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21 MAI 2008
I. Introduction
La proposition de loi a été déposée le 28 janvier 2008. Elle a été examinée conjointement avec la proposition de loi relative à l'étiquetage et aux messages à caractère sanitaire préconisant l'absence de consommation d'alcool par les femmes enceintes sur les unités de conditionnement des boissons alcoolisées, déposée par M. Philippe Mahoux (doc. Sénat, nº 4-598/1) et avec la proposition de résolution visant à organiser une campagne de sensibilisation afin d'attirer l'attention sur les risques liés à la consommation d'alcool pendant la grossesse, déposée par M. Patrik Vankrunkelsven et consorts (doc. Sénat, nº 4-607/1). Cette dernière fait l'objet d'un rapport distinct (voir doc. Sénat, nº 4-607/3).
Les propositions précitées ont été examinées par la commission lors de ses réunions des 16, 23 et 30 avril, ainsi que du 14 mai 2008, en présence de Mme Laurette Onkelinx, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique.
II. Exposés introductifs
II.1. Proposition de loi modifiant l'arrêté royal du 13 septembre 1999 relatif à l'étiquetage des denreées alimentaires préemballées afin d'attirer l'attention sur les risques liés à la consommation d'alcool pendant la grossesse, déposée par M. Vankrunkelsven (doc. Sénat, nº 4-530/1)
La proposition de loi part du constat que la consommation d'alcool pendant la grossesse peut avoir une influence sérieuse sur l'enfant. Cette prise de conscience n'est pas neuve mais plusieurs études réalisées récemment ont montré que 18 % des femmes enceintes consommaient de l'alcool sans précaution et que 5 % d'entre elles buvaient même beaucoup, sans avoir nécessairement conscience des dangers de ce comportement. Les études ont aussi mis en évidence des conséquences telles que retard de croissance, altération des traits et problèmes de développement cérébral. Dans des cas très graves, il est même question de « syndrome d'alcoolisme foetal » se traduisant par des troubles du comportement et de la mémoire.
Pour toutes ces raisons, l'auteur estime qu'il faut agir préventivement. Il s'est inspiré de ce qui existe déjà en France pour imposer un pictogramme de mise en garde sur les étiquettes de boissons alcoolisées. Celui-ci figure déjà sur certaines bouteilles de bière et de vin en Belgique.
Faut-il aussi apposer un texte ? Après réflexion, l'auteur a opté pour un simple symbole, clair et uniforme, et qui, répété sur toutes les bouteilles, sera reconnu par tout un chacun, plutôt qu'un texte qui, le plus souvent, ne serait pas lu.
II.2. Proposition de loi relative à l'étiquetage et aux messages à caractère sanitaire préconisant l'absence de consommation d'alcool par les femmes enceintes sur les unités de conditionnement des boissons alcoolisées, déposée par M. Philippe Mahoux (doc. Sénat, nº 4-598/1)
La proposition de loi nº 4-598/1 trouve sa justification dans les mêmes causes que le texte précédent. La proposition vise une mise en garde très claire quant aux dangers de l'alcool pour la femme enceinte et son enfant. On pourrait d'ailleurs envisager de l'étendre à d'autres groupes de la population. Sur le tabac, le principe de danger pour la santé est déjà inscrit et cela ne pose pas de problème au regard de la législation européenne. Pour l'alcool, la mise en garde ne visera que les femmes enceintes.
La proposition contient un « phasing out » car certains produits sont commercialisés avec un délai de péremption très long. C'est pourquoi des produits non conformes pourront encore être commercialisés à condition d'avoir été étiquetés ou mis sur le marché dans un délai d'un an à partir de l'entrée en vigueur de la loi.
La proposition de loi entend évidemment sensibiliser tous les publics. Si elle ne définit pas le pictogramme, celui-ci devra en tout cas être bien visible.
III. Discussion générale
Mme Durant exprime son soutien aux propositions. Elle estime néanmoins qu'il ne faut pas élargir la problématique, sous peine de manquer l'objectif. L'alcoolisme est un grave problème, avec diverses conséquences pour l'ensemble de la population. Ici, on vise essentiellement l'information et la sensibilisation des femmes enceintes, c'est-à-dire un segment précis et clair de la problématique.
