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12 DÉCEMBRE 2013
I. INTRODUCTION
Dans le cadre de la troisième phase de la Sixième Réforme de l'État, dix propositions ont été déposées à la Chambre des représentants le 24 juillet 2013 (doc. Chambre, nos 53-2965/1 à 53-2974/1).
Ces propositions ont été subdivisées en quatre clusters en vue de leur examen:
1. élargissement de l'autonomie financière des entités fédérées: la proposition de loi spéciale portant réforme du financement des communautés et des régions, élargissement de l'autonomie fiscale des régions et financement des nouvelles compétences (doc. Chambre, nº 53-2974/1);
2. mécanisme de responsabilisation climat et conflits d'intérêts: (i) la proposition de loi relative au mécanisme de responsabilisation climat (doc. Chambre, nº 53-2965/1) et (ii) la proposition de révision de l'article 143 de la Constitution (doc. Chambre, nº 53-2967/1);
3. consultations populaires régionales: (i) la proposition d'insertion d'un article 39bis dans la Constitution (doc. Chambre, nº 53-2966/1), (ii) la proposition de loi spéciale portant modification de la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour constitutionnelle et de la loi spéciale du 12 janvier 1989 relative aux Institutions bruxelloises, en vue de permettre l'organisation de consultations populaires régionales (doc. Chambre, nº 53-2968/1) et (iii) la proposition de révision de l'article 142 de la Constitution (doc. Chambre, nº 53-2971/1) (1) ;
4. dépenses électorales: quatre propositions de révision de la Constitution et modifiant des lois spéciales et des lois ordinaires (doc. Chambre, nos 53-2969/1, 53-2970/1, 53-2972/1 et 53-2973/1).
Après avoir été amendée par la commission de révision de la Constitution et de la réforme des institutions de la Chambre, la proposition de loi spéciale portant réforme du financement des communautés et des régions, élargissement de l'autonomie fiscale des régions et financement des nouvelles compétences a été adoptée le 28 novembre 2013 par l'assemblée plénière de la Chambre des représentants par 105 voix contre 33 (2) . Le 29 novembre, le projet a été transmis au Sénat qui l'a envoyé à la commission des Affaires institutionnelles pour examen.
Cette dernière a décidé, lors de sa réunion introductive du 2 décembre 2013, de reprendre la subdivision en clusters appliquée par la Chambre.
La commission des Affaires institutionnelles a ensuite examiné le projet de loi spéciale portant réforme du financement des communautés et des régions, élargissement de l'autonomie fiscale des régions et financement des nouvelles compétences (doc. Sénat, nº 5-2369/1) au cours de ses réunions des 2, 3 et 4 décembre 2013.
Lors de chacune de ces réunions, le gouvernement était représenté par M. Melchior Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles.
Le présent rapport a été soumis à l'approbation de la commission le 12 décembre 2013.
II. PROCÉDURE
1. Désignation des rapporteurs
M. Mahoux propose de désigner les commissaires suivants comme rapporteurs:
— cluster 1: MM. Anciaux et Laaouej;
— cluster 2: Mme Taelman et M. Deprez;
— cluster 3: MM. Beke et Delpérée;
— cluster 4: M. Anciaux et Mme Khattabi.
M. Laeremans propose une répartition plus équilibrée en ce qui concerne la désignation des rapporteurs. Vu l'importance du projet de loi spéciale modifiant la loi spéciale de financement (doc. Sénat, nº 5-2369/1), il insiste pour que l'on désigne aussi, pour ce projet, au moins un rapporteur issu de l'opposition, par exemple Mme Maes ou M. Vanlouwe.
Mme Maes se rallie à cette proposition et propose de désigner M. Vanlouwe et M. Laeremans comme rapporteurs, respectivement pour le cluster 1 et pour un des trois autres clusters.
La proposition de M. Mahoux est adoptée par 10 voix contre 3.
2. Auditions
M. Laeremans propose que, préalablement à la discussion générale, on procède à des auditions pour le cluster 1, afin d'entendre plusieurs universitaires qui ont analysé l'impact de la réforme proposée sur le fédéralisme budgétaire. Il s'agit des membres de deux groupes de chercheurs de l'Université de Namur et de l'ULB qui ont réalisé une étude intitulée « La 6e réforme du fédéralisme belge: Impact budgétaire du transfert de compétences et des nouvelles modalités de financement » (http://www.unamur.be/eco/economie/cerpe/cahiers/cahiers/cahier65), ainsi que du professeur André Decoster (KU Leuven) et de M. Geert Jennes (KU Leuven — Vives), qui ont tous deux de nombreuses publications à leur actif sur le thème précité.
Mme Maes soutient cette proposition.
Après un bref échange de vues, la proposition prévoyant d'organiser des auditions est rejetée par 9 voix contre 4.
III. PRÉSENTATION DU PROJET DE LOI SPÉCIALE PORTANT RÉFORME DU FINANCEMENT DES COMMUNAUTÉS ET DES RÉGIONS, ÉLARGISSEMENT DE L'AUTONOMIE FISCALE DES RÉGIONS ET FINANCEMENT DES NOUVELLES COMPÉTENCES
Exposé de M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles
Dans le cadre des négociations sur la Sixième Réforme de l'État, un accord a été conclu sur la réforme de la loi spéciale de financement. Cette réforme doit permettre aux entités fédérées de mieux exercer leurs compétences, dont celles issues de la Sixième Réforme de l'État.
Il est proposé d'accroître l'autonomie financière des entités fédérées, notamment en augmentant leurs recettes propres de manière significative, et de tenir compte de plusieurs principes:
— éviter une concurrence déloyale;
— maintenir les règles de progressivité de l'impôt des personnes physiques;
— ne pas appauvrir structurellement une ou plusieurs entités fédérées;
— assurer la viabilité à long terme de l'État fédéral et maintenir les prérogatives fiscales de ce dernier en ce qui concerne la politique de redistribution interpersonnelle;
— renforcer la responsabilisation des entités fédérées en lien avec leurs compétences et la politique qu'elles mènent, compte tenu des différentes situations de départ ainsi que de divers paramètres de mesure;
— tenir compte des externalités, de la réalité sociologique et du rôle de la Région de Bruxelles-Capitale;
— prendre en compte des critères de population et d'élèves;
— maintenir une solidarité entre entités, exonérée d'effets pervers;
— assurer la stabilisation financière des entités;
— tenir compte des efforts à accomplir par l'ensemble des entités pour assainir les finances publiques;
— vérifier la pertinence des modèles proposés à travers des simulations.
Le nouveau modèle sur lequel les négociateurs se sont mis d'accord a fait l'objet d'une simulation réalisée par la Banque nationale de Belgique.
Il vise à renforcer d'une part, l'autonomie fiscale des régions et d'autre part, la responsabilisation des entités fédérées tout en assurant une solidarité dénuée d'effet pervers et en garantissant la viabilité du fédéral sur le long terme.
La réforme proposée pour le financement des entités fédérées concerne essentiellement la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions (ci-après: loi spéciale de financement ou LSF). Étant donné les transferts des nouvelles compétences aux entités fédérées et les nouveaux mécanismes de financement et de responsabilisation, la loi ordinaire du 31 décembre 1983 organisant le financement de la Communauté germanophone devra également être adaptée.
L'adaptation de la loi spéciale de financement actuelle comprend trois volets importants:
1º l'introduction d'une autonomie fiscale partielle pour les régions et les compétences y afférentes qu'elles reçoivent;
2º la manière dont sont financées les compétences pour les régions et les communautés;
3º la contribution des régions et des communautés à l'assainissement des finances publiques et au coût du vieillissement.
S'agissant de la répartition des moyens de financement en vitesse de croisière, l'accent est mis, pour les régions, sur une clé de répartition fiscale (par le biais de l'autonomie fiscale ou de dotations réparties selon une clé fiscale) et, pour les communautés, sur des clés tenant compte des besoins. Cette option signifie que, pour les régions, on opte pour le principe de la responsabilisation fiscale qui sera complété par un mécanisme de responsabilisation climat pour les régions. Par ailleurs, une responsabilisation renforcée sera introduite tant pour les communautés que pour les régions pour le financement des pensions de leurs agents statutaires.
Un mécanisme de solidarité est maintenu, objectif, plafonné et dénué d'effets pervers. Des mécanismes de transition sont prévus pour garantir que chaque entité fédérée dispose, dès le départ du nouveau modèle, de moyens financiers au minimum équivalents à ceux de la loi spéciale de financement actuelle, tenant compte de l'utilisation des dépenses fédérales à transférer, et avant le juste financement de Bruxelles et l'assainissement des finances publiques.
La proposition de loi spéciale attribue des moyens financiers aux communautés, régions et à la Commission communautaire commune en raison des compétences qui sont transférées. L'attribution ou non de moyens financiers et leur répartition n'influence aucunement la répartition des compétences entre l'État fédéral et les communautés, les régions et les commissions communautaires telle que réglée par ou en vertu de la Constitution (voir proposition de loi spéciale relative à la Sixième Réforme de l'État, Doc. Parl. Sénat, nº 5-2232/1). Par conséquent, l'absence d'attribution de moyens financiers ne signifie pas qu'une entité ne pourrait pas exercer les compétences.
En outre, les régions et les communautés participent à l'assainissement des finances publiques et au coût croissant du vieillissement. Cette opération est également intégrée dans la nouvelle loi spéciale de financement, et ce après l'application du principe de non-appauvrissement des entités fédérées.
1. Financement des compétences actuelles des régions
L'autonomie fiscale en matière d'impôt des personnes physiques portera sur le montant de la dotation IPP existante aux régions pour l'année budgétaire 2015, diminuée à concurrence d'un maximum du terme négatif afin de ne pas déséquilibrer la répartition des moyens entre entités, auxquels sont ajoutés 40 % du total des dépenses fiscales transférés de l'exercice d'imposition 2015.
L'autonomie fiscale remplacera donc une partie importante des moyens actuels des régions par des nouvelles compétences pour ces régions en matière d'impôt des personnes physiques.
2. Financement des compétences actuelles des communautés
Les principales modifications sont:
— La liaison à la croissance économique de la part attribuée des recettes de TVA, répartie selon la clé élèves, est maintenue au sein de celle-ci et ce de manière rétroactive depuis 2010 (fin du turbo Lambermont à partir de 2010).
Par conséquent, la partie de la part attribuée des recettes TVA répartie selon la clé IPP restera constante à l'avenir (= une partie du refinancement Lambermont de 2001). Cette partie de la part attribuée des recettes TVA sera à présent mise à charge de l'impôt des personnes physiques fédéral et vient donc s'ajouter à la part des recettes d'impôt des personnes physiques fédéral déjà octroyée aujourd'hui. L'ensemble de ces moyens évolueront en fonction de l'inflation et de 75 % de la croissance du PIB (avant la participation dans le coût du vieillissement) et seront répartis selon la clé de l'impôt des personnes physiques fédéral localisé dans chacune des communautés.
— La dotation redevance radio-tv est intégrée dans la dotation TVA des communautés répartie selon la clé élèves.
3. Financement des nouvelles compétences transférées aux régions
L'ensemble des nouveaux moyens octroyés aux régions le sont sous la forme de part attribuée à l'impôt des personnes physiques fédéral.
Les moyens associés au transfert de la compétence emploi et dépenses fiscales seront répartis selon la clé de l'impôt des personnes physiques fédéral localisé dans chacune des régions. Ces moyens se composent de 90 % des moyens transférés en matière d'emploi (le reste va dans le mécanisme de transition) et du solde, après assainissement, des moyens liés aux dépenses fiscales transférées. Ils évolueront selon l'inflation et 75 % (avant la participation dans le coût du vieillissement) de la croissance réelle du produit intérieur brut.
Les moyens pour les autres compétences transférées aux régions sont joints à une série de moyens actuels plus petits dans une dotation résiduaire. La répartition de ces moyens sera réalisée via des parts attribuées de l'impôt des personnes physiques fédéral et selon une clé spécifique.
4. Financement des nouvelles compétences transférées aux communautés et à la Commission communautaire commune
La répartition des moyens de financement des nouvelles compétences des communautés se fera selon des clés démographiques. La répartition des moyens en matière d'allocations familiales se fera sur la base de la clé population de zéro à dix-huit ans inclus, de chacune des trois communautés et de la Commission communautaire commune. Les enveloppes des entités évolueront ensuite sur la base de l'indice des prix à la consommation et de la croissance de la population de zéro à dix-huit ans compris, de chaque entité, ainsi qu'à 25 % de la croissance du produit intérieur brut par habitant. Ces moyens seront transférés à la Communauté germanophone, à la Communauté française et la Communauté flamande à l'exception de Bruxelles où ils seront transférés à la Commission communautaire commune. Le gouvernement peut, sur proposition des partenaires sociaux, affecter une partie de l'enveloppe bien-être à la majoration des moyens attribués aux communautés si ceux-ci constatent que le taux de participation des jeunes dans l'enseignement supérieur a augmenté significativement.
Pour les compétences transférées concernant les personnes ágées, les moyens seront répartis initialement selon la clé population des plus de quatre-vingts ans. Ils évolueront en fonction de l'évolution des personnes ágées de plus de quatre-vingts ans de chaque entité, de l'inflation et de 82,5 % (avant la participation dans le coût du vieillissement) de la croissance réelle du PIB par habitant.
Les moyens liés aux autres compétences transférées en matière de soins de santé et « d'aide aux personnes » seront répartis selon la clé population et évolueront en fonction de l'inflation et de 82,5 % (avant la participation dans le coût du vieillissement) de la croissance réelle.
En ce qui concerne les autres compétences transférées aux communautés (maisons de justice, protection de la jeunesse, Fonds d'équipement et de services collectifs (FESC), Fonds d'intégration des personnes immigrés (FIPI), ...), le financement sera réalisé via une ou des dotations, et réparti selon des clés liées à la population.
5. Mécanismes de responsabilisation pension et climat
Outre le principe de responsabilisation fiscale des régions qui guide cette réforme, deux mécanismes additionnels de responsabilisation seront intégrés, à savoir la responsabilisation pension et la responsabilisation climat.
5.1. Responsabilisation pension
Si le coût du vieillissement se situe principalement au niveau fédéral, il est toutefois nécessaire que les régions et les communautés contribuent davantage au coût des pensions des fonctionnaires.
Ceci se passera en deux étapes:
1º pour la période 2015 à 2020, des montants obtenus par l'application des règles de calcul de la loi spéciale du 5 mai 2003, sont mis à charge des régions et des communautés;
2º pour les années 2021 et suivantes, une contribution qui constituera une fraction de la contribution de 8,86 % qui est valable pour le personnel contractuel, sera due. Cette fraction sera adaptée progressivement et de manière linéaire pour atteindre, en 2028, les 8,86 %.
5.2. Responsabilisation climat
La loi spéciale de financement prévoit qu'un mécanisme définira pour chaque région, sur la base d'une proposition de la Commission nationale climat, une trajectoire pluriannuelle de réduction d'émissions de gaz à effet de serre dans le secteur des bátiments.
Si une région dépasse son objectif assigné, elle reçoit un bonus financier. Si la région n'atteint pas son objectif, elle paie un malus financier.
6. Juste financement des institutions bruxelloises
La responsabilisation fondée sur la capacité fiscale n'est pas adéquate pour la Région de Bruxelles-Capitale, parce que les revenus d'un grand nombre de personnes travaillant sur le territoire de la Région ne sont pas pris en compte (ceux des navetteurs et des fonctionnaires des institutions internationales). De cette manière l'affectation des moyens ou l'application de l'autonomie fiscale n'ont pas une base suffisante.
Par ailleurs, la Région de Bruxelles-Capitale fait face à des pertes de recettes du fait de l'exonération de nombreux bátiments à la fiscalité immobilière.
Enfin, la Région de Bruxelles-Capitale fait également face à des charges additionnelles comparées aux deux autres régions en matière de bilinguisme, de mobilité, de formation et de sécurité notamment.
Le financement complémentaire des institutions bruxelloises reposera donc sur les principes suivants pour atteindre, sur la base des simulations de la BNB, un montant de 461 millions d'ici 2015, dont 50 % seront affectés.
Au-delà de 2015, le juste financement de la Région de Bruxelles-Capitale sera organisé afin de ne pas dépasser 0,1 % du PIB.
Le juste financement des institutions bruxelloises se compose de deux volets. Le premier volet concerne les moyens affectés et le complément mainmorte, et est repris dans la loi spéciale du 19 juillet 2012 portant un juste financement des institutions bruxelloises.
La présente proposition de loi spéciale ne concerne le premier volet que pour ce qui concerne l'entrée en vigueur au 1er janvier 2014 de l'augmentation de la compensation mainmorte de 72 à 100 % et son élargissement afin de prévoir la compensation des pertes de recettes régionales et d'agglomération ainsi qu'en prenant comme référence les derniers additionnels communaux disponibles.
Le second volet du refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale concerne les navetteurs et les fonctionnaires internationaux.
La correction « navetteurs » se base sur un mécanisme horizontal. La Région de Bruxelles-Capitale recevra un financement qui atteindra, d'ici 2015, un montant de 44 millions d'euros. Ce montant sera financé par les deux autres régions selon une clé de répartition équivalente à celles des navetteurs. À partir de 2016, ce financement est maintenu nominalement constant. Le montant convenu pour 2013 (13 millions d'euros) sera réparti sur les années 2014, 2015 et 2016.
Le financement « fonctionnaires internationaux » est un mécanisme vertical. La Région de Bruxelles-Capitale percevra, d'ici 2015, un montant de 159 millions de l'État fédéral. Le montant convenu pour 2013 (48 millions d'euros) sera réparti sur les années 2014, 2015 et 2016.
7. Assainissement
Comme établi dans les principes généraux, il sera demandé aux entités fédérées, après l'application du principe du non-appauvrissement, de prendre à charge une partie de l'effort de l'assainissement global. Cet effort est divisé en deux mesures importantes:
7.1. Assainissement budgétaire
Il est demandé à toutes les entités fédérées de contribuer à l'assainissement budgétaire dans le but de rééquilibrer les finances publiques de l'ensemble des pouvoirs publics d'ici 2016. Cette contribution est égale à:
1º 250 millions d'euros en 2014. Cette contribution est « unique » et est reprise comme terme négatif unique dans la loi de financement (nouvel article 81quinquies);
2º 1,25 milliards d'euros en 2015, portés à 2,5 milliards d'euros à partir de 2016.
La contribution visée sous le 2º vient en déduction des moyens prévus dans la loi de financement, notamment:
a) en ce qui concerne les régions: de la « dotation emploi »;
b) en ce qui concerne les communautés: de la « dotation IPP »;
c) en ce qui concerne la Commission communautaire commune: de sa dotation spécifique (article 65 LSF).
7.2. Contribution au coût du vieillissement
En plus de la contribution à l'assainissement budgétaire, une contribution sera demandée aux différentes entités fédérées afin de faire face à l'accroissement futur des coûts du vieillissement. Ceci doit permettre un effort complémentaire des entités visées d'ici 2030 équivalant à 0,23 % du PIB.
Le 0,23 % du PIB est atteint progressivement en diminuant le pourcentage de la liaison à la croissance.
Pour les régions, la liaison à la croissance de 75 % des dotations « emploi » et « dépenses fiscales » est diminuée de 75 % à 55 % à partir de 2017. Pour la dotation résiduaire, la liaison à la croissance diminue de 100 % à 55 % à partir de 2017.
Pour les communautés, la liaison à la croissance des dotations soins des personnes ágées et soins de santé (les hôpitaux inclus) diminue de 82,50 % à 65 % à partir de 2017. La liaison à la croissance de la dotation-IPP des communautés suit le parcours des moyens IPP des régions.
Pour la Commission communautaire commune, ces réductions sont égales à celles des dotations soins des personnes ágées et soins de santé, mais elles sont appliquées sur la dotation spécifique visée à l'article 65 de la loi spéciale de financement.
Toutefois, pour tenir compte d'une répartition équilibrée entre, d'une part, l'entité I, et d'autre part, l'entité II, des avantages d'une forte croissance dans le futur, la réduction des liaisons à la croissance est tempérée lorsque la croissance réelle dépasse 2,25 %.
8. Autonomie fiscale
L'autonomie fiscale sera organisée via un modèle d'additionnels élargis sur l'impôt fédéral.
Les taux fédéraux ne seront pas modifiés au départ du calcul. Pour le calcul de l'impôt régional, l'impôt fédéral actuel, obtenu après l'application de la quotité exemptée d'impôts, des réductions d'impôts sur les revenus de remplacement et de la réduction pour revenu d'origine étrangère, sera réduit d'un facteur pour parvenir au nouvel impôt fédéral. Ce facteur d'autonomie, lui-même déterminant le niveau des additionnels initiaux, est, dès le départ, fixé à 25,99 % afin d'atteindre une régionalisation des recettes de l'impôt sur les personnes physiques équivalente à un montant de 11,944 milliards d'euros.
Les centimes additionnels régionaux s'appliqueront aussi aux revenus imposables distinctement, hormis les revenus mobiliers (dividendes, intérêts, royalties) et certains revenus divers (principalement les plus-values imposables sur valeurs et titres mobiliers) qui resteront du ressort exclusif du fédéral.
Le prélèvement par le biais des centimes additionnels sera combiné à toutes les possibilités dont bénéficient déjà les régions en vertu de la loi spéciale de financement actuelle. Les régions peuvent dès lors différencier les centimes additionnels généraux proportionnels par tranche d'impôt ou non; elles peuvent également instaurer des réductions générales. Dans leurs domaines de compétences, les régions peuvent par ailleurs octroyer des réductions d'impôts ou des crédits d'impôts remboursables, ou encore imposer des augmentations fiscales.
Afin de rendre les régions autonomes par rapport au niveau fédéral, le plafond prévu dans la loi de financement actuelle concernant l'exercice de l'autonomie (à savoir la référence aux 6,75 %) sera supprimé. Les régions auront donc la possibilité de réduire ou d'augmenter l'impôt régional sans limite de montant ou de pourcentage, mais elles devront néanmoins respecter la progressivité avec la possibilité d'une dérogation strictement encadrée. Le législateur fédéral reste seul compétent pour la détermination de la base imposable. La détermination du précompte professionnel et du précompte mobilier, ainsi que le service des impôts, restent eux aussi une compétence exclusivement fédérale.
Les régions auront la faculté d'établir sur l'impôt fédéral des additionnels régionaux différenciés par tranche d'impôt. Les tranches d'impôt seront établies comme suit:
— l'impôt fédéral de base est d'abord calculé sur le revenu imposable de la personne;
— l'impôt fédéral de base ainsi calculé peut être subdivisé en tranches par les régions;
— il est ensuite procédé au calcul des réductions d'impôt fédérales correspondant à la quotité exemptée d'impôt, au supplément de quotité exemptée d'impôt pour personnes à charge et aux réductions d'impôt pour revenus de remplacements;
— le montant de ces réductions d'impôt fédérales est déduit de l'impôt fédéral de base calculé sur le revenu imposable en commençant par les tranches d'impôt les plus basses.
Les réductions fédérales d'impôt pour revenus d'origine étrangère s'imputent proportionnellement.
Les additionnels sur l'impôt fédéral afférent aux revenus ayant fait l'objet d'une imposition distincte seront uniformes (cela signifie qu'il n'y aura pas de différenciation par tranche et qu'il y aura taux unique, soit un seul taux quel que soit le taux d'imposition fédéral sur ces revenus).
Si une région établit des additionnels différenciés par tranche d'impôt, la loi spéciale de financement déterminera que, en ce qui concerne les additionnels portant sur l'impôt fédéral afférent aux revenus ayant fait l'objet d'une imposition distincte et sur lesquels les additionnels régionaux s'appliquent, le taux des additionnels ne peut être inférieur à celui qui est appliqué sur la tranche d'impôt régional pour laquelle la recette d'impôt régional est la plus élevée.
Les régions exercent leurs compétences en matière de réductions ou augmentations fiscales générales, de centimes additionnels, de réductions ou de crédits d'impôt sans réduire la progressivité de l'impôt des personnes physiques. Le principe de la progressivité est respecté dans les cas évoqués dans le modèle d'évaluation de la Cour des comptes. Par exception, la règle de progressivité ne s'appliquera pas pour les contrats en cours dont l'avantage fiscal deviendrait régional (exemple du « woonbonus »), l'objectif étant de permettre que le contribuable conserve le même avantage que celui auquel il avait droit dans le régime actuel.
Lorsque les régions différencient les additionnels par tranches d'impôt, le barème des additionnels régionaux peut déroger à l'article 9 de la loi spéciale de financement pour autant:
— que le taux d'additionnel régional sur une tranche d'impôt ne soit pas inférieur à 90 % du taux d'additionnel régional le plus élevé parmi les tranches inférieures d'impôt;
— et que l'avantage fiscal par contribuable résultant de la dérogation à la règle de progressivité ne soit pas supérieur à 1 000 euros par an indexés.
Au titre des dispositions générales, la loi spéciale de financement est complétée pour préciser que l'exercice des compétences fiscales des régions s'opère dans le respect de la loyauté fédérale et notamment des principes suivants:
— le principe d'exclusion de toute concurrence fiscale déloyale;
— le principe visant à prévenir et éviter la double imposition;
— le principe de la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux et de l'Union économique et monétaire.
L'impôt des non-résidents reste de la compétence exclusive de l'autorité fédérale. Celle-ci applique un régime fiscal tenant compte des dispositions fiscales régionales (centimes additionnels, réductions, crédits d'impôt et majorations d'impôt) de manière à garantir le respect des quatre libertés fondamentales (libre circulation des personnes, des services, des capitaux et des biens) inscrites dans les dispositions des traités de l'Union européenne.
Du point de vue budgétaire, la différence, aussi bien en plus qu'en moins, entre l'impôt de référence et l'impôt dû, calculé individuellement, est imputée sur les recettes à verser aux régions.
L'impôt de référence est égal à l'impôt fédéral de base, diminué de la quotité exemptée d'impôt, et de la réduction d'impôt pour revenus de remplacement et pour revenus d'origine étrangère.
9. Amendements
Différents amendements ont été apportés à la proposition de loi spéciale déposée à la Chambre.
La plupart de ceux-ci avaient pour objet de tenir compte des observations formulées par le Conseil d'État dans son avis.
C'est ainsi que la désignation comme adjudicateur des droits d'émission de l'administration du registre a été transférée de la proposition de loi ordinaire relative à la responsabilisation climat vers la loi spéciale, que des précisions ont été apportées sur les moyens devant être affectés par les régions au mécanisme de responsabilisation climat afin de respecter le prescrit de l'article 177, alinéa 2, de la Constitution ou que des précisions ont été apportées sur la durée de validité des trajectoires pluriannuelles en la matière.
Des amendements ont également été déposés afin de clarifier la répartition des compétences pour ce qui concerne ce que l'on appelle le « woonbonus » et offrir un maximum de sécurité juridique, afin de préciser le régime transitoire de certains avantages fiscaux transférés ou encore au sujet du centre fédéral fermé de Tongres.
Enfin, des corrections ont été apportées à certains montants transférés pour tenir compte d'informations obtenues postérieurement au dépôt des textes, pour ce qui concerne, par exemple, la politique des grandes villes ou l'intégration dans ces montants de la part des soins de santé aux personnes ágées dans le coût de l'accord social 2013 en matière de soins de santé.
Le secrétaire d'État conclut son exposé en soulignant que le texte à l'examen offre la garantie d'un accord équilibré et une perspective à long terme dans le financement des différentes entités du pays et de l'État fédéral. Il y a un équilibre entre des principes de responsabilité et de solidarité. On permet de la sorte, à chaque entité, d'exercer pleinement ses compétences en fonction d'une autonomie suffisante mais avec une responsabilisation adéquate. Le projet à l'examen rencontre les onze principes qui ont fait l'objet d'un accord par un certain nombre de familles politiques, y compris des familles qui ne soutiennent pas le texte aujourd'hui.
IV. DISCUSSION GÉNÉRALE
1. Avis et questions des membres
Mme Maes subdivisera son exposé en deux parties. Elle présentera tout d'abord la situation actuelle de la Flandre en termes de financement, telle qu'elle découle de la législation en vigueur. Dans un deuxième temps, elle se penchera sur la réforme proposée, en clôturant son aperçu par une évaluation critique.
A. Situation actuelle de la Flandre en termes de financement
L'intervenante commence par rappeler la situation de la Flandre en matière de financement, telle qu'elle découle de la législation actuelle. Les moyens disponibles peuvent être estimés à 25,1 milliards d'euros pour 2012. Ce montant global se décompose comme suit:
Sur le total du financement régional, il apparaît que seuls 1,6 milliard d'euros peuvent être considérés comme relevant de l'autonomie fiscale.
La grande majorité des moyens régionaux relèvent de la responsabilisation des entités fédérées: ils sont liés au produit intérieur brut. Par contre, une plus grande part des moyens communautaires sont liés aux besoins, et spécialement au nombre d'élèves. Au total, si l'on additionne les deux catégories de moyens, plus de deux tiers du financement de la Flandre relève toujours de la responsabilisation.
Les accords du Lambermont ont eu des conséquences positives pour la Flandre. Les régions y ont reçu une plus large autonomie, par le biais d'impôts régionaux (à concurrence de 3,5 milliards d'euros) et par le biais d'une autonomie fiscale dans l'impôt des personnes physiques.
L'article 9, § 1er, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions établit toutefois des limites. Parmi celles-ci figurent l'exclusion de toute concurrence fiscale déloyale et un seuil maximal de 6,75 % du produit de l'impôt des personnes physiques appliqué au total des réductions et des augmentations générales d'impôt, des centimes additionnels et des réductions d'impôt. Pour la Flandre, ce seuil correspond à environ 1,5 milliard d'euros.
En ce qui concerne les communautés, les accords du Lambermont ont institué un mécanisme appelé le « turbo-Lambermont ». Auparavant, la dotation était calculée sur la base de la TVA, en ne tenant compte que du nombre d'élèves. Avec ce nouveau mécanisme, le financement s'organise différemment et on passe d'un système fondé sur les besoins à un système fondé sur l'autonomie fiscale. L'intervenante propose un graphique tendant à démontrer l'intérêt de ce mécanisme pour le financement de la Flandre:
Dans le graphique suivant, la ligne bleue continue représente le total des moyens consacrés à l'enseignement, la ligne rouge foncée continue, la part de ces moyens qui résulte des accords du Lambermont.
Ce graphique montre que la part octroyée à la Flandre dans les moyens consacrés à l'enseignement (ligne rouge discontinue) augmente au cours des années: elle passe de 56,97 % en 2001 à 59,33 % en 2030.
La loi spéciale de financement actuelle est critiquée essentiellement pour deux raisons. D'une part, elle génère une sur-solidarité, en ce sens qu'une des régions reçoit, par habitant, plus de moyens que la région la plus riche. D'autre part, elle engendre des effets pervers, car elle peut avoir pour conséquence qu'une région dont la population s'appauvrit reçoive plus de moyens. Pour illustrer ces critiques, l'intervenante propose le tableau suivant, qui reprend les dotations calculées sur la base de l'impôt des personnes physiques avant et après le mécanisme de solidarité.
L'Allemagne a institué une limitation au mécanisme de solidarité: lors du calcul de la redistribution, les moyens des régions les moins riches sont portés à 95 % de la moyenne nationale par habitant, et les régions les plus riches ne peuvent pas recevoir moins que 102 % de cette moyenne.
Mme Maes insiste auprès du gouvernement pour qu'il communique les simulations de la Banque nationale sur ce point, afin que l'on puisse confronter l'analyse donnée par la N-VA à ces dernières.
B. La réforme proposée
1. Cette réforme est fondée sur les six lignes de force suivantes:
— Régions
Dans la réforme de l'État qui est proposée, les régions se voient octroyer de nouvelles compétences et des moyens supplémentaires à concurrence de 8,3 milliards d'euros pour 2015. Ces moyens concernent essentiellement le marché du travail (4,7 milliards d'euros), les dépenses fiscales (3 milliards d'euros) et le fonds des amendes routières. La responsabilisation est approfondie, l'ancienne dotation calculée sur la base de l'impôt des personnes physiques étant remplacée par une autonomie pseudo-fiscale. La nouvelle dotation régionale est partagée selon une clef de répartition fiscale. Selon Mme Maes, si le nouveau mécanisme de solidarité comporte moins d'effets pervers, il génère néanmoins toujours une sur-solidarité.
D'après elle, le nouvel article 35octies de la loi spéciale de financement, tel qu'il est proposé par l'article 30 du projet de loi spéciale, ne constitue cependant pas un mécanisme de responsabilisation des régions. La constitution du fonds destiné à redistribuer le produit des amendes n'en constitue pas un non plus.
— Communautés
Les communautés reçoivent elles aussi des compétences nouvelles et des moyens complémentaires, à concurrence ici de 12,1 milliards d'euros pour 2015. Il s'agira principalement des prestations familiales (environ 6,9 milliards d'euros), des soins aux personnes ágées (3,5 milliards d'euros), des soins de santé (0,8 milliard d'euros), des hôpitaux (0,7 milliard d'euros), de la justice (87 millions d'euros), etc. Contrairement aux moyens accordés aux régions, les moyens accordés aux communautés reposeront moins sur une responsabilisation, et donc davantage sur le critère des besoins.
— Les anciennes dotations aux communautés
Une des critiques principales de Mme Maes porte sur la suppression rétroactive du mécanisme du « turbo Lambermont ». Cette suppression, prévue pour 2015, s'accompagne d'une augmentation de la dotation calculée sur la base du nombre d'élèves, aux dépens de la dotation calculée sur la base de l'impôt des personnes physiques. Avec la nouvelle base de calcul de la dotation visant à compenser la redevance radio et télévision (désormais calculée également en fonction du nombre d'élèves), cette réforme coûtera chaque année 144 millions d'euros à la Flandre.
à partir de 2015, deux dotations différentes seront calculées pour le financement des communautés: l'une sur la base du nombre d'élèves, l'autre sur la base de l'impôt des personnes physiques. Toutefois, la seconde évoluera nettement plus lentement que la première, en raison des paramètres des calculs. Or, la première est favorable au sud du pays. À l'horizon 2030, la perte pour la Flandre peut être évaluée, selon l'intervenante, à 900 millions d'euros sur une base annuelle. Le graphique suivant illustre son propos:
— Refinancement de Bruxelles
Le refinancement de Bruxelles s'opère à la fois sur le budget de la Région de Bruxelles-Capitale et sur celui de la Commission communautaire commune. Une somme de 500 millions d'euros liée au bien-être est octroyée sans conditions.
Mme Maes estime qu'il convient néanmoins de soumettre ce financement à certaines conditions.
— Non-appauvrissement des entités fédérées
L'intervenante se réfère ensuite au principe de l'absence d'appauvrissement des entités fédérées, selon lequel aucune entité fédérée ne doit s'appauvrir les premières années. La période transitoire est toutefois fixée à vingt ans. Selon Mme Maes, cela favorise surtout les régions les moins prospères. Par ailleurs, elle estime que l'affirmation selon laquelle la réforme n'induirait aucun appauvrissement des régions est un leurre. Selon l'intervenante, la Flandre en pátira et la principale raison en est que l'on tient compte d'un pourcentage d'élasticité de l'impôt des personnes physiques anormalement élevé.
— Contribution à l'assainissement des finances publiques
Pour que chaque entité participe à l'effort d'assainissement des finances publiques, les moyens que la nouvelle loi spéciale de financement octroie à ces entités n'augmenteront pas plus que la part de cette entité dans le produit intérieur brut global. À cet effet, plusieurs dispositifs sont prévus dans le projet de loi spéciale: contribution en matière de pension, ralentissement de la croissance de la dotation, modifications apportées aux montants de base, etc. En voici un aperçu:
— la contribution en matière de pension: 1,6 milliard d'euros d'ici à 2030, dont 0,9 milliard pour la Flandre;
— la réduction sur les dotations: 250 millions en 2014 (en une fois) et 2,5 milliards répartis structurellement sur les dotations de 2015-2016 sur la base de l'impôt des personnes physiques, associés à une croissance lente des dotations;
— le transfert de moyens inférieurs aux transferts de compétences correspondants, par exemple le bonus logement;
— des dépenses fiscales ont déjà été supprimées pour un montant d'un milliard d'euros dans le cadre du budget 2012 et d'interventions préalables, relatives par exemple aux titres-services et aux réductions concernant les groupes cibles.
Le budget fédéral pour 2014 tient déjà compte de la nouvelle répartition des compétences fiscales, pour un montant d'un milliard d'euros.
2. Évaluation
— Nouvelles compétences communautaires
En ce qui concerne les nouvelles compétences communautaires, Mme Maes constate l'existence de transferts en matière de prestations familiales, de soins de santé et de soins aux personnes ágées. On commence par un transfert à 100 %. Un calcul sera ensuite effectué en 2015, lequel entraînera une limitation. Cette évolution non plus n'est pas favorable. La croissance réelle après 2015 est de 0,7 % pour les prestations familiales, de 0,93 % pour les soins de santé et de 2,65 % pour les soins aux personnes ágées. Il s'agit de la croissance du produit intérieur brut. Tant pour les hôpitaux universitaires que pour les hôpitaux non universitaires, la croissance réelle est de 1,02 %. Pour la justice, la croissance réelle après 2015 se chiffre à 1,50 %.
— Nouvelles compétences régionales
En ce qui concerne les nouvelles compétences régionales, le marché du travail est transféré à 90 %, avec 10 % restant dans le socle. La clé de répartition est l'impôt des personnes physiques fédéral. On prévoit un transfert à 100 % en ce qui concerne les dépenses fiscales et l'article 35.
