5-29COM

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Commission des Relations extérieures et de la Défense

Annales

MARDI 1er FÉVRIER 2011 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Demande d'explications de Mme Vanessa Matz au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et des Réformes institutionnelles sur «les exécutions en Iran» (nº 5-352)

Mme Vanessa Matz (cdH). - Le 9 décembre 2010, le Sénat a adopté une résolution relative à la situation des droits humains en Iran. Elle concernait en particulier le cas de Sakineh Mohammadi Ashtiani, qui avait été condamnée à mort, auquel la presse avait fait largement écho.

Cette résolution invitait le gouvernement à réaffirmer son opposition à la peine de mort et à demander aux autorités iraniennes d'établir un moratoire sur les exécutions dans l'attente de l'abolition de la peine de mort.

Selon la télévision d'État iranienne, quatre pendaisons ont eu lieu le 24 janvier : un homme condamné à mort pour le meurtre de plusieurs femmes et trois hommes condamnés pour le viol d'un adolescent.

Ces quatre pendaisons s'ajoutent à celles, menées le même jour, de deux opposants membres de l'Organisation des moudjahiddines du peuple arrêtés lors des manifestations antigouvernementales de 2009.

Le 29 janvier, Zahra Bahrami, une irano-néerlandaise a été exécutée à Téhéran, malgré les démarches accomplies par les autorités néerlandaises et européennes.

Ces exécutions portent à un total de 53 le nombre de pendaisons en Iran cette année, soit plus de deux par jour, selon un décompte élaboré par l'AFP à partir d'informations publiées par les médias locaux.

En 2010, 179 personnes au moins ont été pendues en Iran. Au rythme actuel, ce sinistre chiffre risque d'être rapidement dépassé.

Je souhaiterais savoir si la Belgique a entamé des démarches auprès des autorités iraniennes concernant le respect des droits humains, en particulier l'abolition de la peine de mort, et, dans l'affirmative, quelles sont-elles ?

Le gouvernement belge a-t-il ou compte-t-il effectuer des démarches concernant ces nouveaux cas et pour en prévenir d'autres ?

Des démarches concernant la peine de mort en Iran sont-elles prévues au niveau européen, au-delà de la déclaration faite par Mme Ashton, condamnant l'exécution de la ressortissante irano-néerlandaise ?

M. Steven Vanackere, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et des Réformes institutionnelles. - Il est extrêmement important de promouvoir la dignité humaine et un certain nombre de valeurs qui nous sont chères. Je vous remercie dès lors d'avoir posé cette question.

La Belgique a effectué pendant le second semestre 2010 une série de démarches concernant le respect des droits humains, en particulier l'abolition de la peine de mort, tant en son nom propre que dans l'exercice de la présidence, au nom de la haute représentante Catherine Ashton.

Au cours de sa présidence, la Belgique a effectivement entrepris de multiples actions à Téhéran au nom des Vingt-sept pour demander que l'Iran suspende l'application de la peine de mort et abolisse la lapidation, conformément aux obligations de l'Iran découlant de sa ratification des conventions internationales sur les droits de l'homme, dont le pacte international sur les droits civils et politiques.

Je me suis aussi prononcé publiquement à ce sujet le 29 décembre, quand j'ai exprimé ma vive préoccupation concernant l'exécution de prisonniers politiques en Iran. La suppression de la peine de mort reste une priorité belge et européenne. Nous nous opposons à l'application de la peine capitale en toutes circonstances et nous plaidons pour son abrogation au niveau mondial avec, comme premier pas, l'instauration d'un moratoire universel sur les exécutions.

Toujours dans l'exercice de sa présidence au nom de la haute représentante, la Belgique a obtenu, l'automne dernier, l'adoption par l'assemblée générale des Nations unies d'une résolution sur les violations des droits de l'homme par l'Iran ainsi que d'une résolution sur un moratoire sur l'application de la peine de mort.

Dans le cadre de l'examen périodique universel de l'Iran par le Conseil des droits de l'homme des Nations unies, le 15 février 2010, la Belgique a également formulé des recommandations en rapport avec la peine capitale.

La recommandation visant à respecter, lors de l'application de la peine de mort, des standards minimaux et les dispositions du pacte international relatif aux droits civils et politiques et de la Convention des droits de l'enfant, a été acceptée par l'Iran.

Je déplore, en revanche, que la recommandation visant à instaurer le plus rapidement possible un moratoire sur les exécutions ait été rejetée.

Effectivement, je resterai très attentif à la situation des droits de l'homme en Iran. Cela étant, il ne faut pas multiplier inutilement les déclarations, afin de ne pas en diminuer l'impact.

Au-delà des mots, ce sont les actions qui comptent. La Belgique, au sein de l'Union européenne, soutient et contribue à déterminer les actions que cette dernière pourrait et devrait mener sur les violations des droits de l'homme en Iran.

La situation des droits de l'homme requiert toute l'attention du Conseil de l'Union européenne et nous verrons ce que nous pourrons faire concernant l'Iran dans les mois qui viennent, tant dans les relations bilatérales que dans les instances onusiennes, à commencer par le Conseil des droits de l'homme.

Par ailleurs, Mme Catherine Ashton, la haute représentante pour la politique étrangère et de sécurité de l'Union européenne, entend bien se prononcer sur les violations des droits de l'homme en Iran, y compris par des déclarations publiques.

Mme Vanessa Matz (cdH). - Je vous remercie pour votre réponse et pour les démarches qui ont été effectuées. Le cas, très médiatisé, de Mme Sakineh est loin d'être unique et, malgré toutes les démarches de la communauté internationale, en ce compris la Belgique, on observe une augmentation sensible des condamnations à mort en Iran. On peut donc se demander si la pression internationale a un impact réel sur les autorités iraniennes.

J'ignore si Mme Ashton s'est prononcée publiquement à ce sujet. Je me demande seulement s'il ne faudrait pas à un moment donné utiliser d'autres moyens que des déclarations publiques et nous tourner vers des mesures un peu plus coercitives pour tenter de remédier à ce difficile problème.

L'ambassadeur d'Iran, à propos de la résolution dont j'étais l'auteur, a avancé comme toujours l'argument selon lequel les États-Unis appliquent aussi la peine de mort. J'ai répété que nous condamnions tous les pays où cette peine existe. Il est vrai cependant qu'aux États-Unis, il n'existe pas la lapidation ou d'autres formes de torture.

J'espère de tout coeur que vous continuerez à vous impliquer de manière soutenue dans ce dossier, comme vous l'avez fait lors de notre présidence européenne.