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25 NOVEMBRE 2003
Proposition de loi relative à l'extension du droit de vote et d'éligibilité aux élections communales aux ressortissants non européens résidant en Belgique
Proposition de loi modifiant la loi électorale communale et la nouvelle loi communale, en ce qui concerne le droit de vote et d'éligibilité des non-Belges aux élections communales et provinciales
Proposition de loi visant à instituer une consultation populaire sur le droit de vote des étrangers
Proposition de loi relative à l'extension du droit de vote et d'éligibilité aux élections communales et intracommunales aux ressortissants non européens résidant en Belgique
Proposition de loi modifiant la loi électorale communale et la nouvelle loi communale, en ce qui concerne le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales des ressortissants des États membres de l'Union européenne et des autres ressortissants de nationalité étrangère résidant en Belgique depuis plus de cinq ans
Proposition de loi modifiant la loi électorale communale, coordonnée le 4 août 1932, en vue d'octroyer le droit de vote aux étrangers non-ressortissants de l'Union européenne aux élections communales
Proposition de loi portant organisation d'une consultation populaire sur l'octroi du droit de vote au niveau communal aux résidents en Belgique qui ne sont pas des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne
La commission de l'Intérieur et des Affaires administratives a examiné ces propositions de loi au cours de ses réunions des 21 octobre, 4, 13, 18 et 25 novembre 2003.
Durant ces réunions, un long débat a été mené sur la manière dont seraient discutées les propositions de loi qui figuraient à l'ordre du jour de la commission.
On peut dire en résumé que deux tendances se sont dégagées au cours de ces débats de procédure, à savoir :
1º Une tendance qui suggérait de prendre pour base de discussion la proposition de loi de M. Mahoux et consorts (doc. Sénat, nº 3-13/1) et d'y intégrer la proposition de loi de Mmes Defraigne et Derbaki Sbaï (doc. Sénat, nº 3-275/1) sous la forme d'amendements. Les groupes PS, SP.A, MR, CdH, Écolo et Agalev étaient partisans de cette méthode de travail.
2º Une tendance qui souhaitait organiser les travaux sur le thème du « droit de vote des immigrés » de la manière suivante :
d'abord, examen quant au fond, tant en commission qu'en séance plénière, des propositions de loi visant à instituer une consultation populaire sur l'octroi du droit de vote aux immigrés (doc. Sénat, nºs 3-245/1 et 3-291/1);
puis, examen en commission des Affaires institutionnelles de la proposition de loi spéciale de M. Dedecker modifiant l'article 6, § 1er, VIII, 4º, de la loi spéciale du 8 août 1980 de réformes institutionnelles (transfert aux régions de la réglementation du droit de vote pour les ressortissants étrangers résidant en Belgique, qu'ils soient citoyens d'un pays de l'Union européenne ou d'un pays tiers) (doc. Sénat, nº 3-293/1);
ensuite, examen des propositions de loi visant à octroyer le droit de vote aux ressortissants étrangers non européens, en corrélation avec la discussion de la proposition de loi de M. Coveliers modifiant plusieurs lois électorales, en vue d'accorder le droit de vote aux Belges qui résident à l'étranger (doc. Sénat, nº 3-297/1).
Les groupes VLD, CD&V et Vlaams Blok se sont déclarés partisans de cette formule. Le VLD et le Vlaams Blok ont en outre insisté pour qu'on recueille l'avis du Conseil d'État sur les propositions de loi relatives à l'octroi du droit de vote aux étrangers.
Le VLD a également souhaité que soient organisées des auditions d'experts néerlandais, étant donné qu'aux Pays-Bas, les immigrés ont déjà, depuis un certain temps, le droit de vote à l'échelon communal.
Le détail de ces débats de procédure et les résultats des votes intervenus à ce propos figurent au chapitre III du présent rapport, intitulé « 1. Considérations introductives ».
M. Mahoux estime que les propositions qui ont été déposées réaffirment clairement les intentions des auteurs.
Son groupe est déterminé à faire aboutir la concrétisation de l'article 8, alinéa 4, de la Constitution, qui prévoit que la loi peut étendre le droit de vote aux résidents en Belgique qui ne sont pas ressortissants d'un État membre de l'Union européenne.
La proposition vise à octroyer le droit de vote et d'éligibilité, aux élections communales et provinciales à tout ressortissant d'un État tiers inscrit au registre de population de la commune. Il s'agit pour l'auteur de rétablir l'égalité de traitement en matière de droits électoraux communaux entre non-Belges ressortissants d'États membres de l'Union européenne, d'une part, et ressortissants d'autres États, d'autre part. Cette discrimination politique n'a aucune justification fondamentale.
L'octroi du droit de vote aux élections communales aux citoyens européens a montré combien le lien exclusif entre nationalité et droit de vote n'a pas de sens au niveau local.
C'est la volonté de participation à la vie de la communauté locale, l'engagement social et économique qui doivent être le fondement d'une participation politique. Font partie de la collectivité locale tous ceux qui participent à la vie de la commune et qui sont en état de continuer à y participer dans le futur en étant autorisés à demeurer sur le territoire belge, qu'ils soient de nationalité belge, ressortissant d'un État de l'Union européenne ou ressortissant d'un État tiers.
M. Mahoux est également convaincu que l'extension du droit de vote rendra les mandataires locaux encore plus attentifs aux besoins de ces nouveaux électeurs.
La participation politique de nos concitoyens d'origine étrangère au niveau local élargira la base démocratique de ces collectivités locales et est un facteur d'intégration puissant, qui contribue à briser les barrières qui peuvent subsister entre tous nos concitoyens. Le refus de ce droit aux ressortissants non européens serait une erreur grave puisque cela renforcerait chez ces derniers un sentiment d'exclusion, qui s'oppose à l'objectif d'une intégration harmonieuse des différentes communautés composant la population d'une entité locale.
Certains opposants au droit de vote ont peur que l'extension de ce droit bouleverse notre système. S'il en était ainsi, est-ce que ce serait une raison suffisante pour faire obstacle à ce que nous considérons comme une avancée démocratique ? Son groupe ne le pense pas.
Les experts ont montré, lors de nos travaux dans la législature précédente que l'extension du droit de vote ne modifierait pas fondamentalement le paysage politique. Cela a été constaté dans des pays, tels que la Hollande et le Danemark, qui ont déjà conféré le droit de vote aux ressortissants non européens. La répartition des votes se faisait selon le spectre politique préexistant.
Cette volonté doit bien sûr pouvoir être identifiée, pour fonder l'octroi du droit de vote. On retient généralement le critère d'une certaine durée d'établissement sur le territoire belge. Pour concrétiser juridiquement ce critère, l'auteur propose de retenir la condition de l'inscription au registre de population de la commune. Figurent en effet sur ces registres les Belges domiciliés dans la commune et, d'autre part, les étrangers domiciliés qui ont été autorisés à s'établir dans le Royaume.
L'autorisation d'établissement peut être accordée par le ministre compétent à tout étranger qui a été admis à séjourner dans le pays pour une durée illimitée. En tout état de cause, et sauf si des raisons d'ordre public ou de sécurité nationale s'y opposent, l'autorisation doit être accordée à différentes catégories d'étrangers. Il s'agit en particulier de tout étranger justifiant d'un séjour régulier et ininterrompu de cinq ans, sauf le séjour en vue d'accomplir des études.
Tout étranger séjournant depuis cinq ans au moins sur le territoire belge se verrait donc octroyer le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales.
Son groupe propose l'extension du droit de vote aux élections communales et provinciales. Communes et provinces sont deux entités locales, auxquelles l'article 41 de la Constitution reconnaît des intérêts exclusifs, distincts des intérêts nationaux. Il est possible qu'une analyse constitutionnelle doive être menée pour valider ce point de vue.
Il est donc proposé d'octroyer le droit de vote et d'éligibilité.
Enfin, il paraît important de faciliter l'exercice de ce droit. Les difficultés rencontrées lors du scrutin communal du 8 octobre 2000 par certains électeurs non belges ressortissants de l'Union européenne pour se faire inscrire sur les listes électorales doivent trouver une solution.
À cet effet, la loi pourrait prescrire aux communes d'envoyer d'office à tous les habitants non belges de la commune, repris sur les registres de population, le document d'inscription sur les listes électorales, que ceux-ci n'auraient plus qu'à renvoyer, pour participer aux élections communales et provinciales.
En concluant, M. Mahoux souligne que son groupe considère cette proposition comme une avancée importante sur le plan démocratique et comme un élément important d'intégration de nos concitoyens d'origine étrangère dans la vie locale en leur permettant d'être actif politiquement.
Mme De Roeck déclare que cette proposition de loi est retirée et remplacée par la proposition de loi relative à l'extension du droit de vote et d'éligibilité aux élections communales et intracommunales aux ressortissants non européens résidant en Belgique (doc. Sénat, nº 3-262).
La discussion sur l'exercice des droits politiques par des non-Belges a connu une genèse longue et souvent pénible. Dès la deuxième moitié des années 1970, une discussion sociale s'est amorcée concernant le droit de vote des étrangers aux élections communales. Il a cependant fallu attendre le début du mois de novembre 2001 avant que cette même discussion puisse avoir lieu au Sénat. Le Parlement a alors manqué une occasion historique. Cette fois-ci, l'accord de gouvernement prévoit qu'il incombe au Parlement de statuer sur cette question, lequel bénéficie en quelque sorte d'une seconde session pour présenter avec succès l'examen de « démocratie ».
Les obstacles constitutionnels ont été levés dès la fin de l'année 1998. En vertu de la révision de la Constitution du 11 décembre 1998, la loi peut étendre, à partir du 1er janvier 2001, le droit de vote des citoyens de l'Union européenne n'ayant pas la nationalité belge aux résidents en Belgique qui ne sont pas ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, dans les conditions et selon les modalités déterminées par ladite loi. Si le Parlement légiférait en ce sens, la Belgique rejoindrait le groupe des huit États membres européens (le Royaume-Uni, l'Irlande, L'Espagne, le Portugal, la Suède, le Danemark, la Finlande et les Pays-Bas) qui ont déjà accordé le droit de vote aux ressortissants hors Union Européenne pour les élections communales. Quatre États membres (la Grèce, l'Italie, le Luxembourg et la Belgique) n'appliquent pas encore ce système, bien que leur Constitution permette de l'appliquer. Dans la résolution du 5 juillet 2001, le Parlement européen appelle à accorder le droit de vote et d'éligibilité pour les élections du Parlement européen et pour les élections locales à l'ensemble des citoyens, y compris les ressortissants hors Union européenne, au bout d'un séjour légal d'au moins 3 ans. Ce délai a été repris dans la proposition de loi.
SP.A-Spirit se prononce clairement en faveur de l'octroi du droit de vote aux étrangers pour les élections locales. La distinction entre citoyens de l'Union européenne et non-citoyens de l'Union européenne ne se justifie pas. Concrètement, cela signifie qu'une partie de la population adulte n'est pas associée à nos institutions démocratiques et reste privée de toute possibilité de contrôle des dirigeants locaux. Bien que les personnes en question paient des impôts et recourent aux services publics, aux infrastructures d'enseignement, aux infrastructures culturelles, etc., elles n'ont pas le droit de se prononcer sur la politique qui influence la vie de tous les jours.
L'association à la vie sociale et économique doit constituer le fondement de la participation politique. Quiconque participe à la vie communale et pourra en faire autant à l'avenir, s'il peut continuer d'habiter sur le territoire belge, fait partie de la communauté locale. La participation politique est la concrétisation politique logique d'une implication socio-économique. Il s'agit là d'un facteur d'intégration, contribuant à la levée des barrières qui peuvent encore exister entre Belges et étrangers. Si l'on maintient le fossé politique entre les citoyens non-belges de l'Union européenne et les autres, on renforce chez ces derniers un sentiment d'exclusion qui va à l'encontre de l'objectif d'intégration équilibrée des différentes communautés constituant ensemble la population d'une entité locale.
En octroyant le droit de vote aux étrangers, on réfute l'argument selon lequel ils ne sont pas concernés. En octroyant le droit de vote aux étrangers, on les met devant leurs responsabilités de citoyens. La participation politique des citoyens non-européens élargit ni plus ni moins l'assise démocratique de l'organisation politique locale.
Les adversaires du droit de vote aux élections communales pour les non-Belges ont toujours fait valoir que les non-Belges auraient le droit d'aller voter tandis que les Belges eux-mêmes sont soumis à l'obligation de vote. Pour éviter tout malentendu, Mme Pehlivan souligne que le SP.A-Spirit est en principe partisan de l'obligation de vote pour les non-Belges. Le souci d'une démocratie représentative véritable et d'une société équitable qui traite tout le monde sur le même pied nous y oblige. Toutes les études scientifiques démontrent que les personnes peu qualifiées et les personnes (très) âgées et les plus faibles de la société sont les premières à ne pas se manifester si l'on supprime l'obligation de vote.
Cela signifierait ni plus ni moins une exclusion politique des plus défavorisés, venant s'ajouter aux autres formes d'exclusion auxquelles ils sont déjà confrontés. Une exclusion politique de facto signifierait que les problèmes de ces personnes, qui ne feraient plus partie du corps électoral, seraient de plus en plus difficilement placés à l'ordre du jour politique.
Ainsi qu'on l'a déjà indiqué, le problème du droit de vote pour les non-Belges est souvent mis en relation avec les procédures de naturalisation et d'acquisition de la nationalité. L'octroi de droits politiques n'est pas contraire à une procédure d'acquisition de la nationalité, mais il la complète. Accorder le droit de vote constitue donc un pas réel vers l'intégration et l'acquisition de la nationalité.
D'autre part, il ne paraît pas logique de faire une distinction entre les élections provinciales et communales. En effet, l'article 41 de la Constitution prévoit que les communes et les provinces sont des entités locales, qui règlent des intérêts exclusivement communaux ou provinciaux, lesquels diffèrent des intérêts nationaux. Toujours selon la Constitution, ces intérêts « sont réglés par les conseils communaux ou provinciaux d'après les principes établis par la Constitution ». L'administration locale est chargée de régler les matières spécifiques d'un groupe social qui diffère de la communauté nationale. On ne voit par conséquent pas bien la raison pour laquelle, s'agissant de la participation politique locale, on ferait une distinction entre les communes et les provinces.
Les adversaires du droit de vote des immigrés pour les élections communales font valoir que le dossier est symbolique parce qu'il ne s'agit que de quelque 125 000 citoyens allochtones, dont 44 700 environ vivent en Flandre. Ce chiffre est approximativement exact, mais pour le SP.A-SPIRIT, ce n'est absolument pas un motif pour banaliser le dossier. L'octroi du droit de vote pour les élections communales aux citoyens allochtones qui, pour des raisons diverses n'ont pas ou pas encore la nationalité belge est effectivement un symbole. Mais il s'agit d'un symbole fort de l'ouverture et de la vigueur de notre système démocratique. Une démocratie qui exclut des gens est une démocratie faible. Notre démocratie ouverte doit être suffisamment forte et dynamique pour pouvoir aussi être hospitalière. L'exclusion n'est rien d'autre qu'un signe de faiblesse.
M. Vanhecke considère que le thème du droit de vote pour les étrangers illustre très clairement la différence entre, d'une part, « le pays réel » l'opinion de la toute grande majorité des citoyens de ce pays et, d'autre part, « le pays légal » l'opinion majoritaire des politiciens belges. Selon l'intervenant, cette majorité politique n'est atteinte que parce que les francophones adoptent une position unanime à l'encontre de la toute grande majorité des Flamands parlementaires et de la population flamande.
M. Vanhecke souligne que même les partisans du droit de vote des immigrés doivent reconnaître qu'il n'y a en Flandre aucune majorité électorale démocratique en faveur de l'octroi de ce droit de vote.
Les citoyens de Flandre éprouvent une grande amertume par rapport au fait que la classe politique s'occupe prioritairement d'un pseudo-problème. Le droit de vote des immigrés ne résoudra pas les problèmes qui se posent entre autochtones et allochtones. La majorité des Flamands et de la classe politique flamande craint, au contraire, que ce droit de vote ne fera qu'aggraver les problèmes de société.
Il est clair que l'électeur attend des politiciens qu'ils s'occupent des véritables problèmes sociaux : le chômage, l'insécurité, les coûts salariaux, les transferts financiers vers la Wallonie, l'augmentation de la dette fédérale, problèmes qui ne sont apparemment pas prioritaires aux yeux des politiciens. Son parti n'est évidemment pas partisan du droit de vote pour les étrangers et trouve qu'il y a d'autres thèmes qui devraient nous occuper. Cependant, dès l'instant où les politiciens francophones mettent ce problème à l'ordre du jour, son parti est bien obligé de prendre position en la matière et il le fait en proposant une consultation populaire.
M. Vanhecke pense que les propositions de loi relatives à une consultation populaire devraient être examinées d'abord en commission et en séance plénière avant que l'on ne puisse ouvrir le débat sur les propositions de loi relatives au droit de vote des étrangers.
La consultation populaire est un instrument de démocratie directe auquel on ne peut recourir à la légère. L'intervenant estime qu'une consultation populaire est nécessaire concernant le droit de vote des étrangers parce que celui-ci a une incidence directe sur le fonctionnement de notre démocratie. Le droit de vote des étrangers modifie les règles démocratiques, avec des conséquences importantes et radicales pour nos institutions. L'article 33 de la Constitution dispose que tous les pouvoirs émanent de la Nation. Cela signifie que l'électeur souverain est la base de la démocratie. Un élargissement du corps électoral touche par conséquent au fondement de la démocratie telle que nous la connaissons actuellement. Il va dès lors de soi que c'est l'électeur souverain lui-même qui décide s'il souhaite ou non que l'on change les règles du jeu.
En outre, l'introduction du droit de vote pour les étrangers modifiera assurément les rapports de force politiques dans ce pays, quoi que l'on puisse dire à ce sujet. Il ne s'agit donc pas d'un geste symbolique politiquement neutre. L'introduction du droit de vote pour les étrangers pourrait assurément avoir une grande influence politique et électorale dans les grandes villes de notre pays et, en outre, il présente un aspect communautaire important à Bruxelles.
Le thème du droit de vote des étrangers a déclenché un important débat de société. Il est clair en tout cas que la majorité de la population est opposée à ce droit de vote. La Nation, c'est-à-dire les citoyens de ce pays, demandent à pouvoir faire connaître son opinion à ce sujet, dans le cadre d'une procédure démocratique.
Le fossé, déjà évoqué, qui sépare le « pays réel » du « pays légal » est un autre argument qui plaide en faveur d'une consultation populaire. Une majorité politique francophone impose le droit de vote des étrangers à la population flamande et aux parlementaires flamands.
Non seulement la majorité des Flamands est opposée au droit de vote, mais en Wallonie aussi, la majorité de la population est contre le droit de vote pour les étrangers.
L'enquête de « Gazet van Antwerpen » et du « Belang van Limburg » du 25 octobre 2003 a montré que près de 80 % des Flamands rejetaient le droit de vote pour les étrangers. Quelque 56 % des francophones s'avèrent également y être hostiles. Cette enquête a, il est vrai, été critiquée dans une note des professeurs Jaak Billet, Marc Swyngedouw et Dirk Jacobs (« De mening van de Vlamingen over gemeentelijk stemrecht voor migranten »).
Selon M. Vanhecke, dans une démocratie, la décision relative à l'octroi ou non du droit de vote aux étrangers revient par conséquent à l'électeur souverain.
L'intervenant refuse l'affirmation selon laquelle une consultation populaire porte atteinte à la démocratie en raison du fait qu'elle conduirait à une prise de décision extrémiste ou à une manipulation par des groupes de pression. Cette vision sous-estime grossièrement la maturité de l'électeur. Selon cette vision, l'électeur est trop stupide pour exprimer son vote dans une matière d'une telle importance.
Mme Durant explique que sa proposition de loi se base sur une série de constats liés à la participation des ressortissants européens aux élections communales. Elle s'inspire également de la notion d'un élargissement de la citoyenneté. L'oratrice estime que l'octroi de droits politiques aux personnes étrangères ne dépend pas de l'obtention de la nationalité. Un nombre important d'étrangers, dits de la première génération ou de la deuxième génération, garde des liens affectifs, culturels, religieux et sentimentaux avec le pays d'origine mais réside de manière durable et irréversible en Belgique. La double nationalité serait une manière de résoudre une partie du problème mais ne peut s'envisager qu'État par État.
De plus, l'octroi du droit de vote aux étrangers non européens s'inscrit dans le processus de reconnaissance et d'intégration de ces personnes.
Le membre veut accorder le droit de vote et d'éligibilité pour les étrangers résidant depuis cinq ans en Belgique, aux élections communales.
Les élections des conseils communaux qui viennent de se dérouler avec la participation des citoyens européens, montrent que cette participation électorale est possible. Il faut néanmoins remarquer que l'obligation de s'inscrire au préalable sur les listes électorales a manifestement été un frein à la participation et a induit des inégalités de fait entre électeurs européens et électeurs belges ainsi qu'entre les ressortissants européens.
Dès lors, la proposition vise à aligner le régime électoral des ressortissants de l'Union européenne sur celui des électeurs non européens. Cependant, afin de se conformer à la directive européenne rendant le vote aux élections européennes facultatives, le membre dépose un amendement instaurant une simple présomption de volonté de faire usage du droit de vote aux élections locales. De cette manière on évite des lourdeurs administratives liées à l'inscription aux listes électorales des personnes concernées.
Mme Deroeck, coauteur de la proposition de loi, considère que chacun connaît les valeurs défendues par Agalev. La proposition de loi déposée par Ecolo et Agalev poursuit globalement le même objectif que celle de M. Mahoux et consorts (doc. Sénat, nº 3-13/1).
Elle prévoit une procédure simple régissant l'exercice du droit de vote et d'égalité par des étrangers non européens. Si elle prévoit une procédure simple, c'est parque que l'on veut que le plus grand nombre possible de personnes puisse participer aux élections.
Le parti de Mme Deroeck n'a pas l'intention de faire voter une proposition de loi à son nom. Son objectif premier est de concrétiser le droit de vote le plus vite possible. L'intervenante demande dès lors à la commission d'entamer au plus vite l'examen d'une proposition quant au fond et elle déclare qu'elle soutiendra pleinement cette proposition de loi.
Elle fait encore part enfin de la réflexion suivante. D'aucuns prétendent que l'extension du droit de vote n'est pas une préoccupation « des gens ». C'est sans doute vrai. Mais quand on leur demande concrètement s'ils seraient prêts à accorder le droit de vote à des personnes d'origine étrangère qu'elles connaissent personnellement, on constate que la plupart répondent affirmativement. Lorsqu'il s'agit d'un immigré qu'ils connaissent, qui vit dans leur village, dont les enfants sont dans la même classe que les leurs, « les gens » sont ouverts à ce droit de vote.
M. Brotcorne signale que sa proposition de loi est analogue à celle proposée par Mme Durant et celle de M. Mahoux. Cependant, elle s'inscrit dans le prescrit de l'article 8 de la Constitution. Le législateur belge a permis que l'obligation de participation des ressortissants européens aux élections locales soit à l'avenir être étendue aux personnes non-européennes. La proposition, contrairement à la proposition de M. Mahoux, ne prévoit pas de participation des étrangers non européens aux élections provinciales.
L'orateur estime que le droit de vote doit nécessairement s'accompagner du droit d'éligibilité afin de ne pas opérer une discrimination entre les différentes catégories d'électeurs.
L'orateur se réfère à la proposition de loi de Mme Nyssens du 22 juillet 2003 modifiant l'article 1erbis de la loi électorale communale du 4 août 1932 en ce qui concerne le droit de vote et l'éligibilité des ressortissants des États membres de l'Union européenne aux élections communales. (doc. Sénat, nº 3-113/1).
L'orateur opte pour le système de l'inscription d'office sur les listes d'électeurs à partir du moment où on est inscrit aux registres communaux tant pour les ressortissants européens que pour les non européens.
L'orateur estime qu'il faut aller jusqu'au bout de l'application de l'article 8 de la Constitution sans introduire d'autres conditions.
Mme Defraigne signale que le mouvement réformateur réitère son engagement en faveur du droit de vote pour les étrangers pris au cours de la législature précédente. En effet, ce droit constitue un facteur d'intégration, qui concerne quelque 120 000 ressortissants non européens en Belgique.
Cette proposition envisage d'octroyer le droit de vote aux ressortissants étrangers non européens lors des élections communales à l'instar du droit de vote des citoyens européens. Toutefois le droit d'éligibilité n'est pas accordé aux étrangers non européens.
Seul le niveau communal est envisagé, dans la mesure où la commune représente l'institution politique la plus proche du citoyen, celle dans laquelle il peut le plus facilement et le plus rapidement s'impliquer. Bien que les élections communales et provinciales aient été couplées, l'auteur de la proposition considère néanmoins que la province constitue un échelon politique que, par sa dimension géographique autant que par son rôle politique, un étranger éprouve davantage de difficultés à cerner et appréhender.
L'octroi du droit de vote est conditionné par une déclaration expresse et préalable de l'intéressé qui doit s'engager à respecter notre Constitution, les lois du peuple Belge et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cet engagement n'a rien d'exceptionnel. Il est requis, rappelons-le, par l'article 21 du Code de la nationalité dont l'une des prérogatives essentielles est, précisément le droit de vote.
La déclaration exigée permet de s'assurer que le candidat électeur partage nos valeurs démocratiques et le respect des droits de l'homme.
Certains semblent considérer que semblable condition est discriminatoire dans la mesure où elle n'est pas requise pour les ressortissants de l'Union européenne. Ce qui distingue les européens des autres étrangers, c'est l'adhésion de leur pays à un même projet européen dont les traités fondateurs affirment une série de valeurs communes auxquelles tous souscrivent collectivement. La différence de traitement ne pourrait donc pas s'apparenter à une discrimination vexatoire.
M. J.-M. Dedecker estime que la consultation populaire est le moyen le plus démocratique d'interroger la population sur la modification de ses droits politiques résultant du droit de vote pour les immigrés.
Le peuple a le droit de contrôler ce que décident les politiques. Lorsque l'opinion du peuple ne coïncide apparemment plus avec celle de ses représentants, une consultation populaire est le moyen le plus logique pour savoir à quoi s'en tenir.
Or, les électeurs ne soutiennent apparemment pas le droit de vote pour les immigrés : il y a eu toute une contestation sur la portée des sondages d'opinion parus dans la presse. Les derniers chiffres de « Gazet van Antwerpen » montrent pourtant une fois de plus que 15,3 % seulement des électeurs francophones du MR soutiennent le droit de vote et que 74,7 % sont contre.
Dans le passé, on a déjà proposé des dizaines de consultations populaires et de référendums par voie de proposition de loi. Tous les partis ont un jour organisé de telles consultations populaires. Malheureusement, force est de constater que l'on n'a jamais tenu compte des résultats parce qu'ils allaient à l'encontre des souhaits des politiciens.
C'est peut-être la raison pour laquelle, selon un sondage d'opinion récent, 17 % seulement de la population attache de la valeur à la parole des politiciens.
L'intervenant a fait le compte des propositions de référendum ou de consultation propulaire déposées depuis le « Dimanche noir » de 1991 : à la Chambre des représentants, il n'y en a pas eu moins de 22. Demander une consultation populaire n'a par conséquent rien d'exceptionnel.
Il est frappant de constater, en effet, que tous les partis ont plaidé pour le référendum et la démocratie directe dans le cadre du renouveau politique. Mais au moment décisif, on s'aperçoit que tout cela n'a rien donné en pratique.
Le membre ajoute que, si les partisans du droit de vote pour les étrangers peuvent démontrer que celui-ci aurait un impact négatif sur l'intégration des allochtones dans notre pays, il changera immédiatement son vote.
On ne peut examiner la question du droit de vote des étrangers sans la relier à la problématique de l'intégration de ceux-ci dans la société.
L'intervenant considère que l'on doit s'appuyer sur l'expérience des pays voisins où le droit de vote des étrangers a déjà été introduit. Des études montrent par exemple que le Danemark, où le droit de vote des étrangers existe déjà depuis 9 ans, est devenu entre-temps l'un des pays les plus xénophobes.
L'expérience des Pays-Bas, aussi, est déconcertante. Une étude comparative de M. Ruud Koopmans, un sociologue reconnu en Allemagne, sur la politique d'intégration néerlandaise (avec droit de vote des immigrés depuis 1983) et la politique d'intégration allemande (sans droit de vote des immigrés) fait apparaître ce qui suit : « (...) la politique néerlandaise a dramatiquement échoué; tout indique même que notre situation serait meilleure avec pas de politique du tout qu'avec la politique qui a été menée (...)
La grande erreur est que la politique d'intégration est imprégnée d'une mentalité de cloisonnement : chaque groupe ethnique a son propre enseignement, sa propre station de radio, sa propre église. Aux Pays-Bas, il existe même des organes de participation pour les Turcs, les Européens du Sud, etc. Lors des élections locales auxquelles des immigrés participent, on distribue même des dépliants dans 126 langues ... ».
L'intervenant cite encore Ruud Koopmans : « Autre exemple du climat socio-économique : en Allemagne, en 1997, 23 % des bénéficiaires de l'aide sociale étaient des étrangers. Ceux qui trouvent que c'est beaucoup n'ont qu'à regarder ce qui se passe aux Pays-Bas : en 1998, 47 % de tous les bénéficiaires de l'aide sociale étaient des allochtones. Parmi les allochtones non occidentaux, pas moins de 20 % dépendaient de l'aide sociale, soit dix fois plus que pour les Néerlandais autochtones (WRR 2001 : 127). Dans l'enseignement, la situation n'est guère différente. En 1998, en Allemagne, 19 % des élèves étrangers ont quitté l'enseignement sans diplôme, contre 8 % pour les Allemands (« Zuwanderungskommission », 2001, p. 215). Doomernik (1998, p. 65) montre que chez les Néerlandais autochtones, ce pourcentage était identique à celui des Allemands (8 %). Aux Pays-Bas, pas moins de 35 % des jeunes Turcs et 39 % des Marocains ont quitté l'école sans diplôme en poche (...).
Enfin, il convient d'aborder aussi un thème particulièrement délicat, à savoir la criminalité. Tant aux Pays-Bas qu'en Allemagne, les minorités ethniques commettent nettement plus souvent des délits relevant du Code pénal que ce à quoi on devrait s'attendre en fonction du pourcentage de la population qu'ils représentent. Et là, une fois de plus, la différence est dramatique : en Allemagne, en 1997, 27 % de la population carcérale était de nationalité non allemande et, aux Pays-Bas, en 1998, pas moins de 53 % des détenus étaient nés en dehors des Pays-Bas (...) ».
L'expérience hollandaise montre donc clairement, selon M. Dedecker, que le droit de vote des immigrés ne garantit en aucune manière une meilleure intégration des allochtones.
Dans notre pays, on n'a même pas le courage de publier les chiffres. Officieusement, on dit pourtant bien que la Belgique se trouve dans la même situation que les Pays-Bas.
En conséquence, il est évident que le débat sur le droit de vote des immigrés doit être élargi à la question de l'intégration des allochtones.
L'auteur renvoie par ailleurs à un ouvrage de Mme Ayaan Hirsi Ali, réfugiée soudanaise et ex-membre du SPA néerlandais, sur la question de l'octroi du droit de vote aux immigrés qui est paru en 1983 : « (...) Selon cette approche, il faut que les nouveaux arrivants qui se sont installés dans la légalité reçoivent automatiquement les mêmes droits et obligations sociopolitiques que ceux dont jouissent les autochotones pour qu'ils puissent faire partie de la société néerlandaise. (...) L'exercice des droits civils et politiques est en fait très limité dans la pratique. Le taux de participation aux scrutins, par exemple, est affligeant.
Du fait qu'il s'intéressent peu à la société néerlandaise, les immigrés connaissent mal leurs droits. En outre, les droits formels sont paradoxalement assez utilisés dans la pratique à des fins contraires à l'intégration, c'est-à-dire pour permettre à une communauté de se démarquer de la société sur la base d'une croyance (ethnicité). L'exemple le plus tragique est celui de l'enseignement islamique subventionné par les pouvoirs publics.
La facilité avec laquelle on peut obtenir le droit aux prestations sociales présente aussi des inconvénients en ce sens que bien des immigrés se sont retrouvés dans une situation quasi permanente d'assistés sociaux. L'approche politico-juridique ne tient en outre pas compte du contexte dans lequel les musulmans vivent aux Pays-Bas. Elle se réfère à l'histoire telle qu'elle s'est déroulée ici et dans le cadre de laquelle on a vu se développer les droits civils et politiques au terme d'une lutte séculaire entre certains groupes.
Comme on n'a pas suffisamment bien mesuré la distance mentale entre les immigrés d'origine musulmane et la société néerlandaise, cette approche n'a jamais prêté attention aux inconvénients précités (...). Pour pouvoir survivre, les immigrés ne sont pas absolument obligés de s'adapter à la société néerlandaise. Le processus de modernisation peut dès lors se bloquer si les intéressés se complaisent dans une situation d'assisés sociaux évoluant en marge de la société et se cramponnent à des valeurs et à des normes qui entravent leur propre émancipation. (...)
Ce sont les exigences que la société d'accueil pose aux immigrés qui déterminent si ceux-ci doivent adopter ou abandonner certaines choses pour pouvoir bien s'intégrer. De plus, l'immigré peut prendre conscience de son niveau de développement et du fait qu'il faut aller de l'avant en se conformant aux valeurs et aux normes du pays d'accueil. C'est beaucoup plus intéressant que d'avoir le sentiment d'être privé de quelque chose. »
De fait, la préférence politique des immigrés dépend de leur situation socioéconomique, c'est-à-dire, le cas échéant, de leur statut d'assisté plutôt que de celui de citoyen intégré.
En tant que coauteur de la proposition de loi, M. Coveliers souhaite revenir sur les commentaires relatifs à l'utilisation du référendum dans une démocratie représentative. Il peut en effet paraître contradictoire de vouloir consulter le peuple alors que celui-ci a élu ses représentants.
Il importe de revenir à l'essence même de la démocratie : l'histoire de la démocratie prend sa source dans la société grecque. La démocratie n'y concernait toutefois qu'un petit groupe de personnes qui dirigeaient les choses ensemble. Comme les actes à poser étaient moins complexes que ceux qu'il faut poser de nos jours, une direction collective était chose possible.
On est passé assez rapidement au système romain, qui consistait à élire des représentants. Les Romains ont également prévu d'étendre le droit de vote aux personnes qui résidaient à Rome depuis un certain temps et qui auraient pu s'y intégrer. Dans une démocratie, il est sain de déléguer le pouvoir, mais aussi de le contrôler en permanence. La tâche de contrôle était dévolu au Parlement. Les mandats étaient limités et n'étaient attribués que pour une année.
Au Moyen-Âge, après la chute de l'Empire romain, le fonctionnement de la démocratie fut gravement perturbé. Le pouvoir était alors aux mains des seigneurs et toute opposition des citoyens était formellement exclue.
On est finalement sorti de cette période sombre pour la démocratie et on a réformé le système en accordant certains droits aux villes en échange du financement des armées.
Chaque fois qu'il a fallu prendre des décisions importantes et lourdes de conséquences pour la nature de la société, on a cherché à y associer le plus grand nombre. Ce fut le cas, par exemple, lorsqu'il fallut prendre la décision de déclarer la guerre. La démocratie n'exclut donc pas l'organisation de certains types d'interférence avec la population.
Dans la démocratie moderne, on constate que tous les partis politiques présentent des programmes. Tous les partis se sont déclarés favorables à la consultation populaire. Aujourd'hui aussi on organise des interférences avec la population. Les congrès des partis sont l'occasion pour ceux-ci de se confronter à leur électorat.
Les médias contribuent également à cette confrontation et permettent aux partis de sonder les sentiments des citoyens. Le rôle d'un homme ou d'une femme politique est évidemment de s'enquérir des sentiments et de l'opinion de ses électeurs. Voilà ce qu'est la vraie démocratie.
Lorsqu'une majorité écrasante de 80 % des Flamands s'oppose à l'octroi du droit de vote aux immigrés, il ne suffit pas de dire qu'ils se trompent. Les hommes et les femmes politiques ne peuvent pas se permettre d'imposer leur propre avis à la population. Raisonner autrement reviendrait à violer la démocratie.
Les sondages d'opinion sur le droit de vote des immigrés soulèvent de nombreuses contestations. Selon un sondage du « Belang van Limburg », il y a 80 % de « contre » et 20 % de « pour ». Le sondage du Soir, a donné sur un tout autre résultat.
Les sondages d'opinion ne valent toutefois que ce qu'ils valent. Selon M. Coveliers, la méthode sur laquelle ils sont basés est d'ailleurs critiquable, si bien qu'il convient de relativiser leurs résultats, comme les professeurs Billiet, Swyngedouw et Jacobs l'ont souligné dans la note qu'ils ont rédigée et qui a été publiée par « l'Instituut voor Sociaal et Politiek opinie-onderzoek » (ISPO) de la KUL, Bulletin 2002/45 : (traduction) « Nous pouvons affirmer avec quelque certitude, sur la base des données de l'ASP et de l'ISPO, qu'il est hautement risqué de supposer qu'il y aurait une nette majorité de partisans favorables ou une majorité d'opposants à l'octroi du droit de vote aux ressortissants étrangers pour les élections communales. »
Si les politiques jouent la carte de la démocratie auprès de la population, on devra bien constater que celle-ci s'oppose radicalement à une chose qui est présentée comme une discriminiation vis-à-vis de la population autochtone.
C'est la raison pour laquelle le membre est partisan d'une consultation populaire. Il est inconcevable que l'on puisse approuver l'organisation d'une telle consultation à propos de la Constitution européenne, alors qu'on s'y oppose pour ce qui est de l'octroi du vote des immigrés.
La conclusion des professeurs Billiet, Swyngedouw et Jacobs est claire : (traduction) « Les données de l'ISPO concernent la période de septembre 1999 à mars 2000. Les données de l'APS, elles, datent de la mi-2001. Il est donc impossible que le débat des derniers mois et semaines dans la presse sur le thème de l'octroi du droit de vote aux étrangers soit réfléchi dans les chiffres en question. Par ailleurs, il convient de rappeler qu'il est question en l'espèce d'un sondage d'opinion légal fondé sur des probabilités et resté quelquefois sans réponse. Il faut donc toujours tenir compte d'une certaine incertitude. L'opinion d'une grande partie de la population flamande sur la question reste une inconnue et elle peut encore être fortement influencée par le cours des débats. Nous pouvons affirmer avec une relative certitude, sur la base des données de l'APS et de l'ISPO, qu'il est hautement risqué de supposer qu'il y aurait une nette majorité de partisans ou d'opposants. Il appartiendra aux hommes et aux femmes politiques, indiquer la voie. »
M. Coveliers estime que, comme tous les partis ont annoncé, dans le cadre de leurs programmes, qu'ils consulteraient la population, et qu'ils se sont fait élire sur cette base, l'heure est venue pour eux de prouver, qu'ils étaient de bonne foi.
Il n'y a pas urgence, puisque le principe du droit de vote des immigrés dans l'hypothèse où il serait adopté ne serait applicable qu'à partir de 2006. Comment ose-t-on dès lors parler d'urgence ?
L'intervenant estime que sa proposition d'organiser une consultation populaire permettrait de résoudre le problème de manière constructive. Si elle était rejeté, il resterait toujours la proposition de loi spéciale de M. Dedecker qui vise à transférer la matière en question aux Régions (doc. Sénat, nº 3-293/1). Cette loi a toutefois été transmise à la commission des Affaires institutionnelles.
M. Wille constate qu'il existe des clivages entre tous les partis démocratiques sur les propositions à l'examen. Il espère que le débat se déroulera dans un climat correct et serein. Le gouvernement a laissé au Parlement le soin de se prononcer sur l'extension du droit de vote. Ce n'est pas le groupe auquel appartient l'intervenant qui a choisi d'entamer le débat à ce stade-ci.
Tout le monde sera d'accord pour dire qu'il existe deux possibilités d'accroître la participation des étrangers à la vie démocratique. La première consiste à faciliter l'acquisition de la nationalité. Cette possibilité présente l'avantage d'octroyer à l'étranger tous les droits politiques. C'est cette option qui a été retenue par le gouvernement précédent.
De nombreuses propositions ont déjà été déposées au cours de la législature précédente en vue de réaliser l'autre possibilité : l'octroi du droit de vote aux étrangers non européens pour les élections locales. À l'époque, cette possibilité n'a toutefois pas recueilli de majorité au Sénat. L'intervenant est dès lors curieux de voir si cette majorité pourra être trouvée durant cette législature.
La discussion sur le droit de vote comporte de nombreux aspects qui devront être examinés à fond :
droit de vote seul ou droit d'éligibilité également;
durée du séjour;
droit de vote aux élections communales seulement ou aussi aux élections provinciales;
conditions à remplir pour pouvoir exercer le droit de vote.
Pour ce qui est de la procédure à suivre, M. Wille estime qu'il faut d'abord examiner et voter sur les propositions relatives à l'organisation d'une consultation populaire. Le Sénat devra ensuite se pencher sur les propositions de loi spéciale visant à transférer aux Régions la compétence en matière de droit de vote.
Ce n'est que lorsque ces discussions seront terminées que l'on pourra passer à l'examen des propositions de loi qui visent à proprement parler à étendre le droit de vote. Cela nécessite un débat approfondi, au cours duquel il faudra examiner différents aspects, parmi lesquels la discrimination à l'égard de la population autochtone, et à l'occasion duquel tous les groupes politiques pourront déposer des amendements.
M. Wille estime que le Parlement doit prendre tout son temps pour cette discussion. C'est à juste titre que Mme De Schamphelaere a souligné, lors des discussions de la législature précédente sur le même sujet, qu'il était irresponsable, pour ce genre de question, de chercher à polariser le débat.
Enfin, M. Wille dit espérer que l'examen des propositions actuelles n'hypothéquera pas la discussion des autres propositions et projets.
M. Verreycken souligne que la discussion de ces propositions est un débat fondamental car il modifiera l'ordre social. En l'espace de quelques élections, en effet, un demi-million de personnes vont pouvoir voter sans la moindre obligation en contrepartie, comme la connaissance d'une des langues nationales ou la nécessité de s'intégrer dans le pays où elles habitent.
Cette conception du droit de vote lui fait penser aux États-nations du XIXe siècle, parmi lesquels figurait la Belgique, où la notion du « peuple » a été tout à fait évacuée et remplacée par celle de « citoyen ». Cela a inévitablement conduit à des constructions artificielles qui, par réaction, ont donné naissance au nationalisme populaire. Le nationalisme populaire prône clairement que tout peuple, partout dans le monde, a le droit de disposer de possibilités de développement maximales, dans le cadre de sa propre culture, chez lui.
Par souci de correction politique, on plaide aujourd'hui pour un creuset de cultures, un fusionnement de gens qui ne sont pas ensemble et qui feraient mieux de se développer indépendamment. Il n'y a toutefois pas de majorité en Flandre pour ce creuset. Si l'on en doute, pourquoi ne le demanderait-on pas tout simplement au citoyen flamand par le biais d'une consultation populaire ?
Lors de la discussion de propositions similaires au cours de la législature précédente, c'est Mme Nagy, ancienne présidente du groupe Écolo, qui a communautarisé le débat en déclarant que, si la Flandre ne voulait pas de ce droit de vote, la Wallonie se chargerait de l'imposer. L'intervenant ne voit toutefois aucune objection à ce que la matière en question soit soustraite à la compétence du législateur fédéral.
Son groupe est convaincu que l'octroi du droit de vote entraînera une distorsion du rapport entre les composants démographiques dans les conseils communaux. Il rappelle à cet égard l'audition avec Mme Brockman lors de la législature précédente, qui a déclaré que les 2,2 % d'étrangers de la ville d'Oslo détiennent 11 % des mandats au conseil communal parce qu'ils se sont organisés politiquement. Ils ne s'intègrent pas dans la vie norvégienne mais optimisent leur pouvoir politique en tirant un parti maximum de tous les moyens démocratiques et ont, de ce fait, un poids politique disproportionné par rapport à leur chiffre de population.
Il est important de garder cela à l'esprit. L'on ne saurait dès lors prétendre qu'il ne s'agit que d'un nombre insignifiant de personnes. Octroyer le droit de vote revient à ouvrir la porte de nos maisons communales à l'arabisation, ce dont l'intervenant n'a pas envie après la lutte séculaire que les Flamands et menée contre la francisation.
En ce qui concerne enfin la position du groupe SP.A-SPIRIT, M. Verreycken rappelle que M. Dirk Vandermaelen, président de ce groupe à la Chambre, a admis que la loi instaurant la procédure accélérée de naturalisation rendait les choses trop faciles pour les étrangers qui voulaient devenir Belges, et que son parti souhaitait revenir sur cette question. Ce que le SP.A-SPIRIT veut remettre en question d'un côté en supprimant la loi instaurant la procédure accélére de naturalisation, il entend le permettre de l'autre côté en octroyant le droit de vote. Le groupe de l'intervenant estime qu'il vaut mieux laisser les deux portes fermées.
De plus, M. Verreycken est d'avis qu'il est indispensable, pour les travaux de la commission, que celle-ci puisse disposer des données relatives au nombre exact d'étrangers qui devraient pouvoir bénéficier du droit de vote que l'on souhaite instaurer (1).
M. Brotcorne espère que ce débat aboutira de manière positive puisque ce sera un signe fort de notre démocratie à l'encontre de ceux qui ont choisi de vivre sur son sol.
Il rappelle que notre Constitution accorde, de manière générale, la même protection et les mêmes droits à tous ceux qui vivent sur le territoire de la Belgique. L'aboutissement des propositions qui sont déposées, auxquelles son groupe se joindra avec son propre texte, sera effectivement ce signal fort.
Pour son groupe, le droit de vote doit valoir pour les élections communales. En ce qui concerne les élections provinciales, il y a apparemment un problème de constitutionnalité.
Ce droit de vote s'accompagne nécessairement du droit d'éligibilité. Il ne peut pas être question de créer deux catégories de citoyens-électeurs. Les modalités de la proposition de son groupe ressemblent aux modalités proposées par la proposition de M. Mahoux et consorts (résidence de cinq ans) et vise à être aussi proche que possible du système applicable aux Belges. Il faut éviter, par exemple, que le vote ne soit plus obligatoire. Il faut donc trouver une formule qui permet juridiquement de se rapprocher de cette obligation de vote. C'est la raison pour laquelle son groupe propose une inscription automatique des étrangers qui figurent sur les registres de la population, les permettant toutefois de se faire rayer de la liste des électeurs. De cette façon, on instaure une présomption réfutable permettant ainsi le plus grand pas possible vers le droit de vote de tous ceux qui résident sur notre territoire.
Mme Durant estime que la présente discussion démontre que le débat est mûr. Elle propose dès lors que la commission travaille vite et bien. Sur base du débat très large qui a eu lieu au Sénat lors de la législature précédente, chaque membre de la commission pourra prendre sa responsabilité à cet égard.
Elle rappelle que le combat pour le suffrage universel est un combat qui est vieux comme la démocratie, qu'il a d'abord concerné ceux qui n'avaient pas de fortune et ceux qui n'avaient pas d'instruction. Puis a eu lieu le combat pour le droit de vote des femmes. Depuis le Traité de Maastricht, le droit de vote s'est étendu aux ressortissants européens. Ce processus ne doit être interrompu.
La proposition que son groupe a déposée avec Agalev depuis plusieurs législatures à la Chambre et au Sénat prévoit le droit de vote et d'éligibilité sur quelle base pourrait on interdire qu'une personne qui est apte à exercer le droit de vote ne serait pas apte à appliquer la politique ? à partir d'une durée de cinq ans sur le territoire et avec une présomption qui permet de considérer que ce droit de vote s'applique à tous les étrangers, sauf si eux-mêmes font la démarche de demander que ce ne soit pas le cas.
Une position simple et claire est nécessaire. Elle ne comprend pas que certains cherchent à allonger la démarche ou à rétrécir la portée du texte.
Le groupe politique de M. Van Peel, le CD&V, estime que la condition sine qua non pour pouvoir discuter de l'octroi du droit de vote à certaines catégories d'étrangers, est que l'on modifie la loi sur les naturalisations. Son groupe est convaincu qu'il faut considérer la volonté de s'intégrer comme une condition essentielle si l'on veut éviter tout sentiment xénophobe ou raciste dans notre société. La loi sur les naturalisations ne favorise pas cette volonté de s'intégrer, car elle a offert la nationalité belge à une masse de personnes qui ne manqueront pas d'être à la base de bien des problèmes sociaux.
Ce point de vue n'est pas seulement celui des membres de son groupe politique. Des membres de tous les partis flamands, y compris Agalev, ont décliné ce point de vue sur tous les tons, avant comme après les élections. Il est clair que cette loi donne très mauvaise conscience à certains. Son groupe demande que l'on commence par régler ce point avant d'aborder la question de l'octroi du droit de vote aux étrangers.
M. Van Peel s'étonne que l'accord de gouvernement laisse au Parlement le soin de régler lui-même cette question. Connaissant les rapports de force numériques dans cette matière, le VLD a donc opté sciemment pour une procédure longue et douloureuse, en sachant pertinement bien qu'il serait mis en minorité. M. Wille plaide même pour que l'on commence par la discussion des propositions relatives à la régionalisation de cette matière et à l'organisation d'une consultation populaire. À quelques mois des élections, le VLD va devoir expliquer à ses électeurs qu'il a essuyé une défaite au Parlement. Cela lui rappelle ce qui est arrivé à son parti à propos du dossier de l'avortement. Il serait toutefois fort étonné que le VLD ait décidé d'aller au combat sans armes.
Mme Defraigne expose que son groupe a déposé une proposition qui n'envisage que les élections communales. Cette approche s'inscrit dans une approche réaliste et humaine.
La proposition du MR est limitée au seul échelon communal et est également conditionnée par deux obligations. Seul le niveau communal est actuellement envisagé, parce que la commune représente l'institution politique la plus proche du citoyen, celle dans laquelle il peut le plus facilement et le plus rapidement s'impliquer.
Bien que les élections communales et provinciales aient été couplées, le MR considère néanmoins que la province constitue un échelon politique que, par sa dimension géographique autant que par son rôle politique, un étranger éprouve davantage de difficultés à cerner et appréhender.
Le MR ne soutient pas l'idée du droit d'éligibilité.
Comme première condition pour l'exercice du droit de vote le MR estime que l'étranger concerné doit avoir séjourné en Belgique de manière ininterrompue depuis 5 ans au moins avant son inscription sur la liste des électeurs.