— Autonomie fiscale
En matière d'autonomie fiscale, il y a un pot de 11,7 milliards d'euros, ce qui n'est pas beaucoup plus que ce que permet l'article 9 de l'actuelle loi spéciale de financement. La technique utilisée consiste à permettre aux entités fédérées de prélever des centimes additionnels à l'impôt des personnes physiques fédéral, à l'instar de ce que les communes peuvent faire actuellement. L'article 9 précité permet déjà aujourd'hui d'opérer une différenciation par tranche de revenus. Par ailleurs, il est possible d'avoir une série de déductions dans le prolongement des compétences transférées (par exemple, le bonus logement et les titres-services).
Mme Maes déclare qu'en plus des conséquences budgétaires que la loi spéciale de financement proposée aura pour la Flandre, elle hypothèque aussi une réforme fiscale approfondie et la politique fiscale à venir.
Les grands gagnants seront en tous cas les spécialistes qui s'occupent exclusivement de l'impôt des personnes physiques. Leur sécurité d'emploi est garantie.
Les grands perdants sont les contribuables qui ne comprendront plus rien au calcul de l'impôt en 2016. Que deviendra la transparence du calcul de l'impôt pour le citoyen après l'adoption de cette loi ? Il se verra infliger une amende de 50 euros dès la première infraction commise par ignorance.
Après l'adoption de la loi à l'examen, ces mêmes contribuables qui ne comprennent plus rien à l'impôt des personnes physiques mais qui doivent néanmoins payer leurs impôts perdront, pour les raisons suivantes, tout espoir d'une sérieuse réduction de la pression fiscale sur le travail et d'une simplification du système.
Premièrement, dans le cadre de l'assainissement des finances publiques, le gouvernement a fortement hypothéqué une réforme fiscale approfondie. En supprimant la réduction d'impôt pour les investissements effectués en vue d'économiser l'énergie, en réduisant l'avantage fiscal pour les autres réductions d'impôt et en taxant davantage l'épargne et les véhicules de société, le gouvernement a raboté la marge budgétaire que le Conseil supérieur des finances prévoyait encore en 2007 pour une réduction de la pression fiscale sur le travail.
En outre, le gouvernement réduit davantage les possibilités d'affecter le budget des dépenses fiscales à la réduction de la pression fiscale sur le travail. Le transfert du bonus logement, de la réduction d'impôt pour les dépenses de sécurisation des habitations contre le vol ou l'incendie, des dépenses pour l'entretien et la restauration de monuments et sites classés, de la réduction d'impôt pour les chèques-ALE et les titres-services, pour l'isolation des toitures, etc. ne s'accompagne pas du transfert complet des moyens budgétaires requis. En effet, l'élasticité appliquée aux 40 % transférés via l'autonomie fiscale a été surestimée de façon irréaliste. Étant donné que les moyens budgétaires que l'autorité fédérale retient ne sont pas appliqués à des mesures fiscales permettant de réduire la pression fiscale sur le travail, cette retenue doit également contribuer à l'assainissement des finances publiques fédérales. Ce n'est pas de cette façon que la pression fiscale sur le travail diminuera en Belgique.
En outre, un certain nombre de choix politiques en matière fiscale deviennent impossibles à faire.
Au cours des auditions organisées au sein de la commission mixte chargée de la réforme fiscale, M. De Wolf, professeur à l'UCL, a remis l'imposition forfaitaire sur la table. On peut être pour ou contre une imposition forfaitaire, mais il sera impossible de l'instaurer à la majorité simple. La progressivité de l'impôt des personnes physiques est en effet ancrée dans la loi spéciale par le projet l'examen. Il est étonnant de constater que le projet à l'examen réserve au pouvoir fédéral la compétence exclusive d'assujettir certains revenus à un taux forfaitaire. Les régions ne peuvent en effet assujettir les revenus imposés distinctement qu'à un seul taux.
Lors d'une autre audition au sein de la même commission mixte, M. Autenne, professeur à l'UCL, a remis en question la forte progressivité des barèmes fiscaux. Le pouvoir fédéral demeure compétent en la matière. Les régions se voient accorder une marge de manœuvre de 1 000 euros. M. Autenne a également recommandé de réduire l'avantage de la quotité du revenu exemptée d'impôt. La quotité exemptée d'impôt représente ou devrait représenter le revenu nécessaire pour vivre. Ensuite, on applique les taux et tranches d'imposition progressifs. Par suite de l'article 512, § 2, de la nouvelle loi spéciale de financement, le mode de calcul actuel de l'impôt en matière de quotité exemptée est régi par une règle de majorité spéciale.
Aucun pays n'inscrit la future politique fiscale dans une loi requérant une majorité spéciale. Dans aucun pays, des majorités des deux tiers n'empêchent qu'un choix de politique fiscale soit fait par une majorité simple. Dans aucun pays, une réforme fiscale globale n'est empêchée par voie constitutionnelle.
On peut donc s'interroger sur l'utilité ou l'inutilité d'inscrire des règles de détail dans une loi spéciale de financement.
— Refinancement de Bruxelles
Le refinancement de Bruxelles doit être évalué à 800 millions d'euros à l'échéance 2030. Dans la note Octopus du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, 500 millions d'euros, liés au bien-être, étaient revendiqués. Les francophones avaient, pour leur part, demandé une somme équivalente à 0,1 % du produit intérieur brut, à majorer de moyens spécifiques pour le fonds Beliris. L'accord à la base du projet à l'examen prévoit pour 2015 un montant de 517 millions d'euros, qui atteindra 715 millions d'euros en 2030.
— Contribution à l'assainissement
Concernant la contribution à l'assainissement, et en particulier la contribution en matière de pension pour les communautés et les régions, la remarque générale de Mme Maes est d'application: les entités fédérées peuvent payer, mais pas décider. Aucun transfert de compétence n'est en effet prévu dans ce domaine. Cela représente pour la Flandre un montant de 76 millions d'euros en 2015, 199 millions d'euros dès 2021 et 915 millions d'euros en 2030.
Les 2,5 milliards de remise sont étalés sur les années 2015 et 2016; s'y ajoutent, en 2014, un supplément de 250 millions et, enfin, 32 millions pour les navetteurs. On note une lente croissance des dotations, celle-ci étant liée à la croissance du PIB. Pour la région, celle-ci est ramenée de 100 % à 55 %, et pour les communautés, de 82,5 % à 65 %. Les 2,5 milliards d'euros sont principalement à la charge de la Flandre. Si ce montant n'était pas déduit, le gain pour la Flandre serait de 195 millions d'euros.
La remise totale par les régions et les communautés en 2030 revient à plus de 6 milliards d'euros, qui se décomposent comme suit: 1,6 milliards de cotisations de pension, 2,5 milliards de contributions à l'assainissement, et le ralentissement de la croissance des dotations, c'est-à-dire des pourcentages ramenés de 100 % à 55 % pour les régions et de 82,5 % à 65 % pour les communautés.
Le principe de l'absence d'appauvrissement des entités fédérées a été posé comme fondement de la réforme. Aucune entité ne doit s'appauvrir les premières années. La période transitoire est toutefois fixée à vingt ans. En outre, un mécanisme de solidarité nouveau, lié au bien-être et plus généreux qu'autrefois, est institué. Au cours des premières années, il y aura une remise relativement lourde sur le mécanisme de solidarité, à la suite du prélèvement des 2,5 milliards d'économies. Comme les moyens des entités fédérées diminuent selon un pourcentage du produit intérieur brut, la nouvelle loi spéciale de financement est en réalité une source d'enrichissement pour l'autorité fédérale.
Si l'on observe les soldes, c'est-à-dire les moyens par rapport aux besoins, on constate que le résultat est très négatif. Le point de vue selon lequel la Flandre ne s'appauvrira pas n'est valable que si l'on ne tient pas compte des cotisations d'assainissement, navetteurs et de pension, ainsi que l'ont confirmé non seulement De Tijd, mais aussi La Libre Belgique.
Le débat sur l'élasticité sera lui aussi récurrent. Si l'on se base sur un taux d'élasticité plus élevé, les chiffres pour la Flandre paraîtront meilleurs. Selon Mme Maes, il serait toutefois plus réaliste de tenir compte d'une élasticité de 1,15 que d'un taux de 1,6, comme on le fait actuellement. Cela générera aussi un appauvrissement.
Au cours de l'année de départ, les entités fédérées ne peuvent pas s'appauvrir dans le socle. Le socle est globalement positif pour les régions, mais pour la Flandre il y aura à ce niveau un déficit de 246,33 millions d'euros en 2015. Pour la communauté, on aura un solde positif de 130,57 millions. Au total, il sera donc question d'un déficit de 115,76 millions d'euros.
L'intervenante en déduit qu'après l'application du mécanisme de remise, seules les institutions fédérales et la Région de Bruxelles-Capitale échapperont en fait à l'appauvrissement. Le pourcentage des moyens pour les régions et les communautés dans le produit intérieur brut diminue. Seule la Région de Bruxelles-Capitale en tire un avantage.
3. Conclusion
L'autonomie fiscale n'est rien d'autre qu'un centime additionnel communal amélioré à l'impôt des personnes physiques fédéral en combinaison avec l'article 9 de l'actuelle loi spéciale de financement. Actuellement, cet article permet déjà d'instaurer des centimes additionnels et soustractionnels (réductions), modulés ou non par tranche de revenu. D'un point de vue instrumental, on n'obtient rien de plus. L'élargissement de la marge dans l'impôt régional des personnes physiques de 6,75 % à 26 % n'apporte rien non plus d'un point de vue politique.
De plus, les déductions fiscales ne sont pas homogènes. Par ailleurs, la règle de la progressivité demeure restrictive. Pourquoi la Flandre ne peut-elle pas en décider elle-même ? L'autorité fédérale peut toujours intervenir dans certaines matières qui relèvent de la compétence des régions. Les régions dépendent donc encore dans une large mesure de décisions prises par le fédéral, et ne peuvent pas non plus soulever de conflits d'intérêts. L'impôt des sociétés n'est même pas évoqué.
La responsabilisation diminue en raison d'une trop grande prise en considération des compétences acquises dans le cadre de la répartition démographique de la population. La région est financée pratiquement à 100 % par le « juste retour », exception faite des moyens versées en vertu de l'article 35 de la loi spéciale relative au financement des communautés et des régions du 16 janvier 1989, adaptée en 2001. Mais de lourds mécanismes de solidarité s'appliquent en l'espèce. En outre, il convient également de tenir compte du fait que des moyens sont libérés pour le refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale.
Pour les communautés, le critère du besoin est devenu prédominant. En outre, une période transitoire de vingt ans est prévue.
Certes, la solidarité entre les régions est moins « perverse » que jadis, mais peut toujours être qualifiée de royale. Les dotations réparties sur la base de facteurs démographiques prennent davantage d'importance et augmenteront effectivement plus rapidement que les dotations réparties sur la base de l'impôt des personnes physiques. En outre, la solidarité est liée au bien-être, ce qui signifie que ni la Région wallonne, ni la Région de Bruxelles-Capitale ne sont lésées, pas seulement à très long terme, mais aussi à court terme, par le biais de ce qu'on appelle le « socle ».
L'intervenante répète qu'il est clair que les seuls gagnants sont l'autorité fédérale et la Région de Bruxelles-Capitale. Si l'on part d'une élasticité de 1,66, la Flandre semble ne pas s'appauvrir, mais si l'on se base sur une élasticité plus réaliste de 1,15, la Flandre est la grande perdante.
M. Laeremans déplore le manque de transparence en ce qui concerne l'impact financier de la sixième réforme de l'État. Les partis de la majorité institutionnelle n'ont toujours pas une vision claire des rapports de force financiers entre l'autorité fédérale, d'une part, et les régions et communautés, d'autre part. Les rapports de force financiers entre les régions et les communautés ne sont pas clairs non plus. Le gouvernement dispose pourtant de suffisamment d'instruments de mesure pour pouvoir déterminer ces rapports avec précision. On est quand même en droit d'attendre que les différentes simulations et modèles de calcul utilisés pour faire des pronostics à court et à long terme sur la base de la réforme proposée soient divulguées. Mais apparemment, ce n'est pas possible.
Heureusement, dans l'intervalle, plusieurs études sur l'impact de la réforme proposée ont été publiées. Il s'agit plus précisément des publications suivantes:
— Geert Jennes (KU Leuven-Vives) (juillet 2013): « De hervorming van de BFW: een beoordeling van zijn gevolgen voor het Belgische begrotingsfederalisme » (cf.: http://www.econ.kuleuven.be/VIVES/publicaties/briefings/BRIEFINGS/briefing-evaluatie-nieuwe-bfw-8.pdf);
— I. Clerbois, C. Ernaelsteen et P. Pousset, sous la direction de M. Dejardin et M. Mignolet (CERPE), et S. Avanzo, J. Bouajaja, L. de Wind et S. Flament, sous la direction de P. Kestens, R. Plasman et I. Tojerow (DULBEA) (novembre 2013): « La 6e réforme du fédéralisme belge: Impact budgétaire du transfert de compétences et des nouvelles modalités de financement » (cf. http://www.unamur.be/eco/economie/cerpe/cahiers/cahiers/cahier65);
— Geert Jennes (KU Leuven-Vives) (janvier 2011): « Een Kritische Evaluatie van de Studie Vanraes: 720 miljoen extra voor Brussel » (cf.: http://www.econ.kuleuven.be/VIVES/publicaties/briefings/BRIEFINGS/20110113briefing).
M. Laeremans souligne que l'élaboration de la loi de financement en 1989 ainsi que les modifications qui ont suivi en 1993 et en 2001 sont le fruit d'un compromis obtenu au terme de longues négociations entre les partis flamands et wallons. La loi spéciale de financement accorde une marge financière plus importante aux entités fédérées, mais en même temps, aucune entité fédérée ne peut régresser sur le plan financier et une solidarité poussée est bétonnée. Le fait de récompenser une politique propre économe et responsable en lui octroyant plus de moyens est certes un principe sain, mais cette politique a tellement été tronquée par d'autres conditions et dispositions qu'il n'en reste plus rien.
L'intervenant déclare que la réforme proposée se fera au détriment de la Flandre. Contrairement à ce que la majorité institutionnelle soutient, la Flandre va bel et bien s'appauvrir. La majorité viole ainsi elle-même un des onze principes de base de la réforme.
M. Beke demande si M. Laeremans pourrait étayer sa thèse à l'aide de données chiffrées. Ce dernier se plaint de ne pas disposer de telles données, mais cela ne l'empêche pas de déclarer que la Flandre sera lésée par la réforme proposée.
M. Laeremans répond qu'il se base sur les chiffres des publications précitées de Geert Jennes (KU Leuven — Vives) (juillet 2013) et des groupes d'étude de l'Université de Namur et de l'ULB. Il souhaiterait néanmoins connaître les chiffres dont dispose M. Beke.
L'intervenant persiste à dire que la loi de financement est un enchevêtrement de mécanismes de financement, de clés de répartition, de calculs et de formules complexes, de telle sorte qu'il n'est nullement question de financement transparent et objectif des entités fédérées. Selon M. Laeremans, tout le système est erroné. Afin d'éviter le gaspillage et les abus dans le cadre de tels flux financiers, il faudrait recourir à une série de critères transparents et objectifs. Mais comme toujours dans les matières communautaires, ce n'est manifestement pas le cas non plus en l'occurrence.
Une autonomie et une responsabilisation véritables ne sont possibles que gráce au transfert intégral des impôts des personnes physiques et des sociétés. Ce n'est qu'à ce prix que les entités fédérées peuvent non seulement percevoir elles-mêmes les impôts, mais également fixer les taux et développer ainsi une politique financière et économique à part entière.
La loi de financement de 1989 avait pour objectif de mettre un terme à la politique du gaufrier: l'argent pour la Flandre ne devrait plus aller de pair avec le transfert d'un même montant vers la Wallonie et inversement. Après une période transitoire de douze ans, l'objectif était d'utiliser l'impôt des personnes physiques payé dans chaque entité fédérée comme clé de répartition. Le budget prévu pour les entités fédérées était lié non pas à la prospérité, mais à l'inflation. Les entités fédérées devraient vivre selon leurs moyens, mais il s'est avéré que la Wallonie, qui avait obtenu une longue période transitoire, avait bien de la peine à le faire. À peine quatre ans plus tard, la loi de financement a été adaptée lors des accords de la Saint-Michel de 1993. Cela n'a toutefois pas remédié au problème et, en 2001, il a été procédé à une nouvelle adaptation lors des accords du Lambermont. Des paramètres ont été modifiés, des clés de répartition ont été corrigées, des compétences ont été transférées, des périodes transitoires ont été instaurées et des moyens complémentaires ont été prévus.
L'intervenant conclut qu'il s'agissait d'un accord très généreux mais qui, à l'évidence, n'était toujours pas suffisant pour les francophones.
M. Beke convient que lors de l'adaptation de la loi spéciale de financement en 2001, on a accordé un maximum de moyens pour un minimum de compétences. Mais quand on propose de faire marche arrière, M. Laeremans n'est pas d'accord non plus. C'est une attitude qui manque de cohérence.
M. Laeremans réplique que l'adaptation de la loi de financement en 2001 englobait le mécanisme avantageux du « turbo-Lambermont » en vertu duquel le produit de l'impôt des personnes physiques (donc le « juste retour ») comme clé de répartition avait, dans le cadre du transfert, davantage de poids que le critère des besoins. Ce système était plus avantageux pour la Flandre, et c'est cela précisément qui disparaît aujourd'hui.
Selon M. Anciaux, M. Laeremans se contredit une nouvelle fois puisqu'il commence par dire que l'adaptation de la loi de financement en 2001 était une mauvaise chose et qu'il se déclare ensuite opposé à la rectification proposée.
M. Laeremans s'inscrit en faux contre cette affirmation. Les accords du Lambermont comportaient certains aspects positifs et ont eu à terme un effet bénéfique pour la Flandre. Pour cela, il faut recourir aux simulations. En 2030 au plus tard, voire dès 2022, la Flandre aurait obtenu son « juste retour ». C'est de cela précisément dont on la prive aujourd'hui. On lui fait une nouvelle fois endosser une charge beaucoup trop lourde.
On applique aujourd'hui les mêmes méthodes qu'en 2001. La loi spéciale de financement devient donc encore plus complexe et elle ne contribue nullement à clarifier les choses ni à responsabiliser davantage les entités. Au vu des contradictions que renferment les onze principes fondamentaux des mécanismes de financement, cela n'a rien d'étonnant.
Or, le financement des entités fédérées devait gagner en transparence et en objectivité et se traduire par une responsabilisation et une autonomie fiscale accrues. Les effets pervers de la loi de financement devraient disparaître. Il apparaît, entre-temps, que ces objectifs ne seront manifestement pas atteints.
Depuis la quatrième réforme de l'État de 1993, les régions disposent d'une autonomie fiscale limitée qui se traduit par le transfert d'une série d'impôts. C'est ainsi qu'à l'époque, six impôts ont été transférés aux régions, à savoir la taxe sur les jeux et paris, la taxe sur les appareils automatiques de divertissement, la taxe d'ouverture de débits de boissons fermentées, les droits de succession, le précompte immobilier et les droits d'enregistrement sur les biens mobiliers. Lors de la cinquième réforme de l'État de 2001, six impôts régionaux ont été ajoutés, comme les droits d'enregistrement sur les hypothèques et le partage de biens mobiliers, les droits d'enregistrement sur les donations, la redevance radio et télévision et les taxes en matière de circulation.
Outre l'extension de ces impôts régionaux, les accords du Lambermont ont permis aux régions de modifier, sous certaines conditions et dans une mesure restreinte, les taux de l'impôt des personnes physiques. Les régions sont toutefois tenues de notifier une éventuelle augmentation ou réduction au gouvernement fédéral et aux autres régions. La progressivité de l'impôt des personnes physiques doit être respectée et la concurrence déloyale n'est pas autorisée. La déduction professionnelle flamande (« jobkorting » — de 2007 à 2010) constitue à ce jour la seule application de l'autonomie fiscale.
Cela signifie que l'autonomie fiscale n'a, au fond, guère de pertinence.
Par nécessité budgétaire, on a d'ailleurs déjà mis un terme à la seule application de l'autonomie. On ne pourra pas non plus décider de réductions à l'avenir, d'autant plus que la Flandre est la grande perdante de cette réforme du financement, qui est un véritable fiasco. De plus, si des moyens disponibles sont trouvés, ils seront plutôt affectés à la réduction des charges sur les salaires et le travail, ce qui pourra relancer notre compétitivité.
Le projet de loi spéciale à l'examen ne modifie presque pas cette situation. Les leviers essentiels restent tous fédéraux. Le législateur fédéral reste exclusivement compétent pour la détermination de la base imposable, pour le précompte professionnel et pour le recouvrement de l'impôt des personnes physiques. L'absence d'autonomie fiscale ressort encore une fois clairement du fait que tout le dispositif reste fondé sur un système de dotations. Bien que l'autonomie fiscale flamande augmente au lendemain de cette réforme de l'État (de 20 % à 34 %), la Flandre reste dépendante, pour 2/3 de ses recettes, des dotations versées par l'autorité fédérale.
Le financement des communautés se fera désormais intégralement par le biais de dotations, dans lesquelles le critère du nombre d'élèves, plus avantageux pour la Communauté française, gagne encore en importance. Cette approche est néanmoins difficile à défendre en cette période de morosité économique. Il faut agir rationnellement avec les moyens disponibles. En intégrant notamment la redevance radio-TV à la dotation TVA allouée et en réduisant le lien à la croissance du PIB de 91 % à 82,5 % dans la dotation impôt des personnes physiques, la proposition accroît encore l'importance de la clé élèves, au détriment de la répartition en fonction de la capacité fiscale. La sixième réforme de l'État s'apparente donc plutôt à une régression en ce qui concerne la responsabilisation des communautés.
Au niveau des régions, l'accent est mis sur le critère de localisation: plus une région contribue aux recettes de l'impôt des personnes physiques, plus elle voit des moyens lui revenir sous forme de dotations. C'est comme cela que fonctionne la responsabilisation, dès lors qu'une gestion régionale efficace peut réellement faire une différence. Les moyens liés à l'impôt des personnes physiques sont en effet principalement répartis en fonction de la capacité fiscale, ce qui favorise la Région flamande. Toutefois, l'élargissement de l'autonomie fiscale est soumis à un tas de conditions, et les leviers fiscaux sont toujours fermement entre les mains du pouvoir fédéral. La marge de manoeuvre des régions est donc beaucoup trop étroite, ce qui a évidemment un impact sur le calcul de l'impôt des personnes physiques, qui se complique encore davantage. Les contrôleurs fiscaux n'auront donc pas la táche facile.
Le plafond de 6,75 % qui limitait l'autonomie fiscale est supprimé. Les régions pourront dorénavant augmenter et diminuer sans restriction les taux de l'impôt des personnes physiques régional, à condition que la progressivité soit garantie. Ce principe offre certes aux entités fédérées des possibilités de mener leur propre politique fiscale, mais c'est sans compter les nombreuses limitations. Le législateur fédéral reste en effet exclusivement compétent pour la fixation de la base imposable, pour le précompte professionnel et pour la perception de l'impôt des personnes physiques. La concurrence déloyale doit être exclue. Les entités fédérées ne peuvent même pas invoquer de conflit d'intérêts si l'autorité fédérale modifie la base imposable, le taux d'imposition ou un autre élément intervenant dans le calcul de l'impôt des personnes physiques. La Cour constitutionnelle doit même garantir cette loyauté fédérale. Que faut-il d'ailleurs entendre précisément par cette loyauté fédérale ?
L'autonomie de la partie des recettes de l'impôt des personnes physiques localisée dans la région est par ailleurs très relative, étant donné qu'en vertu de la progressivité, les centimes additionnels différenciés par tranches de revenu ne peuvent être inférieurs à 90 % du taux d'additionnel régional le plus élevé parmi les tranches inférieures d'impôt et que l'avantage fiscal du contribuable ne peut dépasser 1 000 euros. Des mesures restrictives font en sorte qu'une région n'aura en réalité que très peu d'influence sur la pression fiscale. De plus, les leviers restent entre les mains du pouvoir fédéral, ce qui constitue un handicap supplémentaire pour pouvoir mener une politique propre. La fiscalité constitue pourtant un pilier très important de la politique. Plus la responsabilité fiscale est grande, plus on est économe avec les moyens disponibles. Dans ce cadre, la concurrence fiscale entre régions devrait pouvoir jouer pleinement son rôle. La diminution d'une taxe dans une région pourrait dans ce cas constituer un incitant important pour favoriser la responsabilisation des autres régions. Une croissance économique plus élevée serait également bénéfique pour la fédération. L'intervenant renvoie, dans ce contexte, à l'exemple des droits de succession et de donation, pour lesquels une baisse des taux dans une région a été suivie dans les autres régions, ce qui a entraîné globalement une hausse des revenus.
Le financement des entités fédérées continue à dépendre dans une large mesure des dotations fédérales. Il résulte de l'accroissement de l'autonomie fiscale régionale que les moyens des régions s'inscrivent davantage dans la ligne du mode de calcul classique formulé en la matière par l'OCDE. Dans les pays de l'OCDE, les moyens des autorités décentralisées sont constitués de recettes propres à concurrence de 60 % environ, et de dotations pour 40 %. Les communautés restent cependant totalement dépendantes des dotations fédérales. Il n'est pas question d'autonomie pour ce qui est des revenus. Dans son ensemble, l'autonomie fiscale des entités fédérées demeure dès lors largement en-dessous de la moyenne.
M. Laeremans souligne qu'il découle du principe de subsidiarité qu'il est souvent préférable que les compétences fiscales soient réglées par un niveau de pouvoir inférieur. Il est frappant de constater que, dans d'autres États fédéraux, les compétences fiscales locales sont généralement beaucoup plus importantes qu'en Belgique. Il est urgent de procéder à une réforme en vertu de laquelle les différents niveaux de pouvoir seront pleinement compétents pour financer les táches qui leur sont confiées.
Les compétences transférées représentent 20 milliards d'euros, mais seuls 87,5 % des moyens y afférents sont transférés aux régions en même temps que ces compétences. Les entités fédérées doivent donc procéder à un assainissement pour un montant de 2,5 milliards d'euros. Cela signifie qu'en 2014, la Flandre doit débourser au moins 150 millions d'euros, et qu'en 2015-2016, ce montant s'élèverait à 1,3 milliard d'euros. Il s'agit notamment, en l'occurrence, de la contribution de responsabilisation pour les pensions des fonctionnaires flamands, alors que le régime de pension lui-même restera fédéral.
Le groupe de réflexion académique VIVES a calculé que la nouvelle loi de financement fera augmenter de 20 % les transferts d'argent depuis la Flandre d'ici 2030. De plus, le rythme de croissance de plusieurs dotations sera inférieur à la croissance économique réelle.
Le fait d'attribuer directement aux régions une partie de l'impôt des personnes physiques a pour conséquence que le bonus lié à l'élasticité reviendra intégralement au niveau fédéral. Il résulte de l'élargissement de l'autonomie fiscale que ces moyens supplémentaires seront répartis, à l'avenir, entre le niveau fédéral pour environ 75 %, et les régions pour les 25 % restants. Pour l'autorité fédérale, la perte sera compensée par une série de dotations, réparties selon la clé de l'impôt des personnes physiques, qui ne seront liées que partiellement à la croissance économique réelle. L'autorité fédérale se couvre, pour ainsi dire, contre une baisse de ce bonus lié à l'élasticité, alors que les régions doivent compter sur une élasticité suffisamment élevée et sur une croissance économique structurellement significative pour arriver à une situation « win-win ». En ce qui concerne la notion d'élasticité même, il n'existe aucune unanimité dans la littérature économique.
Il est par ailleurs particulièrement difficile d'évaluer l'évolution future de cette élasticité de l'impôt des personnes physiques et de prévoir l'ampleur et la répartition des moyens. Il est quasiment impossible de prévoir aujourd'hui quel niveau de pouvoir sera parmi les gagnants ou les perdants en 2030. Aujourd'hui, il est cependant clair qu'il ne peut être question d'une situation « win-win » que si cette élasticité est très élevée. C'est pourquoi il est d'une importance capitale que ce point soit renégocié.
En ce qui concerne la Région de Bruxelles-Capitale, M. Laeremans indique que celle-ci a gagné au Win for Life. Chaque année, elle obtiendra un demi milliard d'euros de moyens supplémentaires, sans contrepartie significative comme une simplification administrative ou une réforme institutionnelle interne. Ce refinancement n'améliorera pas la situation de la Région de Bruxelles-Capitale, étant donné qu'il n'est pas question d'une simplification intrabruxelloise, ni d'une augmentation de l'efficacité. Les bourgmestres ne sont pas enclins non plus à transférer des compétences vers la Région.
Le refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale ne contribuera pas à améliorer la situation à Bruxelles. La politique menée et les mécanismes de transfert intégrés ne feront qu'attiser de plus en plus l'appétit financier de la Région. En outre, la compensation exigée par l'autorité flamande en contrepartie d'une augmentation du flux financier vers la Région de Bruxelles-Capitale est une coquille vide. La Flandre espérait une refonte structurelle des zones de police en une seule zone, un transfert substantiel de compétences des communes vers la Région et une fusion des CPAS.
L'intervenant se déclare donc favorable en l'espèce à une fusion limitée des communes bruxelloises.
En ce qui concerne le mécanisme de solidarité, le principe de localisation est aujourd'hui compensé trop fréquemment et de manière excessive par le mécanisme de solidarité. Le mécanisme de solidarité actuel a un effet très « pervers »: après répartition des moyens et application de la solidarité, la région créditrice conserve souvent moins de moyens que la région bénéficiaire.
Un tel mécanisme n'incite pas les régions bénéficiaires à prendre davantage leurs responsabilités. Pour la Wallonie et Bruxelles, ce mécanisme fait disparaître toute incitation à mener une politique plus efficace.
Il est plus facile, en effet, de compter sur la solidarité en restant sous perfusion plutôt que de mener soi-même une politique économique efficace. Les chiffres suivants sont édifiants à cet égard: lors de sa création en 1989, la Région de Bruxelles-Capitale affichait un taux de chômage de 12 % et se caractérisait par un revenu moyen élevé. Entre-temps, le taux de chômage a quasi doublé et le revenu moyen est le plus faible du pays.
L'intervenant doit bien constater que le système proposé n'apportera pas de grands changements. En effet, en liant la solidarité à la croissance économique, cette intervention va croître encore plus vite qu'avant. En outre, le montant d'égalisation au cours de la première année et la longue période de transition de vingt ans ont pour effet de « bétonner » la solidarité.
M. Laeremans en conclut, avant d'en venir aux études de la KU Leuven — Vives, que cette sixième réforme de l'État, et le volet du financement en particulier, constitue une désillusion pour la Flandre. Bruxelles est la grande gagnante de cette réforme et la Wallonie a l'assurance de pouvoir encore bénéficier de transferts financiers pendant au moins vingt ans. Il n'y a donc toujours rien à ce jour qui puisse les inciter à remettre de l'ordre dans leur gestion.
L'intervenant rappelle les dix objectifs (formellement, il y en a douze) que les huit partis signataires de l'accord Papillon se sont fixés dans le cadre de la réforme de la loi spéciale de financement (cf. Accord institutionnel — 2011, p. 56):
1. éviter toute concurrence fiscale déloyale;
2. maintenir les règles de progressivité de l'impôt des personnes physiques;
3. ne pas appauvrir structurellement une ou plusieurs entités fédérées;
4. assurer la viabilité à long terme de l'État fédéral;
5. renforcer la responsabilisation des entités fédérées;
6. tenir compte des externalités, de la réalité sociologique et du rôle de la Région de Bruxelles-Capitale;
7. prendre en compte des critères de population et d'élèves;
8. maintenir une solidarité entre entités, exonérée d'effets pervers;
9. assurer la stabilisation financière des entités;
10. renforcer l'autonomie fiscale.
M. Laeremans donne lecture du « Briefing » de Geert Jennes paru dans VIVES-Briefings, intitulé « De hervorming van de BFW: een beoordeling van zijn gevolgen voor het Belgische begrotingsfederalisme » (La réforme de la LSF; une évaluation de ses conséquences pour le fédéralisme budgétaire belge (traduction)) (juillet 2013), parce que ce texte confirme sur de nombreux points les critiques émises par l'intervenant au sujet de la réforme proposée et montre que le projet de loi spéciale à l'examen ne répond que très partiellement aux dix objectifs précités (voir: http://www.econ.kuleuven.be/VIVES/publicaties/briefings/BRIEFINGS/briefing-evaluatie-nieuwe-bfw-8.pdf) :
« Résumé et conclusion:
À la lumière de la simulation des recettes, nous évaluons ci-après dans quelle mesure la réforme imminente de la loi spéciale de financement (LSF) parviendra à réaliser les dix objectifs (cf. infra) que se sont fixés les huit partis qui ont conclu l'Accord Papillon en octobre 2011.
Alors que d'après notre simulation, l'objectif nº 4, « assurer la viabilité de l'État fédéral », sera atteint — en ce qui concerne les recettes du moins —, cela se fera aux dépens de l'objectif nº 3, « ne pas appauvrir structurellement une ou plusieurs entités fédérées », c'est-à-dire au détriment essentiellement de la situation budgétaire de la Communauté flamande, et dans une moindre mesure de celle de la Région wallonne et de la Communauté française. La réforme de la LSF introduit des mécanismes majeurs qui réduiront les recettes des communautés et surtout de la Communauté flamande.
Par ailleurs, d'après nos simulations, la réforme n'atteint pas vraiment l'objectif nº 5, « renforcer la responsabilisation des entités fédérées », essentiellement parce qu'elle causera une diminution de la part que les régions et les communautés perçoivent des recettes totales et qui est liée aux recettes de l'impôt sur le territoire de la région concernée.
La réforme réalise raisonnablement ses objectifs nos 7 et 8 qui concernent le financement égal des services publics sur le territoire belge. C'est principalement la fin du « turbo Lambermont » qui a pour effet que les communautés sont de nouveau financées davantage en fonction de critères de besoins qu'en fonction de critères de recettes d'impôt, bien que cela maintienne le paradoxe des revenus dans notre pays. Cela signifie que, sous le régime de la LSF, les autorités régionales et communautaires actives sur le territoire d'une région dont la part dans les recettes fiscales fédérales est la plus importante par habitant ne touchent pas la plus grande partie des moyens par habitant.
Enfin, nous constatons que la réalisation de l'objectif nº 10, « renforcer l'autonomie fiscale », est insuffisante, parce que la réforme de la LSF entraîne une augmentation du « vertical fiscal gap », c'est-à-dire la différence entre les recettes totales des régions et des communautés et la part de ces recettes qui est financée par les rentrées fiscales propres de ces entités. L'autonomie fiscale des régions et des communautés en soi augmente effectivement, mais leurs recettes totales augmentent dans une plus grande mesure encore.
Une simulation (= analyse statique) de l'impact de la LSF sur les recettes n'est toutefois qu'une manière d'évaluer la réforme de la LSF. Une optique encore plus importante consiste à vérifier statistiquement quel est l'impact du mode de financement des régions et des communautés prévu par la LSF sur les objectifs de croissance et d'économies des politiques régionale et communautaire (= analyse dynamique). C'est là un domaine qui est encore presque entièrement en friche en Belgique, contrairement aux autres pays dans lesquels des autorités subcentrales sont dotées de compétences importantes, comme le Canada, l'Allemagne, les États-Unis, la Suède et la Suisse.
Sur la base des constats établis à l'étranger, il est permis de craindre qu'en raison de l'augmentation du « vertical fiscal gap », la réforme continue à exercer une pression à la hausse sur le niveau des dépenses, via l'illusion fiscale, et sur le niveau d'endettement, via le « moral hazard », des communautés et des régions (ce qui irait à l'encontre de l'objectif nº 9, « assurer la stabilisation financière des entités fédérées »). Nous estimons que le risque d'une plus grande pression à la hausse sur les niveaux des dépenses et de l'endettement est un constat plus important que les constats basés sur nos simulations dans les domaines des effets statiques sur le niveau des recettes, du paradoxe des revenus et de la responsabilisation.
Concernant la Région de Bruxelles-Capitale en particulier, nous sommes amenés à conclure que tant le refinancement en soi que le choix de l'opérer entièrement avec des dotations supplémentaires sont insuffisamment étayés du point de vue empirique. La réforme de la LSF aura pour conséquence que la Région de Bruxelles-Capitale bénéficiera d'encore davantage de financements supplémentaires que les deux autres régions, et ce alors que le besoin de financement supplémentaire de la Région de Bruxelles-Capitale n'a pas été suffisamment démontré d'un point de vue empirique. Simultanément, le choix d'opérer ce refinancement entièrement au moyen de dotations risque de renforcer encore davantage l'inefficacité de la Région de Bruxelles-Capitale en matière d'affectation de ses moyens et, assez paradoxalement, d'augmenter son niveau d'endettement.
On peut d'ailleurs adresser la critique d'un manque de fondement empirique à l'ensemble de la réforme de la LSF ainsi qu'aux réformes précédentes de la LSF. Plus précisément, ni le refinancement de l'autorité fédérale, que la LSF permettra de réaliser moyennant une élasticité réaliste, ni les économies à charge de la Communauté flamande, qui serviront de facto à financer le niveau fédéral, n'ont été basés sur une analyse préalable du coût et de l'efficacité des compétences et des dépenses des autorités respectives.
Nous recommandons avec insistance que les prochaines réformes éventuelles de la LSF se fondent davantage sur l'expérience internationale en matière de fédéralisme budgétaire. Il serait encore plus judicieux de développer une plus grande expérience en matière de fédéralisme budgétaire belge. »
M. Laeremans pense qu'il s'agit peut-être en l'occurrence d'une táche qui pourrait incomber au nouveau Sénat, lequel pourrait examiner et évaluer si la réforme proposée résiste effectivement au test empirique. Il serait encore plus opportun de mettre sur pied un service d'étude fédéral chargé de réaliser pareille étude scientifique en toute objectivité et de formuler des recommandations permettant de corriger la législation.
D'après M. Laeremans, les négociateurs de l'accord Papillon ont négligé d'effectuer une comparaison internationale avec d'autres États fédéraux, alors que cela aurait quand même permis d'esquisser une image plus complète.