Mme Delvaux se dit convaincue de l'ignorance de certaines femmes enceintes quant à l'impact dramatique que peut avoir la consommation d'alcool pendant la grossesse. Elle s'interroge sur la meilleure manière de faire passer le message, soit au moyen d'un pictogramme seul, soit en y ajoutant un texte. Il semble en effet qu'en matière de prévention, la combinaison de messages aurait plus d'impact. Il est en tout cas essentiel qu'une campagne de sensibilisation soit menée en parallèle avec les communautés.
Mme Van Hoof est d'avis que la combinaison d'un texte et d'un pictogramme pourrait être très efficace. Une sensibilisation et une information sont certes nécessaires car il existe encore beaucoup d'idées fausses. À titre d'exemple, il est encore souvent recommandé aux femmes qui allaitent de boire de la bière de table.
Elle s'interroge sur le seuil de 1,2 % d'alcool mentionné seulement dans la proposition de loi nº 4-607: celui-ci est-il basé sur des études scientifiques ?
Par ailleurs, le tabac est aussi dangereux pour les femmes enceintes; ne serait-il pas opportun d'apposer un pictogramme du même genre sur les paquets de cigarettes ?
Mme Van Ermen plaide aussi pour qu'un logo soit apposé sur les paquets de cigarettes.
M. Claes remarque que l'industrie de la bière a tendance aujourd'hui à mettre sur le marché des boissons faiblement alcoolisées et plus sucrées, notamment à destination du public féminin. La question du seuil à fixer dans la loi lui semble donc cruciale.
Des contacts ont-ils été pris avec l'industrie de l'emballage pour savoir comment le secteur pourra s'organiser, compte tenu de la quantité de boissons importées (vin, bière, etc.) ?
Mme Vanlerberghe estime qu'on ne peut que soutenir une initiative visant à rappeler les dangers de l'alcool pour les femmes enceintes. Elle est néanmoins d'avis que la plupart des femmes sont bien informées, bénéficient d'un suivi médical et font très attention pendant leur grossesse. Les femmes qui échappent à la règle ont généralement de réels problèmes avec l'alcool et un pictogramme ne les dissuadera pas de boire. L'apposition d'un logo doit être vue comme une contribution dans la prévention contre les dangers de l'alcool mais elle ne remplace pas un accompagnement personnalisé.
La membre remarque aussi que dans un café, le consommateur ne voit en général pas la bouteille.
Par ailleurs, la membre estime que le problème de l'étiquetage ne doit pas être négligé car à défaut de solution pour les boissons importées, la loi risque d'avoir peu d'application.
Pour l'intervenante, l'initiative est positive mais elle ne permet pas d'appréhender véritablement le problème.
M. Vankrunkelsven déclare que le seuil de 1,2 % est quelque peu arbitraire mais il vise à éviter que des boissons à très faible taux d'alccol tombent dans le champ d'application de la loi. On ne demande pas aux femmes enceintes de se comporter de façon aussi stricte que des anciens alcooliques qui ne peuvent plus boire une goutte d'alcool. Si on boit de la bière « N.A. », il est presque impossible de subir un dommage.
En ce qui concerne l'industrie de l'emballage, une mesure transitoire permet d'écouler les stocks existant avant l'entrée en vigueur de la loi. Le problème des boissons importées est résolu en France par l'apposition d'un simple cachet sur l'étiquette. C'est toutefois à l'industrie de l'emballage qu'il appartient de trouver une solution.
De contacts pris avec des brasseries, il ressort qu'elles-mêmes ont déjà envisagé une telle mesure mais qu'elles ont estimé qu'elles allaient se placer en situation de discrimination par rapport aux producteurs de vins. Toutefois, quand la loi a été adoptée en France, les brasseurs belges ont apposé le logo sur les bouteilles destinées à l'exportation mais parfois aussi sur toute leur production.
L'auteur de la proposition reconnaît qu'il aurait été plus simple d'avoir une législation uniforme au niveau européen, mais on ne peut pas, en tant que législateur national, attendre systématiquement une initiative européenne pour agir.
