généraux. Il transmet les ordres du jour et les rapports des réunions du collège des procureurs généraux au ministre de la Justice, aux membres du collège, aux procureurs du Roi, aux auditeurs du travail et aux magistrats fédéraux.
§ 6. [...]
Le Roi règle les modalités de collaboration entre le collège et les services placés sous l'autorité du ministre de la Justice.
§ 7. Le collège fait annuellement rapport de ses activités au ministre de la Justice. Ce rapport contient le bilan de la politique des recherches et des poursuites pour l'année écoulée et les priorités pour l'année à venir. Le rapport est communiqué aux Chambres par le ministre de la Justice. tion de ses activités, l'analyse et l'évaluation de la politique des recherches et des poursuites pour l'année écoulée et les priorités pour l'année à venir.
Le rapport est communiqué aux Chambres législatives par le ministre de la Justice et est rendu public.
§ 8. En cas d'absence ou d'empêchement d'un membre du collège des procureurs généraux, il est remplacé conformément à l'article 324, alinéa 1.
Sans préjudice de l'alinéa précédent, en cas d'absence ou d'empêchement du président, la présidence est assumée par le procureur général le plus ancien en rang du même régime linguistique.
§ 8. [...]
La présidence est assurée, à tour de rôle, pour chaque année judiciaire, successivement par les procureurs près les cours d'appel d'Anvers, de Mons, de Bruxelles, de Gand et de Liège. Avec accord de tous les membres du collège, il peut être dérogé à l'alternance entre procureurs généraux appartenant à un même régime linguistique.
Le procureur général qui assume la présidence fixe l'ordre du jour et l'organisation des réunions. Sous son autorité, le secrétariat est dirigé par un directeur qui participe à toutes les réunions du collège. Celui-ci transmet les ordres du jour et les rapports des réunions du collège des procureurs généraux au ministre de la Justice, aux membres du collège, aux procureurs du Roi, aux auditeurs du travail et aux magistrats nationaux.
§ 9. Le Roi règle le mode de collaboration directe entre le collège et les services sous l'autorité du ministre de la Justice. § 9. [...]
En cas d'absence ou d'empêchement d'un membre du collège des procureurs généraux, il est remplacé conformément à l'article 324, alinéa 1er .
Sans préjudice de l'alinéa précédent, en cas d'absence ou d'empêchement du président, la présidence est assumée par le procureur général le plus ancien en rang du même régime linguistique. »
CHAPITRE II CHAPITRE II
La politique criminelle De la politique criminelle
Art. 3 Art. 3
Un article 143ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code: Un article 143ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 143 ter . Le ministre de la Justice soumet à la discussion du collège des procureurs généraux les projets de lignes directrices de politique criminelle, en ce compris les lignes directrices en matière de politique de recherche et de poursuite. Il arrête les lignes directrices. Ces lignes directrices sont contraignantes pour tous les membres du ministère public. Les procureurs généraux près les cours d'appel veillent à l'exécution de ces lignes directrices au sein de leur ressort. » « Art. 143ter. ­ Le ministre de la Justice [...] arrête les directives de politique criminelle, y compris en matière de politique de recherche et de poursuite après avoir pris l'avis du collège des procureurs généraux.
Ces directives sont contraignantes pour tous les membres du ministère public.
Les procureurs généraux près les cours d'appel veillent à l'exécution de ces directives au sein de leur ressort. »
Art. 4
§ 1er . Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143 bis et 143 ter , » sont ajoutés au début de l'article 398 du même Code.
§ 2. Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143 bis et 143 ter , » sont ajoutés au début de l'article 399, premier alinéa, du même Code.
§ 3. Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143 bis et 143 ter , » sont ajoutés au début de l'article 399, deuxième alinéa, du même Code.
§ 4. Les mots « Sans préjudice de l'application des articles 143 bis et 143 ter , » sont ajoutés au début de l'article 400 du même Code.
CHAPITRE III CHAPITRE III
Le magistrat fédéral Du magistrat national
Art. 4 Art. 5
Un article 144bis , rédigé comme suit, est inséré dans le même code: Un article 144bis , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 144bis . § 1. Le collège des procureurs généraux est assisté par des magistrats fédéraux dont la mission s'étend à l'ensemble du territoire du Royaume. « Art. 144bis . ­ § 1er . Le collège des procureurs généraux est assisté par des magistrats nationaux dont la mission s'étend à l'ensemble du territoire du Royaume.