S'il est vrai que l'étude de l'institut flamand VIVES nous aide à nous faire une idée de l'impact de la réforme en projet de la loi spéciale de financement (LSF) sur le fédéralisme budgétaire belge, elle ne souffle mot sur les contributions à l'assainissement (encore inconnues à l'époque) à hauteur de 2,5 milliards d'euros, alors que celles-ci ont bien été prises en compte dans l'étude réalisée par l'Université de Namur et l'ULB.
L'institut VIVES a donc comparé les effets sur les recettes de l'ancienne et de la nouvelle loi de financement sur la période 2012-2030. De plus, il a également tenu compte d'autres études, comme celle de MM. Decoster et Sas (2013), celle de M. Jennes (2012) et celle de M. Heremans et Mme Van Hecke (2012).
L'étude de M. Jennes diffère significativement de celle de MM. Decoster et Sas en ce qu'elle se fonde sur des prévisions de croissance économique plus récentes et moins favorables que celles sur lesquelles les partis de la majorité se sont basés pour établir leur compromis. Les prévisions moins favorables se traduisent par une perte substantielle pour les régions et les communautés. M. Jennes a également ventilé pour les différentes autorités des régions et des communautés l'impact en matière de recettes entre les différentes composantes des dotations de l'ancienne et de la nouvelle loi de financement et en tire d'autres conclusions pour ce qui concerne l'impact de la réforme sur le paradoxe de revenus et sur l'autonomie fiscale.
Autre différence, M. Jennes situe l'impact de la réforme de la loi de financement sur l'autonomie fiscale dans la littérature internationale, qui compare les effets d'un fédéralisme budgétaire surtout basé sur des dotations, comme le système belge, avec les effets d'un fédéralisme budgétaire surtout basé sur l'autonomie fiscale, comme le système canadien ou suisse. Il apparaît que le débat belge fait en grande partie l'impasse sur les différents effets que peut avoir un financement par dotations sur l'attitude des autorités par comparaison avec un financement par taxation propre — c'est-à-dire l'économie politique du fédéralisme budgétaire en général.
D'après M. Laeremans, les résultats des simulations de M. Geert Jennes brossent un tableau surprenant.
Dans son étude, M. Jennes donne d'abord un aperçu des principales modifications apportées à la loi de financement dans le cadre de la Sixième Réforme de l'État (p. 8).
Il examine l'impact de la réforme de la loi de financement sur la base de quatre critères: (1) la neutralité budgétaire pour les instances concernées, (2) un financement égal des services publics par les autorités des régions et des communautés, (3) la responsabilisation des régions et des communautés, et (4) l'autonomie fiscale et le « vertical fiscal gap ».
« Notre premier critère d'évaluation de la réforme de la LSF est son degré de neutralité budgétaire pour l'autorité fédérale (à laquelle nous intégrerons toujours ci-après la sécurité sociale (AF+SS)), pour les R&C prises globalement, et pour les différentes autorités qui composent distinctement les R&C. Considérer l'angle de la « neutralité budgétaire », c'est-à-dire « l'impact de la réforme de la LSF sur les recettes totales par instance fédérée » équivaut à dresser le « compte des perdants et gagnants budgétaires de la réforme ». »
M. Laeremans se réfère ensuite aux graphiques 1 et 2 de l'étude de l'institut VIVES (pp. 11 et 12).
Graphique nº 1: Gain et perte de recettes pour l'autorité fédérale et pour les autorités respectives des régions et communautés (R&C) (en % du PIB) à la suite de la réforme de la LSF, dans l'hypothèse d'une élasticité de 1,25.
M. Laeremans déduit du graphique nº 1 que c'est la Communauté flamande qui perd le plus (le léger gain de la Région flamande ne suffisant pas à compenser la perte considérable de la Communauté flamande).
Ce graphique illustre que, dans le scénario d'une élasticité d'1,25, l'autorité fédérale et la sécurité sociale gagnent (légèrement) aux dépens des communautés et régions. Un gain (ou une perte) pour l'autorité fédérale suite à la réforme de la loi de financement entraîne une perte (ou un gain) équivalent(e) pour les régions et communautés, et vice-versa.
Le graphique nº 1 montre également que, dans l'hypothèse d'une élasticité d'1,25, l'impact de la réforme sur les budgets de la Région wallonne, de la Communauté française et de la Région de Bruxelles-Capitale — dénommées ci-après les trois entités fédérées francophones — est quasiment neutre.
M. Laeremans ajoute que la Région de Bruxelles-Capitale est en effet considérablement refinancée, tandis que la Région wallonne et la Communauté française voient leur budget en partie diminué, mais ces dernières ont déjà demandé à la Région de Bruxelles-Capitale de transférer une partie de ses moyens pour parvenir à un équilibre budgétaire. En d'autres termes, elles transfèrent ces moyens financiers entre elles.
Le graphique nº 1 fait également apparaître que, selon les dernières prévisions de croissance économique réalisées par le Bureau du Plan, une élasticité d'1,25 n'est pas suffisante pour garantir un impact neutre de la réforme de la loi de financement sur le budget de la Flandre (Région + Communauté).
Pour l'intervenant, c'est clair: la Flandre est perdante dans cette réforme. Les cotisations de pension supplémentaires pour les fonctionnaires des régions et des communautés augmenteront sensiblement en 2016, ce qui se traduira par une perte en forte hausse pour les deux communautés entre 2015 et 2016, l'année où les cotisations de pension atteindront leur vitesse de croisière.
Graphique nº 2: Recettes de l'autorité fédérale comparées à celles des communautés et régions (en pourcentage du PIB) sous l'empire de l'ancienne loi spéciale de financement, dans l'hypothèse d'une élasticité de l'impôt sur les personnes physiques d'1,25.
Alors que le graphique nº 1 démontre que l'autorité fédérale est gagnante dans cette réforme de la loi de financement, le graphique nº 2 fait apparaître que l'ancienne loi de financement n'était pas non plus une mauvaise affaire pour le fédéral. Que du contraire. Comme l'ancienne loi de financement attribuait la totalité du bonus « élasticité de l'impôt des personnes physiques » à l'autorité fédérale, la part de cette dernière dans l'ensemble des recettes publiques belges aurait aussi continué à augmenter sous l'ancienne loi de financement, au détriment des régions et communautés.
M. Laeremans ajoute que la répartition des cotisations d'assainissement est telle que l'autorité fédérale recevra chaque année 2,5 milliards d'euros, ce qui représente un gain énorme pour cette dernière.
Graphique nº 3: Gain et perte de recettes pour l'autorité fédérale, les communautés et les régions (en pourcentage du PIB) en conséquence de la réforme de la loi spéciale de financement, dans l'hypothèse d'une élasticité d'1,1.
Selon l'étude réalisée par VIVES, on a toutefois des raisons de présumer que l'accord « Papillon » est fondé sur une élasticité trop élevée de l'impôt des personnes physiques, comme, par exemple, l'élasticité observée par le passé et l'argument selon lequel l'hypothèse d'une politique inchangée n'est pas pas réaliste dans le scénario d'une élasticité d'1,25. « (traduction) Imaginons une élasticité de l'impôt des personnes physiques inférieure, comme l'élasticité de 1,1 supposée dans le graphique nº 3; on constate alors que la valeur de l'élasticité supposée est déterminante en termes d'impact budgétaire de la réforme de la loi de financement. La différence majeure entre le graphique nº 1 et le graphique nº 3 est que l'autorité fédérale est encore bien plus gagnante dans cette réforme. Le gain important de la Région flamande dans le scénario d'une élasticité d'1,25 serait nettement inférieur dans le scénario d'une élasticité d'1,1. Ceci s'explique par le fait que la Région flamande, au lieu de recevoir la même dotation de l'impôt des personnes physiques que sous l'ancienne loi de financement, se verra attribuer, sous la nouvelle loi de financement, un bonus « élasticité » moindre. En effet, l'ancienne dotation « impôt des personnes physiques » n'était pas subordonnée à l'élasticité de l'impôt des personnes physiques. Le gain inférieur de la Région de Bruxelles-Capitale et la perte générée pour la Région wallonne contribuent au gain de l'autorité fédérale, mais dans une plus faible mesure car la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale sont de plus petites entités que la Région flamande.
Une comparaison des graphiques nos 1 et 3 montre aussi que le gain ou la perte, selon le cas, des autorités communautaires n'est pas lié à l'élasticité supposée. Cela n'est pas étonnant, car les centimes additionnels de l'impôt sur les personnes physiques ne profitent qu'aux régions. Indépendamment de l'élasticité, la perte (importante) de la Communauté flamande s'accroît avec le temps, tandis que la perte (légère) accusée par la Communauté française reste plus ou moins stable dans le temps. Par ailleurs, le graphique nº 3 montre qu'avec une élasticité de 1,1, le rapport gain/perte sur l'ensemble de la période considérée sera globalement très négatif pour l'autorité flamande, mais ne sera que légèrement négatif pour les trois autorités francophones cumulées (Région wallonne, Communauté française et Région de Bruxelles-Capitale). »
Graphique nº 4: Gain et perte de recettes pour l'autorité fédérale et les autorités régionales et communautaires (en % du PIB) à la suite de la réforme de la loi de financement, calculés en fonction d'une élasticité de 1,1 sur la base de chiffres relatifs à la croissance économique d'août 2011.
Le graphique nº 3 illustre la sensibilité de l'impact budgétaire en ce qui concerne l'élasticité de l'impôt sur les personnes physiques, tandis que le graphique nº 4 porte sur la sensibilité de l'impact budgétaire en ce qui concerne la croissance économique. Comme chiffres de croissance économique, le graphique 4 utilise les chiffres calculés par le Bureau du Plan en août 2011, qui sont considérablement plus positifs — en particulier pour la période allant jusqu'à 2016 inclus — et qui ont aussi été utilisés par les négociateurs de l'accord Papillon.
M. Anciaux conteste le fait que les négociateurs se seraient uniquement basés sur les chiffres du Bureau du Plan. Ils se sont basés sur des moyennes, notamment les chiffres du Bureau du Plan, mais également ceux de la Banque nationale.
M. Laeremans cite un passage de l'étude réalisée par le VIVES: « La conséquence de l'utilisation de ces chiffres de croissance plus favorables est que le calcul des gains et pertes budgétaires occasionnés par la réforme est moins favorable à l'autorité fédérale et moins défavorable aux communautés et régions. Cela s'explique par le fait que le calcul gain/perte pour les deux communautés évolue plus favorablement en cas d'embellie de la croissance économique belge. Une des raisons en est que la nouvelle loi spéciale de financement intègre la dotation de la redevance radio-TV dans la dotation TVA, si bien que l'évolution de cette dotation dépendra désormais également de la croissance économique et pas seulement de l'inflation. » (traduction)
« Ce constat permet de tirer une deuxième conclusion concernant les effets budgétaires de la réforme. La réforme rend les budgets des communautés et des régions plus sensibles non seulement à l'importance de l'élasticité de l'impôt sur les personnes physiques, mais également aux évolutions de la croissance économique belge globale, qui, à son tour, dépend dans une large mesure de la conjoncture internationale. » (traduction)
M. Jennes tire la conclusion que ce constat rejoint les constatations d'Ernaelsteen (cf. étude réalisée par l'Université de Namur).
Dans son étude, Jennes se base sur une élasticité de 1,1 pour examiner les effets budgétaires de la réforme des différentes dotations au sein d'une même région ou communauté. Les résultats obtenus sont présentés dans les graphiques nos 5 à 9. Sa conclusion générale est la suivante: « En matière de dotation TVA, le gain de la Communauté française est de surcroît supérieur à la perte de la Communauté flamande. Une partie du gain de la Communauté française est dès lors financée par l'autorité fédérale, à travers la liaison verticale de la dotation « redevance radio-TV » à 91 % de la croissance économique sous l'empire de la nouvelle loi spéciale de financement. » (traduction)
Selon M. Laeremans, une partie du gain de la Communauté française est donc financée par l'autorité fédérale. La somme des évolutions défavorables de l'ensemble des dotations distinctes octroyées à la Communauté flamande sous l'empire de la nouvelle loi de financement explique la perte globale croissante de la Communauté flamande dans le temps.
L'évolution favorable dans le temps des deux dotations, à savoir la dotation TVA et le mécanisme de transition, explique pourquoi la perte de la Communauté française reste limitée.
En résumé, les graphiques nos 6 à 10 de cette étude montrent que sur une période de vingt ans:
— il y aura un impact positif majeur sur le refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale;
— la contribution majorée des communautés dans le financement des pensions de leurs fonctionnaires propres aura pour elles un impact négatif majeur;
— la suppression du « turbo Lambermont » aura un impact négatif majeur pour la Communauté flamande en comparaison avec l'impact positif pour la Communauté française.
« Il est à noter qu'aucun des impacts précités n'est lié au financement des nouvelles compétences attribuées aux communautés et aux régions en vertu de l'accord Papillon. Ces quatre grands impacts sont imputables à des modifications de flux financiers qui existaient déjà sous l'ancienne LSF. L'exception est le refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale, bien qu'il n'y ait pas de nouvelles compétences en contrepartie. » (traduction).
Selon M. Laeremans, le transfert de compétences n'est qu'un prétexte pour modifier la loi de financement à l'avantage des francophones. Si la Flandre obtient aujourd'hui des compétences supplémentaires, c'est au prix de nouveaux transferts vers la Wallonie. Il n'en a jamais été autrement.
M. Anciaux indique qu'il est clair pour tout le monde qu'il y a deux gagnants avec cette nouvelle loi de financement, à savoir l'autorité fédérale et la Région de Bruxelles-Capitale.
M. Laeremans en vient au deuxième critère d'évaluation de la réforme de la loi spéciale de financement, à savoir l'égalité de financement du service public sur l'ensemble du territoire. L'enseignement, par exemple, pourra donc être financé sur la base de critères identiques. C'est l'un des arguments que l'on a coutume d'invoquer pour légitimer un fédéralisme budgétaire fondé sur l'octroi de dotations plutôt que sur l'autonomie fiscale.
« Il y a de nombreux pays où les autorités locales n'ont pas toutes la même capacité à financer des services publics par leurs propres ressources fiscales. On remédie alors totalement ou partiellement à ces disparités en prévoyant un financement par dotations. Les régions moins favorisées bénéficient ainsi des mêmes services publics que les régions plus riches. En Belgique, l'application de ce principe notamment a pour conséquence que les autorités régionales et communautaires qui sont, par habitant, les principales bénéficiaires de la LSF sont actives sur le territoire de régions dont la part dans les recettes fiscales fédérales est la plus faible par habitant. On parle en l'espèce — de manière quelque peu trompeuse — du paradoxe des revenus. » (traduction)
C'est ainsi que la part de la Région flamande dans le volume global des recettes fiscales fédérales représentait 60,10 % en 2012 et atteindra 60,72 % en 2030. La part de la Flandre dans les recettes fiscales continuera donc à augmenter, alors que l'on s'attend, en termes proportionnels, à une baisse de sa population. Et on peut constater l'évolution inverse en Région wallonne. Le graphique nº 11 montre que la Région de Bruxelles-Capitale reçoit beaucoup plus par habitant que les deux autres régions (= paradoxe des revenus) en raison du mécanisme de financement actuel. Le graphique nº 12 montre que la réforme proposée amplifie le phénomène lié au paradoxe des revenus. Selon l'étude de Jennes, il y a deux raisons à cela:
— le refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale;
— la suppression du « turbo-Lambermont ».
Jennes pense qu'il n'y a guère d'arguments valables pour justifier la consolidation et l'amplification du paradoxe des revenus entre la Région de Bruxelles-Capitale et la Région flamande. Par le passé, on a avancé l'idée qu'un financement accru par habitant pour Bruxelles en tant que capitale et ville-centre générerait des « externalités » positives majeures pour les autres régions. Jennes considère que ces arguments ne sont pas suffisamment étayés d'un point de vue empirique et indique que dans l'ancien système de financement, Bruxelles était déjà la région la mieux financée.
À cet égard, M. Laeremans renvoie également au graphique nº 12 de l'étude de M. Jennes, qui donne un aperçu des recettes, par habitant, de chacune des communautés et régions, sous la nouvelle loi de financement. La Région de Bruxelles-Capitale recevra 461 millions d'euros supplémentaires. Un tel montant pèse bien plus lourd pour la Région de Bruxelles-Capitale que pour la Région flamande, par exemple, puisque cette dernière a un budget plus élevé et exerce ses compétences sur bien plus de gens. Si on calcule les recettes par habitant, la Région de Bruxelles-Capitale s'avère être la grande gagnante de la réforme de la loi de financement, avec environ 370 euros de recettes supplémentaires par habitant. À l'horizon 2030, la Région de Bruxelles-Capitale sera rejointe par l'autorité fédérale, qui est la deuxième grande gagnante, par habitant, de la réforme.
« La Flandre (Région + Communauté) est la grande perdante de la réforme de la loi de financement, avec 69 euros par habitant en 2015, montant qui augmentera progressivement pour atteindre 362 euros par habitant en 2030 (soit 207 euros par habitant, en euros de 2015). Les entités francophones dans leur ensemble (Région wallonne, Région de Bruxelles-Capitale et Communauté française) perdent beaucoup moins dans cette réforme, puisqu'elles ne commenceront à enregistrer une baisse qu'en 2022, perte qui atteindra jusqu'à 117 euros par habitant en 2030 (ce qui revient à 67 euros par habitant, en euros de 2015). »
Selon M. Laeremans, le gain pour la Région de Bruxelles-Capitale est donc quasi entièrement compensé par les pertes de recettes en Flandre. La Flandre compte toutefois beaucoup plus d'habitants que la Région de Bruxelles-Capitale. Elle paie donc non seulement le gain pour la Région de Bruxelles-Capitale, mais aussi une grande partie du gain pour l'autorité fédérale.
L'intervenant aborde ensuite le troisième critère d'évaluation, à savoir la responsabilisation (pp. 31-33).
« La responsabilisation est un concept souvent utilisé en Flandre pour évaluer la loi spéciale de financement. Cette notion peut toutefois avoir plusieurs sens. Nous définissons la responsabilisation comme la part des recettes d'une entité fédérée (région ou communauté) qui dépend de la recette d'un impôt déterminé sur le territoire de cette entité. Si on applique cette notion à la loi spéciale de financement, on obtient:
Responsabilisation
= (impôts + recettes réparties horizontalement selon la part dans les recettes de l'impôt des personnes physiques)/total des recettes
Le graphique nº 14 ne montre l'effet de la réforme de la loi spéciale de financement sur la responsabilisation qu'en 2015 parce que le refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale aura atteint sa « vitesse de croisière » en 2015. Nous constatons que la réforme de la loi spéciale de financement réduit sensiblement la responsabilisation: de 62 à 53 % des recettes totales des communautés et régions. Cette baisse globale est évidemment due au choix qui a été fait de financer toutes les nouvelles compétences communautaires et donc également tout le refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale par des dotations qui ne sont pas liées aux recettes de l'impôt sur le territoire de l'entité fédérée concernée, contrairement à ce qui a été décidé pour les nouvelles compétences régionales. Alors que la responsabilisation des Régions augmente légèrement (les dotations visant à financer les nouvelles compétences régionales sont effectivement liées à la recette régionale de l'impôt des personnes physiques), sauf pour la Région de Bruxelles-Capitale, celle des communautés diminue bien plus que n'augmente celle des régions. La diminution de la responsabilisation est également due à la « suppression du turbo Lambermont ». »
En conclusion, « la réforme de la loi spéciale de financement ne permettra pas, globalement, de réaliser l'objectif nº 5, à savoir « Renforcer la responsabilisation des entités fédérées », bien que le « piège à la croissance » soit supprimé pour la Région wallonne et la Région de Bruxelles-Capitale ».
M. Laeremans ne s'attarde pas sur le quatrième critère: autonomie fiscale et « vertical fiscal gap ».
M. Laeremans renvoie ensuite à l'article de M. Laurent Gérard « La Flandre, grande perdante de la sixième réforme de l'État », paru dans La Libre Belgique du 15 novembre 2013.
Cet article analyse les conséquences de la Sixième Réforme de l'État sur les dépenses et recettes de l'État fédéral ainsi que des régions et communautés. Le journaliste se base sur une étude du Centre de recherches en économie régionale et politique économique de l'Université de Namur (CERPE) et du Département d'économie appliquée de l'Université libre de Bruxelles (DULBEA).
Cette étude (voir cahier de recherche nº 65 du CERPE, téléchargeable sur: www.unamur.be/cerpe) conclut que l'État fédéral s'en sort bien puisque les budgets correspondant aux compétences transférées ne sont pas transférés dans leur intégralité. M. Laeremans rappelle l'application de la règle des 87,5 % appliquée au niveau du transfert des moyens.
L'étude conclut que Bruxelles se voit légèrement refinancée. C'était un des objectifs de la réforme.
Par contre, les autres entités perdent beaucoup de plumes dans l'affaire.
M. Laeremans relève que l'étude conjointe du CERPE et du DULBEA évalue la variation des recettes, des dépenses et du solde primaire de la Communauté flamande liées à la mise en œuvre de la sixième réforme de l'État à une perte, pour la Communauté flamande de 254 millions d'euros en 2014, 872 millions en 2015 et environ 1,7 milliards d'euros à partir de 2016. Sachant qu'un emploi coûte en moyenne 50 000 euros par ans, le socle compensatoire négatif pour la Communauté flamande correspond à un cadeau de la Flandre d'environ trente-cinq mille emplois. L'intervenant en déduit que la réforme proposée conduit à un véritable pillage de la Flandre, au nom d'une solidarité mal comprise.
L'étude confirme par ailleurs que le pouvoir fédéral est le grand bénéficiaire de la réforme puisqu'il réalisera, en 2025, un bonus de 2 374 milliards d'euros. Sachant que la Flandre perd environ 1,7 milliards d'euros, l'intervenant en déduit que la Flandre finance plus de 70 % de ce bonus fédéral.
M. Laeremans pense que ces chiffres sont difficilement contestables puisqu'ils sont le résultat de calculs effectués par des centres d'études dépendant d'universités francophones. On ne saurait soupçonner ces instituts de faire preuve de flamingantisme en publiant des conclusions qui noirciraient le tableau pour la Flandre. Adopter les textes à l'examen aura des répercussions particulièrement néfastes pour la Flandre.
M. Laeremans demande ensuite des précisions sur les conséquences financières de l'accord de la Sainte- Emilie conclu entre présidents des partis francophones en vue d'organiser l'exercice des compétences transférées dans le cadre de la sixième réforme de l'État.
M. Laeremans demande quelle est la réaction du gouvernement par rapport aux chiffres publiés dans l'étude du CERPE. Le gouvernement dispose-t-il de données différentes qui viendraient contredire cette étude ? Si le gouvernement reste en défaut d'apporter des éléments contraires, l'intervenant en déduira que les transferts financiers sont en fait la motivation profonde de la nouvelle loi de financement.
Enfin, M. Laeremans fait une lecture approbative de l'étude de M. Geert Jennes (KU Leuven — VIVES): « Een Kritische Evaluatie van de Studie Vanraes: « 720 miljoen extra voor Brussel » » (13 janvier 2011) (cf.: http://www.econ.kuleuven.be/VIVES/publicaties/briefings/BRIEFINGS/20110113briefing) :
« Une étude réalisée par les FUSL à la demande du ministre bruxellois des Finances (Verdonck et al., 2010) évalue à 720 millions d'euros les pertes en recettes et les dépenses non financées de la Région de Bruxelles-Capitale. Dans une évaluation critique de cette étude, nous concluons que ces 720 millions d'euros sont largement surévalués:
1) l'étude ne tient pas compte de diverses compensations de coûts déjà accordées, ni de la base imposable rentable de la Région de Bruxelles-Capitale;
2) pour certains coûts, l'étude réclame une double compensation;
3) certains manques à gagner résultent du choix institutionnel de Bruxelles d'être une Région;
4) et aucune proposition n'est élaborée en vue de réduire les dépenses, alors que de telles économies semblent souhaitables à la lumière d'une comparaison de la structure et du volume des dépenses des trois régions de Belgique.
Nous plaidons dès lors pour la réalisation d'une analyse coûts-profits globale de la fonction de capitale de Bruxelles, afin de contribuer aux arbitrages nécessaires dans ce débat si important dans le contexte institutionnel belge. Une étude des causes de la faible contribution de Bruxelles aux transferts interrégionaux de fonds publics en Belgique par rapport à la plupart des autres capitales de l'UE15 serait également la bienvenue.
Introduction
La demande des partis francophones de refinancement de Bruxelles à concurrence de 500 millions d'euros par an ayant été rejetée lors des négociations gouvernementales de l'été 2010, le gouvernement bruxellois a présenté en octobre 2010 une nouvelle étude réévaluant ce besoin de financement à 720 millions d'euros par an. Pour l'étude, ces 720 millions représentent la différence entre les surcoûts que Bruxelles supporte du fait de son rôle de grande agglomération et de capitale (d'après l'étude, ils s'élèvent à 1,2 milliard d'euros) et les recettes supplémentaires qu'elle perçoit d'ores et déjà de la part de l'autorité fédérale.
Les principaux surcoûts annuels évalués sont les suivants:
1. l'absence d'un fonds de compensation pour Bruxelles financé par des cotisations de la périphérie bruxelloise (437 millions);
2. les coûts générés par les navetteurs (235 millions);
3. le manque à gagner lié à l'étroitesse géographique de la Région (90 millions);
4. le surcoût lié à la précarité propre aux grandes villes (90 millions);
5. les exonérations d'impôts prévues entre autres pour l'UE et l'OTAN (312 millions).
Ces surcoûts ne seraient jusqu'à présent compensés qu'en partie, d'où un surcoût non couvert de 720 millions d'euros.
Le mérite de la nouvelle étude est d'avoir réinscrit à l'ordre du jour la nécessité de réaliser une analyse coûts-bénéfices (ACB) détaillée — et de préférence une analyse comparative internationale — du rôle de capitale et de grande agglomération de Bruxelles. (...)
1. Quelques détails de l'étude réalisée pour le ministre Vanraes
Les arguments invoqués pour justifier les 720 millions supplémentaires réclamés pour Bruxelles semblent ne pas faire grand cas des choix institutionnels jadis effectués par Bruxelles, ni des recettes fiscales et interventions financières dont Bruxelles bénéficie déjà:
— l'absence d'un fonds communal bruxellois plus large (1) et le manque à gagner lié à l'étroitesse géographique de la Région (4) sont la conséquence du choix de Bruxelles d'être une Région;
— le manque de subventionnement fédéral des revenus d'intégration et autres allocations (5) est la conséquence de la volonté de la Région bruxelloise de conserver dix-neuf communes autonomes (et donc dix-neuf CPAS). L'intervenant ajoute qu'il y voit un modèle d'inefficacité et recommande de réunir les dix-neuf centres au sein d'un seul grand CPAS;
— les coûts induits par les navetteurs paraissent surévalués (2) et la dotation annuelle fédérale Beliris a été spécialement créée dans les années 90 pour les compenser (3). D'après l'intervenant, la situation sera encore pire avec l'arrivée du RER puisqu'il incitera les habitants à quitter la ville;
— enfin, les exonérations fiscales dont bénéficient les institutions internationales (6) sont d'ores et déjà largement compensées par une contribution de solidarité supérieure que prévoit la loi spéciale de financement (LSF) et par l'activité économique plus intense induite par la simple présence de ces institutions au sein de la Région, avec pour conséquence des recettes plus élevées de ses impôts régionaux.
Nous commentons ci-après plus en détail les surcoûts énumérés ci-avant.
a. Absence d'un fonds communal plus large (437 millions)
L'étude soutient que Bruxelles est trop petite en tant que Région pour avoir un hinterland qui puisse être solidaire avec la métropole, tout comme de petites communes flamandes (ou wallonnes) le sont avec les villes flamandes (ou wallonnes) via le fonds communal flamand (ou wallon). Cette étude dénonce le fait qu'à la suite de la régionalisation du fonds communal en 1970, la part de Bruxelles dans la totalité des moyens répartis sur les trois fonds communaux belges résultant de cette régionalisation ait subitement été ramenée de 20,5 à 9,36 %. Or, c'est précisément la conséquence du voeu explicite de Bruxelles d'être une (petite) « région à part entière ». À Bruxelles, la dotation attribuée, par habitant, au fonds communal (bruxellois) est aussi élevée qu'en Flandre et en Wallonie. La grande différence, en revanche, tient dans le fait que les grandes villes de Flandre et de Wallonie reçoivent proportionnellement (bien) plus de moyens de leurs fonds communaux respectifs, mais au détriment d'autres communes de leur région (solidarité entre des communes plus petites et des grandes villes).
Un autre problème en ce qui concerne ce poste de coûts (le plus grand de la nouvelle étude), c'est qu'il existe ici un risque considérable de double comptage avec d'autres postes de coûts invoqués, comme, par exemple, les frais de transport des navetteurs, et une subvention manquée pour la précarité propre aux grandes villes.
b. Coûts générés par les navetteurs (235 millions)
30 % des dépenses régionales en matière de transport serviraient, d'après la nouvelle étude, à assurer le transport des navetteurs, alors qu'on s'attendrait plutôt à ce que les pouvoirs publics flamands (voies d'accès et ring autour de Bruxelles) et l'autorité fédérale (SNCB) supportent la majeure partie des coûts de transport des navetteurs. Pour arriver au résultat de 30 %, on a apparemment calculé la part du trafic des navetteurs lors des heures de pointe, ce qui, au total, donne une surévaluation. Il nous semblerait plus raisonnable de ne considérer comme coûts pour les navetteurs que les coûts de l'offre STIB complémentaire requise pendant les jours ouvrés.
Nous estimons non seulement que les frais de navette sont surestimés, mais aussi que la navette vers Bruxelles est révélatrice d'un phénomène sous-jacent bien plus important. Dans son « Évaluation d'un cadre entrées-sorties régional pour la Belgique », le Bureau fédéral du Plan (Avonds et autres 2008): déclare que « (...) la contribution analytique de la Région bruxelloise au PIB belge est sensiblement inférieure à sa contribution statistique. Une petite moitié de la valeur ajoutée créée en Région bruxelloise trouve (directement ou indirectement) son origine dans la demande finale des autres régions ». En d'autres termes, les acteurs économiques qui ne résident pas dans la Région de Bruxelles-Capitale contribuent dans une large mesure au fait que Bruxelles ait le PIB par habitant le plus élevé des trois régions belges et que Bruxelles représente près de 20 % du PIB belge.
Les navetteurs qui prennent chaque jour la direction de la Région de Bruxelles-Capitale peuvent donc généralement être considérés comme des travailleurs qui assurent une production répondant à une demande des autres régions, qui sont dotés des aptitudes professionnelles nécessaires acquises gráce à l'enseignement qu'ils ont la plupart du temps suivi dans leur région de résidence, et que Bruxelles ne parvient pas à trouver sur son propre territoire. Les navetteurs peuvent être considérés comme des acteurs économiques qui, plutôt qu'exporter la prospérité hors de Bruxelles, l'importent dans la capitale. Ce n'est pas Bruxelles qui crée les emplois à Bruxelles pour les navetteurs, mais ce sont les entreprises en Flandre et en Wallonie qui font appel au secteur des services bruxellois et qui créent ainsi des emplois.
En conclusion, une analyse coûts-bénéfices approfondie, déjà recommandée plus haut, est plus que nécessaire, en ce qui concerne spécifiquement le trafic des navetteurs.
c. Beliris
De plus, en ce qui concerne les coûts (d'infrastructure et de transport) des navetteurs, l'étude suit le raisonnement suivant: la dotation Beliris annuelle ne compense pas tous les coûts que la fonction de capitale de Bruxelles impose aux habitants de Bruxelles. Qui plus est, l'étude réduit la dotation Beliris du montant affecté aux dépenses censées ne pas bénéficier aux habitants de Bruxelles, à savoir 29 millions d'euros. Or, à l'origine, Beliris avait précisément pour but de financer des projets censés bénéficier aux navetteurs et autres acteurs économiques qui choisissent Bruxelles précisément parce que Bruxelles est une capitale, en d'autres termes, principalement des projets d'infrastructure aux effets de débordement considérables. Le but de Beliris n'est donc pas de profiter directement aux habitants de la Région de Bruxelles-Capitale. Il nous semble que la nouvelle étude ne tient pas compte de l'objectif initial de Beliris. On reproche à Beliris de ne pas profiter davantage aux Bruxellois qu'aux navetteurs et aux touristes, alors que le but initial de Beliris était d'éviter que Bruxelles doive couvrir elle-même les coûts générés par des non-résidents du fait de son statut de capitale.
Se pose toutefois un second problème. Dans la nouvelle étude, un financement Beliris supplémentaire est demandé, notamment pour élargir le réseau du métro bruxellois, et donc pour soutenir financièrement le type de projets pour lesquels Beliris a initialement été créé. Mais la dotation Beliris annuelle de 125 millions d'euros est aujourd'hui déjà dépensée, en partie, pour des projets ne présentant aucun lien direct avec les fonctions de capitale, comme, par exemble, le subventionnement des institutions culturelles et scientifiques et l'embellissement de quartiers fragilisés. (cf. tableau 1) En outre, la nouvelle étude fait elle-même apparaître (à la page 56) qu'un certain nombre de dépenses effectuées via Beliris par le passé auraient de toute façon été effectuées, même sans Beliris. L'objectif de Beliris n'est donc pas atteint, du moins en partie. Enfin, on peut mentionner que, dans le cadre de la relance économique, les montants pour 2009 et 2010 de la dotation Beliris ont été relevés respectivement à 195 et 150 millions d'euros.
d. Manque à gagner lié à l'étroitesse géographique de la Région (90 millions)
Dans l'étude, on demande que Bruxelles puisse bénéficier d'un financement fédéral compensatoire pour couvrir le surcoût lié aux structures politiques et administratives. M. Jennes utilise un tableau basé sur les calculs de Robert Deschamps et al. de l'Université de Namur pour montrer que c'est à Bruxelles effectivement que ces structures coûtent le plus. Cela s'explique en partie par le fait que les coûts fixes que doivent supporter les autorités de petites régions sont proportionnellement plus élevés (inconvénient d'échelle). Mais c'est Bruxelles elle-même qui a voulu constituer à elle seule une petite région (« à part entière »). En outre, plusieurs responsables politiques bruxellois plaident eux-mêmes pour une simplification des structures administratives bruxelloises et pour une réduction du nombre d'acteurs administratifs. Enfin, Bruxelles bénéficie déjà à l'heure actuelle d'un financement fédéral considérable en vertu de son statut spécial d'entité administrative bilingue et ce, en faveur essentiellement des commissions communautaires (qui ne sont pas prises en considération dans l'étude visée) et des communes bruxelloises.
e. Précarité propre aux grandes villes (90 millions)
L'étude indique que les CPAS plus importants comme celui d'Anvers reçoivent une subvention fédérale proportionnellement plus élevée. Plus le nombre d'allocataires faisant appel au CPAS est élevé, plus la part du revenu d'intégration subsidiée par l'autorité fédérale est élevée. Dans l'étude, on calcule la part de financement fédéral dont Bruxelles est privée de par le fait que ses CPAS n'ont pas la taille du CPAS d'Anvers. L'étude semble ainsi plaider davantage pour une fusion des dix-neuf CPAS bruxellois que pour l'obtention d'un financement supplémentaire.
f. Absence de compensation pour les exonérations d'impôts notamment pour l'UE et l'OTAN (312 millions)
Dans le cadre de la LSF, Bruxelles bénéficie d'une contribution de solidarité élevée et qui est en augmentation, puisque celle-ci est calculée exclusivement sur la base du volume (décroissant dans la Région de Bruxelles-Capitale) de l'impôt des personnes physiques perçu par habitant (et non, par exemple, sur la base du volume de l'impôt des sociétés perçu par habitant ou sur la base du volume des impôts propres de la région). Les fonctionnaires internationaux qui résident à Bruxelles ne paient pas l'impôt des personnes physiques en Belgique, ce qui explique l'augmentation de la contribution de solidarité que Bruxelles reçoit dans le cadre de la LSF (3) . Or, la nouvelle étude réalisée pour le compte du gouvernement bruxellois constate que cette contribution de solidarité versée à Bruxelles ne compense pas dans une mesure suffisante le manque à gagner qu'elle subit en raison de l'exonération fiscale des institutions internationales présentes sur son territoire. C'est pourquoi cette étude propose d'augmenter encore le montant de cette contribution de solidarité au profit de Bruxelles. Cette proposition va d'ailleurs à l'encontre des diverses propositions de réforme récentes de la LSF, qui reconnaissent les effets pervers du fonctionnement du mécanisme de solidarité actuel (y compris pour Bruxelles, voir, par exemple, VIVES discussion paper nº 6, Algoed, juillet 2009) et veulent d'une manière ou d'une autre le limiter.
Le débat lancé par la nouvelle étude quant au coût lié au statut de capitale internationale est une nouvelle occasion pour nous de plaider en faveur de la réalisation d'une analyse coûts-bénéfices approfondie.
2. Contexte global
Dans le cadre de cette brève contribution au débat, notre objectif n'est pas vraiment d'approfondir la question du bien-fondé et de la pertinence pour chaque catégorie de surcoût non couvert. Nous voulons plutôt faire le point en ce qui concerne la situation globale de la Région bruxelloise en termes de recettes et de dépenses et dresser une comparaison avec la situation financière d'autres capitales au sein de l'UE. Nous voulons montrer de manière plus globale que la nouvelle demande de financement supplémentaire à hauteur de 720 millions sous-estime le volet des recettes de la Région bruxelloise, mais qu'elle omet aussi (et surtout) d'explorer les possibilités de rationalisation de la structure actuelle des dépenses de la Région bruxelloise.