La proposition de loi ne va certes pas régler le problème chez les femmes enceintes alcooliques mais l'organisation d'une campagne de sensibilisation, l'information du public et l'effet de répétition du logo peuvent amener à une prise de conscience. Même si elle n'a d'impact que sur 5 % des cas, la mesure en vaut la peine.
Mme Vienne souligne qu'une campagne de sensibilisation n'a pas pour vocation d'être universelle. L'initiative prise ici constituera une étape dans la prise de conscience en matière de consommation d'alcool. Même si les médecins mettent en garde les femmes enceintes contre les risques de la consommation d'alcool, c'est insuffisant car l'alcool fait trop partie intégrante de nos modèles de consommation.
L'adaptation du marché n'est pas un sujet de préoccupation. Les producteurs s'adaptent très facilement à leurs différentes cibles et il en va de même pour l'emballage. Néanmoins, pourquoi ne pas essayer de sensibiliser les autorités européennes à la question ?
Mme Vanlerberghe demande s'il est impossible d'être ivre en buvant pendant toute la journée des boissons dont le taux d'alccol est inférieur à 1,2 %. Elle estime qu'on ne peut fixer ce taux dans la loi que s'il est scientifiquement étayé.
Mme Lanjri, présidente, précise qu'il ne s'agit pas de savoir si l'on peut être ivre mais s'il peut y avoir un danger pour le foetus. Si un risque existe, aussi faible soit-il, il faut supprimer ce seuil dans la loi.
M. Vankrunkelsven fait remarquer que le seuil de 1,2 % a été retenu aussi pour une raison pratique: c'est à partir de ce seuil que le pourcentage d'alcool doit être mentionné sur l'étiquette. On a estimé qu'en deçà il ne s'agissait pas vraiment de boissons alcoolisées parce qu'on ne pouvait pas être ivre en les buvant.
En principe, le corps humain peut éliminer un verre de bière normale (5 % d'alccol) par heure. Si l'on boit de la bière sans alcool, qui a quand même, malgré l'appellation, un taux d'alccol de 0,5 %, il faut en boire dix par heure avant d'arriver au même stade. C'est presque impossible d'absorber un tel volume. La limitation physique s'impose d'elle-même. Le seuil de 1,2 % semble donc raisonnable et justifié.
Néanmoins, aucune étude scientifique ne permet de justifier un seuil plutôt qu'un autre en termes d'impact sur le foetus. Le meilleur conseil que l'on puisse donner à une femme enceinte est de ne pas boire du tout d'alccol.
M. Claes fait remarquer que certaines femmes boiront malgré le message, mais si elles se tournent vers des alternatives moins alcoolisées, l'objectif sera quand même rencontré, d'où l'intérêt de fixer un seuil. Par ailleurs, il est évident que le secteur de l'emballage aura plus de difficultés à s'adapter pour les produits importés. Selon le membre, il faudra certainement prévoir pour ceux-ci un délai plus long de mise en conformité. Enfin, il sera certes difficile de montrer au client le logo dans les cafés et autres établissements publics mais on pourrait éventuellement le faire figurer sur la carte des boissons alcoolisées. De plus, on prend généralement un verre en compagnie d'autres personnes et dans ces cas-là, le contrôle social s'exerce.
Mme Van Hoof fait remarquer que le seuil de tolérance à l'alcool varie d'une femme à l'autre. Pour plus de clarté, tant vis-à-vis du public que pour l'industrie de l'emballage, il serait peut-être plus avisé de ne pas fixer de seuil dans la loi.
M. Vankrunkelsven répète que dans la législation actuelle, la différence entre boissons alcoolisées et non alcoolisées a été fixée au seuil de 1,2 % et que l'indication du taux d'alcool n'est imposée qu'à partir de ce seuil.
Mme Lanjri, présidente, réplique que cela n'empêche pas d'imposer l'apposition du logo « femmes enceintes » en dessous de ce seuil, à partir du moment où on sait que la boisson contient de l'alcool. Si l'on n'a pas d'avis scientifique sur les dangers pour le foetus, c'est la solution la plus sûre.
M. Vankrunkelsven est d'avis qu'il faut être raisonnable. L'objectif est de donner un signal aux femmes qui consomment de l'alcool en quantités limitées.