§ 2. Les magistrats fédéraux sont désignés par le Roi, sur proposition du ministre de la Justice et sur avis du collège des procureurs généraux, parmi les membres du ministère public auprès des cours d'appel et des tribunaux de première instance ayant exercé des fonctions de magistrat du ministère public ou de juge pendant au moins cinq ans. Leur désignation est faite pour un terme de cinq ans, renouvelable. § 2. Les magistrats nationaux sont désignés par le Roi, sur proposition du ministre de la Justice et sur avis du collège des procureurs généraux, parmi les membres du ministère public [...] ayant exercé des fonctions de magistrat du ministère public ou de juge d'instruction pendant au moins cinq ans. Ils sont désignés pour un terme de cinq ans, renouvelable, au maximum deux fois.
§ 3. Les magistrats fédéraux sont placés sous l'autorité du collège des procureurs généraux. Ils sont chargés, sous la surveillance et la direction du membre du collège que le Roi aura désigné à cette fin, après concertation avec le collège des procureurs généraux: chargés, sous la surveillance et la direction du membre du collège que le Roi aura désigné à cette fin après concertation avec le collège des procureurs généraux :
1º d'assurer la coordination de l'exercice de l'action publique et de faciliter la coopération internationale en concertation avec un ou plusieurs procureurs du Roi. Si nécessaire, ils peuvent donner à cet effet des instructions contraignantes à un ou plusieurs procureurs du Roi, après en avoir informé le procureur général territorialement compétent et sauf décision contraire de sa part; 1º d'assurer la coordination de l'exercice de l'action publique et de faciliter la coopération internationale en concertation avec un ou plusieurs procureurs du Roi. Si nécessaire, ils peuvent donner à cet effet des instructions contraignantes à un ou plusieurs procureurs du Roi, après en avoir informé le procureur général territorialement compétent et sauf décision contraire de sa part;
2º de prendre toutes les mesures urgentes qui sont nécessaires dans le cadre de l'exercice de l'action publique, aussi longtemps que la compétence d'un procureur du Roi n'est pas déterminée. Ces mesures sont contraignantes pour le procureur du Roi. 2º de prendre toutes les mesures urgentes qui sont nécessaires [...] en vue de l'exercice de l'action publique aussi longtemps qu'un procureur du Roi n'a pas exercé sa compétence légalement déterminée. Ces mesures sont contraignantes pour le procureur du Roi. »
CHAPITRE IV CHAPITRE IV
Dispositions diverses Dispositions diverses
Art. 5 Art. 6
Il est inséré dans l'article 185 du Code judiciaire un deuxième alinéa rédigé comme suit: Il est inséré dans l'article 185 du même Code un deuxième alinéa, rédigé comme suit :
« Il crée des grades de qualification particulière, dont il fixe le nombre d'emplois correspondants, le traitement et le statut, afin d'assurer le secrétariat du collège des procureurs généraux et celui des magistrats fédéraux. Les fonctions exercées dans ces secrétariats sont considérées comme des fonctions exercées dans un parquet. » « Le Roi peut également, conformément aux dispositions de l'alinéa précédent , créer des grades de qualification particulière afin d'assurer le secrétariat du collège des procureurs généraux et celui des magistrats nationaux . Les fonctions exercées dans ces secrétariats sont considérées comme des fonctions exercées dans un parquet. »
Art. 6 Art. 7
L'article 186 du même Code modifié par les lois des 7 juillet 1969 et 11 juillet 1994, est complété par un nouvel alinéa suivant: L'article 186 du même Code, modifié par les lois des 7 juillet 1969 et 11 juillet 1994, est complété par un nouvel alinéa rédigé comme suit :
« Le siège du collège des procureurs généraux et des magistrats fédéraux est fixé à Bruxelles ». « Le siège du collège des procureurs généraux et des magistrats nationaux est fixé à Bruxelles. »
Art. 7 Art. 8
Un article 327ter , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code: Un article 327ter, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 327ter . Les dispositions des articles 327, alinéa 5, et 327bis , alinéa 4, sont applicables aux magistrats fédéraux. » « Art. 327ter. ­ Les dispositions des articles 327, alinéa 5, et 327bis, alinéa 4, sont applicables aux magistrats nationaux . »
Art. 8 Art. 9
Un article 355bis , rédigé comme suit, est inséré dans le même Code: Un article 355bis, rédigé comme suit, est inséré dans le même Code :
« Art. 355bis . Les traitements des magistrats fédéraux sont les mêmes que ceux fixés par l'article 355 pour les avocats généraux auprès des cours d'appel. » « Art. 355bis. ­ Les traitements des magistrats nationaux sont les mêmes que ceux fixés par l'article 355 pour les avocats généraux auprès des cours d'appel. »
Art. 9 Art. 10
A l'article 9 du Code d'instruction criminelle, modifié par les lois des 10 juillet 1967, 10 octobre 1967 et 11 février 1986, les mots « par les magistrats fédéraux, » sont ajoutés après les mots « les procureurs du Roi et leurs substituts ». À l'article 9 du Code d'instruction criminelle, modifié par les lois des 10 juillet 1967, 10 octobre 1967 et 11 février 1986, les mots « par les magistrats nationaux , » sont ajoutés après les mots « les procureurs du Roi et leurs substituts ».