Une situation relativement confortable pour Bruxelles en termes de recettes
Les calculs réalisés dans l'étude de Koen Algoed sur le financement de Bruxelles (2009) montrent qu'à l'heure actuelle, Bruxelles reçoit déjà considérablement plus de moyens par habitant que les deux autres régions. (...) Algoed a calculé que ce surfinancement de Bruxelles se chiffrait, en 2007, à 550 millions d'euros. Les auteurs supposent que le surfinancement était du même ordre de grandeur en 2009. Il est intéressant de mettre en parallèle ces 550 millions de recettes supplémentaires sur base annuelle avec les 720 millions de financement supplémentaire réclamés par la nouvelle étude.
Les 550 millions de recettes supplémentaires nettes sur base annuelle sont principalement imputables aux deux facteurs suivants:
1) Recettes d'impôts régionaux propres
Comme indiqué précédemment, les impôts régionaux de Bruxelles les plus importants quantitativement sont les droits d'enregistrement. Ceux-ci génèrent beaucoup plus de recettes par habitant à Bruxelles que dans les deux autres régions. En raison, principalement, des droits d'enregistrement mais aussi des droits de succession et du précompte immobilier, lesquels sont également liés à l'immobilier, Bruxelles a une autonomie fiscale plus grande que n'importe quelle autre région en Belgique si l'on considère sa quote-part de recettes fiscales propres dans l'ensemble de ses recettes. Selon le ministre bruxellois des Finances, M. Vanraes, qui s'exprimait dans une carte blanche publiée dans le quotidien De Tijd du 16 décembre 2010, on parle en l'occurrence d'une autonomie de pas moins de 50 %.
Il est frappant de constater que l'étude, commanditée par le gouvernement bruxellois, ne reconnaît pas l'avantage de disposer d'un vaste potentiel de recettes d'impôts régionaux propres. Selon l'étude, la législation fiscale belge, en ce compris la LSF, ne génère guère un avantage financier net pour Bruxelles. Par exemple, les prix élevés de l'immobilier à Bruxelles auraient surtout pour conséquence de réduire le pouvoir d'achat des Bruxellois et de condamner les autorités bruxelloises au paiement de sommes élevées pour l'hébergement de leurs services. À nouveau, il convient de ne pas inverser les données du problème. Par exemple, le fait que les prix de l'immobilier à Bruxelles sont supérieurs à la moyenne belge sont, aux yeux des auteurs, un indicateur de la base économique très importante de la ville, laquelle profite de surcroît largement au Trésor bruxellois, principalement sous la forme de recettes élevées en matière de droits d'enregistrement (...), mais également sous la forme de recettes relativement élevées en matière de droits de succession et de précompte immobilier. Le Bureau central du Plan néerlandais (2010) livre une interprétation similaire: lorsque les prix des terrains sont élevés, cela signifie que les propriétaires des terrains et immeubles sont disposés à mettre le prix pour être à proximité des équipements. Le Bureau considère par ailleurs que la meilleure manière de financer ces équipements publics locaux est de taxer les prix de vente élevés des terrains.
Si Bruxelles trouve que ses droits d'enregistrement sont trop élevés, elle a la possibilité, en tant que Région, de les diminuer. De même, si elle estime que ses recettes sont insuffisantes, elle a la possibilité, en tant que Région, de les accroître. (...)
2) Dotations fédérales supplémentaires pour Bruxelles
Depuis sa création, la Région bruxelloise perçoit toutes sortes de dotations fédérales pour sa fonction de capitale et son statut bilingue, les principales étant la dotation Beliris, les dotations fédérales aux commissions communautaires et les dotations fédérales aux communes bruxelloises.
Il suffit d'examiner le budget fédéral — par exemple le département SPF Intérieur —, pour s'apercevoir qu'il existe encore toutes sortes de postes (plutôt petits) qui sont prévus exclusivement en faveur de Bruxelles (par exemple des moyens supplémentaires pour les pompiers et pour la police), ainsi que des postes qui profitent plus à Bruxelles que la moyenne (par exemple le Fonds fédéral des grandes villes). »
M. Beke interrompt M. Laeremans dans sa lecture en lui demandant à quoi il veut en venir précisément. L'étude de Geert Jennes est suffisamment connue.
M. Laeremans réplique que cette étude infirme le point de vue défendu par la majorité institutionnelle selon lequel la Région de Bruxelles-Capitale aurait besoin d'un financement supplémentaire.
Il poursuit, imperturbable, sa lecture:
« Plusieurs de ces dotations de moindre importance, de même que les dotations fédérales aux commissions communautaires, ne sont pas prises en considération dans la nouvelle étude, tandis que la dotation Beliris est sous-estimée, comme cela a été souligné précédemment.
Plusieurs des dotations supplémentaires aux dotations régulières prévues dans la LSF sont destinées à d'autres autorités bruxelloises que l'autorité régionale bruxelloise, mais ces autres autorités opèrent également sur le territoire de la Région bruxelloise. Par conséquent, le nombre d'acteurs par lesquels Bruxelles se voit allouer des moyens constitue déjà à lui seul une entrave à une gestion budgétaire parcimonieuse à Bruxelles. Non seulement cette multiplicité affaiblit la contrainte budgétaire stricte à Bruxelles, mais, de manière générale, la gestion budgétaire bruxelloise est complexifiée par les critères divergents que ces acteurs imposent à l'obtention des ressources, par leurs différences en termes de prévisibilité et par l'absence d'une vue d'ensemble en la matière (le tableau 2 constitue une modeste tentative de dresser un tel aperçu). Ces différents éléments font par ailleurs qu'il est difficile de percevoir le bien-fondé de toute nouvelle demande de moyens supplémentaires.
Une situation inquiétante pour Bruxelles en termes de dépenses
Sur la base des chiffres de M. Robert Deschamps et al. de l'université de Namur, nous avons calculé dans le tableau 3 que, parmi les trois régions, Bruxelles est la plus dépensière par habitant, que les dépenses des Communautés française et flamande soient comprises ou non. (...)
Ce qui frappe dans le tableau 3, ce sont les dépenses élevées pour les équipements et les transports. Il se peut que des surcoûts soient inhérents à l'organisation de transports en commun dans une grande ville (par exemple, l'exploitation d'un réseau de métro) mais les petites distances et la forte densité de population par rapport à la Flandre et à la Wallonie laissent penser qu'il y a également des avantages en termes de coûts et de recettes pour Bruxelles. Il apparaît que la STIB en particulier a une lourde structure de coûts, avec un coût de 10 euros au kilomètre en 2007, ce qui représentait le double des coûts de De Lijn et de la TEC.
En termes généraux aussi, les dépenses régionales de Bruxelles s'avèrent être supérieures à celles de la Flandre et de la Wallonie, ce qui est entre autres dû au fait que la Région de Bruxelles-Capitale subventionne la Commission communautaire française et la Communauté française pour l'enseignement et le bien-être notamment. M. Vanraes, ministre bruxellois des Finances et du Budget, écrivait dans son article d'opinion paru dans le journal De Tijd du 16 décembre 2010 que le montant annuel de ces subventions était de 300 millions d'euros sur un budget total de quelque 3 milliards. Avec un tel subventionnement, Bruxelles invalide en fait partiellement sa demande de refinancement.
Enfin, les dépenses élevées pour le service bruxellois de la dette publique sont frappantes par rapport aux autres régions. Le fait que jusqu'à présent Bruxelles ait autorisé des déficits budgétaires plus élevés que les autres régions pourrait indiquer une anticipation du refinancement fédéral (ce qui s'appelle « bail-out » en économie).
Le Parlement de la Région de Bruxelles-Capitale pourrait recourir davantage à la Cour des comptes fédérale pour examiner de manière critique certains aspects de la structure des dépenses à Bruxelles. Alors que nombre de rapports distincts concernant les dépenses de la Région flamande (septante-cinq pour les dix dernières années) se trouvent sur le site de la Cour des comptes, il n'y en a que sept couvrant la même période et concernant la Région de Bruxelles-Capitale (exception faite des commissions communautaires), dont trois traitent du même sujet (la station d'épuration des eaux de Bruxelles-Nord).
La situation financière des capitales vue dans le contexte de l'UE
Graham Bird et Enid Slack de l'université de Toronto, qui se sont spécialisés dans le financement des grandes villes, affirment que la base imposable de la plupart des villes dans le monde est supérieure à celle de ses alentours, ce qui en règle générale rend peu justifiable la demande de transferts financiers depuis ces régions.
Les statistiques d'Eurostat dans son Regional Yearbook 2010 étayent non seulement les constatations de Bird et Slack, mais démontrent également la situation exceptionnelle de Bruxelles dans le contexte européen. Dans dix-huit des vingt-trois États membres de l'UE au sujet desquels Eurostat collecte des données chiffrées, les capitales sont les régions dont le PIB par habitant est le plus élevé (situation en 2007; cf. Eurostat 2010). Bruxelles ne fait pas partie des cinq exceptions. En termes de PIB par habitant, Bruxelles occupait même la troisième place parmi les capitales les plus riches de l'UE (après Londres et Luxembourg), en 2007.
Eurostat arrive à une constatation comparable pour les revenus primaires et les revenus disponibles par habitant. Dans treize des vingt États membres de l'UE au sujet desquels Eurostat collecte des données chiffrées, les capitales sont les régions où les revenus disponibles par habitant sont les plus élevés (situation en 2007). Pour ces catégories de revenus, Bruxelles fait effectivement exception, au même titre que Berlin, Rome et Madrid.
Eurostat constate par ailleurs que pour la majorité de quinze capitales de l'UE, le ratio revenus disponibles/revenus primaires est inférieur à 80 %. Cela signifie que ces régions d'ordinaire les plus riches du pays en question contribuent proportionnellement le plus aux recettes publiques et/ou bénéficient proportionnellement le moins des dépenses publiques. Malheureusement, Eurostat ne fournit aucun chiffre concernant ce ratio pour Bruxelles. Il est frappant que la majorité des études sur les flux publics interrégionaux en Belgique constatent par contre que la Région de Bruxelles-Capitale n'apporte quasi pas de contribution nette à ces flux, voire en est un bénéficiaire net (voir, par exemple, VIVES 2010, également basé sur le critère du domicile).
Il serait utile de procéder à une étude plus approfondie de la situation financière de Bruxelles dans le contexte de l'UE.
3. Conclusion
Bruxelles dispose, en termes relatifs, d'un volume de recettes supérieur à celui de la Région flamande et de la Région wallonne et effectue relativement plus de dépenses. Il va sans dire qu'en tant que grande agglomération, Bruxelles a des frais qu'une commune rurale n'a pas, mais ce raisonnement est tout aussi vrai pour certaines recettes. La nouvelle étude de Verdonck et al., qui réclame un financement supplémentaire de 720 millions sur base annuelle pour Bruxelles, sous-estime le volet des recettes: certaines dotations n'y sont pas reprises et l'assiette fiscale régionale n'est pas reconnue comme un avantage. De plus, la nouvelle étude ne propose aucune réforme dans le but de dégager, du côté des dépenses, davantage de marge pour la mise en œuvre de politiques.
Par le passé, Bruxelles a bénéficié à plusieurs reprises d'un refinancement fédéral. Aujourd'hui, elle entend tirer parti une nouvelle fois de la « contrainte budgétaire douce » en faisant appel au Trésor fédéral (en déficit chronique). En économie, on appelle cela une « tragédie des biens communs ». D'un côté, Bruxelles veut être une Région à part entière, sur un pied d'égalité avec la Flandre et la Wallonie, mais, d'un autre côté, elle demande à recevoir diverses compensations financières en brandissant son statut de (petite) région. Ces deux options semblent difficilement conciliables.
Nous renvoyons en l'espèce à l'arrêt « Berlin » rendu en octobre 2006 par la Cour constitutionnelle allemande: celui-ci a limité la possibilité pour les Länder allemands et, en particulier (mais pas exclusivement), la cité-État de Berlin, d'invoquer l'état de nécessité budgétaire. La règle qui prévalait avant octobre 2006 était que si l'état de nécessité budgétaire était invoqué, il y avait une obligation d'assistance entre les Länder et l'État fédéral (ainsi qu'entre les Länder eux-mêmes). Pour pouvoir bénéficier d'une assistance, les Länder doivent, depuis octobre 2006, apporter la preuve que leurs dépenses par habitant pour certains objectifs ne dépassent pas la moyenne fédérale et qu'ils ont épuisé toutes les possibilités d'assainissement qui sont à leur portée.
VIVES perçoit cependant une possiblité indirecte de financement supplémentaire pour Bruxelles, notamment à travers une régionalisation partielle de l'impôt des sociétés, toujours fédéral aujourd'hui. Cette régionalisation est l'un des éléments figurant dans la proposition de VIVES en vue de réformer la LSF. Étant donné que le refinancement (net) que VIVES propose poursuit en premier lieu un objectif de responsabilisation (un durcissement des contraintes budgétaires douces des communautés et des régions), il nous paraît plus durable qu'un refinancement basé sur l'octroi, à la Région bruxelloise, de dotations ad hoc supplémentaires provenant du trésor fédéral et en dehors du cadre de la LSF. »
M. Laeremans est également favorable à une régionalisation partielle de l'impôt des sociétés à condition que le siège d'exploitation des sociétés soit pris comme critère de localisation. À défaut, c'est Bruxelles qui raflera un tiers du produit de l'impôt des sociétés. En effet, de nombreuses sociétés sont établies à Bruxelles mais ont leur siège d'exploitation ailleurs. Cette régionalisation inciterait aussi Bruxelles à attirer de nouvelles entreprises et à conserver celles qui sont déjà implantées sur son territoire.
Cette opération aurait le mérite de remédier à l'opacité du financement actuel de la Région de Bruxelles-Capitale. Malheureusement, les esprits ne sont pas encore mûrs pour cela. La majorité institutionnelle a donc bricolé une loi de financement qui ne ressemble à rien.
M. Beke rappelle que si le projet de loi spéciale à l'examen est discuté aujourd'hui, c'est parce que le CD&V a insisté pour qu'il le soit dès le début des négociations. Il y avait quatre bonnes raisons à cela.
La première raison est que chaque entité fédérée doit pouvoir disposer d'une grande autonomie fiscale. Jusqu'à présent, cette autonomie était limitée. Cette réforme de l'État l'élargira considérablement: il s'agit, au total, d'un montant de 12 milliards d'euros. Pour la Flandre, l'autonomie fiscale passe de 20 % à 31 %.
Une deuxième raison importante est le fait que le degré de responsabilisation des différentes entités fédérées sera renforcé.
La troisième raison est le fait que la solidarité gagnera en transparence et aura moins d'effets pervers.
Une quatrième raison de modifier la loi spéciale de financement est la stabilité. Il est dérangeant de devoir constater que d'aucuns n'ont que les mots gain ou perte à la bouche. On oublie que les Flamands aussi font partie de la fédération belge et qu'ils y font appel dans le domaine des pensions ou des soins de santé, par exemple. En ce qui concerne les pensions et les dépenses futures y afférentes, M. Beke indique que les Flamands représentent 67 % de la population et 62 % de la capacité fiscale et qu'ils prennent à leur charge 63 % des dépenses en matière de pensions. Cela vient du fait que le Flamand vit en moyenne plus longtemps et que ses revenus moyens — et donc les pensions moyennes — sont plus élevés. Les Flamands aussi trouvent donc leur compte dans la fédération belge, qui prend notamment les dépenses de sécurité sociale à sa charge.
Selon M. Beke, le projet de loi spéciale à l'examen répond aux objectifs fixés. Toutes sortes d'études ont été publiées à ce sujet. La plus récente est intitulée: « De herziening van de financieringswet — Over het hoe, het waarom en het resultaat » (André Decoster et Willem Sas, Leuvense Economische Standpunten 2013/139, Centrum voor Economische Studiën — KU Leuven, novembre 2013) (voir: http://www.econ.kuleuven.be/drc/CES/research/documenten/les-139.pdf). L'intervenant cite un extrait du résumé de cette étude:
— « L'autonomie fiscale a-t-elle augmenté de manière substantielle ? Sans aucun doute. »
— « La responsabilisation a-t-elle augmenté ? Certainement. »
— « Est-il encore tenu compte du chiffre de la population et du nombre d'élèves ? Absolument. »
— « La solidarité entre les entités est-elle maintenue et les effets pervers sont-ils éliminés ? Assurément. »
— « A-t-on la garantie qu'aucune entité fédérée ne s'appauvrit structurellement et que la stabilité financière des entités fédérées est préservée ? Le changement dans les mécanismes intégrés de la loi de financement sont défavorables à la Wallonie et à Bruxelles. La nouvelle loi de financement est favorable à la Région flamande mais défavorable à la Communauté flamande. En fin de compte, la Flandre tire son épingle du jeu, tout comme la Communauté française. »
M. Beke pense que lorsqu'il évoque l'étude de l'Université de Namur et de l'ULB, M. Laeremans compare des pommes et des poires. De même, lorsqu'il compare la Flandre à la Wallonie ou Bruxelles, il doit aussi tenir compte de la part que représentent respectivement la Communauté flamande et la Région flamande au niveau de la Flandre. Lorsqu'on fait cela et que l'on retire le financement spécifique de la Région de Bruxelles-Capitale, on constate que la proportion en matière de capacité fiscale passe de 68/32 à 69/31.
L'intervenant cite une fois encore l'étude d'André Decoster et Willem Sas: « De herziening van de financieringswet — Over het hoe, het waarom en het resultaat »:
« Tout d'abord, le citoyen d'une fédération est membre de plusieurs entités. Un Flamand (et, mutatis mutandis, un Wallon et un Bruxellois) appartient à la fois à la Région flamande, à la Communauté flamande et à la fédération belge. »
Il a donc une part dans toutes les entités, que ce soit pour les coûts ou pour les recettes.
Ou encore:
« Mais l'on peut aussi considérer cette sixième réforme de l'État comme historique si l'on prend comme critère la différence de dépenses entre le niveau fédéral et le niveau régional. Lorsque cette réforme de l'État entrera en vigueur en 2015, ce sera la première fois que les dépenses des régions et des communautés seront nettement plus importantes que les dépenses fédérales.
La part de l'autorité fédérale retombe à 21,4 % de l'ensemble des dépenses, alors que celle des régions et des communautés passe à 31,7 %. Des compétences à forte connotation économique, comme certains aspects de la politique du marché du travail (activation, réductions pour groupes-cibles, ...), la politique fiscale (bonus logement, titres-services, ...) ou la politique des grandes villes sont transférées vers le niveau régional. Les communautés, quant à elles, reçoivent encore plus de compétences dans les matières personnalisables, dont les allocations familiales et certains éléments de la politique des soins de santé et des soins aux personnes ágées. Ces deux mesures contribuent pour une deuxième raison à faire entrer la sixième réforme de l'État dans l'histoire: la sécurité sociale, elle aussi, entre pour la première fois dans le collimateur de la décentralisation. Étant donné qu'un peu plus de 75 % des moyens transférés relèvent du giron de l'ONSS, la part de la sécurité sociale diminue significativement, pour retomber à 33,8 %. La sixième réforme de l'État entraînera une hausse des dépenses des régions et des communautés de 18,9 milliards en 2015: de 45,8 milliards actuellement, elles passeront à 64,7 milliards. »
Pour ce qui est du refinancement de Bruxelles, M. Beke souligne que ce point était sur la table des négociations dès le premier jour, et ce pour un montant de quelque 500 millions d'euros. Il rappelle par ailleurs que M. De Wever avait déjà, en sa qualité de clarificateur royal, prévu à cet effet un montant de 350 millions d'euros, sans toutefois préciser clairement à quoi ces moyens financiers serviraient. Bruxelles est, comme d'autres villes, confrontée à de sérieux problèmes. Voici ce que le bourgmestre d'Anvers a déclaré à ce sujet (Trends, 12 avril 2013):
« (traduction) L'une des plus grandes menaces est la population urbaine qui produit de moins en moins de recettes fiscales, vu l'afflux massif, par milliers, de non-productifs. Tous ont besoin de crèches pour leurs enfants, d'un enseignement et de soins, mais ils apportent en moyenne une plus-value moindre en contrepartie de ces facilités. Alors qu'il y a dix ans, l'impôt des personnes physiques par habitant à Anvers était encore supérieur à la moyenne nationale, il est aujourd'hui inférieur de 20 % à la moyenne du pays. »
L'intervenant ne peut que souscrire à ce plaidoyer pour un financement accru des villes. Le refinancement de Bruxelles ne passe pas uniquement par le projet à l'examen, mais on peut dire, de manière globale, que Bruxelles est financée à raison de 540 euros par habitant. C'est beaucoup moins qu'une ville comme Anvers, dont le financement atteint 1 250 euros par habitant, gráce au Fonds d'investissement, au Fonds des communes, etc.
M. Beke estime en outre que la nouvelle loi spéciale de financement ne lèse pas la Flandre, avant assainissement. Il renvoie à cet égard à un article intitulé « Vlaanderen wint bij financieringswet » (De Tijd, 11 juillet 2013), d'où il ressort que la réforme rapporte 192 millions d'euros à la Flandre.
MM. Laeremans et Broers contestent les chiffres repris dans cet article. En effet, ils ne permettaient pas d'établir avec certitude la récurrence ou non de certaines contributions d'assainissement. Alors que l'auteur partait du principe qu'il s'agissait d'une contribution unique, il est apparu par la suite qu'il s'agissait d'une contribution structurelle.
À son tour, M. Anciaux conteste formellement cette affirmation.
M. Beke répète que la Flandre y gagnera par rapport à l'actuelle loi de financement, fût-ce à concurrence d'un montant relativement faible. Le projet à l'examen garantit non seulement une responsabilisation, à travers l'autonomie fiscale, mais aussi la stabilisation des finances publiques. Il est exact que les régions contribuent elles aussi, mais c'est précisément ce que demande, depuis des années déjà, le Conseil supérieur des finances, au sein duquel toutes les autorités sont représentées. Depuis 2004, le Conseil supérieur demande en effet un nouvel équilibre financier entre l'autorité fédérale et les régions, et ce, afin de permettre l'assainissement futur des finances publiques et le financement des pensions et du vieillissement en général. Le Comité d'étude sur le Vieillissement a souligné l'importance d'une contribution des différentes entités.
Le dernier avis du Conseil supérieur des finances, qui date de 2013, proposait deux options: le respect soit du ratio classique 35/65, soit d'un autre ratio. D'après le ratio proposé ici, les différentes entités fédérées fournissent un effort pour un montant de 2,5 milliards d'euros, tandis que l'autorité fédérale prend 6 milliards d'euros à son compte. Les entités fédérées contribueront donc pour 30 % à cet effort et l'autorité fédérale pour 70 %. Si l'on part du principe que le montant total des dépenses de l'autorité fédérale — sécurité sociale comprise — est de 96 à 97 milliards d'euros, on obtient donc un effort de 6,5 % pour l'autorité fédérale, contre un effort de 3,9 % pour la Flandre. M. Beke ne nie donc pas que la Flandre est elle aussi concernée par cet effort commun, mais quiconque critique cela doit aussi oser dire, par exemple, qu'il sera impossible d'encore payer les pensions si cet effort n'est pas fait.
Selon M. Beke, l'essentiel de la demande d'assainissement est de savoir si nous serons toujours à même, à l'avenir, de dégager les moyens nécessaires en matière de soins de santé et de pensions. Nous ne sommes d'ailleurs pas les seuls à mener ce débat. En 2010 déjà, le clarificateur royal écrivait lui aussi que: « Le degré de transfert sera défini en fonction de la contribution générale des communautés et régions dans l'assainissement des finances publiques. »
L'assainissement des finances publiques se fera en deux étapes: 2,5 milliards d'euros d'ici 2016 ainsi qu'une consolidation linéaire de 0,23 % de la contribution au PIB dans le cadre du vieillissement. Cet effort s'élèvera, au total, à 5,2 milliards d'euros en 2028. Cela fait beaucoup d'argent, mais cela correspond à un effort égal à 0,8 % du PIB. Pour comparaison: en trois ans, l'autorité fédérale a consenti à elle seule un effort de 23 milliards d'euros, soit 5 % du PIB. Les communautés et régions devront donc effectivement fournir un effort supplémentaire car elles seront elles aussi confrontées à des besoins croissants au niveau des personnes handicapées, de l'accueil des enfants, etc. Cela signifie surtout que chaque entité devra continuer à fournir une part de l'effort pour assurer, à l'avenir, le financement de notre modèle de prospérité.
Mme Maes souligne que la Flandre fait déjà des efforts depuis plusieurs années.
M. Beke le confirme. Ces efforts profitent d'ailleurs aux Flamands. La Flandre a fait cet effort parce qu'elle-même le voulait et non parce que d'autres l'y ont contrainte. En outre, ces efforts de la Flandre ont moralement poussé la Région wallonne, la Région de Bruxelles-Capitale et la Communauté française à tendre vers un équilibre plus rapidement qu'elles ne le souhaitaient au départ.
En ce qui concerne le refinancement de Bruxelles, il a été largement fait référence aux études réalisées par VIVES et d'autres. M. Beke évoque un rapport sur la Belgique, publié par l'OCDE en 2008, qui faisait état d'un sous-financement structurel de Bruxelles et invitait à y remédier.
D'autres intervenants ont affirmé que la compétence en matière de centimes additionnels ne permet pas de véritable autonomie. M. Beke trouve qu'il s'agit d'un point de vue surprenant pour différentes raisons. De mars à mai 2011, l'intervenant était négociateur royal. À cette époque, il avait affaire à un modèle qui avait été élaboré par M. Vande Lanotte et à propos duquel des experts de la Banque nationale avaient déclaré qu'il ne fonctionnerait pas bien dans la pratique. Une alternative a été cherchée, d'ailleurs en collaboration, dans un premier temps, avec un représentant du service d'études de la N-VA. Le résultat fut un modèle étendu de centimes additionnels qui a reçu une évaluation plus positive de la part des experts de la Banque national quant à sa praticabilité.
Il va de soi que ce modèle ne peut pas tout simplement être comparé aux centimes additionnels communaux. Celui qui prétendrait le contraire ne serait pas honnête intellectuellement et ignorerait le mode de fonctionnement d'une commune ou des centimes additionnels communaux. Les régions peuvent en effet faire varier leurs propres tarifs en fonction de leurs propres tranches d'imposition. Elles peuvent, par exemple, mener une politique des revenus qui leur est propre et instaurer une répartition qui leur est propre à cet effet. Les communes ne peuvent fixer qu'un seul taux de centimes additionnels sur l'impôt final. Les régions peuvent différencier des centimes additionnels, elles peuvent fixer un propre barème d'imposition avec différents centimes additionnels et selon des barèmes dont elles fixent elles-mêmes les limites, ce qui équivaut à une autonomie barémique de fait. Elles peuvent accorder des réductions générales, elles peuvent instaurer des majorations d'impôts sur des revenus liés à des matières pour lesquelles elles disposent de la compétence matérielle et accorder des réductions et des crédits d'impôt liés à des matières pour lesquelles elles disposent de la compétence matérielle. Elles obtiennent la compétence exclusive sur plus de 3 milliards d'euros de dépenses fiscales. La politique fiscale et les recettes ne sont pas influencées par les réductions et les crédits d'impôt au niveau fédéral. Enfin, l'autorité fédérale ne peut plus instaurer de nouvelles déductions des revenus nets afin de ne pas influencer les revenus des régions.
Il s'agit en effet d'un modèle de centimes additionnels, selon M. Beke, mais qui est très étendu, quasiment selon le modèle du split rate. Ce modèle est surtout un modèle praticable et procure une autonomie très approfondie concernant ses modalités de mise en œuvre. Il n'est donc nullement comparable avec le modèle communal des centimes additionnels.
M. Broers indique que les communes ont bel et bien d'autres possibilités de compléter leurs revenus.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, souligne que la comparaison ne portait que sur les centimes additionnels et non sur d'autres possibilités.
Mme Maes souhaite répliquer à la remarque selon laquelle son groupe aurait été à l'origine du modèle des centimes additionnels. Son groupe n'y a jamais été favorable et a toujours défendu le modèle du split rate. Le modèle des centimes additionnels a été avancé par le PS. Un centime additionnel sur l'impôt fédéral des personnes physiques, à l'instar de ce qui se faisait pour les communes, était le maximum qui allait être concédé par le PS. L'impôt des personnes physiques devait rester et resterait essentiellement un impôt fédéral. Pour la N-VA, le modèle des centimes additionnels sur le barème dans le cadre duquel le centime additionnel peut être fixé par tranche de revenus et qui prévoit la liberté de moduler la déduction pour les revenus de remplacement et pour les personnes et les enfants à charge équivaut à un split rate. De même, la N-VA a toujours déclaré être d'accord avec le principe de la progressivité, mais elle estimait qu'il revenait aux régions de la définir concrètement.
M. Beke estime qu'il est manifestement faux d'affirmer que le PS a proposé le modèle des centimes additionnels. Lorsque l'intervenant était négociateur royal, une alternative au split rate qui était impraticable avait été imaginée. Le modèle étendu des centimes additionnels figurait également dans son rapport de négociateur royal et c'est sur la base de ce rapport que le président de la N-VA a invité M. Di Rupo à réaliser des progrès en tant que formateur parce que tout était sur la table. Il n'est pas correct de dire que la N-VA n'a jamais collaboré à cet égard.
M. Beke aborde ensuite la question de l'élasticité. Il a participé à cette discussion dès le tout début, et ce thème, tout comme celui du non-appauvrissement, a d'abord été défini au sein du groupe de travail Jambon-Marcourt. Tous les principes ont été discutés et ancrés dans ce groupe de travail. L'élasticité est effectivement un facteur aléatoire, mais lors des discussions, les partis flamands sont partis du principe que cela faisait aussi partie de l'autonomie.
Le ratio d'élasticité a été mis au point en décembre 2011 par la Banque nationale. À ce moment, on a observé l'élasticité sur les cinq années précédentes et on a obtenu un ratio de 3,1 %. En neutralisant les diminutions d'impôts pendant ces cinq années, on obtenait une augmentation moyenne de 4,9 % sur cette période, soit un chiffre supérieur à celui prévu dans le modèle actuel.
Personne ne peut prédire comment l'élasticité évoluera dans le futur. Il faut tenir compte de plusieurs facteurs. Il y a par exemple des facteurs macroéconomiques, comme la crise financière. Mais l'élasticité dépend aussi de la politique que chaque région mènera. Dans le futur, le volume de compétences des régions pour la politique du marché du travail, par exemple, passera de 16 % à 43 %. Par conséquent, mettre en doute le coefficient d'élasticité, c'est aussi douter, en partie, de ses propres capacités.
M. Laeremans attire l'attention sur l'impact considérable de la conjoncture internationale.
M. Beke est aussi de cet avis. Plusieurs éléments jouent un rôle: il y a le contexte international, mais aussi la politique spécifique de chaque région. Mais le contexte international vaut aussi pour l'autorité fédérale, dont nous espérons qu'elle pourra garantir à l'avenir le paiement de nos pensions et de notre sécurité sociale. Tout se tient.
Il a aussi été question du mécanisme de solidarité. Il s'agit là d'un des quatre grands critères d'évaluation, avec la démocratisation, la responsabilisation et la stabilisation de l'autorité fédérale. Le professeur Decoster affirme dans son étude que le mécanisme de solidarité sera désormais plus transparent et qu'il n'aura plus d'effets pervers. Désormais, gráce à la moindre importance de la solidarité, une entité fédérée qui sera plus performante gagnera toujours plus qu'elle ne perdra. La solidarité retombera ainsi à 876 millions d'euros en 2015, alors qu'elle est de 1,2 milliard d'euros en vertu de la loi de financement actuelle, soit une diminution de près d'un tiers.
Un mécanisme de transition de dix ans est effectivement prévu. M. Beke renvoie à des articles du journal Le Soir du 26 septembre 2011 et du 23 janvier 2012, où l'on peut lire que la Wallonie n'a pas dix ans pour se reprendre. Véronique Lamquin écrit: « Le nouveau système maintient la solidarité dans l'État fédéral, mais dans une moindre mesure. L'accord prévoit une période transitoire de dix ans, de manière à laisser le temps aux entités plus pauvres de se reprendre financièrement. Mais dix ans, c'est peu pour remettre tous les indicateurs au vert du jour au lendemain. Au demeurant, la responsabilisation est le grand leitmotiv de cette réforme. À l'avenir, les Régions devront beaucoup plus compter sur leurs propres recettes, lesquelles seront déterminées directement par le revenu moyen de la région. Ce ne sera évident pour personne, et surtout pas pour la Wallonie et Bruxelles, dont les habitants sont plus pauvres. »
Il y a donc, selon M. Beke, un mécanisme de solidarité qui sera plus transparent à l'avenir. Il y a également une période transitoire de dix ans. Et dans dix ans, chaque entité fédérée devra voler de ses propres ailes.
M. Laeremans se dit certain qu'une nouvelle loi interviendra dans les dix ans.
M. Beke ne peut exclure cette possibilité, mais il ne faut pas tabler dès à présent sur cette hypothèse.
En ce qui concerne le turbo Lambermont, M. Beke estime que certains font parfois preuve de malhonnêteté intellectuelle dans le débat. Ils n'évoquent que les points qui appuient leur thèse, mais passent tout le reste sous silence. Le groupe de travail Jambon-Marcourt a précisé qu'il fallait non pas comparer les principes de la loi de financement point par point, mais évaluer l'impact de l'ensemble. Cela vaut donc aussi pour le turbo Lambermont, qui est effectivement « gelé ». Il n'est toutefois pas correct de parler uniquement de ce qui est arrêté, sans mentionner les nouveaux éléments ajoutés. Le turbo Lambermont est ainsi remplacé par la politique du marché du travail, ce qui est très avantageux pour la Flandre. Les moyens de cette politique sont répartis sur la base de la capacité fiscale, alors que la pratique effective est aujourd'hui beaucoup plus déterminée par la part de la population. Si l'on veut être correct, il faut considérer l'ensemble, et non citer ponctuellement les différents principes.
D'après M. Anciaux, la réforme de la loi spéciale de financement est l'un des principaux piliers de la sixième réforme de l'État, tant au regard de ses montants qu'au regard de ses principes.
Les transferts de compétences de l'autorité fédérale vers les communautés et les régions pèsent pour plus de 20,3 milliards d'euros. Les revenus des communautés et des régions augmenteront ainsi de 40 % en 2016, passant de 47 à 68 milliards d'euros. Compte tenu de l'assainissement demandé à hauteur de 2,5 milliards d'euros, les moyens transférés aux communautés et aux régions atteindront encore 65,5 milliards d'euros. Le budget de la Région flamande passera de 28 à 39,3 milliards d'euros en 2016, et après l'assainissement, il s'élèvera encore à 37,8 milliards d'euros, ce qui représente une hausse de 35 %.
Les régions acquièrent une autonomie fiscale de l'ordre de 11,9 milliards d'euros, soit 25,93 % de la totalité de l'impôt des personnes physiques, ce qui correspond au quadruple des valeurs actuelles.
Les développements de la proposition de loi spéciale à l'origine du projet à l'examen (doc. Chambre, nº 53-2974/1, p. 3) énoncent onze principes. Le cinquième principe porte sur le renforcement de la responsabilisation des régions en lien avec leurs compétences et la politique qu'elles mènent.
Les dotations aux régions, par exemple en ce qui concerne la politique du marché du travail, sont couplées à leur capacité fiscale. Cette mesure, associée à l'autonomie fiscale, rend les régions extrêmement sensibles à la capacité fiscale de leur population. Lorsqu'une région est prospère, elle dégage davantage de recettes fiscales. L'on a en outre instauré un mécanisme qui fait office de filet de sécurité, ce qui permet d'accélérer l'augmentation des dotations lorsque la croissance économique réelle au sein d'une région donnée est plus importante.
En ce qui concerne la politique du marché du travail, la dotation augmentera avec l'inflation à partir de 2017 et une part de la croissance économique réelle sera en outre attribuée aux régions à concurrence de 55 %. La dotation augmentera aussi plus rapidement si cette croissance économique dépasse 2,25 %. La règle des 55 % est appliquée à la partie de la croissance non supérieure à 2,25 %; tout ce qui dépasse 2,25 % est totalement attribué aux régions, ce qui leur permet de recueillir les fruits de leurs bonnes performances économiques.
M. Laeremans observe que cela fait quand même fort longtemps qu'une croissance de 2,25 % n'a plus été enregistrée.
M. Anciaux épingle le dernier congrès du VOKA (Vlaams Netwerk van Ondernemingen), qui a eu lieu le 19 novembre 2013, et au cours duquel certains intervenants ont affirmé qu'il convient de briguer à court terme une croissance économique de 2 à 2,5 %.
Pour M. Laeremans, il s'agit avant tout d'un vœu pieux.
M. Anciaux souligne par ailleurs la responsabilisation des régions par rapport aux pensions de leurs fonctionnaires statutaires. Elles devront financer elles-mêmes le recrutement d'un fonctionnaire supplémentaire. L'on prévoit également un bonus climatique pour les régions qui émettent moins de CO2. De plus, il va de soi qu'elles disposent encore de l'impôt régional, qui dépend fortement de leurs prestations économiques. L'on peut donc affirmer que la responsabilisation des régions constitue le fil rouge de l'ensemble de la réforme.
Le dixième principe qui est de « tenir compte des efforts à accomplir par l'ensemble des entités pour assainir les finances publiques », revêt également une grande importance (voyez les développements de la proposition de loi spéciale, doc. Chambre, nº 53-2974/1, p. 3).
Les onze principes de la loi de financement qui sont évoqués dans les développements de la proposition de loi spéciale (o.c., p. 3) ne sont pas neufs. En effet, ils ont déjà été approuvés par la majorité et par la N-VA le 24 août 2010, lors de la mission de préformation de M. Elio Di Rupo.
L'intervenant évoque ensuite les conséquences politiques de l'actuelle loi de financement. Celle-ci visait à étrangler financièrement la fédération et la Communauté française. L'intervenant estime que cela était surtout illicite vis-à-vis de la Communauté française. Une partie des problèmes rencontrés jusqu'à présent par l'enseignement francophone est imputable à la loi de financement.