De plus, il plaide pour qu'on se base sur la législation existante qui a fixé un seuil pour des raisons objectives. Si l'on veut fixer un autre seuil, on va s'engager dans des discussions interminables.
Mme Onkelinx, ministre des Affaires sociales et de la Santé publique, partage les préoccupations des auteurs des textes à l'examen. L'aspect « santé publique » est incontestable même si peut s'interroger sur le seuil de 1,2 %. Un spécialiste de l'ISP pourrait venir éclairer la commission sur ce point.
Quant au choix du message, la ministre souligne que le choix d'un texte impliquera qu'il figure dans les trois langues nationales.
Mme Delvaux insiste pour qu'on entende un spécialiste afin de pouvoir objectiver ces pourcentages. Le taux d'alcool est important mais la quantité consommée et la sensibilité de la personne entrent aussi en considération.
M. Claes suggère aussi de demander l'avis du SPF Santé publique ou d'un autre organisme officiel, ainsi que l'avis de l'industrie de l'emballage.
M. Vankrunkelsven déclare qu'il ne s'opposera pas à un amendement visant à abaisser le seuil à partir duquel un pictogramme devra être apposé, mais le seuil de 1,2 % lui semble une bonne façon de délimiter la frontière entre, d'une part, les boissons alcoolisées et, d'autre part, la bière de table et les boissons très faiblement alcoolisées. On peut difficilement exiger que le pictogramme figure sur toutes les boissons et il est persuadé que la proposition dans sa version actuelle permet d'atteindre l'objectif poursuivi. La législation sur les emballages a été suivie au maximum: le pictogramme ne doit figurer que sur les bouteilles où doit aussi figurer l'indication du degré d'alcool.
Il signale que sa proposition de loi mentionne une dizaine de références bibliographiques mais que leur lecture ne permet pas de fixer avec certitude un seuil à partir duquel l'alcool serait nocif. Tout ce qu'on peut dire, c'est que la consommation régulière d'alcool est nocive.
Comme l'auteur de la proposition, Mme Durant estime qu'on peut discuter à l'infini sur les données scientifiques et que ce n'est pas l'objet du débat ici. L'objectif est de donner un signal aux femmes enceintes, la grossesse étant un état momentané, pendant lequel on invite à prendre des précautions particulières.
Mme Jansegers demande si ce signal ne vaut pas aussi pour les femmes pendant la période où elles allaitent.
M. Vankrunkelsven confirme qu'il n'est pas recommandé de boire de l'alcool quand on allaite. La proposition de résolution nº 4-607 vise à organiser des campagnes de sensibilisation, notamment à destination des médecins, infirmiers et personnel soignant des hôpitaux où des accouchements sont pratiqués.
Mme Vienne remarque qu'il conviendrait aussi de s'intéresser au message. En France, le pictogramme est accompagné d'un texte « 0 alcool pendant la grossesse », ce qui lui semble un message clair, accessible à tous, quel que soit le niveau d'éducation.
Mme Van Hoof ajoute que, dans le cadre européen, il serait bon que tous les États appliquent le même message et optent pour un seuil identique.
Pour information, M. Claes cite un extrait du Plan national de lutte contre l'alcoolisme qui a été soumis à la conférence interministérielle: « Outre les jeunes, les femmes enceintes constituent aussi un groupe cible important. Boire de l'alcool pendant la grossesse peut nuire à l'enfant à naître. Par précaution, il est vivement recommandé de s'abstenir complètement d'alcool pendant toute la grossesse. ».
M. Mahoux trouve qu'il conviendrait de dresser un inventaire de toutes les boissons alcoolisées dont le taux d'alcool est inférieur à 1,2 % afin d'avoir une idée de l'importance du risque.
Mme Tilmans remarque qu'elle est l'auteur d'une proposition de résolution relative à la consommation d'alcool par les mineurs qui a été adoptée à l'unanimité à la Chambre sous la législature précédente (Doc. Ch. nº 51-1107/1). Le rapport de cette proposition contient des informations intéressantes au sujet des taux d'alcool des différentes boissons. Elle plaide pour une cohérence avec cette proposition qui interdisait notamment la publicité en faveur de l'alcool, ainsi que la vente de produits alcoolisés au rayon limonades.