En second lieu, l'octroi du droit de vote doit être conditionné par une déclaration expresse et préalable de l'intéressé qui doit s'engager à respecter notre Constitution, nos lois nationales et la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cet engagement n'a rien d'exceptionnel. Il est requis, rappelons-le, par l'article 21 du Code de la nationalité dont l'une des prérogatives essentielles est, précisément ... le droit de vote.
M. Lionel Vandenberghe insiste pour que le débat soit mené dans un climat serein. La question de l'octroi du droit de vote aux étrangers est devenu une question symbolique et les déclarations musclées qui sont faites dans la presse ne manquent pas de provoquer une certaine polarisation. Il souhaite dès lors que le débat ne s'étende pas au-delà du coeur du problème et que l'on ne traite pas de l'organisation de consultations populaires ni de la régionalisation de la matière en question.
Le coeur du problème, c'est la question de la participation et de la concrétisation des droits démocratiques de tous les habitants de notre pays.
M. Coveliers souhaite intervenir pour réfuter, au nom de son groupe politique, plusieurs arguments en faveur de l'octroi du droit de vote aux étrangers.
Il déclare tout d'abord que l'argument souvent utilisé du « No taxation without reprsentation » est totalement tiré de son contexte historique. C'était le slogan que brandissaient, au 18e siècle, les colons et les exilés, dans les colonies anglaises d'Amérique, dans la lutte qu'ils menèrent pour obtenir la nationalité et le droit de vote.
Il ajoute qu'il va de soi que les personnes qui bénéficient d'avantages sociaux en Belgique (indemnités de chômage, assurance-maladie, formation, pension, logement) paient des impôts sur les revenus qu'elles touchent.
Il souligne pour terminer qu'il ne peut être question de discrimination en la matière. Selon les normes de la CEDH, il y a discrimination lorsque des personnes qui se trouvent dans une même situation sont soumises à un traitement inégal. La question qui se pose est plutôt de savoir si une personne qui a la nationalité belge et qui ne peut y renoncer ni acquérir une autre nationalité sans perdre sa nationalité belge de départ ne serait pas victime d'une discrimination par rapport à un étranger qui refuserait d'acquérir la nationalité belge, mais qui jouirait du droit de vote. Il y aurait en l'espèce une discrimination manifeste aux dépens des personnes qui ont la nationalité belge.
M. Moureaux rappelle que le droit de vote figurait sur le programme électoral de son parti politique. Ceux qui ont voté pour son parti l'ont donc fait en pleine connaissance de cause. En ce qui concerne les grandes proclamations sur les majorités qui existeraient dans l'opinion publique, il renvoie les collègues aux sondages récents qui montrent que les conclusions que l'on pourrait tirer sont peut-être prématurées. Il estime surtout que l'opinion publique a besoin d'information sur ce sujet, vu les différents sondages qui se contredisent. Il ne faut ne pas tirer des conclusions trop rapidement.
L'orateur estime que la proposition du 15 octobre 2003 de M. Frank Vanhecke visant à instituer une consultation populaire sur le droit de vote des étrangers (doc. Sénat, nº 3-245/1) est irrecevable parce qu'elle est inconstitutionnelle. Il propose que la commission prenne clairement position pour ne pas retenir une proposition qui n'est pas conforme aux règles constitutionnelles.
Le membre signale que son groupe retire la partie de la proposition de M. Mahoux qui a trait à la participation des étrangers non européens aux élections provinciales. Bien que son groupe voudrait aller plus loin, il est important de respecter les limites constitutionnelles.
Son groupe veut avancer dans ce débat et est prêt à faire un pas dans la direction de la proposition déposée par le Mouvement Réformateur (MR), même s'il ne donne pas entièrement satisfaction.
Brièvement, il examine les points principaux de cette proposition.
1. La condition de cinq ans de résidence semble raisonnable à l'orateur.
2. Cependant, la déclaration sur le respect de la Constitution prévue par la proposition de loi de Mme Defraigne lui semble superfétatoire voire vexatoire. Logiquement, on peut supposer que tous ceux qui veulent participer à notre société souhaitent respecter nos principes démocratiques. Par souci de réalisme, l'orateur pourrait accepter cette condition comme étant des « fourches caudines sous lesquelles il faut passer » pour être émancipé.
3. Le problème de l'éligibilité revêt cependant un caractère plus délicat. Il convient surtout que les personnes installées durablement dans notre pays puissent le plus rapidement possible devenir des acteurs dans notre système électoral.
M. Moureaux souligne que, pour son groupe, il est important de pouvoir dire rapidement aux concitoyens, à partir du moment où ils sont durablement installés sur notre territoire, à partir du moment où ils vivent véritablement toutes les contraintes de la vie municipale et locale, qu'ils deviendront électeurs. C'est dans cet esprit que son groupe choisira la voie du réalisme, de la sagesse et de l'avancée.
M. Jean-Marie Dedecker renvoie à sa proposition de loi portant organisation d'une consultation populaire sur l'octroi du droit de vote au niveau communal aux résidents en Belgique qui ne sont pas des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne (doc. Sénat, nº 3-291/1).
Selon l'intervenant, le président américain Théodore Roosevelt se disait convaincu que l'initiative populaire et le référendum devaient être utilisés non pas pour détruire le système représentatif, mais pour le corriger lorsqu'il n'est plus représentatif.
L'intervenant cite l'économiste philosophe Jos Verhulst : « La seule chose que les citoyens puissent faire, c'est exercer leur droit de codécision en particpant aux élections qui ont lieu tous les quatre ans. Ainsi naît un système dans lequel la législation peut voter des lois qui ne bénéficient pas de l'appui de la majorité. La population a certes la faculté de ne pas réélire ceux qu'elle a élus au cours des dernières élections, mais elle ne dispose d'aucun moyen légal qui lui permette d'empêcher la prise de décisions dont la majorité des citoyens ne veut pas. »
Or, selon l'intervenant, ce point se trouve au centre du débat en cours.
À cet égard, M. J.-M. Dedecker fait référence à M. Louis Tobback qui a déclaré que celui qui redoute une majorité raciste doit s'en prendre non pas à la majorité, mais au racisme. M. Van Peel a aussi déclaré en 1997 que l'on peut organiser des referendums consultatifs à tous les niveaux d'administration.
Par ailleurs, l'intervenant se réjouit que Mmes De Roeck et Durant aient elles aussi déposé des propositions prévoyant l'organisation d'une consultation populaire. Il ose espérer qu'elles ne manqueront dès lors pas de soutenir sa proposition de consulter la population sur le sujet en question qui revêt une très grande importance.
L'intervenant plaide pour que l'on consacre le temps nécessaire à un débat de fond. Selon le sondage d'opinion que la « Gazet van Antwerpen » et « De Belang van Limburg » ont réalisé le 25 octobre 2003, 80 % de la population flamande seraient opposés à l'octroi du droit de vote aux immigrés. Il déclare qu'il serait inadmissible qu'une poignée de politiciens élus de l'autre côté de la frontière linguistique puisse prendre ces gens en otage. Voilà pourquoi il faut organiser une consultation populaire.
M. Coveliers précise que la proposition de loi déposée par M. Jean-Marie Dedecker prévoit une consultation populaire consultative. Il estime que l'on doit organiser une consultation populaire de manière à savoir ce que pense la population. Il est en effet inconcevable que la petite assemblée que forme la commission puisse décider seule de ce qui est bon pour la population. Celle-ci lui fait penser sérieusement aux despotes éclairés du 18e siècle.
Le membre renvoie aux divers sondages d'opinion qui ont déjà été organisés en la matière et aux commentaires circonstanciés que des sociologues ont consacrés à ceux-ci. Il est certain que le résultat d'un sondage d'opinion peut être conditionné par la manière de poser les questions. Il serait tout à fait normal, à son avis d'interroger la population sur le sujet pour clarifier les choses.
Le membre admet que l'on ne puisse pas organiser de référendum sur la question de l'octroi d'un droit de l'homme. Mais l'exercice du droit de vote par une personne qui ne possède pas la nationalité n'entre pas dans la sphère des droits de l'homme. À cet égard, il cite l'article 3 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui prévoit que « le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité ce qui n'en émane expressément ». Cet article pose clairement le principe de la nationalité. Le problème de l'octroi de vote est un problème de gestion de la société et il appartient par conséquent à la population de dire si elle accepte ou non que des étrangers puissent participer à l'organisation de la société.
L'intervenant déclare que le groupe politique dont il fait partie est opposé à l'octroi du droit de vote à des personnes qui refusent la nationalité. Voilà l'élément essentiel de la position de son groupe politique, le VLD.
Au cours des négociations gouvernementales de 1999, on a choisi entre deux choses d'octroyer le droit de vote aux étrangers ou simplifier la procédure permettant d'acquérir la nationalité belge. Comme il est devenu très facile d'acquérir la nationalité belge, il est totalement inacceptable que l'on accorde le droit de vote à ceux qui la refusent, qui n'ont pas pour souci d'être loyaux envers notre société et qui, au contraire, la rejettent, elle et les valeurs qu'elle représente.
Comment se fait-il que la communauté autochtone soit à ce point (80 % des Flamands) opposée à l'octroi du droit de vote tel qu'il est proposé ? Le professeur Étienne Vermeersch estime lui aussi, en tant que philosophe moral, que l'octroi du droit de vote tel qu'il est proposé est injustifiable.
La seconde question est celle de savoir si la population allochtone souhaite vraiment obtenir le droit de vote en question et si les allochtones qui possèdent déjà la nationalité belge souhaitent qu'on l'octroie aux allochtones qui refusent de demander la nationalité belge. Si tout étranger a le droit le plus strict de refuser la nationalité belge, il serait malvenu de la part de celui qui le fait de réclamer le droit de vote.
Aux termes de la déclaration gouvernementale du 10 juillet 2003, la question de l'octroi du droit de vote aux étrangers est une question qui doit être réglée en toute autonomie par le Parlement. M. Coveliers estime dès lors qu'on doit lui permettre de poser les questions qu'il souhaite poser et qu'il est en droit d'obtenir une réponse.
Plusieurs auteurs de propositions font régulièrement référence à ce qui se fait à l'étranger. M. Coveliers souligne néanmoins que, parmi les quinze États membres actuels et les dix futurs États membres de l'Union européenne, il n'y en a que quatre qui ont accordé le droit de vote aux étrangers. De plus, il ne faut pas tenir compte de l'Espagne, étant donné qu'elle applique le principe de réciprocité et que, jusqu'à présent, elle n'a signé qu'une seule convention bilatérale, plus précisément avec la Norvège.
La proposition de loi de M. Brotcorne (doc. Sénat, nº 3-274/1) prévoit que quiconque « réside régulièrement depuis plus de cinq ans en Belgique » peut exercer le droit de vote. Cela signifie-t-il qu'un étranger qui purge, dans notre pays, une peine de prison de dix ans et qui est libéré au bout de cinq ans peut réclamer le droit de vote ?
En outre, certaines dispositions des propositions déposées sont contraires à l'article 10 de la Constitution et on peut parler d'une discrimination manifeste. M. Coveliers renvoie en l'espèce à la jurisprudence de la Cour d'arbitrage, qui définit la notion de discrimination comme le fait de poursuivre un but légitime en causant un préjudice disproportionné à des personnes, alors qu'il existe d'autres moyens. Il existe un autre moyen d'obtenir le droit de vote : demander la nationalité.
On relève en outre une deuxième discrimination : l'étranger qui refuse la nationalité et ne veut pas exercer son droit de vote ne peut pas être sanctionné, alors que c'est le cas pour les Belges, qui sont soumis à l'obligation de voter. Enfin, il y a encore une troisième discrimination, à laquelle l'Espagne a remédié en instituant le principe de réciprocité. Pourquoi ne pas prévoir ce même principe dans la loi belge ?
Le rejet de la réciprocité implique que l'on juge une communauté supérieure à une autre. L'intervenant propose que si l'on accorde le droit de vote, cela ne se fasse qu'à la condition que les Belges disposent du même droit dans le pays d'origine.
Afin d'examiner ces objections juridiques, M. Coveliers propose de demander l'avis du Conseil d'État sur les propositions de loi déposées.
Et M. Coveliers de conclure que les propositions de loi relatives à l'octroi du droit de vote aux étrangers ne disposent pas d'une assise démocratique et que leur vote aurait des conséquences néfastes pour le statut social des étrangers qui refusent la nationalité belge. L'intervenant reconnaît le droit, pour les étrangers, de vivre et de travailler en Belgique et d'y faire usage de toutes les infrastructures existantes, mais il n'est pas disposé à leur accorder tous les avantages liés à la nationalité belge sans qu'ils acquièrent effectivement cette nationalité.
Le membre souhaite en outre organiser une consultation populaire sur cette question et examiner s'il ne serait pas préférable de transférer aux Régions la compétence en matière de droit de vote des immigrés (voir à ce propos la proposition de loi de MM. Dedecker et Coveliers (doc. Sénat, nº 3-291/1) et la proposition de loi spéciale de M. Jean-Marie Dedecker (doc. Sénat, nº 3-297/1).
M. Van Peel estime que le droit de vote des immigrés est un dossier symbolique. Il illustre la différence de mentalité entre la partie francophone et la partie néerlandophone du pays en ce qui concerne la façon de lutter contre la xénophobie et le racisme. C'est ce dernier élément qui préoccupe l'intervenant. D'après lui, il est établi qu'en Flandre, 80 % de la population est opposée à l'octroi du droit de vote aux immigrés, alors que dans la partie francophone du pays, il existe quasiment un consensus en faveur de cet octroi.
M. Van Peel ajoute que le groupe CD&V est fondamentalement favorable à la participation politique des immigrés, mais considère que le droit de vote des étrangers doit rester lié à l'acquisition de la nationalité belge. D'éventuelles exceptions à ce principe ne pourraient être discutées que si l'on modifie la loi
instaurant une procédure accélérée de naturalisation. Cette loi ne prévoit en effet aucune condition quant à la connaissance minimale de la langue et à la volonté de s'intégrer. Le délai d'un mois que la loi accorde aux parquets pour vérifier le passé judiciaire des candidats à la nationalité belge est insuffisant. M. Van Peel invite les autres membres de la commission à se prononcer sur cette corrélation.
L'intervenant note qu'il existe aussi à propos de cette loi instaurant une procédure accélérée de naturalisation une différence de mentalité entre les parties francophone et néerlandophone du pays, comparable au point de vue qu'elles affichent concernant le droit de vote des immigrés. Le VLD et le SP.A (par la bouche de son chef de groupe à la Chambre, M. Dirk Van der Maelen) souhaitent adapter la loi de naturalisation accélérée. Selon une déclaration qu'a faite M. Van der Maelen en avril 2003, la position du SP.A avait déjà été précisée dans les fiches d'argumentation du parti et dans l'ouvrage de M. Patrick Janssens, l'ancien président du SP.A.
L'intervenant souligne que le SP.A avait déjà déclaré le 27 août 2001, par la bouche de M. Patrick Janssens, qu'il voulait coupler l'octroi du droit de vote aux immigrés à une évaluation de la loi de naturalisation accélérée.
Toujours selon M. Van Peel, les partis politiques francophones ne souhaitent visiblement pas modifier cette loi.
Le membre invite une fois de plus la commission à mener un débat global sur la révision de la loi de naturalisation accélérée et à mettre sur la table, dans le cadre de celui-ci, la question de l'octroi du droit de vote aux immigrés et les points de vue flamands en la matière.
Mme Durant estime que nombre de pays européens ont réalisé des progrès importants en matière d'octroi du droit de vote aux étrangers.
L'oratrice considère que le référendum constitue un instrument qui vient uniquement en complément de la démocratie représentative.
Le membre fait remarquer que la déclaration expresse et préalable par laquelle l'étranger prend l'engagement de respecter nos droits et libertés fondamentales, requise par la proposition de loi de Mme Defraigne, revêt un caractère vexatoire.
L'oratrice signale que la directive du Conseil de l'Union européenne nº 94/80/CE du 19 décembre 1994 fixant les modalités de l'exercice du droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales pour les citoyens de l'Union résidant dans un État membre dont ils n'ont pas la nationalité, ne prévoit pas d'obligation à inclure la fonction de bourgmestre à l'éligibilité aux élections communales. Dès lors, il faut apporter des nuances en ce qui concerne cette fonction qui est revêtue de la souveraineté nationale.
Afin d'avancer, le membre propose de travailler éventuellement en deux étapes Dans un premier temps, on discute du droit de vote qui semble faire un certain consensus. Dans un second temps, on pourrait envisager de discuter sur le droit de l'éligibilité.
Le membre estime qu'il n'existe pas d'antinomie entre, d'une part, l'obtention de la nationalité et d'autre part, l'accès au vote.
Elle estime que la loi relative à l'acquisition de la nationalité ne doit pas être adaptée, mais elle ne rejette pas, a priori, un débat parlementaire distinct à ce sujet.
M. Van Hauthem n'est pas d'accord avec la déclaration de M. Moureaux selon laquelle la proposition de loi de M. Vanhecke visant à instituer une consultation populaire sur le droit de vote des étrangers (doc. Sénat, n 3-245/1) serait irrecevable, parce qu'inconstitutionnelle. L'intervenant souligne que la consultation populaire prévue par la proposition de loi n'est pas contraire à la Constitution, puisqu'elle n'aurait aucune valeur contraignante.
Il constate en outre que plusieurs ténors politiques des partis de la majorité ont manifesté explicitement leur préférence pour un referendum, notamment à propos du projet de Constitution européenne.
Mme Pehlivan souhaite supprimer la discrimination entre les citoyens qui sont ressortissants des États membres de l'Union européenne et ceux qui ne le sont pas, en permettant à tous les habitants de participer à notre démocratie, quelle que soit leur origine. L'intervenante estime que, comme d'autres partis politiques proposent de permettre aux Belges qui résident à l'étranger de participer aux élections régionales et européennes belges, il convient d'offir également cette possibilité aux personnes qui résident en Belgique mais qui ne possèdent pas la nationalité belge.
Elle ajoute qu'elle souhaite que ce débat soit clôturé dès que possible et qu'elle pourrait admettre fût-ce à contre-coeur le principe de la déclaration par laquelle l'étranger souscrirait aux valeurs démocratiques de notre pays telle qu'elle est prévue dans la proposition de loi de Mme Defraigne (doc. Sénat, nº 3-275/1).
Mme Pehlivan ne souhaite pas que le débat sur les propositions de loi concernant le droit de vote des immigrés soit lié à un débat sur la législation relative à la naturalisation. Elle estime que le choix de la nationalité est une chose très personnelle.
M. Brotcorne se dit étonné de la position de M. Moureaux qui semble pouvoir accepter la proposition de Mme Defraigne. L'orateur estime que la déclaration sur le respect de la Constitution prévue par cette proposition de loi, revêt un caractère superfétatoire voire vexatoire. Les étrangers qui ne souhaitent pas souscrire à cet engagement risquent d'être qualifiés de personnes qui ne peuvent pas accepter nos valeurs démocratiques.
Selon l'intervenant, cela va à l'encontre des motivations qui sous-tendent les propositions de loi en la matière.
Mme Defraigne se réjouit du fait que M. Moureaux puisse se rallier aux conditions posées par sa proposition de loi.
L'oratrice estime que la déclaration prévue par sa proposition de loi n'a rien d'exceptionnel parce qu'il est requis par l'article 21 du Code de la nationalité, dont une des prérogatives essentielles est précisément le droit de vote.
M. Vankrunkelsven partage le point de vue de M. Van Peel selon lequel la discussion sur l'octroi du droit de vote aux immigrés devrait s'inscrire dans un débat plus large sur l'intégration, l'engagement social et la nationalité.
L'orateur souhaiterait dissocier la question du droit de vote à l'échelon local de la problématique de l'acquisition de la nationalité. Les immigrés font partie de la communauté locale et il importe donc de promouvoir leur intégration, qu'ils aient ou non la nationalité belge. A contrario, le fait de donner le droit de vote aux personnes de nationalité belge qui résident à l'étranger est considéré comme une évidence. Une telle absurdité rend plus que jamais indispensable la dissociation entre la question de l'octroi du droit de vote à l'échelon local et la problématique de l'acquisition de la nationalité.
L'intervenant estime qu'il y aurait lieu de procéder dans le même temps, à une adaptation de la loi de naturalisation accélérée.
M. Verreycken fait référence à une étude comparative du 24 octobre 2003 de la bibliothèque du Parlement fédéral sur le droit de vote et d'éligibilité pour les non-ressortissants de l'Union européenne aux élections communales (Dossiers documentaires, nº 82). Il estime que les membres de la commission feraient bien de commencer par examiner attentivement cette étude.
L'intervenant estime qu'il faut en tout cas consulter la population pour pouvoir se faire un sondage objectif de l'opinion publique. Cela permettra de confronter à la réalité les résultats de plusieurs sondages d'opinion contradictoires relatifs au droit de vote des étrangers.
L'intervenant estime que, si l'on refuse l'idée d'organiser une consultation populaire, on devra demander l'avis du Conseil d'État, comme l'ont déjà proposé MM. Van Hauthem et Coveliers.
Mme de Schamphelaere constate que l'on voit se développer, au sein de la majorité, un consensus autour de la proposition de Mme Defraigne. Elle demande si le SP.A-SPIRIT est disposé à discuter des effets négatifs de la loi sur la nationalité.
Mme Geerts répond que le SP.A n'est pas un parti antidémocratique. La loi sur la nationalité est un sujet dont on peut discuter mais il faut d'abord en terminer avec le dossier à l'examen.
Mme Leduc estime qu'il convient de mener le débat en commission de manière plus sereine. Elle conclut également des divers sondages que les avis sur le droit de vote des étrangers sont différents dans la région de langue française et dans la région de langue néerlandaise. Elle plaide en outre pour un respect mutuel entre les allochtones et les autochtones. Elle rappelle que le législateur a lui-même choisi de faciliter l'acquisition de la nationalité pour favoriser l'intégration des immigrés. Elle souhaite dès lors qu'on ne renonce pas au lien entre le droit de vote et la nationalité.
M. Coveliers est d'avis qu'il faut organiser une série d'auditions pour que la commission soit informée en détail de l'octroi du droit de vote aux étrangers. Le professeur Étienne Vermeersch, par exemple, a publié un article intéressant sur le droit de vote en tant que prétendu droit de l'homme. Le docteur Osnanaglou a également réalisé une étude remarquable sur le danger de la sécularisation. Enfin, M. Ruud Koopmans a comparé en détail les politiques d'intégration néerlandaise et allemande. Une audition avec sa participation sur l'échec de l'octroi du droit de vote aux étrangers comme moyen d'intégration aux Pays-Bas serait très instructive.
Il ne fait aucun doute qu'une évolution politique s'est produite depuis la législature précédente. Par conséquent, on ne saurait se baser uniquement sur les auditions de la législature 1999-2003. Qui plus est, nous avons à présent entamé une nouvelle législature, avec de nouveaux commissaires, de sorte qu'il n'est pas possible de se référer en permanence à ce que l'on a fait par le passé.
Le président met aux voix la proposition visant à organiser des auditions : elle est rejetée par 10 voix contre 7.
Mme Leduc estime que la commission n'est pas suffisamment informée de la portée des chiffres qui ont été transmis par le ministre de l'Intérieur (2). Le nombre de ressortissants non européens est à présent connu et elle constate qu'il y a une disparité entre la Wallonie et la Flandre.
Cependant, selon l'intervenante, ces chiffres ne permettent pas de savoir quelles personnes ont été encouragées à avoir recours à la procédure accélérée de naturalisation. C'est pourquoi elle a adressé une lettre au ministre de l'Intérieur, afin que l'on puisse déterminer combien de personnes ont demandé la nationalité belge, combien de dossiers de naturalisation sont à l'examen par commune et combien de refus il y a eu.
Selon elle, la discussion et le vote final sur les propositions de loi ne peuvent avoir lieu avant que l'on ne soit fixé à ce sujet.
Le président prend acte de la demande de Mme Leduc, mais estime qu'elle n'empêche pas de poursuivre les travaux. Il faut respecter l'ordre du jour tel qu'il a été approuvé.
Madame Vienne, lorsqu'elle entend le ton des débats, ne peut s'empêcher de repenser au débat qui eut lieu lorsqu'il fut question du droit de vote des femmes. Elle ne partage nullement l'opinion selon laquelle les étrangers voteraient mal, si ce droit leur était reconnu.
Sur la question de la consultation populaire, l'intervenante se dit très méfiante parce que c'est la porte ouverte au règne de la démagogie. Le VLD se pose soudain en défenseur du prolétariat, ce qui ne manque pas de l'étonner. La consultation populaire ne doit pas être appliquée dans les matières relatives aux droits de l'homme et à l'éthique. Si tel avait été le cas, le droit de vote des femmes n'aurait jamais été reconnu, encore moins le droit à l'avortement et l'abolition de la peine de mort.
C'est une responsabilité politique des élus de faire avancer la société et, à un moment donné, sur le plan éthique et des droits de l'homme, d'aller au delà de ce que l'opinion publique pourrait approuver.
Concernant l'exclusion sociale, l'intervenante considère que l'illettrisme, l'exclusion sociale et l'insertion socio-professionnelle n'ont strictement rien à voir avec le droit de vote. Ces phénomènes dépendent avant tout des variables économiques difficiles propres à notre pays.
Le fait que l'on puisse penser que parmi les populations qui vivent une situation d'exclusion, on votera plus pour un parti que pour un autre lui semble peu crédible. À l'inverse, la frustration ressentie par nos concitoyens les poussera à voter vers des partis extrémistes et il y a un réel travail à faire à cet égard.
Ce qui menace le plus les populations étrangères de notre pays, c'est le repli sur leur communauté. Il est clair que le droit de vote sera le facteur par excellence qui contrecarrera ce repli. Leur permettre de donner leur avis sur la vie politique de leur commune participera de manière fondamentale à l'insertion des étrangers.
M. Guilbert est d'avis que si on suggère une consultation de la population, comme le fait M. Jean-Marie Dedecker, il faut rester logique : faire une consultation populaire, c'est aussi interroger la population concernée. Il lui semble dés lors indiqué de demander aux étrangers ce qu'ils pensent de cette problématique. Le droit de vote est un droit fondamental et se réfugier derrière une consultation populaire et des sondages difficilement quantifiables ne mènera à rien. Le Parlement doit jouer son rôle et prendre ses responsabilités. Le débat est mûr et aucune manoeuvre de retardement ne pourra l'influencer.
En 1980, la France a aboli la peine de mort alors que la population y était opposée. À l'heure actuelle, plus aucun parti politique démocratique n'oserait mettre en doute la pertinence de cette décision.
Le rôle du Parlement est d'élever la démocratie dans la voie du progrès plutôt que de courir derrière l'opinion publique. Plus il y a de citoyens participant à la vie politique d'un État, plus il y a de démocratie.
Quand bien même le droit de vote des étrangers ne résoudra pas tous les problèmes d'intégration des étrangers, il pourra y participer de manière active.
M. Van Hauthem plaide pour que l'on conduise d'abord à terme la discussion des deux propositions de loi visant à instituer une consultation populaire sur le droit de vote des étrangers (doc. Sénat, nºs 3-245/1 et 3-291/1) en commission, mais aussi en séance plénière du Sénat.
En effet, si une des deux propositions était adoptée, l'examen des différentes propositions de loi visant à accorder le droit de vote aux étrangers n'aurait plus guère de sens.
M. Hugo Vandenberghe fustige la façon dont le débat parlementaire a été mené jusqu'à présent sur ce sujet et met en garde quant à la manière dont il sera perçu. Celle-ci ne contribuera certainement pas à réduire la fracture entre les citoyens et la politique, selon l'intervenant.
De plus, on ne doit pas perdre de vue que les discussions relatives à la Constitution priment les discussions concernant la loi ordinaire. La déclaration de révision de la Constitution du 4 avril 2003 (Moniteur belge du 10 avril 2003) permet d'instaurer le référendum pour les Régions et les communes. Demander l'organisation d'une consultation populaire n'a rien de théorique et encore moins de dilatoire, contrairement à ce que prétendent certains membres des groupes politiques de la majorité. Qui plus est, l'intervenant renvoie à l'article 58 de la Constitution, qui prévoit explicitement que le parlementaire bénéficie d'une immunité absolue. Cet article signifie que le débat démocratique n'a de sens que si tous les arguments peuvent être présentés.
M. Hugo Vandenberghe plaide lui aussi pour que l'on ouvre ce débat pour en faire un débat sur la société et l'intégration.
En outre, il souligne le danger qu'il y aurait à ne pas tenir compte de l'opinion publique de l'une des deux Régions du pays, à savoir l'opinion publique flamande, qui est opposée à l'octroi du droit de vote aux étrangers.
Actuellement, 825 000 étrangers résident dans notre pays. C'est 250 000 de plus qu'aux Pays-Bas. La réalité sociologique exige un débat plus large que celui qui est mené actuellement en commission, selon M. Hugo Vandenberghe.
M. Moureaux relève que les propositions du VLD, du CD&V et du Vlaams Blok pourraient avoir pour effet de paralyser la démocratie parlementaire si, parallèlement à toute proposition ou à tout projet de loi, on déposait une proposition de loi visant à organiser une consultation populaire sur la matière concernée.
M. Verreycken ne comprend pas pourquoi M. Moureaux craint l'organisation d'une consultation populaire sérieuse. M. Moureaux ne fait-il pas confiance aux électeurs ? L'intervenant souligne en outre que la proposition de loi de M. Vanhecke et consorts et la proposition de loi de M. Jean-Marie Dedecker et Coveliers visent non pas à instituer un référendum contraignant, mais bien une consultation populaire ayant valeur d'avis. En d'autres termes, les deux propositions de loi cadrent parfaitement dans le contexte constitutionnel actuel.
M. Verreycken se rallie par conséquent à la méthode de travail proposée par MM. Van Hauthem et Jean-Marie Dedecker, qui consiste à examiner d'abord les propositions de loi relatives à la consultation populaire.
La méthode de travail proposée par les membres du VLD, du CD&V et du Vlaams Blok est rejetée par 10 voix contre 7.
2.1. M. Germeaux
M. Germeaux considère que l'émoi que la présente proposition de loi a suscité en commission est le reflet de celui qu'elle suscite aussi dans la société. Au fond, il ne s'agit d'ailleurs pas de l'octroi du droit de vote aux étrangers, mais de l'octroi du droit de vote aux non-européens qui refusent d'adopter la nationalité belge.
L'intervenant a l'impression qu'il est impossible pour l'instant de débattre sereinement de cette question. Tant que la sérénité ne sera pas revenue, ce point ne sera en fait pas mûr pour que l'on en débatte. Si l'intention de certains est de soumettre rapidement cette proposition de loi au vote, le débat passera à côté de l'essence du problème, qui n'est pas la question du droit de vote ou de l'obligation de vote, mais bien celle de la participation.
En conséquence, son intervention doit être considérée comme un témoignage plutôt que comme une prise de position en la matière. En tant que médecin généraliste dans un quartier dont 98 % des habitants sont d'origine non-européenne, il peut témoigner du fait que la participation fonctionne, tandis que des artifices tels que le droit de vote sont inopérants. Au sein d'une société, il existe d'autres moyens d'encourager la participation que le simple octroi d'un privilège à un groupe de personnes. C'est une discrimination positive qui ne résout rien, bien au contraire.
Trop souvent, le débat s'est focalisé sur un groupe particulier de notre société, celui des non-européens, quel que soit leur pays d'origine, qui refusent d'acquérir la nationalité belge. Ceux qui ne montrent aucun signe d'une quelconque volonté de participation au sein de notre société ne doivent cependant pas bénéficier d'une discrimination positive, d'autant qu'en fin de compte, ils ne sont de toute façon pas intéressés.
L'intervenant cite l'exemple de la ville de Genk. Dans les années 20, cette commune comptait 2 000 habitants alors qu'elle en compte aujourd'hui 63 000, dont 40 % de Belges « sur papier », 30 à 35 % d'autochtones et 20 à 22 % d'allochtones de 79 nationalités différents. Or, dans cette ville, la participation fonctionne.
L'intervenant est convaincu que l'octroi du droit de vote aux résidents belges de nationalité extra-européenne ne résoudra pas le problème lié à leur manque d'intégration et de participation à la vie sociale. Cette forme de discrimination positive donne même un signal erroné à ce groupe de population. Tout d'abord, la proposition de loi considère ce droit de vote comme une évidence. L'étranger intéressé qui souhaite participer à la vie politique devrait cependant accomplir lui-même les démarches nécessaires en acquérant la nationalité belge par naturalisation. De plus, l'octroi du bénéficie du droit de vote n'est subordonné à aucun autre « incitant ». L'intervenant attend ainsi des intéressés qu'ils maîtrisent la langue de la région dans laquelle ils résident. Peut-être la différence d'attitude de part et d'autre de la frontière linguistique sur la question de l'octroi du droit de vote est-elle due au fait que le néerlandais est plus difficile à apprendre que le français.
En réaction aux propos de Mme Bouarfa qui conteste cette dernière affirmation, M. Germeaux fait remarquer que les immigrés de la première génération en tout cas n'ont pas réussi à maîtriser le néerlandais. C'est une des causes de la méfiance entre la population autochtone et la population allochtone.
L'expérience que l'intervenant a acquise dans la ville multiculturelle de Genk lui a appris que le modèle qui y est appliqué pour résoudre les problèmes de société donne des résultats. Ce modèle repose sur deux piliers : le travail de proximité et le recours intensif à la procédure de naturalisation. Depuis 1991, à Genk, plus de 8 800 personnes ont acquis la nationalité belge par le biais de la naturalisation. Il s'agit certes, dans une très large majorité, d'immigrés de la deuxième et de la troisième génération qui s'étaient déjà bien intégrés, mais, en demandant la nationalité belge, ils ont malgré tout fourni eux-mêmes la preuve concrète de leur intégration.
L'intervenant constate que, par analogie avec les règles applicables aux citoyens de l'Union européenne qui n'ont pas la nationalité belge, certains revendiquent le droit de s'inscrire sur les listes électorales pour les non-ressortissants de l'Union européenne résidant en Belgique, tout en ne souhaitant pas soumettre ceux-ci, comme les ressortissants belges, à l'obligation de se présenter au bureau de vote.
Afin d'illustrer sa thèse selon laquelle l'octroi du droit de vote à ces conditions ne permettra pas de remédier aux problèmes d'intégration des ressortissants non européens, l'intervenant signale le degré de participation extrêmement faible des deux catégories de population précitées aux deux consultations populaires communales qui ont été organisées à Genk en 1996 et en 2001. Le même constat avait été fait lors des élections communales du 8 octobre 2000 auxquelles les ressortissants de l'Union européenne ont pu participer.
M. Mahoux objecte que la réglementation européenne interdit d'imposer l'obligation de se présenter au bureau de vote. C'est pourquoi on a choisi la procédure prévoyant que les citoyens de l'Union européenne qui n'ont pas la nationalité belge ne sont soumis à cette obligation que dans la mesure où ils ont manifesté la volonté d'exercer leur droit de vote.
M. Germeaux ne conteste pas cela. Il estime cependant que la clé proposée par la présente proposition de loi pour résoudre la problématique de l'intégration des étrangers non européens n'ouvrira pas la porte à une cohabitation harmonieuse des divers groupes de population.
Tout d'abord, l'octroi du droit de vote aux ressortissants non européens ne les rapprochera pas d'une participation sociale à part entière. En effet, la pratique a montré que cet instrument n'était que peu utilisé, voire qu'il ne l'était pas du tout.
Ensuite, l'intervenant craint que l'on n'assiste à un nouveau déchirement de la Belgique à la frontière linguistique si la présente proposition de loi devait être adoptée contre la volonté d'une majorité de la population. C'est la raison pour laquelle il se dit personnellement opposé à une consultation populaire, qui risquerait d'empoisonner le débat durant des années, voire des décennies, et qui ferait dès lors obstacle à la recherche d'une solution au problème de l'intégration dans un proche avenir.
M. Germeaux ne comprend dès lors pas l'empressement avec lequel d'aucuns souhaitent faire approuver le droit de vote des immigrés par le Parlement. Ils risquent d'obtenir l'effet contraire, à savoir la marginalisation d'un groupe de population déjà vulnérable, dont l'émancipation pourrait être encouragée par d'autres voies. L'octroi du droit de vote aux ressortissants non européens n'améliorera en tout cas pas la position précaire qui est la leur sur le marché du travail, bien au contraire. Ainsi, la vague de licenciements qui a touché l'usine Ford à Genk a provoqué une grande inquiétude. Tout le monde se demande qui sera licencié. Ce n'est pas en octroyant le droit de vote à certains groupes de population que l'on résoudra la précarité à laquelle ils sont confrontés. Leur vulnérabilité est due à d'autres motifs, qui nécessitent un traitement spécifique que la majorité de la population accepte.
Le Parlement doit par conséquent faire preuve de circonspection lorsqu'il traite de droits, comme le droit de vote, qui sont perçus comme sensibles par les Flamands et il doit dès lors se garder de vouloir imposer purement et simplement les propositions de loi en la matière. Cette façon de faire risque en effet de perturber le dialogue à l'intérieur des Communautés et entre elles dans les années à venir. Cela vaut-il vraiment la peine d'indisposer la majorité des Flamands à l'égard de la population allochtone pour une mesure qui ne profiterait qu'à 152 000 peronnes ?
M. Germeaux plaide dès lors pour que l'on examine globalement cette question. Ainsi faudrait-il se demander pourquoi une grande majorité de la population réagit de manière si émotionnelle contre l'octroi du droit de vote à un groupe limité de personnes ? Des efforts devront être consentis dans de nombreux domaines pour parvenir à une société vivable pour toutes les catégories de population. Le droit de vote ne peut pas être un but en l'espèce, mais seulement la conséquence.
L'intervenant conclut que l'octroi du droit de vote aux ressortissants non européens résidant en Belgique pourrait être, à terme, une motivation positive, mais seulement si on l'assortit de conditions bien définies. Le fait est que les obligations de résultat produisent le meilleur résultat.
M. Germeaux regrette qu'en cas d'octroi du droit de vote, le débat ne doive être considéré comme clos.
L'examen des autres aspects du problème de l'intégration est ainsi renvoyé aux calendes grecques, ce qui représente, pour M. Germeaux, une occasion manquée.
2.2. Madame Lizin
Mme Lizin trouve normal que la proposition en discussion suscite tant d'inquiétude dans la société.
L'on assiste en effet à une reformulation de la notion de citoyenneté dans la perspective d'un monde moderne, dans lequel l'accession à la citoyenneté implique la mondialisation et la mixité de la société.
Elle admire les hommes politiques qui, dans ces circonstances ont montré un grand courage.
Elle pense d'abord à M. François Mitterrand qui, à un mois des élections, a déclaré vouloir abolir la peine de mort, alors qu'une majorité des Français n'en voulait pas. Il a quand même été élu et a eu raison de ce fait. Ethiquement, il a ainsi provoqué une évolution énorme.
Elle a ensuite admiré le point de vue de M. Jean-Luc Dehaene, ancien premier ministre, qui, au journal « Standaard », a fait un vibrant appel pour le droit de vote des étrangers.
Par contre, a-t-elle noté, c'est suite à une demande insistante de M. Eyskens (CVP) que l'on a scindé à Maestricht le droit de vote des européens de celui des non-européens, alors que différents pays étaient prêts à accepter les deux.
C'est ainsi que le droit de vote a été refusé une première fois. Il l'a été une deuxième fois pendant la législature fédérale précédente. L'on assiste actuellement à une nouvelle tentative qui est une troisième vague dans une même lame de fond, et elle espère que ce sera la bonne.
2.3. Madame De Schamphelaere
Mme De Schamphelaere a trouvé intéressant l'exposé de M. Germeaux.
Il a donné un bon aperçu des diverses formes que peut prendre la volonté de s'intégrer et des différentes approches politiques.
L'intervenante constate que le VLD plaide contre le droit de vote. Mais si ce parti se souciait réellement de l'enjeu, il aurait dû savoir que le défi était aussi grand, qu'il avait de ce fait pour mission de faire préparer au sein de la coalition un programme dans ce sens et d'y consacrer un débat approfondi.
En ne le faisant pas, selon Mme De Schamphelaere, il démontre son irresponsabilité.
Lorsqu'on est confronté à la question de savoir comment intégrer ces nombreux étrangers, c'est manquer de sagesse que de permettre une polarisation politique, en soutenant une coalition dont une partie n'accepte pas les options en question.
L'intervenante déplore cet état de choses.
Elle n'est bien entendu pas non plus partisane de villes avec des enclaves, ni d'un marché du travail non intégré, et elle est favorable à une politique d'intégration prônant le rapprochement entre les immigrés et les autochtones.
Le pugilat auquel on assiste aujourd'hui au Parlement laisse en fin de compte les immigrés perdants.
On aurait mieux fait de démontrer qu'un effort positif eût été préférable par le biais du système d'acquisition de la nationalité belge.
Mme De Schamphelaere estime qu'en agissant comme il le fait, le VLD est doublement perdant, d'abord en ayant accepté la nouvelle loi sur la naturalisation accélérée et ensuite en ne combattant pas clairement la polarisation.
Pourtant, le détour par la naturalisation pour acquérir le droit de vote n'a rien de démesuré.
Le système est d'une simplicité extrême : il suffit d'avoir séjourné pendant cinq années et de faire une déclaration d'observance des lois du peuple belge.
L'intervenante ne comprend pas l'impossibilité psychologique qu'invoquent les opposants à ce détour pour ne pas devoir faire le pas.
Pourquoi ne peut-on pas examiner les autres pistes susceptibles de mener à l'intégration ?
À ce propos, l'intervenante se pose des questions au sujet de la proposition de loi de Mmes Defraigne et Derbaki Sbaï (doc. Sénat, nº 3-275/1).
En fait, le MR exige que soient remplies les mêmes conditions que pour la naturalisation, mais avec une durée de résidence plus élevée pour le droit de vote ordinaire que pour la naturalisation.
C'est contradictoire dans la mesure où il est plus aisé, pour un étranger, d'obtenir la naturalisation que le droit de vote.
Du fait de la loi sur la naturalisation accélérée, la nationalité est devenue une notion très abstraite.
Par ailleurs, l'intervenante voudrait que l'on clarifie encore un point. On a communiqué aux membres, dans une circulaire, un chiffre de 154 000 étrangers, qui serait le nombre des étrangers qui auraient le droit de vote aux élections communales de 2006. Ce nombre est-il basé sur la proposition de loi de M. Mahoux et consorts ou sur celle de Mmes Defraigne et Derbaki Sbaï ?
Le président communique que ce chiffre repose sur une hypothèse de cinq années de présence en Belgique depuis le 1er août 2001.
L'intervenante conclut en déclarant qu'elle est favorable à l'intégration, mais qu'il faut démontrer une certaine volonté de s'intégrer, et que le meilleur moyen de le faire est d'acquérir la naturalisation.
2.4. M. Roelants du Vivier
M. Roelants du Vivier a deux réflexions : l'une historique, l'autre personnelle.
La question du vote des étrangers est déjà très ancienne.
L'émotion qu'elle suscite provient selon lui de la confusion entre citoyenneté et nationalité.
À la fin du XVIIIe siècle, lors de la Convention, des personnes ont été élues comme membres de ladite Convention alors qu'elles étaient originaires des Amériques, comme Thomas Paine, de Prusse ou encore de ce qui est actuellement l'Italie.
Le concept de citoyenneté avait prévalu, en ce sens que ceux qui adhéraient à la république étaient citoyens. Cette qualité de citoyen faisait qu'on devenait électeur éligible.
Plus tard, et durant tout le XIXe, le concept d'électeur éligible a été lié au concept de nationalité.
Avec la création de l'Union européenne, il y a eu une évolution remarquable parce qu'une nouvelle notion de citoyenneté européenne s'est faite jour. Il fut créé un espace démocratique propre à un ensemble de pays. Cet espace peut encore s'élargir.
Quand à son expérience personnelle, il a ressenti comme un problème le fait que, lorsqu'il habitait en France, il ne lui était pas possible de voter dans son pays d'acceuil, ni dans son propre pays. C'est la raison pour laquelle il a déposé une proposition afin de permettre aux Belges vivant à l'étranger de pouvoir voter en Belgique (doc. Sénat, nº 3-284/1).
Par ailleurs il a ressenti ce que représentait l'interdiction de voter dans le pays où il vivait.
Il s'est dès lors posé la question de savoir s'il était scandaleux que l'étranger participe aux élections législatives de son pays d'origine par fidélité, et aux élections communales de son pays d'acceuil par intérêt pour la vie politique et communale de son pays d'implantation.
Il faut, selon lui, concilier les deux.
Ce n'est pas par hasard que l'on a choisi le niveau local.
2.5. Mme Geerts
Mme Geerts observe que dans son intervention, M. Germeaux exprimait un souci de bonne cohabitation entre tous. Beaucoup de solutions sont envisageables et le membre a reconnu que l'octroi du droit de vote pourrait être un incitant positif. Pouvons-nous dès lors négliger un tel incitant ? Ne devons-nous pas mettre en oeuvre tous les moyens à notre disposition pour favoriser la cohabitation ?
2.6. Mme Durant
Mme Durant rappelle que la valeur symbolique de l'octroi du droit de vote aux étrangers est précisément la raison pour laquelle le débat est si intense. Il faut faire preuve de pédagogie au quotidien, notamment en impliquant les élus locaux. Dans certaines communes, des quartiers habités par des étrangers sont complètement délaissés par les élus locaux. Si cette population peut voter aux élections communales, les élus seront incités à la prendre en considération.
Il ne s'agit pas d'une victoire pour les immigrés, mais simplement de la traduction d'une nouvelle vague, d'un élargissement de l'assise de la démocratie.
Au lieu de la déclaration d'intégration défendue par le MR, Mme Durant propose d'ajouter sur la convocation électorale de tous les électeurs, une phrase engageant à respecter la Constitution, les lois du peuple belge, la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cette proposition devrait rencontrer le souhait de certains, tout en n'ayant pas de caractère vexatoire puisqu'elle s'appliquerait à tout électeur.
2.7. M. Delacroix
M. Delacroix estime que l'opposition entre le nord et le sud du pays présentée dans le débat ne correspond pas du tout à la réalité. Les sondages ont donné des résultats très divers, certes, mais même en se basant sur celui qui a dégagé la tendance la plus favorable au droit de vote des étrangers, il est impossible qu'il y ait une telle disparité entre la population francophone et la population neerlandophone. C'est là une disparité purement politicienne.
Il ressort de la presse francophone une unanimité parfaite entre les différents partis. C'est inexact. Le FN a toujours été adversaire de l'octroi du droit de vote automatique aux étrangers qui n'ont pas opté pour la nationalité belge. Il s'agit d'une condition qui ne remet nullement en cause la démocratie.
Si les partis francophones, à l'unanimité sauf le FN, sont en faveur de l'octroi du droit de vote sans condition, c'est regrettable car cela témoigne d'un divorce total entre le monde légal et le monde réel. Quant au FN, il aura été le seul parti à refuser ce qu'une notable partie de l'opinion refuse aussi.
Enfin, si l'on suit le raisonnement de la démocratie jusqu'au bout, ne faut-il pas exclure de ce droit de vote les Suisses dont 27,4 % viennent de voter dans leur pays pour un parti d'extrême-droite ?
2.8. M. Vanhecke
M. Vanhecke revient sur la consultation populaire qui a été proposée par certains membres. Aux États-Unis, le référendum n'est pas possible au niveau fédéral mais il existe dans 24 États. Dans une étude réalisée aux États-Unis et publiée cette année (« Initiative and referendum almanach »), on trouve les résultats du sondage d'opinion le plus large réalisé sur le sujet aux États-Unis et certainement aussi dans le monde. Dans chacun des 50 États, plus de mille citoyens ont été interrogés sur cette forme de démocratie directe. La question était : « Dans beaucoup d'États, les citoyens peuvent prendre l'initiative d'une consultation populaire en recueillant un nombre suffisant de signatures. Si une majorité de la population approuve la proposition, elle devient loi. Est-ce une bonne idée ? »
Il est apparu que dans tous les États, tant ceux où les consultations populaires sont possibles que dans les autres, les partisans du référendum sont 30 % plus nombreux que ceux qui s'y opposent.
Les opposants affirment parfois que les électeurs peuvent se lasser si on organise un grand nombre de référendums. On y a étudié également la question et la même étude permet de conclure que dans les États américains où de nombreuses consultations populaires ont eu lieu ces dernières années, comme l'État de Californie, la population est davantage en faveur des référendums que dans les États où soit il n'y a pas eu de consultations populaires, soit elles ont été moins fréquentes, comme dans l'État de New York. Dès lors, l'intervenant estime que la théorie de la prétendue lassitude engendrée par la répétitions des scrutins n'est pas fondée, au contraire. En guise de boutade, on pourrait affirmer que la démocratie appelle la démocratie. Celui qui est familiarisé avec le référendum souhaite que l'on y ait davantage recours. À la question, posée par les enquêteurs, de savoir si la démocratie directe doit également être possible au niveau fédéral aux États-Unis, 57 % des personnes interrogées ont répondu oui et 20 % non.
Enfin, les chercheurs ont voulu savoir si l'intérêt général était mieux servi par la démocratie représentative les votes au Parlement ou par la démocratie directe la consultation du peuple. En l'occurrence également, il s'est avéré que plus de 65 % des personnes interrogées estimaient que la démocratie directe servait mieux l'intérêt général. Cette conclusion correspond parfaitement à l'avis personnel de l'intervenant.
Du reste, M. Vanhecke estime que les élections représentatives, lors desquelles les électeurs désignent leur représentation au Parlement, requièrent un effort et une perspicacité politique plus grands que le référendum dès lors qu'on demande aux électeurs de tenir compte en même temps de nombreux éléments. Le candidat est-il compétent, fiable et honnête ? Connaît-on toutes les positions de l'intéressé ? À quel parti appartient-il ? Quels sont les points de vue de ce parti qui ont éventuellement été imposés au candidat contre sa volonté ? L'électeur doit répondre correctement à toutes ces questions; cela exige de lui qu'il pénètre la psychologie de chaque candidat, ce qui est évidemment impossible. Lors d'un référendum, au contraire, l'electeur ne doit se prononcer que sur un seul sujet ou sur une seule proposition.
Dès lors, l'argument souvent utilisé par les « particrates » contre l'organisaiton d'une consultation populaire, selon lequel l'électeur moyen ne serait pas suffisamment intelligent pour se prononcer sur un thème déterminé, ou selon lequel il serait trop paresseux pour s'informer sur le sujet, est infondé. Pareille argumentation voudrait que l'électeur, tout en étant lui-même très malhabile soit quand même capable de choisir un bon plombier et de contrôler le travail de celui-ci. Cette argumentation relève évidemment du sophisme.