M. Broers souhaite savoir ce que M. Anciaux entend par cet aveu.
M. Anciaux explique que la modification de la loi de financement en 1992 visait à obliger la Communauté française à faire de nouveau une grande promesse lors d'une prochaine réforme de l'État.
D'après M. Laeremans, c'est le financement excessif de l'enseignement francophone et l'inefficacité qui sont la principale source des problèmes.
M. Anciaux explique qu'avant les accords du Lambermont, la Communauté française a connu de graves difficultés dues aux effets de la loi de financement qui lui étaient néfastes.
Tous les moyens financiers supplémentaires pour l'enseignement, le bien-être et la culture en Communauté flamande sont essentiellement le fruit de la solidarité dont fait preuve la Région flamande. La Région wallonne n'a toutefois jamais pu réaliser la même solidarité avec la Communauté française en raison de la loi de financement.
Si la Sixième Réforme de l'État a pour effet des transferts considérables de compétences aux régions et aux communautés, la fédération ne conservera que la sécurité sociale pour l'essentiel. Il est crucial que celle-ci reste entre les mains de l'autorité fédérale et que des moyens supplémentaires lui soient accordés parce que la Région flamande aussi a intérêt à ce que la Région de Bruxelles-Capitale et la Région wallonne soient prospères.
La nouvelle loi de financement est favorable pour la Région flamande et la Communauté flamande malgré la suppression du turbo Lambermont. L'impact de cette loi n'est modifié que par une opération d'assainissement. L'autorité fédérale gagnera 4 milliards d'euros en 2030 gráce à l'opération d'assainissement et aux modifications de la loi de financement. La Région de Bruxelles-Capitale pour sa part gagnera 400 millions d'euros qui lui permettront de mener une politique efficace, ce qui est bénéfique pour tout le pays. Au total, 4,4 milliards d'euros sont donc octroyés à la fédération et à la Région de Bruxelles-Capitale. Sur ce montant, 2,7 milliards d'euros seront financés par la Communauté flamande et la Région flamande dans le cadre de l'opération d'assainissement. Toutefois, vu que la Région flamande et la Communauté flamande représentent 65 % de la fédération, elles récupèrent cet argent par le biais des moyens qui seront attribués à la fédération.
En 2030, la Communauté française et la Région wallonne devront fournir un effort respectif de 900 et 700 millions d'euros, ce qui revient à 1,6 milliard d'euros.
M. Anciaux estime que la présente loi de financement ne prévoit guère de mécanismes de solidarité, voire n'en prévoit plus du tout. La réforme proposée vise à fournir les efforts nécessaires pour donner l'oxygène indispensable à l'autorité fédérale et à la Région de Bruxelles-Capitale à hauteur de 4 milliards et de 400 millions d'euros respectivement. La critique selon laquelle cette réforme appauvrira la Flandre de 2,7 milliards d'euros est ridicule. Les Flamands représentent en effet 65 % de la population belge. Si ce pourcentage est appliqué à ces 4 milliards d'euros, on obtient grosso modo les 2,6 milliards d'euros, c'est-à-dire le montant que l'autorité flamande doit fournir. Dans ce calcul, Bruxelles n'est d'ailleurs pas encore prise en compte.
Bruxelles ne peut être considérée comme un inconvénient pour le Flandre mais doit être perçue comme une valeur ajoutée. Aussi M. Anciaux demande-t-il que l'on fasse le calcul économique et financier de l'intérêt de Bruxelles pour la Flandre. Bruxelles doit en effet faire des efforts dans le domaine du bilinguisme, mais la Flandre et la Région flamande sont gagnantes tous les jours gráce à Bruxelles. Sans vouloir minimiser l'importance d'Anvers, cette ville ne possède tout de même pas le même rayonnement international que Bruxelles. Le financement à hauteur de 400 millions d'euros se justifie donc.
M. Broers rétorque que la ville d'Anvers est très importante, pas seulement pour la Flandre, mais pour l'ensemble du pays.
M. Moureaux ne conteste pas non plus la valeur d'Anvers, mais précise qu'il ne faut pas sous-estimer l'importance stratégique de Bruxelles, car elle dépasse la Région bruxelloise, et s'étend même au-delà de nos frontières.
M. Anciaux ajoute que l'atout principal est la situation de la Flandre. Bien entendu, Anvers, l'un des plus grands ports du monde, pèse ici de tout son poids.
La contribution d'assainissement de 2,5 milliards d'euros n'est pas non plus un scandale, car la loi de financement n'a jusqu'à présent jamais retiré le moindre euro à la Flandre. Au contraire, la Flandre n'a fait qu'augmenter ses revenus, et même au-delà d'une simple indexation. Maintenant qu'un assainissement s'avère nécessaire, il est demandé à la Flandre de faire un effort de 3 %, alors que l'autorité fédérale continue d'assumer le double.
Cette loi de financement ne fait pas de gagnant ni de perdant. Le seul gagnant est la politique sociale qui, à l'avenir, restera possible au niveau fédéral. Voter contre cette loi de financement, c'est donc choisir l'option de rendre cette politique sociale impossible au niveau fédéral.
M. Broers déduit de l'argumentation de M. Anciaux que l'autorité fédérale a jadis vécu au-dessus de ses moyens. Si des compétences sont transférées à la Flandre et qu'au final, il y a moins de moyens disponibles, on ne peut qu'en conclure que l'autorité fédérale a gaspillé l'argent.
M. Anciaux répond que chacun est conscient que nous avons vécu au-dessus de nos moyens pendant de nombreuses décennies, mais que cela n'enlève rien au fait que ce gouvernement, plus que tout autre auparavant, a réalisé des économies considérables sur une très courte période.
M. Broers se réfère également au plaidoyer de M. Anciaux pour l'enseignement francophone, et à la thèse que celui-ci défend, à savoir que la Communauté française ne peut pas être solidaire sur le plan financier. Lors d'une interview, Marie-Dominique Simonet, ancien ministre de l'Enseignement obligatoire dans le gouvernement de la Communauté française, et Marie-Martine Schyns, actuelle ministre de l'Enseignement obligatoire et de la Promotion sociale, ont plaidé pour que la Wallonie soutienne financièrement les infrastructures sportives et la bibliothèque de Fourons. Si la Communauté française ne peut pas être solidaire, elle devrait en premier lieu cesser de financer des projets au-delà de la frontière linguistique.
M. Anciaux partage cet avis, mais fait remarquer qu'avant les accords du Lambermont, la Communauté française connaissait un véritable problème.
M. Laeremans pourrait même accepter des transferts plus importants de la Flandre vers le niveau fédéral, à la condition que l'autorité fédérale agisse correctement, ce qui n'est pas le cas puisque la proportion 60/40 n'est pas respectée, et certainement pas dans les départements sociaux.
M. Anciaux répond qu'au fond, sécurité sociale rime avec solidarité avec les personnes dans le besoin.
M. Laeremans demande s'il est nécessaire que cette compétence reste dans le giron du fédéral.
Pour M. Broers, il n'est pas question de renoncer à la solidarité. Si nous sommes solidaires avec d'autres pays, pourquoi ne le serions-nous pas avec nos propres compatriotes ?
M. Laeremans aimerait par ailleurs connaître l'origine des chiffres cités par M. Anciaux. S'agit-il de chiffres utilisés par les huit partis de la majorité institutionnelle ?
M. Anciaux répond que ces chiffres proviennent du service d'études de son parti.
M. Laeremans déplore l'absence de chiffres illustrant la vision commune des huit partis concernés et aimerait également avoir les tableaux avec les prévisions annuelles.
M. Laaouej constate que beaucoup de points ont déjà été abordés; il ne va donc pas se livrer à un exercice d'énumération superfétatoire et se contentera de commenter quelques éléments essentiels.
Pour commencer, le membre met l'accent sur le moment clé qu'a constitué l'adoption par un certain nombre de partis politiques de onze principes destinés à guider une bonne réforme de la loi de financement.
Ces onze principes apparaissent parfois un peu contradictoires. Comment transférer une large part d'autonomie fiscale aux régions sans toucher aux prérogatives fiscales de l'État fédéral ? Comment revoir certaines clés, comment transformer des dotations en autonomie fiscale directe, donc en transferts de compétences fiscales, tout en assurant la viabilité de l'État fédéral ?
Or, M. Laaouej est d'avis que le projet de loi spéciale à l'examen témoigne d'un bon équilibre. Il a fallu évidemment peser et sous-peser dans un sens et dans un autre. Il a fallu trouver le chemin de la cohérence. Au moment où l'on a songé à régionaliser une bonne part de l'impôt des personnes physiques, certains ne se rendaient peut-être pas compte des difficultés auxquelles ils allaient être confrontés. Par exemple, l'autonomie fiscale d'une région peut avoir des limites qui trouvent leur origine dans le droit européen: libre circulation des travailleurs, des capitaux, voire des marchandises. De la même manière, certains se sont rendu compte au fil des discussions que l'impôt des personnes physiques était une recette fiscale d'une nature particulière car ses recettes avaient une croissance supérieure à la croissance du PIB. De nombreux éléments sont ainsi apparus, rendant les discussions plus complexes.
D'autres enfin qui demandaient une large régionalisation de l'impôt des personnes physiques n'avaient pas réalisé qu'il était adossé à la sécurité sociale, qu'une large part de la base imposable à l'IPP est en effet constituée de revenus de remplacement qui proviennent de la sécurité sociale.
On pourrait ainsi citer quantité d'exemples qui expliquent pourquoi il aura fallu autant de temps pour pouvoir trouver les bons équilibres, dans le respect des onze principes fixés en août 2010. Parmi ceux-ci, la viabilité de l'État fédéral qui, depuis toujours, a pu compter sur l'élasticité de l'IPP, mais aussi le principe qui voulait que l'on préserve les prérogatives fiscales de l'État fédéral.
Il convient de souligner que le choix du modèle de l'autonomie fiscale est judicieux. En faisant en sorte que l'État fédéral garde une compétence exclusive sur la détermination de la base imposable, on a pu se résoudre à garder le critère du domicile dans la dévolution du pouvoir fiscal entre les régions. Ce choix n'allait pas du tout de soi. Il suffit pour s'en convaincre de voir ce qui se passe entre la Belgique et le reste du monde chaque fois qu'il s'agit de résoudre un conflit de souveraineté fiscale. Dans toutes les conventions sont retenus d'autres critères que celui du domicile: parfois le lieu de travail, parfois le siège de la fortune, parfois le situs d'un bien qui produit lui-même des revenus immobiliers, parfois encore la source du revenu, s'agissant de revenu financiers.
En faisant le choix judicieux des additionnels, plutôt que de donner compétence sur la base imposable, on a permis à la fois de préserver les prérogatives fiscales et d'éviter de rentrer dans un débat que certains auraient regretté car il aurait impliqué une modification des territoires fiscaux, voire même peut-être un élargissement de certains de ces territoires.
Un troisième élément sur lequel le sénateur souhaite insister car il montre le bon sens de ceux qui se sont accordés sur le projet à l'examen, c'est l'idée qu'il fallait une véritable autonomie fiscale. Dès lors, pour la part d'autonomie fiscale transférée aux régions, il fallait transférer l'élasticité, mais sans perdre de vue le principe de viabilité de l'État fédéral. Or, l'État fédéral doit faire face aux coûts du vieillissement, en particulier les pensions; il doit assumer une charge d'intérêts considérable sur une dette publique qui est à peu près l'équivalent de la richesse produite au niveau national. Il était légitime aux yeux de ceux qui se soucient de permettre à l'État fédéral d'assumer le coût du vieillissement, ainsi que la gestion et le service de la dette publique, de ne pas le priver de l'ensemble des ses moyens.
À l'origine des motivations de ceux qui demandaient plus d'autonomie fiscale, il y avait deux principes fondamentaux qu'on peut résumer de la sorte: d'une part, plus de démocratisation (les régions qui disposent de plus de recettes propres doivent aussi être celles qui les votent), d'autre part, plus de responsabilisation. Sur ces deux points, le sénateur ne peut que renvoyer aux développements du projet de loi et mieux encore, au rapport de la commission de la Chambre des représentants. Les chiffres sont clairs: s'agissant de l'augmentation de l'autonomie fiscale, elle passe de 51 à 68 % pour la Région de Bruxelles-Capitale, de 44 à 79 % pour la Région flamande, de 21 à 35 % pour l'ensemble de la Communauté et de la Région flamande, de 39 à 67 % pour la Région wallonne. Cela représente une augmentation significative de la part d'autonomie fiscale. Prétendre le contraire serait nier la réalité.
L'augmentation de la part des recettes fiscales propres met en œuvre le principe même de la responsabilisation. Cela doit satisfaire ceux qui pensent que la réussite d'une politique se manifestera dans une croissance de la recette d'impôt des personnes physiques localisée sur le territoire de la région concernée puisqu'on augmente la masse à partir de laquelle ce postulat pourra — de manière hypothétique — se vérifier. Pour sa part, l'intervenant fait remarquer que les recettes d'impôt des personnes physiques sont certes tributaires des politiques fiscales menées au niveau fédéral ou demain au niveau régional, mais qu'elles dépendent aussi de tellement de facteurs exogènes qu'on a parfois l'impression qu'elles échappent à l'analyse de ceux qui considèrent que la responsabilisation ne se manifeste qu'à travers l'augmentation des recettes IPP localisées sur un territoire régional. Nous sommes tributaires de chocs internationaux: crise financière, choc pétrolier, etc., nous subissons des récessions, une diminution des recettes fiscales dues à des facteurs exogènes divers. Il y a donc des nuances à apporter à ce principe de responsabilisation. Néanmoins, le groupe politique du membre s'est accordé sur le projet à l'examen et accepte de travailler dans ce schéma de responsabilisation.
S'agissant du financement des communautés, il est important de savoir si, pour l'éducation de nos enfants, pour le droit à l'école, — droit fondamental aux yeux du sénateur —, le critère du besoin est celui qui s'impose. Considérer qu'on va faire dépendre l'avenir éducatif d'un enfant de l'évolution des recettes IPP localisées sur le territoire sur lequel l'enfant va à l'école, ne lui paraît pas conciliable avec l'idée selon laquelle le droit à l'éducation est fondamental. C'est la raison pour laquelle le membre se réjouit du refus de suivre certaines lubies demandant que l'enseignement soit également financé sur la base de clés fiscales. Dans le projet de loi spéciale, on retrouve heureusement l'idée que pour certaines compétences, la logique de besoin doit s'imposer parce que ce sont des choses fondamentales. La même logique est suivie pour plusieurs compétences transférées, telles que les allocations familiales ou l'aide aux personnes ágées.
Un élément important du dispositif sur lequel on s'est accordé concerne le refinancement de Bruxelles. C'est un élément auquel on a voulu donner une réalité. Réalité qu'à aucun moment, on n'a voulu masquer derrière des considérations mues par une idéologie vaine. Il est vrai qu'on a voulu objectiver ce refinancement. On parle de « juste refinancement » car Bruxelles est centrale en Belgique, mais aussi en Europe. Elle irrigue de sa prospérité économique les autres régions. Premier bassin d'emploi du pays, elle accueille un grand nombre de navetteurs, de Flandre ou de Wallonie. Elle a pour cette raison d'importants besoins de financement sur le plan de la mobilité, de la propreté, de l'encadrement, de l'aménagement du territoire. C'est pourquoi on a fait le choix politique de lui apporter un complément de financement. L'accord vise, pour moitié, des recettes affectées ou un financement complémentaire affecté, et, pour l'autre moitié, étalée dans le temps, un certain nombre d'autres allocations.
Comme l'a titré le journal Le Soir, nous avons un socle de transition qui expirera dans dix ans. Cela signifie qu'on s'est donné une durée jugée raisonnable pour permettre aux différentes entités qui vont accueillir de nouvelles et importantes compétences de pouvoir prendre la mesure de ces compétences et de pouvoir, plus encore, développer des politiques qui leur permettront demain d'assurer leur viabilité financière.
M. Laaouej est convaincu que certaines entités — la Région bruxelloise évidemment — auront plus de difficultés que d'autres, en raison d'une évolution sociologique différente, d'une natalité différente, d'une proportion de jeunes plus importante. Pour toutes ces raisons, les besoins de financement iront grandissant. Mais un accord a été conclu sur un socle de transition de dix ans. C'est la raison pour laquelle le membre ne peut adhérer à l'idée selon laquelle on signe un chèque en blanc ad vitam aeternam. Dire cela, ce n'est pas lire correctement les textes.
L'intervention de solidarité a été drastiquement revue. Il n'est pas question ici de revenir sur le débat de l'effet pervers éventuel de la mesure. Comment peut-on imaginer qu'il viendrait à l'idée des gestionnaires, qui se soumettent au suffrage universel à échéance régulière, qu'il vaut mieux développer des politiques d'appauvrissement pour obtenir davantage d'intervention de solidarité ? C'est à la fois faux et insultant. Des réalités socioéconomiques peuvent justifier à certains moments des décalages en termes d'évolution de la prospérité et de la croissance économique et donc de recettes budgétaires. L'histoire est faite de cycles. Ce qui est vrai un jour peut ne plus l'être demain et la prospérité d'aujourd'hui n'est pas garantie pour le futur. Autrement dit, il faut faire preuve d'un peu d'humilité dans ce genre de débat.
C'est la fin du turbo Lambermont mais elle est compensée par une grosse dotation emploi qui, elle, est répartie sur des clés fiscales. De la même manière, au niveau de l'autonomie fiscale, l'élasticité de l'IPP a été transférée aux régions pour la part d'impôt régionalisée.
Comme une bonne part de l'IPP est régionalisée, il fallait se doter d'un cadre de concertation pour éviter la concurrence fiscale. Alors que le processus au niveau européen vise précisément à essayer de lutter contre la concurrence fiscale entre États, actuellement pour l'impôt des sociétés mais aussi de plus en plus pour l'impôt des personnes physiques, il aurait fallu, selon l'idéologie de certains, laisser jouer la concurrence fiscale sans limite au sein de la Belgique. C'est un calcul à court terme qui n'aboutirait qu'à assécher les caisses publiques et appauvrir tout le monde. Dans un État fédéral modernisé, l'idée même de concurrence fiscale est en soi une négativité. Il faut pouvoir l'encadrer et cet encadrement ne va nullement à l'encontre de la possibilité laissée aux régions de faire un large usage de leur autonomie fiscale. Alors qu'il y avait jadis une limite de 6,75 % de l'IPP localisé dans chacune des régions, en termes d'usage d'autonomie fiscale, il est demain théoriquement possible qu'une région ramène son impôt régional à zéro. On lui demande juste de respecter la progressivité qui, elle-même, subira une dérogation à hauteur maximum de 1 000 euros.
La concurrence fiscale ne procède pas de la logique d'un fédéralisme fiscal.
On pourrait encore s'étendre sur la manière dont l'autonomie fiscale a été concédée aux régions, en particulier sur la latitude laissée aux régions dans la politique de réduction d'impôt: réductions générales, réductions proportionnelles, différenciées ou non par tranches. Chaque région peut, en fonction de ses besoins, ou de ses priorités, développer une politique fiscale conforme à ses intérêts ou ses objectifs.
En guise de conclusion, M. Laaouej souligne qu'il se réjouit que le refinancement de Bruxelles soit aussi une reconnaissance de la Région bruxelloise comme institution à part entière.
M. Broers qualifie l'exposé de M. Laaouej comme très intéressant et surtout très « performant » du point de vue francophone. La clé de voûte de cette intervention consiste à défendre le principe visant à « assurer la viabilité de l'État fédéral ». Sur ce point, son opinion diverge de celle de M. Laaouej. Mais ce dernier a éclairé les raisons pour lesquelles les francophones veulent éviter certains débats.
M. Moureaux déduit de cette remarque que le groupe politique de M. Broers préfère organiser la non-viabilité de l'État fédéral.
M. Broers répond que les idées de son groupe politique sont connues: il prône la solidarité mais dans une optique de confédéralisme.
M. Moureaux rétorque que si le groupe N-VA s'oppose au principe visant à garantir la viabilité de l'État fédéral, il ne peut se dire confédéraliste. C'est bien du séparatisme qu'il s'agit, voire de la mise à mort de l'État fédéral.
M. Broers conteste cette interprétation. Son groupe politique souhaite introduire le confédéralisme. Mais il admet que certaines matières comme la politique de la défense ne peuvent être transférés aux régions.
En ce qui concerne les dix objectifs de la réforme proposée, Mme Taelman se rallie au secrétaire d'État, M. Wathelet, qui a renvoyé au contexte politique dans lequel ces objectifs ont été élaborés. L'intervenante pense qu'il est dans la logique des choses de formuler d'abord les principes et d'élaborer ensuite un modèle sur cette base.
Selon l'intervenante, ces principes correspondent à la théorie du fédéralisme fiscal tel qu'il est décrit dans la littérature scientifique. Elle déplore donc les déclarations laissant entendre que ces principes n'auraient pas été suivis. À cet égard, on a renvoyé à une étude du VIVES qui remonte toutefois à une date antérieure à celle où le texte à l'examen a été déposé. Il serait dès lors préférable de renvoyer, tout comme le fait M. Beke, à une étude plus récente, réalisée après le dépôt du texte à l'examen, à savoir l'étude de Decoster et Sas, de novembre 2013, intitulée « De nieuwe bijzondere financieringswet van de 6e staatshervorming: werden de beloften ingelost ? » (voir: http://www.flemosi.be/uploads/215/FLEMOSI %20DP28 %20Decoster %20Sas %202013 %20- %20financieringswet.pdf).
Cette étude conclut, dans le cadre d'évaluation qui lui est propre, que la nouvelle loi de financement tient ses promesses.
L'intervenante passe en revue, pour chaque principe, les conclusions de Decoster et Sas:
« L'autonomie fiscale a-t-elle augmenté de manière substantielle ? (Principe 1) Sans aucun doute. Au vu de leur ordre de grandeur, les centimes additionnels régionaux à l'IPP nouvellement instaurés offrent une marge de manœuvre confortable en termes de politique. L'autonomie fiscale des régions augmente dans une proportion d'environ deux tiers. On constate toutefois que, conformément aux principes 2 et 3 parmi l'ensemble des douze principes, des mesures ont été prévues afin de préserver la progressivité et d'éviter la concurrence fiscale déloyale, laquelle aurait rapidement un impact négatif sur le bien-être de chaque citoyen. »
Mme Taelman estime que l'autonomie qui est offerte aux régions est réelle et qu'elle leur permettra de mener leurs propres politiques. Il s'agit d'un modèle de centimes régionaux élargis. Cela signifie non seulement que des centimes pourront être prélevés mais aussi que des réductions, des diminutions d'impôt et des crédits d'impôt pourront être accordés. Les régions pourront donc faire beaucoup plus que les communes.
Elle indique que l'autonomie fiscale de la Flandre passera de 44 % à 79 %. Celle de la Wallonie et de Bruxelles sera respectivement de 67 % et de 61 %, si l'on considère la fiscalité propre. Il n'y aucun État fédéral au monde où l'autonomie fiscale des entités fédérées avoisine les 100 %.
« Le degré de responsabilisation a-t-il augmenté ? (Principe 5) Certainement. »
Mme Taelman prend l'exemple de la politique relative au marché du travail et renvoie à l'intervention de M. Laaouej. Les moyens afférents à cette politique sont substantiels, surtout en ce qui concerne la Flandre. Il s'agit en effet d'une enveloppe de quelque 5 milliards d'euros, répartie sur la base de la capacité fiscale. Plus une région sera performante sur le plan économique, plus elle obtiendra de moyens.
« Le chiffre de la population et le nombre d'élèves sont-ils encore pris en compte comme clé de répartition pour les dotations ? (Principe 5). » « Absolument », selon Decoster et Sas.
Cela signifie que pour les communautés, on utilise des dotations qui sont réparties selon une clé liée aux besoins. Selon l'étude, c'est une procédure parfaitement normale dans une fédération. Elle est l'expression de l'égalité horizontale de tous les citoyens de la fédération. L'intervenante adhère pleinement à ce principe. Lorsqu'on parle de l'enseignement pour les enfants ou des soins aux personnes ágées, on doit se fonder sur ce principe d'égalité fondamentale.
« La solidarité entre les entités est-elle maintenue et les effets pervers sont-ils éliminés ? (Principe 7). » Decoster et Sas répondent par l'affirmative. « L'on instaure un nouveau mécanisme de solidarité formulé plus clairement. Il est exclu qu'une région n'ait aucun intérêt à croître économiquement parce que cela entraînerait une diminution de ses revenus (piège au développement). Le mécanisme de solidarité est incontestablement moins généreux, même en tenant compte du fait qu'il est lié à la prospérité. Les dotations de solidarité reculent de 28 %. Le soi-disant « effet pervers » selon lequel, après application de la loi de financement, la Région flamande, plus riche, recevait moins par tête d'habitant que la Région wallonne, plus pauvre, a disparu. »
« Est-il tenu compte de la situation spécifique de Bruxelles-Capitale et de sa réalité sociologique ? (Principe 10) Oui, certainement. »
Bien que le débat sur ce sujet ait déjà eu lieu, l'intervenante souligne que la conclusion est clairement affirmative.
« Est-il garanti qu'aucune entité fédérée ne s'appauvrit structurellement ? (Principe 8) et la stabilité financière des entités fédérées est-elle assurée ? (Principe 9). »
Mme Taelman souligne que la fédération et Bruxelles sont gagnantes. Elle partage l'analyse de Decoster et Sas, qui estiment que les calculs de gains et de pertes, que les journaux affectionnent de mettre à la une, ne donnent pas une image correcte des avancées et des reculs enregistrés dans la réalité de tous les jours. En effet, une perte d'un euro de la Flandre vis-à-vis de l'autorité fédérale ne signifie pas que tous les Flamands perdront ensemble un euro, mais que l'euro en question sera utilisé au niveau fédéral pour des dépenses qui se situeront probablement encore principalement en Flandre, ou que cet euro sera économisé pour atteindre des objectifs européens. L'intervenante renvoie à l'exemple du vieillissement.
« La viabilité de l'État fédéral est-elle garantie ? (Principe 10) et l'équilibre des finances publiques globales est-il conservé ? (Principe 11). » Decoster et Sas affirment que de sérieux efforts ont en tout cas été entrepris en ce sens. Une contribution est demandée aux régions et aux communautés afin de préserver la viabilité des finances de l'ensemble des pouvoirs publics et afin également de soutenir le coût du vieillissement.
L'intervenante conclut au nom du groupe Open Vld que la loi de financement à l'examen met simultanément en œuvre deux réformes fondamentales. Une autre solution aurait été de pratiquer la politique de l'autruche et de ne pas partager équitablement les efforts d'assainissement et le coût du vieillissement entre l'autorité fédérale et les entités fédérées. La Flandre et les autres entités fédérées auraient alors acquis beaucoup plus de moyens. Mais l'on aurait alors passé sous silence le fait que le vieillissement aurait à terme mis l'État fédéral en faillite, avec pour victimes la Flandre, la Wallonie et Bruxelles, et surtout les citoyens de ces régions.
La réforme en projet de la loi de financement ne se contente pas d'instaurer un mécanisme de répartition équitable. Elle offre également une garantie pour l'avenir et déplace le centre de gravité vers les entités fédérées.
M. Deprez déclare avoir participé à plusieurs négociations relatives au financement des communautés et des régions. En 1987-1988 ont eu lieu les négociations qui ont abouti à la première loi spéciale de financement de 1989. En matière de financement des régions, il existait à ce moment un système complet de dotations, basé sur trois critères relatifs à la population, au territoire et à l'IPP. Il n'y avait donc aucune responsabilité des régions prévue. Lors des négociations, il y a eu de fortes discussions sur la proposition d'abandonner ce système et d'introduire quelques éléments de responsabilité et d'autonomie financière. En échange de cette petite parcelle d'autonomie donnée aux régions, un mécanisme de solidarité a été instauré.
À l'époque, il s'était réjoui de cette réforme. Ce n'est qu'après que les effets pervers de ce système de financement sont apparus. Il s'est ainsi avéré que les Communautés n'avaient pas reçu suffisamment de moyens. D'aucuns ont prétendu que les Flamands voulaient, de cette manière, étouffer les communautés afin de forcer le franchissement de nouvelles étapes dans la réforme de l'État.
M. Moureaux observe que les choses sont tout de même un peu plus complexes que ça. La vérité, c'est que la part des francophones dans l'enseignement alors unitaire a baissé extrêmement vite. Cette baisse a pris fin avec la réforme Toshiba de M. Dehaene. Mais le PS a alors commis l'erreur politique de déclarer, jusque sur les affiches électorales, que les francophones étaient prêts à fonctionner désormais avec moins de moyens que les autres. Sur le plan sociologique, ce n'était pas tenable. Lorsque le personnel enseignant est descendu dans les rues, le PS a d'abord tenu bon, mais le président d'un autre parti francophone a alors cédé sous la pression, avec toutes les conséquences que cela a impliquées.
M. Deprez admet avoir été ce président de parti. Il ajoute qu'à l'époque, son parti estimait que l'enseignement francophone était trop coûteux et qu'il fallait faire des économies.
L'intervenant a simplement voulu souligner le chemin parcouru depuis lors.
La réforme actuelle, avec des principes en matière d'autonomie fiscale, est un pas de géant par rapport à avant. Les onze principes énoncés sont fondamentaux et le modèle qui s'en inspire est complexe mais sain.
En ce qui concerne l'autonomie fiscale, l'intervenant soulève qu'un vrai pouvoir démocratique ne peut effectuer des dépenses que s'il est responsable de ses recettes. La responsabilisation des régions lui semble donc très importante.
L'intervenant se réjouit du fait qu'il est mis fin au système du turbo-Lambermont. Aussi longtemps que des compétences restent au niveau de l'État fédéral, ce dernier doit être correctement financé.
L'orateur apprécie que les effets pervers du mécanisme de solidarité sont corrigés. Il est judicieux de renforcer la Région bruxelloise. Personne n'a intérêt à avoir au centre du pays une capitale qui ne reçoit pas le maximum de moyens pour assurer son développement et assumer son rôle.
Un dernier élément concerne les chiffres que l'on demande de fixer pour 2028. Certes, des évaluations peuvent être faites, mais nous ne pouvons pas prévoir ce qui va se passer réellement en 2028.
Ainsi, l'intervenant est convaincu que le coût du vieillissement n'a pas été suffisamment évalué. La même chose vaut pour les effets de la nouvelle concurrence internationale des pays émergents. A-t-on vraiment pris la mesure des exigences que nous devrions rencontrer dès maintenant pour donner une chance aux populations bruxelloises pour lesquelles il y a un taux de chômage indécent à cause d'un manque de formation ou de discriminations ? Il faut une solidarité de tous les régions pour remédier à de telles situations.
L'orateur conclut que les présentes négociations se sont avérées nettement plus complexes, plus sophistiquées et donc plus longues que les précédentes, mais que les principes qui les régissent sont très cohérents et vont tous dans le bon sens.
2. Réponses de M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles
Le secrétaire d´État souhaite d'abord remercier les sénateurs de la majorité institutionnelle qui, avec une grande perspicacité, ont défendu la réforme proposée qui, faut-il le rappeler, trouve son origine dans une proposition de loi spéciale déposée à la Chambre des représentants. Vu que cette proposition est devenue un projet suite à son adoption par la Chambre des représentants, le gouvernement l'a fait le sien.
Le secrétaire d'État aborde encore les points suivants.
M. Beke a démontré avec force de conviction que les centimes additionnels prévus par le projet ne sont pas comparables à des centimes additionnels communaux. En effet, ils sont trop divergents en termes d'ordre de grandeur. Les régions pourront ainsi réduire à zéro 25 % de l'impôt des personnes physiques. Au vu de ce constat, il n'est pas tenable d'affirmer que la réforme n'accorde aucune autonomie fiscale aux régions. Une autre preuve de cette autonomie, mise en exergue par M. Laaouej, réside dans l'habilitation des régions à définir elles-mêmes la progressivité, dans un cadre strict (cf. l'article 12 du projet).
La réforme est inspirée par la volonté de respecter les onze principes dont celui d'éviter une concurrence fiscale déloyale. Les détracteurs de ce dernier principe ne font pas preuve de cohérence. D'une part, ils plaident au niveau européen pour que la Belgique ne fasse plus l'objet d'une concurrence fiscale ou sociale déloyale de la part de pays de l'Est ou d'États membres de l'Union européenne. D'autre part, ils qualifient d'hérésie l'ancrage du principe de l'exclusion de toute concurrence fiscale déloyale au niveau belge.
D'autre part, la critique formulée par certains, qui ne voient pas d'un bon œil que l'on oblige les entités fédérées à participer à l'effort d'assainissement, est paradoxale. Les partis qui s'opposent à un effort d'assainissement des entités fédérées sont justement ceux qui insistent pour que l'autorité fédérale se serre la ceinture afin de respecter les normes budgétaires européennes.
À cet égard, M. Beke a fait valoir à juste titre que la clé de répartition utilisée à cet effet est inférieure à celle proposée par le Conseil supérieur des finances pour le transfert des compétences. Le Conseil supérieur, où sont représentés aussi bien l'État fédéral que les entités fédérées, avait proposé une clé de 65/35 en partant des dépenses des différentes instances. Le projet fait un pas de plus dans le sens d'une autonomie d'affectation pour toutes les entités, ce qui joue à nouveau en faveur des entités fédérées. Mme Taelman a souligné à juste titre que le centre de gravité s'est à présent déplacé vers les entités fédérées. Certains tournent son affirmation en ridicule, mais s'opposent en même temps à une contribution proportionnelle des entités fédérées aux efforts d'assainissement.
Un autre point qui suscite l'insatisfaction politique du secrétaire d'État concerne les sommes excessives que l'État fédéral dépenserait, selon certaines critiques, lorsqu'il exerce une compétence donnée. Mais lorsqu'une telle compétence est transférée aux entités fédérées avec le budget correspondant, ce dernier est tout à coup jugé insuffisant. C'est de la schizophrénie poussée à son paroxysme. Une solution consisterait à refédéraliser toutes ces compétences parce que cela permettrait de faire des économies d'échelle. Mais ce point de vue n'est pas partagé unanimement.
En ce qui concerne l'élasticité, le secrétaire d'État se rallie à la déclaration de M. Beke. Il est exact qu'une partie des risques liés au mécanisme de l'élasticité seront répartis entre toutes les instances concernées. Il ne serait pas logique d'attribuer une totale autonomie aux régions sans qu'elles doivent elles-mêmes supporter les risques liés au mécanisme de l'élasticité. Cette répartition des risques est basée sur la moyenne des précédents chiffres d'élasticité. Il n'y avait pas d'alternative.
L'élasticité est influencée par toutes sortes de facteurs externes, comme la conjoncture, mais aussi par des facteurs internes, comme la propre politique.
En ce qui concerne le socle prévu pour dix ans, le secrétaire d'État souligne que celui-ci n'est pas indexé. Cela constitue déjà une part de responsabilisation. L'entité participe ainsi aux efforts budgétaires.
En ce qui concerne le financement de la Région de Bruxelles-Capitale, même M. De Wever prévoyait déjà un budget d'un montant de 350 millions d'euros. Le secrétaire d'État souligne par ailleurs que dans tous les plaidoyers en faveur d'une plus grande autonomie de compétence et de budget, il y a une discrimination qui saute aux yeux. Bruxelles était la seule région qui n'assumait aucune responsabilité par rapport à ses recettes. Quelle que soit la politique menée par la Région de Bruxelles-Capitale, celle-ci n'avait aucun impact sur ses recettes, sauf en ce qui concerne celles tirées des biens immobiliers. La réforme proposée permet de rencontrer la demande justifiée de refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale, mais réalise en même temps un assainissement du mode de financement de cette Région.
En ce qui concerne les accords de la « Sainte-Émilie », le secrétaire d'État souligne qu'il s'agit d'un accord politique qui n'a pas été coulé dans des textes de loi. À la question de M. Laeremans qui consiste à savoir s'il peut communiquer le texte de ces accords, le secrétaire d'État répond que ces accords n'ont aucun rapport avec le projet de loi spéciale à l'examen. En outre, il appartient aux acteurs politiques des différentes entités fédérées de déterminer eux-mêmes la manière dont ils entendent exercer leur autonomie. En tant que membre du gouvernement fédéral, il n'a pas à donner de commentaire sur la question.
Le débat concernant, entre autres, la suppression du « turbo Lambermont » et l'enveloppe pour l'emploi démontre que francophones et néerlandophones ont dû faire des concessions pour parvenir à ce compromis. Ils n'ont pas usé de la bonne vieille tactique qui consiste à mettre une entité au régime sec pour ensuite la contraindre à être plus indulgente.
Enfin, il constate que, jusqu'à présent, aucun régime de financement alternatif répondant à l'ensemble des onze principes précités n'a été formulé tant en ce qui concerne l'État fédéral qu'en ce qui concerne les communautés et régions.
3. Répliques
M. Laeremans renvoie au tableau de M. Anciaux qui reprend les montants que les entités fédérées devront payer au final. Il s'agit de sommes astronomiques qui coïncident dans une large mesure avec celles qui figurent dans l'étude réalisée par les universités wallonnes. L'intervenant renvoie aux articles publiés dans De Tijd et dans Het Belang van Limburg, le mardi 3 décembre 2013, sur les économies considérables que devra réaliser la Région flamande au cours des prochaines années. Le montant de ces économies est plus élevé que jamais: rien que pour la prochaine législature, la Flandre doit faire face à un déficit de 7,8 milliards d'euros dû aux cotisations relatives à l'assainissement et au vieillissement. Ceci freine bien sûr énormément la nouvelle autonomie. Ces montants exorbitants expliquent certainement le rejet d'un certain nombre de mesures par l'autorité fédérale.