M. Vankrunkelsven trouve cette remarque intéressante mais il faut éviter de noyer la présente initiative dans la problématique générale de la lutte contre l'alcoolisme. À l'intention de l'intervenant précédent, il cite deux boissons dont le taux d'alcool se situe clairement en dessous du seuil de 1,2 %, à savoir la bière « N.A. » et la bière de table. Il rappelle qu'il faut boire dix verres de cette bière pour atteindre le taux d'alcool d'une chope de bière normale.
La ministre des Affaires sociales et de la Santé publique déclare que la Conférence interministérielle — composée des ministres de la Santé du gouvernement fédéral et des entités fédérées — de mai 2005 a chargé la cellule Politique de santé en matière de drogues de rédiger un Plan d'action national « alcool ». Les propositions à l'examen s'inscrivent dans la ligne retenue par les experts qui ont rédigé le projet de plan national de lutte contre l'alcool, en particulier quant à l'attention portée au but à atteindre. Trois objectifs principaux ont été fixés: 1. Prévenir et réduire les dommages liés à l'alcool; 2. Combattre la consommation inadaptée, excessive, problématique et risquée de l'alcool; 3. Mener une politique orientée vers des groupes-cibles à risques.
Présenté le 11 mars, le projet de plan a été jugé imprécis et ne contenant pas encore assez de mesures concrètes et son adoption a été reportée à la conférence interministérielle du 17 juin prochain. Elle propose d'attendre l'adoption du plan pour voir comment les mesures concrètes qui y figureront pourront être articulées avec les propositions à l'examen.
La ministre exprime quelques réserves quant à la proposition d'apposer un pictogramme. Une telle initiative a été proposée au sein de l'Union Européenne et les États membres l'ont rejetée en bloc. Seules la France et la Pologne ont adopté ce pictogramme.
Mme Lanjri, présidente, remarque que rien n'interdit de jouer le rôle de précurseur dans ce domaine. Par ailleurs, si les mesures proposées s'inscrivent dans le prolongement du plan alcool, pourquoi faudrait-il attendre son adoption ?
Mme Delvaux insiste pour connaître les raisons du rejet de la mesure par les pays membres de l'UE, et disposer d'informations sur l'impact réel qu'a eu la mesure en France. Cela permettrait aussi de savoir s'il faut privilégier le pictogramme seul ou accompagné d'un message écrit.
M. De Gucht ne comprend pas pourquoi il faudrait d'abord connaître l'impact d'une mesure ailleurs avant de l'adopter chez nous. La question a trait à la manière la plus efficace d'informer le consommateur et rien d'autre.
M. Vankrunkelsven estime qu'il faut un recul d'un an ou deux pour évaluer l'effet d'une mesure. Le membre signale en outre que l'avertissement qui figure sur les paquets de cigarettes a été introduit sans qu'on ait au préalable étudié les effets d'une telle mesure. Il est de toute façon très difficile d'identifier l'impact d'une telle mesure. On sait qu'elle n'a de réel effet que si elles s'inscrit dans le cadre d'une large campagne d'information. La simple apposition du pictogramme sur les boissons alcoolisées n'aura peut-être qu'un impact très réduit mais si elle est combinée avec la résolution et avec les mesures que la ministre va adopter, elle s'inscrira dans un ensemble cohérent.
Enfin, le membre rappelle que l'interdiction de la publicité pour les cigarettes a aussi été introduite unilatéralement dans plusieurs pays avant qu'une décision européenne soit entrée en vigueur.
La ministre des Affaires sociales et de la Santé publique explique que lors d'une proposition de règlement sur l'étiquetage des denrées alimentaires, la Commission européenne a chargé des groupes de travail d'analyser l'effectivité d'une mesure visant à apposer un pictogramme sur les bouteilles contenant de l'alcool. Ces groupes de travail ont finalement préconisé le rejet de la mesure mais on ignore sur quelle base car leurs travaux ne sont malheureusement pas accessibles.