Les partisans de la démocratie représentative affirment que le nom et le logo du parti politique sont des accessoires cognitifs qui aident l'électeur à émettre son vote car ils font le lien avec une famille politique ou avec un programme déterminé. Ils affirment également qu'il émane une certaine attraction du nom du parti et une certaine aura des personnages publics connus, qui feraient défaut dans un référendum. Ces arguments sont notamment avancés dans l'avis scientifique qui a été émis en 2002 à l'intention de la Commission du renouveau politique instituée au cours de la législature précédente (doc. Sénat, nº 2-416/2).
L'intervenant ne saurait en aucun cas souscrire à cette argumentation. Il est essentiel, en effet, que la législation soit élaborée ou corrigée dans le sens indiqué par l'électeur, ce qui peut se faire beaucoup plus facilement, cela va de soi, par la démocratie directe que par la voie représentative, car celle-ci suppose une compréhension bien plus grande des questions politiques, puisque l'électeur doit voter pour des partis et des candidats dont il espère qu'ils apporteront ensuite les modifications souhaitées par lui. En réalité, c'est impossible : on ne sait guère, en tant qu'électeur, quel parti influencera la législation, et dans quel sens.
Selon M. Vanhecke, l'avis du Comité scientifique de la Commission pour le renouveau politique, en ce qu'il compare les éléments sur lesquels l'électeur se base pour déterminer son choix à l'occasion d'un référendum populaire aux éléments sur la base desquels il détermine son choix pour un parti politique dans le cadre d'un scrutin indirect, compare des pommes et des poires. En effet, en votant pour tel ou tel parti, l'électeur ne sait pas dans quelle mesure son choix influencera le travail législatif.
L'orateur s'inscrit en faux contre l'idée selon laquelle les élus sont mieux informés et plus aptes à prendre les bonnes décisions que le citoyen moyen. Les opposants à l'organisation d'une consultation populaire sur le droit de vote des étrangers estiment que la politique est une affaire de spécialistes.
Est-il exact que le politicien, à l'instar du chirurgien, du plombier, du chauffeur de bus ... doit bénéficier d'aptitudes particulières par rapport au citoyen pour exercer son mandat de représentant de la Nation ? M. Vanhecke ne le pense pas. Tout le monde est en mesure d'exprimer une opinion ou un vote sur un sujet déterminé. La réalité du travail parlementaire montre que les élus sont contraints de se spécialiser dans certains domaines spécifiques. Pour le surplus, leur connaissance des matières est très superficielle. Leur vote est déterminé non pas sur base de l'opinion personnelle que le parlementaire s'est forgée au terme d'une étude approfondie du dossier mais en fonction de l'avis de spécialistes ou des directives du parti.
Or, le processus décisionnel suivi par le citoyen à l'occasion d'un référendum populaire n'est en rien différent de celui suivi par les hommes politiques au Parlement. Une partie d'entre eux va procéder à une étude approfondie de la matière, mais la grande majorité des citoyens détermine son choix en fonction de l'opinion d'autres personnes qui sont considérées comme des spécialistes en la matière.
Par ailleurs, il n'existe aucune preuve permettant d'affirmer que les lois, décisions ... issues d'une consultation populaire sont d'une qualité moindre que celles votées par un Parlement élu. D'autre part, si le citoyen est capable d'émettre un choix éclairé lorsqu'il se prononce sur des représentants qui sont supposés voter des lois correspondant à la volonté des électeurs, il est à plus forte raison capable d'émettre un choix éclairé à l'occasion du vote direct d'une loi.
M. Vanhecke se réfère sur ce point à l'étude publiée en 1996 par Michael Gallagher « The referendum experience in Europe ». Selon cet auteur, l'expérience montre qu'il n'y a pas d'exemple patent de décisions prises à la légère par des citoyens dans le cadre de la démocratie directe. Il est bien entendu possible que la démocratie directe aboutisse à des décisions erronées ou qui n'ont pas l'effet escompté. Cependant, des situations comparables se présentent à l'issue d'une procédure parlementaire classique.
L'étude de Cronin « Direct democracy » (Édition Harvard-London) sur la démocratie directe arrive aux mêmes conclusions. Selon cet auteur, les opposants à la démocratie directe ont une perception mythique du parlementaire qui serait investi de toutes les qualités alors que le peuple serait une meute non crédible. Or, comment refuser de faire confiance au citoyen pour faire la distinction entre de bonnes et de mauvaises lois alors qu'il serait capable de distinguer les bons des mauvais candidats dans le cadre de la démocratie indirecte.
Bref, la comparaison entre le travail législatif et le travail de l'ouvrier qualifié, qui ne serait pas à la portée de tout un chacun, est absolument inappropriée. Toute personne douée d'un bon sens normal est en mesure de participer à la prise de décision politique par le biais d'un référendum.
Qui plus est, le droit à la participation individuelle à la prise de décision politique devrait être inaliénable. L'élément central d'une décision politique est en effet toujours d'ordre moral.
Prendre une décision politique, c'est faire en son âme et conscience un choix en faveur de ce que l'on considère comme étant le bien, sur la base de faits objectifs. Il n'y a de prise de décision politique que dans la mesure où les faits permettent un tel choix moral.
Un jugement de conscience est par nature inaliénable et individuel. On ne peut sous-traiter sa propre conscience. L'on peut se donner mutuellement mandat, faire pleinement confiance à autrui pour qu'il prenne une décision déterminée à notre place. Les consciences en revanche ne peuvent s'échanger.
Transposée au sujet qui nous intéresse, cette conception philosophique signifie que le mandat donné par le citoyen, l'abandon qu'il fait de la prise de décision politique, ne peut jamais être absolu; le citoyen doit avoir la possibilité, sur certains sujets, de ne pas céder son droit de décision et de se prononcer par référendum. Dans une démocratie bien comprise, les citoyens décernent aux élus un mandat de confiance pour effectuer le travail législatif qu'ils ne veulent pas effectuer eux-mêmes, mais ils doivent conserver l'entière disponibilité, chaque fois que cela s'avère nécessaire, de décider en conscience par l'intermédiaire du référendum contraignant. C'est le cas pour le sujet qui nous intéresse ici : il est nécessaire d'organiser un référendum sur le droit de vote des citoyens non européens aux élections communales.
2.9. Mme Leduc
Mme Leduc regrette que la majorité actuelle n'ait pas pu se mettre d'accord sur un compromis acceptable qui aurait permis d'examiner à fond et dans la sérénité les propositions à l'ordre du jour, en autorisant un débat contradictoire.
La position du VLD est parfaitement claire depuis longtemps. Le VLD s'oppose à l'octroi du droit de vote pour les élections communales aux ressortissants non européens. Quiconque souhaite prendre part à la prise de décision démocratique doit posséder la nationalité belge.
Dans une intervention précédente, Mme Durant a souligné que, dans certaines communes, les immigrés non européens ont été abandonnés à leur triste sort pendant des décennies; l'administration communale ne s'intéressait pas aux besoins de ces gens en matière de logement, d'emploi, d'enseignement, etc., de sorte que leur situation ne faisait qu'empirer, comme le rappelle Mme Leduc.
L'intervenante s'est efforcée de vérifier, dans la liste des communes comptant un nombre important de ressortissants non européens, quelles sont celles où les problèmes sont les plus grands. Il apparaît que les communes qui ont le plus négligé les desiderata justifiés des allochtones sont celles qui, depuis plusieurs générations, sont ou ont été administrés par le PS ou le SP.A (Anvers, Malines, Gand, quelques communes bruxelloises comme Molenbeek, etc.).
L'intervenante a vérifié les sondages, dont il ressort qu'il y a, en Flandre, une majorité considérable qui estime, pour diverses raisons, que les étrangers non européens qui veulent s'établir et travailler définitivement ici doivent également adopter la nationalité belge. Cela ne constitue pas un problème pour les ressortissants d'origine turque ou marocaine, puisqu'ils peuvent avoir la double nationalité, ce qui présente l'avantage qu'ils ne perdent pas leurs droits dans leur pays d'origine.
À l'appui de l'octroi du droit de vote aux étrangers, on renvoie souvent au traité de Maastricht, qui l'accorde aux ressortissants européens. La comparaison est inappropriée, dès lors qu'il y a, dans ce cas, réciprocité.
Il ressort de certaines enquêtes que certains immigrés insistent pour obtenir le droit de vote, parce qu'ils croient qu'il leur donnera de meilleures possibilités en matière d'enseignement, d'emploi, de logement, bref, d'intégration. C'est toutefois inexact. Si le sentiment d'amertume augmente dans la société, c'est parce qu'on préfère ignorer certains maux. Cette amertume ne disparaîtra pas parce que l'on octroie le droit de vote pour les élections communales aux gens qui ne demandent pas la nationalité belge. Les problèmes d'enseignement, de logement et d'emploi dépassent en effet le niveau communal.
L'intervenante renvoie au témoignage de M. Hafid Bouazza (Knack, 29 octobre 2003). De nombreux immigrés semblent s'accrocher, par nostalgie, à une image statique de leur pays d'origine, alors que, souvent, de nombreux changements s'y produisent. De nombreux immigrés s'obstinent à maintenir une sorte de lien avec leur pays d'origine.
L'intervenante cite ensuite des passages d'une interview que l'hebdomadaire Humo a eue avec le professeur Étienne Vermeersch, le 24 avril 2001. À la question de savoir quel est le degré de nécessité d'un parti dont les coryphées chantent l'Internationale le 1er mai, mais contribuent le lendemain à la construction de la « citadelle Europe » et refusent de s'engager en faveur du droit de vote des immigrés, le professeur Vermeersch répond ce qui suit :
« Vous savez, la pureté absolue en politique, cela n'existe pas. Je ne voyais rien à redire aux hésitations du SP dans le débat sur l'octroi du droit de vote aux étrangers, car je n'en suis moi-même pas partisan. Pourquoi l'immigré qui veut voter en Belgique ne se fait-il tout simplement pas naturaliser ? Où est le problème ?
Sur ce point, je partage pleinement le point de vue du président du VLD, M. Karel De Gucht. Lorsque j'ai des conversations avec des jeunes issus de l'immigration, je leur dis toujours : « Imaginez un peu que vous partiez vivre pendant un an au Maroc ou en Turquie. Je vous parie qu'après quelques mois, vous voudrez retourner en Belgique. » Et c'est d'ailleurs logique : ces jeunes ne sont plus tout à fait marocains ou turcs, ils sont seulement d'origine marocaine ou turque. Je peux m'imaginer que les immigrés de la première génération veuillent rester fidèles à leur patrie, même s'ils savent pertinemment qu'ils ne rentreront jamais au pays. Ce lien émotionnel mérite notre respect et j'estime que nous pouvons aussi donner le droit de vote à ces personnes. »
L'intervenante souligne qu'elle a toujours défendu cette dernière thèse, y compris en séance publique. « Mais les immigrés de la deuxième, de la troisième ou de la quatrième génération doivent affirmer clairement leur volonté d'intégration. Et le professeur Vermeersch de continuer : « Je suis très méfiant vis-à-vis des progressistes qui souscrivent de manière inconditionnelle à l'idéologie d'attachement aux racines que prônent certains jeunes immigrés. Dire que l'on est marocain parce que son père et son grand-père étaient Marocains, est en fait un argument génétique. L'idéologie de l'attachement aux racines est le revers de la médaille du racisme, même si la démarche est moins négative : on identifie les gens sur la base de leur filiation.
Alors que nous sommes des individus déterminés par la culture dans laquelle ils vivent. (...) La plainte relative à la relégation des allochtones est pertinente et constitue un problème auquel les politiques doivent s'attaquer de toute urgence. Seulement, je doute fort qu'une société véritablement multiculturelle soit souhaitable. Imaginez que chaque communauté revendique le droit de parler sa propre langue et de pratiquer sa propre culture, y compris son propre enseignement, sa propre vision du monde, ses propres conceptions pour ce qui est de l'éducation et des relations hommes-femmes, ...
Il ne faudrait pas longtemps avant que la société devienne tout à fait invivable. La conséquence ultime du multiculturalisme est que les groupes ethniques ne peuvent pas rompre la solidarité interne par l'abandon de la pratique religieuse, par des schémas de mariage divergents, etc. L'idéologie de l'attachement aux racines conduit à la formation de ghettos culturels. L'on observe déjà aujourd'hui que les Turcs de Belgique sont plus souvent conservateurs que leurs compatriotes d'Ankara : est-ce cela que nous voulons ? » Fin de citation.
Mme Leduc cite en outre un article non daté intitulé : (traduction) « Fatma Pehlivan, travailleuse immigrée turque » : « Un entretien avec Fatma Pehlivan, enseignante intégrée de l'enseignement communal, nous apprend que la problématique de l'enseignement n'est que le sommet de l'iceberg. (...) En tant qu'enseignante intégrée, elle mène un combat assez solitaire au sein de la communauté turque. (...) Les immigrés tels que les Turcs font partie des groupes menacés parce que leur pays n'est pas admis au sein de l'UE en raison des violations des droits de l'homme qui s'y commettent. » Dans cet article, Mme Pehlivan affirme que le premier problème est celui du logement, car les Turcs s'installent dans des logements bon marché à proximité des entreprises : « Il arrive ainsi que les immigrés aillent s'installer dans les ghettos de la périphérie, où la possibilité d'intégration devient dès lors inexistante. » Mme Leduc déclare qu'elle a plutôt l'impression qu'ils vont s'installer dans les vieux quartiers du centre des villes. « Les Turcs se sentent obligés d'acheter des taudis. (...) Ils s'approprient donc leur propre ghetto. »
Dans cette interview, Mme Pehlivan aborde aussi la question de la ghettoïsation des écoles : « La ghettoïsation du logement a pour conséquence directe celle de l'école. La population de certaines écoles est composée exclusivement d'enfants issus de l'immigration. » Mme Pehlivan déclare, dans le même entretien, que les enfants d'immigrés fréquentent surtout l'enseignement professionnel. Selon l'intervenante, Mme Pehlivan est devenue aujourd'hui sénatrice, notamment, parce qu'à l'instar de beaucoup d'autres, elle a été assez avisée pour devenir belge. Ces personnes se sont vraiment intégrées et ont discerné les problèmes réels. Elles sont la preuve vivante qu'acquérir la nationalité belge peut résoudre des problèmes. Selon Mme Leduc, elles doivent donc montrer l'exemple aux personnes d'origine turque ou marocaine. Elle les encourage à devenir le levier qui améliorera la situation. Cette amélioration n'est possible que par l'enseignement. Les femmes turques et marocaines prouvent que cet enseignement ne doit pas être exclusivement professionnel. L'intervenante connaît personnellement des dizaines, des centaines de jeunes filles allochtones qui décrochent brillamment un diplôme d'humanités ou d'études supérieures. Elle constate que les garçons d'origine turque ne rencontrent pas non plus beaucoup de problèmes, contrairement aux jeunes marocains. Un écrivain d'origine marocaine, qui se dit Néerlandais, affirme que les garçons et les hommes d'origine marocaine n'abusent que trop souvent d'un comportement machiste. Ils rêvent de retourner au Maroc pour s'y trouver une épouse docile qui reconnaîtra en eux le maître du ménage. L'intervenante s'est renseignée à ce sujet, tant dans les écoles libres que dans l'enseignement officiel. Le même modèle saute aux yeux : bien qu'intelligents, ces garçons marocains n'étudient pas. Les statistiques le prouvent.
Mme Bouarfa proteste formellement contre ces propos.
Mme Leduc poursuit en demandant pourquoi les filles marocaines réussissent à décrocher un diplôme et les garçons marocains pas. Bon nombre de garçons marocains ne terminent pas leurs études et abordent dès lors le marché du travail sans qualification, si bien qu'il leur est très difficile de trouver un emploi.
L'intervenante reprend l'interview de Mme Pehlivan « Tout semble s'enchaîner logiquement : logement dans des ghettos, écoles de concentration, aucune possibilité d'intégration ou d'apprentissage d'une langue étrangère. Les Turcs ne savent guère le néerlandais, ce qui pose pas mal de problèmes, notamment dans les hôpitaux. » Mme Leduc constate en passant qu'il y a des interprètes turcs dans certains hôpitaux, mais aucun néerlandophone pour aider les malades flamands. « Fatma Pehlivan atteste elle-même comment certaines mosquées sont tout bonnement anti-occidentales, pour des motifs de fondamentalisme religieux du type Khomeini. Si les parents turcs n'offrent à leurs propres enfants aucune possibilité d'étudier et n'ont comme unique préoccupation que de marier leurs filles, il n'y a aucune chance d'intégration. Il n'est donc pas étonnant que des Turcs progressistes qui prennent la défense de leur propre peuple dans notre pays se fassent rejeter par leurs propres concitoyens (...) Nous ne sortirons probablement jamais de nos ghettos. »
Enfin, Mme Leduc évoque l'opinion de Mme Marianne Nimmegeers, porte-parole de « Objectief, beweging voor gelijke rechten », qui prétend que le droit de vote au niveau communal n'est qu'un premier pas vers le droit de vote général. Mme Nimmegeers a déclaré que la proposition en discussion était une boîte de Pandore vide. Le droit de vote est entièrement vidé de sa substance. Le verre n'est ni à moitié plein, ni à moitié vide; il est tout à fait vide. Cette proposition ne sert qu'à apaiser la conscience de certains partis.
Selon l'intervenante, l'octroi du droit de vote au niveau communal aux citoyens qui ne sont pas d'origine européenne ne résout rien. Il faut oeuvrer à l'intégration.
2.10. Mme Pehlivan
Mme Pehlivan réplique que dans son livre, elle a exposé sa vision des problèmes de société actuels, l'emploi, la politique du logement et la problématique de l'enseignement. Les références que d'autres membres ont faites à ses idées reposent toutefois sur des sources erronées.
Mme Bouarfa estime que les Flamands sont en grande partie favorables au droit de vote des immigrés. Elle se réjouit également de l'intervention de M. Germeaux, qui témoigne d'un sens certain du dialogue et d'une certaine sérénité. Par contre, elle considère les interventions du VLD en tant que parti comme indignes d'un parti démocratique.
Bien que les interventions du CD&V cadrent parfaitement avec son rôle de parti d'opposition, l'intervenante rappelle que 45 % des membres de ce parti se sont prononcés, lors d'un congrès, en faveur de l'octroi du droit de vote aux étrangers. Si l'on devait finalement suivre le point de vue de l'extrême droite, il faudrait aller jusqu'à faire disparaître les chiffres arabes de notre système de calcul.
L'intervenante admet que les immigrés ont d'autres priorités que le droit de vote aux élections communales, comme le droit au logement, le droit à un enseignement de qualité et à une bonne formation, la connaissance d'une des langues nationales, le droit à un emploi convenable, etc. Le droit de vote peut toutefois, de par la signification démocratique qui est la sienne, aider les immigrés à réaliser plus rapidement les priorités précitées. L'intervenante dit pouvoir témoigner personnellement du changement d'attitude qu'elle constate chez les mandataires locaux à son égard une fois qu'elle eut acquis le droit de vote en obtenant la nationalité belge.
Il y a encore d'autres éléments qui plaident en faveur de l'octroi du droit de vote, à savoir le fait que le nombre d'élus soit déterminé sur la base du nombre d'habitants (parmi lesquels les immigrés), le fait que les immigrés fassent partie de la société et participent à l'enseignement, aux soins de santé, à l'économie ..., le fait que la réglementation actuelle, qui accorde le droit de vote aux Belges et aux immigrés européens, mais le refuse aux immigrés non européens, constitue une discrimination à l'égard de ces derniers.
L'intervenante peut difficilement admettre l'argument de la réciprocité qui a été avancé à plusieurs reprises au sein de la commission étant donné qu'il ressort des contacts personnels qu'elle a au Maroc, en Algérie et au Congo, que les Belges qui résident dans ces pays ne sont absolument pas demandeurs du droit de vote. Sur la base de son expérience personnelle, l'intervenante rejette également l'argument selon lequel certains immigrés refuseraient la nationalité belge, car elle n'a personnellement eu connaissance que d'un seul refus en trente ans.
Pour conclure, elle affirme que faire de la politique, c'est réaliser chaque jour de nouvelles choses, faute de quoi la politique perdrait sa raison d'être et que c'est précisément ce que l'on essaie de faire au travers du débat en cours.
2.11. Mme Derbaki Sbaï
Mme Derbaki Sbaï souhaite intervenir brièvement pour dissiper quelques malentendus. Elle revient, tout d'abord, sur le fait que, certains considèrent que l'octroi du droit de vote est le meilleur moyen d'intégration d'une partie de la population. L'intervenante estime que le droit de vote est un droit indépendant des efforts d'intégration. L'intégration est réalisée par le biais de l'éducation, d'un enseignement équilibré et de qualité pour tous, du logement, de l'emploi, etc.
L'intervenante ajoute que les Turcs et les Marocains ne seront pas les seuls à bénéficier du droit de vote. Des personnes ayant d'autres nationalités en bénéficieront aussi et de nombreux membres des communautés turque et marocaine ont déjà acquis un droit de participation politique par le biais de la nationalité.
En outre, Mme Derbaki Sbaï estime qu'il importe de bien réfléchir, une fois encore, à la définition exacte des termes que l'on utilise; pour elle, octroyer le droit de vote aux étrangers, c'est leur ouvrir l'accès à la citoyenneté.
2.12. M. Hugo Vandenberghe
M. Hugo Vandenberghe estime que la brièveté des interventions des partisans de l'octroi du droit de vote aux immigrés indique qu'une partie de la majorité refuse de mener le débat quant au fond. L'opposition doit passer sous les fourches caudines de celle-ci et la manière dont la discussion est menée évoque les mailles d'une nasse dont elle ne peut absolument pas sortir. Tous les arguments qui se situent en dehors des limites imposées sont considérés comme non pertinents.
M. Hugo Vandenberghe estime dès lors que le débat porte en fait sur la seule question de savoir si l'on va accorder ou non le droit de vote aux étrangers qui ne souhaitent pas acquérir la nationalité belge. Par conséquent, le titre que l'on donne à la discussion, à savoir le droit de vote des étrangers, est manifestement faux. Aujourd'hui, des étrangers de partout jouissent déjà en Belgique du droit de vote du fait qu'ils possèdent la nationalité belge. La discussion concerne donc les étrangers qui remplissent les conditions mises à l'octroi de la nationalité belge et qui ne demandent pas celle-ci et les étrangers qui ne remplissent pas ces conditions et qui n'ont dès lors pas le droit de vote. Il s'agit de deux catégories différentes d'étrangers.
La formulation précise de la question à débattre est la première condition d'une discussion raisonnable. En l'espèce, les choses sont mal formulées puisque l'on parle constamment du droit de vote des étrangers.
Par conséquent, toute réglementation que l'on envisagerait ou voudrait instaurer doit avoir une certaine cohérence et l'on ne peut dès lors jamais dissocier la question de l'octroi du droit de vote dans des matières exclusivement communales de la question de savoir comment l'on veut organiser le droit de vote en général.
Les points de vue à cet égard peuvent diverger sensiblement. On s'est également demandé s'il fallait organiser un référendum sur cette question ou s'il fallait la régionaliser. À ce propos, M. Hugo Vandenberghe souligne que son groupe n'est pas partisan d'une solution « à la carte », comme celle qui a été retenue pur ce qui est de la loi sur les armes. Une telle solution prêterait d'ailleurs le flanc à des objections constitutionnelles.
De nombreuses conceptions de la démocratie ont déjà été abordées en commission. Le philosophe politique français Claude Lefort a intitulé un de ses ouvrages « L'invention démocratique », en insistant, dans le sous-titre, sur l'indétermination de la société démocratique. Il veut dire par là que l'on peut avoir divers modèles démocratiques, avec diverses conceptions démocratiques de l'organisation du pouvoir, de la fixation des conditions auxquelles est soumis le droit de vote. Cet élément n'est jamais statique; il est toujours évolutif. L'histoire le prouve à suffisance : les conceptions actuelles de la démocratique sont tout à fait différentes de celles d'il y a cent ans.
La notion de « référendum » couvre elle aussi de très nombreuses pratiques différentes. Il règne donc une confusion babylonienne autour de ce terme fort usité. Il en va de même pour ce qui est des notions de « démocratie » et de « droits de l'homme ». De quoi s'agit-il exactement ?
Et si, en ce qui concerne la question de l'octroi du droit de vote, on adoptait enfin une autre approche que celle qui donne l'impression que l'on veut en fait accorder le droit de vote pour satisfaire à des visées clientélistes, au lieu de se fonder sur des facteurs objectifs ? L'attitude « clientéliste » favorisera les dissensions au sein de l'opinion publique. L'objectivation du débat poursuivie par M. Hugo Vandenberghe vise non pas à compliquer celui-ci, mais à renforcer la légitimité du processus décisionnel.
Il est évident que la majorité décide, mais cela ne signifie pas que la décision en question soit légitime du point de vue démocratique. C'est pourquoi la discussion au Parlement est nécessaire pour que l'on puisse vérifier la qualité des arguments avancés.
La notion de démocratie a évolué au cours de l'histoire : démocratie directe, démocratie représentative, démocratie mixte, etc. La caractéristique de cette évolution est qu'elle est particulièrement sensible du contexte dans lequel elle a lieu. C'est dans cette optique que M. Hugo Vandenberghe souligne que sur les 10 millions d'habitants que compte la Belgique, il y a 825 000 étrangers (chiffres d'Eurostat, 2002). En d'autres termes, la Belgique compte 250 000 étrangers de plus que les Pays-Bas, dont la population est de 15 millions d'habitants. Ce chiffre n'est pas négligeable. La question de l'intégration et du respect des principes de l'État de droit est donc bel et bien posée. C'est en tenant compte de cet élément qu'il faut proposer une méthode de prise de décision en vue de résoudre le problème et défendre une certaine opinion.
M. Hugo Vandenberghe estime que, sachant comment fonctionne la démocratie belge, on doit bien avouer que la participation à la vie publique ne se limite pas à l'exercice du droit de vote. On ne saurait affirmer qu'une personne qui, pour des raisons qui doivent évidemment être objectives ne reçoit pas le droit de vote, parce qu'elle n'a pas la nationalité belge, ne participe pas à la prise de décision dans notre société. En effet, on peut participer par des actions collectives, des actions sociales, des actions juridiques individuelles, etc.. Il existe, dans notre pays, toutes sortes de voies qui permettent aux citoyens quelle que soit leur nationalité de participer d'une manière ou d'une autre à la prise de décision.
Il est donc faux de dire que l'on ne ferait de la politique qu'au moment des élections et que la participation politique serait nulle au cours des périodes intermédiaires.
Si l'on admet que la démocratie ou l'État de droit implique une forme de reconnaissance de droits sociaux, alors on doit aussi admettre qu'il convient de relativiser l'opposition entre la démocratie directe, le référendum et la démocratie représentative ou indirecte dans toutes sortes de stades intermédiaires dans la mesure où il y a toujours entre deux élections, des moments où l'on peut prendre en compte les intérêts des citoyens.
M. Hugo Vandenberghe illustre ce qu'il vient de dire à l'aide d'un exemple qui renvoie à l'histoire française. Il fut un temps ou « la raison d'État » de Richelieu suffisait à justifier la prise de décision politique dans un État. Si cette philosophie n'a plus guère de succès auprès des populations des divers pays du globe, c'est précisément parce que l'on estime que la démocratie et la politique doivent tirer leur légitimité de valeurs bien supérieures à celle que représente le simple exercice du pouvoir. Par conséquent, la légitimation de l'exercice du pouvoir par une majorité est beaucoup moins acceptable aujourd'hui qu'au cours de certaines périodes du passé, étant donné qu'on admet maintenant que le pouvoir peut être utilisé d'une manière abusive.
Au Sénat, on discute presque au cours de chaque législature du référendum. À cet égard, il faudrait se fonder sur le cadre constitutionnel belge pour déterminer dans quelle mesure on peut y recourir. En fait, notre Constitution n'autorise pas, à l'heure actuelle, le référendum au niveau fédéral et les dispositions de celle-ci qui ont été déclarées soumises à révision concernent l'introduction éventuelle du référendum aux niveaux régional et communal. Au niveau provincial, la possibilité d'y recourir existe déjà.
On complique donc, en l'occurrence, la discussion en voulant recourir à un outil qui n'est pas vraiment opérationnel. On affirme certes qu'il faut faire une distinction entre le référendum et la consultation populaire, mais la plupart des auteurs estiment que cette distinction n'est pas suffisamment sérieuse, car, si le référendum est contraignant du point de vue juridique, il lie le pouvoir politique et si la consultation populaire n'est pas contraignante du point de vue juridique, elle l'est néanmoins du point de vue politique.
En droit public, on fait une distinction entre la force juridique obligatoire d'un référendum, qui est différent de celle d'une consultation populaire, et le caractère politiquement contraignant d'une consultation populaire, qui génère de toute évidence une sorte de droit.
Par conséquent, l'idée d'organiser une consultation populaire pour permettre à la population de donner son avis en ce qui concerne l'octroi éventuel du droit de vote aux étrangers est inapplicable actuellement puisqu'elle est étrangère à la Constitution.
Il est évident que l'on peut toujours avancer des arguments en faveur d'un référendum, mais on doit tenir compte du fait que chaque système et chaque pays dispose de mécanismes lui permettant de garantir l'équilibre nécessaire. Bien des études de droit comparé mettent en parallèle la Suisse et les États-Unis. En Suisse, bien des cantons, et aux États-Unis, bien des États fédérés connaissent le référendum d'initiative populaire. La démocratie s'y pratique dans des contextes différents et suivant des sensibilités spécifiques. L'étude comparée des systèmes juridiques peut, certes, être instructive, mais la transplantation d'un système juridique étranger est comparable à celle d'organes chez les êtres humains. Il peut y avoir des phénomènes de rejet. En l'espèce, on pourrait voir se développer un système qui ferait fi de la cohérence dans le processus.
Il y a donc les obstacles constitutionnels (voir l'article 33 de la Constitution) et, qui plus est, on n'est pas sûr qu'une consultation populaire permettrait vraiment de résoudre le problème.
L'intervenant se réfère à plusieurs exemples historiques de référendum, qui en démontrent le caractère manipulable.
Lorsque Napoléon organisait des référenda, il obtenait une majorité de 90 % des voix.
Adolphe Hitler a, au cours de sa première année de pouvoir, organisé quatre référenda où il a obtenu plus de 99 % des voix.
Il est vrai que l'on ne pouvait voter que « oui », et que le scrutin n'était pas secret.
Un autre exemple du caractère manipulable de la question est le référendum organisé en 1969 par le général De Gaulle, où une double question était posée : « Êtes-vous pour la suppression du Sénat et pour les lois sur la décentralisation ? » Il fallait répondre par un seul « oui » ou « non ».
En soi, le fait pour le référendum de présenter la réponse à un problème sous forme de « oui » ou « non » a un effet de polarisation.
La question est de savoir si cela résout le problème.
De ce point de vue, le contexte politique est en Belgique particulièrement difficile.
La consultation populaire de 1950 l'a montré : la majorité a émis un vote positif, mais la solution fut négative.
Même si, à l'époque, la Belgique n'était pas un État fédéral, et qu'il n'existait que les neuf provinces, le problème reste le même, en particulier dans les matières où l'opinion publique varie au nord et au sud du pays.
Si, comme certains l'envisagent, il fallait exiger, en Belgique, la majorité dans chacune des deux communautés, ou dans chacune des trois Régions, cela aurait pour conséquence que la minorité disposerait d'un droit de veto, ce qui engendrerait à nouveau des frustrations dans le chef de la majorité.
L'intervenant déclare qu'il n'est pas a priori opposé à l'idée d'un référendum, et qu'une forme de démocratie directe peut être admise, en tout cas au niveau régional.
Au niveau fédéral, cela devrait être possible, mais il faudrait au préalable résoudre le problème du comptage des voix.
L'argument souvent invoqué à l'appui du référendum est la souveraineté populaire mais, à la différence des parlementaires et des ministres, qui doivent tôt ou tard se justifier, le peuple est souverain mais pas responsable.
L'intervenant est donc assez sceptique par rapport à ce système, qui soulève des problèmes de constitutionnalité. Il estime en tout cas que l'on ne peut l'invoquer à propos du droit de vote des étrangers, qui est bien plus qu'un thème symbolique.
Pour l'intervenant, la nationalité est et reste le critère pour l'exercice des droits politiques.
Ce point de vue est parfois présenté comme tout à fait dépassé, et l'on invoque à ce sujet l'évolution dans l'Union européenne.
L'intervenant estime que cela n'est pas sérieux.
Il renvoie à cet égard à l'article 17 du Traité instituant la Communauté européenne, qui prevoit qu'« il est institué une citoyenneté de l'Union. Est citoyen de l'Union européenne toute personne ayant la nationalité d'un État membre. La citoyenneté de l'Union complète la citoyenneté nationale et ne la remplace pas. Les citoyens de l'Union jouissent des droits et sont soumis aux devoirs prévus par le présent traité ».
Il est logique d'appliquer cette même approche à la législation sur le droit de vote des étrangers.
Les membres de la commission ont reçu communication d'un aperçu intéressant sur l'évolution du droit de vote.
L'intervenant estime toutefois que la situation dans d'autres pays doit être replacée dans son contexte. Ainsi, la reconnaissance du droit de vote aux étrangers au niveau communal aux Pays-Bas a eu lieu à un autre moment et dans un tout autre contexte, où la législation en matière de nationalité était d'une toute autre nature.
L'intervenant constate que, si l'on considère la législation belge sur la nationalité, force est de constater qu'elle est particulièrement généreuse. Cette générosité découle entre autres du fait qu'après trois ans de résidence en Belgique, un étranger a accès à la nationalité belge, ce qui n'existe nulle part dans l'Union européenne.
Après sept ans, l'intéressé dispose d'un droit absolu à acquérir la nationalité belge, et peut faire une déclaration de nationalité.
Aucune exigence minimale de connaissance linguistique n'est prévue.
Les Pays-Bas eux-mêmes, qui ne peuvent être suspectés d'avoir mené, au cours des dernières années, une politique répressive à l'égard des étrangers, ont imposé cette condition pour l'acquisition de la nationalité.
Cela est compréhensible, car on ne peut parler d'intégration ni de participation, si l'on n'indique pas clairement à l'étranger l'importance qu'il y a à connaître la langue du pays pour avoir accès à la culture de ce pays et aux idées qui y circulent.
À défaut d'une telle connaissance linguistique, la personne reste enfermée dans son propre univers, et étrangère au pays où elle vit.
M. Hugo Vandenberghe se souvient des discours de M. Coveliers à l'occasion de la première modification de la loi sur la nationalité belge en 1998, pour dire qu'il trouvait honteuse la manière dont la nationalité belge était octroyée aux étrangers. Au cours de la législature précédente, le programme électoral du VLD affirmait, à propos de la nouvelle loi sur la nationalité belge, que « les conflits actuels entre autochtones et allochtones ne seront pas résolus par un assouplissement de la législation sur la nationalité. Un tel assouplissement nourrissait simplement l'illusion qu'une solution est à portée de main ». Un an après le vote de la loi, on a décidé d'évaluer son application avant la fin de la législature, en vue d'y apporter des modifications. La loi a effectivement été évaluée, mais aucune modification n'y a été apportée.
L'intervenant estime que le VLD a déjà fait une concession en ce qui concerne la nouvelle loi sur la nationalité et il espère qu'il ne va pas en faire de nouvelle pour ce qui est du droit de vote des étrangers.
Abstraction faite de la question de savoir si on adoptera ou non le principe de l'octroi aux étrangers du droit de vote aux élections communales, il faut savoir que la matière en question est inévitablement liée aux conditions d'application de la législation relative à la nationalité belge. Il est évident que, sous l'empire d'une loi sur la nationalité très sévère, qui complique singulièrement l'acquisition de la nationalité belge, le problème de l'octroi du droit de vote aux étrangers s'inscrirait dans une perspective totalement différente de celle dans laquelle ils peuvent acquérir très facilement la natonalité belge.
Si l'on voulait examiner le problème de l'insertion de manière objective, on devrait à tout le moins lier la discussion du texte proposé à l'évaluation de la législation sur la nationalité. Ce serait raisonnable et objectif.
L'intervenant ne voit d'ailleurs pas pourquoi l'insertion constituerait une menace pour les étrangers. L'insertion doit précisément ouvrir la voie à une appréciation positive, alors que l'on s'imagine à tort maintenant, que le simple fait d'octroyer aux étrangers le droit de vote aux élections communales suffit à garantir leur dignité.
Certains membres, comme Mme Defraigne, estiment que l'examen des nouvelles propositions relatives à la modification de la loi sur la nationalité belge sera mis à l'ordre du jour suivant, mais ils mettent ainsi la charrue devant les boeufs : quand on examinera les conditions que les étrangers devront remplir pour pouvoir obtenir le droit de vote aux élections communales, il faudra en même temps examiner minutieusement les conditions à remplir pour pouvoir acquérir la nationalité belge et les délais à respecter en la matière.
Un étranger qui réside légalement en Belgique depuis trois ans peut obtenir la nationalité belge. On considère d'une manière générale que c'est injuste.
L'Union européenne a lié les droits et les devoirs politiques à la nationalité. De la sorte, elle n'a pas fait un choix dépassé ou débile, mais elle a établi la référence nécéssaire pour pouvoir déterminer la position politique des intéressés. Il est en effet inimaginable que le lieu de résidence puisse déterminer le statut politique en tant que tel.
L'intervenant se dit très déçu de constater qu'avec les problèmes de chômage actuels et la dévaluation de la notion de « travail », on mène un débat qui n'a plus rien à voir avec la réalité. Un sondage a été publié récemment en France qui révèle que 85 % des Français estiment qu'il n'y a plus aucun respect pour le travail. Cela en dit long sur l'ampleur du problème.
L'altermondialisation à grande échelle procède également du constat selon lequel les gens sont de plus en plus inquiets, perdent leurs repères et se tournent, davantage que par le passé, vers l'État dont ils portent la nationalité.
Il ne faut pas sous-estimer l'identité politique. Les étrangers qui vivent ici doivent eux aussi faire preuve de compréhension et de respect pour ceux qui vivent dans notre pays depuis des générations, qui y ont construit une langue, une tradition et une culture, ainsi que pour leurs conceptions de la nationalité en tant que point de repère d'une société.
Henri De Page écrit lui aussi, dans son « Traité élémentaire de droit civil », qu'il convient de maintenir la notion de nationalité à l'écart de la politque partisane.
L'intervenant incite à la prudence, car tout cela joue un rôle dans le subconscient collectif de la population. C'est la raison pour laquelle le problème du droit de vote doit être résolu par le biais de la législation relative à la nationalité. Une loi équilibrée sur l'acquisition de la nationalité permettrait de réduire l'examen du droit de vote communal à un problème marginal.
L'intervenant fait ensuite remarquer que le débat sur le droit de vote communal concerne non seulement les immigrés, l'intégration et la nationalité, mais également l'équilibre politique de notre pays, ce qui rend le problème encore plus complexe.
Une des trois Régions de notre pays connaît une concentration d'immigrés particulièrement élevée. Divers mécanismes d'équilibrage ont été mis en place par le passé pour les néerlandophones de Bruxelles-Capitale. La présente proposition de loi entraînera un glissement des équilibres politiques.
En d'autres termes, la façon dont les propositions de loi sont traitées n'est pas équilibrée mais témoigne, au contraire, d'un manque de sérieux politique.
La vitesse à laquelle les propositions sont discutées est également surprenante. Plusieurs propositions de loi avaient été déposées, mais on a décidé immédiatement, sans argument à l'appui, que l'on voterait sur la proposition du groupe MR. Si l'on a fait ce choix, ce n'est pas parce que la proposition de loi du MR est la meilleure, mais simplement pour pouvoir voter rapidement. Cette évolution témoigne d'une légèreté dont on sous-estime gravement les conséquences.
M. Hugo Vandenberghe est d'avis que ce débat devrait être mené dans le contexte de l'Union européenne. Pourquoi la discussion n'est-elle pas éclairée par les options qui ont été prises dans le cadre du débat relatif à la nouvelle Constitution européenne, où sont inscrits les droits fondamentaux et les libertés fondamentales ?
Chaque mois, le « Frankfurter Allgemeine » publie des enquêtes de fond sur l'évolution de l'opinion publique. Dans l'édition du 12 novembre 2003, on peut lire que le clivage gauche-droite est toujours une réalité et que l'opinion publique n'évolue pas dans le sens que l'on pense. L'internationalisation et les difficultés économiques qui s'annoncent incitent l'opinion publique à se montrer beaucoup plus prudente que par le passé.
Il y a, dans notre pays, 850 000 étrangers sur 10 millions d'habitants (soit près de 10 % de la population). Ils sont de surcroît très concentrés dans certaines régions. Voilà pourquoi il faut mener une politique prudente.
L'intervenant fustige la manière dont est mené au Sénat le premier grand débat, celui du droit de vote aux étrangers, en fonction des élections communales d'octobre 2006. S'agit-il là du problème le plus urgent auquel notre pays est confronté ? Que dire alors de l'accroissement du chômage ou de l'essoufflement de la croissance économique ?
Il est naturellement possible de constituer des majorités arithmétiques. Mais lorsque tous les partis francophones et un seul parti néerlandophone défendent un point de vue, cela doit inciter à la prudence politique. Inversement, si tous les partis néerlandophones adopteraient un seul et même point de vue et que tous les partis francophones, à l'exception d'un seul, y étaient opposés, les protestations seraient vives si la majorité néerlandophone tentait d'imposer son point de vue.
Une majorité communautaire qui veut forcer une décision au Parlement contre l'avis de l'opinion publique de l'autre majorité communautaire commet une erreur.
Le seul moyen d'éviter cela est d'ouvrir un débat objectif dans le cadre plus large de la législation sur la nationalité, solution que l'intervenant juge raisonnable et défendable. Or, à l'heure actuelle, ce type de discussion n'est pas possible parce que les partis francophones, principalement, brandissent si souvent des notions telles que le racisme qu'ils les banalisent. Ils agissent au nom du bon droit, mais prennent un grand risque politique avec leur projet d'imposer sur-le-champ à une majorité de la population l'octroi du droit de vote aux élections communales pour les ressortissants non européens.
2.13. M. Verreycken
M. Verreycken tient tout d'abord à réagir à l'affirmation d'une préopinante selon laquelle les étrangers ne refusent jamais la nationalité, mais sont seulement découragés par la masse des formalités à accomplir. Cette déclaration contraste singulièrement avec celle qu'a faite M. Fethi Gümüs, un membre de la communauté turque d'Anvers et chef de projet au sein du Subregionaal Tewerkstellingscomité, comité sous-régional, de l'emploi d'Anvers, au cours de la législature précédente devant cette commission. Bien qu'habitant depuis trente ans déjà en Belgique et refusant la nationalité belge pour des raisons de principe, il déclare qu'« octroyer le droit de vote à des gens tels que lui n'est certainement pas une faveur, mais un devoir élémentaire, un « must », une étape nécessaire pour avancer dans notre structure démocratique » (doc. Sénat, nº 2-548/7, p. 63).
Par ailleurs, l'attitude de divers partis de la majorité démontre combien ceux qui ont adopté en son temps la loi instaurant la procédure accélérée de naturalisation parce qu'on leur avait promis que la question de l'octroi du droit de vote aux ressortissants non européen était ainsi reportée sine die, ont été grugés. L'accord de gouvernement a ouvert toute grande la porte à cet octroi. Le VLD se sait à présent totalement isolé au sein de la majorité gouvernementale. Le Vlaams Blok s'oppose toutefois à l'octroi de ce droit de vote, relayant en cela le point de vue de la grande majorité des Flamands.
Avec l'aperçu historique qui suit, l'intervenant entend démontrer que l'octroi du droit de vote aux élections communales aux étrangers est une revendication des partis francophones et de gauche qui remonte à plusieurs décennies.
Dès la fin des années soixante, des plaidoyers en faveur de l'octroi du droit de vote aux personnes de nationalité étrangère commencèrent à se faire entendre au sein des milieux syndicaux francophones. L'idée centrale consistait à accorder aux travailleurs étrangers peu qualifiés (italiens, espagnols, grecs, marocains, algériens et tunisiens), embauchés à l'étranger sur la base d'accords de coopération, une participation relative dans les décisions qui les concernaient directement. Les syndicats revendiquaient le droit de vote pour les non-Belges, dans le sillage de l'assimilation des Belges et des non-Belges aux élections sociales.
En mars 1971, le front commun syndical FGTB-CSC liégeois organisa une journée d'étude sur la participation politique des étrangers à l'échelon local. L'initiative et le plaidoyer des syndicats liégeois furent imités dans tous le pays, via l'organisation de journées de discussion. C'est ainsi que la problématique du droit de vote des étrangers fut mise pour la première fois publiquement à l'agenda.
Au cours du mois où les syndicats liégeois évoquèrent ouvertement la question, le socialiste francophone Ernest Glinne (PSB) déposa, avec l'appui de plusieurs députés du PSB, du FDF et du PSC, une première proposition de loi qui visait explicitement à octroyer le droit de vote aux élections communales aux étrangers ressortissants des États membres de la CEE. Dans sa proposition, M. Glinne n'allait certes pas aussi loin que les revendications des syndicats liégeois (à savoir le droit de vote au niveau local pour tous les étrangers), mais il se'bornait'à accorder aux ressortissants des États membres de la CEE, à titre d'essai, le privilège de la participation politique (3).
Ce droit de vote était octroyé à condition que les intéressés résident depuis au moins 10 ans en Belgique et depuis au moins 5 ans dans la commune concernée, parce qu'il fallait exiger une certaine intégration culturelle et une certaine insertion dans le milieu social (4).
M. Glinne soulignait que le nombre de sièges aux élections était déterminé par le nombre d'habitants (et donc pas par le nombre de ressortissants) et que, dans certaines régions de la Wallonie notamment, les étrangers représentaient souvent plus de 15 % de la population locale. Il affirmait également que les étrangers payaient aussi des impôts et ne commettaient, en moyenne, pas plus de délits que les Belges (5). La proposition de loi de M. Glinne mourut de sa belle mort avec la chute du gouvernement rouge-romain Eyskens-IV.
Durant la législature suivante, le communiste francophone Marcel Levaux (PC) déposa une proposition de loi qui allait beaucoup plus loin. Levaux, qui présenta sa proposition à la Chambre en avril 1972, voulait accorder le droit de vote aux élections communales (et à certaines élections à l'échelon supra-local) à tous les non-Belges. Pour pouvoir voter, la personne de nationalité étrangère devait résider depuis au moins 5 ans en Belgique et être établie depuis 2 ans minimum dans la commune concernée.
Pour se présenter aux élections, elle devait être née en Belgique et y avoir résidé de manière ininterrompue ou y avoir déjà exercé une fois le droit de vote et résider, à partir de ce moment, de manière ininterrompue en Belgique. Par cette proposition, M. Levaux pensait pouvoir associer les immigrés plus étroitement à la vie de la communauté locale à laquelle ils appartenaient.
Il soulignait par ailleurs que les travailleurs immigrés, bien que n'ayant pas eux-mêmes le droit de vote, étaient repris dans les chiffres de population qui servent à déterminer le nombre de conseillers communaux. Contrairement à M. Glinne, M. Levaux estimait que le droit de vote devait être accordé aux travailleurs immigrés comme une sorte de récompense ou de dette d'honneur : « La place prise par les travailleurs immigrés (le soulignement est du Vlaams Blok) dans notre vie économique est considérable. Sans eux, une série d'activités de première importance et délaissées par les cotoyens belges en raison de leur caractère dangereux et insalubre auraient connu de sérieuses difficultés, avec tous les dommages qui en seraient résultés pour l'ensemble de l'économie nationale (6). »
La proposition de loi de M. Levaux fut frappée de caducité en 1974. Entre-temps, le premier ministre démocrate chrétien Gaston Eyskens (CVP) avait lancé l'idée, au Sommet européen de Paris d'octobre 1972, aux côtés de l'Italien Andreotti, d'accorder sous certaines conditions le droit de vote local aux ressortissants de la CEE.
Ce plaidoyer fut confirmé dans le courant de 1973 par le nouveau gouvernement Leburton. En mars 1973, les évêques belges, dans une lettre pastorale, invitèrent à accorder le droit de vote aux étrangers pour les élections communales sous certaines conditions, afin de favoriser leur participation politique (7).
En mai 1974, sous le gouvernement Tindemans I (CVP-PSC, PVV-PLP), le socialiste Glinne déposa, conjointement avec quelques collègues francophones et néerlandophones socialistes (PSB-BSP), une proposition qui allait plus loin que son initiative précédente et qui se situait dans le prolongement du plaidoyer de Gaston Eyskens pour l'octroi du droit de vote local aux ressortissants de la CEE.
M. Glinne plaidait en faveur de l'octroi du droit de vote au plan communal aux ressortissants de la CEE qui résidaient depuis cinq ans dans notre pays. Pour ce qui est du droit d'éligibilité, l'étranger ressortissant de la CEE devait résider depuis au moins dix ans en Belgique.
M. Glinne motivait sa proposition à la lumière de l'intégration européenne : « Les « étrangers » de la CEE sont devenus des cousins, membres d'une famille politique, et la liberté de circulation et le droit d'établissement dont ils bénéficient ne peuvent rester sans prolongement spécifique au plan des droits politiques. Un « compatriote de la CEE », si tant est que l'Europe communautaire devienne ou doive devenir une nouvelle patrie, ne peut rester confiné dans la même catégorie politique que l'immigrant venu des antipodes, d'un autre continent ou d'un État européen non membre de la CEE. » (soulignement du Vlaams Blok) (8). La proposition de M. Glinne ne fit jamais l'objet d'une discussion en commission et fut frappée de caducité à la fin de la législature en 1977.
À la mi-1976 fut approuvé un projet de loi du gouvernement qui visait à moderniser les lois électorales sur un certain nombre de points. En juin 1976, les communistes francophones Levaux et Van Geyt (PC) déposèrent un amendement visant à octroyer le droit de vote « aux étrangers travaillant en Belgique » (9).
Le ministre de l'Intérieur de l'époque, M. Joseph Michel (PSC), rejeta toutefois cette initiative en déclarant qu'il y avait des objections de nature constitutionnelle aux tentatives d'octroyer le droit de vote sur le plan communal aux non-Belges par le biais d'une modification directe de la législation électorale.