Il est exact que la Flandre gagnerait elle aussi à mener une politique veillant à ce que les pensions puissent encore être payées. Selon M. Laeremans, le ratio au niveau fédéral n'est pas réparti selon une clé de 60/40 grosso modo, mais plutôt de 50/50. En outre, l'autorité fédérale aurait prévoir les problèmes depuis bien plus longtemps. Aucune politique de prévoyance n'a jamais été menée, ni en ce qui concerne le vieillissement, ni en ce qui concerne les pensions, ni en ce qui concerne la charge de la dette. Tous les problèmes se répercutent désormais dans une large mesure sur les entités fédérées, de sorte que l'autonomie flamande ne pourra guère proposer de nouvelles mesures et sera continuellement perçue comme extrêmement coûteuse. Une réforme de l'État devrait ouvrir des possibilités et des perspectives, mais c'est loin d'être le cas en l'occurrence.
Où la Flandre va-t-elle pouvoir trouver tout cet argent ? Les allocations familiales représentent près d'un tiers du budget transféré, mais M. Laeremans doute que l'on puisse économiser beaucoup dans ce domaine étant donné que le nombre d'enfants ne connaîtra pas de baisse spectaculaire, que du contraire. La seule solution, c'est d'économiser sur les missions principales telles que l'enseignement, le logement ou le bien-être. Le gouvernement flamand aura énormément de difficultés à mener une politique digne de ce nom au cours des prochaines années à cause de cette nouvelle loi de financement. Le nouveau régime de financement met un énorme frein aux possibilités des entités fédérées.
V. DISCUSSION DES ARTICLES ET VOTES
Article 1er
Cet article ne donne lieu à aucune observation. Il est adopté par 8 voix contre 4.
Article 2
M. Laeremans demande pourquoi dans l'article 1er, § 1er, 4º, en projet de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, il est question d'un mécanisme de transition de 2015 à 2033. Les développements de la proposition de loi spéciale précisent néanmoins: « Il (le montant de transition) reste constant en valeur nominale pendant dix ans pour diminuer de manière linéaire lors des dix années suivantes jusqu'à sa disparition complète ». La période visée est donc de vingt ans. Comment se fait-il alors que la période de transition n'est prévue en l'occurrence que de 2015 à 2033 ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que le montant de transition est nul pour la dernière année, à savoir 2034, et qu'il n'a dès lors pas été repris dans le délai mentionné.
Vote
L'article 2 est adopté par 9 voix contre 4.
Article 3
Mme Maes souligne que l'exercice des compétences fiscales des régions doit se faire dans le respect de la loyauté fédérale prévue à l'article 143 de la Constitution. Cette loyauté fédérale impose à l'autorité fédérale et aux entités fédérées de veiller, dans l'exercice de leurs compétences, à ne pas troubler l'équilibre de la construction fédérale. Elles ne peuvent pas porter atteinte à l'union économique et monétaire, et doivent tenir compte des autres entités (4) .
En outre, l'exercice des compétences fiscales doit se faire à l'exclusion de toute concurrence fiscale déloyale. Le secrétaire d'État peut-il expliquer ce que le principe de « l'exclusion de toute concurrence fiscale déloyale » apporte comme plus-value à la notion de loyauté fédérale ?
Une région confrontée à la concurrence fiscale d'un pays voisin peut-elle justifier une concurrence fiscale déloyale ? Imaginons que les Pays-Bas adoptent une mesure incitant le personnel ayant suivi une formation technique à aller travailler aux Pays-Bas et que les entreprises flamandes ainsi que le port réclament l'adoption d'une mesure similaire. Si les compétences fiscales prévues dans la loi spéciale à l'examen s'y prêtent et que la Flandre adopte, elle aussi, une mesure fiscale favorable, peut-on parler en l'occurrence d'un manque de loyauté ?
La question se pose en outre de savoir comment la loyauté fédérale se concilie avec le principe européen de fidélité communautaire prévu à l'article 4, alinéa 3, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (5) . La Belgique s'est vue condamner à plusieurs reprises par la Cour de justice après que les régions ont fait usage de leurs compétences fiscales.
La loyauté fédérale doit-elle être expliquée conformément au principe européen de coopération loyale ? La fidélité communautaire européenne prime-t-elle à ce point la loyauté belge que les régions doivent, dans l'exercice de leur compétence fiscale, aller à l'encontre des limitations instaurées par la loi spéciale à l'examen (6) ?
Les compétences fiscales des régions sont également liées au principe de la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux. Il s'agit de la pierre angulaire de l'intégration européenne que la jurisprudence de la Cour ne cesse de façonner. La Cour vérifie tout d'abord si l'une des libertés économiques fait l'objet d'une limitation. Le cas échéant, elle vérifie ensuite si cette limitation est justifiée et proportionnelle. Concernant la « reportabilité » flamande des droits d'enregistrement, la Cour a ainsi estimé que la limitation se justifiait par la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal (7) .
Le principe de la libre circulation figure également dans le Traité Benelux (8) . Il ressort du Commentaire commun des trois pays du Benelux que le Traité Benelux (1958) doit garantir aussi bien la liberté de circulation qu'un traitement national, notamment dans le domaine des droits et impôts de quelque nature que ce soit tels que définis aux articles 2.2. a) et f). La circulation des capitaux et des services doit également être exempte de toute interdiction ou entrave.
Quelle est la portée du principe inscrit en matière de libre circulation dans la proposition de loi spéciale ? Le principe doit-il faire l'objet d'une interprétation autonome et interne ? A-t-il la portée que lui donne le droit européen dans le cadre duquel une dérogation peut être justifiable ou doit-il recevoir une interprétation plus stricte qui, à l'instar du Traité Benelux, ne tolère aucune interdiction ni entrave ?
Quelles sont les conséquences si une Région exerce sa compétence fiscale telle qu'elle est définie dans la loi spéciale à l'examen de telle manière que l'on peut considérer qu'il y a concurrence fiscale déloyale ou atteinte à la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux ? En cas de double imposition, il est clair que la concertation doit permettre de remédier à la situation. Dans le cas d'une concurrence déloyale comme dans celui d'une atteinte à la libre circulation, la concertation est-elle facultative et n'y a-t-il donc pas d'obligation de résultat ?
M. Laeremans demande ce qu'il faut entendre par la notion de « concurrence fiscale déloyale ».
M. Beke explique que ce principe s'impose étant donné qu'il n'y a pas de hiérarchie entre les normes des entités fédérées et celles de l'État fédéral. Un certain nombre de règles de l'Union européenne doivent cependant être prises en considération. La notion de « concurrence fiscale déloyale » a déjà été définie dans l'accord du Lambermont de 2001: « L'introduction dans la loi spéciale de financement de l'exclusion de la concurrence fiscale déloyale évoquée ci-dessus est une innovation. Le concept de concurrence fiscale déloyale ne peut, à l'instar du concept d'union économique et d'unité monétaire, être défini de manière univoque. La Cour d'arbitrage a néanmoins développé elle-même ce concept général avant qu'il soit intégré dans la législation spéciale. Le principe de l'union économique et de l'unité monétaire est devenu un critère de contrôle pour la Cour d'arbitrage. On vise à présent le même objectif par l'inscription de la notion de concurrence fiscale déloyale. Le gouvernement entend formellement introduire une idée novatrice dans la loi spéciale de financement. Pareille introduction correspond au caractère évolutif de la structure fédérale de l'État. Par conséquent, il n'est pas indiqué de faire dépendre uniquement ce système, qui repose également sur la loi spéciale de financement, de points d'ancrages juridiques déjà existants. » (voir l'exposé des motifs du projet de loi spéciale portant refinancement des communautés et extension des compétences fiscales des régions, doc. Chambre, nº 50-1183/1, p. 22)
L'intervenant en conclut que ce principe est inscrit dans la loi spéciale depuis douze ans déjà sans avoir encore prêté à discussion.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que le principe de l'exclusion de la concurrence fiscale déloyale tout comme le principe de la libre circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux doivent être interprétés de manière analogue à l'interprétation actuelle de la Cour européenne.
M. Laaouej estime qu'il faut faire une lecture complète de l'article 3 du projet de loi spéciale. L'article 1erter proposé de la loi spéciale du 16 janvier 1989 prévoit que l'exercice des compétences fiscales des régions applique les principes de l'exclusion de toute concurrence fiscale déloyale, de l'évitement de la double imposition et de la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux. Un mécanisme de concertation entre l'État fédéral et les régions sur la politique fiscale et sur ces principes est mis en place. Il ne s'agit donc nullement de briser l'autonomie fiscale des régions mais de rendre possible cette concertation, en fonction d'un certain nombre de paramètres.
Dans le cadre du principe de l'évitement de la double imposition, d'éventuels conflits entre régions sur la localisation du domicile légal, qui constitue la base pour justifier le pouvoir d'imposition d'une région ou d'une autre, s'inscrivent dans le cadre de la concertation précitée.
Le principe de l'exclusion de la concurrence fiscale déloyale, lorsqu'une politique fiscale menée par une région peut constituer un préjudice envers d'autres régions, à l'instar des règles au sein de l'Union européenne, est acquis.
Le principe de la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux fait partie du cadre normatif existant de l'Union économique et d'unité monétaire de la Belgique. Ce principe qui vaut pour l'Union européenne doit évidemment aussi valoir à l'intérieur de la Belgique.
Le « job-korting » accordé par la Flandre constitue un exemple de la mise en application de ce principe. Il devait être accordé aux ressortissants de l'Union européenne et donc a fortiori aussi aux ressortissants d'une autre région de la Belgique.
M. Laeremans renvoie à l'article 1erter initial de la loi spéciale relative au financement des régions et des communautés, qui dispose ce qui suit: « l'exercice des compétences fiscales des régions visées dans la présente loi s'opère dans le respect du principe visant à éviter la double imposition. En cas de demande visant à prévenir la double imposition, jugée fondée par la région, cette région se concerte avec les autres autorités concernées en vue de remédier à l'imposition contraire au principe évoqué à l'alinéa 1er. »
Le principe de l'exclusion de la concurrence fiscale déloyale a été introduit en l'espèce en 2001. Que recouvre ce principe et quelle est la sanction prévue en cas de non-respect de ce principe ?
Pour M. Anciaux, il est évident qu'un accroissement considérable de l'autonomie fiscale va de pair avec la compétence de fixer les règles du jeu, mais cela n'empêchera pas le déploiement d'une politique propre ni de l'autonomie fiscale. La loyauté fédérale est déjà inscrite dans la Constitution et dans les lois spéciales. Une jurisprudence s'est déjà développée en la matière, et cela n'a pas encore donné lieu à des conflits jusqu'à présent. Il n'est pas possible de fixer dès à présent des règles du jeu pour l'avenir; il faut d'abord attendre la jurisprudence qui se construira en la matière.
La concertation jouera un grand rôle, car il n'y a pas de hiérarchie des normes. C'est la raison pour laquelle on ne peut pas contester en justice la politique d'une des entités concernées, sauf en cas de pratiques manifestes de concurrence déloyale.
M. Beke pense que l'on pourra mener ce débat au sein du futur Sénat, dans le cadre des prochaines étapes de la réforme de l'État. Comment faire pour transférer de nouvelles compétences, eu égard à notre système dépourvu de hiérarchie des normes, et à une Union européenne toujours plus encline à nous dicter notre politique monétaire, socioéconomique et financière ?
Les auteurs du texte à l'examen ont opté pour une solution pragmatique qui existe déjà depuis 2001, de sorte qu'on ne touche pas au principe de l'absence de hiérarchie des normes.
Il faut en outre tenir compte du principe européen de la libre circulation des personnes et de la question du pays de l'activité professionnelle ou du pays de résidence. La sécurité sociale est alors liée à la situation professionnelle, tandis que l'aide sociale est liée à la situation de résidence. Voilà encore un sujet de discussion pour le futur Sénat.
Le secrétaire d'État souligne que les principes de l'union économique et monétaire ont déjà donné lieu à une jurisprudence et que la loyauté fédérale a, elle aussi, déjà été définie par la Cour constitutionnelle. Tout ce qui sort du cadre défini est déloyal et sera dès lors soumis à l'appréciation de la Cour constitutionnelle.
La Cour constitutionnelle définira elle-même les conséquences des arrêts qu'elle rendra dans ce domaine.
M. Laeremans renvoie à l'intervention qu'il a consacrée précédemment à la loyauté fédérale dans le cadre de la discussion du projet de loi spéciale relative à la Sixième Réforme de l'État (voir doc. Sénat, nº 5-2232/5). Dans les travaux préparatoires de la modification de la Constitution de 1993, il était précisé initialement que le contrôle de ce principe ne faisait pas partie des missions de la Cour constitutionnelle car il était question d'intérêts, et non de compétences. Mais entre-temps, la Cour constitutionnelle s'est vu attribuer de nombreuses compétences nouvelles, si bien que la crainte d'un « gouvernement des juges » est fondée.
Pourquoi prévoit-on la possibilité d'une concertation sur demande dans le cas du principe de la prévention de la double imposition (voir le nouvel article 1erter, alinéa 3), alors que rien de semblable n'est prévu pour le principe de la concurrence fiscale déloyale ? En ce qui concerne la concurrence déloyale, le nouvel article 1erter, dernier alinéa, prévoit seulement la tenue d'une concertation annuelle. Il n'y a donc aucune place pour la concertation sur des mesures ponctuelles. Dès la moindre suspicion de concurrence déloyale, l'intéressé doit s'adresser à la Cour constitutionnelle.
M. Laaouej lit le dernier alinéa de l'article 1erter: « Une concertation sur la politique fiscale et sur les principes visés à l'alinéa 1er est organisée annuellement au sein du Comité de concertation visé à l'article 31 de la loi ordinaire du 9 août 1980 de réformes institutionnelles. » L'alinéa 1er en question énonce: l'exclusion de toute concurrence fiscale déloyale, l'évitement de la double imposition et la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux.
La concertation doit donc porter sur ces trois points. Le rôle des parlementaires sera de vérifier si oui ou non la concertation a eu lieu et le résultat de celle-ci.
Selon M. Laeremans, il n'en demeure pas moins qu'aucune concertation n'est prévue pour les mesures ponctuelles qui seraient prises dans le courant de l'année et considérées par une région ou par l'autorité fédérale comme induisant une concurrence déloyale, étant donné que la concertation est organisée une fois par an.
Mme Maes estime, elle aussi, que les mesures prévues sont réactives, alors que le législateur régional doit pouvoir mener une politique et ne pas dépendre de décisions rendues a posteriori par une Cour constitutionnelle. La sécurité juridique n'est pas garantie de cette manière.
M. Anciaux souligne que le comité de concertation peut être convoqué plus d'une fois par an. En fait, chaque membre du comité de concertation peut toujours demander que le comité se réunisse et également proposer des points à mettre à l'ordre du jour.
Vote
L'article 3 est adopté par 9 voix contre 4.
Article 4
Mme Maes souligne que l'article 4 proposé reprend l'actuel article 11, alinéa 2, de la loi spéciale de financement, étant entendu que cette disposition ne s'appliquera désormais plus aux Communautés. Cela signifie-t-il que les Communautés seront compétentes à l'avenir pour prélever des centimes additionnels, décider de réductions d'impôt ou autoriser des diminutions d'impôt visés dans cette loi ? En effet, les Communautés conservent leur compétence constitutionnelle de lever des impôts, sauf exception prévue par la loi.
Le secrétaire d'État répond que les Communautés n'ont pas de compétences fiscales et n'en auront pas non plus dans le cadre de la réforme à l'examen.
Amendement nº 1 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à compléter l'article 1erquater proposé.
Mme Maes renvoie à la justification écrite de l'amendement.
Le secrétaire d'État ne peut marquer son accord sur cet amendement et renvoie aux développements, qui expliquent pourquoi cette option n'a pas été retenue par les membres de la majorité institutionnelle.
Votes
L'amendement nº 1 de Mme Maes et M. Broers est rejeté par 9 voix contre 4.
L'article 4 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 5
Mme Maes se réfère aux observations formulées par le Conseil d'État concernant cet article (doc. Chambre, nº 53-2974/2, p. 9). Quelles sont les suites qui leur ont été données ?
Le secrétaire d'État répond que la majorité institutionnelle a déposé à la commission compétente de la Chambre un amendement visant à donner suite à l'observation du Conseil d'État.
M. Laeremans aimerait obtenir de plus amples explications concernant l'article 5. Toutes les amendes relatives aux infractions au code de la route sont-elles transférées aux régions suivant le lieu de l'infraction ? Les amendes relatives à des infractions commises sur des routes régionales ou communales sont-elles immédiatement reversées aux régions et les amendes relatives à des infractions commises sur les autoroutes sont-elles versées au fonds fédéral et ensuite transférées au fonds régional ? En réalité, différents fonds sont créés. N'est-il pas plus logique de travailler seulement avec des fonds régionaux ?
Le secrétaire d'État explique que la police percevra les amendes et les reversera ensuite aux régions suivant les modalités définies dans la loi de financement. Dès lors que la police reste une compétence fédérale, les sommes qu'elle perçoit sont versées au fonds fédéral. De plus, les autoroutes restent une compétence fédérale, ce qui financera en partie la police fédérale.
L'intervenant renvoie à l'article 58 de la proposition de loi spéciale, qui prévoit ceci: « Lorsque, en raison de ses compétences en matière de police et de justice, l'autorité fédérale perçoit les recettes visées à l'article 2bis, [elle] verse celles-ci à l'autorité compétente de la Région à la fin du mois qui suit celui de leur perception par l'autorité fédérale. »
M. Laeremans en déduit que chaque amende perçue actuellement sur le territoire d'une région déterminée revient à cette région. Les clés de répartition appliquées jusqu'à présent étaient très complexes et donnaient lieu à des transferts nord-sud, ce qui ne sera désormais plus du tout le cas.
Le secrétaire d'État confirme que la loi prévoit maintenant un système transparent.
M. Broers comprend que cette réglementation doit être maintenue sur les autoroutes afin de financer en partie la police fédérale. Une autre solution était envisageable: on aurait pu prévoir que les régions reversent à l'autorité fédérale une partie des amendes concernées.
Vote
L'article 5 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 6
Cet article ne donne lieu à aucune observation. Il est adopté par 10 voix contre 4.
Article 7
Mme Maes a un certain nombre de questions au sujet de plusieurs dispositions de cet article.
Cet article règle la question du domicile fiscal.
L'article 7, § 2, du projet à l'examen dispose que pour l'application de la loi proposée, l'impôt des personnes physiques est réputé localisé à l'endroit où le contribuable a établi son domicile fiscal.
Le Conseil d'État fait remarquer, à juste titre, que le texte ne parvient pas à définir clairement et sans équivoque le critère de localisation puisque le Code des impôts sur les revenus 1992 applique plusieurs critères. Les personnes physiques qui ont établi en Belgique leur domicile ou le siège de leur fortune sont assujetties à l'impôt des personnes physiques. En outre, il y a les dispositions relatives aux diplomates nationaux et aux délégués des entités fédérées qui sont présumés avoir établi en Belgique leur domicile, alors que ce n'est pas le cas dans les faits lorsqu'ils sont accrédités à l'étranger. De surcroît, il y a aussi les conjoints qui sont toujours réputés avoir leur domicile fiscal à l'endroit où la famille est établie.
Le délégué du président de la Chambre des représentants aurait répondu au Conseil d'État que le « siège de la fortune » en tant que critère de rattachement serait supprimé du Code des impôts sur les revenus 1992. Selon Mme Maes, la catégorie visée fait d'ores et déjà partie des grands gagnants de la sixième réforme de l'État.
Mais cela ne résout pas encore tous les problèmes.
Les diplomates nationaux et les délégués des entités fédérées à l'étranger sont également réputés avoir leur domicile fiscal en Belgique. Dans quelle région le secrétaire d'État localise-t-il ces personnes ? Il s'agit en effet d'un groupe-cible qui, dans les faits, ne réside pas en Belgique.
Dans les développements de la proposition de loi spéciale (p. 17), on évoque le cas particulier lié à l'année de la séparation de fait. À cet égard, on peut lire ce qui suit:
« Pour cette année-là, les conjoints sont encore taxés ensemble. Dans ce cas, en application des règles qui sont utilisées pour déterminer l'endroit d'imposition en matière d'impôt des personnes physiques, les conjoints seront considérés comme:
— habitants de la région dans laquelle ils ont leur domicile fiscal au 1er janvier de l'exercice d'imposition, lorsque leur domicile se situe dans la même région;
— habitants de la région dans laquelle la dernière résidence matrimoniale était établie, lorsque, au 1er janvier de l'exercice d'imposition, ils ont leur domicile fiscal dans des régions distinctes. »
Quelle est la force juridique de cette idée formulée dans les développements (9) ?
L'article 2, § 1er, 1º, dernier alinéa, du CIR 92 introduit une fiction en ce sens que les couples mariés sont toujours censés avoir leur domicile fiscal à l'endroit où la famille est établie. Cette disposition a été instaurée en 1994, en réaction à la jurisprudence. La durée de séjour dans un pays déterminé jouait en tant que critère un rôle important pour l'obtention du statut de non-résident. Alors que la femme et les enfants continuaient à vivre en Belgique, l'homme travaillait à l'étranger. Pour faire en sorte que les revenus soient de nouveau assujettis à l'impôt belge des personnes physiques, on a créé une fiction en considérant que l'homme était présumé avoir son domicile à l'endroit où la famille est établie.
Étant donné que les développements ne disent mot des dispositions précitées, peut-on considérer que cette fiction ne s'applique pas dans le cadre de l'impôt des personnes physiques régional ?
L'article 5/1, § 2, du CIR 92, met l'accent sur la localisation du contribuable à une date unique, à savoir le 1er janvier de l'exercice d'imposition à l'impôt des personnes physiques. Mme Maes se réfère à une décision de justice attribuant alternativement aux coparents divorcés la majoration de la quotité exemptée pour enfants à charge. Les enfants résidaient à tour de rôle, au 1er janvier de l'exercice d'imposition, les années paires chez l'un des parents, et les années impaires chez l'autre parent, dans le système du partage alterné égalitaire de la résidence (10) . Cette décision montre clairement que lorsque le critère de localisation se focalise sur une date unique, en l'occurrence le 1er janvier, la situation de fait doit également être appréciée à cette même date.
Précédemment, Mme Veerle Wouters avait déjà interrogé le ministre à la Chambre des représentants à propos des contribuables dont les bases d'imposition disparaissent en cours de période imposable (11) . Il s'agit de personnes qui déménagent à l'étranger ou qui décèdent. En pareil cas, il y a lieu de déposer une déclaration « spéciale » à l'impôt des personnes physiques, afférente à l'exercice d'imposition « spécial ». Pouvons-nous considérer qu'un contribuable qui décède ou déménage à l'étranger en 2015 recevra un décompte fiscal pour l'exercice « spécial » d'imposition 2015 ? Le contribuable toujours en vie ou habitant encore dans le Royaume au 1er janvier 2016 recevra-t-il un décompte fiscal afférent à l'exercice d'imposition 2016 ?
Si pour la loi spéciale de financement, l'impôt des personnes physiques est réputé localisé à l'endroit où le contribuable a établi son domicile fiscal au 1er janvier de l'exercice d'imposition, en cas de décès ou de déménagement à l'étranger, l'impôt des personnes physiques sera-t-il localisé au 1er janvier du début de la période imposable ? Pour l'exercice « spécial » d'imposition 2015, la date du 1er janvier 2015 déterminera-t-elle donc l'endroit où il a établi son domicile fiscal pour cette loi ? Le secrétaire d'État confirme-t-il qu'un contribuable qui déménage dans une autre région dans le courant de l'année 2015 recevra un décompte fiscal pour l'exercice d'imposition 2016 et que son domicile fiscal sera dès lors fixé au 1er janvier 2016 ?
Une autre question se pose sur le plan de la procédure. L'administration fiscale fédérale se chargera de contrôler la détermination du domicile fiscal. En cas de litige entre le fisc et le contribuable, les Régions pourront-elles intervenir dans la procédure judiciaire en tant que parties intéressées ?
L'article 7, § 3, du projet, définit l'impôt État réduit. Les dividendes, intérêts, redevances, lots afférents aux titres d'emprunts et plus-values sur valeurs et titres mobiliers, continuent de relever de la compétence exclusive de l'autorité fédérale (développements, p. 15). Il ressort des développements de la proposition de loi spéciale qu'il s'agit de dividendes, intérêts et redevances à qualifier de revenus mobiliers. Toutefois, s'ils présentent un caractère professionnel, ces revenus seront qualifiés de revenus professionnels conformément à l'article 36 du CIR 92.
Pourquoi les dividendes, intérêts et redevances qualifiés de revenus mobiliers sont-ils exclusivement réservés à l'autorité fédérale ? Pourquoi ce choix se limite-t-il à l'article 17, 1º à 3º, du Code des impôts sur les revenus 1992 et ne comprend-il pas les revenus visés à l'article 17, 4 et 5 du CIR 92 (rentes viagères qui ne constituent pas des pensions et revenus issus de la cession ou de la concession de droits d'auteur et de droits voisins) ? L'objectif de cette majorité est-il que l'autorité fédérale garde la mainmise exclusive sur les revenus de l'épargne des citoyens (12) ?
L'article 7, § 5, alinéa 1er, prévoit que seule l'autorité fédérale est compétente pour les dispositions en matière de précompte mobilier et professionnel.
Nous lisons dans les développements (p. 18) que « l'autorité fédérale continuera à assurer le service de l'impôt des personnes physiques. Ceci implique entre autres que les contribuables pourront demander les réductions et crédits d'impôt régionaux via leur déclaration à l'impôt des personnes physiques et que le service public fédéral Finances sera responsable de l'enrôlement, de la perception et du recouvrement de l'impôt des personnes physiques, en ce compris l'enrôlement, la perception et le recouvrement de l'impôt des personnes physiques régional, ainsi que du traitement du contentieux y relatif. »
En vertu de l'actuelle loi spéciale de financement (article 9, § 1er, dernier alinéa), « les modalités de décompte de l'application des réductions et des augmentations générales d'impôt, des centimes additionnels et des réductions d'impôt sont réglées par un arrêté royal délibéré en Conseil des ministres après concertation préalable avec les gouvernements de région ». L'article 18 de la proposition à l'examen abroge cette disposition. Cette disposition permettait d'imputer au précompte professionnel les réductions générales d'impôts, telles que la déduction professionnelle flamande (« jobkorting »).
Faisons-nous ici un pas en arrière en ce qui concerne les éléments certains du calcul de l'impôt qui, sur le plan constitutionnel, doivent être imputés sur le précompte professionnel ? La concertation relative à l'imputation des réductions d'impôt sur le précompte professionnel disparaît en effet de la loi spéciale de financement.
Imaginons qu'une région décide de conserver le « bonus logement » et qu'une autre le supprime. Qu'avec la marge de manœuvre libérée, cette autre région veuille appliquer une réduction ou des centimes additionnels peu différenciés sur la tranche de revenus la plus basse. Et que, de cette manière, l'autre région veuille encourager l'activation des personnes peu qualifiées. L'autorité fédérale répercutera-t-elle la réduction ou les centimes additionnels sur le précompte professionnel ? Si elle ne le fait pas, elle prive la mesure de tous ses effets. En effet, l'autorité fédérale a elle-même déjà découvert qu'un crédit d'impôt sur les bas revenus ne fonctionne pas s'il ne se traduit pas directement par un salaire net plus élevé.
Si le précompte professionnel n'intègre pas l'impôt régional des personnes physiques, les indépendants qui font des versements anticipés pourront-ils, contrairement aux salariés, tenir compte de la politique régionale ?
L'article 7, § 5, dernier alinéa, prévoit que l'autorité fédérale peut instaurer des réductions d'impôt sans aucune limitation. Le Conseil d'État (cf. Dévelopements p. 12) se demande si ceci vaut uniquement lorsque ces réductions sont liées aux compétences matérielles de l'autorité fédérale ou aussi pour les matières qui relèvent des compétences matérielles des régions. La seule exception concerne les déductions qui sont transformées en réductions d'impôt par le gouvernement et qui sont exclusivement transférées aux régions. Quant à la portée exacte de cette compétence exclusive, on s'attarde encore sur l'article 11. Le débat qui fait déjà rage dans les médias au sujet de la compétence relative à la deuxième habitation illustre que cette nouvelle vague de réforme institutionnelle se heurte d'emblée à ses propres limites: le transfert concerne uniquement l'avantage fiscal pour l'habitation propre, et non la fiscalité d'une deuxième habitation. Le quotidien flamand De Tijd a déjà qualifié cette mesure d'« absurde » (13) .
Dans les développements (p. 27), on peut lire que « l'acquisition d'une deuxième habitation peut en fait être considérée comme un investissement ou comme la constitution d'une pension complémentaire du troisième pilier et est donc mise en rapport avec une compétence fédérale ». Il en va de même pour la première habitation. Quatrième pilier des pensions, il s'agit d'un facteur important contre la pauvreté à l'áge de la pension. En outre, une deuxième habitation peut tout aussi bien être mise en rapport avec le marché locatif.
Mme Maes a déjà souligné la tendance de ce projet à vouloir régler trop de détails. Il n'est pas inconcevable que la définition de l'habitation propre pour le bonus logement soit en conflit avec la première ou la deuxième habitation. L'habitation propre n'est en effet pas forcément la même chose que la première ou la deuxième habitation. En outre, le législateur spécial empiète considérablement sur la compétence du législateur statuant à la majorité simple.
Actuellement, le bonus logement s'applique à l'habitation qui est l'habitation unique du contribuable au 31 décembre de l'année de la conclusion du contrat d'emprunt. Le contribuable ne bénéficie plus du bonus logement majoré de dix ans à partir de la période imposable au cours de laquelle il devient propriétaire d'une deuxième habitation. La situation est également évaluée au 31 décembre de cette période imposable. Quel législateur sera désormais compétent pour moduler le moment à prendre en compte pour l'habitation unique ? La région devient en effet exclusivement compétente pour les dépenses en vue de l'acquisition ou de la conservation de l'habitation propre. Quelle autorité est compétente pour la première habitation et pour l'habitation unique ? Les modalités relatives à l'habitation propre, unique, première ou secondaire peuvent-elles être associées ? Les régions peuvent-elles aussi établir un lien avec les éléments de la base imposable fédérale ? En effet, on ignore absolument ce que le gouvernement fédéral décidera à propos du bonus logement. Actuellement, l'excédent d'intérêts des emprunts pour lesquels le bonus logement est appliqué n'est pas pris en considération pour la déduction d'intérêts ordinaire. Le gouvernement fédéral va-t-il encore couper ce lien avant l'entrée en vigueur de la loi spéciale à l'examen ? Dans le cas contraire, quelle autorité sera compétente pour couper éventuellement ce lien ? Concernant les éléments de la base imposable, est-il imaginable que le gouvernement fédéral associe des conditions asymétriques ou symétriques à une réduction d'impôt régionale qui n'existe que dans une seule région (asymétrique) ou qui existe dans les trois régions (symétrique) ?
Le secrétaire d'État répond que la législation relative aux personnes ne résidant pas en Belgique demeure une compétence fédérale. Les diplomates sont obligés d'avoir un domicile en Belgique. Il faut donc tenir compte de leur domicile pour pouvoir déterminer qui est compétent. Si la loi recourt à une fiction pour déterminer le domicile, le lieu de l'impôt régional sera déterminé par le domicile déterminé de manière fictive par la loi.
Concernant les différents exercices d'imposition, le secrétaire d'État répond que, si les conditions d'assujettissement à l'impôt disparaissent en 2015, l'impôt sera perçu cette année-là. Le lieu est déterminé le 1er janvier de cette année. Dans l'exemple choisi, il s'agit donc du 1er janvier 2015.
Pour ceux qui déménagent dans une autre région en cours d'année, le domicile sera déterminé le 1er janvier de cette même année.
La perception des impôts demeure une compétence fédérale.
En ce qui concerne le bonus logement, l'habitation propre deviendra une compétence entièrement et exclusivement régionale. L'intervenant renvoie à cet égard à l'article 11, § 4, alinéa 7. Le texte a encore été amendé à la Chambre, afin que ce point soit formulé le plus clairement possible.
M. Laeremans demande un complément d'information concernant le bonus logement et la réduction d'impôt. Les régions pourront à l'avenir accorder des réductions sur certains centimes additionnels ainsi que des diminutions d'impôt, mais elles ne pourront rien modifier à la base imposable ni instaurer des déductions fiscales. Cette interprétation est-elle correcte ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond qu'en effet, les régions ne peuvent pas accorder de déductions fiscales sur ce point. La seule compétence transférée est celle liée à l'habitation propre. Les régions décideront de manière autonome des mesures de soutien fiscal pour ces habitations. En revanche, les régions ne pourront pas instaurer de mécanismes de déduction de l'impôt, cette dernière restant fédérale.
M. Laeremans souligne toutefois que l'actuel mécanisme en matière de bonus logement est un mécanisme de déduction.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, réplique que c'est précisément la raison pour laquelle cette déduction est transformée en réduction d'impôt. Cela permettra aux régions de l'appliquer sans qu'il y ait d'immixtion ou de conflit avec les compétences fiscales du fédéral. Si les régions décident de ne pas se saisir de cette compétence autonome, le mécanisme actuel de réduction d'impôt reste d'application vu le principe de continuité.
Mme Maes revient à sa question concernant le précompte professionnel. Tiendra-t-on compte des réductions globales que les régions pourront appliquer ?
M. Wathelet rappelle que le précompte professionnel reste dans le giron des compétences fédérales. On pourra toutefois tenir compte des réductions prévues par les régions.
Amendement nº 2 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 2 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à compléter l'article 5/1, § 5, alinéa 1er, en projet, par la phrase suivante: « La prise en compte, dans le précompte professionnel, des centimes additionnels régionaux et des diminutions générales, des réductions d'impôt, déductions d'impôt et crédits d'impôt généraux, est fixée par arrêté royal après concertation avec les gouvernements régionaux. »
Mme Maes renvoie à la justification écrite de son amendement.
Amendement nº 3 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 3 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), qui vise à remplacer le § 2 de l'article 5/1 en projet par ce qui suit:
« § 2. Pour l'application du présent titre, l'impôt des personnes physiques est réputé localisé à l'endroit où le contribuable a établi son domicile fiscal au 1er janvier de la période imposable. »
Mme Maes renvoie à la justification écrite de son amendement.
Amendement nº 4 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), qui vise à remplacer le § 5, dernier alinéa, de l'article 5/1 en projet par ce qui suit:
« Sans préjudice des dispositions de l'article 5/5, § 4, l'autorité fédérale ne peut mettre en œuvre des suppléments sur la quotité du revenu exemptée d'impôt, des diminutions ou des réductions, déductions ou crédits d'impôt en ce qui concerne les compétences matérielles des communautés et des régions. »
Mme Maes renvoie à la justification écrite de son amendement.
Amendement nº 12 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 12 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à supprimer les mots « majoré de l'impôt afférent aux dividendes, intérêts, redevances, lots afférents aux titres d'emprunts et plus-values sur valeurs et titres mobiliers, » dans l'article 5/1, § 3, en projet.
Mme Maes renvoie à la justification écrite de son amendement.
M. Laeremans déclare soutenir les amendements développés par ses collègues de la NV-A. Il aimerait connaitre la position du gouvernement à ce sujet.
Monsieur Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, renvoie à ses réponses précédentes tant sur le précompte professionnel que sur le domicile. Quant à l'amendement nº 4, il ne peut le soutenir car il impliquerait que l'exonération fiscale pour enfants à charge, par exemple, ne pourrait plus être appliquée par le fédéral, ce qui est contraire aux termes de l'accord de gouvernement.
M. Laeremans aimerait avoir quelques précisions concernant les crédits d'impôt visés à l'article 7 du projet de loi spéciale. Les régions peuvent accorder des crédits d'impôt, mais des restrictions sont-elles prévues ? Comment ce mécanisme fonctionne-t-il concrètement ?
Selon l'intervenant, le système des crédits d'impôt présente de nombreuses lacunes. Ce système récompense notamment les contribuables qui fraudent en déclarant moins que les revenus dont ils bénéficient en réalité.
M. Wathelet réplique qu'il n'y a pas de limites aux crédits d'impôts prévus dans le projet de loi spéciale mais qu'il est évident que les régions doivent les rembourser au fédéral. Quant au principe même du crédit d'impôt, il rappelle que si les régions n'y souscrivent pas, elles ne sont pas obligées de l'appliquer. C'est la base même de l'autonomie vers laquelle on tend et le groupe politique de M. Laeremans devrait, à sons sens, s'en réjouir.
M. Anciaux constate à son tour que le Vlaams Belang plaide manifestement pour une autonomie fiscale limitée dans le chef des entités fédérées.
M. Laeremans souligne que pour pouvoir bénéficier de cette possibilité, la Flandre doit payer cash à l'autorité fédérale.
L'intervenant se demande si la réforme modifie les crédits d'impôt existants ou si ceux-ci restent intégralement à charge du fédéral.
M. Anciaux répond que le projet à l'examen ne modifie pas la législation fiscale; il concerne simplement les compétences de l'autorité fédérale et des régions en la matière.
M. Laaouej acquiesce. La seule chose que l'on a faite préalablement au projet de loi, c'est de convertir la déduction d'impôt pour habitation propre en une réduction d'impôt, sans que cela ait la moindre conséquence pour le contribuable. Cela permet cependant le transfert de la compétence en question.
Mme Maes indique que son amendement trouve son origine dans le transfert de la compétence relative aux prestations familiales vers les communautés.
Votes
Les amendements nos 2, 3, 4 et 12 de Mme Maes et M. Broers sont successivement rejetés par 10 voix contre 4.