Art. 10 Art. 11
Dans le Code d'instruction criminelle, livre 1er , est inséré un chapitre IVbis , intitulé « Des magistrats fédéraux », comprenant un article, 47bis rédigé comme suit: Dans le même Code, livre 1er , est inséré un chapitre IVbis , intitulé « Des magistrats nationaux », comprenant un article 47bis , rédigé comme suit :
« Art. 47bis . Sans préjudice de l'article 144 bis , § 3, 1º du Code judiciaire, les magistrats fédéraux sont chargés de prendre toutes les mesures urgentes qui sont nécessaires dans le cadre de l'exercice de l'action publique aussi longtemps que la compétence d'un procureur du Roi n'est pas déterminée. « Art. 47bis . ­ Sans préjudice de l'article 144bis , § 3, 1º du Code judiciaire, les magistrats nationaux sont chargés de prendre toutes les mesures urgentes qui sont nécessaires en vue de l'exercice de l'action publique aussi longtemps qu'un procureur du Roi n'a pas exercé sa compétence légalement déterminée .
Dans l'exercice des compétences visées à l'alinéa 1er , les magistrats fédéraux disposent de tous les pouvoirs du procureur du Roi et peuvent procéder ou faire procéder à tous actes d'information ou d'instruction relevant de leurs attributions sur l'ensemble du territoire du Royaume. » Dans l'exercice des compétences visées à l'alinéa 1er , les magistrats nationaux disposent de tous les pouvoirs que la loi confère au procureur du Roi. Dans le cadre de ceux-ci, ils peuvent procéder ou faire procéder à tous actes d'information ou d'instruction relevant de leurs attributions sur l'ensemble du territoire du Royaume. »
Art. 11 Art. 12
L'article 2 de la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire, abrogé par la loi du 10 novembre 1970, est rétabli dans la rédaction suivante: L'article 2 de la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire, abrogé par la loi du 10 novembre 1970, est rétabli dans la rédaction suivante :
« Le nombre de magistrats fédéraux est fixé à 3 et peut être porté jusqu'à 5 par arrêté royal délibéré en conseil des ministres. » « Le nombre des magistrats nationaux est fixé à 3 et peut être porté jusqu'à un maximum de 5 par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres. »
Art. 12 Art. 13
L'article 43bis , § 4, alinéa premier de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire inséré par la loi du 10 octobre 1967 et modifié par la loi du 26 juin 1974, est remplacé par la disposition suivante: L'article 43bis , § 4, alinéa premier, de la loi du 15 juin 1935 concernant l'emploi des langues en matière judiciaire inséré par la loi du 10 octobre 1967 et modifié par la loi du 26 juin 1974, est remplacé par la disposition suivante :
« Nul ne peut être nommé procureur général près la cour d'appel de Bruxelles ou magistrat fédéral, s'il ne justifie de la connaissance de la langue française et de la langue néerlandaise. Un magistrat fédéral au moins doit justifier par son diplôme avoir subi les examens du doctorat ou de licencié en droit en langue française et un magistrat fédéral au moins doit justifier par son diplôme avoir subi ces examens en langue néerlandaise. » « Nul ne peut être nommé procureur général près la cour d'appel de Bruxelles ou magistrat national , s'il ne justifie de la connaissance de la langue française et de la langue néerlandaise. Un magistrat national au moins doit justifier par son diplôme d'avoir subi les examens de docteur ou de licencié en droit en langue française et un magistrat national au moins doit justifier par son diplôme d'avoir subi ces examens en langue néerlandaise.
Ces nombres sont portés à deux si le nombre des magistrats nationaux est augmenté par arrêté royal conformément à l'article 2 de la loi du 3 avril 1953 d'organisation judiciaire. »
Art. 14
Le collège des procureurs généraux est présidé par le procureur général le plus ancien en rang, lors de l'année judiciaire pendant laquelle le collège des procureurs généraux est installé.
Art. 13 Art. 15
La présente loi entre en vigueur à la date fixée par le Roi et au plus tard six mois après sa publication au Moniteur belge . La présente loi entre en vigueur à la date fixée par le Roi et au plus tard six mois après sa publication au Moniteur belge.