M. Michel estima qu'on tenait déjà suffisamment compte des velléités de participation politique des étrangers en prévoyant d'octroyer le droit de vote actif à tous les Belges naturalisés : « Ceux qui ont obtenu la naturalisation ordinaire peuvent voter dès à présent, ce qui constitue déjà un sérieux progrès » (10).
L'amendement des communistes fut rejeté sans la moindre hésitation : une majorité de 124 députés (démocrates chrétiens, libéraux, Volksunie, FDF-RW) vota contre l'amendement; seuls 2 députés (communistes) votèrent pour et 42 autres (socialistes et communistes) s'abstinrent (11).
À l'automne de 1976, diverses personnes, organisations et associations commencèrent à s'organiser et créèrent un mouvement qui allait oeuvrer en faveur du droit de vote des étrangers. Après une conférence de presse fructueuse tenue le 5 octobre 1976, trente-trois organisations belges et trente-cinq associations d'étrangers se groupèrent dans un mouvement qui s'appela « Objectif 82 » (du côté francophone) et « Stemrecht 82 » (côté néerlandophone).
Les revendications primordiales de ce mouvement étaient un meilleur statut juridique des étrangers (en particulier sur le plan du séjour), et l'octroi du droit de vote actif et passif aux non-Belges au niveau communal pour les prochaines élections d'octobre 1982. Les socialistes francophones inclurent l'octroi du droit de vote aux ressortissants CEE dans le programme de leur parti (12).
Fin octobre 1978, un gouvernement de transition de centre-gauche, qui venait d'être installé sous la direction de M. Paul Vanden Boeynants, déposa au Sénat une proposition de déclaration de révision de la Constitution. L'article 4 de la Constitution, qui réservait l'exercice des droits politiques aux Belges, ne figurait pas dans la liste du gouvernement. Les partisans de l'octroi du droit de vote aux étrangers firent part de leur déception dans la presse.
La sénatrice francophone chrétienne-démocrate Geneviève Ryckmans proposa d'ouvrir l'article à révision. Elle se basait sur les conclusions d'un colloque juridique sur les matières électorales qui s'était tenu à Louvain-la-Neuve en 1978. Il y était dit que la Constitution devait être adaptée avant que le droit de vote ne puisse être accordé aux étrangers pour les élections communales.
Sur le plan juridique, Mme Ryckmans estimait qu'il y avait un vide juridique préjudiciable aux travailleurs étrangers sur le plan économique, social, moral et humain. Sa proposition fut rejetée par une grande majorité. Lors de la dernière séance plénière de la législature à la Chambre, le 14 novembre 1978, la question suscita des discussions enflammées car, contre l'avis du gouvernement, 16 socialistes francophones, 4 chrétiens-démocrates et un socialiste flamand votèrent quand même pour la modification de l'article 4. Avec le soutien de deux communistes et deux membres du Rassemblement wallon, ce vote fut insuffisant pour déclarer l'article 4 ouvert à révision.
La question du droit de vote des étrangers aux élections communales joua un rôle très discret dans la campagne électorale de décembre 1978. Il figurait néanmoins au programme du gouvernement Martens entré en fonction en avril 1979. Aucune initiative ne fut prise par le gouvernement. Par contre, le parlementaire communiste Levaux réintroduisit sa proposition en avril 1979, de même que Glinne, avec quelques collègues du parti socialiste en juin 1979.
1980 vit l'entrée en fonction d'une nouvelle tripartite, Martens III. Le droit de vote des étrangers disparut subitement de l'accord gouvernemental et, pourtant, en 1981, trois propositions de loi étaient introduites. Le francophone chrétien-démocrate A. Liénard proposait d'octroyer le droit de vote mais pas le droit d'éligibilité- à tous les non-Belges séjournant depuis dix ans en Belgique ou nés en Belgique et y séjournant depuis cinq ans. On trouve dans l'exposé des motifs de sa proposition des considérations telles qu'un devoir moral à l'égard des immigrés ou encore une étape logique dans un processus de démocratisation. Il fallait d'autre part laisser à l'opinion publique belge le temps de se familiariser avec l'idée, ainsi que donner aux immigrés la possibilité de prendre petit à petit des responsabilités politiques, avant de leur octroyer aussi le droit à l'éligibilité.
Le socialiste flamand John Mangelschots, dans sa proposition de loi, subordonnait le droit de vote à un séjour de cinq ans dans le pays. L'exposé des motifs précisait que l'on ne pouvait attendre d'étrangers qu'ils optent pour la nationalité belge s'ils caressaient peut-être l'espoir de rentrer un jour au pays.
Enfin, Fievez (Rassemblement wallon) allait encore plus loin puisqu'il proposait en outre d'accorder le droit à l'éligibilité après 10 ans de séjour dans le pays.
Confronté à ces propositions de loi, M. Philippe Moureaux, ministre de l'Intérieur de l'époque, demanda l'avis du Conseil d'État sur leur constitutionnalité. Le 22 octobre 1980, le Conseil d'Etat rendit un avis négatif, selon lequel la Constitution devait être modifiée avant de pouvoir octroyer le droit de vote aux étrangers pour les élections locales. Les propositions furent donc mises au frigo jusqu'à devenir caduques à la fin de la législature.
Les élections de novembre 1981 virent les libéraux enregistrer un grand succès. Avec le gouvernement Martens V, il ne fut plus question de droit de vote des étrangers car les libéraux francophones y étaient fortement opposés. Dans une émission télévisée d'avril 1992, Jean Gol insista sur son refus du droit de vote pour les étrangers.
L'initiative parlementaire vint à nouveau d'un membre communiste, mais elle fut également gelée.
En 1983, le ministre de la Justice Jean Gol, déposa un projet de loi relatif à la politique des étrangers assouplissant les conditions d'octroi de la nationalité. Selon lui, le droit de vote était un droit politique lié à la citoyenneté. Si les étrangers voulaient le droit de vote, ils devaient acquérir la nationalité belge.
En janvier 1986, sous le gouvernement suivant, le parlementaire socialiste Jef Sleeckx essaie à nouveau d'octroyer le droit de vote aux étrangers via une adaptation de la loi électorale. L'avis du Conseil d'Etat, demandé par le président de la Chambre est encore négatif. IL est maintenant clair que les partisans de l'octroi du vote aux étrangers au niveau local doivent au préalable faire modifier l'article 4 de la Constitution.
En 1987, l'article 4 ne figure pas dans le projet de déclaration de révision de la Constitution. M. Jean Gol manifeste toujours son opposition ferme à l'octroi du droit de vote aux étrangers n'ayant pas acquis la citoyenneté belge. Le programme du PRL voyait la possibilité à long terme d'octroyer le droit de vote aux étrangers européens, via un traité multilatéral et sur une base de réciprocité.
Lorsque, en octobre 1987, le gouvernement déposa au Parlement un projet de révision de la Constitution, l'article 4 de la Constitution ne fut pas abordé. Selon Jean Gol, il ne pouvait être question d'octroyer aux non-Belges un droit de vote général qui porterait atteinte à la distinction entre citoyens et étrangers. Dans la ligne du programme du PRL, il voyait toutefois une possibilité d'accorder à terme, par le biais d'une convention multilatérale européenne, le droit de vote aux citoyens européens sur la base de la réciprocité et en donnant la priorité aux pays voisins.
Aux yeux de Gol, une modification de l'article 4 était une entreprise risquée, car cela ouvrirait la possibilité « d'octroyer des droits politiques à d'autres étrangers provenant d'États non membres de la CEE, sans que la réciprocité soit assurée » (13).
La remarque suivante est particulièrement pertinente et pour la clarté, nous la reproduisons dans la langue d'origine (le français) : « Je suis personnellement partisan d'une politique qui vise, au maximum, à l'intégration des étrangers vivant sur notre territoire. Mais, en contre-partie je suis également favorable à une politique visant à rendre aussi temporaire que possible la présence, sur notre territoire, d'étrangers ne désirant pas s'y intégrer. J'estime cette attitude tout à fait logique » (14).
En d'autres termes, selon Gol, l'octroi du droit de vote aux étrangers entraverait l'intégration des étrangers non ressortissants de la CEE, alors que ce problème ne se posait pas pour les étrangers ressortissants de la CEE. En outre, l'octroi du droit de vote aux étrangers hypothéquerait la possibilité de limiter autant que faire se peut la possibilité de séjour des « non-intégrés » (15).
Plusieurs parlementaires de l'opposition tentèrent encore de faire déclarer l'article 4 de la Constitution soumis à révision, mais finalement, cette tentative échoua le 3 novembre 1987 à la Chambre : 47 membres votèrent en faveur d'une possible révision (principalement les socialistes et les verts), tandis que 107 représentants (les partis de la coalition) votèrent contre; il y eut 11 abstentions, de la ... Volksunie (16).
En juillet 1988, la Commission européenne présenta une proposition de directive relative à l'octroi du droit de vote à l'échelon communal aux ressortissants de l'UE, ce qui marqua le début de la discussion.
À l'exemple du Comité interministériel pour la politique des immigrés, le gouvernement décida de renforcer le ius soli, mais de ne pas chercher à accorder le droit de vote aux étrangers (17)
Le 24 novembre 1991, le Vlaams Blok fit une percée sans précédent. Le gouvernement sortant avait signé le Traité de Maastricht le 7 février 1992, dont l'article 8 qui instaurait une citoyenneté de l'Union disposait que tout citoyen de l'Union résidant dans un État membre dont il n'est pas ressortissant a le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales et aux élections au Parlement européen dans l'État membre où il réside, dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État.
Lorsque la ministre flamande de la Santé, Mme Wivina Demeester, suggéra à l'occasion du 14e Festival du migrant à Anvers qu'il était temps de rouvrir le débat sur l'octroi du droit de vote aux étrangers non ressortissants de la CEE, elle fut immédiatement rappelé à l'ordre par le bureau du CVP et fut ensuite critiquée par tous les autres partis flamands, à l'exception d'Agalev (18).
Le 22 novembre 1993, le sénateur Agalev Frans Lozie déposa une proposition de loi concernant le droit de vote et d'éligibilité des habitants de la Belgique aux élections communales et provinciales qui visait à octroyer ces droits aux étrangers ayant séjourné cinq ans dans notre pays.
Ce qui est frappant, c'est que lorsque Hand in Hand décida, en décembre 1993, de se rallier à l'exigence de l'octroi du droit de vote aux étrangers à l'occasion de sa deuxième manifestation en faveur de l'égalité des droits pour les étrangers, qui devait se tenir à Bruxelles le 27 mars 1994, il perdit le soutien ouvert de quelques partis politiques flamands (CVP, SP et VU) qui, auparavant, étaient bien disposés à son égard. Alors que le PS et le PSC, partis francophones, maintenaient leur confiance dans le mouvement, le président du SP, Frank Vandenbroucke, souligna en décembre 1993 que « Hand in Hand commettait une erreur en voulant concentrer la prochaine manifestation. Mettre l'accent sur le droit de vote aux communales constitue une stratégie polarisante, qui renforce les « extrêmes » : le Vlaams Blok, d'une part, et l'extrême gauche, d'autre part » (19)(Traduction).
Sur ces entrefaites, les élections européennes de juin 1994 et les élections communales d'octobre de la même année s'approchèrent; le sénateur socialiste Roger Lallemand (PS) et les sénatrices démocrates chrétiennes Andrée Delcourt-Pêtre et Pierrette Cahay-André (PSC) déposèrent en octobre 1993 une proposition de révision de l'article 4 de la Constitution.
La proposition des sénatrices du PSC supprima tout simplement la condition de la citoyenneté. Mmes Delcourt et Cahay déposèrent en même temps une proposition de modification de la loi électorale qui visait à octroyer le droit de vote et d'éligibilité aux ressortissants de l'UE (après un séjour de, respectivement, cinq et dix ans).
Dans les développements, les auteurs de la proposition laissèrent toutefois la porte ouverte à l'octroi du droit de vote à tous les non-Belges : « L'étape suivante sera celle de l'octroi du même droit à tout étranger résidant en Belgique » (20).
En juin 1996, le ministre flamand de la Culture, de la Famille et de la Santé, M. Luc Martens (CVP), se déclara partisan de l'octroi du droit de vote aux étrangers pour les élections communales. Il demanda, au Conseil flamand, à ce que le débat sur l'octroi du droit de vote aux étrangers non ressortissants de l'UE soit également mené dans le cadre des nécessaires réformes de la Constitution.
Une tentative de Ria Van den Heuvel (Agalev) de faire appuyer une motion invitant à mener le débat sur le droit de vote des étrangers ne réussit qu'à moitié. La motion fut uniquement soutenue par Agalev le 3 juillet 1996, mais bénéficia d'une déclaration de soutien circonspecte sous la forme d'une abstention symbolique de l'ensemble du groupe SP (21).
Au niveau fédéral, le ministre de l'Intérieur Johan Vande Lanotte (SP) se demanda début décembre 1996 quelles seraient les conséquences de l'adage « no taxation without representation » en ce qui concerne l'octroi du droit de vote aux ressortissants non européens : « Il n'est en effet pas évident d'octroyer le droit de vote aux Européens, même ceux qui ne paient pas d'impôts dans notre pays, mais de ne pas l'octroyer aux non-Européens qui résident ici depuis des années et paient des impôts » (22) (Traduction).
En février 1997, le chef de l'opposition, Willy Courtois (VLD), se déclara, certes, prêt à collaborer à l'application de la directive européenne, mais s'opposa à l'octroi du droit de vote aux « immigrés », un terme par lequel il désignait les étrangers non membres de l'UE, parce que cela constituerait une « erreur stratégique « , étant donné que » le Belge moyen n'est pas encore mûr pour le droit de vote des immigrés » (23). Le libéral suggérait ainsi que l'attitude de rejet du VLD à l'égard du droit de vote des étrangers ne devait pas être ramenée à une pure position de principe concernant le lien entre citoyenneté et droit de vote, mais procédait tout autant de motifs électoraux. Dans ce contexte, il faut évoquer le questionnaire organisé avec beaucoup d'ostentation par le VLD en 1995 auprès de ses disciples, ce qu'on a appelé le « référendum du VLD », au cours duquel une grande majorité de membres du VLD s'étaient prononcés contre l'octroi du droit de vote aux étrangers non européens (24).
À l'occasion de l'enterrement, suivi par une nombreuse assistance, de la jeune Marocaine assassinée de 9 ans Loubna Benaïssa, le 8 mars 1997, le journaliste de la BRT Ivan De Vadder demanda à l'ancien premier ministre Jean-Luc Dehaene si l'heure n'était pas venue d'accorder aux étrangers le droit de vote aux élections communales. En réponse, le premier ministre annonça qu'« à l'heure actuelle, un débat sur l'octroi du droit de vote aux immigrés n'est en tout cas pas impossible ». À la suite des propos de Dehaene, tous les bureaux de partis examinèrent cette thématique le même jour. Au nom de son parti, le président du SP Louis Tobback se dit « en principe » favorable à l'idée de l'octroi du droit de vote aux étrangers, à la condition qu'il se fasse « rapidement et sur la base d'un consensus ». En même temps, il souligna que la naturalisation est une voie d'accès plus large au droit de vote. Par la voix de son vice-président Elio Di Rupo, le PS adopta une attitude positive à l'égard du droit de vote pour tous les étrangers. Le PSC s'empressa de proclamer que la Chambre était saisie d'une série de propositions de loi accordant le droit de vote qu'il avait déposées. Seuls les libéraux soulignèrent que le droit de vote devaient rester liés à la nationalité. Le Vlaams Blok souligna que le droit de vote des étrangers était inadmissible et accusa Dehaene de commettre « une tentative de récupération politique condamnable » (25).
Le 11 mars 1997, la parlementaire Agalev Ria Van den Heuvel déposa au Conseil flamand une motion qui priait le gouvernement flamand de « mettre tout en oeuvre pour faire accepter par de larges couches de la population le droit de vote des immigrés aux élections communales, pour le faire accéder au rang des sujets susceptibles d'être discutés et pour le défendre en concertation avec le gouvernement fédéral » (26). Sur ce, les membres du Vlaams Blok Filip Dewinter et Felix Strackx déposèrent une motion contraire qui priait le gouvernement flamand de « se distancier des propos tenus par certains de ses membres à titre personnel en faveur du droit de vote des étrangers et de s'opposer vigoureusement, au sein du comité de concertation, à l'octroi aux étrangers du droit de vote aux élections communales ».
Ils affirmèrent que « sous un angle politique déterminé, on abuse de la compassion justifiée de la population flamande pour la famille de Loubna Benaissa pour placer à l'ordre du jour le droit de vote des étrangers » (27).
Les membres du Vlaams Blok firent valoir que le droit de vote doit rester subordonné à la nationalité, « comme c'est le cas dans presque tous les États démocratiques, partout dans le monde », et que son octroi « aurait des conséquences désastreuses pour la représentation des Flamands au sein des conseils communaux bruxellois », alors que selon son plan politique pour Bruxelles, le gouvernement avait quand même l'intention « de vouloir faire quelque chose contre la minorisation croisssante des Flamands bruxellois » (28). Le lendemain, le président du PRL Louis Michel fit une ouverture marquant le soutien de son parti à la condition que certaines concessions soient faites à l'opposition comme la suppression de l'obligation de voter. Durant la semaine qui suivit l'enterrement de Loubna, le syndicat socialiste francophone FGTB plaida en faveur de l'octroi aux étrangers du droit de vote à tous les niveaux politiques.
Le 18 mars 1997, le bureau du CVP a déclaré à la presse maintenir son point de vue officiel (liaison de l'octroi du droit de vote aux ressortissants hors UE à la nationalité) et a annoncé qu'une enquête interne serait organisée au sein du parti avant de prendre définitivement attitude sur cette question au mois de mai. C'est pourquoi le 19 mars 1997, les membres CVP du Vlaamse Raad ont voté contre la motion déposée par Agalev appelant à octroyer le droit de vote aux ressortissants hors UE (29).
Le 29 avril 1997 les députés CVP Jacques Lefevre et Pierrette Cahay-Andre déposent des propositions visant notamment à octroyer aux non-Belges le droit de vote après 5 années de séjour et le droit d'éligibilité après 10 années de séjour. Le 13 mai 1997, les socialistes Roger Lallemand (PS) et Philippe Mahoux (PS) déposent au Sénat une proposition « ouverte » de révision de la Constitution dissociant le droit de vote aux élections communales et aux élections provinciales de la citoyenneté.
Le 20 mai 1997, le CVP opte à nouveau pour un compromis. Le parti continue à coupler l'octroi du droit de vote aux ressortissants hors UE à l'acquisition de la nationalité, mais il s'oppose en même temps à toute autre « simplification et objectivation » de la procédure de naturalisation. Il a été dit au même moment qu'après les élections communales de 2000, on procéderait à une évaluation afin de savoir s'il n'aurait pas lieu d'octroyer aux étrangers le droit de vote aux élections communales. Pour ce faire, les dirigeants du CVP ont prôné une modification ouverte de la Constitution (30). Le VLD a rapidement fait savoir qu'il ne soutiendrait pas pareille initiative.
Sous l'impulsion de Bert Anciaux, la VU deuxième parti flamand après Agalev a repris dans son programme l'octroi aux étrangers du droit de vote aux élections communales, en fixant comme conditions que les intéressés séjournent dans le pays depuis 5 ans, qu'ils connaissent la langue de la région et qu'ils paient des impôts. Le premier ministre Dehaene a promis, lors des États généraux du CECLR, que les étrangers hors UE jouiraient du droit de vote aux élections communales de 2006.
Lors du Conseil des ministres du 13 février 1998, le gouvernement adopte un avant-projet de loi octroyant aux ressortissants UE le droit de vote aux élections communales de 2000. M. Dehaene n'a pas oublié les étrangers non européens. Quelques jours après le dépôt de l'avant-projet relatif aux élections, il a déposé, au nom du gouvernement deux amendements à la proposition Clerfayt amendée qui, bien qu'ayant été approuvée en commission de la Chambre, fut rejetée en assemblée plénière. Le premier de ces amendements prévoyait qu'une loi accordant le droit de vote aux ressortissants hors UE pourrait être adoptée à la majorité simple. Le deuxième prévoyait que l'octroi de ce droit de vote ne pourrait pas intervenir avant le 1er janvier 2001.
Le 10 mars 1998 le VLD et le PRL annoncent en commission de la Chambre qu'ils bloqueront toute proposition de modification ouverte de la Constitution. Les libéraux francophones rejetaient toute possibilité d'octroi du droit de vote aux ressortissants hors UE.
Quelques jours plus tard, le ministre président wallon Robert Collignon (PS) déclarait dans Le Soir qu'il était favorable à une défédéralisation de la législation électorale vieille revendication flamande que le VLD avait encore fait valoir peu de temps auparavant afin que la Wallonie puisse accorder de manière autonome à tous les non-Belges le droit de vote aux élections locales et régionales (31).
Fin mars, 15 000 personnes ont manifesté à Bruxelles dans le cadre de la journée internationale antiracisme en faveur de l'octroi à tous les non-Belges du droit de vote aux élections communales. On a également appris que Mostafa Ouezekhti élu au conseil régional bruxellois avait quitté Écolo pour rejoindre les rangs du PRL-FDF.
La presse francophone y a vu le signe avant-coureur d'un soutien du PRL-FDF à une révision ouverte de la Constitution (32), ce qui laissait augurer que la majorité des deux tiers serait atteinte.
Et le PRL rentra effectivement dans le rang. Dès le 31 mars 1998, Didier Reynders (PRL-FDF) déposa un étonnant amendement de révision de la Constitution qui proposait d'accorder aux ressortissants hors UE le droit de vote aux élections communales à la condition qu'ils « s'engagent formellement à respecter la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales » (33).
La condamnation de la Belgique par la Cour de justice dans une affaire concernant l'octroi du droit de vote aux ressortissants européens et l'astreinte que la Belgique risquait de se voir infliger ont conduit le gouvernement Dehaene à s'empresser d'entamer, au cours de la première quinzaine du mois de juillet, des négociations avec le PRL-FDF sur la question de la révision de la Constitution. Les libéraux francophones annoncèrent qu'ils étaient prêts à soutenir le gouvernement à condition que les Belges vivant à l'étranger se voient rapidement accorder le droit de vote et que la procédure de naturalisation soit considérablement assouplie. Il s'agissait, à n'en point douter, d'une nouvelle stratégie du PRL-FDF afin de s'attirer les faveurs des nouveaux électeurs potentiels qui avaient jusque là été séduits principalement par ECOLO, le PS et le PSC. À l'automne 1998, la loi sur les naturalisations fut effectivement assouplie en échange de l'appui du PRL pour réviser l'article 8 de la Constitution.
Consécutivement à la révision de la Constitution du 11 décembre 1998, l'article 8 de notre charte fondamentale fut modifiée comme suit. Le nouvel alinéa 3 prévoit que la loi peut organiser le droit de vote des citoyens de l'Union européenne n'ayant pas la nationalité belge, conformément aux obligations internationales et supranationales de la Belgique. Aux termes du nouvel alinéa 4, ce droit de vote peut être étendu par la loi aux résidents en Belgique qui ne sont pas des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, dans les conditions et selon les modalités déterminées par ladite loi. Celle-ci ne pouvait cependant pas être adoptée avant le 1er janvier 2001.
Dans l'intervalle, le SP avait plaidé, lors de son congrès d'avenir de 1998, en faveur du droit de vote aux élections communales et provinciales pour les personnes originaires d'un pays hors UE et en situation de séjour légal dans notre pays depuis au moins cinq ans (34).
Les élections du 13 juin 1999 ont amené au pouvoir le gouvernement arc-en-ciel Verhofstadt Ier. Durant les négociations en vue de la formation du gouvernement, le VLD s'est opposé à l'introduction du droit de vote au niveau communal pour les étrangers, ce qui était une exigence d'AGALEV et d'ECOLO, mais les libéraux flamands ont en revanche accepté d'assouplir et d'accélérer la procédure de naturalisation avant la fin de l'année (35). En application de l'accord de gouvernement (36), le Conseil des ministres a approuvé en première lecture, le 24 septembre 1999, un projet de loi visant à assouplir l'acquisition de la nationalité belge et le gouvernement a approuvé le 17 novembre 1999 un projet de loi modifiant plusieurs dispositions relatives à l'acquisition de la nationalité belge, après y avoir apporté des adaptations en vue de tenir compte des observations du Conseil d'État.
Le 13 décembre 1999, le président du SP, Patrick Janssens, déclare qu'il préférerait personnellement que l'on octroie d'abord aux étrangers le droit de vote aux élections communales avant de revoir le Code de la nationalité. Selon lui, la logique d'intégration a été inversée. Le SP a cependant respecté l'accord de gouvernement (37).
Malgré les critiques formulées par le VLD fin 1999, la Chambre et le Sénat ont approuvé respectivement le 20 janvier 2000 et le 17 février 2000 le projet de loi assouplissant le Code de la nationalité.
La loi du 1er mars 2000 modifiant certaines dispositions relatives à la nationalité belge (Moniteur belge du 6 avril 2000) est entrée en vigueur le 1er mai 2000. Elle étendait la possibilité d'acquisition de la nationalité belge par une déclaration de nationalité auprès du service communal de l'état civil réservée jusqu'alors aux étrangers nés en Belgique aux personnes dont un des parents au moins était belge et aux étrangers qui avaient eu leur résidence principale en Belgique pendant au moins sept ans et qui, au moment de la déclaration, étaient en possession d'un permis de séjour à durée illimitée ou d'une autorisation d'établissement.
La naturalisation peut désormais être accordée par la Chambre après trois ans de résidence au lieu de cinq (ou après deux ans au lieu de trois pour les réfugiés et les apatrides). La volonté d'intégration, dont le parquet devait auparavant s'assurer à l'aide d'un questionnaire, est supposée attestée, selon la nouvelle réglementation, par la demande de naturalisation elle-même. Pour faire opposition sur d'autres bases, le parquet ne dispose plus, désormais, que d'un mois au lieu de quatre.
Cette loi de naturalisation accélérée a permis et permet toujours à de nombreux étrangers d'obtenir la citoyenneté européenne liée à la citoyenneté belge , une citoyenneté dont ils ne bénéficieraient jamais dans d'autres pays de l'Union européenne.
Les chiffres qui suivent permettent de se faire une idée des conséquences immédiates de la loi : selon des informations publiées en mars 2001, 24 878 personnes ont fait une déclaration de nationalité entre mai et novembre, contre 5 273 seulement durant toute l'année 1999. Le nombre de naturalisations a lui aussi augmenté. Entre mai et décembre 2000, la Chambre des représentants a été saisie de 13 337 demandes, contre 12 203 sur l'ensemble de l'année 1999 (38).
Malgré l'assouplissement véritablement dramatique de la législation sur la nationalité, qui octroie le droit de vote aux étrangers à tous les niveaux, les partisans du droit de vote aux étrangers ne restèrent pas les bras croisés et plusieurs propositions de loi furent déposées par les partis de gauche et les partis francophones.
Les propositions de loi Decroly-Talhaoui (Écolo-Agalev) (39) et Lozie-Nagy (Agalev-Écolo) (40) visent à octroyer le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales aux ressortissants non européens qui résident légalement (41) sur le territoire depuis au moins cinq ans. En outre, les auteurs visent également à supprimer l'article 1bis de la loi électorale communale, de telle sorte que les non-Belges ne soient plus obligés de s'inscrire préalablement sur les listes électorales pour pouvoir exercer leur droit de vote.
Il est très important de souligner que, selon les auteurs de ces propositions, l'octroi du droit de vote aux élections communales n'est qu'un premier pas vers une participation démocratique plus large. Selon eux, le droit de vote et d'éligibilité en faveur des étrangers devra également être applicable, à l'avenir, aux élections provinciales, régionales et européennes. Ces auteurs ont également annoncé des propositions de loi spécifiques visant à supprimer, à terme, la condition de nationalité requise pour siéger au conseil de CPAS et pour exercer un mandat de bourgmestre ou d'échevin.
Les propositions de loi Di Rupo (PS) (42) et Mahoux-Daïf (PS) (43) visent à octroyer le droit de vote et d'éligibilité à tous les citoyens de pays tiers inscrits au registre de la population de la commune et ce, non seulement aux élections communales mais aussi aux scrutins provinciaux , ainsi que le droit d'exercer des fonctions exécutives à ces deux niveaux.
Selon ces propositions de loi, la commune est obligée d'envoyer d'office la preuve de l'inscription sur les listes électorales à tous ses habitants non belges inscrits dans les registres de la population. Il suffit alors aux personnes concernées de renvoyer cette preuve pour pouvoir participer aux élections communales et provinciales.
Selon les auteurs, le lien absolu entre la nationalité et le droit de vote au niveau local n'a aucun sens. Les socialistes francophones estiment à ce propos qu'en maintenant le fossé politique entre les citoyens non belges ressortissants de l'UE et les autres, on fait naître chez ces derniers un sentiment d'exclusion qui va à l'encontre de l'objectif d'une intégration équilibrée des diverses communautés constitutives de la population d'une entité locale.
Ces deux propositions de loi mentionnent un délai de cinq ans. En d'autres termes, ces conditions sont donc plus strictes (!!) que la condition de séjour pour la naturalisation, qui a été ramenée à trois ans (44).
Les sénateurs F. Pehlivan (SP) et L. Tobback (SP) (45) plaident en faveur de l'octroi du droit de vote et d'éligibilité aux ressortissants de pays non membres de l'UE qui résident légalement en Belgique depuis au moins trois ans, et ce, tant pour les élections communales que provinciales.
La réglementation proposée applique toutefois ici le principe du vote obligatoire, tant pour les ressortissants que pour les non-ressortisssants de l'UE. Il est fait référence à une résolution du Parlement européen qui appelle les États membres à accorder le droit de vote aux ressortissants de pays non membres de l'UE après un séjour de trois ans. Aux termes de la proposition de loi socialiste, après trois ans de séjour, les étrangers seraient automatiquement inscrits dans le registre des électeurs. Pour les auteurs, l'inscription automatique pouvait, contrairement à l'obligation de voter, être discutée, tout comme la durée de séjour minimale de trois ans. Tobback invitait à régler sans tarder la question du droit de vote pour les étrangers, parce qu'une longue discussion publique jouerait uniquement en faveur du Vlaams Blok.
Le 26 août 2001, le chef de file d'AGALEV, Jos Geysels, exhorta la majorité à mettre en oeuvre le droit de vote des étrangers aux élections communales. Alors qu'il recevait l'appui du président du SP.A Patrick Janssens, le président du VLD Karel De Gucht réagit négativement. Dans l'émission télévisée « De Zevende Dag » du 2 septembre 2001, De Gucht déclara que d'après lui, il ne serait pas raisonnable d'encore vouloir régler l'instauration du droit de vote des étrangers avant les élections législatives suivantes, alors que les prochaines élections communales n'auront lieu qu'en 2006. Selon le président du VLD, cela ne ferait que jouer le jeu du Vlaams Blok.
Verhofstadt précisa clairement, lui aussi, que le gouvernement n'exécuterait que ce qui figurait dans l'accord de gouvernement, et il souligna que dans cet accord, il n'y avait aucune allusion au droit de vote des étrangers. Dans l'émission « De Zevende Dag » du 9 septembre 2001, Bart Somers, représentant du VLD et bourgmestre de Malines, déclara que l'instauration du droit de vote des étrangers en recourant à une majorité de rechange menacerait le gouvernement.
Au congrès du CD&V du 29 septembre 2001, un compromis intervint sur le droit de vote des étrangers, qui compte au sein du CD&V à la fois des opposants [(par exemple Marc Van Peel et Pieter De Crem (46)] et des partisans (par exemple Stefaan De Clercq et Marc Eyskens). Ici aussi, la question est corrélée à l'assouplissement de la législation sur la nationalité. Selon le CD&V, la participation politique passe normalement par l'acquisition de la nationalité, qui assure la participation à tous les niveaux.
Le CD&V veut rendre plus stricte la législation sur la nationalité en portant à nouveau à cinq ans la durée minimale de séjour et en exigeant du candidat à la nationalité belge qu'il possède une connaissance de base de la langue de la région ou s'applique à maîtriser cette langue. Ce n'est qu'au moment où une telle adaptation de la législation sur la nationalité aura été réalisée que le CD&V sera prêt à engager au Parlement le débat sur les circonstances dans lesquelles des personnes qui remplissent les nouvelles conditions de nationalité et sont donc sur la voie de l'intégration, mais qui peuvent produire des raisons fondées pour lesquelles elles ne font pas usage de ce droit, peuvent obtenir le droit de vote aux élections communales par le biais d'un droit d'inscription comme pour les citoyens de l'UE.
Le CD&V reste vague sur la question du sens que l'on pourrait donner à ces raisons fondées. Il est notamment fait référence à des immigrés qui proviennent d'un pays n'autorisant pas la double nationalité et qui, pour ce motif, ne peuvent pas devenir Belges sans perdre leur nationalité d'origine. Selon le président du congrès Nahima Lanjri, des raisons « subjectives « ne sont toutefois pas non plus exclues.
Patrick Dewael, du VLD, s'est déclaré personnellement favorable au droit des étrangers si un certain nombre de conditions sont réunies.
Dans son livre intitulé « Wederzijds Respect » (respect mutuel), il est certes écrit que les étrangers
doivent devenir belge s'ils veulent pouvoir voter mais dans le manuscrit d'origine, M. Dewael tenait un plaidoyer pour l'introduction d'un droit de vote aux élections communales en échange d'un renforcement de la législation relative à la nationalité.
M. Dewael indique, dans la version initiale de son livre, que la nationalité est une voie dépassée qui ne répond pas au principe de bon fonctionnement d'une démocratie.
Selon M. Dewael, à une époque où le sens des États-nations s'estompe sous l'influence de la globalisation de l'économie et des technologies de l'information sans frontières, le lien entre le droit de vote et la nationalité est de moins en moins pertinent : « Le vieux principe démocratique selon lequel celui qui paie des impôts peut avoir son mot à dire sur leur affectation, nous oblige à terme à réfléchir sur la suppression du lien entre la nationalité et le droit de vote » (47).
M. Dewael subordonne l'octroi du droit de vote aux étrangers à la condition d'une durée de résidence minimale de cinq ans.
Le 26 octobre 2001, le président du PS, M. Di Rupo, laissa entendre que son parti n'insisterait pas pour que soit introduit le droit de vote aux étrangers et que le VLD en échange n'accepterait pas de majorité de substitution pour la loi sur les repentis. Après la réaction négative des verts et du SP.A, M. De Gucht nia qu'il était question d'un marchandage mais il confirma aussi qu'il n'accepterait pas de majorité de substitution sur ces deux sujets (48).
Le 6 novembre 2001, la commission de l'Intérieur du Sénat entama la discussion sur l'octroi du droit de vote aux étrangers sur la base de la proposition Lozie-Nagy. À la demande du VLD et du CD&V, la commission organisa, le 20 novembre 2001, une audition de plusieurs experts sur les expériences dans les pays où existait le droit de vote des étrangers.
La veille, le chef de groupe VLD à la Chambre, M. Coveliers, s'était opposé à l'octroi du droit de vote aux étrangers au cours de la présente législature (le Vlaams Blok souligne). Les étrangers devaient selon lui d'abord devenir belges, ce qui était, selon lui, « l'enfance de l'art ».
La proposition de loi en question ne parviendrait jamais à la Chambre : « si le Sénat approuve le droit de vote, il n'y aura effectivement plus de gouvernement ». Comme Karel De Gucht, M. Coveliers exigeait que la loi instaurant une procédure accélérée de naturalisation prévoie à nouveau des conditions plus sévères pour éviter les abus : « à l'occasion d'une prochaine négociation gouvernementale, l'on pourra alors éventuellement aborder la question de l'octroi du droit de vote aux immigrés » (49).
À la faveur d'une interview ultérieure, M. Coveliers déclara que la référence au principe du « no taxation without representation » n'était pas pertinente : « l'argument selon lequel les non-Belges paient aussi des impôts, n'est pas pertinent. Quelqu'un qui ne paie pas d'impôts, ne peut-il donc pas voter ? On en reviendrait alors à l'époque du suffrage censitaire ... » (50).
Le 27 novembre 2001, M. Tobback (SP.A) proposa en Commission de l'Intérieur du Sénat de régler à très court terme la question de l'octroi du droit de vote aux étrangers et, parallèlement, d'adapter la loi instaurant une procédure accélérée de naturalisation.
Les sénateurs VLD demandèrent un temps de réflexion, mais M. De Gucht répéta, le 15 décembre 2001, que le VLD ne voudrait « jamais » entendre parler du droit de vote aux étrangers même si on liait celui-ci à une révision de la loi instaurant une procédure accélérée de naturalisation ni à l'occasion de la formation du gouvernement suivant.
M. De Gucht déclara qu'il n'était pas personnellement opposé à l'octroi du droit de vote aux non-ressortissants de l'Union européenne, mais qu'il estimait qu'une majorité des flamands ne voulait pas en entendre parler (51).
C'était aussi le point de vue de M. Wille, sénateur : « Notre base ne veut pas entendre parler de l'octroi du droit de vote aux immigrés. En Flandre, il n'y a pas de majorité en faveur du droit de vote : ni parmi les représentants de la nation, ni parmi la population » (52).
Les sénateurs socialistes déclarèrent le 18 décembre, ne pas craindre la crise gouvernementale que menaçait de déclencher le VLD.
Le 18 décembre 2001, M. Filip Dewinter, président du groupe Vlaams Blok au Vlaamse Raad, déposa une proposition de résolution relative à l'octroi du droit de vote aux étrangers aux élections communales afin que le Vlaamse Raad adresse un signal fort au Sénat : il n'existe en Flandre aucune majorité en faveur de l'octroi du droit de vote aux étrangers (53).
Dans cette proposition, M. Dewinter expliquait que cet octroi du droit de vote aux étrangers était imposé aux Flamands par la caste politique francophone unanime. En effet, les partis wallons et francophones savent pertinemment qu'en accordant le droit de vote aux étrangers, ils peuvent éliminer définitivement les Flamands de Bruxelles de la carte électorale. Le fait qu'environ 98,5 % des dossiers de naturalisation à Bruxelles sont introduits en français en dit long.
Il convient de remarquer que les groupes de la majorité marquèrent leur accord sur l'examen de la résolution et que seul le CD&V, dans l'opposition, vota contre l'examen en urgence (54). La résolution fut rejetée par tous les partis au Parlement flamand, y compris par le N-VA.
Le droit de vote des étrangers ne fut pas approuvé en 2002. Comme l'avait annoncé Louis Michel (PRL), tous les sénateurs de sa famille politique votèrent contre la proposition dans la commission compétente. Le coryphée du PRL estima qu'il n'était pas opportun de soutenir une majorité de rechange qui isolerait le VLD, son partenaire dans la coalition.
Au début de 2003, Louis Michel déclara ce qui suit : « Nous devons tenir compte des difficultés que le droit de vote des immigrés pose au partenaire gouvernemental qu'est le VLD. (...) Nous devons lui donner le temps nécessaire. Les prochaines élections communales ne sont pas prévues avant 2006 » (55).
Le report de l'octroi du droit de vote aux étrangers pour les élections communales n'était nettement pas au goût de certains membres du CD&V. L'ancien ministre CD&V de la Culture, Luc Martens, déclara qu'une partie sans cesse plus grande des parlementaires CD&V étaient favorables au droit de vote des étrangers : « Et non pas des moindres. (...) Ceux-là ne vont absolument pas accepter que l'on tire prétexte de ce qui se passe maintenant pour reporter définitivement le droit de vote des immigrés » (56).
Dans cette même interview, M. Martens déclara que le vote qui venait d'avoir lieu au Sénat ne clôturait pas le débat : pour les prochaines élections communales, il faudrait de toute façon que ce droit devienne une réalité.
M. Martens a obtenu gain de cause. Alors que, fidèle à une vieille habitude, le VLD s'était présenté aux élections de 2003 avec un programme relativement costaud dans lequel il se disait notamment favorable à des contrôles plus stricts des candidats qui souhaitent obtenir la nationalité belge par naturalisation, favorable à « une intégration généralisée obligatoire des nouveaux arrivés » et contre le droit de vote des étrangers (57), il n'en resta pas grand chose, pour ne pas dire rien, dans l'accord de gouvernement.
Comme pour les autres domaines de la politique, la politique des étrangers est entièrement faite sur mesure des francophones. Cet accord ouvre grand la porte à l'octroi du droit de vote aux étrangers pour les élections communales : le Parlement est « invité » « à se prononcer sur l'octroi du droit de vote et l'éligibilité pour les étrangers au niveau communal » (58). Ce passage ne laissa subsister aucune équivoque et, très vite, on vit des propositions de loi être déposées à ce sujet.
Après que Claude Eerdekens, du PS, et Mme Pehlivan (59) et M. Erdman (60), tous deux du SP.A, eurent déposé des propositions de loi déjà en juillet, le député Philippe Monfils, du MR, annonça, à la fin août, le dépôt d'une proposition de loi par son parti. Pour le MR, un étranger qui veut voter doit habiter depuis au moins cinq ans en Belgique.
Les étrangers doivent demander chacun pour soi à pouvoir voter et doivent signer une déclaration dans laquelle ils s'engagent à respecter la Constitution et
les lois belges (61). La proposition de loi du MR se limite au droit de vote et ne prévoit pas le droit d'éligibilité (62).
Il faut souligner une nouvelle fois, en l'occurrence, que la condition de séjour applicable à l'octroi du droit de vote aux étrangers au niveau local est plus sévère que la condition de séjour de trois ans permettant d'obtenir la naturalisation.
Le sénateur VLD Jean-Marie Dedecker réagit en déposant une proposition de loi spéciale visant à modifier la loi spéciale du 8 août 1988. M. Dedecker veut régionaliser les procédures électorales pour que la Flandre et la Wallonie puissent décider séparément si elles accordent ou non le droit de vote : « la Flandre et la Wallonie ont des points de vue différents sur l'octroi du droit de vote aux étrangers. Jusqu'à présent, la discussion s'est concentrée sur l'octroi du droit de vote au niveau communal, mais il est évident qu'on ne s'arrêtera pas là. La présente proposition permet à chaque Région d'octroyer le droit de vote aux immigrés pour la Chambre et le Sénat. » (traduction) M. Dedecker ne craint pas qu'il n'y ait pas de majorité au Parlement flamand pour s'opposer à l'octroi du droit de vote aux étrangers : « Je suis absolument certain de l'existence de pareille majorité. Organisons un référendum sur la matière, mettons la démocratie citoyenne en pratique » (63).
Toutefois, alors que cette proposition suscite des réactions négatives, on constate que fin janvier, M. Verhofstadt a affirmé que l'octroi du droit de vote aux étrangers ... était un élément de l'accord du Lambermont. Selon l'accord du Lambermont, l'ensemble de la législation électorale communale et provinciale y compris, par conséquent, l'octroi du droit de vote aux étrangers au niveau communal serait transféré aux Régions et la Flandre, Bruxelles et la Wallonie pourraient alors décider si elles accordent le droit de vote aux étrangers hors UE et si oui, à quelles conditions (64).
Le CD&V propose une solution alternative à Louis Michel : « Les partis francophones de la majorité pensent accorder la double nationalité aux Belges qui résident à l'étranger. Pourquoi ne pas l'accorder également aux étrangers qui résident ici ? Nous constatons qu'on hésite à devenir belge, parce que l'on perd son ancienne nationalité. Cette hésitation concerne également les personnes qui sont bien intégrées ici. C'est un choix émotionnellement difficile. Permettons leur donc de conserver cette nationalité, elles obtiendront alors automatiquement le droit de vote » (traduction), selon le président du CD&V Yves Leterme (65).
En d'autres termes, le CD&V veut que les étrangers résidant en Belgique obtiennent le droit de vote par le système de la double nationalité. Un Marocain ou un Turc qui souhaite obtenir un passeport belge ne devrait alors plus remettre ses anciens papiers.
Au cours de la première quinzaine de septembre 2003, le président du VLD Karel DE GUCHT met en garde les partis francophones et le SP.A contre les effets secondaires de l'octroi du droit de vote aux étrangers au niveau communal. Tout d'abord, il souligne qu'une majorité des Flamands et des représentants flamands y sont opposés. Selon lui, cet octroi fera les affaires du Vlaams Blok et celui-ci risque de bloquer la gestion de Bruxelles :
« Le SP.A est prêt à être le seul parti flamand à approuver, avec les partis francophones, l'octroi du droit de vote aux immigrés au niveau communal et ce, contre la volonté de la majorité des Flamands et des représentants flamands. J'appelle le SP.A à réfléchir à cette responsabilité immense. Le SP.A a les clés en main. ( ...) Primo, les bagarres concernant ce dossier symbolique profiteront à nouveau au Vlaams Blok. Secundo, la gestion de Bruxelles sera bloquée. En soutenant unanimement l'octroi du droit de vote aux immigrés, les partis francophones poussent l'électeur francophone bruxellois dans les bras du Vlaams Blok. Pour le Bruxellois francophone qui réprouve l'octroi du droit de vote aux immigrés, voter pour le Vlaams Blok est la seule solution » (66).
Deux parlementaires du VLD se distancient ouvertement du point de vue de leur parti. Sven Gatz (Parlementaire flamand et bruxellois) et Patrik Vankrunkelsven (sénateur) sont ouvertement en faveur de l'octroi du droit de vote aux étrangers.
Ils sont soutenus par l'association libérale des étudiants de Gand, la LVSV. MM. Vankrunkelsven et Gatz « déplorent que leur parti ait adopté une attitude de refus à ce point tranchée qu'il lui est difficile de s'en départir encore » (67). Annemie Neyts, Annemie Van de Casteele, Bart Tommelein, Dirk Verhofstadt et Vincent Van Quickenborne se rangent eux aussi derrière Gatz et Vankrunkelsven (68).
Dans l'allocution qu'il a prononcée à Namur le 21 septembre 2003 dans le cadre des fêtes de Wallonie, le ministre-président wallon Jean-Claude Van Cauwenberghe (PS) a déclaré que le droit de vote pour les étrangers aux élections communales pouvait emporter l'approbation de tous les partis wallons. Personnellement, il est également partisan de permettre aux étrangers de voter aussi aux élections régionales en 2009. Dans une réaction, le ministre-président flamand Barts Somers (VLD) s'oppose au droit de vote des étrangers : « Cette innovation irait à l'encontre de la volonté de la majorité des représentants flamands au Parlement fédéral. » Bart Somers a souligné qu'il y avait en la matière un grand écart entre l'opinion publique du sud et celle du nord du pays. Au sud, il y a unanimité sur le droit de vote des étrangers, tandis qu'en Flandre une grande majorité des élus y est opposée (69).
Pour le député VLD Karel Pinxten, c'est une affaire entendue que les Flamands ne veulent pas du droit de vote pour les étrangers et que les francophones veulent imposer ce droit de vote à la Flandre (70).
Au cours des journées du parti organisées à Ostende le week-end des 26 et 27 septembre 2003, une large majorité des mandataires du VLD a décidé de se battre activement contre toutes les propositions de loi visant à instaurer le droit de vote pour les étrangers. Le président du groupe politique VLD à la Chambre, Rik Daems, souligne que pratiquement toutes les matières qui touchent aux communes relèvent de la compétence régionale et qu'il est donc logique qu'il en soit de même en ce qui concerne la compétence en matière de droit de vote. Le chef de groupe VLD au Sénat, Hugo Coveliers, estime qu'il est impensable que le SP.A et les francophones imposent une chose que 80 % des Flamands rejettent. Le président du VLD Karel De Gucht signale également que la compétence relative à l'octroi des licences d'armes a été régionalisée et qu'une défédéralisation permettrait aussi aux francophones d'obtenir leur droit de vote pour les étrangers (71).
Le SP.A-Spirit, le PS et le MR réagissent rapidement et ne veulent pas entendre parler d'une régionalisation. Le chef de fil du MR, Louis Michel, déclare
très clairement : « J'espère que mes amis libéraux se rendent compte que l'instauration du droit de vote pour les immigrés est inéluctable. Il ne s'agit que de quelque 100 000 personnes, mais c'est malgré tout important pour moi » (72).
Le CD&V aussi ne soutient pas le VLD. « En fait, le président du VLD Karel De Gucht abuse de la régionalisation pour dissimuler les oppositions entre les partenaires de la coalition violette », déclare le président Yves Leterme, qui poursuit : « Mais une régionalisation doit résoudre les problèmes des Flamands et non pas ceux de De Gucht ou de Stevaert » (73).
Karel De Gucht déclare alors que la réaction des francophones ne l'étonne pas : « Ils réagissent à la carte, puisqu'ils ont bien régionalisé le commerce des armes. Et le SP.A-SPIRIT entend accélérer la discussion par crainte de ses propres troupes. Ce qui m'a le plus étonné, c'est la réaction du CD&V qui, pour des raisons tactiques, reste à l'écart bien qu'il soit aussi opposé au droit de vote pour les immigrés (74).
Au cours du programme « Controverse » diffusé sur RTL le dimanche 5 octobre 2003, le ministre-président bruxellois Daniel Ducarme (MR) déclare qu'il ne veut pas se prononcer sur la question de savoir si le vote au Parlement doit intervenir avant ou après les élections de 2004. Selon le président du CD&V Yves Leterme, l'attitude évasive du MR est révélatrice d'un accord avec le VLD pour reporter le débat jusqu'après l'élection de 2004 (75).
Au cours de ce débat, il est également apparu que les partis francophones n'étaient pas d'accord sur les conditions, le contenu précis et sur la portée du droit de vote à accorder aux étrangers (76).
Cet aperçu historique permet de tirer une conclusion claire. L'octroi du droit de vote aux étrangers (au niveau communal) a toujours été une exigence des francophones et de la gauche, contre laquelle aucune opposition flamande ne s'est jamais manifestée.
À part le PRL (devenu le MR), tous les partis francophones ont toujours été en faveur de l'octroi du droit de vote aux étrangers. Ce sont des motifs électoraux stratégiques qui ont fait changer le PRL d'avis. Ce parti ne pouvait pas rester à la traîne dans la pêche aux nouveaux groupes d'électeurs. Au cours de la législature 1999-2003, c'est à contrecoeur qu'il a soutenu son homologue flamand, le VLD.
Nous pouvons être très brefs en ce qui concerne le VLD. Ce parti s'opposerait prétendument à l'octroi des droits de vote aux étrangers. En réalité, c'est précisément le VLD qui, par le biais de la procédure accélérée de naturalisation, a fait en sorte que les étrangers puissent voter en masse à tous les niveaux sans devoir faire preuve d'aucune volonté d'intégration.