L'article 7 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 8
Mme Maes constate qu'on instaure, dans l'article 8, le « facteur d'autonomie ». Jusqu'à présent, l'imputation des mesures autonomes régionales était réglée entre les régions et l'autorité fédérale. Le contribuable n'avait qu'à vérifier son décompte fiscal individuel. Avec le projet à l'examen, le contribuable devient partie prenante de l'imputation politique d'une manière que plus personne ne comprend. C'est tout à fait antidémocratique et asocial. Seuls ceux qui auront les moyens pourront encore recourir aux services — coûteux — d'un fiscaliste pour faire vérifier leur calcul d'impôt. En effet, qui pourra vérifier l'application de ce facteur d'autonomie ?
Prenons le cas de l'indexation des montants de l'impôt des personnes physiques. En 2010, Mme Veerle Wouters, députée, avait interrogé le ministre des Finances et le ministre de l'Économie sur la différence de résultat obtenu lors du calcul des index moyens. Le ministre des Finances de l'époque était convaincu que le fisc avait toujours utilisé le bon coefficient d'indexation. Un simple coup d'œil suffit pourtant pour constater que les moyennes des index pour les années de référence 1988 (70,90), 1989 (73,10) et 1991 (77,97), telles que publiées annuellement par le fisc au Moniteur belge, ne correspondent pas aux moyennes calculées par le SPF Économie pour les années 1988 (70,84), 1989 (73,03) en 1991 (77,98). Le SPF Économie a souligné qu'il s'agit d'un calcul purement mathématique. Selon le mode d'arrondissement du résultat intermédiaire ou seulement du résultat final de la conversion de la moyenne d'une année en moyenne d'une autre année de référence, la différence est de 0,01 point au maximum, en conséquence des écarts d'arrondissement, lesquels s'expliquent eux-mêmes par la précision du calcul de l'index à 0,01 point près. Le SPF Économie indique toutefois que le résultat obtenu est le même dans la plupart des cas. En effet, la différence ne tient pas à la méthode choisie, mais à la précision mathématique du calcul.
Les index moyens retenus par le fisc présentent pourtant un écart de plus de 0,01 point. Comme on pouvait s'y attendre, le fisc arrondit en faveur du Trésor. Il s'agit là d'une technique de fraude informatique bien connue dans le secteur bancaire. De nombreux petits écarts d'arrondissement donnent en effet un montant considérable au final.
Le 14 mars 2012, le SPF Finances a jugé utile de publier le message suivant sur son site web:
« L'indexation annuelle des limites de revenus, des tranches de revenus, des exonérations, des réductions, des déductions et des limites ou des limitations se réalise en multipliant ces montants par la moyenne des indices des prix de l'année qui précède celle des revenus et en divisant par la moyenne des indices des prix de l'année 1988.
Depuis les adaptations à l'indice des prix apportées en 1996 et 2004, l'administration fiscale utilise toujours les coefficients de conversion publiés par le SPF Économie, PME, Classes moyennes et Énergie. L'indexation a toujours été correctement appliquée.
Aucune rectification ne doit donc avoir lieu. Même si certains incitent à introduire des réclamations, celles-ci sont complètement dénuées de sens. »
Le journal l'Écho a réussi à mettre la main sur un arrêt de la cour d'appel d'Anvers du 8 mars 2005, donnant tort au fisc dans une affaire relative à l'indexation. L'arrêt ne figure pas dans la banque de données Fisconetplus des Finances. La revue Le Fiscologue a récemment commenté un jugement du tribunal de Mons qui donne à nouveau tort au fisc dans une affaire relative à l'indexation des barèmes, le contribuable obtenant gain de cause et le fisc étant condamné à lui rembourser 2,72 euros d'impôt des personnes physiques.
Il est dommage qu'il ne soit pas possible d'intenter une « class action » contre les pouvoirs publics en Belgique. Qui croit encore le fisc quand celui-ci affirme qu'il est totalement dénué de sens d'introduire une réclamation ? Cela ne vaut guère la peine pour les contribuables d'engager une procédure à titre individuel, mais pour le fisc, il s'agit de sommes considérables. Le professeur Haelterman avait déjà prévenu en 2012 que si le fisc était condamné, le gouvernement se couvrirait en adoptant un texte de loi légalisant la pratique courante. Il s'agit de créer un sentiment de légalité chez le citoyen.
Si Mme Maes cite cet exemple des coefficients d'indexation, c'est parce que les contribuables doivent pouvoir recalculer leur décompte d'impôt et vérifier tous les éléments du calcul.
Qui peut préciser où le citoyen peut retrouver les facteurs A, B et C pour la fixation du facteur d'autonomie ?
A est le montant fixé pour l'exercice budgétaire 2015 en vertu de l'article 33 pour les trois régions ensemble.
Où le contribuable peut-il retrouver le montant des moyens de l'impôt des personnes physiques par région pour l'exercice budgétaire 2015 ? Où le contribuable pourra-t-il contrôler quels étaient les moyens de l'impôt des personnes physiques en 2015 ?
Où le contribuable peut-il retrouver le montant de l'intervention de solidarité nationale et du terme négatif ?
B est le montant octroyé pour l'exercice budgétaire 2015 en vertu de l'article 35decies pour les trois régions ensemble, multiplié par 4/6. Dans le commentaire tant de l'article 9 (doc. Chambre, nº 53-2974/001, p. 20) que de l'article 32 (doc. Chambre, nº 53-2974/001, p. 60), nous lisons que 60 % des moyens afférents au transfert de certaines dépenses fiscales dans l'impôt des personnes physiques sont transférés aux régions. Les 40 % restants sont transférés par le biais de l'autonomie fiscale des régions en matière d'impôt des personnes physiques.
Pour déterminer la dotation de 60 % des dépenses fiscales transférées à titre de compétence exclusive, on part d'un montant de référence provisoire de 2 984 683 730 euros pour les trois régions ensemble.
Le Conseil d'État fait remarquer à juste titre qu'il conviendra de préciser si le facteur d'autonomie est arrondi à trois décimales à la hausse ou à la baisse. Nous supposons d'ailleurs aussi que le facteur C du numérateur doit également être arrondi à l'euro.
Comme les coefficients d'indexation, le facteur d'autonomie sera publié chaque année au Moniteur belge. Le secrétaire d'État a-t-il une idée de quand il sera publié en 2017 ?
L'article 5/2, § 2, en projet, détermine dans quel ordre l'impôt État est calculé.
Jusqu'à ce jour, ce calcul s'opère comme suit: la quotité exemptée est déduite de la base d'imposition. Le solde est diminué de la liste des réductions d'impôts visées aux articles 145/1 à 145/36 du CIR 92. L'on applique ensuite la réduction d'impôt pour pensions et revenus de remplacement. Les personnes un tant soit peu familiarisées avec le calcul de l'impôt des personnes physiques savent que chez les pensionnés et les bénéficiaires d'un revenu de remplacement, une réduction d'impôt au titre des articles 145/1 et suivants a pour effet de réduire la réduction d'impôt pour pensions et revenus de remplacement. Ces réductions interfèrent entre elles.
M. Laeremans souligne la complexité de la déclaration d'impôt, qui va encore aller croissant compte tenu du projet de loi à l'examen. L'on connaît le « facteur d'autonomie » pour les années 2015, 2016 et 2017, mais il devra chaque fois être recalculé pour les années suivantes. Pourquoi ce « facteur d'autonomie » a-t-il été fixé spécifiquement pour ces années et pas pour les années suivantes ? Va-t-il augmenter ou restera-t-il stable ? N'est-ce pas purement arbitraire ? Pourquoi est-ce si complexe ?
M. Anciaux rappelle que le « facteur d'autonomie » deviendra définitif à partir de 2018.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, renvoie à l'article 5/2, § 1er, alinéa 5, en projet, qui dispose:
« Le facteur d'autonomie visé aux alinéas 3 et 4, est déterminé par arrêté royal délibéré en Conseil des ministres et après concertation avec les gouvernements des régions sur la base des rapports de la Cour des comptes visés à l'article 81ter. »
Le secrétaire d'État estime que l'intervention de Mme Maes n'a pas grand-chose à voir avec le projet à l'examen, qui opte expressément pour une seule et unique déclaration d'impôt. Le groupe N-VA veut-il que l'on utilise deux déclarations, une pour le fédéral et une pour le régional ? Pour le secrétaire d'État, ce serait tout sauf une simplification administrative.
M. Broers souligne combien il est important que les moyens perçus par l'autorité fédérale au moyen de cette déclaration unique, soient reversés à temps aux régions.
M. Anciaux répond que les moyens de l'autorité fédérale ont jusqu'ici toujours été versés à temps aux régions.
Amendement nº 13 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 13 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), qui vise à supprimer l'article 5/2, § 2, 7º, proposé.
Mme Maes se réfère à son intervention générale à propos de cet article ainsi qu'à la justification écrite de l'amendement.
Votes
L'amendement nº 13 de Mme Maes et M. Broers est rejeté par 10 voix contre 4.
L'article 8 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 8/1 (nouveau)
Amendement nº 15 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 15 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), tendant à insérer un article 8/1 (nouveau), rédigé comme suit:
« Art. 8/1. Dans le titre III/1, il est inséré un article 5/2/1 rédigé comme suit:
« Art. 5/2/1. § 1er. Chaque année, la différence est calculée entre les deux montants suivants:
1º un premier montant égal à l'impôt État réduit pour 2015 multiplié par le facteur d'autonomie, tel que fixé à l'article 5/2, § 1er, montant qui sera adapté chaque année, à partir de 2016, à 167 % de la croissance réelle du produit intérieur brut et à 100 % du taux de fluctuation de l'indice moyen des prix à la consommation, ainsi qu'il est prévu à l'article 33, § 2;
2° un deuxième montant égal à l'impôt État réduit, multiplié par le facteur d'autonomie tel que fixé à l'article 5/2, § 1er.
§ 2. À partir de 2018, la différence, telle que prévue au § 1er, est répartie entre les régions, si elle est positive, sur la base des recettes relatives à l'impôt des personnes physiques fédéral localisé dans chaque région. » »
Mme Maes renvoie à la justification écrite de l'amendement.
Vote
L'amendement nº 15 de Mme Maes et M. Broers est rejeté par 10 voix contre 4.
Article 9
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, explique que le facteur d'élasticité a été choisi sur la base de ce qui se faisait dans le passé. Il renvoie à la réponse de M. Beke en ce qui concerne le choix de ce facteur.
Mme Maes demande si l'on utilisera le même facteur pour toutes les régions.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que la logique appliquée est la même dans toutes les régions, mais que cela ne signifie pas nécessairement qu'on utilise le même facteur d'élasticité dans toutes les régions.
Mme Maes a encore une question en ce qui concerne les réductions d'impôt visées au § 2 de cet article. Elle souligne que l'expression « éléments remboursables » n'est pas définie dans le Code des impôts sur les revenus.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, indique que le Conseil d'État n'a formulé aucune observation à ce sujet. Il part donc du principe que cette expression est suffisamment claire.
Mme Maes demande si les membres de la commission ne peuvent formuler des remarques que sur les points qui ont fait l'objet d'observations de la part du Conseil d'État.
En ce qui concerne la notion « éléments fédéraux imputables et non remboursables », le secrétaire d'État renvoie aux explications fournies dans les développements de la proposition de loi, à la page 21 du document nº 2974/001 de la Chambre. Il s'agit:
1) du crédit d'impôt pour indépendants (article 289bis, CIR 92);
2) de la quotité forfaitaire d'impôt étranger (articles 285 à 289, CIR 92);
3) de la bonification pour versement anticipé de l'impôt (articles 175 à 177, CIR 92).
M. Laaouej fait remarquer qu'une loi de financement ne vise pas simplement à « clicher » une situation. Demain, on peut très bien avoir, dans la fiscalité fédérale, des crédits d'impôts remboursables. Ils en existe déjà et on peut imaginer qu'il en soient créés au niveau régional.
On n'organise donc pas uniquement un cadre légal pour ce qui existe déjà mais également en fonction de ce qui pourra être créé dans le cadre de la cohérence générale de la loi de financement.
Mme Maes constate que certaines notions, comme l'habitation propre, sont bien ancrées et définies, et d'autres pas. Cela ne bénéficie pas à la clarté.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, rétorque qu'il s'agit là de deux choses tout à fait différentes. Lorsqu'une compétence est transférée, il faut en donner une définition claire avant d'y affecter un montant. L'article en question définit simplement la façon dont les compétences sont exercées par les différentes entités. C'est la raison pour laquelle la notion d'« habitation propre » a été définie.
M. Laaouej donne un exemple: à un certain moment, la quotité d'impôt — qui est une réduction d'impôt — a été rendue remboursable. C'est donc une réduction d'impôts qui a été rendue remboursable pour ceux dont les revenus ne permettaient pas d'en bénéficier totalement. Cet exemple permet de se rendre compte que, dans le domaine des mesures fiscales qu'un gouvernement fédéral ou régional peuvent adopter, il y a toute une gamme de possibilités.
Vote
L'article 9 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 10
Mme Maes souhaite poser quelques questions ponctuelles sur cet article.
L'article 5/4, § 2, 2º, en projet, prévoit que l'impôt de base calculé est réparti entre les tranches d'impôt régionales.
Le Code des impôts sur les revenus prévoit l'application d'un taux progressif selon des tranches de revenu successives. Ainsi, un travailleur actif toute une année au salaire minimum de 1 501,82 euros par mois (14) sait qu'il sera taxé à 43 % (15) .
Il serait concevable de ventiler les taux d'imposition actuels en un taux fédéral et un taux régional. Si le but est de faire en sorte que les régions perçoivent 25 % de l'impôt des personnes physiques, cela signifierait que l'on scinde le taux fédéral actuel de 50 % en un taux fédéral de 37,5 % et un taux régional de 12,5 %.
Or, plutôt que de ventiler les taux actuels en un taux fédéral et un taux régional, on opte pour des centimes additionnels régionaux par tranche d'impôt. C'est une façon originale de présenter les choses. D'un point de vue mathématique, on peut effectivement prélever des centimes additionnels sur des tranches d'imposition, comme cela se fait pour la taxe communale additionnelle. Mais si l'objectif est d'accorder aux régions une autonomie en ce qui concerne le taux progressif et son champ d'application, seules des tranches de revenu peuvent convenir. Il est ainsi beaucoup plus facile de représenter la somme des taux fédéraux et régionaux et la tranche de revenu correspondante.
Amendements nº 5 et 14 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent deux amendements à cet article (doc. Sénat, nº 5-2369/2).
L'amendement nº 5 vise à supprimer le 3° de l'article 5/4, § 3, en projet.
De même qu'il n'existe aucun rapport entre les taux applicables aux revenus imposables distinctement visés à l'article 90 du CIR 92 et les taux applicables aux tranches de revenus appliquées aux revenus imposables globalement, il n'est pas souhaitable d'établir un lien entre les centimes additionnels régionaux applicables aux revenus imposables globalement et distinctement. Il ne convient pas que l'autorité fédérale impose aux régions des règles qu'elle n'applique pas elle-même. En outre, si le taux des centimes additionnels régionaux est uniforme et unique, la différence de pression fiscale sur les revenus imposables distinctement est déterminée par le taux d'imposition fédéral sous-jacent.
L'amendement nº 14 vise à supprimer l'alinéa 2 de l'article 5/4, § 2, en projet.
Mme Maes renvoie à l'amendement nº 12 et à la justification écrite de cet amendement.
M. Laeremans constate que le commentaire des articles cite un certain nombre d'exemples de la différenciation rendue possible par l'article 10. Il constate ainsi que la réduction de la progressivité est de moins de 10 %, si bien qu'on en est encore à 90 %. Quelle en est la ratio legis ? Pourquoi faudrait-il admettre qu'un pourcentage nettement inférieur soit appliqué à une tranche déterminée ? Quelle plus-value y aurait-il à accorder une diminution pour une tranche donnée ?
La deuxième remarque de M. Laeremans porte sur le § 3 de l'article proposé. En cas d'application de centimes additionnels différenciés, le taux doit être uniforme et il ne doit donc pas y avoir de différenciation des revenus imposés distinctement. L'intervenant trouve que la formulation utilisée n'est pas claire et prête à confusion.
M. Wathelet, secrétaire d'État, s'étonne de cette dernière remarque. Sur la concurrence fiscale déloyale, M. Laeremans estime que le texte n'est pas assez précis. Mais à l'article 10, où il est détaillé comment la progressivité pourra être maintenue, le membre reproche aux auteurs du texte d'être trop précis.
La ratio legis de cet article, est à trouver dans l'application d'un des onze principes de la réforme: le principe de la progressivité ne peut être mis en difficulté par une des régions. La manière dont la progressivité peut être modifiée est définie ici.
M. Laaouej rappelle que le principe de base reste la globalisation des revenus. Ce revenu globalisé est soumis à un impôt barémique. On aurait pu prévoir qu'il n'y aurait pas de centimes additionnels différenciés par tranche. La majorité l'a pourtant prévu, ce qui augmente l'autonomie fiscale des régions car elles peuvent cibler ce qu'elles font. Soit la région respecte une progressivité parfaite, soit elle renforce la progressivité, soit elle l'atténue dans les limites qu'on a évoquées précédemment.
Sur le principe de la globalisation des revenus, il y a deux grandes exceptions:
1. les revenus financiers soumis au précompte mobilier libératoire;
2. des revenus taxables distinctement (arriérés de salaire, indemnités de licenciement, revenus de la sous-location, ...).
Ces revenus ne sont pas soumis à un barème par tranche mais à des taux uniques. Pour des taux uniques, on ne peut pas imaginer de centimes additionnels différenciés. Il s'agit nécessairement de centimes additionnels uniformes à taux unique. En vertu du § 3, le taux applicable à ces centimes additionnels ne peut être inférieur à celui appliqué à la tranche d'impôt régional pour laquelle la recette estimée de l'impôt des personnes physiques régional est la plus élevée. C'est le choix qui a été fait.
M. Laeremans demande pourquoi il est prévu dans les développements (p. 30) que la dérogation à la progressivité ne peut être inférieure à 90 %.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que la dérogation à la progressivité par les régions est limitée à 90 %. La partie régionale de l'impôt des personnes physiques est aussi levée par tranche. Dans ces tranches, on peut modifier la progressivité à hauteur de 90 % au maximum. En ce qui concerne les taxes imposées séparément, elles sont soumises à des taux fixes. La majorité est parvenue à un accord sur ces 90 %, ce qui signifie que ce chiffre marque la limite de l'autonomie des régions pour modifier la progressivité des impôts.
Votes
Les amendements nos 5 et 14 de Mme Maes et M. Broers sont successivement rejetés par 10 voix contre 4.
L'article 10 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 11
Amendement nº 6 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 6 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), qui vise à supprimer le § 4 de l'article 5/5 proposé.
Mme Maes renvoie pour le surplus à la justification écrite de l'amendement.
Amendement nº 28 de M. Laeremans
M. Laeremans dépose l'amendement nº 28 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à remplacer le § 4 de l'article 5/5 proposé. L'intervenant opte pour une description générale non limitative, prévoyant que les régions sont également compétentes pour accorder des réductions ou des crédits d'impôt concernant toutes leurs compétences.
Interrogé sur son point de vue à propos de cet amendement, M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles répond que la fiscalité reste une compétence fédérale, sauf si l'on prévoit expressément une exception rendant les régions compétentes dans une matière déterminée.
M. Laeremans demande des précisions sur une série de notions figurant dans l'article 5/5, § 4, en projet. Il se demande ainsi ce que l'on entend par les raisons sociales pour lesquelles on ne peut pas occuper son habitation, comme prévu au 2 b) et quelles peuvent être les entraves légales empêchant le contribuable d'occuper sa propre habitation, comme prévu au point 2, c). S'agissant de l'alinéa 6, l'intervenant demande si dans la deuxième phrase, il ne manque pas le mot « autre » étant donné que l'on veut sans doute dire que le contribuable occupe une « autre » habitation. Enfin, l'intervenant demande des précisions à propos de l'alinéa 7 qui prévoit que pour les contribuables mariés ou les cohabitants légaux, il n'y a qu'une seule habitation qui peut être considérée comme l'habitation propre.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que les notions de « raisons sociales » et d'« entraves légales » ont la même teneur que dans le Code des impôts sur les revenus 1992, et dans la jurisprudence qui s'y rapporte.
En ce qui concerne l'alinéa 6, le secrétaire d'État répond que la disposition en projet reprend dans le texte de la loi spéciale les mêmes éléments que ceux actuellement applicables au bonus logement.
En ce qui concerne l'alinéa 7, le secrétaire d'État précise que lorsque des contribuables mariés ou cohabitants légaux vivent en séparation de fait, seule une des deux habitations pourra être considérée comme l'habitation propre.
Votes
L'amendement nº 6 de Mme Maes et de M. Broers est rejeté par 10 voix contre 4.
L'amendement nº 28 de M. Laeremans est rejeté par 10 voix contre 4.
L'article 11 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 12
Mme Maes se réfère à l'article 5/6, § 3, proposé, qui prévoit que les prêts souscrits avant le 1er janvier 2015 en ce qui concerne le bonus logement et l'épargne logement ne doivent pas satisfaire à la règle de progressivité visée au paragraphe 1er. Cette dérogation reste en outre valable jusqu'à ce que la région décide elle-même de modifier le taux de la réduction d'impôt à appliquer.
L'intervenante se demande pourquoi les régions doivent se plier à la règle très stricte de la progressivité si l'autorité fédérale n'est elle-même pas tenue de s'y conformer. Pourquoi les régions doivent-elles être plus catholiques que le Pape ? Cette exception n'est-elle pas une nouvelle preuve du carcan étroit dans lequel l'autonomie fiscale des régions va être enfermée ?
De plus, Mme Maes demande pourquoi l'exception s'applique uniquement aux emprunts conclus avant le 1er janvier 2015. Cela entraîne-t-il qu'à partir du 1er janvier 2015, on ne pourra plus souscrire d'emprunt selon les conditions actuelles du bonus logement ? En d'autres termes, le bonus logement prendra-t-il fin le 31 décembre 2014 ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que l'exercice de cette compétence par les régions ne sera possible que dans le respect du principe de la progressivité, tel qu'il est défini dans la loi spéciale de financement.
Amendements nos 10 et 11 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 10 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) tendant à prévoir explicitement dans l'article 5/6, § 3, en projet, que cette dérogation s'appliquera tant que la réduction d'impôt afférente aux contrats conclus avant le 1er janvier 2015 n'est pas expressément modifiée.
Mme Maes renvoie pour le surplus à la justification écrite de l'amendement.
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 11 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui tend à remplacer l'article 5/6, § 3, proposé, par ce qui suit: « § 3. Les régions peuvent continuer à appliquer, pour les dépenses visées à l'article 5/5, § 4, alinéa 1er, 1, une réduction d'impôt qui s'écarte de la règle de progressivité visée au § 1er. »
Mme Maes renvoie pour le surplus à la justification écrite de son amendement.
M. Laeremans revoie à l'article 5/6, § 2, 2°, en projet, qui prévoit: « pour autant que l'avantage fiscal par contribuable résultant de la dérogation à la règle de progressivité ne soit pas supérieur à 1 000 euros par an. » (doc. Chambre, nº 53 2974/012, p. 13). À partir de quel seuil de revenus cet avantage fiscal s'applique-t-il et est-il possible d'en donner un exemple ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que ce montant indexé de 1 000 euros est une limitation de l'assouplissement de la règle de progressivité qui s'applique aux régions. Des exemples sont donnés dans l'annexe 6 de la proposition de loi spéciale (doc. Chambre, nº 53-2974/001, pp. 197 à 202).
Mme Maes demande si une réduction d'impôt au taux marginal est appliquée aux contrats conclus avant le 1er janvier 2015.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond affirmativement.
Votes
Les amendements nos 10 et 11 de Mme Maes et M. Broers sont successivement rejetés par 10 voix contre 4.
L'article 12 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 13
Mme Maes se réfère à l'avis du Conseil d'État concernant l'article 13 de la proposition de loi spéciale, dans lequel il est dit que:
« Afin de lui permettre de remettre à la Région concernée un avis documenté et motivé sur les projets et les propositions de décret ou d'ordonnance en matière fiscale, l'article 5/7, alinéa 4, proposé, charge la Cour des comptes de développer « en accord avec le gouvernement fédéral et les gouvernements de région un modèle d'évaluation transparent et uniforme ». Les développements ne donnent pas la moindre explication à ce sujet.
Pareille disposition doit être entendue comme chargeant la Cour des comptes de concevoir elle-même ce modèle d'évaluation transparent et uniforme, car il ne se conçoit pas que cette mission confiée à la Cour des comptes, compte tenu de la nature de celle-ci, prenne par exemple la forme d'une convention ou d'un accord de coopération. Il est cependant admissible que le gouvernement fédéral et les gouvernements de région apportent leur collaboration à cette mission. Le texte doit être rédigé de manière à lever toute ambiguïté » (doc. Chambre, nº 53-2974/002, p. 14).
L'intervenante se demande s'il s'agit d'un modèle d'évaluation autonome de la Cour des comptes ou si l'on a prévu une procédure permettant aux régions de s'opposer à ce modèle d'évaluation.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, renvoie à sa réponse qui figure au rapport de la Chambre concernant la proposition de loi spéciale (doc. Chambre, nº 53-2974/007, p. 81).
Amendement nº 29 de M. Laeremans
M. Laeremans dépose l'amendement nº 29 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à supprimer l'article 13.
L'article 5/7, alinéa 1er, en projet, tel qu'il est prévu par l'article 13, dispose que: « Les projets et les propositions d'une règle visée à l'article 134 de la Constitution qui règlent des matières visées à l'article 5/6 sont, selon le cas avant dépôt devant le Parlement concerné ou après approbation par la commission compétente du Parlement en question, communiqués, pour avis concernant l'applicabilité technique, au gouvernement fédéral, aux autres gouvernements régionaux et, pour avis concernant le principe visé à l'article 1erter, alinéa 1er, 1º, à la Cour des comptes. Il en est de même pour les amendements adoptés. »
Aux termes de l'article 9, § 1er, de l'actuelle loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions, « l'instauration de réductions ou d'augmentations générales d'impôt, de centimes additionnels ou de réductions d'impôt, visés à l'article 6, § 2, alinéa 1er, 3 et 4, est préalablement communiquée par le gouvernement de région concerné au gouvernement fédéral ainsi qu'aux autres gouvernements de région ».
L'intervenant en conclut que l'article 9, § 1er, de la loi spéciale existante prévoir une simple communication sans participation du gouvernement fédéral et des autres gouvernements de région. La législation est renforcée étant donné que l'on prévoit une procédure d'avis qui aura un effet dilatoire. Quel est l'objectif de cette mesure et que se passe-t-il si le gouvernement fédéral ne rend pas d'avis ?
M. Anciaux fait remarquer que la procédure proposée n'est en fait pas renforcée. L'article 9bis de l'actuelle loi spéciale du 16 janvier 1989 relative aux financement des communautés et des régions dispose déjà: « Les projets et les propositions d'une règle visée à l'article 134 de la Constitution qui règlent des matières visées à l'article 9 sont, selon le cas avant dépôt devant le parlement concerné ou après approbation par la commission concernée du parlement en question, communiqués au gouvernement fédéral et aux autres gouvernements de région et, pour avis, à la Cour des comptes. (...) »
Cette procédure d'avis devant la Cour des comptes est remplacée par une procédure de concertation. Dans d'autres domaines tels que la mobilité, il existe d'ailleurs une procédure similaire qui permet un échange d'informations.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, souligne que la proposition de loi spéciale ne fait que perpétuer les procédures existantes sans en créer de nouvelles. Les mécanismes n'ont d'ailleurs pas pour vocation de bloquer, mais bien d'informer.
Amendement nº 7 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 7 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui tend à supprimer l'obligation d'avis préalable par une partie du pouvoir législatif à une partie du pouvoir exécutif, parce que ce principe n'est pas compatible avec l'autonomie fiscale des régions.
Mme Maes renvoie pour le surplus à la justification écrite de son amendement.
M. Anciaux répond que l'actuel article 9bis de la loi spéciale de financement, concernant la procédure d'avis obligatoire devant la Cour des comptes, est abrogé par l'article 19 de la loi spéciale en projet.
M. Laeremans relève que l'alinéa 3 de l'article 5/7 en projet énonce que « Les projets et propositions transmis à la Cour des comptes sont appuyés des données chiffrées suffisantes. L'assemblée générale de la Cour des comptes émet dans le mois qui suit la réception du projet ou de la proposition, dans le cadre du respect du principe visé à l'article 1erter, alinéa 1er, 1°, un avis documenté et motivé sur le respect du principe en matière de progressivité, visé à l'article 5/6. Cet avis est communiqué au gouvernement fédéral et aux gouvernements de région ».
L'intervenant en conclut qu'il s'agit pratiquement du même texte que celui qui figure actuellement à l'article 9bis de la loi spéciale du 16 janvier 1989 relative au financement des communautés et des régions.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, confirme que l'ancien article 9bis précité a été renuméroté en article 5/7, alinéa 3.
M. Laeremans renvoie à l'alinéa 2 de l'article 5/7 en projet, aux termes duquel « la procédure de concertation concernant l'applicabilité technique de l'instauration de centimes additionnels différenciés ou de diminutions, réductions ou augmentations d'impôt ou de crédits d'impôt, visés à l'article 5/1, § 1er, est fixée dans l'accord de coopération visé à l'article 1erbis ».
L'intervenant demande si la procédure de concertation est considérée comme inexistante si aucun accord de coopération n'a été signé à l'entrée en vigueur de la loi.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que l'accord de coopération date déjà du 7 décembre 2001.
Votes
L'amendement nº 7 de Mme Maes et de M. Broers est rejeté par 10 voix contre 4.
L'amendement nº 29 de M. Laeremans est rejeté par 10 voix contre 1 et 3 abstentions.
L'article 13 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 14
Mme Maes fait remarquer que l'article 5/8, en projet, prévoit que lorsque les régions souhaitent faire usage de leur autonomie fiscale dans le cadre de l'impôt des personnes physiques, les gouvernements de région doivent le communiquer préalablement au gouvernement fédéral et aux gouvernements des autres régions.
Cette disposition est très semblable à l'actuel article 9, § 1er, alinéa 1er, de la loi spéciale de financement et donc à l'article 13 du projet de loi spéciale. Mais quelle est la valeur ajoutée de cette communication en plus de l'obligation de demander l'avis du gouvernement fédéral et des gouvernements des autres régions ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, explique que cette procédure de communication a été prévue à l'article 14 du projet de loi spéciale afin que les divers gouvernements soient avisés de l'instauration « de centimes additionnels, de diminutions, réductions ou augmentations d'impôt ou de crédits d'impôt, visés à l'article 5/1, § 1er » (doc. Chambre, nº 53-2974/012, p. 14).
L'intervenant répète qu'il ne s'agit pas ici de mécanismes de blocage, mais de procédures d'information qui existent déjà.
M. Laeremans demande des précisions sur le mot « préalablement ». S'agit-il d'un délai court ou plus long ?
Vote
L'article 14 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 15
M. Laeremans fait remarquer qu'il est question à l'article 15 de l'impôt des personnes physiques fédéral, ce qui est un nouveau terme. Y a-t-il aussi un impôt des personnes physiques régional ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que la notion d'« impôt des personnes physiques régional » qui figure à l'article 5/1, § 1er, alinéa 2, proposé, repris dans l'article 7 de la proposition de loi spéciale, est défini comme suit: « Le total des centimes additionnels et des diminutions, réductions et augmentations d'impôt, le cas échéant après application de l'article 5/3, § 1er, 2º, constitue la taxe additionnelle régionale sur l'impôt des personnes physiques, ci-après « l'impôt des personnes physiques régional ». »
Vote
L'article 15 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 16
M. Laeremans demande ce qu'il faut entendre par « la population » pour l'application de cet article. Compte-t-on aussi les personnes inscrites au registre des étrangers et les demandeurs d'asile ? Qui fixe les chiffres ? L'Institut de statistique ou le SPF Intérieur ?
Le secrétaire d'État répond qu'il s'agit de toutes les personnes inscrites aux registres de la population, mais pas de celles inscrites au registre d'attente. Les nombres sont fixés par le SPF Finances, comme c'est déjà le cas actuellement.
Vote
L'article 16 est adopté par 10 voix contre 4.
Articles 17 à 29
Ces articles ne donnent lieu à aucune observation. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 4.
Article 30
Amendement nº 16 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 16 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) visant à remplacer l'alinéa 4 dans l'article 35octies, § 1er, proposé.
Mme Maes renvoie à la justification écrite de cet amendement.
Le secrétaire d'État ne peut pas marquer son accord sur cet amendement et renvoie à cet égard à l'exposé de M. Beke sur les efforts des différentes entités (voir supra).
M. Laeremans fait remarquer que les moyens supplémentaires sont octroyés à partir de l'exercice budgétaire 2015, alors que les compétences sont transférées dès juillet 2014. En effet, la loi spéciale à l'examen entrera en vigueur le 1er juillet 2014. Comment les compétences transférées seront-elles financées entre le 1er juillet 2014 et le 31 décembre 2014 ?
Le secrétaire d'État renvoie à l'article 77 qui prévoit que l'autorité fédérale prendra le financement à sa charge pendant cette période de six mois.
M. Laeremans demande aussi des explications supplémentaires sur les chiffres figurant à l'article 35octies, à savoir le montant de 625 887 632 euros, le montant de 5 millions d'euros et le pourcentage de 2,25 %. D'où proviennent ces chiffres ? Le chiffre de 5 millions d'euros aurait trait aux bátiments. Quelle est la ratio legis justifiant d'y associer un chiffre ? Le secrétaire d'État dispose-t-il d'un aperçu du Bureau du plan indiquant qu'il peut être réaliste de tabler sur une croissance de 2,25 % ? Les prévisions de croissance des prochaines années sont-elles à ce point favorables ? Selon l'intervenant, il s'agit plutôt d'un chiffre purement fictif étant donné que la croissance n'a pas été conforme à la réalité ces dernières années et qu'elle ne le sera pas davantage à l'avenir.
Le secrétaire d'État explique que le chiffre de 625 887 632 euros se rapporte à toutes les nouvelles compétences qui sont transférées, à savoir 46 millions pour la politique des grandes villes, les prestations pour les travailleurs indépendants et le Fonds starters, 3 millions pour l'agriculture et le Fonds des calamités, 25 millions pour le Fonds des calamités, le bien-être animal et les déchets, 14 millions pour le Bureau d'intervention et de restitution belge (BIRB), 8 millions pour le Fonds de réduction du coût global de l'énergie, 30 millions pour le personnel et le comité d'acquisition et 500 millions pour le transfert de l'Emploi.
Le chiffre de 5 millions d'euros pour les bátiments est un forfait parce que plusieurs litiges consécutifs aux précédentes réformes institutionnelles sont encore pendants. Pour éviter toute nouvelle contestation éventuelle, la majorité institutionnelle a opté pour un forfait.
Enfin, le pourcentage de 2,25 % qui a été retenu comme prévision de croissance résulte d'un accord politique. Mais au cours des cinq dernières années, la croissance n'a plus atteint ce niveau.
M. Beke renvoie aussi aux litiges du passé sur l'état des bátiments. C'est pourquoi l'on a opté à présent pour un budget limité, mais en échange, les intéressés doivent accepter l'état des bátiments. Le but est d'arriver à la transparence et à une pacification.
M. Laeremans demande si l'on règle en même temps des procédures pendantes ou si l'on se borne à éviter des nouvelles procédures. Les 5 millions seront-ils répartis au marc le franc entre les régions ?
Le secrétaire d'État répond par l'affirmative. La répartition entre les régions s'opérera selon un pourcentage prédéfini.
M. Laeremans renvoie ensuite à la clé de répartition de l'article 30: 50,33 % pour la Région flamande (ce qui est très peu), 41,37 % pour la Région wallonne (alors que ce chiffre devrait être de 34 à 35 %) et 8,3 % pour la Région de Bruxelles-Capitale. Sur quoi ces chiffres sont-ils basés ?
Au § 2 sont mentionnés les montants qui seront portés en déduction pour 2015, 2016, 2017, 2018 et 2019. Sur quoi ces réductions sont-elles basées ? Sont-elles cumulatives ? Pourquoi ne sont-elles prévues que jusque 2019 ?
Le secrétaire d'État explique que cette clé de répartition est en fait une moyenne pondérée de tous les pourcentages subsistants pour les diverses dotations résiduaires. Chacun peut refaire le calcul et l'on arrive au même résultat.
Lors de réformes antérieures, M. Laeremans a appris à se méfier des calculs du gouvernement fédéral, étant donné qu'ils aboutissaient toujours à un résultat défavorable à la Flandre. Ce n'est pas parce que le gouvernement présente un chiffre comme une moyenne pondérée qu'il en est effectivement ainsi. L'intervenant souhaite donc un calcul détaillé pour le rapport afin que chacun, y compris des mathématiciens, puisse vérifier les calculs.
M. Laaouej rappelle que les développements (p. 39) renvoient aux articles 35ter à 35septies mais aussi aux critères de l'utilisation. Les pourcentages se basent sur l'utilisation relative aux compétences transférées:
— le Fonds de participation à l'exception du transfert des fonds propres réglé par la proposition de loi spéciale relative à la sixième réforme de l'État (doc. Sénat, 5-2232/1);
— transfert de personnel lié notamment au transfert des Comités d'acquisition, et les subsides à la recherche en matière de bien-être animal;
— les calamités publiques;
— la politique des grandes villes;
— les calamités agricoles;
— le Fonds de réduction du coût global de l'énergie;
— le Bureau d'intervention et de restitution belge.
À partir de l'année budgétaire 2015, ces moyens sont répartis entre les régions selon la clé de répartition tenant compte des clés de répartition visées aux articles 35ter à 35septies inclus et de l'utilisation des moyens relatifs aux compétences énumérées ci-dessus: la Région flamande 50,33 %, la Région wallonne 41,37 % et la Région de Bruxelles-Capitale 8,30 %.
Cela lui semble dès lors une clé de répartition objective.