En France, il existe déjà un rapport d'évaluation réalisé par l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé. Ses conclusions font état d'une mémorisation spontanée assez faible du pictogramme: environ 2/3 des Français et 7 femmes enceintes sur 10 savent que les bouteilles de boissons alcoolisées comportent un avertissement sur les risques de la consommation d'alcool pendant la grossesse mais seuls 14 % ont remarqué la présence d'un nouvel élément sur les bouteilles. Près d'un Français sur 2 déclare avoir vu le pictogramme mais seuls 29 % l'ont vu sur une bouteille. Il semble que beaucoup soient au courant grâce à la vaste campagne d'information dans la presse écrite qui a accompagné la mesure.
Le message est considéré comme bien compris et jugé utile. 77 % comprennent que l'alcool est interdit pour les femmes enceintes contre 21 % qui pensent qu'il suffit d'en limiter la consommation. Pour la majorité des Français, le message n'est pas culpabilisant.
Les Français approuvent à plus de 90 % le fait que les bouteilles d'alcool comportent désormais une indication sur les risques liés à la consommation d'alcool pendant la grossesse. Près de 6 Français sur 10 préfèrent néanmoins la présentation la plus complète, à savoir le pictogramme accompagné du message. 69 % des Français estiment que ces indications auront un impact important sur les femmes enceintes et leur consommation d'alcool.
Les femmes enceintes semblent aussi convaincues. Néanmoins, près de la moitié des femmes qui consomment de l'alcool pendant leur grossesse (une minorité vraisemblablement réfractaire) déclarent que ces messages ne changeront rien à leur consommation d'alcool.
Notons encore que 72 % des Français jugeraient utile d'inscrire sur les bouteilles d'alcool des messages destinés à d'autres catégories de la population, prioritairement les jeunes. Assez logiquement, le risque à mentionner en priorité devrait être les accidents de la route.
M. Vankrunkelsven constate que le pictogramme semble avoir été vu par beaucoup de femmes et avoir eu un effet positif. Il ressort aussi de l'étude que l'introduction du pictogramme doit être accompagnée d'une campagne. C'est là l'objet de la proposition de résolution nº 4-607/1.
IV. Discussion des articles
Article 1er
L'article 1er est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.
Article 2
Amendement nº 2
M. Vankrunkelsven et consorts déposent un amendement nº 2 visant à compléter l'article 2, § 1er, 8º, de l'arrêté royal du 13 septembre 1999 relatif à l'étiquetage des denrées alimentaires préemballées, afin d'imposer l'apposition d'un pictogramme mettant en garde contre les risques de la consommation d'alcool pendant la grossesse. Contrairement au texte initial de la proposition de loi, l'amendement ne fait plus référence au taux d'alcool de 1,2 % comme seuil à partir duquel il faudrait imposer le pictogramme. C'est là une question technique qui relève du gouvernement.
L'amendement nº 2 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.
L'article 2 ainsi amendé est adopté par le même vote.
Article 3
L'article 3 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.
Article 4
Amendement nº 1
Afin de répondre aux inquiétudes exprimées par plusieurs membres au sujet du pourcentage d'alcool retenu dans la proposition, M. Vankrunkelsven dépose un amendement habilitant le Roi à modifier ce pourcentage après concertation avec les acteurs du secteur concerné.
En outre, l'arrêté royal étant ici modifié par une loi, le Roi perdrait sa compétence de le modifier. L'amendement vise donc aussi à maintenir cette compétence du Roi.
M. Mahoux s'insurge contre cet amendement: d'une part, on modifie par une loi un arrêté royal ordinaire et d'autre part, on dépose un amendement visant à donner au Roi la possibilité non seulement de déterminer une disposition de la loi qui modifie un arrêté royal mais aussi de supprimer cette loi ou partie de cette loi. A quoi sert encore l'initiative parlementaire ? Un tel amendement est la négation complète de la compétence du législateur !
L'amendement nº 1 est retiré par son auteur.
L'article 4 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.
Article 5
L'article 5 est adopté à l'unanimité des 9 membres présents.
V. Votes
La proposition de loi ainsi amendée a été adoptée à l'unanimité des 9 membres présents.
La proposition de loi nº 4-598/1 devient sans objet par suite de l'adoption de la présente proposition de loi.
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 11 membres présents.
Texte adopté par la commission (voir le doc. Sénat, nº 4-530/5 - 2007/2008)