Marie-Claire Foblets souligne, à juste titre, que : « le partenaire libéral de la coalition qui, sous la précédente législature, a voulu éluder le débat sur le droit de vote au niveau communal, a fait aujourd'hui une concession bien plus considérable et a permis que l'on inscrive dans la loi une tolérance bien plus grande que si on avait bel et bien discuté à l'époque du droit de vote au niveau communal. L'acquisition de la nationalité permet d'obtenir le droit de vote, non seulement au niveau communal, mais à tous les niveaux » (77) (traduction).
Le VLD trompe une fois de plus l'électeur flamand quand il affirme qu'il s'oppose à l'octroi du droit de vote aux immigrés. En effet, il a déjà accordé le droit de vote aux étrangers. Depuis l'adoption de la loi sur la procédure accélérée de naturalisation, la citoyenneté est devenue un simple morceau de papier et les étrangers peuvent participer aux élections en masse à tous les niveaux.
L'octroi du droit de vote aux étrangers n'est pas une question de principe pour le VLD. Le parti ne s'y oppose actuellement que pour des raisons purement électorales et stratégiques. La population n'est pas consciente des conséquences dramatiques de la loi relative à la procédure accélérée de naturalisation. Par contre, le dossier actuel concernant l'octroi du droit de vote aux étrangers est très symbolique et identifiable par tout un chacun.
Nous pouvons également être très brefs à propos du CD&V. S'il s'est jamais véritablement opposé à l'octroi du droit de vote aux étrangers, à aucun moment cette opposition n'a été unanime au CD&V, il y a à la fois des partisans et des opposants et ce n'est certainement pas une opposition de principe (78). En témoigne la dernière manoeuvre de Yves Leterme.
Le SP.A et Agalev ont toujours oeuvré à l'octroi du droit de vote aux étrangers. Les partis flamands (79) et pas seulement le SP.A. (80) et Agalev portent une lourde responsabilité en la matière.
L'orateur est convaincu que cette opposition flamande doit se manifester, malgré la collaboration des socialistes avec les partis francophones. Le Vlaams Blok ne trahira pas ses électeurs et ne se mettra pas à genoux devant les hordes francophones.
2.14 Mme Thijs
Mme Thijs constate qu'aucun des partisans de la présente proposition de loi n'intervient de manière substantielle dans le débat en commission.
Personne ne peut être satisfait de la façon dont la discussion est menée. Il est scandaleux de devoir débattre dans de telles conditions sur un sujet aussi important.
En tant que chambre de réflexion, le Sénat manque ici une occasion unique de débattre en profondeur de la problématique à l'ordre du jour. Alors qu'on propose de tenir de grands débats sur l'astronautique, sur le vieillissement, etc., un débat approfondi s'avère impossible sur la problématique des immigrés.
Le groupe CD&V, dont Mme Thijs fait partie, a toujours voulu aborder ce problème dans un contexte global. Il serait bon de mener ce débat de société dans un climat serein, plutôt que dans des conditions indignes d'une démocratie.
Depuis le milieu des années nonante, la question du droit de vote des immigrés est devenue un dossier symbolique. Tous les partis se sont laissés piéger par la manière dont cette problématique a aujourd'hui été mise à l'ordre du jour.
En principe, il faudrait parler d'abord de l'intégration. Où en sommes-nous à cet égard ? Comment pourrait-on mieux s'attaquer à ce défi ? Qu'en est-il des 70 % de jeunes allochtones qui sont aujourd'hui sans emploi ? Toutes ces questions sont importantes.
Ce sont les partis socialistes qui veulent absolument voir voter rapidement cette proposition de loi, dont ils attendent un bénéfice électoral. Ils supposent que si les immigrés obtiennent le droit de vote, ils voteront principalement pour eux.
Le Sénat a pour vocation de débattre en profondeur. Les discussions ne doivent pas être menées sur la base de considérations purement électorales, mais d'une manière telle que toute la société puisse en bénéficier.
On ne résoudra pas leurs problèmes en se contentant d'octroyer le droit de vote à tous les immigrés.
Dans la commune de Mme Thijs, il existe depuis cinq ans un contrat d'intégration obligatoire. Peut-être toutes les communes devraient-elles en faire autant. Les personnes qui arrivent dans la commune bénéficient d'un accompagnement. Chaque jour, des nouveaux venus arrivent dans la commune, soit dans le cadre du regroupement familial ou en tant que réfugiés politiques. Cet aspect important de l'intégration est absent de la discussion.
On peut tirer des leçons de ce qui se passe aux Pays-Bas, où les allochtones ont le droit de vote depuis 1983. Force est de constater que, vingt ans plus tard, les mêmes problèmes continuent à se poser. Cela prouve que le seul fait d'accorder le droit de vote à ces gens ne résout rien.
Il importe de dissiper rapidement cette illusion. Il faut s'attaquer aux problèmes avec le concours de la communauté immigrée.
Comme nous, les Pays-Bas ont instauré une procédure de naturalisation accélérée avant d'envisager l'octroi du droit de vote aux immigrés. Le parallélisme est tellement grand entre les deux pays qu'il est d'autant plus grave qu'on ne veuille pas ou qu'on n'ose pas tirer les leçons, chez nous, de l'expérience néerlandaise. En réalité, la proposition de loi doit être votée coûte que coûte. Comme on sait avec certitude que cette loi n'améliorera pas spectaculairement la situation des allochtones, il est vain de traiter ce sujet avec un tel empressement.
Le CD&V souhaite partir du principe d'une société interculturelle enrichissante. Une telle base permettrait d'améliorer la société. Actuellement cohabiter se résume souvent, pour les diverses cultures et les divers groupes ethniques, à vivre chacun de son côté. La politique doit faire en sorte que tous puisse vivre dans le respect des convenances. Toute personne qui souhaite s'établir dans notre pays doit avoir la possibilité de mettre à profit ses talents propres. Il faut mettre l'énorme diversité des cultures dans notre pays au service du développement de notre société.
Les auteurs de la proposition de loi qui nous occupe ont mis la charrette avant les boeufs en la déposant. Elle ne permettra pas d'obtenir quoi que ce soit. En effet, l'on a créé à tort, au sein de la communauté immigrée, des attentes énormes auxquelles la proposition de loi à l'examen ne permettra jamais de répondre.
Au lieu de cela, il faut tendre vers une société dans laquelle les individus cohabitent en faisant preuve de respect et de tolérance les uns vis-à-vis des autres.
La première priorité doit être d'éliminer le retard qui existe actuellement dans divers domaines et, notamment en matière d'enseignement, sur le marché du travail, en ce qui concerne l'accès au logement, etc. Ce qui importe, c'est que l'on s'efforce de développer une société multiculturelle harmonieuse, dans laquelle chacun ait des droits et des devoirs.
Lors de la discussion du projet au cours de la législature précédente, on n'a pas abordé tous les aspects du problème. La discussion sur le lien entre l'octroi du droit de vote aux immigrés et la procédure accélérée de naturalisation, notamment, n'a pas pu avoir lieu.
Au cours de la période qui a précédé les élections législatives fédérales de mai 2003, tous les partis ont concédé que la loi relative à la procédure accélérée de naturalisation était une mauvaise loi, qu'il convenait d'adapter au plus vite. Le CD&V demande dès lors que l'on s'attèle à nouveau à l'adapter au cours de la présente législature. Le message à la population doit être clair : si, pour les immigrés, la nationalité n'est pas un simple morceau de papier, ce n'est pas non plus le cas pour le CD&V.
L'intégration « honnête » constitue un autre aspect important. Elle réclame une certaine ouverture de la part de notre propre population. On pourrait citer de nombreux exemples de réussite, mais ce sont toujours les autres exemples qui éclipsent le débat. Il faut réfléchir à la manière de résoudre ce problème.
Le CD&V a formulé de nombreuses propositions concrètes. L'une d'entre-elles est d'encourager l'intégration par des projets d'accueil obligatoires. Ceux-ci peuvent bel et bien fonctionner.
Entre 1994 et 1999, la Flandre a accueilli environ 21 000 nouveaux venus par an, sans compter les régularisés, dont 55 % de personnes qui étaient originaires de l'Union européenne. On constate que le système actuel des projets d'intégration ne suffit pas. Il faut travailler à l'intégration au départ des diverses communautés.
Un deuxième élément que Mme Thijs souhaite souligner est que le CD&V rejette la discrimination, le racisme et l'extrémisme. On ne saurait tolérer ces phénomènes sous aucune forme, ni quand ils touchent des allochtones ni quand il touchent des autochtones.
Plusieurs aspects sont importants. Il faut tout d'abord que la population comprenne mieux ce qu'est une société multiculturelle. On en parle beaucoup, mais on agit peu.
Pour éclairer le citoyen, il faudrait également attirer l'attention sur les initiatives positives qui ont été prises dans l'enseignement, dans la vie associative, sur le marché du travail, dans le secteur des loisirs, etc.
Il faut en outre veiller d'urgence à ce que les médias diffusent une information positive sur la présence des allochtones. Le CD&V plaide pour que les médias s'auto-évaluent et corrigent les erreurs récurrentes qu'ils commettent en abordant de manière caricaturale les événements auxquels sont mêlés des immigrés.
L'intervenante plaide dès lors pour l'organisation de tests de situation en vue de lutter contre la discrimination sur le marché du travail et en matière de logement.
La participation des immigrés constitue un troisième élément et l'acquisition de la nationalité doit aller de pair avec l'intégration. L'émancipation politique et la participation sont des éléments importants d'une bonne politique de l'intégration. C'est pourquoi on lie en premier lieu le droit de vote à l'acquisition de la nationalité, qui constitue le principal moyen d'intégration. L'acquisition de la nationalité est un droit pour toute personne qui a un permis de séjour de durée illimitée, qui réside de manière légale et ininterrompue depuis cinq ans dans notre pays, qui n'a aucun passé criminel, qui ne constitue aucun danger pour la société, qui a une connaissance de la langue de la région où elle vit et qui s'efforce de l'apprendre.
C'est pourquoi il faut adapter en profondeur la loi relative à la procédure accélérée de naturalisation.
Le travail constitue un autre élément vital de l'intégration. La réussite de l'intégration dépend totalement de la réussite de l'insertion socio-économique. L'emploi est l'un des principaux leviers d'intégration. La possibilité d'avoir un logement convenable, d'être en bonne santé, de construire une famille et de fournir une bonne éducation à ses enfants dépend en grande partie de la possession d'un emploi. Il est absolument inacceptable que des jeunes allochtones n'aient aucune possibilité de participer à notre économie. On investit trop peu dans ces jeunes.
La période de 1996 à 2001 a été une période de reprise économique, mais, si le chômage des demandeurs d'emploi sans travail a diminué globalement de 33 %, il a augmenté d'environ 30 % pour les allochtones. Cette augmentation vaut surtout pour les « nouveaux venus ». Comment cela se fait-il ? Conclusion : les immigrés n'ont pas pu profiter de la reprise économique dont a bénéficié la Belgique. Comment se fait-il que les allochtones soient surreprésentés dans les chiffres du chômage ? Est-ce dû à une attitude discriminatoire des employeurs et à un manque de qualification (connaissances linguistiques lacunaires, niveau de scolarisation peu élevé, mauvais choix d'études, ...) des candidats allochtones ? Le groupe CD&V veut veiller à ce que les allochtones puissent trouver un emploi; il y a lieu, plus concrètement, de ramener le taux de chômage des immigrés au niveau de celui des Belges.
À cette fin, le CD&V a élaboré des propositions très concrètes. Il souhaite :
que l'on s'attache en priorité à prendre une série de mesures générales en faveur de l'ensemble des personnes dont les chances sont réduites sur le marché du travail (réduction des coûts salariaux en fonction de la durée du chômage et dispense de cotisations patronales pour les revenus les plus bas);
que l'on mette effectivement en oeuvre les plans d'action positifs pour les allochtones dans le secteur public et dans le secteur privé. On peut constater d'une manière générale que très peu d'allochtones sont occupés dans le secteur public.
que l'on organise des tests pratiques pour pouvoir constater les discriminations lors du recrutement;
que l'on consacre plus d'attention et une aide accrue aux initiatives positives qui sont prises dans le secteur privé et que l'on prenne des mesures de sensibilisation qui sont absolument nécessaires;
que l'on ouvre, aux immigrés, l'accès à tous les emplois de la fonction publique;
le plan premier emploi, qui vise à recruter des jeunes de moins de 30 ans en prévoyant des incitants supplémentaires pour les personnes peu qualifiées, oblige les entreprises à y réserver 3 % de leurs emplois. Dans l'état actuel des choses, quasiment aucun allochtone n'en bénéficie;
accroître l'offre de cours de langues en néerlandais ou en français ...
Pourtant, tous les allochtones ne sont pas sans qualification. En l'espace d'un an, 35 000 personnes se sont ajoutées (on est passé de 120 000 en 2002 à 155 000 aujourd'hui). Le problème, c'est qu'ils doivent presque tous commencer comme travailleurs non qualifiés. Comment peut-on rompre cette spirale ?
Mme Thijs relève ensuite que d'après son groupe, tous les élèves doivent bénéficier de chances égales. Il faut éviter que des retards scolaires ne surviennent dès l'enfance, car ils peuvent avoir de lourdes conséquences par la suite. Cela influence certainement la carrière scolaire et les chances de trouver un emploi. C'est pourquoi il faut prévoir suffisamment de possibilités d'accompagnement des études. Ce sont, certes, des mesures qui relèvent du champ de compétences des régions, mais elles font partie du débat global.
En ce qui concerne le logement des allochtones, Mme Thijs souligne que la ghettoïsation, dans quelque sens que ce soit, freine souvent l'intégration. Un brassage social des groupes de population est important pour assurer un environnement vivable.
Par ailleurs, le CD&V est favorable à la mise en oeuvre de la reconnaissance de l'islam et entend coopérer à la reconnaissance à part entière de celui-ci. Il faut que les imams et les enseignants islamiques suivent une formation chez nous et donc, qu'ils parlent aussi le néerlandais ou le français. Il est urgent de créer une faculté de théologie où l'islam sera enseigné. Notre pays sera ainsi mieux protégé contre l'extrémisme.
Un autre élément dans le projet d'intégration est le fait de prévoir du travail sur mesure pour les jeunes, les femmes et les personnes âgées. La génération plus âgée des immigrés commence à lancer les premiers signaux, mais on y accorde peu d'attention, alors que ce serait nécessaire.
2.15. M. Jean-Marie Dedecker
M. Jean-Marie Dedecker rappelle l'origine de l'adage « No taxation without representation » : lorsque les immigrés britanniques en Amérique constatèrent qu'ils ne pouvaient plus voter au Royaume-Uni, ils menacèrent de ne plus payer l'impôt à la couronne britannique. Depuis lors, nous avons des conventions visant à éviter la double imposition et celui qui paie des impôts en Belgique ne doit plus le faire dans son pays d'origine (à condition bien entendu qu'il existe une telle convention).
Par rapport à la notion de « racisme », M. Jean-Marie Dedecker tient à souligner que ce que les Flamands considèrent comme du racisme, c'est le fait que les structures sociales pour lesquelles ils ont épargné et cotisé pendant des générations sont dilapidées par des gens qui n'ont pas contribué à les alimenter.
Quant à l'affirmation selon laquelle les jeunes immigrés auraient besoin du droit de vote pour s'intégrer, l'intervenant souligne qu'elle est inexacte. Il renvoie en la matière aux Pays-Bas, où une commission d'enquête parlementaire a été chargée d'examiner pourquoi la politique d'intégration a échoué, en dépit du fait que les immigrés y ont, depuis trente ans déjà, le droit de vote aux élections communales. Il ressort du rapport 2003 sur les minorités que la distance qui reste à parcourir est encore très grande, que ce soit sur le plan sociétal, social ou culturel. Elle est le plus visible et le plus perceptible au niveau local. Sur le plan social, la distance se manifeste par un taux d'emploi bien trop bas pour certaines parties de la population minoritaire; ce sont surtout les femmes turques et marocaines et les personnes âgées de plus de 40 ans qui ne sont présents qu'en nombre très réduit sur le marché du travail. Un taux d'emploi peu important implique que ces groupes sont largement tributaire du régime d'allocations.
Selon l'intervenant, le même schéma peut s'appliquer à la situation en Belgique, mais chez nous on ne peut apparemment pas se permettre de publier des chiffres à ce sujet.
M. Dedecker cite une allocution que M. Verdonk, le ministre chargé des Étrangers et de l'Intégration aux Pays-Bas, a faite le 23 octobre 2003 à l'occasion de la présentation du rapport 2003 sur les minorités présenté par le Bureau du plan social et culturel (SCP) :
« À l'école, les connaissances linguistiques des jeunes restent largement insuffisante. C'est notamment pour cette raison que le taux de décrochage scolaire dans l'enseignement secondaire est trop élevé, y compris parmi les élèves de la seconde génération. Le décrochage scolaire est ensuite un facteur important de la surreprésentation des jeunes d'origine marocaine et antillaise dans la criminalité. L'implication nombreuse de ces groupes dans les affaires criminelles est désastreux pour l'image des minorités et entrave leur intégration.
La distance sociale. L'intervenant entend par là le peu de contact existant entre les minorités et les autochtones. Les analyses du SCP montrent que la fréquence des contacts entre les minorités et les autochtones a même diminué au cours des dernières années. Les mariages de Turcs et de Marocains avec des autochtones sont plutôt rares et se soldent souvent par un échec. La majorité des conjoints sont issus du pays d'origine. De ce fait, le progrès que l'on a fait en matière d'intégration est perdu en grande partie.
Culturellement, il y a un écart au niveau de la langue, mais aussi sur le plan des valeurs et des normes. Une grande partie de la population minoritaire a encore de grande difficultés avec le néerlandais, même après avoir séjourné de nombreuses années dans notre pays. Une connaissance limitée des valeurs et des normes qui régissent notre pays et qu'ils n'y adhèrent que mollement donne lieu régulièrement à des conflits culturels entre les minorités et les autochtones.
Localement, la distance est réduite à son expression la plus littérale parce que située dans l'espace du fait que les minorités habitent et vivent pour une large partie séparés des autochtones. Les ghettos de minorités sont confrontés à une dégradation excessive et accentuent ainsi l'opinion négative qu'une partie sans cesse plus grande de la population a des minorités. Cela ne favorise pas davantage l'intégration.
M. Jean-Marie Dedecker cite ensuite les propos de M. Jan Marijnissen, président du groupe SP, aux Pays-Bas :
« L'intégration est tout d'abord la responsabilité des personnes concernées elles-mêmes. On constate, rétrospectivement, que la question de l'intégration n'a jamais fait l'objet d'une analyse fondamentale. Ce que nous faisons, c'est appliquer un emplâtre sur une jambe de bois lorsque des problèmes surgissent en aval. Il convient de procéder aussi vite que possible à cette analyse et, ensuite, d'examiner quelles mesures devront être prises. L'absence de politique d'intégration vaut mieux qu'une mauvaise politique, comme on le voit en Allemagne, où on n'a pas mené de politique d'intégration, mais où les résultats sont nettement plus positifs que chez nous, malgré les dizaines de milliards que nous y avons injectés. Il ne faut pas sombrer dans le paternalisme et penser que nous pouvont aider les allochtones à s'intégrer en organisant des cours et en formant des animateurs socio-culturels. Ils doivent le faire eux-mêmes. »
M. Jean-Marie Dedecker se réfère également à un rapport du sociologue Ruud Koopmans, publié le 12 octobre 2002 dans le « Groene Amsterdammer » :
(Traduction) « Aucun État au monde n'a investi autant d'argent que les Pays-Bas dans la politique d'intégration au cours des vingt dernières années. Nul ne connaît le montant exact des investissements, mais on estime que plusieurs milliards d'euros ont été injectés dans des projets de promotion du bien-être, des cours et des fondations dans le but d'aider les nouveaux arrivants à s'intégrer dans la société néerlandaise.
Le site internet www.integratie.net présente un bon aperçu de ce que les autorités de notre pays (les Pays-Bas) ont réalisé dans ce domaine. Dans l'introduction de la page d'accueil, on peut lire ce qui suit : (traduction) « Les Pays-Bas sont une société multiculturelle au sein de laquelle chacun peut vivre en citoyen à part entière. Telle est en tout cas le voeu du gouvernement néerlandais. » On y recense plus de cent organisations sociales, trente institutions publiques et une quarantaine de minorités et groupements ethniques distincts, actifs d'une manière ou d'une autre dans le domaine de l'intégration.
L'agenda annonce une saison d'activités variées (dont par exemple des ateliers de cuisine multiculturelle), des événements et des débats sur des thèmes tels que les relations amoureuses, la fierté de porter le voile, l'image des allochtones dans la presse, l'émancipation de la femme et l'éducation. Le site lance un appel à toute personne intéressée par le rôle d'ambassadeur régional pour la campagne officielle « Oog voor anderen kan veel veranderen ». On recherche à cette fin des « personnes enthousiastes et charismatiques, des figures connues disposant d'un réseau de relations et prêtes à s'investir pour une société multiculturelle ».
Pour connaître le contenu de cette campagne, il suffit de cliquer sur des icônes représentant des photos. Une jeune musulmane portant le voile déclare : « Les Néerlandais pensent que si je porte le voile, je ne suis pas intégrée. Je suis prête à en parler avec eux, mais pourquoi devrais-je l'enlever ? » Un fermier néerlandais coiffé d'un casquette s'interroge : « Les étrangers me posent question. Et si je les posais tous simplement, ces questions ? » Et une petite Chinoise s'étonne : « Je n'ai pas beaucoup d'amis néerlandais. C'est quand même étrange, avec tant de Néerlandais autour de mois. »
Il est clair que l'on fait beaucoup sur le plan de l'entraide et du dialogue pour promouvoir le multiculturalisme, c'est-à-dire pour faire coexister pacifiquement, sur un pied d'égalité et dans le respect mutuel, des citoyens aux origines culturelles différentes.
À la fin septembre, M. Marijnissen, le président du SP, estimant que « la politique menée au cours des dernières années avait donné que de très maigres résultats », a déposé, avec l'appui de tous les groupes politiques sauf le LPF une motion visant à examiner à quoi était dépensé exactement tout cet argent.
Selon Hans Roodenburg, chercheur au CPB, il est impossible de calculer le coût et les résultats exacts de l'immigration des travailleurs étrangers et de la politique d'intégration : « Un tel calcul ne serait qu'une simplification excessive d'une réalité complexe. Lorsqu'on a cessé, en 1975, d'embaucher de la main d'oeuvre peu qualifiée, 70 000 travailleurs immigrés avaient franchi les frontières du pays. Par suite des regroupements familiaux et des naissances, la communauté turque et marocaine compte aujourd'hui environ 570 000 personnes. Or, on constate que peu d'entre eux seulement participent au circuit du travail et que beaucoup, au contraire, recourent à la sécurité sociale. Il n'est pas vraisemblable que tout cela ait finalement débouché sur un solde positif. »
Même s'il est impossible de chiffrer ce phénomène, on s'interroge depuis un certain temps déjà sur l'utilité de la politique d'intégration menée jusqu'à présent. Les attentats du 11 septembre et l'assassinat de Pim Fortuyn ont ravivé un malaise latent. Alors qu'on estimait jusqu'il y a peu qu'on avait déjà réalisé beaucoup et qu'il fallait encore investir davantage, on a plutôt tendance à penser aujourd'hui que la société multiculturelle est une catastrophe, que l'intégration est un véritable échec et que l'argent a été dépensé de manière injustifiée.
Comme si tous les tabous étaient tombés, on aborde aujourd'hui toute une série de thèmes dont on ne pouvait parler jusqu'il y a peu. Pour la première fois, on ose dire que des développements indésirables se sont produits au sein du monde musulman et les Néerlandais de confession islamique sont contraints de définir leur attitude par rapport à l'islam politique et à l'État de droit néerlandais. Et c'est une arme à double tranchant : le relativisme culturel est en mauvaise posture et la question désormais centrale est celle de savoir pourquoi les autochtones se sont dérobés au débat critique sur notre politique d'intégration pendant toutes ces années.
Le travail d'autocritique auquel on commence à se livrer, va (pour l'instant) surtout dans le sens de la correction politique, notamment, du PvdA. « Pourquoi la social-démocratie, qui prend la défense des plus faibles, a-t-elle si longtemps relativisé l'oppression des femmes musulmanes et mené une politique qui a permis à des organismes propageant l'apartheid aux Pays-Bas de bénéficier de subventions généreuses ? Et pourquoi cet acharnement à défendre l'enseignement basé sur la foi, la coutume et le pouvoir », s'est demandé la politologue Ayaan Hirsi Ali le 2 octobre, dans une allocution s'adressant au groupe PvdA de la Tweede Kamer. « A-t-on sous-estimé les rapports de force au sein de la communauté musulmane ou s'agissait-il ce qui serait beaucoup plus grave d'un signe d'arrogance et d'indifférence ? »
Jusqu'il y a peu, sa critique était accueillie au sein du parti par des propos qui relativisaient le problème. On lui faisait gentiment remarquer que la position des allochtones de la troisième génération s'est améliorée, ce à quoi Ali répondait d'un ton railleur que l'augmentation du nombre de filles dans l'enseignement professionnelle secondaire et supérieur n'était guère perceptible sur le marché du travail. « Une fois mariées, elles retombent dans le carcan de la tradition, de la foi et de la culture de groupe. Tout dépend de l'angle sous lequel on examine la question. »
Comme le philosophe Hans Achterberg l'affirmait déjà en 1969 dans son livre « De markt van welzijn en geluk », dans lequel il dénonce les aspects dangereux du travail social, la politique d'intégration s'est évaluée sous un angle privilégié. Tandis que la politique a comme credo la faisabilité de la société (l'utopie de l'immigré vu comme l'homme nouveau), les travailleurs sociaux et les services qu'ils dispensent créent une offre qui engendre une demande correspondante. Les travailleurs sociaux font office de tampon par rapport à la politique et filtrent les revendications des allochtones. Selon M. Achterberg, le secteur des travailleurs sociaux dans les milieux immigrés a plutôt tendance à freiner la participation et l'émancipation.
Le moment est à présent venu de briser le mythe du grand succès de l'intégration. La quantification des résultats de la politique qui a été menée produit un effet dégrisant. « Peut-être aurait-il même mieux valu ne rien faire du tout », ose même affirmer le sociologue et politologue néerlandais Ruud Koopmans, attaché au Wissenschaftszentrum für Sozialforschung de Berlin, qui arrive à cette conclusion sur la base d'une étude comparative du statut socioéconomique des immigrés aux Pays-Bas et en Allemagne. « L'absence de politique, comme ce fut le cas en Allemagne, a permis aux immigrés d'atteindre un statut économique et social nettement meilleur. Alors que la politique d'immigration et d'intégration menée par les Pays-Bas a toujours été citée en exemple en Europe pour sa tolérance et son absence de xénophobie, l'étude montre que la situation aux Pays-Bas n'est pas du tout aussi positive qu'on pourrait le penser. »
Koopmans est allé de surprise en surprise lorsqu'il a analysé la situation des étrangers à plusieurs niveaux sur la base des données chiffrées. « Le taux de chômage parmi la population immigrée est beaucoup plus élevé aux Pays-Bas qu'en Allemagne. Alors qu'aux Pays-Bas, le taux de chômage au sein de la population allochtone est quatre fois supérieur à celui constaté dans les classes comparables de la population allochtone, ce taux atteint en Allemagne le double de la moyenne nationale. »
Cette différence notable se reflète également dans d'autres domaines. « À la fin des années 1990, 23 % des étrangers en Allemagne recevaient une allocation, contre 47 % aux Pays-Bas. En 1998, 19 % des écoliers étrangers en Allemagne ont quitté l'enseignement sans diplôme (contre 8 % des autochtones, le même pourcentage qu'aux Pays-Bas); dans notre pays, ce chiffre est de 35 % parmi les écoliers turcs et de 39 % parmi les marocains. En ce qui concerne le point le plus sensible, la criminalité, ce sont de nouveau les Pays-Bas qui se distinguent négativement : en 1998, les prisons allemandes renfermaient 27 % d'étrangers, alors que les cellules néerlandaises sont peuplées à raison de 53 % de personnes nées en dehors des Pays-Bas, un chiffre qui est peut-être faussé du fait que l'ethnicité n'entre pas en ligne de compte dans les statistiques carcérales. Quant à la représentation des allochtones dans le secteur public (mesurée sur la base du contenu de la presse), les Pays-Bas sont également dépassés par l'Allemagne. »
L'auteur néerlandais de cette étude a été passablement ébranlé par les résultats obtenus. « Je m'attendais, moi aussi, à ce que nos chiffres soient bons, parce que notre système paraissait être un exemple classique de la meilleure voie d'intégration : nous accordons un maximum de droits propres, tant au groupe qu'à l'individu. L'idée est qu'en facilitant l'intégration politico-culturelle du groupe, on aboutit automatiquement à une intégration socio-économique. Donnez aux allochtones des droits propres des écoles islamiques, la possibilité d'exprimer leur identité culturelle, etc. et des subventions pour qu'ils créent des institutions selon leurs propres critères, cela donnera un groupe autonome conscient de soi, qui s'intégrera facilement. Jadis, le modèle de l'organisation propre convenait bien aux groupements minoritaires, mais cette approche s'est avérée totalement inappropriée dans le cadre de l'intégration des immigrés. Les aspirations des allochtones sont souvent diamétralement opposées à ce que les organisations et les décideurs politiques veulent nous faire croire. »
Et Koopmans n'est pas loin de s'en irriter : « Ce qui est étrange, c'est que si l'on examine les écrits politiques de tous ces groupements d'intérêts, tout le monde dit aspirer à l'égalité sur le marché du travail. Mais cette politique d'intégration, imprégnée de cloisonnement, a conduit non pas à l'intégration des nouveaux venus dans la société néerlandais, mais à leur exclusion. À une ségrégation et une discrimination tenaces.
Cela a été une bonne chose pour une petite élite ethnique de représentants, mise dans l'ouate mais coupée de la réalité et fermée sur elle-même. Commes les groupements d'intérêts ne devaient pas se financer eux-mêmes, ils n'étaient pas forcés de mobiliser leur base. Je trouve scandaleux que ces organismes d'immigrés n'aient jamais tiré la sonnette d'alarme pour attirer l'attention sur les problèmes internes du groupement qu'elles représentent. Elles sont coupables d'avoir annihilé ainsi toute velléité d'autonomie et d'effort personnel.
Les immigrés se sont vus offrir la sécurité sociale sur un plateau d'argent. S'il n'est pas nécessaire d'apprendre le néerlandais, s'il n'est même pas nécessaire de travailler, comment pourrait-on être incité à chercher sa propre voie ? Si vous aviez mal au dos, un travailleurs social vous ouvrirait les portes de la WAO. Les travailleurs immigrés puis, plus tard, leurs enfants, ont été perçus comme étant malades, faibles et pitoyables, alors qu'il s'agissait justement de personnes qui avaient eu l'audace et l'esprit d'aventure nécessaires pour franchir le pas de l'émigration. Cela procédait, certes, d'une bonne intention, mais la politique suivie a été beaucoup trop mesquine et paralysante. Stimuler la faculté d'autonomie en posant des exigences raisonnables, voilà quelle doit être la politique néerlandaise. »
M. Jean-Marie Dedecker précise qu'il s'agit ici de citations extraites d'un rapport officiel du gouvernement belge.
2.16. M. Van Hauthem
M. Van Hauthem apporte les précisions suivantes :
En ce qui concerne l'organisation d'une consultation populaire : si l'on veut être logique dans l'organisation des travaux, il faut examiner les propositions de loi visant à instituer une consultation populaire sur le droit de vote des étrangers avant d'entamer le débat sur les propositions de loi visant à octroyer le droit de vote et d'éligibilité aux ressortissants étrangers. En effet, une consultation populaire n'a plus de sens une fois que le droit de vote a été octroyé aux ressortissants non Européens résidant en Belgique.
M. Hugo Vandenberghe a cependant considéré que l'organisation d'un référendum n'est pas possible dans un contexte belge, étant donné la dimension communautaire du dossier. Lorsque l'on a discuté, en 1999, d'une révision éventuelle de la Constitution pour rendre possible la tenue de référendum, aucun accord n'a pu être trouvé en raison des problèmes communautaires. Les partis francophones se sont en effet opposés à ce que les voix soient comptées au niveau national car ils redoutaient que les francophones soient victimes des choix exprimés par la majorité flamande du pays.
En ce qui concerne l'attribution du droit de vote aux étrangers car ils sont des contribuables, M. Van Hauthem rappelle que le principe selon lequel le droit de vote est reconnu aux contribuables date du Moyen-Âge. Cette solution a été abandonnée au 19e siècle car on a lié le droit de vote à la nationalité.
L'argument selon lequel il est logique que celui qui contribue par l'impôt aux charges de la collectivité puisse participer au processus décisionnel en ayant le droit de vote est pervers. En effet, il faudrait a contrario en déduire que tous ceux qui ne paient pas d'impôt ne peuvent pas voter, ce qui ne saurait manifestement être le but visé.
En ce qui concerne le lien entre le droit de vote et la nationalité, M. Van Hauthem constate que les propositions en discussion veulent accorder le droit de vote à des étrangers qui refusent de devenir belges. L'orateur peut comprendre que certaines personnes ne souhaitent pas abandonner leur nationalité d'origine. Il respecte ce choix mais il estime que la conséquence de la décision de ne pas vouloir devenir belge est que l'on ne jouit pas du droit de vote.
M. Van Hauthem estime que c'est un dogme que de soutenir que le droit de vote favorise l'intégration des ressortissants étrangers. Toute personne qui ose mettre cet axiome en question, est traitée de raciste ou, au minimum de conservateur qui refuse d'évoluer avec son époque.
Or, il est apparu aux Pays-Bas que toute la politique en matière d'intégration, dont l'octroi du droit de vote était un élément en 1985, n'a pas eu les résultats escomptés. Il renvoie sur ce point à l'audition de M. Fennema, professeur à l'université d'Amsterdam, qui a eu lieu lors de la législature précédente à l'occasion de la discussion d'une proposition de loi ayant le même objet (voir doc. Sénat, nº 2-548/7, p. 3).
M. Van Hauthem fait observer par parenthèse qu'il est étrange que le Vlaams Blok soit le seul parti à recevoir, tant des médias que des autres partis politiques, une étiquette différente de celle qu'il se donne. C'est donc à tort qu'on le qualifie d'extrême droite.
Comme l'on a dit, M. Fennema signale qu'il a eu aux Pays-Bas, dans les années 1980, une résurgence de l'extrême droite. L'octroi du droit de vote a donc été en fait une tentative de contrecarrer la montée de l'extrême droite. De plus, on était très soucieux, aux Pays-Bas, de l'intégration des étrangers dans la société néerlandaise.
L'octroi du droit de vote a effectivement abouti à une intégration politique. Le droit de vote a conduit à la participation politique, mais pas à une intégration culturelle ni à une harmonisation de la société. Telle est la conclusion que tire M. Fennema.
La question est donc de savoir si le droit de vote est un vecteur d'intégration. Ce débat est déclenché sans tabou aux Pays-Bas depuis quelque temps déjà. L'intervenant envie les Pays-Bas où il est possible d'avoir ouvertement ce débat. Cela ne semble pas être possible en Belgique. L'intervenant renvoie à un article de M. P. Scheffer, publié dans le « NRC Handelsblad », et intitulé « Le drame multiculturel ». Cet article écrit par un progressiste de gauche a conduit à l'ouverture de ce débat important et a même été à l'origine de la création d'une commission parlementaire chargée d'examiner à la loupe la politique d'intégration dans son ensemble.
À propos de l'adjectif « multiculturel », l'intervenant se demande si les concepts de « multiculture » et d'« intégration » ne sont pas contradictoires. M. Bert Anciaux a lui aussi déclaré que le terme « multiculturel » vise des cultures qui cohabitent tandis que l'on tend plutôt à une société interculturelle.
M. Scheffer déclare ce qui suit : « Autant les Pays-Bas ont jadis pris à bras - le - corps la « question sociale », autant ils se montrent résignés aujourd'hui face au problème de la relégation de générations entières d'allochtones et à celui de la formation d'une sous-classe ethnique. Pourquoi pensons nous pouvoir nous permettre de voir échouer des générations d'immigrés et de laisser inexploité un réservoir de talents potentiels ? Et d'où nous vient cette confiance que tout finira par rentrer dans l'ordre ? La paix sociale est gravement menacée, estime Paul Scheffer.
La confusion culturelle prend parfois un tour comique. Bientôt, on pourra lire sur les affiches de recrutement de la police communale le texte suivant : « Ce turban nous sied à tous .» La proposition des commissaires en chef de pouvoir échanger, si on le souhaite, la casquette contre un foulard de tête ou un turban montre bien l'incertitude qu'entraîne la présence toujours plus nombreuse d'immigrés aux Pays-Bas. Un tel infléchissement vers des préférences religieuses part assurément d'un bon sentiment, mais on oublie manifestement de se demander si courtiser ainsi l'identité propre est bien compatible avec la volonté d'émancipation.
Le siècle passé s'est caractérisé par la tentative de faire reculer l'inégalité sociale. Aucune question n'a occupé davantage la vie publique aux Pays-Bas que celle de l'élévation sociale des différentes catégories de la population, afin que chacun puisse devenir un citoyen à part entière. Ce souci de l'égalité des chances était inspiré par la crainte de soulèvements sociaux. Mais ce n'est pas le seul élément : au cours de la deuxième moitié du dix-neuvième siècle, on voit aussi émerger une offensive de civilisation.
Dans l'ensemble, on peut dire que cette tentative d'intégration a été un succès. Les états et classes se sont estompés : l'origine est devenue de moins en moins une fatalité. C'est précisément la raison pour laquelle on a du mal à imaginer pourquoi l'on réagit de manière aussi résignnée à l'émergence d'une nouvelle dualisation, beaucoup plus pernicieuse celle-ci, de la société néerlandaise. Car pourquoi ne parle-t-on pas en termes beaucoup plus contraignants de la relégation vécue par des générations entières d'allochtones et de la formation d'une sous-classe ethnique ? Autant on s'est attaqué énergiquement à la question sociale d'antan, autant on se montre hésitant aujourd'hui face au drame multiculturel qui se joue sous nos yeux.
Ce tableau n'est-il pas trop sombre ? Non, comme le montre le récent « Rapportage minderheden 1999 » du SCP (Bureau du plan social et culturel), une étude consacrée à la position des allochtones dans l'enseignement et sur le marché du travail. La situation générale semble préoccupante même s'il y a des différences considérables entre les groupes ethniques et au sein même de ceux-ci. En moyenne, les enfants allochtones ont un retard substantiel en matière de développement cognitif et d'aptitudes linguistiques, ce qui leur ferme la porte aux emplois les plus intéressants. Les communautés turque et marocaine sont celles où l'on rencontre le plus d'enfants sans aucun diplôme scolaire. Selon le SCP, il existe un « réservoir de talents considérable ». Cela n'empêche pas le fossé entre les enfants autochtones et les enfants allochtones de rester important et de s'aggraver même, selon certains chercheurs.
Lorsqu'on passe en revue toutes les données disponibles, on arrive à la triste conclusion que le chômage, la pauvreté, le décrochage scolaire et la criminalité frappent toujours davantage les minorités ethniques. Et les perspectives sont décourageantes sur toute la ligne, malgré certaines réussites individuelles. Il y a un grand nombre de laissés - pour - compte et de défavorisés dont le poids sur la société néerlandaise ne cessera d'augmenter.
Selon les chiffres les plus optimistes, les Pays-Bas abritent aujourd'hui un peu moins d'un million et demi d'allochtones, qui font partie de ce qu'on appelle les groupes cibles de la politique en faveur des minorités. Il s'agit de personnes originaires de Turquie, du Maroc, du Surinam ou des Antilles. Il n'est donc pas question de gens venant des États-Unis ou de Suède, Selon les prévisions du rapport du SCP, 12 % de la population, soit près de deux millions de citoyens, feront partie de ces « groupes cibles » en 2015. Près de 40 % d'entre eux seront des réfugiés des pays du Tiers-Monde. Il importe également de savoir qu'en 2015, près de la moitié de la population des quatre grandes villes du pays sera allochtone. Aujourd'hui, la population scolaire y est déjà majoritairement originaire des groupes de population qui n'auront bientôt plus rien de minoritaire. Dans les 45 grandes villes néerlandaises ce sera déjà le cas dans dix ans.
Personne ne trouvera cette perspective rassurante, car il est clair que cette mutation démographique galopante pose d'énormes problèmes d'adaptation. Dans tous les secteurs de la société (soins de santé, enseignement, justice, logement et marché du travail) les problèmes sont légion. Un exemple parmi tant d'autres : dans quinze ans, les Pays-Bas compteront environ un million de demandeurs d'asile. Bon nombre d'entre eux souffriront de traumatismes qu'ils auront subis au cours de guerres et de catastrophes dont ils seront réchappé, que le secteur des soins de santé mentale sera censé résoudre.
Les problèmes énormes qui résultent de telles situations sont bien connus, mais cela ne semble pas préoccuper outre mesure les partisans d'une politique d'asile généreuse. En tout cas, on ne les entend pas souvent s'étendre sur la question. Comme toujours, nous sommes en retard d'une guerre. Un débat fait rage, actuellement, à propos « d'excuses » à adresser à la population juive et une véritable armée de scientifiques se penche sur le problème de la prise en charge des personnes qui sortirent vivante des camps après 1945.
La question qui se pose est la suivante : comment en est-on arrivé là ? Pourquoi pensons-nous pouvoir nous permettre de voir échouer des générations d'immigrés et pouvoir laisser inexploité un réservoir de talent supposé ? Où puisons-nous l'assurance que tout rentrera dans l'ordre, malgré les problèmes visibles ? Cela s'explique-t-il par la croissance économique qui permet de prévenir la grogne et l'inquiétude et par l'heureux constat que nous ne connaissons pas de troubles raciaux et que la situation est donc nettement plus grave ailleurs ?
En 1994, le gouvernement déclarait encore, à propos des minorités ethniques, qu'il fallait apporter d'urgence une solution à leurs problèmes. M. Scheffer cite le passage suivant d'une note du gouvernement néerlandais : « Le gouvernement conclut que la situation est extrêmement préoccupante pour l'avenir et ce, en raison de la stagnation économique, de la persistance de l'immigration, de l'arrivée continuelle de nouveaux demandeurs d'asile, et des conséquences sociales profondes de tout cela sur le soutien social dont jouit la politique. »
Selon M. Scheffer, on a pu avoir l'impression, en 2000, que la préoccupation de 1994 s'était évaporée dans la béatitude suscitée par ce que l'on a appelé le « Modèle hollandais » : « Beaucoup se méprennent en pensant qu'aux Pays-Bas, l'intégration des minorités ethniques se réalise à peu près comme s'y est réalisée la conciliation pacifique des divers groupes religieux. Comme jadis, il faut conclure des arrangements, faire des concessions, se résoudre à du donnant-donnant, négocier et agir dans le secret. Ainsi se manifeste surtout une confiance sans bornes dans les élites.
On attend, sans le dire explicitement, des immigrants qui ont réussi, qu'ils facilitent l'insertion de leurs semblables dans la société néerlandaise. Autrement dit, beaucoup pensent que les règles et les usages en vigueur dans une démocratie pacificatrice peuvent atténuer les nouvelles discordes. Cela fait penser, selon M. Scheffer, à la confiance que les gens avaient dans la politique de neutralité la veille de la Deuxième Guerre mondiale. La confiance dans la pacification a permis de mettre fin aux différents religieux qui marquèrent les Pays-Bas et l'on pense maintenant qu'elle permettra également de surmonter les clivages ethniques.
Cela remet à l'ordre du jour la question du sentiment de solidarité national, dont il est question dans l'ouvrage classique de 1968 sur la pacification néerlandaise. La conclusion de cet ouvrage était qu'il ne fallait pas exagérer la force du nationalisme néerlandais, mais que ce nationalisme existe bel et bien. Les différends philosophiques se sont inscrits dans le cadre d'une histoire commune, on a pu les maîtriser grâce à l'existence d'une Constitution qui recueille un consensus général et on a pu les débattre dans une langue commune. Les diverses familles idéologiques et philosophiques formant la société néerlandaise soutiennent le même toit. »
M. Scheffer se demande ensuite quelle est la valeur de l'ancienne méthode de coexistence pacifique dans un contexte totalement nouveau ? Fonctionne-t-elle encore de la même manière ? Fait-on preuve de confiance en soi en ne mettant pas trop l'accent sur ce qui est spécifique de la société dont on fait partie ? La cohésion culturelle à l'intérieur de laquelle on pouvait vivre n'est plus aussi forte; il y a peu de sources de solidarité. La comparaison avec la question du cloisonnement social ne tient pas. La ségrégation qui naît dans l'enseignement de l'existence d'écoles « noires » et d'écoles « blanches » n'a bien sûr rien à voir avec la séparation entre l'enseignement public et l'enseignement libre.
On ne peut pas non plus comparer le rôle de l'islam avec celui des religions chrétiennes aux Pays-Bas. Le « Sociaal-cultureel Planbureau » (Bureau du plan socioculturel) se veut rassurant quand il écrit dans son rapport : « Le taux toujours élevé de musulmans dans les populations minoritaires est peut-être un facteur de cohésion des allochtones .» Il s'agit approximativement de la moitié des minorités; autrement dit, environ un million d'habitants des Pays-Bas seront bientôt musulmans. Même en sachant que beaucoup d'entre eux pratiqueront une forme édulcorée de l'islam, ce n'est pas un élément qui laisse indifférent, pas plus que l'existence d'écoles islamiques.
Peut-être assistera-t-on au développement d'une tradition libérale dans ce que l'on appelle les « sphères excentriques » de l'islam. Pour l'heure, les efforts de réforme sont limités. Le problème vient du fait que le monde islamique n'accepte vraiment pas la séparation de l'Église et de l'État. Il arrive que des parties de prêches d'imams transpirent et que l'on ait vent de propos haineux qu'ils prononcent contre la société dont ils sont censés faire partie. C'est ainsi qu'à l'époque où Ed Van Thijn était bourgmestre d'Amsterdam, on pouvait entendre dire que les musulmans ne devaient pas se conformer aux lois d'une ville qui était dirigée par un bourgmestre juif. On peut considérer également la différence sous un autre angle. La loi islamique lie à l'apostasie des conséquences juridiques qui sont inacceptables dans notre pays ». Voilà le point de vue de M. Scheffer.
M. Van Hauthem estime que cet exposé est révélateur d'une partition des esprits. Une politique ciblée qui tient compte des origines culturelles ne favorise non pas l'intégration mais la ségrégation. Selon l'intervenant, c'est perceptible notamment à Bruxelles. En 1987, la capitale ne comptait que peu de vidéothèques louant exclusivement des films arabes. Aujourd'hui, la population arabe se coupe de plus en plus de la société. La politique s'est conformée sans le vouloir à cet état de choses en défendant le modèle d'une société multiculturelle.
Aux Pays-Bas, on a cru promouvoir l'intégration dans les années 1980 en créant des écoles islamiques subventionnées. L'on constate aujourd'hui que de la sorte, on a favorisé la ségrégation. La Belgique n'est pas encore mûre pour de telles conclusions. Les diverses cultures doivent être traitées sur un pied d'égalité, mais il est des valeurs et des normes dont personne ne peut s'écarter sans risquer de remettre le consensus social en question.
Selon l'intervenant, le droit de vote n'a rien à voir avec l'intégration. M. Van Hauthem cite l'exemple de membres de sa famille qui résident en Argentine et au Brésil, qui y sont parfaitement intégrés et même assimilés mais qui n'y ont pas le droit de vote. Le discours sur l'intégration et sur la politique des minorités est contre-productif. Pour certaines communautés allochtones, imposer l'intégration équivaut à du racisme. Par conséquent, il n'est pas faux de parler de « culture dominante », comme au Danemark, par exemple. Les personnes qui viennent habiter chez nous doivent s'adapter à notre langue, à nos normes et à nos valeurs.
L'orateur cite à nouveau Paul Scheffer : (traduction) « Et ainsi s'effondre le château de cartes de la société multiculturelle. Toutes les attentes inexprimées, selon lesquelles l'intégration serait surtout une question de temps, ne se réalisent pas. Sous la surface de la vie publique flotte un océan de récits sur le choc des cultures qui ne sont pas entendus, ou à peine. Nous en sommes déjà aujourd'hui à la troisième génération d'immigrés et les problèmes n'ont fait que s'aggraver.
Il n'est pas certain que les immigrés qui ont réussi joueront le rôle d'entraînement qu'on attend d'eux, car ils ne savent généralement pas à quel rythme ils doivent se détacher de leur « base » présumée. Ce n'est pas faire preuve d'ouverture que de passer outre à de tels constats, en plaidant tranquillement pour la société multiculturelle. Tous ces défenseurs de la diversité ne sont pas concernés par ce qui se passe dans les grandes villes néerlandaises.
De nombreux immigrés sont dépassés par le passage à la société urbaine anonyme, où l'on transige parfois avec loi et où l'on préfère négocier que sanctionner. À une époque marquée par d'importants mouvements migratoires, on ne peut perpétuer les libertés aux Pays-Bas en recourant aux anciennes méthodes. La culture de la tolérance, qui se heurte aujourd'hui à ses propres limites, va de pair avec une fausse image de soi. Il est indispensable de renoncer à l'illusion cosmopolite dans laquelle beaucoup se complaisent.
La manière méprisante dont on a traité le sentiment national aux Pays-Bas n'est pas très engageante. Nous nous battons la coulpe sur ce sentiment national parce que nous pensons ne pas en avoir. Cette attitude des Néerlandais qui consiste à nier les frontières ne contribue pas à l'intégration, car elle dissimule trop souvent une société distante et désinvolte. Nous sommes aujourd'hui sous le règne d'une conception post-moderne de l'histoire dans laquelle le « nous » est automatiquement suspect. »
Le spécialiste de la littérature Douwe Fokkema écrit, dans la même veine : « Il est impossible de dire que « nous » avons navigué à l'Est par le Cap de Bonne-Espèrance ou que « nous » avons hiverné en Nouvelle-Zélande. Ce n'était pas « nous ». Ces gens ne parlaient pas notre langue et suivaient d'autres conventions » (dans « NRC-Handelsblad », du 15 juin 1996).
L'intervenant affirme que les propos de M. Scheffer ont eu l'effet d'une bombe dans la politique néerlandaise. Aux Pays-Bas, contrairement à ce qui se passe dans notre pays, on n'a pas jeté l'anathème sur le messager. Au contraire, on a compris le message. Le débat sur la politique d'intégration, dont le droit de vote n'est qu'un élément, atteint même le Parlement. Une commission réfléchit à la politique d'intégration qui a été menée. Quand créera-t-on une commission similaire au Sénat, qui est sauf erreur une chambre de réflexion et le lieu de rencontre des Communautés ?