M. Laeremans souhaite savoir par ailleurs quel régime sera applicable à partir de l'année 2019. Ensuite, il demande si les réductions prévues dans cet article sont cumulatives ou s'il s'agit chaque fois de réductions par rapport au montant de base de 2015.
Le secrétaire d'État répond que c'est l'ensemble de l'encours que l'on doit vider jusqu'en 2020. Le niveau fédéral doit payer dans l'intervalle pour régler la fin de l'exécution de ses compétences.
À partir de 2020, les diminutions ne seront plus appliquées et sera payé le montant de 625 millions d'euro.
Les réductions prévues entre 2016 et 2019 serviront à permettre à l'autorité fédérale de respecter ses engagements.
Votes
L'amendement nº 16 de Mme Maes et de M. Broers est rejeté par 10 voix contre 4.
L'article 30 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 31
Amendements nos 17, 18 et 19 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent trois amendements à cet article (doc. Sénat, nº 5-2369/2).
L'amendement nº 17 propose de supprimer le 4° dans l'article 35nonies, § 1er, alinéa 2, proposé parce que cela représente une réduction trop forte des moyens transférés aux communautés et aux régions.
L'amendement nº 18 propose de supprimer la diminution de 831 millions d'euros prévue au § 1er de l'article 35nonies, § 1er, alinéa 3, proposé, parce que cela représente également une réduction trop importante des moyens à transférer.
L'amendement nº 19 vise à porter à 100 % les pourcentages de répartition des moyens sur la base de la croissance réelle afin que la croissance réelle soit transférée intégralement aux régions et aux communautés.
M. Laeremans voudrait savoir sur la base de quels paramètres objectifs les pourcentages, chaque fois différents, ont été définis pour déterminer la réduction de la croissance réelle à transférer aux communautés et aux régions. Il s'interroge aussi sur les conséquences en cas de croissance économique négative.
Le secrétaire d'État répond que 90 % des moyens sont transférés, les 10 % restant vont à ce qu'on appelle le socle. Pour le surplus, les moyens transférés sont soumis à plusieurs pourcentages différents parce qu'il s'agit chaque fois d'éléments différents. L'on part toujours du principe que personne ne peut y perdre. Il s'agit de mécanismes sur lesquels un accord a été atteint au sein de la majorité et qui tiennent compte de la viabilité des différentes entités.
Si la croissance économique est négative, cela aura naturellement aussi des conséquences négatives pour les moyens qui sont transférés aux communautés et aux régions. C'est la conséquence de la responsabilisation.
Votes
Les amendements nos 17, 18 et 19 de Mme Maes et M. Broers sont successivement rejetés par 10 voix contre 4.
L'article 31 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 32
Mme Maes pose plusieurs questions à propos de cet article.
Le secrétaire d'État peut-il donner une ventilation du montant de référence provisoire de 2 984 683 730 euros par réduction d'impôt transférée de manière exclusive (bonus logement, épargne logement, protection contre le cambriolage et l'incendie, restauration de monuments et sites classés, chèques ALE et titres-services, dépenses faites en vue d'économiser l'énergie ventilées par catégorie d'investissement (isolation de toiture, construction de maisons basse énergie), rénovation d'habitations dans une zone d'action positive des grandes villes, et rénovation d'habitations louées à des agences immobilières sociales) ? Elle voudrait également savoir si ce montant porte uniquement sur les réductions d'impôt à l'impôt des personnes physiques ou s'il s'applique aussi à l'impôt des non-résidents. Dans l'affirmative, les montants précités peuvent être ventilés entre les deux impôts sur le revenu.
Le secrétaire d'État répond que ce montant contient tous les éléments existants qui sont utilisés à l'heure actuelle au niveau fédéral.
Mme Maes demande par ailleurs de quels éléments on a tenu compte pour l'extrapolation de l'exercice d'imposition 2011 à l'exercice budgétaire 2014 (taux de croissance, disparition de certaines réductions d'impôt, modifications consécutives à la jurisprudence de la Cour constitutionnelle). Pourquoi le montant de l'exercice budgétaire 2015 n'a-t-il pas été extrapolé à l'exercice d'imposition 2015 ?
Le secrétaire d'État répond que l'on est parti des montants de 2011 et qu'on les a extrapolés en tenant compte de toutes les informations dont on disposait pour arriver au meilleur calcul. Le montant de l'exercice budgétaire 2015 n'a pas été utilisé parce qu'il ne connaît pas ce montant. Il ne peut partir que des derniers chiffres connus.
Amendement nº 8 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 8 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) visant à faire évoluer la dotation en tenant compte de 90 % de la croissance réelle du produit intérieur brut, afin de ne pas porter atteinte à la constitution du quatrième pilier des pensions.
Mme Maes renvoie à la justification écrite de l'amendement.
M. Laeremans constate que cet article prévoit une dotation de 60 % des dépenses fiscales relatives aux réductions d'impôt pour lesquelles les régions deviennent compétentes à titre exclusif. Les 40 % restants sont transférés par le biais de l'autonomie fiscale en matière d'impôt des personnes physiques. Cette distinction peut-elle être expliquée ? Pourquoi une proportion de 60-40 ?
M. Wathelet, secrétaire d'État, répond que cela a été décidé ainsi dans l'accord de gouvernement.
Votes
L'amendement nº 8 de Mme Maes et de M. Broers est rejeté par 10 voix contre 4.
L'article 32 est adopté par 10 voix contre 4.
Articles 33 à 36
Ces articles ne donnent lieu à aucune observation. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 4.
Article 37
M. Laeremans demande des précisions sur l'arrêt rétroactif du turbo Lambermont, à partir de 2010. Pourquoi cet arrêt n'intervient-il pas à partir de 2013 ou 2015 ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, rappelle que la ratio legis de cette disposition a déjà été explicitée précédemment. Il est essentiel de voir les dispositions dans leur ensemble et non individuellement. L'arrêt du turbo Lambermont est compensé par les diverses enveloppes en matière de marché de l'emploi et d'autonomie fiscale. Il fait partie de l'accord de gouvernement.
M. Beke rappelle que le principe de non-appauvrissement ne doit pas être considéré mesure par mesure, mais globalement.
M. Laeremans souhaite connaître l'impact financier concret de cet arrêt rétroactif à partir de 2010. Combien cela coûte-t-il à la Flandre ? Qui y trouve avantage ?
M. Laaouej constate que, dans le débat sur les prétendus perdants et gagnants, on tend à oublier que l'État fédéral perd aussi une partie de son élasticité dès lors qu'une partie de l'impôt des personnes physiques est transférée vers les régions. Or, cette élasticité permettait à l'État fédéral d'avoir un boni budgétaire qui contribuait à financer le coût du vieillissement. L'État fédéral perd donc également une partie de ses recettes dans cette opération.
C'est à la lumière de ce constat qu'il faut analyser la fin du turbo Lambermont, lequel est par ailleurs largement compensé par le fait que les dotations emploi se font sur base d'une clé fiscale.
Il insiste donc également sur le fait qu'il ne faut pas saucissonner la nouvelle loi de financement mais bien l'analyser dans son ensemble.
M. Laeremans comprend ce point de vue, mais souhaite avoir une idée des conséquences financières de l'arrêt rétroactif du turbo Lambermont. Pourquoi précisément la date de 2010, alors que cette mesure est justement au détriment de la Flandre ?
M. Beke déclare que la nouvelle loi de financement a l'ambition de faire régner une plus grande transparence. Cela signifie concrètement que pour les dépenses des régions, on travaille davantage sur les clés fiscales, tandis que pour les dépenses des communautés, on a opté pour des clés en fonction des besoins. C'est pourquoi le législateur souhaite supprimer le terme négatif.
L'on peut certes analyser chaque compartiment de la loi de financement séparément et se demander pour chacun d'eux ce que cela rapporte à la Flandre. Mais c'est une approche erronée de la réforme à l'examen.
Il insiste une nouvelle fois pour que l'on tienne compte de la résultante globale de la nouvelle loi de financement et pas uniquement de ses composantes.
M. Laeremans ne partage pas ce point de vue. Il peut difficilement croire que les services du ministre n'ont pas de simulations sur le coût de cet arrêt rétroactif. M. Anciaux a fourni une simulation claire de ses services d'études concernant l'impact des contributions d'assainissement et de vieillissement des entités fédérées.
Malgré ses demandes répétées, M. Laeremans n'a toujours reçu aucun chiffre sur l'impact de l'arrêt rétroactif du turbo Lambermont. Pourquoi la majorité fait-elle preuve d'une telle réticence ? La rétroactivité a-t-elle été prévue pour que les comptes tombent juste ?
M. Beke répond qu'il est évident que l'on veut faire en sorte que les comptes tombent juste. L'arrêt rétroactif a donc été décidé sur la base du principe de non-appauvrissement des entités fédérées par les opérations d'assainissement, conformément à la philosophie du Groupe de haut niveau.
Vote
L'article 37 est adopté par 10 voix contre 4.
Article 38
Amendement nº 20 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 20 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) visant à supprimer le 3° dans l'article 40quinquies, alinéa 1er, proposé.
Mme Maes renvoie à la justification écrite de l'amendement.
M. Laeremans demande quels sont les chiffres qui sont utilisés aujourd'hui pour la clé de répartition communautaire en matière d'enseignement.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, répond que cette clé se chiffre pour 2013 à 56,48 % pour la Communauté flamande et à 43, 52 % pour la Communauté française.
Votes
L'amendement nº 20 de Mme Maes et de M. Broers est rejeté par 10 voix contre 4.
L'article 38 est adopté par 10 voix contre 4.
Articles 39 à 42
Ces articles ne donnent lieu à aucune observation. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 4.
Article 43
Amendements nos 21, 22, 23 et 24 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 21 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) visant à supprimer, dans l'article 47/2, § 1er, alinéa 2, proposé, le 3° où il est question d'un « montant négatif égal à 356 292 000 euros ».
L'intervenante renvoie à la justification écrite de l'amendement.
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 22 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à compléter l'article 47/2, § 1er, proposé, par un point 4° rédigé comme suit:
« 4° du montant obtenu pour l'année budgétaire 2015, en application de l'article 47/3, pour la Communauté flamande et la Communauté française réunies; ».
L'intervenante renvoie à la justification écrite de l'amendement.
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 23 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), qui vise à remplacer, dans l'article 47/2, § 2, proposé, l'alinéa 2 par ce qui suit:
« Le montant de base obtenu en application de l'alinéa 1er est, à compter de l'année budgétaire 2017, adapté annuellement au taux de fluctuation de l'indice moyen des prix à la consommation et à 91 % de la croissance réelle du produit intérieur brut de l'année budgétaire concernée suivant les modalités fixées à l'article 33, § 2, puis multiplié par le rapport entre le facteur d'adaptation visé à l'article 38, § 4, pour l'année budgétaire concernée et le facteur d'adaptation visé à l'article 38, § 4, pour l'année budgétaire précédente. »
L'intervenante renvoie à la justification écrite de l'amendement.
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 24 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), qui vise à remplacer, dans l'article 47/2, § 2, proposé, l'alinéa 1er par ce qui suit:
« Pour l'année budgétaire 2016, le montant attribué pour l'année budgétaire 2015 est d'abord adapté au taux de fluctuation de l'indice moyen des prix à la consommation et à un pourcentage de la croissance réelle du produit intérieur brut de l'année budgétaire concernée, suivant les modalités définies à l'article 33, § 2. Ce pourcentage est égal au pourcentage déterminé conformément à l'article 35nonies, § 1er, alinéa 5. »
L'intervenante renvoie à la justification écrite de l'amendement.
M. Laeremans renvoie au § 3 de cet article. Il est question de cinq décimales. Pourquoi ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, explique que c'est une norme comme une autre pour obtenir un degré de précision suffisant, sans exagérer.
M. Laeremans se demande si la région de langue française visée au § 4, 2°, désigne la Wallonie sans la région de langue allemande.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, confirme que tel est bien le cas.
Votes
Les amendements nº 21, 22, 23 et 24 de Mme Maes et M. Broers sont successivement rejetés par 10 voix contre 5.
L'article 43 est adopté par 10 voix contre 5.
Articles 44 à 47
Ces articles ne donnent lieu à aucune observation. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 5.
Article 48
M. Laeremans renvoie au taux de participation des jeunes ágés de dix-neuf à vingt-quatre ans, dont il est question dans cet article. Dispose-t-on de chiffres concernant ce taux de participation ?
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, donne l'aperçu suivant:
population de 0 à 18 ans — bevolking 0 tot en met 18-jarigen | population de 19 à 24 ans — bevolking 19 tot en met 24-jarigen | |||||
1/jan | 2011 | 2012 | 2013 (a) — 2013 (a) | 2011 | 2012 | 2013 (a) — 2013 (a) |
Région bilingue de Bruxelles-Capitale — Tweetalig gebied Brussel-Hoofdstad | 260 934 | 267 390 | 272 698 | 89 064 | 90 046 | 90 510 |
Région de lange néerlandaise — Nederlandse taalgebied | 1 307 729 | 1 311 489 | 1 313 897 | 449 480 | 456 379 | 459 918 |
Région de langue française — Franse taalgebied | 779 817 | 780 584 | 782 225 | 270 089 | 272 500 | 272 669 |
Région de langue allemande — Duitse taalgebied | 16 311 | 16 234 | 16 054 | 5 801 | 5 943 | 5 958 |
Total — Totaal | 2 364 791 | 2 375 697 | 2 384 874 | 814 434 | 824 868 | 829 055 |
La population totale et sa répartition régionale au 1/1/2013. — De totale bevolking en haar regionale opdeling op 1/1/2013. Source: Chiffres de population SPF Économie — Bron: Bevolkingscijfers FOD Economie |
Vote
L'article 48 est adopté par 10 voix contre 5.
Article 49
Cet article ne donne lieu à aucune observation. Il est adopté par 10 voix contre 5.
Article 50
M. Laeremans se réfère aux montants de 472 033 613 euros pour la Communauté flamande, de 257 732 297 euros pour la Communauté française et de 128 644 410 euros pour la Commission communautaire commune. Comment ces montants ont-ils été fixés ?
Ces moyens sont diminués d'un montant prélevé pour les services spécialisés isolés de revalidation et de traitement, existants au 1er janvier 2013, mais qui ne constituent plus de tels services à la date du 1er janvier 2015. L'intervenant ne comprend pas bien ce qu'il y a lieu d'entendre par là et demande des explications supplémentaires.
Le secrétaire d'État répond que l'article 47/8, alinéa 2, proposé, vise des services qui auront disparu à la date du 1er janvier 2015, par exemple en raison d'une fusion entre différents hôpitaux, à la suite de laquelle ces services restent fédéraux. Il a semblé opportun d'inscrire une disposition réglant les conséquences financières dans l'hypothèse où des services ne sont pas transférés aux communautés.
M. Laeremans demande si l'on sait évaluer le nombre d'établissements qui seront visés par cette disposition.
Le secrétaire d'État répond qu'à l'occasion du transfert de compétences, une série de services isolés devront choisir s'ils fusionnent avec des hôpitaux et restent ainsi au niveau fédéral. Dans ce cas, les montants qui leur sont alloués seront déduits de la dotation accordée aux communautés ou à la Commission communautaire commune. À ce jour, il est impossible de savoir combien de services seront concernés par cette mesure.
Vote
L'article 50 est adopté par 10 voix contre 5.
Articles 51 et 52
Ces articles ne donnent lieu à aucune observation. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 5.
Article 53
M. Laeremans lit dans le commentaire que cet article règle la dotation qui est accordée annuellement à la Communauté flamande et à la Communauté française, à partir de l'année budgétaire 2018 à l'issue de la phase VII des moyens liés aux pôles d'attraction interuniversitaires. L'intervenant demande un complément d'explications à ce sujet.
M. Wathelet, secrétaire d'État aux Réformes institutionnelles, explique que la septième phase porte sur un projet existant qui figure déjà dans l'actuelle loi de financement. Il s'agit de programmes de coopération interuniversitaire visant à organiser certaines recherches conjointement.
Vote
L'article 53 est adopté par 10 voix contre 5.
Article 54
Cet article ne donne lieu à aucune observation. Il est adopté par 10 voix contre 5.
Article 55
Amendements nos 25 et 26 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 25 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) visant à supprimer le 2° dans l'article 48, § 4, alinéa 2, proposé.
L'intervenante renvoie à la justification écrite de l'amendement.
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 26 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) visant à remplacer, dans l'article 48, § 4, proposé, les alinéas 2 et 3 par ce qui suit:
« Pour l'année budgétaire 2016, le montant de base visé à l'alinéa 1er est d'abord adapté au taux de fluctuation de l'indice moyen des prix à la consommation de l'année budgétaire concernée et à la croissance réelle du produit intérieur brut de l'année budgétaire concernée suivant les modalités définies à l'article 35octies.
À partir de l'année budgétaire 2017, le montant de l'année budgétaire précédente est adapté annuellement au taux de fluctuation de l'indice moyen des prix à la consommation de l'année budgétaire concernée et à la croissance réelle du produit intérieur brut de l'année budgétaire concernée suivant les modalités définies à l'article 35octies. »
L'intervenante renvoie à la justification écrite de l'amendement.
Votes
Les amendements nos 25 et 26 de Mme Maes et M. Broers sont successivement rejetés par 10 voix contre 5.
L'article 55 est adopté par 10 voix contre 5.
Articles 56 à 59
Ces articles ne donnent lieu à aucune observation. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 5.
Article 60
Mme Maes relève que ni la loi spéciale de financement actuelle ni le texte à l'examen ne prévoient l'autonomie fiscale des régions pour les non-résidents. L'intervenante rappelle que la Cour de Justice a condamné la Belgique à plusieurs reprises en matière fiscale car les régions, en raison de compétences fiscales incomplètes, étaient dans l'impossibilité d'allouer les mêmes avantages fiscaux aux non-Belges. Cela a contraint la Flandre à limiter son autonomie fiscale en matière d'impôt des personnes physiques.
Le projet à l'examen confirme le principe selon lequel l'État fédéral reste exclusivement compétent pour le régime fiscal des non-résidents. Si les régions décident d'appliquer des centimes additionnels, des diminutions, des réductions et augmentations d'impôts et des crédits d'impôts vis-à-vis de non-résidents, elles en supporteront la charge.
Le même principe s'appliquera aux réductions d'impôts qui seront transférées de manière exclusive aux régions. Mme Maes demande quel est le montant des réductions d'impôts qui sont consenties dans le cadre de l'impôt des non-résidents pour des dépenses pour la sécurisation contre le vol ou l'incendie d'une habitation, pour des dépenses effectuées pour des prestations payées avec des titres-services ou pour des travaux d'isolation du toit d'une habitation.
Mme Maes demande enfin pour quelles raisons la notion de « domicile fiscal » est définie dans la loi spéciale et pas dans une loi ordinaire.
M. Laaouej ne partage pas l'analyse de la préopinante lorsqu'elle estime que la Flandre a dû réduire son autonomie fiscale en raison de la jurisprudence de la Cour de Justice.
L'intervenant précise que la Commission européenne a estimé que la « Vlaamse jobkorting » était discriminatoire parce qu'exclusivement applicable aux résidents flamands. Les résidents d'un autre État membre de l'Union européenne qui travaillaient en Flandre et y percevaient un revenu, n'y avaient en effet pas droit. La Commission estimait que la mesure était contraire à la libre circulation des travailleurs et à la liberté d'établissement.
La Région flamande avait la possibilité de supprimer la « jobkorting » ou de l'élargir aux non-résidents. Pour des raisons budgétaires, le gouvernement flamand a choisi la première solution. On ne peut cependant pas en conclure que l'Europe a contraint la Flandre à réduire son autonomie fiscale.
Le secrétaire d'État précise que c'est la même logique qui prévaut au niveau de la nouvelle loi spéciale de financement: lorsqu'un non-résident « purement » fédéral bénéficiera de réductions d'impôts « purement » régionales — qui doivent également s'appliquer aux non-résidents pour éviter toute discrimination —, ces montants seront imputés à la Région qui aura accordé la réduction fiscale.
Mme Maes pense que la Flandre a été contrainte de réduire ses compétences fiscales car elle était exclusivement compétente sur la base du critère de résidence mais qu'elle n'avait pas de compétence sur la base du critère du lieu de travail. La Flandre n'aurait dès lors pas pu étendre la « jobkorting » à des personnes travaillant en Flandre mais qui n'y étaient pas domiciliées fiscalement.
M. Laaouej fait remarquer que le travailleur hollandais qui travaille en Flandre tout en résidant aux Pays-Bas reçoit une fiche de paie « belge ». C'est à partir de la Belgique qu'il aurait été possible de lui accorder la « jobkorting » sous une forme à déterminer par un décret flamand.
Mme Maes fait remarquer que la loi de financement actuelle lie la compétence fiscale au lieu de résidence. La Flandre ne peut dès lors pas régler la situation fiscale de personnes qui y travaillent mais n'y résident pas.
Le secrétaire d'État précise que l'article 54/2, proposé, vise les non-résidents. Ces personnes dépendront du système fiscal belge mais devront pouvoir bénéficier des différentes réductions d'impôts régionales pour ne pas être discriminées par rapport à un résident régional. Si on ne prévoit pas le mécanisme proposé, la Belgique risque une nouvelle condamnation au niveau européen.
M. Laeremans renvoie au § 2, proposé, qui prévoit que le service public fédéral Finances envoie aux régions un aperçu mensuel. Pour quelles raisons cette communication doit-elle se faire sur une base mensuelle ?
Le secrétaire d'État répond que cela correspond à la pratique actuelle. Le projet ne change rien sur ce point.
Amendement nº 9 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à supprimer, dans l'article 54/2 proposé, les paragraphes 3 et 4.
Mme Maes renvoie à la justification écrite de son amendement.
Le secrétaire d'État déduit de la justification que les auteurs de l'amendement ne veulent pas que les régions assument les conséquences financières des réductions fiscales qu'elles décident d'octroyer en application de l'autonomie fiscale qui leur est transférée. L'intervenant ne peut s'inscrire dans une telle logique qui aboutit à une déresponsabilisation fiscale.
Mme Maes réplique que les auteurs de l'amendement ne veulent pas que les régions paient l'addition pour des non-résidents à l'égard desquels elles ne sont pas compétentes.
Le secrétaire d'État admet que les non-résidents restent soumis au régime fiscal fédéral. Cependant, le pouvoir fédéral doit octroyer les réductions d'impôts sur la base des décrets régionaux. Ce n'est dès lors pas le niveau fédéral qui détermine le montant de ces réductions.
Mme Maes précise que le niveau fédéral supporte déjà ces coûts à l'heure actuelle.
Votes
L'amendement nº 9 de Mme Maes et M. Broers est rejeté par 10 voix contre 5.
L'article 60 est adopté par 10 voix contre 5.
Articles 61 à 63
Ces articles ne soulèvent pas d'observations. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 5.
Article 63/1 (nouveau)
Amendement nº 30 de M. Laeremans
M. Laeremans dépose l'amendement nº 30 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à insérer un article 63/1 dans le projet de loi spéciale. L'auteur propose d'abroger l'article 64bis de la loi spéciale qui assure un refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale. M. Laeremans estime que les institutions bruxelloises ne sont pas sous-financées. Elles devraient simplement utiliser de manière plus efficace les moyens qui sont mis à leur disposition.
Vote
L'amendement nº 30 de M. Laeremans est rejeté par 10 voix contre 1 et 4 abstentions.
Article 63/2 (nouveau)
Amendement nº 31 de M. Laeremans
M. Laeremans dépose l'amendement nº 31 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à insérer un article 63/2 dans le projet de loi spéciale. L'auteur propose d'abroger l'article 64ter de la loi spéciale qui assure un refinancement de la Région de Bruxelles-Capitale.
Vote
L'amendement nº 31 de M. Laeremans est rejeté par 10 voix contre 1 et 4 abstentions.
Article 64
Amendement nº 32 de M. Laeremans
M. Laeremans dépose l'amendement nº 32 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à supprimer l'article.
L'intervenant souligne que l'article 64quater, proposé, de la loi spéciale du 16 janvier 1989 octroie des moyens supplémentaires à la Région de Bruxelles-Capitale pour compenser les pertes de revenus consécutives au flux de navetteurs. M. Laeremans doute de l'opportunité de cette énième compensation financière au profit de Bruxelles et dont la Flandre supportera la plus grande part.
M. Laeremans constate que le montant des moyens financiers passe de 32 millions d'euros en 2014 à 48 millions en 2015 et 49 millions en 2016. À partir de 2017, ce montant s'élève à 44 millions d'euros. L'intervenant demande si le montant de la « compensation navetteurs » ne variera plus au-delà de 2017. Des adaptations sont-elles encore possibles ? Selon quels paramètres ? L'intervenant pense par exemple à l'hypothèse dans laquelle le nombre de navetteurs augmenterait fortement.
Le secrétaire d'État répond que le montant de 44 millions d'euros prévu à partir de 2017 est fixe.
Votes
L'amendement nº 32 de M. Laeremans est rejeté par 10 voix contre 1 et 4 abstentions.
L'article 64 est adopté par 10 voix contre 5.
Article 65
Amendement nº 33 de M. Laeremans
M. Laeremans dépose l'amendement nº 33 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à supprimer l'article 65.
L'intervenant souligne que l'article 64quinquies, proposé, octroie des moyens supplémentaires à la Région de Bruxelles-Capitale pour compenser la perte de revenus en raison de la présence de fonctionnaires internationaux. L'intervenant ne comprend pas pourquoi les autres régions ne bénéficient pas de compensations comparables alors que des fonctionnaires internationaux y résident également. Le régime de compensation financière proposé est discriminatoire et doit dès lors être supprimé.
Votes
L'amendement nº 33 de M. Laeremans est rejeté par 10 voix contre 1 et 4 abstentions.
L'article 65 est adopté par 10 voix contre 5.
Article 66
Amendement nº 27 de Mme Maes et M. Broers
Mme Maes et M. Broers déposent l'amendement nº 27 (doc. Sénat, nº 5-2369/2) qui vise à remplacer, au 5°, les premiers et deuxièmes alinéas de l'article 65, § 6 proposé.
Les auteurs renvoient à leurs amendements antérieurs.
Votes
L'amendement nº 27 de Mme Maes et M. Broers est rejeté par 10 voix contre 5.
L'article 66 est adopté par 10 voix contre 5.
Article 67
Cet article ne soulève pas d'observations. Il est adopté par 10 voix contre 5.
Article 68
M. Vandaele relève que l'article 65quater, proposé, instaure un mécanisme de responsabilisation en matière de politique climatique qui doit être lu en parallèle avec le projet de loi relative au mécanisme de responsabilisation climat (doc. Sénat, nº 5-2370/1).
Les régions se voient assigner des objectifs annuels de réduction des émissions de gaz à effet de serre dans les bátiments des secteurs résidentiels et tertiaire. La région qui atteint son objectif reçoit un bonus alors que celle qui reste en deçà de ses objectifs perd une partie des recettes tirées de la mise aux enchères des quotas d'émission de gaz à effet de serre.
L'intervenant pense que le législateur spécial, en mettant en place ce mécanisme, s'immisce dans des matières relevant des compétences des régions. Si la Commission nationale climat ne parvient pas à s'accorder sur une proposition de répartition des réductions des gaz à effet de serre dans les bátiments des secteurs résidentiels et tertiaires, c'est la trajectoire fixée dans l'annexe à la loi spéciale qui s'imposera aux régions jusqu'en 2030.
M. Vandaele trouve que ce mécanisme va à l'encontre du système fédéral belge où les autorités fédérale et régionales sont sur pied d'égalité. Or, la disposition à l'examen permet au législateur spécial d'imposer des obligations aux régions, sans concertation préalable, dans le cadre des compétences qui leur sont propres. C'est d'autant plus évident que l'autorité fédérale revendique une part des recettes de la mise aux enchères des quotas d'émission de gaz à effet de serre, moyens qui, d'après l'intervenant, devraient revenir intégralement aux régions. Or, l'Union européenne souhaite rehausser le prix des quotas d'émission. Le mécanisme de responsabilisation revient donc en pratique à un transfert déguisé de moyens financiers dont la Flandre serait la victime.
En ce qui concerne le fonds fédéral budgétaire nouvellement créé, il y lieu de faire observer que le bonus versé aux régions est limité à la part fédérale des recettes de mise aux enchères des quotas d'émission alors que le malus est comparativement à peine limité et qu'il peut aller jusqu'à 50 % de la part régionale de ces recettes.
Enfin, le législateur peut, par une simple loi, vider de sa substance le présent projet de loi spéciale dans la mesure où il peut, entre autres, modifier les objectifs fixés si des normes européennes ou internationales imposent une autre trajectoire.
L'orateur se réfère aux observations faites par le Conseil d'État sur cette partie du texte ainsi que sur le projet de loi qui sera examiné ultérieurement. Il fait observer que sur certains points, il en a été tenu compte lors de l'adoption du présent texte à la Chambre mais que pour d'autres points cela n'a pas été le cas.
L'intervenant fait par ailleurs observer que l'article 65quater, § 9, proposé concerne des montants provisoires et se demande ce qu'il en est des contributions financières définitives à verser aux régions. Cet aspect des choses n'a, à son sens, pas été précisé dans le texte.
D'une manière générale, il estime qu'une concertation s'impose, en tout état de cause, avec le gouvernement des régions avant l'adoption de chaque arrêté royal pris dans le cadre de ce mécanisme de responsabilisation et pas seulement lorsqu'on se trouve en situation de conflit.
Le secrétaire d'État renvoie au rapport de la Chambre des représentants (doc. Chambre, 53-2974/007) et plus particulièrement aux pages 92-96 de ce document où se trouvent consignées les réponses données à toutes les observations du Conseil d'État.
Vote
L'article 68 est adopté par 10 voix contre 5.
Article 69
Cet article ne soulève pas d'observations. Ils est adopté par 10 voix contre 5.
Article 70
M. Laeremans entend mettre en exergue l'énormité du montant prévu dans cet article. Il se demande si un tel montant peut être justifié.
Le secrétaire d'État répond que ce montant est effectivement assez élevé parce que le mécanisme en place est relativement éclaté. Il y a, en effet, plusieurs caisses d'allocations familiales. La SNCB a, par exemple, une caisse d'allocation familiale spécifique pour le paiement des allocations aux travailleurs qu'elle emploie. Si actuellement le critère d'application en la matière est la situation professionnelle de l'un des deux parents de l'enfant, la résidence de l'enfant déterminera à l'avenir de quelle communauté il va dépendre dans le cadre d'un mécanisme de paiement des allocations familiales.
M. Laeremans s'interroge néanmoins sur la destination de ce montant d'approximativement 215 millions d'euros ce qui, d'après ses calculs, pourrait concerner la rémunération de quatre mille cinq cents fonctionnaires si l'on se base sur un montant de 50 000 euros par fonctionnaire.
Le secrétaire d'État fait observer, sur ce point, qu'il ne s'agit pas seulement de frais de personnel, mais plutôt de frais de fonctionnement au sens large, lesquels englobent entre autres, les bátiments, le matériel informatique, le courrier, etc.
Vote
L'article 70 est adopté par 10 voix contre 5.
Articles 71 à 77
Ces articles ne soulèvent pas d'observations. Ils sont adoptés successivement par 10 voix contre 5.
Article 78
Amendement nº 34 de M. Laeremans
M. Laeremans dépose l'amendement nº 34 (doc. Sénat, nº 5-2369/2), qui vise à supprimer la dotation annuelle forfaitaire de 24 millions d'euros que le présent projet de loi spéciale entend accorder rétroactivement à la Région de Bruxelles-Capitale pour les années 2012 et 2013, somme qui n'est en aucun cas justifiée.
Le secrétaire d'État fait remarquer que l'amendement a le mérite de la cohérence dans la mesure où il se situe dans la ligne des amendements nos 31 à 33 qui visent également à réduire les moyens octroyés à la Région bruxelloise.
M. Laeremans estime que la Région bruxelloise est privilégiée par le présent projet de loi spéciale. Il partage d'ailleurs ce point de vue avec un certain nombre d'académiciens qui ont mis en évidence cet aspect.
Votes
L'amendement nº 34 de M. Laeremans est rejeté par 10 voix contre 1 et 4 abstentions.
L'article 78 est adopté par 10 voix contre 5.
Articles 79 à 82
Ces articles ne soulèvent pas d'observations. Ils sontadoptés successivement par 10 voix contre 5.
VI. VOTE SUR L'ENSEMBLE ET DÉCLARATION DE VOTE
1. Déclaration de vote
M. Laeremans déclare que du côté flamand, et même au sein du gouvernement flamand, on commence à se rendre compte des conséquences dramatiques des règles de financement proposées et de la contribution d'assainissement. D'après les calculs du ministre flamand du Budget, la Flandre devrait économiser sur une législature la somme astronomique de 7,8 milliards d'euros. D'aucuns le nient, mais c'est comme nier la lumière du soleil. Sans cette opération, la Flandre disposerait d'un budget supplémentaire de près de 8 milliards d'euros pour mener ses propres politiques. Il faudra à présent économiser sur tous les postes de dépenses. La Flandre porte ainsi la charge de la mauvaise gestion, car non prospective, de l'autorité fédérale qui reporte, par le projet de loi spéciale à l'examen, une partie de sa dette énorme sur la Flandre qui a vécu selon ses moyens et a fait preuve de diligence en matière de politique financière. La Flandre est donc la principale victime de ce projet. Les prochaines élections montreront que l'incapacité du gouvernement flamand de Kris Peeters à mener une politique est fortement liée à la non-gestion du gouvernement fédéral Di Rupo.
2. Vote sur l'ensemble
L'ensemble du projet de loi spéciale est adopté par 10 voix contre 5.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 10 membres présents.
Les rapporteurs, | La présidente, |
Bert ANCIAUX. Ahmed LAAOUEJ. | Sabine de BETHUNE. |
Le texte adopté par la commission est identique au texte du projet de loi spéciale transmis par la Chambre des représentants (voir le doc. Chambre, nº 53-2974/12).
(1) Cette proposition a été déclarée sans objet à la Chambre des représentants (voir doc. Chambre, n° 53-2969/3, p. 7).
(2) Pour les autres propositions (clusters 2, 3 et 4), il est renvoyé aux rapports n° 5-2370/3, 5-2372/3 et 5-2374/3.
(3) Or, il faut savoir que les fonctionnaires internationaux qui résident en Flandre ou en Wallonie ne paient pas non plus, évidemment, l'impôt belge des personnes physiques et que la Flandre ne reçoit nulle compensation pour cela sous la forme d'une contribution de solidarité ou sous une autre forme (contrairement à la Wallonie).
(4) J. Velaers, De grondwet en de Raad van State Afdeling Wetgeving, Anvers, Maklu, 1999, p. 231-232.
(5) Article 4, paragraphe 3, du TUE. « En vertu du principe de coopération loyale, l'Union et les États membres se respectent et s'assistent mutuellement dans l'accomplissement des missions découlant des traités. Les États membres prennent toute mesure générale ou particulière propre à assurer l'exécution des obligations découlant des traités ou résultant des actes des institutions de l'Union. Les États membres facilitent l'accomplissement par l'Union de sa mission et s'abstiennent de toute mesure susceptible de mettre en péril la réalisation des objectifs de l'Union. »
(6) Il résulte d'une jurisprudence constante de la Cour de justice qu'une autorité d'un État membre ne saurait exciper de dispositions, pratiques ou situations de son ordre juridique interne, y compris celles découlant de l'organisation constitutionnelle de cet État, pour justifier l'inobservation des obligations résultant du droit communautaire. Voir: Cour de justice de l'Union européenne, arrêt du 1er avril 2008, dans l'affaire C-212/06, gouvernement de la Communauté française et Gouvernement wallon contre gouvernement flamand, point 58; arrêt du 10 juin 2004, dans l'affaire C-87/02, Commission/Italie, point 38; arrêt du 26 octobre 2006 dans l'affaire C-102/06, Commission/Autriche, point 9.
(7) Cour de justice, arrêt du 1er décembre 2011 dans l'affaire C-250/08, Commission européenne contre Belgique, Fiscologue 2011, n° 1275, 11-12.
(8) L'article 4 du Nouveau Traité Benelux dispose que les droits et obligations découlant des parties 1re et 3 du Traité de 1958 s'appliquent sans restriction, sauf s'il en est disposé autrement dans ce Traité. La partie 1re « Principes » du Traité de 1958 comprend les articles 1er à 14. Les libertés figurent à l'article 2.
(9) L'actuelle loi spéciale de financement définit de manière très précise le critère de localisation en matière de droits de successions, c'est-à-dire: — à l'endroit où le défunt avait son domicile fiscal au moment de son décès; — si le défunt a eu son domicile fiscal dans plus d'un endroit en Belgique au cours de la période de cinq ans précédant son décès: à l'endroit de la Belgique où son domicile fiscal a été établi le plus longtemps pendant ladite période; — les droits de mutation par décès des non-habitants du Royaume: dans la région où les biens sont situés; s'ils sont situés dans plusieurs régions, dans la région à laquelle appartient le bureau de perception dans le ressort duquel se trouve la partie des biens qui présente le revenu cadastral fédéral le plus élevé.
(10) Van Dyck, J., « Beurtelings » ten laste van niet meer samenwonende pa en ma », Fiscoloog 2007, n° 1081, (6) 8.
(11) Question orale n° 10 574 de Mme Veerle Wouters, 24 avril 2012, Compte rendu intégral, Chambre, 2011-12, n° CRIV 53 COM 461, 22; Bull. Questions & Réponses, Chambre, 2012-13, n° 53-107, 208 (anciennement n° 119, Veerle Wouters, 7 mars 2013).
(12) Article 313, CIR 92 (exercice d'imposition 2014).
(13) I. Albers, « Een eigen huis », De Tijd, 17 septembre 2013.
(14) Pour un isolé à partir du 1er avril 2013. http://www.fao.fgov.be/site_fr/professionnel/remuneration/rmmmg/rmmmg.html.
(15) Y compris 7,5 % de taxe communale additionnelle.