On est parvenu à inverser toute la discussion, toujours selon M. Van Hauthem. Auparavant, on considérait que la nationalité était ouverte à tous, à certaines conditions, et qu'on pouvait ainsi acquérir tous les droits, à savoir le droit de vote au niveau communal, mais aussi au niveau régional et national. À présent, on soutient que l'octroi du droit de vote favorisera l'intégration. L'intervenant demande pourquoi les partisans de l'octroi du droit de vote souhaitent le limiter au niveau communal. L'argument des impôts communaux n'est pas valable, car seuls 6 à 8 % des impôts sont destinés à la commune. L'intervenant reproche aux partisans du droit de vote des étrangers de manquer de cohérence.
M. Van Hauthem poursuit en affirmant que les immigrés réussissent aussi fort bien à culpabiliser la population allochtone. S'ils viennent dans notre pays et qu'ils n'apprennent pas la langue, c'est de notre faute, parce que nous ne leur proposons pas suffisamment de solutions; s'ils n'ont pas de travail, c'est de notre faute également. Une telle culpabilisation est inacceptable, a fortiori si on la compare à ce qui se passe actuellement en Australie.
Quiconque souhaite émigrer en Australie doit d'abord marquer des points, lesquels dépendent de la connaissance de la langue, du diplôme, de l'expérience professionnelle, ... Le Vlaams Blok n'ose pas imposer ces conditions en Belgique et pourtant, on lui reproche d'être antidémocratique, alors que l'on ne reproche absolument pas à l'Australie d'être un pays antidémocratique, xénophobe ou raciste.
L'intervenant ajoute qu'en Belgique, on ne peut pas débattre de la manière dont la politique d'intégration est menée. Aux Pays-Bas, le débat a bel et bien lieu et l'on remet en cause la politique de la « cajolerie », qui consiste à confirmer les autres groupes de la population dans leur culture. Chez nous, on continue de vivre dans l'illusion que l'on pourra résoudre tous les problèmes en accordant le droit de vote au niveau communal pourquoi d'ailleurs seulement au niveau communal et pas au niveau fédéral ?
2.17. M. Coveliers
M. Coveliers déclare que les propositions de loi à l'examen visant à accorder le droit de vote aux étrangers sont mauvaises et que leurs partisans l'ont démontré de diverses manières. Jusqu'à présent, ces partisans ne les ont à peine commentées, ne les ont aucunement défendues et voudraient en quelque sorte les faire passer comme des voleurs en pleine nuit, quelques années avant les élections communales et quelques mois avant les élections régionales, dans l'espoir qu'à ce moment-là, l'électeur aura oublié. Or, comme les partis tiennent à se présenter sous leur meilleur jour à la veille des élections, les bonnes propositions devraient être publiées juste avant celles-ci et présentées triomphalement au public lors d'une conférence de presse.
L'intervenant souligne également que personne n'ose affirmer que le droit de vote au niveau communal favoriserait l'intégration. Au contraire, il a un effet contre-productif et, en outre, les immigrés eux-mêmes ne sont pas demandeurs. En témoigne une citation de M. Stevaert lui-même, qui a reconnu un jour que les immigrés lui demandaient du travail, une maison, une école pour leurs enfants, mais jamais le droit de vote.
En outre, M. Coveliers confirme l'analyse de M. Hugo Vandenberghe, selon laquelle les dispositions proposées sont inspirées par le clientélisme et la spéculation, le but étant de permettre à certains partis de gagner des voix et des sièges. L'intervenant prévient toutefois que l'on perd de vue les « dommages collatéraux ». Cette manoeuvre sera considérée par l'opinion publique, ainsi que les journaux l'indiquent dès à présent, comme une manoeuvre antiflamande si la minorité francophone persiste à faire avaler ce droit de vote à la majorité flamande.
En ce qui concerne le droit de vote octroyé aux citoyens des États membres de l'Union européenne, l'intervenant affirme que ce droit de vote repose sur un accord mutuel avec ces pays, fondé sur l'acquis communautaire, qui comprend certains droits de l'homme, la séparation de l'Église et de l'État, ... dont il résulte finalement que tous ces citoyens ont en tant que tels les mêmes droits et les mêmes devoirs fondamentaux. Il n'y a donc aucune discrimination.
Sur la base d'une série de citations, notamment de Jurgen Habermas, le membre précise ensuite que les États ont le droit de protéger leur forme de vie politique ou culturelle, façonnée par l'histoire, face à l'immigration et de se protéger contre les immigrés lorsque ces derniers ne sont pas suffisamment tolérants vis-à-vis de la société multiculturelle et, par exemple, ne peuvent pas respecter une séparation suffisante entre l'Église et l'État.
M. Coveliers estime que l'on en trouve la meilleure illustration dans un ouvrage récent de M. Abou Jahjah, dont il ressort clairement que, dans notre pays où un peuple s'est jadis établi et prône le multiculturalisme, certains immigrés entendent vivre, en tout temps et en tout lieu, selon les règles prescrites par leur culture et leur conception de la séparation entre l'Église et l'État.
C'est ainsi que l'on se trouve confronté à des problèmes comme celui du port du voile. Le premier ministre français Jean-Pierre Raffarin a voulu interdire le port du voile, arguant qu'il faut s'abstenir de tout signe par lequel on s'affirme à l'encontre d'autrui. L'on ne résoudra pas le problème du port du voile en accordant le droit de vote aux étrangers. Bien au contraire, puisque l'auteur précité veut créer un parti musulman.
Dans les grandes villes par exemple, on constate que des subventions financées par le FIS et d'autres fonds, pour un montant total de plusieurs millions, sont accordées à une pléiade d'ASBL dont le site web affiche pourtant clairement qu'elles n'admettent en leur sein que les adeptes d'une religion déterminée, à l'exclusion de toutes les autres personnes. M. Coveliers estime que c'est précisément là que réside le problème et que l'octroi du droit de vote aux étrangers n'y apporte aucune solution.
La proposition de loi ne résout donc rien et n'apportera rien. De plus, elle causera d'importants « dommages collatéraux ».
Le premier dommage grave qu'elle causera et qui risque bien d'être irréparable est celui causé à la majorité flamande. Sont visés ici tant les élus que l'ensemble de la population flamande. Cette dernière se sentira une nouvelle fois victime d'une discrimination et nourrira une frustration due au fait que la majorité francophone impose sa volonté aux Flamands plus nombreux. Ce dommage risque de mettre en péril la loyauté fédérale dans ce pays.
Il pourrait pourtant être limité en prévoyant comme l'a fait l'Espagne l'application du principe de réciprocité en vertu duquel un ressortissant étranger ne se verrait octroyer le droit de vote en Belgique qu'à la condition que les ressortissants belges jouissent également du droit de vote dans l'État d'origine de cet étranger.
Cette réciprocité est indispensable, sans quoi la Cour d'arbitrage risque d'annuler le texte de loi à l'examen pour cause de discrimination.
Cette discrimination réside tout d'abord dans le fait que le ressortissant belge subit une discrimination objective du fait qu'il jouit de droits moindres que ceux de l'étranger qui reçoit le droit de vote en Belgique mais qui peut continuer à voter dans le pays dont il a la nationalité.
Il y a encore une deuxième discrimination : aux termes de la proposition de loi, l'étranger peut se faire radier des registres et donc choisir de ne pas exercer son droit de vote.
En réponse à une question préjudicielle qui lui a été posée récemment, la Cour d'arbitrage a pris position comme suit à propos de la notion de discrimination : « Les règles constitutionnelles de l'égalité et de la non-discrimination n'excluent pas qu'une différence de traitement soit établie entre des catégories de personnes, pour autant qu'elle repose sur un critère objectif et qu'elle soit raisonnablement justifiée. »
Quand bien même la présente proposition utiliserait un critère objectif, il faudrait en outre qu'il soit raisonnablement justifié. La Cour d'arbitrage précise à ce sujet : « L'existence d'une telle justification doit s'apprécier compte tenu du but et des effets de la mesure critiquée ainsi que de la nature des principes en cause » et encore « Le principe d'égalité est violé lorsqu'il est établi qu'il n'existe pas de rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. »
Certains commissaires prétendent maintenant que la nationalité est très importante pour les étrangers à qui l'on veut octroyer le droit de vote. C'est la raison pour laquelle ils veulent conserver leur nationalité et n'acceptent pas d'adopter la nationalité belge.
L'on peut s'interroger sur l'objectif véritable de la proposition de loi. Pour M. Coveliers, c'est du pur clientélisme.
Il estime par conséquent que les dispositions à l'examen ne résisteront pas au contrôle de la constitutionnalité que la Cour d'arbitrage réalise à la lumière des articles 10 et 11 de la Constitution, sans parler de la violation de l'article 14 de la Convention européenne des droits de l'homme.
M. Coveliers rappelle comment on s'est retrouvé dans l'impasse actuelle. En 1999, on était arrivé à la conclusion que le problème ne résidait moins dans l'octroi du droit de vote que dans la difficulté d'acquérir la nationalité. Aussi a-t-on essayé de faciliter l'acquisition de la nationalité, partant du principe que celui ou celle qui demande la nationalité le faisait aussi par loyauté envers la communauté dans laquelle il vit.
Dans ce cas, les intéressés jouissent évidemment de tous les droits politiques. L'on a aussi supprimé pour cela une grande partie du contrôle. L'évaluation réalisée par la suite a montré que l'on avait fait fausse route et qu'il fallait modifier la procédure accélérée de naturalisation. Il n'est cependant pas d'accord avec M. Hugo Vandenberghe et Mme Thijs lorsque ceux-ci demandent de lier ce point aux textes à l'examen.
Durant la discussion de la loi relative à la procédure accélérée de naturalisation, il avait aussi été décidé de régulariser une série d'étrangers en situation de séjour illégal dans notre pays.
Il s'agissait pensait-on de 15 000 personnes tout au plus. En définitive, il s'est avéré que cela concernait un beaucoup plus grand nombre de personnes. De plus, il était illogique de permettre à des représentants des ONG et à des avocats de participer à la décision dans ces dossiers. Il s'en est suivi une appréciation beaucoup trop large des éléments de preuve produits.
Étant donné que la Belgique a accordé un soutien financier aux candidats réfugiés politiques, il y a eu une assez grande affluence. Ce soutien financier a été remplacé par une aide matérielle avec indication de la date d'entrée en vigueur de cette modification. Par anticipation, l'afflux à l'Office des étrangers a été tel que cette date a dû être avancée. La leçon que l'on doit en tirer est que le crime organisé abuse également des lacunes de la législation. Lorsqu'il rédige une nouvelle législation, le législateur doit donc tenter de prévoir comment ce texte pourrait être utilisé abusivement. Il n'en a malheureusement pas été ainsi lors de la confection de la loi sur la procédure accélérée de naturalisation.
Dans les années 1970, à l'instar de la plupart des pays européens, la Belgique a décrété un gel de l'immigration. Depuis 1974, l'immigration devrait être devenue impossible dans notre pays, du moins en théorie. Seules deux exceptions sont prévues. Une première exception est le régime d'asile politique en faveur des réfugiés politiques. Comme il est important de pouvoir conserver ce système, il faut également combattre les abus. On a donc pris des mesures, si bien que la situation est actuellement plus ou moins sous contrôle.
Les abus se produisent aujourd'hui au niveau de la deuxième exception, à savoir le regroupement familial. Un membre du CPAS d'Anvers a constitué un dossier à ce sujet. On n'est pas encore intervenu pour réprimer ces abus. C'est là que se situent également la plus grande discrimination et le principal danger.
Les partisans de la proposition de loi en discussion sous-estiment considérablement le sentiment de discrimination qu'éprouvent un certain nombre de Belges autochtones. Nombre d'entre eux se trouvent dans une situation marginale et bénéficient bien souvent d'une aide moins généreuse qu'un certain nombre de nouveaux venus.
En second lieu, c'est psychologiquement très important, parce qu'aucune contrepartie n'est prévue. Il n'y a aucune garantie que certains problèmes seront résolus. Cela n'est pas non plus apprécié par les nouveaux Belges, qui ont fait l'effort d'acquérir la nationalité. Dans ce groupe également, on va causer un préjudice irréparable.
M. Coveliers se demande pourquoi certains parlementaires veulent à tout prix et le plus rapidement possible voter une mauvaise proposition de loi, alors qu'en fait, personne n'est disposé, en commission, à défendre cette proposition sur le fond. D'ailleurs, tout le monde prétend que le droit de vote n'a rien à voir non plus avec l'intégration. Pourquoi dans ce cas ne peut-on pas commencer par examiner ce qui a déjà été investi dans l'intégration des allochtones, non seulement financièrement, mais aussi sur le plan psychologique ?
L'intervenant se demande en outre comment certaines couches de population réagiront à l'octroi du droit de vote aux immigrés qui ont la nationalité belge. Le Centre pour l'égalité des chances et la lutte contre le racisme a déclaré recevables et fondées les plaintes de la Ligue arabe européenne, contrairement à l'acte provocateur manifestement raciste d'une jeune femme qui, à « Moeders voor Moeders », à Anvers, avait refusé d'enlever son foulard alors que cette organisation est une association regroupant des personnes qui se dévouent bénévolement pour tout un chacun, non seulement pour la population anversoise, mais aussi et surtout pour les autres nécessiteux qui viennent de l'étranger.
Même si le droit de vote des immigrés est purement symbolique, cette symbolique est tout à fait fausse et le droit de vote aura un effet contre-productif. Avant de prendre de nouvelles mesures, il faut évaluer et éventuellement adapter le fonctionnement des institutions, centres et commissions existants qui oeuvrent en faveur de l'intégration.
L'intervenant estime aussi que la proposition de loi à l'examen est discriminatoire et il renvoie à cet égard au remarquable ouvrage du professeur Jan Velaers intitulé « La Constitution et le Conseil d'État, Section de législation : cinquante ans d'avis aux assemblées législatives, à la lumière de la jurisprudence de la Cour d'arbitrage » (traduction), Maklu, 1999.
Par ailleurs, la professeur Marie-Claire Foblets déclare que l'octroi du droit de vote aux immigrés est tout à fait absurde : « Voici un nouvel argument pour la tenue de la discussion sur l'octroi du droit de vote aux ressortissants d'un État de l'UE. S'il s'avérait que la concentration de communautés immigrées dans certaines communes du Royaume est l'ultime obstacle qui retient les opposants à une dissociation généralisée de la nationalité et du droit de vote aux élections communales, alors le mécanisme des dérogations temporaires locales permettrait d'introduire graduellement le droit de vote local généralisé. »
M. Coveliers en déduit qu'il est peut-être possible d'introduire le droit de vote au niveau local, mais certainement pas au niveau provincial ni au niveau régional, du moins pas en Flandre, parce qu'il n'y existe aucune majorité pour le faire. Une telle distorsion est aussi contre-productive.
L'intervenant cherche en vain la plus-value que pourrait reculer cette proposition de loi. On ne peut tout de même pas se constituer un nouvel électorat en faisant fi de la Constitution, ni en prenant des mesures discriminatoires, ni en infligeant un camouflet à la population flamande.
Enfin, l'intervenant met en garde contre les conséquences qu'aurait l'adoption de cette proposition de loi et il espère que le groupe SP.A-SPIRIT se rendra compte à temps du caractère contre-productif de l'opération et retirera ses propositions.
2.18. Mme de Bethune
Mme de Bethune tient encore à aborder quatre points.
Le premier concerne la constatation que la majorité violette subit un nouvel échec par manque de projet de société. La discussion sur le droit de vote aux immigrés est l'illustration du fait que l'actuelle majorité n'est rien de plus qu'une alliance objective pour rester au pouvoir. Les règles du jeu démocratique et la participation politique sont au coeur de notre société. Le fossé séparant socialistes et libéraux est si grand que la majorité est incapable de proposer un projet de société unique en la matière, ni même d'avoir simplement un débat d'adulte sur le sujet.
Le deuxième point concerne l'intégration dont la quasi-totalité des groupes a souligné l'importance. Il est acquis que ni l'octroi du droit de vote aux immigrés ni l'acquisition de la nationalité ne garantissent automatiquement en soi une intégration réussie. Voilà pourquoi il convient aussi de mener une politique d'intégration concrète et positive. L'intervenante déplore que plusieurs commissaires n'aient pas voulu aborder ce débat, alors qu'il est censé ouvrir des perspectives aux gens et à la société. L'intégration nécessite un engagement réciproque, un engagement qui consiste à offrir des possibilités d'intégration à ceux qui souhaitent habiter ici et qui requiert une volonté d'intégration de la part de ceux qui choisissent de vivre ici.
Pour le CD&V, ce débat s'inscrit dans la perspective d'une société interculturelle rejetant toute discrimination et tout racisme. Par ce qu'il a foi dans les talents de chaque être humain, dans la spécificité et la valeur des diverses cultures, le CD&V estime qu'une société interculturelle mixte et véritablement soudée est un enrichissement et une source d'opportunités et de perspectives nouvelles.
Le troisième point que Mme de Bethune soulève concerne la manière dont s'est déroulé le débat. La discussion n'a pas laissé suffisamment de latitude aux membres du groupe politique CD&V pour leur permettre d'indiquer quels points de vue et quelles déclarations des autres commissaires leur parti soutient ou rejette. Le CD&V ne partage absolument pas les thèses exprimées par les membres du Vlaams Blok et n'approuve pas davantage la campagne menée par ce parti sur le droit de vote aux immigrés, campagne dont les affiches au message démagogique appelent à l'exclusion. Par ailleurs, il y a les images diffusées dans les médias de la réunion du Vlaams Blok au cours de laquelle des mandataires élus d'origine allochtone ont vu leur noms cités et leur légitimité mise en question au mépris des règles démocratiques en vigueur dans ce pays.
Enfin, Mme de Bethune rappelle que le CD&V est partisan de la participation politique des allochtones, mais que l'acquisition de la nationalité belge est une condition à l'octroi du droit de vote et d'éligibilité aux élections communales.
Amendements nºs 14 et 15
M. Vanhecke et consorts déposent les amendements nºs 14 et 15 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui visent à remplacer l'intitulé de la proposition de loi en discussion.
M. Verreycken signale que c'est surtout l'amendement nº 15 qui a de l'importance, puisqu'il tend à remplacer l'intitulé de la proposition de loi par : « Proposition de loi visant à octroyer le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales aux étrangers non européens qui ont refusé de prendre la nationalité belge. »
Cet amendement vise à préciser clairement que le droit de vote serait accordé aux personnes qui ont refusé la nationalité belge. C'est inadmissible. Les développements de la proposition de loi examinée sont assez simplistes, puisqu'on peut par exemple y lire ce qui suit : « Les citoyens étrangers, maintenus muets politiques peuvent être tentés de constituer des groupes de pression fondés exclusivement sur une identité prescrite, ethnique, culturelle ou religieuse, plutôt que de rejoindre des mouvements démocratiques portant des revendications politiques » (doc. Sénat, nº 3-13/1, p. 2).
De tels propos sont bien entendu tendancieux, et l'exemple de la Ligue arabe européenne (LAE) à Anvers est bien connu. Les membres de la LAE ont beau posséder la nationalité belge et jouir du droit de vote, ils n'en fondent pas moins des groupes de pression.
Les amendements nºs 14 et 15 sont rejetés par 9 voix contre 3 et 5 abstentions.
Amendement nº 160
Le président déclare l'amendement nº 160 non recevable sur la base de l'article 59, point 1, alinéa 2, du Règlement du Sénat, parce qu'il n'a rien à voir avec l'objet de la proposition de loi. Les propositions de loi relatives à la citoyenneté ont en outre déjà été renvoyées à la commission de la Justice.
Article 1er
Amendement nº 56
M. Coveliers et consorts déposent l'amendement nº 56 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui vise à modifier cet article comme suit : « La présente loi règle une matière visée à l'article 77 de la Constitution. »
L'auteur principal fait remarquer qu'il s'agit d'un amendement technique, mais néanmoins important.
Lors de la réforme de l'État de 1995, le législateur a discuté très longtemps de la position des deux chambres législatives l'une par rapport à l'autre. On avait alors décidé que la Chambre des représentants deviendrait la chambre politique la plus importante et que certaines matières deviendraient désormais unicamérales (naturalisations, budgets et contingent de l'armée). D'autres matières facultativement bicamérales furent liées au droit d'évocation, tandis que d'autres encore furent considérées comme obligatoirement bicamérales.
D'une manière générale, cela revient à dire que tout ce qui touche à l'ordonnancement de l'appareil judiciaire et à l'organisation judiciaire, ainsi que tout ce qui implique des modifications importantes du système constitutionnel et institutionnel, doit relever de l'article 77 de la Constitution.
Même si son application est actuellement limitée, la présente proposition de loi modifie profondément un des éléments constitutionnels de notre pays, à savoir la composition de l'électorat. C'est pourquoi il y a lieu de considérer qu'elle relève de l'article 77 de la Constitution.
L'amendement nº 56 est rejeté par 10 voix contre 7.
L'article 1er est adopté par 10 voix contre 2 et 5 abstentions.
M. Coveliers souhaite motiver brièvement son abstention au vote de l'article 1er. Bien que son groupe estime que la proposition de loi en discussion doive relever de l'article 77 de la Constitution, il s'incline devant la nécessité de donner une qualification à la proposition de loi.
Article 2
Amendements nºs 17 et 18
M. Vanhecke et consorts déposent l'amendement nº 17 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui tend à supprimer les articles 2 et 3 et l'amendement nº 18 qui tend à supprimer les articles 2 à 9.
M. Verreycken estime, en tant que coauteur des amendements, que l'amendement nº 18 est celui qui va le plus loin, car il propose de supprimer les articles 2 à 9 inclus.
Dans le passé, son parti a fait savoir clairement, à plusieurs reprises, qu'il était opposé par principe au droit de vote des immigrés, tant à l'échelon national qu'à l'échelon local. Le droit de vote doit être réservé aux Flamands, dans une république de Flandre indépendante. Le Vlaams Blok a publié à ce propos un document volumineux, intitulé « Proeve van Grondwet van de republiek Vlaanderen », dans lequel il est dit clairement que, dans une société démocratique, il faut veiller à ce que le pouvoir le plus élevé émane du peuple.
Le peuple doit rester souverain, ce qui sera possible s'il choisit ses représentants et s'il participe à des référendums. Ces deux prérogatives doivent rester indissociablement liées, car c'est là la seule manière pour le peuple d'exercer le pouvoir le plus élevé.
Seuls les citoyens ayant la nationalité du pays concerné peuvent disposer du droit de vote et du droit d'éligibilité. Par conséquent, le pouvoir qu'a le citoyen flamand d'exercer ce droit de vote est une traduction de la souveraineté qui est la sienne.
Dans le même temps, il est inconcevable qu'une personne qui refuse la nationalité puisse parler au nom du peuple souverain. Il lui est en effet impossible de connaître la volonté du peuple dont elle refuse la nationalité.
Par voie de conséquence, la proposition de loi est incohérente et les articles 2 à 9 doivent être supprimés.
Les personnes en séjour légal sur notre territoire peuvent aisément participer à la vie politique grâce à la loi relative aux naturalisations : toute personne qui séjourne en Belgique depuis 3 ans peut très facilement acquérir la nationalité belge sans devoir apporter aucune preuve de son intégration dans la société. La Belgique dispose du code de la nationalité le plus souple au monde.
L'intervenant estime qu'octroyer de surcroît le droit de vote à des personnes n'ayant pas la nationalité belge, constituerait un pas de plus dans le sens de la fragmentation de la société, ce qui réduirait d'autant la nécessité de s'intégrer.
Les développements de la proposition de loi font état d'une volonté d'intégration, mais curieusement, rien n'y est dit à propos des problèmes linguistiques. L'intégration et la participation à la vie politique n'ont absolument aucun sens si les intéressés ne maîtrisent pas la langue de la région.
Si la proposition est adoptée, on court le risque que chaque groupe ethnique et religieux se mette à défendre ses propres intérêts. Or en démocratie, les représentants élus sont censés représenter la nation.
Il n'y aura donc pas d'intégration dans la société, bien au contraire.
Le Vlaams Blok est opposé à une société fragmentée. Il est important que les étrangers s'intègrent dans la société flamande et qu'ensemble avec le reste de la population, ils fassent des choix dans l'intérêt général. La naturalisation doit être le couronnement d'une intégration réussie. Le Vlaams Blok estime que tous les individus ne sont pas égaux. On lui a déjà souvent fait grief de ce point de vue. Pourtant, l'ex-premier ministre Mark Eyskens a encore déclaré récemment : « Les individus ne sont pas égaux mais sur un pied d'égalité. » C'est le point de vue que le Blok défend depuis de nombreuses années.
Être mis sur un pied d'égalité, cela veut dire que chacun doit se voir offrir des possibilités d'épanouissement maximales. Les possibilités d'épanouissement, on les trouve surtout auprès des siens, au sein de la culture du peuple auquel on appartient. Sinon, on risque d'assister à des heurts entre les différentes convictions.
Les partisans de l'octroi du droit de vote aux étrangers invoquent systématiquement l'argument qu'il faut d'abord accorder tous les droits politiques aux étrangers et que ceux-ci pourront ensuite mieux s'intégrer. L'intervenant a la conviction que les auteurs mettent la charrette avant les boeufs. C'est l'intégration qui donne accès aux droits politiques et pas l'inverse. Il faut pour cela que les intéressés s'adaptent à notre culture et à nos coutumes et qu'ils respectent nos lois.
Voilà pourquoi le Vlaams Blok prône la citoyenneté. Selon l'intervenant, la proposition peut constituer un excellent fil conducteur pour la discussion au sein de cette commission. Tout étranger peut, en suivant une procédure simple, devenir Flamand parmi les Flamands. Mais, comme on a pu lire dans un article de la « Gazet van Antwerpen » du 8 septembre 2003, « l'octroi du droit de vote aux étrangers dissuadera les étrangers d'opter pour la citoyenneté, car pourquoi se donneraient-ils encore cette peine s'il n'y a plus aucune différence de traitement sur le plan juridique entre les Belges et les non-Belges ? ».
L'intervenant pense que les partis politiques francophones savent bien que l'octroi du droit de vote aux étrangers pour les élections communales permettra peut-être de rayer définitivement les Flamands de Bruxelles de la carte électorale.
Environ 98 % des dossiers de naturalisation introduits à Bruxelles le sont en français. L'octroi du droit de vote aux ressortissants hors Union européenne pour les élections communales représente à Bruxelles quelque 64 106 électeurs potentiels. Si l'on y ajoute les 11 500 ressortissants de l'Union européenne, on arrive à 75 606 électeurs de nationalité étrangère sur un total de 544 000 électeurs belges à Bruxelles, soit une augmentation de 13,5 %. Or, il ressort des dossiers de naturalisation que ces 13,5 % seraient presque exclusivement des électeurs potentiels francophones.
L'intervenant considère que la présente proposition fait partie d'un agenda anti-flamand.
Le droit de vote est un droit constitutionnel qui ne peut être exercé que par la nation. Ce n'est pas un droit humain. Selon une publication récente, l'exercice du droit de vote ne relève pas des droits des étrangers, bien qu'il puisse être prévu en vertu des dispositions d'une convention internationale. Tel est le cas en Belgique, mais uniquement pour le droit de vote aux élections communales qui a été accordé aux seuls ressortissants de l'Union européenne. M. Verreycken rappelle à cet égard l'absence de toute règle de droit coutumier prévoyant l'obligation pour le droit interne d'un État d'octroyer également le droit de vote pour les élections communales aux étrangers non européens.
L'intervenant renvoie à l'article 16 de la Convention de sauvegarde des Droits de l'homme et des libertés fondamentales qui prévoit que « Aucune des dispositions des articles 10, 11 et 14 ne peut être considérée comme interdisant aux Hautes Parties contractantes d'imposer des restrictions à l'activité politique des étrangers ».
On peut déduire de cet article de la Convention européenne des droits de l'homme que l'État a le droit de réserver le droit de vote aux personnes qui possèdent la nationalité belge.
L'intervenant affirme que son parti s'est toujours opposé à l'octroi aux ressortissants de l'Union européenne du droit de vote aux élections communales en raison de considérations fondamentalement nationalistes et aussi parce que cela contribuerait à la francisation de Bruxelles.
La citoyenneté européenne dans le cadre de l'Union européenne implique également le droit de vote aux élections communales, mais en raison du principe de réciprocité, cette citoyenneté ne peut pas être accordée aux ressortissants de pays extérieurs à l'Union européenne. Selon l'intervenant, cette thèse est défendue par la Cour européenne des droits de l'homme. Il renvoie à l'arrêt Moustaquim contre Belgique du 18 février 1991 et à l'arrêt Göl du 19 février 1996. La Cour a estimé qu'il n'était pas question de discrimination à l'encontre des demandeurs parce que la Belgique fait partie de l'ordre juridique spécifique de l'Union européenne, si bien qu'elle peut traiter différemment les ressortissants de pays extérieurs à l'Union européenne.
L'intervenant est donc formellement partisan de la suppression des articles 2 à 9 de la proposition de loi en discussion.
Mme Van dermeersch souligne qu'il faut supprimer les articles 2 à 9 de la proposition de loi en discussion, parce que le droit de vote doit rester lié à la nationalité. La nationalité belge est en effet très facile à obtenir. L'intervenante considère que malgré son opposition à un octroi rapide de la nationalité belge, le VLD a, au cours de la législature précédente, donné son assentiment à un assouplissement radical de la loi sur la nationalité. L'intégration de l'étranger est présumée et la connaissance de la langue n'est pas requise. En outre, les parquets ne peuvent pas rendre d'avis approfondi dans le court laps de temps qui leur est imparti. À sa connaissance, on n'a encore introduit aucun dossier de déchéance de la nationalité.
L'intervenante croit savoir que dans la communauté islamique aussi, l'obtention de la nationalité belge est considérée comme une condition pour participer à des élections.
Mme Van dermeersch explique en détail pourquoi le groupe dont elle fait partie, celui du Vlaams Blok, estime que le droit de vote et la nationalité doivent rester indissociablement liés.
Elle condamne également la loi instaurant une procédure accélérée de naturalisation et s'oppose aux conséquences de cette nouvelle législation sur la nationalité : à cet égard, elle cite, à titre d'exemple, le ministre de l'Intérieur, M. Patrick Dewael, lors du congrès du VLD du 30 mars 2003 : (traduction) « Dans aucun autre pays, il n'est aussi facile d'obtenir la nationalité, avec tous les droits qui y sont attachés. »
Elle cite également M. Mohammed Talhaoui, ancien candidat d'ouverture du VLD, qui, dans une interview à « P-Magazine », a fait la déclaration suivante : « Le VLD a à ce point abaissé le seuil d'accès à la nationalité belge que les allochtones peuvent facilement devenir membres du club et qu'ils peuvent participer aux décisions à tous les niveaux. C'est là une offre généreuse, qui va, en fait, plus loin que le droit de vote aux élections communales. »
Selon l'intervenante, ces nouveaux Belges jouissent en effet du droit de vote à tous les niveaux. La procédure accélérée de naturalisation a entraîné une véritable explosion du nombre de nouveaux Belges.
Le groupe Vlaams Blok exige donc non seulement que l'octroi du droit de vote soit lié à la nationalité, mais aussi que l'on revoie la loi instaurant une procédure de naturalisation accélérée et que l'on renforce les conditions d'acquisition de la nationalité belge. L'acquisition de la nationalité doit être le couronnement d'une intégration réussie. À l'heure actuelle, tout étranger peut acquérir la nationalité belge au bout de trois ans de séjour légal dans notre pays, sans devoir apporter la preuve d'une quelconque forme d'intégration.
Le Vlaams Blok est explicitement opposé aux présentes propositions de loi qui tendent à octroyer le droit de vote aux étrangers. Selon l'intervenante, il est en effet à craindre que les étrangers ne défendent surtout leurs propres intérêts, ce qui est à son avis en contradiction avec la nécessaire volonté d'intégration. L'intervenante cite l'exemple de la Ligue arabe européenne (LAE) qui défend manifestement ses propres intérêts, qui a l'intention de présenter une liste aux prochaines élections et qui appelle ouvertement ses partisans à voter sur une base ethnique. Pareilles initiatives provoquent une fragmentation de la société, contre laquelle l'intervenante s'insurge.
Outre un renforcement du code de la nationalité, le Vlaams Blok estime que les candidats à la nationalité belge devraient être obligés de renoncer à leur nationalité d'origine. Ceux qui aujourd'hui choisissent expressément de ne pas adopter la nationalité belge et renoncent donc au bénéfice de la loi relative aux naturalisations, s'excluent eux-mêmes de toute participation aux élections.
Il est clair, pour l'intervenante, que les auteurs de la proposition de loi veulent uniquement s'en prendre aux Flamands de Bruxelles et lutter contre le Vlaams Blok à Anvers.
L'avenir dira si cette stratégie politique est la bonne. Car il n'est pas impossible que le Vlaams Blok recueille toutes les voix des électeurs qui refusent l'octroi du droit de vote aux étrangers. Les partis politiques francophones comptent sur le fait que ces étrangers de Bruxelles et de la périphérie vont voter massivement pour des listes francophones.
Un des points principaux du programme du Vlaams Blok est la création d'un État flamand indépendant, avec une nationalité flamande à laquelle le droit de vote doit être rattaché. Le Vlaams Blok prône carrément la dissolution de l'Union belge et revendique l'indépendance de la Flandre pour que l'État flamand puisse mener une politique qui réponde effectivement aux attentes des Flamands. Le Vlaams Blok voit l'État flamand comme une démocratie parlementaire, une république. Il est donc farouchement opposé à la francisation du Brabant flamand. Aussi le Vlaams Blok exige-t-il explicitement la suppression des facilités linguistiques et la scission de l'arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde.
De plus, Mme Van dermeersch critique la complexité de la réforme de l'État belge et les coûts budgétaires supplémentaires qu'elle entraîne. Selon elle, notre structure fédérale a été inventée pour sauver la construction belge et pour maintenir les transferts annuels de plusieurs milliards de la Flandre vers la Wallonie. Toutes sortes de loi ont permis de museler la majorité flamande. À présent, les francophones veulent faire passer l'octroi du droit de vote aux étrangers, contre la volonté de la majorité des Flamands. L'intervenante qualifie cette situation d'antidémocratique.
Selon elle, la Nation flamande n'est pas un concept creux. À l'appui de cette affirmation, elle se réfère à l'ouvrage intitulé « The ethnic origins of Nations » (Blackwell, Oxford, England, 1986) de M. Smith, le théoricien anglais du nationalisme.
Dans cet ouvrage, M. Smith se démarque de l'école dominante des marxistes Ernst Geller et Erich Hobsbawn. Ces derniers présentaient la nation comme un pur produit de l'État nation du 19e siècle. Smith considère en revanche que les nations sont l'incarnation moderne des ethnies prémodernes. Il définit la nation comme suit : « Une population qui, historiquement, possède un territoire, un mythe commun, des souvenirs historiques, une culture publique, une économie commune, des droits et obligations communs, parmi lesquels le droit de vote. Les nations modernes ne peuvent pas être créées à partir de rien et l'on ne peut pas simplement ajouter des personnes à une nation. »
Il importe à cet égard, selon l'intervenante, de dissocier expressément les notions de « nation » et de « peuple ». Le peuple est une communauté de personnes qui partagent la même culture et les mêmes usages et qui parlent, le plus souvent, la même langue. Sous la pression socio-économique, certains représentants d'une communauté se voient parfois contraints d'adopter une autre langue ou de laisser un peuple voisin plus puissant annexer certains territoires historiques d'une communauté populaire. C'est ainsi que les Flamands de Bruxelles et de la Flandre française appartiennent au peuple flamand.
La nation est un peuple qui est conscient de sa culture commune distincte et qui aspire à la traduire politiquement, soit sous la forme de l'indépendance politique, soit sous une autre forme d'autonomie.
Les caractéristiques, normes et valeurs communes d'une communauté culturelle déterminée conditionnent son identité. À une nation se rattache par conséquent une certaine identité et aussi une nationalité. L'identité commune a pour conséquence que les personnes faisant partie d'un peuple déterminé se sentent liées les unes aux autres. Les membres d'une communauté populaire acquièrent cet ensemble cohérent d'idées et de concepts, de valeurs et de normes par des processus éducatifs dans l'enseignement et au sein de la famille. La culture acquise influence fortement leur comportement et distingue les membres d'un peuple déterminé de ceux d'autres peuples. Et l'intervenante d'ajouter que selon la doctrine de M. Smith, l'identité mais également la nationalité sont capitales en l'espèce.
La hiérarchie des caractéristiques qui font que l'on appartient ou non à un peuple déterminé est différente selon les peuples. C'est ainsi que les Écossais n'ont par exemple pas de langue commune, mais lient leur identité avant tout à l'importance de leur histoire commune.
M. Smith défend la théorie selon laquelle le nationalisme est le mouvement idéologique qui tend à atteindre et à conserver l'autonomie, mais aussi l'unité, l'identité d'un certain groupe de population qui, par certains de ses membres, est considéré comme nation de fait ou potentielle. L'autodétermination et l'identité sont deux idées maîtresses du nationalisme. Le nationalisme doit être clairement dissocié du chauvinisme ethnique, susceptible de déboucher sur l'impérialisme ethnique. Un nationaliste estime en effet que chaque nation a droit a une identité propre et que chaque identité est unique et égale.
Tout cet exposé sur le nationalisme tend à illustrer que le Vlaams Blok reste attaché au lien entre le droit de vote et la nationalité. Voilà pourquoi Mme Van dermeersch propose expressément de supprimer les articles 2 à 9 de la proposition de loi.
Mme Leduc souhaite apporter plusieurs rectifications au tableau qu'a dressé la précédente intervenante de son parti, le VLD. Les migrations ont toujours existé. À un certain moment, les migrants s'établissent là où ils se sentent bien et où ils veulent que leurs enfants grandissent. Dans notre pays, nous connaissons et c'est heureux, la liberté d'expression et de culte. Chacun peut, sans le moindre problème, conserver ses coutumes et sa conviction, mais en Belgique contrairement aux Pays-Bas par exemple , on demande à celui qui s'établit ici, qui veut s'intégrer et souhaite en participer au processus démocratique d'acquérir la nationalité belge. D'où la loi instaurant une procédure accélérée de naturalisation qui a assoupli les conditions d'acquisition de la nationalité.
L'étape la plus importante vers l'intégration plus encore que l'acquisition de la nationalité consiste d'ailleurs, selon l'intervenante, à apprendre la langue de la région où l'on veut s'établir. Cela ne signifie pas pour autant que l'on doive renier ses origines ou sa culture. Celui qui veut aider des immigrés doit surtout leur faire passer ce message. Mme Leduc conclut dès lors en disant qu'en tant que libérale, elle n'a pas de leçon à recevoir de la part d'autrui, notamment de la part de Mme Van dermeersch.
Mme Van dermeersch commente les amendements nºs 17 et 18 et souligne que le droit de vote doit rester lié à la nationalité.
L'octroi automatique du droit de vote aux étrangers, alors que l'on a déjà la législation sur la nationalité la plus souple au monde, est un pas de plus vers une société totalement fragmentée dans laquelle les êtres humains ne devront absolument plus s'intégrer. On risque de voir chaque groupe ethnique et religieux défendre ses intérêts propres, ce qui constitue une évolution très préoccupante. Il existe déjà aujourd'hui à Anvers un parti d'étrangers, la Nieuwe Democratische Alliantie. L'octroi du droit de vote aux élections communales aux étrangers continuera de polariser la société et il ne sera plus question d'une intégration des étrangers dans la société.
Le Vlaams Blok est le seul parti politique à être radicalement et par principe opposé au droit de vote des étrangers, tant au niveau national qu'au niveau local. Pour le Vlaams Blok, le droit de vote en tant que droit politique doit rester réservé aux Flamands.
L'article 1er de la « Proeve van Grondwet van de Republiek Vlaanderen » (projet de Constitution de la République de Flandre) prévoit que la Flandre est une république démocratique « où le pouvoir suprême émane du peuple ». Le peuple flamand « exerce le pouvoir suprême par l'entremise des représentants qu'il a élus au Parlement et par sa participation aux référendums ». Par ailleurs, seuls les citoyens flamands ont le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales.
Le fait que les étrangers ne puissent pas voter aux élections législatives découle du point de vue du Vlaams Blok sur la souveraineté du peuple flamand. Pour le Vlaams Blok, la souveraineté est détenue par le peuple flamand, qui l'exerce par l'entremise de ses représentants élus. Le droit, la compétence du citoyen flamand d'exprimer une volonté au moyen du droit de vote est la traduction et l'expression de la souveraineté du peuple flamand.
La citoyenneté flamande est indissociable de la souveraineté du peuple flamand : par l'élection des ses représentants, le Flamand, le citoyen flamand participe à l'élaboration de la législation, de la réglementation à laquelle il ou elle est soumis(e). L'étranger n'a ni la faculté ni l'autorisation de parler au nom du peuple flamand; l'étranger n'a ni la faculté ni l'autorisation de participer à la formulation de la volonté du peuple flamand.
Pour Mme Van dermeersch, il est inacceptable que des étrangers reçoivent un pouvoir de codécision dans nos villes et communes. Dans les villes à forte densité d'étrangers, le droit de vote aux élections communales des Flamands sera vidé de sa substance. Les groupements de musulmans comme la Ligue arabe européenne qui militent pour le droit de vote des étrangers et pour une société multiculturelle à l'état pur ont un programme qui n'est absolument pas axé sur l'intégration, mais sur la séparation et la distinction.
L'intervenante souligne que son groupe politique n'est pas partisan d'une société fragmentée, mais qu'il est capital que les étrangers s'intègrent dans la société flamande et qu'ils fassent, avec les Flamands, des choix qui serviront l'intérêt général de notre société. La naturalisation est la clé de voûte d'une intégration réussie. Ce n'est qu'alors que le nouveau citoyen flamand peut jouir des droits politiques inhérents à la citoyenneté.
Le Vlaams Blok applique la devise : « les droits politiques par l'intégration » et non « l'intégration par les droits politiques ». Les étrangers en tant qu'individus peuvent devenir des citoyens flamands, mais uniquement s'ils s'adaptent à notre culture, à notre mode de vie, à nos lois. M. John De Wit, journaliste, fait remarquer à juste titre que l'octroi du droit de vote aux étrangers décourage, en règle générale, les étrangers d'adopter la citoyenneté « car à quoi bon s'acharner alors que, juridiquement, un Belge n'est de toute manière pas traité différemment d'un non-Belge ? ».
L'octroi du droit de vote aux étrangers est une exigence de la caste politique francophone tout entière. Les partis politiques wallons et francophones savent pertinemment qu'en octroyant le droit de vote aux étrangers, ils peuvent rayer définitivement les Flamands de Bruxelles de la carte électorale.
Les partisans du droit de vote (communal) font souvent référence, en effet, à toutes sortes de traités internationaux et aux droits humains fondamentaux. Or, diverses dispositions de droit international prévoient précisément que le droit de vote peut être réservé aux citoyens de l'État concerné.
Si un État peut limiter l'activité politique des étrangers, il peut aussi, a fortiori, limiter le droit de vote des étrangers.
S'il est vrai que la doctrine a toujours été partagée quant à la portée exacte de l'article 3 du Premier Protocole de la Convention européenne des Droits de l'homme (« Les Hautes Parties contractantes s'engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans les conditions qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple sur le choix du corps législatif. »), une chose est sûre en tout cas : cet article n'est pas réputé applicable aux élections des conseils communaux et des centres publics d'aide sociale. Il concerne uniquement le « pouvoir législatif ».
D'autre part, le Comité des ministres du Conseil de l'Europe a approuvé une convention qui prévoit l'octroi du droit de vote et d'éligibilité aux étrangers et pas seulement aux ressortissants des États membres du Conseil de l'Europe qui résident légalement dans le pays d'accueil depuis au moins cinq ans. La Convention du 5 février 1992 sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local devait entrer en vigueur dès l'instant où quatre pays l'avaient ratifiée.
Alors que des pays comme le Danemark, la Finlande, l'Italie, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède l'ont signée et ratifiée (Chypre, la Tchéquie et le Royaume-Uni l'ont signée mais ne l'ont pas encore ratifiée), la Belgique et la grande majorité des États membres ne l'ont pas encore signée ni, a fortiori, ratifiée.
L'article 21, premier alinéa, de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 juridiquement non contraignante dispose que « toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis ». Les mots « de son pays » montre clairement qu'il s'agit des citoyens ressortissants de l'État concerné. C'est pourquoi l'intervenante propose de supprimer les articles 2 et suivants de la proposition de loi à l'examen.
L'article 25 de la Convention internationale de 1966 sur les droits civils et politiques dispose ce qui suit : « Tout citoyen a le droit et la possibilité, (...) (a) de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis, (b) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs; (...) ». Selon cet article, la catégorie des personnes qui peuvent l'invoquer est limitée explicitement à « tout citoyen », c'est-à-dire aux personnes qui ont la nationalité du pays.
Par le passé, le Vlaams Blok s'est radicalement opposé à l'octroi du droit de vote aux ressortissants UE pour des raisons de principe d'ordre nationaliste et parce que l'octroi du droit de vote aux ressortissants UE contribue à la francisation de Bruxelles et du Brabant flamand. Telle n'est toutefois pas la question ici. Ce qui se passe ici, c'est que l'on met les ressortissants hors UE et les ressortissants UE sur un pied d'égalité pour ce qui est du droit de vote. L'intervenante estime que cela ne se justifie en rien.
Les États peuvent conclure des conventions internationales prévoyant des exceptions au critère de nationalité comme condition liée à l'exercice d'un droit politique. C'est d'ailleurs ce qu'ont fait les États membres de l'Union européenne en créant une citoyenneté européenne à laquelle sont attachés certains droits, comme le droit de vote aux élections communales et européennes. Pour le processus d'intégration en cours, ces pays de l'Union européenne forment un ordre juridique spécifique et leurs ressortissants ne peuvent donc en aucun cas être mis sur un pied d'égalité avec ceux de pays hors UE.
Les partisans de l'octroi du droit de vote aux étrangers pour les élections communales invoquent souvent l'adage « No taxation without representation ». Comme les étrangers paient aussi des impôts, ils devraient avoir leur mot à dire sur l'utilisation des recettes fiscales. Mme Van dermeersch estime que ce raisonnement est à la fois erroné et malhonnête.
L'adage en question remonte en effet à la « Magna Charta » de 1215, époque où la noblesse anglaise voulait avoir son mot à dire à côté du Roi.
Les colons qui peuplèrent l'Amérique du Nord reprirent cet adage à l'adresse de la royauté britannique.
Historiquement, cet adage n'a certainement pas été formulé dans le cadre de l'octroi du droit de vote aux étrangers. Il est donc malséant de l'invoquer ici. Le contexte est totalement différent.
Avant le 19e siècle, le système électoral était basé sur le suffrage censitaire. Seuls ceux qui payaient un certain montant d'impôts avaient le droit d'émettre un ou même plusieurs suffrages. Nous osons espérer que l'intention n'est pas d'en revenir à pareil système. Pour accorder les mêmes droits à chacun, on décida au 19e siècle de lier le droit de vote à la nationalité. Le Vlaams Blok souhaite maintenir ce lien et demande dès lors la suppression des articles 2 et suivants de la proposition de loi.
Le fait de payer des impôts n'a rien à voir avec le droit de vote. Les impôts sont à mettre en rapport avec les services que l'État offre à la population. Le citoyen qui paie des impôts à son autorité doit normalement obtenir certains services en échange. L'étranger qui paie des impôts doit également recevoir des services en retour.
Le Vlaams Blok craint que le premier ministre Verhofstadt n'ait déjà, par souci de son propre salut, fait certaines promesses aux partisans de l'octroi du droit de vote aux étrangers. Pour ce parti, c'est la énième trahison de la cause flamande par le VLD. On sent déjà que l'opposition du VLD à la présente proposition de loi a perdu beaucoup de sa vigueur. L'on sait bien que les partis francophones veulent se servir du droit de vote des étrangers pour minoriser complètement les Flamands de Bruxelles. Une majorité de francophones veut à tout prix faire passer ce texte, contre la volonté d'une majorité de Flamands. Voilà entre autres pourquoi le Vlaams Blok demande la suppression de l'article 3 de la proposition de loi.
M. Wille renvoie à l'intervention de Mme Marie-Claire Foblets, professeur à la KUL, durant les auditions que cette commission a organisées sous la précédente législature (doc. Sénat, nº 2-548/7). Selon elle, la discussion sur la durée du séjour et les conditions de séjour en général, a été menée de façon plus que douteuse. Cela risque de créer des problèmes.
L'intervenant estime que la différence qui existe sur le plan de l'intégration entre les ressortissants de l'Union européenne et les autres ressortissants étrangers d'États ne faisant pas partie de l'UE a délibérément été passée sous silence par certains commissaires et par une partie des médias. L'article 8 B, paragraphe 1, du traité CE, revêt une importance particulière à cet égard. Cette disposition prévoit que des problèmes spécifiques peuvent donner lieu à un statut distinct dans certains États membres. Compte tenu du contraste entre les opinions au Nord et au Sud du pays, on pourrait examiner dans quelle mesure l'article 8 B, paragraphe 1, du Traité CE peut trouver à s'appliquer.
M. Wille demande par ailleurs à ses collègues de réenvisager une limitation à laquelle M. Moureaux a déclaré se résoudre par pragmatisme politique sous peine que la proposition de loi n'aboutisse pas. En effet, si l'on s'intéresse vraiment à la citoyenneté européenne, il faut bien se rendre compte qu'un ressortissant européen fonctionne dans la logique du niveau communautaire.
Il n'est pas vrai que les personnes qui connaissent une série de besoins locaux doivent également voir expliciter ces besoins à ce niveau. C'est justement la grande différence avec les ressortissants hors UE. Selon M. Wille, celui qui prétend que l'octroi du droit de vote au niveau local permettra de combler le principal besoin des ressortissants hors UE, se trompe du tout au tout.
Si vraiment on estime que l'octroi du droit de vote au niveau communal est une nécessité, il faut oser appliquer ce raisonnement à tous les niveaux. Or, c'est précisément là que réside la différence non seulement de ton, mais aussi de contenu entre le point de vue de la majorité ad hoc dans ce dossier et par exemple celui du VLD. Le VLD est précisément d'avis que c'est l'ouverture de la nationalité qui témoigne du plus grand respect envers les intéressés.
Pour le VLD, il est nécessaire de réaliser l'aspiration de ce groupe au moyen du choix de la nationalité. Ce n'est qu'une fois qu'ils auront fait ce choix que les intéressés jouiront de tous les mêmes droits politiques que ceux dont jouissent les Belges. Toute autre discussion est une fausse discussion. Contrairement au Vlaams Blok, le VLD cherche la solution dans la concertation et non pas dans l'affrontement. Il est par conséquent très frustrant que le fonctionnement de la commission dans ce dossier n'ait vraiment pas permis d'avoir cette concertation.
M. Noreilde demande au groupe SP.A d'expliquer pour quels motifs il n'est pas d'accord avec la proposition du VLD de faire une ouverture en acceptant une évaluation du code de la nationalité.
Mme Pehlivan déclare que le SP.A n'a jamais prétendu que l'octroi du droit de vote permettrait de résoudre certains problèmes au sein de la société. Ce droit de vote est avant tout une affaire de participation politique élémentaire. C'est un levier d'intégration. Le SP.A n'a jamais non plus prétendu que l'adoption de la nationalité belge résoudrait tous les problèmes.
Mme Pehlivan souhaite revenir sur un article de presse qui lui est consacré et auquel Mme Leduc s'est référée durant la discussion générale. Cet article, qui date de 1981, décrit Mme Pehlivan comme une étrangère parfaitement intégrée. L'intéressée souligne qu'en 1981, elle n'avait pas encore acquis la nationalité belge. Elle n'en avait pas eu besoin pour se sentir parfaitement bien ici. À son arrivée en Belgique à l'âge de sept ans, elle a été accueillie chaleureusement par ses voisins, par les Gantois et par les Flamands. Cela n'a pas été une mince affaire pour elle et sa famille de s'ouvrir aux Flamands. Les choses se sont faites petit à petit et elle a fini par être élue comme représentante de l'ensemble de la population. De nombreux flamands la soutiennent dans le combat qu'elle est en train de mener.
Mme Pehlivan veut que cette proposition de loi donne un signal clair, qu'elle soit une ouverture à la participation politique, y compris pour les personnes qui, pour diverses raisons, n'adoptent pas la nationalité. Il règne actuellement une forme de discrimination. On peut y opposer la réciprocité, mais Mme Pehlivan estime que si, dans un contexte européen, la nationalité belge ne peut pas être une condition pour qu'un Néerlandais, un Polonais, etc., puissent voter, les personnes qui habitent chez nous depuis plusieurs années ont, elles aussi, le droit démocratique d'être dispensées de cette condition.
Le SP.A est prêt à mener l'ensemble du débat sur l'intégration. Un certain nombre de membres du VLD et du CD&V semblent y être disposés. Mme Pehlivan souhaite également mener au Sénat un débat de fond sans équivoque sur l'intégration. Il ne s'agit ici que de la participation politique. La prochaine phase consistera à parler de l'emploi, de l'enseignement, du logement, de l'exclusion, du racisme, de la discrimination, etc. Mme Pehlivan demande à ses collègues s'ils sont prêts à entamer cette discussion et quel est le prix qu'ils sont disposés à payer pour cela.
Mme Geerts revient sur la demande visant à mener un débat un peu plus axé sur le fond. Il n'empêche qu'à un moment donné, on a quand même abordé la question de savoir comment on pourrait oeuvrer ensemble à ces problèmes de société. Finalement, le VLD n'a pas donné suite à cette initiative. L'intervenante regrette que l'on n'ait pas saisi cette chance à l'époque.
Cependant, il est trop tard pour reprendre le fil de cette esquisse de dialogue, puisque la discussion générale est close, conclut Mme Geerts.
M. Jean-Marie Dedecker confirme qu'au cours de la réunion précédente, le VLD avait effectivement proposé de collaborer, mais uniquement si l'on pouvait démontrer que l'octroi du droit de vote aux étrangers contribue à l'intégration des allochtones. Jusqu'à présent, les partisans de ce droit de vote sont restés muets.
Une chose est sûre, poursuit M. Jean-Marie Dedecker : dans les pays où l'on a accordé le droit de vote aux étrangers, l'expérience a débouché sur un échec. On connaît l'exemple néerlandais, mais au Danemark aussi, le résultat a été un comportement xénophobe caractérisé.
Un débat ouvert requiert une discussion qui couvre tous les aspects. La loi instaurant une procédure accélérée de naturalisation a manifestement été un fiasco et aujourd'hui, on veut aller encore plus loin, sans avoir jamais fait le bilan des mesures précédentes. C'est un peu comme si dans ce débat, celui qui donne un doigt perdait le bras.
Mme Bousakla trouve que l'on utilise beaucoup trop le langage des slogans. L'intégration doit venir des deux côtés. Il va de soi que l'on doit vérifier la volonté des allochtones de s'adapter. Mais les autochtones doivent également s'ouvrir à la culture de leurs concitoyens allochtones. Pour les représentants de la nation, s'y intéresser est non seulement un droit, mais aussi un devoir.
Mme Vienne se dit étonnée de voir que le débat est mené en termes d'antagonisme, comme s'il s'agissait d'un conflit entre communautés multiples, et que les relations entre elles seraient jugées en termes de manque de loyauté.
Elle est d'avis qu'il s'agit de tout autre chose, et qu'il faut considérer ces différentes communautés comme une tranche de mille-feuille, dont les couches s'additionnent, et ne s'excluent pas.
Dans cette optique, il est très bien concevable qu'on participe à la politique en tant qu'étranger, sans renoncer à la nationalité de son pays d'origine.
Elle espère que les gens qui vivent depuis longtemps ici auront enfin le droit de devenir des acteurs dans leur propre commune. C'est le minimum qu'on puisse leur offrir dans un esprit de générosité.
Mme Durant s'étonne de la pression communautaire qui s'exerce dans ce débat. C'est une technique désormais bien connue : chaque fois qu'on n'obtient pas raison, on extrait un problème pour en faire un autre débat. La dernière trouvaille est l'exigence de tenir un référendum sur la question du droit de vote parce que l'on démontrerait ainsi que les Communautés ne s'accordent pas sur ce point.
M. Jean-Marie Dedecker rappelle qu'Écolo a un jour proposé d'organiser un référendum.
Mme Durant conteste qu'il s'agisse de la même chose. Écolo voulait un référendum à titre complémentaire.
L'intervenante maintient le point de vue selon lequel l'octroi du droit de vote ne saurait en aucun cas être antagonique avec l'intégration.
M. Jean-Marie Dedecker déplore que ses amendements soient systématiquement écartés et qu'il ne soit même pas possible de discuter d'une proposition, pourtant évidente, visant à exiger que la personne de nationalité étrangère parle la langue du pays pour pouvoir voter.
M. Verreycken loue la modération avec laquelle M. Wille a abordé le problème du droit de vote des étrangers, en insistant notamment sur la différence essentielle existant entre le droit de vote des citoyens ressortissants de l'Union européenne et celui des autres étrangers.
Selon lui, cette différence réside évidemment dans le fait que, dans le premier cas, le droit de vote découle d'une donnée propre au droit des traités, alors que, dans l'autre cas, il n'y a pas eu abandon de souveraineté en faveur des non-ressortissants de l'Union européenne.
M. Moureaux a surtout été impressionné par les interventions venant du SP.A. et par les témoignages de ses deux sénateurs d'origine étrangère.
Il veut toutefois relever un point particulier : celui concernant le soit disant danger de francisation des communes bruxelloises. Il croit au contraire que le renforcement de la présence flamande à Bruxelles se fera par les allochtones ou ne se fera pas.
Il partage évidemment le point de vue que, pour s'intégrer, il faut connaître la langue du pays.
À tel point que, dans sa commune, tous les immigrés sont incités à apprendre au moins une langue nationale, dont le néerlandais. Ces cours sont dispensés avec l'aide notamment de la « Vlaamse Gemeenschapscommissie ».
Le problème du droit de vote se situe bien évidemment dans une hiérarchie de problèmes.
Il est évident que, dans des quartiers à forte densité de populations d'origine étrangère, le premier problème est l'emploi. Le deuxième, en relation étroite de cause à effet avec le premier, est l'éducation : il ne demande pas mieux que d'avoir le plus d'écoles possibles, et de recevoir le plus de subsides possibles pour ce faire. L'importance de certains dossiers ne doit pas empêcher que l'on avance à propos d'autres.
Mme Thijs se dit également préoccupée par les problèmes du chômage, de la connaissance des langues, etc. Mais, contrairement à d'autres, elle ne lance aucun appel à une quelconque forme de soutien : elle estime qu'il appartient aux politiques de rechercher eux-mêmes une solution. Jusqu'à présent, elle n'a encore entendu aucune proposition visant à résoudre les différents problèmes évoqués.
M. Coveliers répète que l'octroi du droit de vote ne favorise pas automatiquement l'intégration. Le VLD part du principe qu'un tel cadeau serait contre-productif. Tel qu'il est prévu dans la proposition à l'examen, ce cadeau est sans valeur. Il suffit de voir ce qui se passe aux Pays-Bas, où il apparaît clairement que les étrangers n'attachent que peu d'importance à ce droit. M. Coveliers ajoute que la proposition de loi en discussion induit une discrimination à l'égard des autochtones belges.
Aux yeux de M. Van Peel, ce n'est pas un hasard si l'atmosphère en commission et au Sénat est si crispée lorsqu'on aborde la problématique du droit de vote des immigrés.
Selon lui, cette crispation reflète parfaitement le climat qui règne à ce sujet dans notre pays.
L'on tente de se convaincre qu'en accordant ce droit de vote, on contribue à rendre la société meilleure et plus tolérante.
Or, c'est le contraire qui est vrai : tous les liens invoqués entre l'intégration et le droit de vote des étrangers non européens ne sont pas pertinents. Il suffit, pour s'en convaincre, d'observer le phénomène « Pim Fortuyn » aux Pays-Bas. La problématique de la langue, de l'emploi, de l'intégration et de l'islam a provoqué une véritable éruption aux Pays-Bas, où les immigrés disposent pourtant du droit de vote aux élections communales.
Le refus de l'intégration s'est accru au lieu de s'atténuer et il entraîne un phénomène de polarisation.
M. Moureaux rejette cet éternel recours à la fuite en avant devant le Vlaams Blok, en invoquant le danger de polarisation comme prétexte.
M. Van Peel estime, au contraire, que des initiatives irréfléchies comme les présentes propositions ne font qu'accentuer la polarisation.
Il peut comprendre qu'une personne désire conserver sa nationalité d'origine et s'abstienne, pour cette raison, d'invoquer la loi de naturalisation accélérée.
Mais pour la grande majorité des immigrés, ce risque n'existe pas. En prenant la nationalité belge, la plupart d'entre eux ne perdent pas leur nationalité d'origine, contrairement aux Belges qui adoptent une autre nationalité.
Dès lors, pourquoi les étrangers ne prendraient-ils pas la nationalité belge afin d'acquérir tous les droits, y compris celui d'être élu, et ce, à tous les niveaux ?
Il constate que dans ce débat, comme dans beaucoup d'autres, une majorité francophone tente d'imposer une réglementation fondamentale à laquelle une majorité flamande est opposée.
La situation inverse conduirait immédiatement à une opposition massive des francophones.
Après le vote sur l'interdiction de la publicité pour le tabac à Francorchamps, le parlement a été dissout. Lors des négociations gouvernementales qui s'ensuivirent, le premier point à l'ordre du jour fut l'assouplissement de la loi « Francorchamps ».
Selon l'intervenant, la raison de ce malaise persistant réside dans la manière tout à fait différente dont la Flandre et la Belgique francophone perçoivent la plupart des problèmes de société.
Il ne faut pas contraindre les Flamands à lutter contre le racisme et la xénophobie avec des armes qu'ils ne souhaitent pas utiliser eux-mêmes pour combattre ces phénomènes.
Cela vaut aussi bien pour la présente proposition que pour d'autres propositions antérieures, comme celles relatives à la privation de financement pour les partis liberticides ou à la lutte contre le Vlaams Blok par la voie judiciaire.
L'intervenant déplore qu'on ne prenne même pas la peine d'écouter les arguments du VLD, et il est convaincu qu'une telle attitude ne fera qu'aggraver les problèmes de société.
Mme Leduc abonde dans le même sens.
Entre-temps, en dépit de ses demandes répétées, elle n'a toujours reçu aucune réponse à la question de savoir pourquoi les étrangers concernés par la présente proposition refusent toujours d'adopter la nationalité belge, alors même que cette naturalisation ne leur ferait pas perdre leur nationalité d'origine. Tel est le cas, entre autres, des ressortissants du Maroc et de la Turquie. Aucune personne sensée ne peut comprendre pourquoi ils refusent ce cadeau.
Mme Bouarfa répond à M. Wille qu'à l'heure de la mondialisation et alors que le monde devient de plus en plus petit grâce aux moyens de communication, le groupe PS veut l'intégration dans une société des gens, et refuse une intégration dans une société de l'argent.
La même intervenante rappelle que le droit de vote n'a pas besoin de nationalité. C'est une idée acquise même au sein des groupes VLD et CD&V, puisque les citoyens européens possèdent le droit de vote en Belgique.
Un autre argument utilisé par les deux groupes politiques précités, à savoir que les ressortissants non européens refuseraient la nationalité belge, est faux, parce que l'État belge ne leur propose pas la nationalité. L'intervenante souscrit à l'opinion que la demande de la nationalité est la meilleure solution pour les citoyens installés en Belgique depuis longtemps afin qu'ils puissent partager tous les droits. Elle rappelle qu'en 2003, moins de 30 % des demandes de naturalisation ont été accordées. Le meilleur exemple des gens qui refusent la nationalité est précisément celui des ressortissants des pays membres de l'Union européenne. Ils veulent garder leur nationalité d'origine.
Mme Bouarfa répète que pour le groupe PS le droit de vote n'est qu'un élément parmi les autres de l'intégration. L'argumentation de principe est que le droit de vote est juste.
Le droit de vote a également été mis en exergue vis-à-vis de la montée de l'extrême droite. L'exemple du Danemark a été cité, mais l'on pourrait également parler d'Anvers. L'intervenante insiste sur le fait que la démocratie est un combat permanent et quotidien. Accorder le droit de vote ne mettra pas fin à ce combat.
Mme Leduc souligne que la notion d'États-Unis d'Europe est en train de mûrir dans les esprits et souligne l'importance de la réciprocité. Elle se demande encore pourquoi certains refusent la nationalité belge puisqu'ils peuvent conserver leur nationalité d'origine. Le VLD espère obtenir rapidement du ministre de l'Intérieur les statistiques relatives aux demandes de naturalisation.
M. Vanhecke souligne l'aspect communautaire de ce débat. La Belgique francophone veut imposer le droit de vote, malgré le refus de la Flandre, à l'exception des membres du SP.A-Spirit. Pourquoi les partis flamands n'adoptent-ils pas la même stratégie que les partis francophones ? Ils pourraient fort bien peser de tout leur poids politique pour s'opposer au droit de vote.
Mme Thijs fait remarquer que l'octroi du droit de vote aux citoyens européens résulte du fait d'être citoyen d'un État membre de l'Union européenne. Pour le reste, des pays comme les pays scandinaves appliquent le principe de réciprocité.
M. Guilbert déclare que le problème est plutôt politique que communautaire. Le débat oppose les partisans d'une société ouverte à ceux qui optent pour une société refermée et repliée sur elle-même. La confusion entre citoyenneté et nationalité perdure. L'on continue à confondre l'endroit d'où on vient avec l'endroit où on vit. Un citoyen doit pouvoir participer à la vie de sa commune et y exercer ses droits de citoyen. Le fait que d'aucuns préfèrent garder leur nationalité d'origine est un choix respectable. Ce choix relève de l'intimité de la personne. Ce n'est pas pour autant qu'il faut lui interdire de participer à la vie publique.
L'intervenant constate que l'expérience aux Pays-Bas est réussie depuis 1985, contrairement aux allégations des opposants du droit de vote. L'apparition d'un leader populiste ne signifie pas l'échec de l'introduction du droit de vote. Il répète que le droit de vote est un élément parmi d'autres qui permettra aux étrangers de s'intégrer.
M. Roelants du Vivier s'accorde avec les défenseurs de la naturalisation, mais il note que la naturalisation s'opère au niveau national. Or, trouver une solution pour les problèmes locaux nécessite une participation au niveau local. L'argument de l'extinction progressive de la problématique n'est vrai qu'en partie et que pour certaines nationalités, notamment pour les Turcs et les Marocains. Dans les années à venir, des autres nationalités viendront s'installer ici, comme les personnes venant du Moyen-Orient, de l'Amérique latine, de l'Europe de l'Est. Ils voudront garder un lien avec leurs pays d'origine, par exemple dans le cadre des élections législatives, mais souhaiteront en même temps participer à la politique locale en Belgique.
M. Jean-Marie Dedecker s'étonne de la remarque de M. Roelants du Vivier. Ce dernier a en effet déposé en octobre dernier une proposition de loi spéciale visant à permettre aux Belges résidant à l'étranger de voter aux élections législatives régionales (voir doc. Sénat, nº 3-284/1). L'intervenant trouve curieux que la proposition relative à l'octroi du droit de vote aux étrangers, qui ne pourrait entrer en vigueur qu'en 2006 au mieux, soit examinée ici en urgence. Par contre, la proposition de M. Roelants du Vivier concerne les élections de 2004. Pourtant, elle n'a pas encore été inscrite à l'ordre du jour de la commission.
Le président fait remarquer que la commission a décidé d'inscrire prochainement la proposition de loi spéciale à son ordre du jour.
M. Roelants du Vivier retorque que sa proposition de loi spéciale n'est pas contradictoire avec la proposition en discussion ici. Sa proposition concerne les élections régionales et européennes.
M. Van Overmeire demande si l'octroi du droit de vote aux ressortissants des États membres de l'Union européenne est un acquis. Il ne pense pas et renvoie sur ce point à un article du projet de Constitution européenne. Cet article permet aux États membres de sortir de l'Union européenne. Un autre article prévoit par ailleurs la possibilité d'exercer sur un État membre une pression politique telle qu'il ne lui reste plus d'autre choix que de quitter l'Union. En pareil cas, les ressortissants de l'État en question perdraient leur droit de vote. Par conséquent, l'exemple du droit de vote des citoyens de l'Union européenne ne peut s'appliquer à d'autres pays.
Amendement nr. 162
M. Coveliers et consorts déposent l'amendement nº 162 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui vise à supprimer les articles 2 et 3 de la proposition de loi parce qu'ils sont contraires à l'article 8 de la Constitution.
M. Jean-Marie Dedecker, coauteur, renvoie à l'avis du Conseil d'État nº 35 825/2 du 20 octobre 2003, qui a été rendu sur l'article 2 de la proposition de loi de M. Eerdekens du 15 juillet 2003 visant à octroyer le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales et provinciales aux ressortissants étrangers (doc. Chambre, nº 076/002). L'article 2 de cette proposition de loi est identique à la proposition de loi en discussion. Il vise à accorder le droit de vote aux élections provinciales aux ressortissants d'États étrangers à l'Union européenne. Selon le Conseil d'État, la Belgique n'a en effet aucune obligation de droit international d'accorder le droit de vote aux élections provinciales à des ressortissants de l'Union européenne, pas plus, a fortiori, qu'à d'autres étrangers.
M. Coveliers signale que l'article 8, alinéa 3, de la Constitution dispose que conformément aux obligations internationales et supranationales de la Belgique, le droit de vote peut être accordé aux ressortissants de l'Union européenne. Il est toutefois limité aux élections communales et ne s'applique pas aux élections des conseils de district ni aux élections provinciales, pas plus, a fortiori, qu'aux élections régionales.
L'intervenant se réjouit que M. Eerdekens, député, ait demandé en temps utile l'avis du Conseil d'État concernant sa proposition. Cela a permis de déceler un certain nombre d'éléments inconstitutionnels dans la proposition de loi.
Mme Leduc déplore que la proposition de loi en discussion ne soit toujours pas compatible avec la Constitution.
M. Moureaux dit regretter qu'un débat sur le fond soit manifestement impossible au sein de cette commission. Pourtant, la commission est confrontée à un problème particulièrement délicat. L'intervenant est donc ouvert aux arguments des opposants à la proposition de loi en discussion qui n'invoquent pas des arguments racistes. C'est pourquoi son groupe souhaite accepter le « plus petit commun dénominateur » des partisans du droit de vote aux élections communales pour les ressortissants de pays non membres de l'UE et faire ainsi un premier pas, symbolique.
L'intervenant reconnaît que des problèmes sont parfois posés par un petit groupe, surtout de jeunes. Ce n'est toutefois pas à ces personnes que la loi proposée accordera le droit de vote aux élections communales, puisque bien souvent, elles sont déjà belges. Ce sont surtout des personnes plus âgées, qui séjournent chez nous depuis longtemps, qui obtiendront la possibilité de participer à la prise de décisions démocratiques. Les auteurs de la proposition de loi espèrent de la sorte pouvoir également demander le concours de la communauté allochtone pour amener le petit noyau de jeunes rebelles à être plus raisonnables.
L'intervenant souligne qu'il y a aujourd'hui encore une immigration. Une approche nuancée du phénomène est de mise. Il n'est pas tenable en effet d'ouvrir purement et simplement toutes les frontières; les flux migratoires doivent être canalisés. Mais il est sûr que l'on continuera d'être confronté au phénomène migratoire; c'est inévitable. L'intervenant est convaincu, pour des raisons morales et philosophiques, qu'il faut aborder cette problématique dans un esprit d'ouverture et en se référant au principe que tous les hommes sont égaux. Dans le passé, cette motivation a conduit des gens à risquer leur propre vie durant l'occupation de la Seconde Guerre mondiale pour aider la population juive à survivre.
Le noeud du problème se situe au niveau de la condition de nationalité. Pas mal d'étrangers ont profité de l'assouplissement de la législation pour acquérir la nationalité belge, mais un certain nombre d'entre eux ne sont cependant pas disposés à en faire autant pour diverses raisons. Cependant, ils souhaitent participer à la prise de décision comme le montre par exemple la participation aux « assemblées générales » en région bruxelloise. C'est pour ces personnes, qui ne sont pas si nombreuses et qui ne bouleverseront donc certainement pas les rapports de force politiques, que l'adoption de la proposition à l'examen présente une valeur symbolique considérable. À terme, cette démarche conduira à l'intégration.
Mme De Schamphelaere apprécie grandement l'intervention de M. Moureaux, qui a indiqué de manière très claire les motivations qui sous-tendent la proposition à l'examen. Notre pays a effectivement évolué et est devenu une société ouverte dans un monde globalisé, mais il se caractérise aussi par le vieillissement démographique de la population autochtone. Il importe donc d'offrir aux nouveaux Belges l'opportunité de s'intégrer dans cette société ouverte et tolérante.
La réalisation du droit de codécision politique peut s'opérer de deux manières : soit en dissociant les notions de nationalité et de droits politiques, soit en assouplissant la législation sur la nationalité.
La Belgique a opté récemment pour la seconde option, les Pays-Bas et les pays scandinaves pour la première. Ce qui frappe à cet égard, c'est que ces pays ont opté pour une procédure rigoureuse d'obtention de la nationalité.
Le droit de vote pour les immigrés figure déjà depuis des décennies à l'agenda politique. Le parti dont l'intervenante fait partie, durant tout le temps où il a assumé des responsabilités gouvernementales, n'a jamais soutenu la seconde option. Il a, en revanche, contribué à assouplir la législation sur la nationalité, même s'il émet pas mal de réserves à propos de la dernière modification, à savoir la procédure accélérée de naturalisation. Cette dernière a en effet eu pour résultat que la situation de la Belgique en matière d'octroi de droits politiques aux étrangers n'est plus comparable à celle en vigueur dans les autres pays européens.
En Belgique, les étrangers acquièrent des droits politiques, dont certains touchent à la souveraineté nationale, sans devoir fournir la preuve d'une connaissance suffisante de l'une des langues nationales ou de toute autre forme de loyauté. Dans certains cas, il n'y a même plus de conditions de résidence.
Dans la plupart des pays européens, la législation relative à la nationalité impose en revanche l'un ou l'autre critère de contrôle de la volonté d'intégration. Cela peut aller d'une connaissance suffisante de la langue nationale (Allemagne, France et Pays-Bas) au serment de fidélité à la Nation (Allemagne, Italie et Royaume-Uni), en passant par l'obligation de renoncer à la nationalité d'origine (Danemark et Pays-Bas).
Dans la législation belge sur la nationalité, toutes ces conditions ont été éliminées parce qu'on a voulu réaliser la participation politique des étrangers par le biais d'une procédure souple de naturalisation.
La nationalité belge a ainsi évolué pour devenir une preuve de citoyenneté et on ne peut plus affirmer que la participation des étrangers à la vie politique soit impossible.
Si, en adoptant la proposition à l'examen, la Belgique décide de passer de la seconde à la première option susvisée, on se trouvera confronté à de graves conséquences. C'est la raison pour laquelle son groupe s'oppose à cette proposition. La nationalité doit être considérée comme une forme de citoyenneté assortie de participation politique, que l'étranger peut acquérir par le biais d'une procédure souple. Si cette formule ne rencontre pas le succès espéré, c'est en raison d'un manque d'information.
Nombre de ressortissants non-UE résidant en Belgique s'imaginent à tort qu'ils ne peuvent obtenir la nationalité belge que s'ils renoncent à leur nationalité d'origine. Parfois, cependant, ils sont confrontés à un problème de principe ou à un problème moral. Dans ce cas, on peut se demander s'il y a bien lieu de leur accorder le droit de vote.
L'adoption de la proposition en l'examen aura pour effet de rendre notre législation incohérente. La procédure accélérée de naturalisation permet aux intéressés d'obtenir après trois ans les droits politiques à tous les niveaux, alors que ceux qui ne veulent pas de la nationalité belge obtiendront le droit de vote au niveau communal après cinq ans.
Comme on l'a dit, avec un tel système, la Belgique occupera une place très particulière parmi les pays européens. La situation est la conséquence des mauvais compromis conclus par la coalition gouvernementale actuelle. Au cours de la précédente législature, la législation sur la nationalité a été assouplie parce que les partis libéraux n'étaient pas partisans du droit de vote aux élections communales pour les ressortissants non-UE. Cela n'a pas été une bonne chose pour cette législation. Le nouveau compromis a pour conséquence de rendre les conditions d'exercice de ce droit de vote plus rigoureuses que ce qui est possible par le biais de la naturalisation.
M. Noreilde se rallie à l'appel de M. Moureaux en faveur d'une société ouverte. Il n'est toutefois pas d'accord avec lui sur la manière de réaliser le mieux cette ouverture. La notion clef est, d'après lui, la nationalité, qui est une formalisation de la citoyenneté, c'est-à-dire la manifestation de la volonté de faire route ensemble. Cette démarche comporte évidemment la participation politique, et donc le droit de vote à tous les niveaux de pouvoir.
En proposant, comme il l'a fait, d'organiser des auditions, l'intervenant ne voulait nullement retarder les débats, mais simplement tirer les leçons des exemples étrangers. Les législations néerlandaise et danoise, qui sont basées sur la dissociation de la nationalité et des droits politiques et dont la proposition à l'examen s'inspire, n'ont en effet pas eu l'effet escompté. L'intervenant aimerait dès lors que les auteurs disent pour quelles raisons ils continuent à privilégier cette option.
Mme Thijs attire l'attention sur le fait que durant la précédente législature, il y avait un accord politique pour simplifier la procédure de naturalisation. Avant les élections du 18 mai 2003, cette procédure de naturalisation a toutefois été qualifiée de bévue par tous les partis flamands. Il est donc étonnant qu'aucun parti flamand de la majorité ne veuille rendre à nouveau plus rigoureuse cette loi qui n'exige aucune volonté d'intégration.
L'intervenante conteste la déclaration selon laquelle son parti, le CD&V, est hostile au droit de vote des étrangers. Lors d'un congrès du parti, en 1993, il a été affirmé explicitement que la participation politique des immigrés devait devenir réalité. Cet objectif devait être concrétisé par le biais d'une procédure de naturalisation plus rapide et plus souple. L'obtention de la nationalité belge était l'étape ultime du processus d'intégration.
Le nouveau Belge obtiendrait ainsi le droit de vote actif et passif sur le cadre normatif et social de notre société. L'obtention de la nationalité scelle donc le pacte social qu'il a avec l'autorité. Ce contrat constitue le lien entre la communauté et l'individu et la preuve tangible de son identification aux valeurs publiques de la société, sans qu'il doive pour autant renoncer à son identité propre.
En outre, on ne peut affirmer que ceux qui souhaitent acquérir la nationalité belge doivent passer par une procédure lourde. La procédure accélérée permet d'obtenir la naturalisation après trois ans de séjour en Belgique. Il est seulement regrettable que les intéressés ne doivent pas fournir la preuve de leur volonté d'intégration.
Par ailleurs, il faut se rendre compte que le droit de vote n'est qu'un aspect de la participation politique. Il existe de nombreux conseils consultatifs, conseils de la jeunesse, etc., dans lesquels les étrangers peuvent être actifs sans la moindre condition de nationalité.
Enfin, le problème que la proposition de loi vise à régler disparaîtra avec le temps. La troisième génération d'immigrés acquiert en effet automatiquement la nationalité belge.
Mme Durant estime qu'il n'est pas souhaitable de lier le droit de vote politique à la détention de la nationalité belge parce que, comme on l'a expliqué, les deux questions ne concernent pas les mêmes personnes. Certains étrangers, pour certaines raisons, ne veulent pas acquérir la nationalité belge, mais ils souhaitent en revanche exercer le droit de vote au niveau communal. En faisant dépendre l'exercice du droit de vote de la possession de la nationalité belge et en rendant plus sévère la législation à cet effet, on penaliserait ceux qui optent aujourd'hui pour la nationalité belge.
Mme Leduc ne voit pas pourquoi les étrangers auxquels la législation de leur pays permet d'acquérir la double nationalité refusent malgré tout la nationalité belge.
M. Hugo Vandenberghe déclare que les amendements relatifs à la législation sur la nationalité ne peuvent être écartés de la discussion de la proposition de loi à l'examen. Cette liaison a d'ailleurs déjà été admise lors de la législature précédente. Elle traduit en effet une vision politique concernant l'exercice du droit de vote.
L'intervenant demande à Mme Durant pourquoi certains refusent d'adopter la nationalité si elle est si peu importante, tout en souhaitant malgré tout avoir des droits politiques. C'est là un exemple typique de double langage. D'une part, la nationalité ne peut jouer aucun rôle dans l'octroi des droits politiques, mais d'autre part on devrait pouvoir refuser la nationalité pour des raisons de principe. Or, on ne peut pas dire que la nationalité est importante dans un cas et qu'elle ne l'est pas dans l'autre.
Ce débat tourne au fond autour de l'octroi du droit de vote à des personnes qui remplissent les conditions pour obtenir la nationalité belge, mais qui ne la demandent pas et qui souhaitent alors exercer le droit de vote aux élections communales. Quelqu'un qui réside légalement en Belgique depuis trois ans peut déjà demander la nationalité belge. L'intervenant souhaiterait débattre des motifs réels qui empêchent quelqu'un de demander la nationalité belge.
Il s'oppose à ce que la discussion se déroule d'une manière caricaturale. On la réduit à une question de oui ou non, ce qui, au vu de la législation sur la nationalité, est une présentation faussée des choses.
En ce qui concerne la volonté d'intégration, l'intervenant souligne que l'octroi du droit de vote aux étrangers pour les élections communales ne résout pas le problème de l'intégration des étrangers vivant dans les quartiers où le chômage des jeunes atteint 20 à 30 %. La principale filière d'intégration dans notre société est le travail. Or, ce facteur est négligé dans la discussion. Une politique d'emploi adéquate avec des objectifs à court terme servirait mieux les jeunes allochtones que la perspective du droit de vote aux élections communales en 2006.
Enfin, cette proposition est vue comme un moyen de promouvoir l'intégration des ressortissants non-UE en Belgique. L'intervenant ne dispose certes pas de sondages, mais il constate qu'une nette majorité flamande ne soutient pas la proposition. Les partisans de celle-ci devraient dès lors réfléchir à la question de savoir si cette piste d'intégration bénéficie d'une assise sociale suffisante. Si l'on veut véritablement l'intégration, on commence par rechercher une majorité politique, y compris en Flandre, qui soutienne positivement cette intégration. Si l'on s'en remet par contre à la seule force de la majorité des voix, la démarche aura un effet négatif, avec les victimes que l'on sait.
L'intervenant plaide pour une large discussion dans laquelle on rechercherait la majorité la plus large possible et on inclurait la législation sur la nationalité.
Amendement nº 1 et sous-amendements nºs 57 et 58
Mme Defraigne et consorts déposent l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 3-13/2), qui reprend les conditions pour exercer le droit de vote, telles qu'énumérées dans la proposition qu'elle a déposée avec Mme Derbaki Sbaï (doc. Sénat, nº 3-275/1).
Les conditions suivantes doivent être réunies : de résidence ininterrompue de cinq ans, pas d'éligibilité, droit de vote réservé aux seules élections communales et non aux élections provinciales et dépôt d'une déclaration de conviction démocratique.
Mme Defraigne et consorts déposent ensuite les sous-amendements nº 57 et 58 à l'amendement nº 1 (doc. Sénat, nº 3-13/2) qui visent respectivement à régler la situation des apatrides et à préciser la commune dans laquelle les étrangers doivent introduire leur demande pour acquérir la qualité d'électeur.
Amendement nº 9
M. Brotcorne dépose l'amendement nº 9 (doc. Sénat, nº 3-13/3) qui vise à remplacer l'article 2 par un texte qui définit les conditions pour être électeur. Il n'opère pas de distinction entre, d'une part, les ressortissants de l'Union européenne et, d'autre part, les citoyens non européens. L'inscription aux registres des électeurs, qu'ils soient européens ou non, se fait d'office et relève de la responsabilité de la commune.
Amendement nº 12
M. Brotcorne dépose un sous-amendement à l'amendement nº 1 de Mme Defraigne (doc. Sénat, nº 3-13/3, amendement nº 12) qui vise à supprimer au 1º du nouvel article 1erter de la loi électorale communale proposé le point c) et l'alinéa 2. M. Brotcorne précise que la seule introduction d'une demande par les ressortissants étrangers en vue d'acquérir la qualité d'électeur présume de leur engagement à respecter nos valeurs démocratiques.
Amendement nº 13
M. Brotcorne dépose un amendement subsidiaire à l'amendement nº 12 (doc. Sénat, nº 3-13/3, amendement nº 13).
Il se réfère à la justification de son amendement nº 12.
Amendement nº 171
M. Ramoudt et consorts déposent un sous-amendement nº 171 à l'amendement nº 1 de Mme Defraigne et consorts (doc. Sénat, nº 3-13/3) qui vise à imposer la preuve d'une connaissance linguistique fonctionnelle aux personnes qui participent aux élections. Le fait de résider depuis cinq ans sur le territoire belge ne fournit pas à lui seul la garantie d'une connaissance linguistique.
Mme De Schamphelaere estime que cet amendement pourrait s'inscrire dans le cadre de la proposition de loi modifiant le Code de la nationalité belge que Mme Erika Thijs et consorts ont déposée le 23 octobre 2003 (doc. Sénat, nº 3-288/1). La langue dans laquelle la propagande électorale a lieu doit également être compréhensible pour la population locale et c'est pourquoi les connaissances linguistiques de ceux qui y participent doivent être suffisantes.
Amendement nº 169
Mme Durant dépose un sous-amendement à l'amendement nº 1 de Mme Defraigne et consorts (doc. Sénat, nº 3-13/3, amendement nº 169) qui vise à étendre le droit d'éligibilité aux ressortissants en Belgique qui auront le droit de vote suite à l'adoption de la proposition de loi, ceci dès les élections communales de 2012.
Amendement nº 170
Mme Durant dépose un sous-amendement nº 170 à l'amendement nº 1 de Mme Defraigne et consorts (doc. Sénat, nº 3-13/3) qui vise à spécifier sur la convocation électorale que l'électeur prend l'engagement de respecter la Constitution et les lois de notre pays.
M. Jean-Marie Dedecker fait référence à la « tijdelijke Commissie Onderzoek Integratiebeleid » (commission temporaire d'Examen de la politique d'intégration) instituée par la Deuxième Chambre des Pays-Bas, le 3 décembre 2002, en application d'une motion déposée en septembre qui concluait à l'échec de la politique d'intégration menée jusque-là. La commission doit permettre à la Deuxième Chambre d'évaluer la politique d'intégration des gouvernements néerlandais au cours des 30 dernières années.
L'intervenant souligne que, lors de l'organisation des élections communales aux Pays-Bas, il a fallu distribuer des dépliants informatifs rédigés dans quelque 126 langues. La méconnaissance de la langue locale se solde donc par un déficit démocratique.
M. Verreycken renvoie au sous-amendement nº 171 de M. Ramoudt à l'amendement de Mme Defraigne et consorts (doc. Sénat, nº 3-13/3, amendement nº 171) concernant la fourniture de la preuve d'une connaissance linguistique fonctionnelle. Cet amendement pourrait également être applicable à l'article 4 de la proposition de loi à l'examen.
L'intervenant estime que les brochures électorales qui ne sont rédigées qu'en français et en arabe et qui ne sont pas comprises par la population locale entraînent également un déficit démocratique.
Les amendements nºs 17 et 18 sont rejetés par 10 voix contre 2 et 5 abstentions.
L'amendement nº 162 est rejeté par 10 voix contre 7.
L'amendement nº 1 est adopté par 9 voix contre 7 et 1 abstention.
Les amendements nºs 57 et 58 sont adoptés par 9 voix et 8 abstentions.
Par la suite de l'adoption de l'amendement nº 1 l'amendement nº 9 devient sans objet.
Les amendements nºs 12 et 13 sont rejetés par 9 voix contre 1 et 7 abstentions.
L'amendement nº 171 est rejeté par 10 voix contre 7.
Les amendements nºs 169 et 170 sont rejetés par 16 voix contre 1.
L'article 2, ainsi amendé, est adopté par 10 voix contre 7.
Article 3
Amendement nº 10
M. Brotcorne a déposé un amendement visant à supprimer l'article 3 (amendement nº 10, doc. Sénat, nº 3-13/3). Il se réfère à la justification de son amendement nº 9 (voir supra : discussion de l'article 2). Il vise, par cet amendement, à ce que le texte soit conforme à l'avis du Conseil d'État qui constate l'inconstitutionnalité de l'extension du droit de vote au niveau des élections provinciales.
Amendements nºs 2 et 72
Mme Defraigne et consorts déposent les amendements nºs 2 et 172.
Ces deux amendements visent à adapter l'article 3 de la loi électorale communale à la modification de l'article 3 de cette loi.
L'amendement nº 10 de M. Brotcorne est rejeté par 10 voix contre 6 et 1 abstention.
Amendement nº 2
L'amendement nº 2 de Mme Defraigne et consorts est adopté par 10 voix et 7 abstentions.
Amendement nº 172
L'amendement nº 172 de Mme Defraigne et consorts est adopté par 10 voix et 7 abstentions.
L'article 3, tel qu'amendé, est adopté par 10 voix contre 6 et 1 abstention.
M. Coveliers motive sont abstention en se référant au serment constitutionnel que chaque sénateur prête au début de son mandat. Par ce serment, les intéressés s'engagent à respecter la Constitution. Or, le Conseil d'État affirme que l'article 3 est contraire à l'article 8 de la Constitution. Malgré des demandes insistantes et répétées, l'intervenant n'a jamais eu de réponse à sa question portant sur le point de savoir en quoi le Conseil d'État avait tort.
Article 4
Amendement nº 3
Mme Defraigne dépose un amendement (amendement nº 3, doc. Sénat, nº 3-13/3) visant à supprimer l'article 4.
M. Coveliers rappelle que le Conseil d'État a souligné dans son avis que le droit de vote dont il est question ici ne peut être octroyé que conformément aux obligations de la Belgique en vertu de traités internationaux. Or, les conseils de district ne sont visés dans aucun traité international.
M. Creyelman donne les explications suivantes :
Dans le débat sur l'octroi du droit de vote aux étrangers, on évoque régulièrement l'inégalité de traitement entre les ressortissants d'un État membre de l'Union européenne, qui ont le droit de vote aux élections communales et aux élections européennes, et les non-Européens ou les Européens ressortissants d'un État non-membre de l'Union, qui ne bénéficient donc pas du droit de vote.
D'aucuns estiment que le fait de n'accorder le droit de vote qu'aux ressortissants des États membres de l'Union européenne constitue une discrimination à l'égard des non-Européens qui, bien souvent, habitent et travaillent chez nous depuis longtemps et qui, parfois même, sont intégrés dans notre pays.
Dans le cadre de cet article, M. Creyelman trace un bref historique de l'apparition du droit de vote pour les ressortissants de l'UE.
Dans la plupart des États de droit, l'exercice des droits politiques est traditionnellement soumis à un ensemble de conditions constitutionnelles et légales. Lorsqu'on se penche sur l'histoire du droit de vote en Europe, on peut constater une diminution progressive, au fil du temps, du nombre des conditions à remplir pour voter ou pour être élu. De ce fait, le nombre des personnes admises à participer à la vie politique n'a cessé d'augmenter. Remarquons également qu'en matière d'octroi du droit de vote aux citoyens, la plupart des États européens ont établi un lien entre la nationalité et le droit de vote : le droit de vote est réservé aux ressortissants du pays concerné.
Selon le droit constitutionnel belge, le problème du droit de vote et d'éligibilité est réglé par l'article 8, deuxième alinéa, de la Constitution, qui fait de la nationalité belge la première condition à respecter pour pouvoir exercer les droits politiques stricto sensu.
On peut toutefois se demander si la portée de cet article 8, deuxième alinéa, de la Constitution, doit être considérée comme « absolue ». Le Conseil d'État a toujours estimé que l'exercice du droit de vote et du droit d'éligibilité dans les diverses communautés politiques du Royaume était réservé exclusivement aux Belges. Toutefois, comme les élections organisées en Belgique en vue de désigner les représentants belges au Parlement européen ne relèvent pas de ce critère, il n'y a aucune objection constitutionnelle à ce que des ressortissants des autres États membres de l'Union européenne prennent part aux élections du Parlement européen.
L'idée d'une « Europe des citoyens » a vu le jour en même temps que l'Union européenne. À l'occasion du Sommet de Paris de 1974, le rapport Tindemans sur l'Union européenne (1975) envisageait déjà des solutions pour renforcer la protection des droits des citoyens et pour rendre la solidarité européenne plus concrètement mesurable, par des signes extérieurs.
Après un long mûrissement à propos du contenu à donner à cette matière, le traité sur l'Union européenne constitua un important pas en avant, étant donné qu'il crée formellement une citoyenneté de l'Union et insère à cet effet une toute nouvelle deuxième partie dans le traité de Rome.
Est citoyen de l'Union toute personne ayant la nationalité d'un État-membre (article 8, paragraphe 1, deuxième phrase, du Traité instituant la Communauté européenne). La citoyenneté de l'Union est donc un complément à la citoyenneté nationale, mais elle ne se substitue absolument pas à celle-ci. La qualité de sujet d'un État membre est définie exclusivement en application des règles concernant la nationalité en vigueur dans ce dernier.
Le rapport à la nationalité est basé sur un lien de solidarité particulier et sur une réciprocité en matière de droits et de devoirs. Dans un système fédéral à part entière, les conditions à remplir pour pouvoir acquérir la nationalité sont définies au niveau fédéral. Il n'empêche que les États membres doivent reconnaître inconditionnellement la citoyenneté de l'Union qu'un autre État membre a conférée à une personne en lui accordant sa nationalité. Les États membres ne peuvent donc imposer aucune condition supplémentaire comme celle de résidence ordinaire.
Un citoyen de l'Union jouit des droits et est soumis aux devoirs prévus par le traité instituant la Communauté européenne (article 8, paragraphe 2, Traité instituant la Communauté européenne). Le Traité sur l'Union européenne ne précise pas ce que l'on entend par devoirs prévus par le Traité instituant la Communauté européenne, mais il accorde, aux citoyens de l'Union, les droits suivants :
1. le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres (article 8A du Traité instituant la Communauté européenne);
2. le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales et aux élections au Parlement européen dans l'État membre où ils résident (article 8B du Traité instituant la Communauté européenne);
3. la protection de la part des autorités diplomatiques et consulaires de tout État membre sur le territoire d'un pays tiers (article 8C du Traité instituant la Communauté européenne);
4. le droit de pétition devant le Parlement européen et le droit de s'adresser au médiateur du Parlement européen (article 8D du Traité instituant la Communauté européenne).
L'objet de la construction européenne est, selon le Préambule du Traité instituant la Communauté européenne, d'établir le fondement d'une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens. À cette fin, le Traité prévoit une série de libertés dont les citoyens des États membres peuvent faire usage. À cette fin, il a créé un système juridique original qui permet à chaque citoyen de construire sa vie professionnelle sans avoir à tenir compte des frontières de son pays d'origine. La qualité de citoyen d'un État membre emporte, pour une personne donnée, l'octroi de droits non seulement dans celui-ci mais aussi dans les autres États membres dont elle n'a pas la nationalité. La liberté d'établissement est utilisée et considérée comme une des principales réalisations du droit communautaire.
La libre circulation des personnes a toutefois eu un important effet indirect dans le passé, du fait que la dissociation entre le territoire et les effets juridiques de la nationalité n'a eu aucune incidence sur les droits politiques, pas même au niveau communal. En conséquence, plus de 4 millions de citoyens européens ont été privés de leur droit de vote aux élections communales au cours des ans, simplement parce qu'ils ne résidaient plus dans l'État membre dont ils avaient la nationalité. Autrement dit, on ne pouvait alors exercer les libertés d'établissement et de résidence qu'au prix d'une auto-limitation de ses droits politiques.
L'on se rendit compte petit à petit qu'il devenait nécessaire de faire un bond en avant qualitatif dans la construction européenne en cessant de limiter l'objet de la Communauté à des aspects économiques et en associant les citoyens en tant que tels à son action. La Commission estima, dans le rapport qu'elle déposa sur le bureau du Conseil en 1975, que les droits spéciaux à accorder aux citoyens des États membres devaient comporter au moins le droit de vote aux élections communales dans le pays d'accueil.
Le rapport précité décrivait également les deux principales difficultés juridiques qu'il fallait surmonter pour pouvoir réaliser ce projet. La première difficulté venait d'une entrave constitutionnelle due au fait que le droit de vote et d'éligibilité était soumis à l'époque à des conditions mises à l'octroi de la nationalité qui figuraient dans la Constitution de six des neuf États membres. En tant que telle, cette entrave constitutionnelle n'était pas insurmontable, puisque les six Constitutions concernées prévoyaient une procédure applicable en vue de leur modification.
La deuxième difficulté était liée à la question de savoir si l'on pouvait trouver, dans le contexte européen de l'époque, des éléments permettant de fonder l'octroi, outre de droits économiques et sociaux, de droits politiques.
La Commission a déclaré à cet égard que le rôle des institutions communautaires en la matière était fortement limité, étant donné que les traités communautaires ne contenaient aucune disposition attribuant déjà un pouvoir d'action en matière de droits politiques, pas même l'article 235 du Traité instituant la Communauté européenne.
La Commission n'excluait toutefois pas la possibilité d'accorder une telle compétence dans le cadre communautaire, étant donné que l'instrument juridique à utiliser devrait être un acte ad hoc, comme un nouveau traité de droit international ou le cas échéant une révision du Traité instituant la Communauté européenne sur la base de l'article 236.
Il était donc évident que seule une volonté politique unanime pouvait faire progresser cette idée.
C'est pourquoi l'avis du Parlement européen allait être un signal politique important. Dans une résolution qu'il adopta en 1977, il invita la Commission à élaborer des « propositions relatives aux droits spéciaux ... considérer comme des droits à accorder en priorité aux citoyens de la Communauté ... le droit de vote et d'éligibilité ... au niveau communal ».
La double impulsion qu'avaient donnée le Sommet de 1974 et le Parlement européen influença les discussion au sein du Conseil. Les considérations de fait ne manquèrent toutefois pas de jouer un rôle important au niveau de celui-ci. Aux termes d'une série de négociations, cette question ne fut plus inscrite à son ordre de jour. Cet échec eut de graves conséquences par la suite.
La Commission a toutefois continué à se prononcer pour l'octroi du droit de vote aux élections communales. On constate même une évolution dans son point de vue concernant le fondement juridique nécessaire à l'octroi des droits politiques. On n'a pas examiné activement cette problématique avant 1983. La réactivation des droits du citoyen à l'occasion du Conseil européen de Fontainebleau de 1984 et le Parlement européen ont replacé la question au centre de l'actualité.
Après le Conseil européen de Fontainebleau de 1984, l'on a créé un comité ad hoc chargé d'examiner les mesures nécessaires pour préciser et propager l'identité et l'image que se font de l'Europe les citoyens de celle-ci et celle que l'on s'en fait dans le monde. Ce comité recommanda, dans son rapport de juin 1985, d'approfondir les négociations qui avaient déjà été engagées sur l'octroi du droit de vote et d'éligibilité, aux élections locales, aux citoyens de tous les États membres, aux mêmes conditions que celles auxquelles devaient satisfaire les citoyens du pays d'accueil, et pour autant qu'ils aient déjà leur résidence fixe dans le pays d'accueil depuis un certain temps.
Le Parlement européen avait déjà fait savoir en 1983 qu'il défendrait le principe de l'octroi du droit de vote. Une résolution invita la Commission à déposer une proposition de directive. Cette résolution fut confirmée par deux autres. Le 15 décembre 1987, le Parlement européen adopta une résolution dans laquelle il invitait une fois de plus instamment et le plus clairement possible la Commission à déposer une proposition de directive au cours du premier semestre de 1988.
Cette résolution devait constituer pour la Commission le signal politique nécessaire pour qu'elle puisse clore le stade de l'examen de la question et passer à l'action. En 1988, la Commission déposa une proposition de directive concernant le droit de vote des citoyens des États membres aux élections communales dans l'État membre de résidence, mais celle-ci fut rejetée par le Conseil. Le fondement juridique de la compétence exercée en la matière était constitué par l'article 235 du Traité instituant la Communauté européenne. La proposition précitée de 1988 fut modifiée en 1989, mais on en conserva les lignes principales.
Au fil des tentatives précitées, il s'avéra qu'il était impossible dans la pratique d'accorder le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales par la voie d'une directive communautaire. Les délégations au Conseil observèrent une grande prudence en raison des entraves constitutionnelles qui existaient dans plusieurs États membres. Il y eut également toujours des discussions à propos de la question de savoir si le Traité instituant la Communauté européenne pouvait fournir le fondement juridique nécessaire. Il devint de plus en plus clair que l'on ne pourrait mettre fin à l'incertitude en la matière qu'en modifiant ce Traité.
Le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales pour les ressortissants européens dans l'État membre où ils résident est finalement devenu une réalité dans le traité sur l'Union européenne.
Le texte de l'article 8, B, paragraphe 1, du traité CE se lit comme suit : « Tout citoyen de l'Union résidant dans un État membre dont il n'est pas ressortissant a le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales dans l'État membre où il réside, dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État. Ce droit sera exercé sous réserve des modalités à arrêter avant le 31 décembre 1994 par le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen; ces modalités peuvent prévoir des dispositions dérogatoires lorsque des problèmes spécifiques à un État membre le justifient. »
Quand on lit ce texte attentivement, il est très clair que le droit de vote accordé n'est pas sans restriction.
Le droit de vote est accordé uniquement aux citoyens de l'Union et pas à ceux de pays tiers. Comme l'Union ne se compose que de quelques pays, le système juridique mis en place n'est obligatoire qu'à l'intérieur de ces frontières. Ces pourquoi ces mesures doivent forcément se limiter aux citoyens des États concernés.
Il est d'ailleurs difficile de légiférer vis-à-vis de citoyens de pays tiers, dès lors qu'en matière de droits politiques, l'État de nationalité prime l'État de résidence. De plus, il n'est pas prévu de réciprocité, notion fondamentale en droit international, pour le cas où ces droits seraient accordés unilatéralement aux citoyens de pays tiers. En revanche, dans le cadre d'un traité conclu au niveau de l'Union, la réciprocité est le fondement d'une telle décision, qui en tire d'ailleurs toute sa crédibilité.
La primauté du critère de résidence en matière de droit de vote trouve sa justification dans la création de l'Europe des citoyens. Il est clair que cette création doit profiter avant tout aux citoyens des États membres, dès lors qu'elle favorise la libre circulation et la liberté d'établissement. Il serait illogique de déclarer l'extension de l'Europe des citoyens à certains droits politiques applicable également aux citoyens de pays tiers qui ne jouissent pas de ces autres droits déjà acquis.
Les citoyens de l'Union exercent le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales dans l'État membre où ils résident, dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État. Le droit conféré par l'article 8B, paragraphe 1, du traité CE est donc une application du principe d'égalité et de non-discrimination entre les ressortissants et les non-ressortissants dans le cadre des matières politiques et une conséquence logique du droit à la libre circulation et à la liberté d'établissement qui est consacré par le traité CE.
C'est de toute justesse que le Conseil a respecté le délai fixé par le Traité CE. La directive en question date du 19 décembre 1994 et a été transposée par l'article 14 le 1er janvier 1996.
Les lignes de force de la directive peuvent être résumées comme suit.
Son point de départ est que l'article 8, B, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne constitue une application du principe de non-discrimination et un corollaire logique du droit de libre circulation et de séjour. De plus, il n'est pas jugé nécessaire de procéder à une harmonisation globale des systèmes électoraux des États membres. En vertu du principe de subsidiarité, le régime instauré vise essentiellement à supprimer la condition de nationalité qui était jusqu'alors requise dans la plupart des États membres pour exercer le droit de vote et d'éligibilité aux élections municipales. Le législateur communautaire s'est rendu compte de la grande diversité des structures administratives locales dans les États membres.
C'est ainsi que les élections municipales sont décrites comme « les élections au suffrage universel direct visant à désigner les membres de l'assemblée représentative et, le cas échéant, selon la législation de chaque État membre, le chef et les membres de l'exécutif d'une collectivité locale de base ».
L'application du principe de non-discrimination sert de fil rouge dans toute la directive. Les conditions fixées par la législation interne et les restrictions du droit de vote et d'éligibilité s'appliquent de la même manière aux citoyens de l'Union provenant d'un autre État membre. Il importe de relever que les conditions d'assujettissement aux impôts locaux et de maîtrise de la langue, sur lesquelles le gouvernement flamand avait insisté en son temps, ne figurent pas dans la directive.
Le principe de l'égalité de traitement souffre deux exceptions : la première en faveur des citoyens de l'Union provenant d'un autre État membre et la seconde en leur défaveur. La première exception concerne l'obligation de vote des citoyens de l'Union provenant d'un autre État membre. En vertu de l'article 7, paragraphe 1, cette obligation n'est applicable que si le citoyen en question a manifesté la volonté d'exercer son droit de vote. Selon l'article 8, paragraphe 1, il doit à cette fin demander à être inscrit sur la liste électorale. Il n'est donc pas prévu que le simple fait pour un citoyen de l'Union de remplir la condition de séjour dans un autre État membre fasse naître automatiquement pour lui une obligation de vote. En revanche, une fois qu'il est inscrit sur la liste électorale, il reste inscrit dans les mêmes conditions que les électeurs nationaux.
La deuxième exception, qui joue cette fois en la défaveur des citoyens de l'Union originaires d'un autre État membre, est que l'État où ils résident peut étendre son régime d'incompatibilités à des fonctions équivalentes exercées dans d'autres États membres. De plus, les États membres de résidence peuvent disposer que tout citoyen de l'Union qui, par l'effet d'une décision individuelle en matière civile ou d'une décision pénale, est déchu du droit d'éligibilité en vertu du droit de son État membre d'origine, est exclu de l'exercice de ce droit lors des élections municipales.
Cet assujettissement à la législation de l'État membre d'origine ne s'applique cependant pas au droit de vote. Compte tenu du principe de proportionnalité, il suffit « de ne subordonner le droit de vote qu'au régime d'incapacité électorale de l'État membre de résidence ».
La directive n'a pas pour but de prévoir une intégration politique illimitée des citoyens de l'Union au niveau communal. L'article 5, paragraphe 3, alinéa 1er, permet aux États membres de disposer que « seuls leurs propres ressortissants sont éligibles aux fonctions de chef, d'adjoint ou de suppléant ou encore de membre du collège directeur de l'exécutif d'une collectivité locale de base si ces personnes sont élues pour exercer ces fonctions pendant la durée du mandat ». Cette règle avalise la situation de la France qui, après avoir modifié sa Constitution pour ratifier le traité sur l'Union européenne, a refusé l'accès aux fonctions de maire et d'adjoint au maire aux citoyens de l'Union originaires d'un autre État membre.
Les États membres peuvent également disposer que l'exercice à titre provisoire et intérimaire des fonctions de chef, d'adjoint ou de membre d'un collège directeur de l'exécutif d'une collectivité locale de base peut être réservé à leurs propres ressortissants.
L'article 5, paragraphe 4, prévoit que les États membres peuvent également disposer que les citoyens de l'Union élus membres d'un organe représentatif ne peuvent participer à la désignation des électeurs d'une assemblée parlementaire ni à l'élection des membres de cette assemblée.
Enfin, on peut encore s'arrêter à deux dérogations au droit électoral applicable aux élections municipales. La première est taillée sur mesure pour le Luxembourg, mais dans le cadre de la proposition de loi en discussion, elle est particulièrement intéressante.
À la date du 1er janvier 1996, si, dans un État membre, le nombre de citoyens de l'Union provenant d'un autre État membre dépasse 20 % du nombre total de citoyens de l'Union qui ont atteint l'âge requis pour voter et y séjournent, cet État membre peut réserver le droit de vote et d'éligibilité aux citoyens de l'Union qui séjournent sur son territoire depuis un certain temps.
Pour le droit de vote, cette période ne peut excéder « la durée d'un mandat au sein de l'assemblée municipale représentative » et, pour le droit d'éligibilité, « la durée de deux mandats au sein de cette assemblée ». Des mesures sont également possibles en ce qui concerne la composition des listes électorales, et ce, pour prévenir une polarisation entre candidats ressortissants et non-ressortissants.
La deuxième dérogation vise notre pays. La Belgique peut appliquer la condition qui prévoit de subordonner le droit de vote il n'est pas fait état du droit d'éligibilité ! à une période de séjour minimale qui ne peut pas être supérieure à la durée d'un mandat au sein du conseil communal à « un nombre limité de communes », dont elle doit communiquer les noms au moins un an avant les élections communales pour lesquelles elle souhaite faire usage de la dérogation.
Dans l'avant-dernier considérant du préambule de la directive, on justifie cette dérogation en faisant état de circonstances et d'équilibres propres à la Belgique, liées au fait qu'en vertu de la Constitution, il existe trois langues officielles ainsi qu'une division en régions et communautés. Dans une déclaration pour le procès-verbal du Conseil, la Belgique a fait savoir qu'elle n'appliquera la dérogation autorisée que dans les communes dont le nombre de citoyens de l'Union jouissant du droit de vote est supérieur à 20 % du nombre total d'électeurs et dans lesquelles une situation spécifique aux yeux du gouvernement fédéral belge justifie une telle dérogation exceptionnelle. Tels sont l'historique et la situation du droit de vote aux élections communales.
L'idée de faire participer les ressortissants de l'UE qui séjournent dans un État membre autre que celui dont ils possèdent la nationalité aux élections du Parlement européen est étroitement associée au principe du suffrage universel direct pour les membres de ce Parlement, que prévoit l'article 138, alinéa 3, du traité CE(E).
Aux prémices des Communautés européennes, le Parlement européen n'avait pas encore la légitimation démocratique qui caractérise aujourd'hui cette institution.
Pourtant, le traité CEE prévoyait l'élection directe du Parlement suivant une procédure uniforme dans tous les États membres. En application de l'Acte de 1976, le Parlement européen fut, pour la première fois, élu suivant le principe du suffrage universel direct en 1979, ce qui lui conféra une légitimité que ne possèdent pas les autres institutions de la Communauté. Toutefois, tant qu'aucune procédure électorale uniforme n'est arrêtée, la procédure dans chaque État membre se déroule suivant les dispositions nationales en la matière.
La plupart des ressortissants de l'UE séjournant dans un État membre autre que celui dont ils possédaient la nationalité se sont de ce fait vus forcés de retourner dans leur pays d'origine s'ils souhaitaient participer à ces élections. En effet, la plupart des États membres s'en tenaient comme pour les élections municipales au critère de la nationalité.
Seuls quelques États membres ont donné la préférence au critère du lieu de séjour : en Irlande, les ressortissants de l'UE qui séjournaient sur le territoire pouvaient voter pour des candidats irlandais; la Belgique et les Pays-Bas ont accordé un même droit de vote aux ressortissants de l'UE, mais uniquement à la condition que ces citoyens, parce qu'ils y séjournaient, aient perdu leur droit de vote dans leur pays d'origine. D'autres États membres encore (par exemple la France et l'Espagne) ont prévu un système de vote par correspondance ou par procuration.
Tout comme c'était le cas pour les élections municipales, des voix se sont aussi progressivement élevées afin que l'on élabore, pour les élections du Parlement européen, une réglementation générale qui considérerait le critère du séjour comme un élément déterminant pour l'exercice du droit de vote. À la fin des années 1980, Le Parlement européen se prononça dès lors en faveur de l'octroi à tous les ressortissants des États membres du droit de vote et d'éligibilité dans l'État membre de séjour lors des élections du Parlement européen.
Ce droit est finalement devenu réalité par l'adoption du Traité sur l'Union européenne. Les dispositions relatives au droit de vote et d'éligibilité pour les élections du Parlement européen ont été insérées dans l'article 8, B, paragraphe 2, nouveau, du Traité CE.
Le texte de cet article dispose : « Sans préjudice des dispositions de l'article 138, paragraphe 3, et des dispositions prises pour son application, tout citoyen de l'Union résidant dans un État membre dont il n'est pas ressortissant a le droit de vote et d'éligibilité aux élections au Parlement européen dans l'État membre où il réside, dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet État.
Ce droit sera exercé sous réserve des modalités à arrêter, avant le 31 décembre 1993, par le Conseil, statuant à l'unanimité sur proposition de la Commission et après consultation du Parlement européen; ces modalités peuvent prévoir des dispositions dérogatoires lorsque des problèmes spécifiques à un État membre le justifient. »
Le droit de vote n'est octroyé qu'aux citoyens des États membres de l'Union et non aux citoyens de pays tiers. Il s'agit évidemment d'une restriction, dans la mesure où le Parlement européen est une institution d'un ordre juridique qui ne s'adresse qu'aux États membres qui en font partie. Un raisonnement identique à celui tenu dans le cadre des élections des conseils communaux doit aussi être suivi dans ce contexte-ci.
L'intervenant compare la situation au niveau européen et la situation belge lors des élections communales et européennes.
La jouissance des droits politiques en Belgique est réglée par les articles 8 et 9 de la Constitution.
Pour l'exercice du droit de vote et d'éligibilité les droits politiques , la possession de la nationalité belge est une condition absolue.
Il ne peut dès lors y avoir le moindre doute, de prime abord, sur le fait qu'actuellement, les étrangers de Belgique sont privés du droit de vote et d'éligibilité.
Au cours de la première décennie qui a suivi l'indépendance de la Belgique, il y avait unanimité sur le fait que la qualité de Belge était une condition indispensable pour pouvoir être pris en considération pour l'exercice des droits politiques au sens strict. En ce qui concerne le droit de vote et d'éligibilité, on ne faisait aucune distinction entre les chambres législatives et les conseils provinciaux, d'une part, et les conseils communaux, d'autre part. Certains juristes englobaient expressément dans les droits dont l'étranger était exclu de l'exercice, parce qu'ils présentaient un caractère politique, le droit de vote et d'éligibilité aux élections des conseils communaux.
L'installation en Belgique de nombreux travailleurs immigrés et la pression exercée par certains groupes afin de leur octroyer un meilleur statut ont amené progressivement des voix à s'élever pour réclamer l'octroi de droits politiques aux étrangers pour les élections des conseils communaux. Le raisonnement que tenaient ces groupes voulait qu'à ce niveau, les matières locales constituent l'enjeu principal et que, dans ce cadre, tous les résidents de la commune y compris les étrangers sont concernés invariablement.
La création de la Communauté économique européenne et le souci de consolider sa cohésion, notamment en octroyant le droit de vote aux élections des conseils communaux aux ressortissants des États membres dans l'État membre de résidence, a aussi été un incitant à la réflexion sur l'élargissement du droit de vote aux non-ressortissants.
Embrayant sur ce courant d'idées, un colloque a été organisé à l'UCL, le 28 février 1978, sur le thème de la participation des étrangers aux élections des conseils communaux.
Dans son rapport sur la situation en droit belge, le professeur Delpérée a affirmé que les dispositions de la Constitution qui portent sur les droits politiques subordonnent expressément la jouissance de ces droits à la possession de la nationalité belge. C'est ce que dit de manière lapidaire l'article 8 de la Constitution.
L'ancien texte de l'article 9 de la Constitution signifiait, selon lui, que seule une grande naturalisation accordait à l'étranger l'ensemble des droits politiques qui pouvaient être exercés par celui qui était belge de naissance, mais qu'elle n'était pas requise pour acquérir certains autres droits politiques. Le droit de vote et le droit d'éligibilité sont incontestablement des droits politiques.
Le législateur les a également considérés comme tels pour les élections communales. Dès le départ, il n'a toutefois exigé que la naturalisation ordinaire pour pouvoir voter et être élu aux conseils communaux. S'il en a décidé ainsi, ce n'est pas, selon M. Delpérée, parce qu'il ne considérait pas ces droits comme des droits politiques, mais parce que les articles 8 et 9 ne lui permettaient de poser que cette condition.
(...) Le Conseil d'État attire tout d'abord l'attention sur le texte de l'article 8, deuxième alinéa, de la Constitution, et constate que cette disposition est rédigée en termes larges. Selon le Conseil, la condition de nationalité requise pour l'exercice des droits politiques est également incluse dans l'économie de la Constitution, laquelle repose sur le principe de souveraineté (voir en particulier l'article 33), qui suppose à son tour un lien de nationalité.
Si l'on peut déduire de ce qui précède que la qualité de Belge est requise pour pouvoir bénéficier de tous les droits politiques, y compris le droit de vote aux élections communales, aucune autre disposition de la Constitution ne porte atteinte à cette conclusion. L'article 9, deuxième alinéa, notamment, ne vise qu'à réserver la jouissance de l'ensemble des droits politiques aux Belges de naissance ou à ceux qui le sont devenus par la grande naturalisation, mais n'exclut pas que certains droits politiques puissent être exercés par d'autres Belges aussi. C'est donc de manière conforme à l'article 9, alinéa 2, que le législateur a étendu le droit de vote communal à d'autres catégories de Belges. Mais l'article 9 ne permet pas au législateur de sortir des limites de l'article 8.
Amendement nº 163
M. Coveliers dépose l'amendement nº 163 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui vise à instaurer le principe de réciprocité en matière de participation aux opérations électorales communales.
L'auteur a déjà souligné à plusieurs reprises le risque de discrimination tant morale que juridique. Une fois la présente proposition de loi votée, tout Belge ayant un intérêt pourrait intenter auprès de la Cour d'arbitrage une action en annulation du présent texte, sur la base des articles 10 et 11 de la Constitution.
Conformément à la jurisprudence de la Cour d'arbitrage, le législateur peut instaurer des discriminations pour autant qu'il poursuive un but légitime et que la mesure légale soit justifiée de manière objective. Cela signifie qu'il doit exister un lien de proportionnalité raisonnable entre les moyens mis en oeuvre et l'objectif poursuivi.
En l'espèce, nous aurons en Belgique, d'une part, des citoyens belges qui sont soumis à une obligation de vote dont le non-respect est puni de peines d'emprisonnement ou d'amendes, et qui ne peuvent voter qu'en Belgique et, aux élections communales, dans d'autres pays d'Europe, en vertu du principe de réciprocité, et, d'autre part, les citoyens du reste du monde, autorisés à voter en Belgique sans devoir se soumettre aux obligations liées à ce droit.
Deuxième forme de discrimination : ces étrangers pourront voter non seulement en Belgique, mais aussi dans le pays dont ils portent la nationalité.
Il s'agit là, objectivement, d'une discrimination. Vise-t-on par là un objectif légitime, conforme à nos principes légaux ? Une analyse purement objective montre que le but visé est de permettre à chacun de participer aux élections. Juridiquement, cet objectif apparaît bien légitime.
Mais l'intervenant s'interroge sur le lien raisonnable entre les moyens mis en oeuvre et le but poursuivi. Dans la plupart des cas, la Cour d'arbitrage vérifie s'il n'existe pas d'autres moyens, moins discriminatoires, pour atteindre le même objectif.
Selon M. Coveliers, c'est là que le bât blesse. En effet, il existe un autre moyen pour atteindre l'objectif de l'octroi du droit de vote : la naturalisation. En fait, on lie ici la discrimination à une condition potestative, c'est-à-dire une condition qui dépend purement et simplement de la volonté d'une des parties.
Dans notre système juridique, une telle condition potestative est strictement interdite.
L'auteur de l'amendement estime que l'on peut résoudre cette discrimination en instaurant l'égalité entre le Belge et l'étranger qui refuse la nationalité.
La législation espagnole, par exemple, prévoit que le droit de vote peut être accordé à un étranger à condition qu'un accord bilatéral octroie également le droit de vote aux Espagnols qui résident dans le pays d'origine de l'étranger en question.
L'Espagne a conclu un accord bilatéral de ce genre avec la Norvège.
Cette façon de procéder est la plus logique et est l'essence de l'équivalence. Si l'on admet que le droit de vote est un tremplin vers l'intégration, il est évident que ce tremplin est applicable à tous, partout dans le monde.
L'intervenant réfute l'argument selon lequel la Belgique doit montrer l'exemple en n'exigeant pas de réciprocité. Une telle thèse est présomptueuse, parce qu'elle implique que les autres sociétés seraient pires que la nôtre.
Il estime dès lors que la réciprocité est la clé qui permettra de dissiper la menace de discrimination.
Amendement nº 19
M. Vanhecke et consorts déposent l'amendement nº 19 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui vise à remplacer l'article par un article 1erter nouveau insérant une nouvelle disposition dans la loi du 27 janvier 1999.
M. Verreycken déclare qu'il s'agit d'un amendement charnière, par lequel son parti veut laisser ouverte la possibilité d'un droit d'éligibilité pour les étrangers aux élections communales. Cette ouverture est subordonnée à une série de conditions :
a) Il ne peut s'agir que de personnes qui résident depuis 8 ans au moins sur le territoire et 5 ans au moins dans la commune où elles souhaitent exercer ce droit.
b) Elles doivent démontrer une connaissance active de la langue de la région. Sans cette connaissance, des problèmes se posent.
c) Elles doivent renoncer au droit de vote aux élections locales dans leur pays d'origine. C'est une évidence. On ne peut pas jouer sur deux tableaux à la fois.
d) Il faut prévoir un frein : le droit de vote ne peut être accordé que dans les communes comptant moins de 10 % d'habitants allochtones.
e) Les intéressés ne peuvent pas exercer de mandats exécutifs.
Les sous-amendements 20 à 47 de M. Vanhecke et consorts sont retirés par leurs auteurs.
Amendement nº 48
M. Vanhecke et consorts déposent le sous-amendement nº 48 à l'amendement nº 19 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui tend à remplacer cet article par un article 1erter nouveau à insérer dans la loi du 27 janvier 1999.
Cet amendement exige seulement la connaissance active de la langue de la région. Sans cette connaissance de la langue, il ne saurait être question d'intégration sociale. Il rejoint à cet égard les développements de la proposition de loi de M. Mahoux.
M. Buysse commente le droit de vote des immigrés à l'étranger.
Il serait impardonnable d'instituer le droit de vote des étrangers en Belgique sans examiner soigneusement quelle est la situation légale dans les autres pays.
Aux Pays-Bas, l'article 130 de la Constitution entré en vigueur le 17 février 1983 s'énonce comme suit : « La loi peut accorder le droit d'élire les membres du conseil communal et le droit d'être membre du conseil communal aux résidents qui, sans avoir la nationalité néerlandaise, réunissent au moins les conditions qui s'appliquent aux résidents ayant la nationalité néerlandaise. »
La loi du 29 août 1985 a accordé sous certaines conditions le droit de vote et d'éligibilité pour les élections du conseil aux non-Néerlandais. Pour être admis à l'électorat et cela concerne aussi bien le droit de vote que d'éligibilité les non-Néerlandais doivent en premier lieu avoir résidé dans le pays durant une période ininterrompue de cinq ans au moins. En second lieu, les non-Néerlandais doivent être autorisés à résider aux Pays-Bas en vertu des articles 9 ou 10 de la loi de 1965 sur les étrangers, ou en vertu du Traité instituant la Communauté économique européenne de 1957 ou du Traité instituant l'Union économique de Benelux de 1958. Ne sont pas autorisés à voter les non-néerlandais occupés aux Pays-Bas au service d'un autre État dont ils possèdent la nationalité. Ceci vaut également pour leurs conjoints ou partenaires non-Néerlandais et leurs enfants, dans la mesure où ils forment avec eux un ménage commun (article B 3, alinéa 3). Il n'est posé aucune condition de connaissance de la langue néerlandaise.
Lors de la modification de la loi électorale de 1985, le ministre néerlandais de l'Intérieur a encore marqué une stricte limite en restreignant le droit électoral des non-Néerlandais aux élections communales, mais dès 1988, la possibilité pour les non-Néerlandais d'être nommés fonctionnaires de l'État a été considérablement élargie.
L'intervenant analyse également la situation dans les pays scandinaves.
En Suède, les étrangers ont le droit de voter et celui d'être élu aux élections locales depuis 1975. Les conditions sont de séjourner régulièrement depuis trois ans et d'avoir atteint l'âge de 18 ans.
En Norvège, la loi du 15 décembre 1978 accorde le droit de vote et d'éligibilité pour l'élection des conseils municipaux et de comté aux ressortissants des autres pays scandinaves, à condition qu'ils soient inscrits comme résidant en Norvège depuis au moins trois ans avant la date de l'élection et qu'ils aient atteint l'âge de 18 ans. Les premières élections locales auxquelles des étrangers ont participé remontent à septembre 1979. Depuis 1983, la loi octroie aux autres étrangers le droit de vote et d'éligibilité aux élections locales.
Au Danemark, cette question est réglée par la loi du 18 mai 1977, qui a été modifiée le 1er novembre 1978 et qui accorde le droit de vote et d'éligibilité aux ressortissants finlandais, islandais, norvégiens et suédois, pour autant qu'ils aient résidé au Danemark de manière ininterrompue pendant les trois années précédant l'élection et qu'ils n'aient pas été déclarés incapables. Une loi du 30 mars 1981 a étendu ce droit de vote local à tous les étrangers remplissant ces conditions.
En ce qui concerne la Finlande, on retiendra la section 14 du chapitre 2 (« Droits et libertés fondamentaux ») de la Constitution finlandaise, laquelle prévoit que tout citoyen finlandais a le droit, à partir de l'âge de 18 ans, de participer aux élections et référendums nationaux. Elle prévoit aussi que tout étranger résidant de manière permanente en Finlande jouit du droit de vote aux élections et référendums municipaux à partir de l'âge de 18 ans. Il est prévu une condition de résidence de deux ans.
Depuis 1963, la République d'Irlande connaît une législation très souple en ce qui concerne l'octroi du droit de vote aux étrangers. Pour participer aux élections présidentielles et législatives, il faut avoir la nationalité irlandaise. Mais au niveau local, toute personne en situation de séjour régulière qui, à la date du 15 septembre de l'année précédant celle de l'élaboration de la liste (soit environ un an et demi avant les élections), est inscrite sur la liste électorale de la circonscription dans laquelle les élections ont lieu et a atteint l'âge de 18 ans (condition d'âge ramenée de 21 à 18 ans en 1973), a le droit de participer aux élections locales. Il s'agit ici uniquement du droit de vote, pas du droit d'éligibilité.
La situation du Royaume-Uni est très spécifique. Tout citoyen n'ayant pas le statut d'étranger (alien) a le droit de vote à toutes les élections. Selon le code britannique de la nationalité le British Nationality Act de 1981, les ressortissants irlandais et du Commonwealth ne sont pas des étrangers. Ces ressortissants peuvent participer au scrutin pour peu qu'ils remplissent les conditions imposées à tout citoyen du Royaume-Uni. Ce point est confirmé dans le Representation of the People Act de 1983 qui est la résultante d'une solidarité née au fil de l'histoire.
En Allemagne, cette question est régie par l'article 20 de la Constitution qui prévoit que la souveraineté émane du peuple et qu'elle est exercée par celui-ci dans le cadre des élections et des référendums. L'article 28 ajoute que « dans chacun des Länder, Kreise et municipalités, le peuple doit avoir une représentation qui résulte d'élections au suffrage universel direct, libre, égal et secret. » Le terme « Volk » utilisé fait référence exclusivement aux ressortissants allemands. Quelle que soit l'élection concernée, seuls les citoyens allemands jouissent du droit de vote.
L'accord de gouvernement de 1998 conclu entre les sociaux-démocrates et les verts prévoyait l'octroi de ces droits aux étrangers afin de promouvoir leur intégration, mais la majorité des deux tiers, qui était requise au Bundestag et au Bundesrat pour modifier l'article 28 de la Constitution, n'a pas pu être atteinte.
Une telle majorité n'existe pas davantage sous cette législature et ce point ne figure d'ailleurs pas dans l'accord de gouvernement.
En Allemagne, ce dossier ne devrait plus évoluer, étant donné que l'octroi du droit de vote aux étrangers est une compétence fédérale, ainsi qu'il ressort de l'annulation en 1990 par la Cour constitutionnelle de deux lois des États de Hambourg et Schleswig-Holstein octroyant le droit de vote aux étrangers à l'échelon local.
Les considérations juridiques formulées par la haute juridiction allemande dans ces affaires sont très intéressantes et pertinentes. Dans l'affaire concernant la loi du Schleswig-Holstein, la Cour a estimé dans le dispositif de son arrêt que c'est le peuple de la République fédérale d'Allemagne qui est détenteur de la souveraineté nationale. Ce peuple se compose des citoyens allemands.
En ce qui concerne le droit de vote aux élections communales, la Cour pose aussi que seuls des citoyens allemands peuvent envoyer des représentants au sein des Kreise et des Gemeinden, et ce, en vertu de l'unité des fondements de la démocratie allemande.
En ce qui concerne l'Autriche, l'article 26, alinéa 1er, de la Constitution prévoit que le Nationalrat est élu par le Bundesvolk. Tous les hommes et toutes les femmes qui possèdent la nationalité autrichienne à la date des élections et qui sont âgés de 19 ans peuvent être élus (article 26, alinéa 4).
En Autriche, les Länder définissent les conditions à remplir pour pouvoir exercer le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales. Le Stad-Land Wenen (le SPÖ avec le soutien des Verts) a adopté le principe de l'octroi du droit de vote et d'éligibilité aux étrangers. Le gouvernement fédéral (ÖVP et FPÖ) a déposé un recours contre l'adoption de ce principe devant la Cour constitutionnelle.
En France l'article 3, alinéa 4, de la Constitution réserve explicitement le droit de vote aux citoyens français. Les diverses dispositions du Code électoral (L. 127, 194, 228 et 272, 296, 339) sont très claires à ce sujet.
Le 5 novembre 2002, une proposition de loi modifiant la Constitution fut déposée qui visait à accorder le droit de vote et d'éligibilité à toutes les élections locales à tous les citoyens non-ressortissants d'un État membre de l'Union européenne. L'Assemblée nationale rejeta cette proposition le 26 novembre 2002. Une autre proposition de modification de la Constitution fut déposée le 23 juillet 2002.
Au cours de la précédente législature, plus précisément le 3 mai 2000, l'Assemblée nationale adopta une proposition de modification de la Constitution dont le champ d'application était plus limité, qui fut déposée par l'ensemble des groupes de la majorité. Cette proposition, qui ne visait ni l'ensemble des élections locales (municipales, régionales, etc.) ni les fonctions exécutives, se heurta à l'opposition du Sénat qui dispose d'un droit de veto dans les matières constitutionnelles.
Plusieurs intervenants ont déjà parlé brièvement du système qui est appliqué en Espagne. L'article 13, alinéa 2, de la Constitution espagnole prévoit que le droit de vote aux élections communales peut être accordé à des étrangers par un traité ou une loi sous condition de réciprocité. Jusqu'à présent, cette disposition n'a été appliquée qu'en faveur de la Norvège. Les Espagnols sont les seuls à avoir le droit de vote et d'éligibilité aux élections législatives (article 68, alinéa 5, de la Constitution).
La Constitution portugaise n'accorde aucun droit de vote aux étrangers. L'Assemblée de la République portugaise est l'institution représentative de tous les citoyens portugais. L'article 241 prévoit que l'Assemblée d'un « district local » est élue par les citoyens qui y résident, et ce, selon le système de la représentation proportionnelle.
Le Portugal a toutefois conclu des accords de réciprocité avec des pays qui accordent le droit de vote aux Portugais se trouvant sur leur territoire. En ce qui concerne les non-ressortissants de l'UE, une distinction est faite entre les ressortissants des pays de langue portugaise et les autres. C'est ainsi que, depuis 1971, les ressortissants du Cap Vert et du Brésil bénéficient du droit de vote aux élections locales et nationales. La condition de résidence est de deux ans pour le droit de vote et de quatre ans pour le droit d'éligibilité. Depuis 1997, le droit de vote est accordé aux ressortissants d'autres pays (en vertu d'accords de réciprocité), à savoir l'Argentine, Israël, la Norvège, le Pérou et l'Uruguay. Les ressortissants de ces pays résidant au Portugal bénéficient du droit de vote à l'échelon local après trois ans de résidence et du droit d'éligibilité après cinq ans de résidence.
En Italie, les articles 48, alinéa 1er, et 51, alinéa 1er, de la Constitution réservent explicitement le droit de vote et d'éligibilité aux citoyens italiens.
Au début d'octobre 2003, le vice-premier ministre Gianfranco Fini, président de l'Alleanza Nazionale (AN), secouait le monde politique par une proposition visant à octroyer le droit de vote à tous les étrangers résidant légalement en Italie. M. Fini estime que les immigrés qui résident légalement en Italie, qui y travaillent et payent leurs impôts doivent pouvoir, au même titre que les Italiens, voter à toutes les élections, y compris aux scrutins nationaux. La proposition de M. Fini prévoit l'octroi du droit de vote pour les élections communales et provinciales aux étrangers qui en font la demande, qui résident depuis au moins six ans en Italie, qui disposent d'un revenu régulier et suffisant, qui ont un casier judiciaire vierge et qui s'engagent à respecter les principes fondamentaux de la Constitution.
En Italie, il n'est pas question d'allocation de chômage pour les immigrés sans emploi. Le gouvernement détermine chaque année le nombre d'immigrés entrant en ligne de compte pour un permis de travail; les employeurs doivent leur assurer un logement et payer le voyage de retour lorsque leur travail est terminé. Le 4 juin 2002, la Chambre italienne des députés a approuvé un renforcement de la législation sur l'immigration. Désormais, les résidents non-ressortissants d'un État membre de l'UE ne se voient octroyer un permis de séjour que s'ils possèdent un contrat de travail et ils doivent quitter immédiatement l'Italie s'ils perdent leur emploi. Les permis de séjour ne sont désormais valables que deux ans au lieu de trois. Tous les résidents non-ressortissants de l'UE qui souhaitent résider en Italie doivent se soumettre, à leur arrivée, à un prélèvement d'empreintes digitales. Les illégaux qui entrent à nouveau dans le pays après en avoir été expulsés risquent une peine d'un an à quatre ans d'emprisonnement.
La Grèce n'accorde le droit de vote et d'éligibilité qu'aux personnes de nationalité grecque. Les étrangers ressortissants d'un État membre de l'UE ont le droit de vote aux élections communales. Tout comme en Belgique, le vote est obligatoire en Grèce.
En Suisse, les étrangers ont le droit de vote aux élections communales dans les cantons d'Appenzell Ausserrhoden, du Jura et de Neuenburg. Une condition de résidence d'un à dix ans minimum (dans la commune, dans le canton et/ou en Suisse) y est prévue. Dans le canton de Neuenburg, la personne étrangère concernée doit être titulaire d'un permis de séjour permanent, qui ne peut être accordé qu'après cinq à dix ans de résidence (selon le pays d'origine). Dans le canton d'Appenzell Ausserrhoden, le droit de vote n'est pas accordé dans toutes les communes : le droit cantonal prévoit simplement la possibilité d'octroyer ce droit. En dehors du canton du Jura, les étrangers ont uniquement le droit de vote, et pas le droit d'éligibilité. Dans le Jura, ils bénéficient du droit de vote mais non du droit d'éligibilité aux élections cantonales.
En Islande, depuis 1981, les ressortissants des pays scandinaves peuvent, après un séjour de deux ans, participer aux votes lors des élections administratives.
Aux États-Unis, les étrangers peuvent participer aux School Board Elections à New York et à Chicago. Par ailleurs, ils jouissent du droit de vote aux élections locales dans cinq communes du Maryland. Dans les années nonante, plusieurs autres villes (en particulier dans le Massachussets) ont fait diverses tentatives pour accorder le droit de vote aux étrangers.
Au Canada, seuls les citoyens canadiens de plus de 18 ans peuvent participer aux élections fédérales, aux référendums et aux élections municipales.
En Nouvelle-Zélande, les étrangers jouissent du droit de vote et d'éligibilité à l'échelon municipal. Les étrangers jouissent également du droit de vote, mais non du droit d'éligibilité à l'échelon national. Précédemment, seuls les ressortissants britanniques jouissaient de ces droits, mais à la fin de 2002, ces droits ont été étendus à tous les étrangers.
En Australie, en vertu de la Citizenship Act de 1948, les ressortissants britanniques jouissaient des mêmes droits que les citoyens australiens. À partir de 1984, les ressortissants britanniques ont pu voter et être élus aux niveaux local et régional. Ils peuvent également voter aux élections nationales s'ils figuraient sur les listes d'électeurs avant le 26 janvier 1984. Dans les États australiens de Tasmanie et de Victoria, les étrangers non britanniques jouissent du droit de vote et d'éligibilité aux élections locales s'ils sont propriétaires ou détenteurs de biens immobiliers ou s'ils sont représentants d'une entreprise qui possède des biens immobiliers dans la région en question. Les mêmes règles sont applicables en Australie méridionale.
L'intervenant considère qu'il ressort de ce qui précède que seuls quelques pays occidentaux ont institué le droit de vote pour les étrangers à l'échelon local. Il ne s'agit toutefois ici que d'un groupe de culture plutôt scandinave, au sein duquel le Royaume-Uni et, dans une moindre mesure, le Portugal sont des « cas à part » en raison de leur passé colonial. L'intervenant estime qu'on ne peut certainement parler d'une sorte de « droit européen de vote des étrangers aux élections communales » en devenir. Cela ressort également du succès relativement mitigé de la convention sur la participation des étrangers à la vie publique au niveau local du 5 février 1992, qui a été conclue dans le cadre du Conseil de l'Europe. Cette convention, qui est soumise pour ratification à 45 États membres du Conseil de l'Europe n'a, jusqu'à présent, été signée et ratifiée que par le Danemark, la Finlande, l'Italie, les Pays-Bas, la Norvège et la Suède, signée mais pas encore ratifiée par Chypre, la Tchéquie et le Royaume-Uni.
Selon l'intervenant, la référence à ce groupe limité de pays relève en outre de la malhonnêteté intellectuelle.
Il est un fait qu'en général, ces pays ainsi que les autres pays de l'Union européenne ont une législation sur la citoyenneté plus stricte.
La Belgique et l'Italie sont les seuls États européens à avoir abandonné l'épreuve d'intégration explicite.
Prenons par exemple les Pays-Bas, où le droit de vote des étrangers à l'échelon municipal a été institué en 1985. La loi néerlandaise du 21 décembre 2000 sur la nationalité exige que le candidat à la naturalisation puisse être considéré comme intégré à la société des Pays-Bas, des Antilles néerlandaises ou d'Aruba sur la base du fait qu'il possède la connaissance de la langue néerlandaise dans une mesure à définir par règlement d'administration publique ou bien, s'il a sa résidence principale dans les Antilles néerlandaises ou à Aruba, de la langue en usage à côté du néerlandais dans l'île de sa résidence principale, ainsi que de l'organisation politique de la société des Pays-Bas, des Antilles néerlandaises ou d'Aruba et qu'il se soit également fait admettre, respectivement, dans la société des Pays-Bas, des Antilles néerlandaises ou d'Aruba.
L'intervenant fait le lien entre notre procédure accélérée de naturalisation et le droit de vote des étrangers aux élections communales au travers d'un article publié par un partisan radical du droit de vote des étrangers à tous les niveaux, Jessurun D'Oliveira, professeur de droit international à l'université d'Amsterdam. Ce professeur déclare (traduction) : « Dans le débat sur le droit de vote des étrangers, on fait souvent valoir, y compris le gouvernement, que les étrangers qui aimeraient tant exercer les droits politiques comme le droit de vote n'ont qu'à se porter candidat à la naturalisation. Cette conception passe à côté du problème. Certes, un certain nombre d'étrangers emprunteront la voie de la naturalisation pour accéder aux droits politiques dans un État déterminé. Mais si l'on veut faire de la nationalité le mode d'accès exclusif à ces droits, il faut veiller à ne pas soumettre la naturalisation à des conditions si exigeantes qu'elles aboutissent à exclure beaucoup d'étrangers. On devra également promouvoir l'octroi d'office de la nationalité aux descendants des immigrés établis durablement chez nous. Exiger l'intégration, par exemple, c'est placer la charrue avant les boeufs. On ne peut s'intégrer si l'on n'a pas le droit de participer à la vie politique. L'intégration se réalise par l'octroi des droits politiques, par l'octroi de la nationalité, et pas avant.
Notre procédure accélérée de naturalisation accorde des droits politiques sans même réclamer l'intégration. Le raisonnement de Jessurun D'Oliviera implique toutefois naturellement qu'une législation de naturalisation très souple exclut le droit de vote des étrangers « tout court ».
Les partisans du droit de vote des étrangers font souvent référence à d'autres États où un tel droit de vote communal a été instauré. Or, ainsi que d'autres membres du groupe Vlaams Blok le montreront encore, tous ces pays ont une législation de naturalisation beaucoup plus rigoureuse et il est intellectuellement malhonnête de faire une comparaison.
L'intervenant cite l'exemple du Danemark où le droit de vote des étrangers existe. Mais ce pays a aussi par ailleurs une législation beaucoup plus sévère sur la naturalisation.
Au Danemark, qui a certes octroyé le droit de vote communal aux étrangers en 1981, la politique à l'égard des étrangers a été systématiquement durcie au fil des années. Cette évolution n'a pas commencé sous le gouvernement conservateur actuel, mais bien déjà sous le gouvernement socialiste précédent.
Amendement nº 3
L'amendement nº 3 est retiré au profit de l'amendement nº 161.
Amendement nº 11
M. Brotcorne dépose un amendement (doc. Sénat, nº 3-13/3) visant à remplacer le principe selon lequel l'étranger doit demander à pouvoir voter par une déclaration selon laquelle il ne souhaite pas exercer son droit de vote.
L'amendement nº 11 est retiré par M. Brotcorne.
Amendement nº 19
L'amendement nº 19 est rejeté par 10 voix contre 2 et 4 abstentions.
Amendement nº 48
L'amendement nº 48 est rejeté par 10 contre 2 et 4 abstentions.
Amendement nº 161
Mme Defraigne et consorts déposent un amendement (doc. Sénat, nº 3-13/3) visant à appliquer également le droit de vote des étrangers aux élections pour les conseils de district.
L'amendement nº 161 est adopté par 10 voix contre 3 et 3 abstentions.
Amendement nº 163
L'amendement nº 163 est rejeté par 10 voix contre 6.
Amendement nº 173
M. Ramoudt et consorts déposent un amendement (doc. Sénat, nº 3-13/3) visant à retenir la connaissance de la langue parmi les conditions à remplir pour pouvoir exercer le droit de vote.
L'amendement nº 173 de M. Ramoudt est rejeté par 9 voix contre 5 et 1 abstention.
L'article 4 amendé est adopté par 10 voix contre 6.
Articles 5, 6 et 7
M. Verreycken formule une remarque technique. Dans l'article 5, A, le mot « étrangers » a été traduit par les mots « kandidaten van vreemde origine », alors que dans l'article 4, on a utilisé le mot « vreemdelingen ». Pour éviter que l'on confonde les notions, une explication semble indiquée.
Le président souligne qu'il s'agit d'une question de traduction. C'est ainsi que l'expression « ressortissant non belge de l'Union européenne », qui figure à l'article 1erbis, § 4, de la loi électorale communale, est remplacée, en vertu de l'article 4, D, de la proposition de loi par le mot « étranger ». Dans l'article 23, § 1er, alinéa 8, de la même loi, on peut toutefois difficilement remplacer l'expression néerlandaise « niet-Belgische kandidaten van de Europese Unie », par analogie avec le français, par les mots « de vreemde kandidaten ». D'où le choix, à l'article 5, de l'expression « kandidaten van vreemde origine ».
Amendement nº 4
Mme Defraigne et consorts déposent l'amendement nº 4 (doc. Sénat, nº 3-13/2) visant à supprimer l'article 5. Il s'ensuit que les étrangers n'auront que le droit de vote et non le droit d'éligibilité aux élections communales.
M. Brotcorne s'oppose à cet amendement parce qu'il est contraire à la Constitution et en particulier à son article 8 et au principe d'égalité consacré par son article 10. Alors que les partisans de la proposition de loi et de l'amendement à l'examen entendent promouvoir l'intégration des non-ressortissants d'un État membre de l'Union européenne résidant en Belgique, cette catégorie ne peut pas prétendre aux mêmes droits que les Belges et que les ressortissants de l'Union européenne, qui disposent quant à eux du droit d'éligibilité. L'on va ainsi à l'encontre de l'objectif de la proposition. Parallèlement, l'amendement viole les articles 8 et 10 de la Constitution.
M. Coveliers déclare, pour sa part, qu'il approuvera cet amendement parce que l'éligibilité de la catégorie d'étrangers visée constituerait une discrimination encore plus grande.
Amendement nº 49
M. Vanhecke et consorts déposent l'amendement nº 49 (doc. Sénat, nº 3-13/2) visant à supprimer l'article 5.
M. Van Overmeire déclare que le rejet de principe et radical du droit de vote aux étrangers n'est pas inspiré par des considérations racistes, mais par une idée bien précise de la notion de souveraineté. Cette souveraineté appartient au peuple flamand.
Pour le Vlaams Blok, il s'agit du peuple flamand et de la nation flamande.
Il existe un lien indéfectible entre la souveraineté et la citoyenneté.
En 2003, le monde est toujours composé d'États-nations. Dans ce système, une nationalité déterminée est attribuée à chaque individu, laquelle en fait un membre d'une communauté politique, d'une nation qui s'administre politiquement. Tout individu possède donc une citoyenneté à laquelle est liée le droit de vote.
Il est frappant de constater que les étrangers qui ne sont pas citoyens de l'UE n'ont le droit de vote ni en France ni en Allemagne. Ces deux pays ont chacun leur propre code de la nationalité et leur propre conception culturelle de la nation, mais ils partagent le même point de vue sur la participation formelle de ceux qui n'ont pas la citoyenneté.
Cela nous amène à nous poser la question fondamentale qui est de savoir quelle est la base qui légitime l'exercice du pouvoir.
Jusqu'au Moyen-Âge, la France et le Saint-Empire romain considéraient que l'autorité des monarques était d'essence divine. Ils ne faisaient pas de nouvelles lois, mais redécouvraient et rétablissaient les anciennes lois telles que Dieu les avait voulues.
Cette conception a toutefois été contestée par plusieurs Cités-États italiennes au sein desquelles naquit la notion de souveraineté du peuple. On retrouve la même évolution au sein du comté de Flandre en 1302, laquelle a malheureusement été interrompue vers 1328.
Les guerres de religion qui ont fait rage en Europe aux 16e et 17e siècles ont entraîné la disparition du fondement théologique du pouvoir de l'État dans les grands royaumes féodaux, après quoi est apparue la notion de « raison d'État ». Le souverain tirait son autorité du fait qu'il était garant de la sécurité et du bien-être de ses sujets (cf. Hobbes, Leviathan).
L'étape suivante a été franchie lors des révolutions américaine et française qui reposaient sur l'idée que le peuple est souverain et que sa souveraineté est inaliénable. Ce principe de la souveraineté du peuple et le droit de vote qui y est indissociablement lié s'est ensuite répandu dans le monde entier et constitue de nos jours encore la justification de l'existence des États-nations.
Cette vision est cependant mise à mal sous l'effet des mouvements migratoires. C'est pourquoi on distingue aujourd'hui les « citizens », c'est-à-dire les citoyens qui jouissent de tous les droits, et les « denizens », c'est-à-dire les citoyens qui jouissent de tous les droits sauf les droits politiques.
L'on en est ainsi arrivé à un modèle postnational dans lequel des notions telles que la nationalité et l'État-nation sont jetées par-dessus bord et les droits fondamentaux ne sont plus associés à la nationalité, mais sont inhérents au fait que l'on séjourne sur le territoire d'un État déterminé depuis un certain temps. Cette transformation de la citoyenneté traditionnelle implique cependant une dévaluation de la citoyenneté, qui minera à terme la légitimité même de l'État et qui conduira même à la disparition du pacte entre l'État et le citoyen.
À la lumière de ce qui précède, force est de constater que la proposition de loi à l'examen est en porte-à-faux avec la loi relative aux naturalisations, qui avait précisément pour objet d'encourager la participation politique des étrangers en leur donnant la possibilité d'acquérir de manière simple la nationalité belge. La volonté d'intégration est supposée être présente du simple fait de la demande.
Les étrangers qui, pour quelque raison que ce soit, ne veulent pas faire ce modeste geste, doivent en supporter les conséquences. L'argument consistant à dire que les autorités belges doivent tendre la main aux étrangers, ne tient plus debout.
Le parti auquel le membre appartient, le Vlaams Blok, veut éviter à tout prix d'arriver à une société totalement fragmentée dans laquelle il n'est pas nécessaire de s'intégrer. Le risque existe que chaque groupe ethnique et religieux ne défende que ses propres intérêts et que l'on se retrouve dans la situation qui est aujourd'hui celle des États-Unis, à savoir celle du « vote ethnique ». L'enjeu des élections ne porte plus sur les intérêts de la nation, mais sur ceux de chaque groupe spécifique.
L'intervenant est partisan d'un système dans lequel les étrangers qui s'établissent en Belgique de manière permanente et qui souhaitent participer à la vie politique, s'intègrent dans la société par assimilation, la naturalisation étant le couronnement d'une intégration réussie.
La proposition de loi met la charrue avant les boeufs en posant que les étrangers doivent d'abord jouir de tous les droits politiques pour ensuite mieux pouvoir s'intégrer. Eu égard à ce qui précède, on peut se demander pourquoi les étrangers devraient encore se donner la peine de s'intégrer puisqu'ils ne subissent quand même aucune différence de traitement par rapport aux Belges et aux étrangers qui ont obtenu la naturalisation, preuve ultime de leur intégration.
Amendement nº 164
M. Coveliers et consorts déposent l'amendement nº 164 (doc. Sénat nº 3-13/3) modifiant l'article 5. Comme l'auteur est d'accord avec l'amendement nº 4, cet amendement ne nécessite aucune autre discussion.
L'amendement nº 4 est adopté par 15 voix contre 1.
Les amendements nºs 49 et 164 deviennent dès lors sans objet.
À la suite de l'adoption de l'amendement nº 4 à l'article 5 de la proposition de loi, les articles 5, 6 et 7 de la proposition de loi deviennent sans objet.
Les amendements nºs 5, 6, 50, 51, 165 et 166 deviennent dès lors également sans objet.
Mme Derbaki Sbaï note que rares sont les pays qui acceptent la double nationalité. La double nationalité est certes possible pour des personnes de nationalité marocaine qui peuvent donc demander la nationalité belge, mais nombre d'allochtones ne sont pas dans le cas et ne souhaitent pas renoncer à la nationalité de leur pays d'origine. Ils ne peuvent par conséquent pas devenir Belges. Pour eux, l'adoption de la proposition de loi à l'examen est fort importante.
Mme Leduc réplique que la plupart des personnes résidant dans notre pays qui peuvent entrer en ligne de compte pour obtenir la double nationalité et qui peuvent dès lors aussi demander la nationalité belge, sont turques ou marocaines. Outre ces personnes, il y en a d'autres, qui sont originaires d'autres pays que la Turquie ou le Maroc et qui refusent pour une raison ou une autre de demander la nationalité belge. Elle renvoie aux chiffres qui les concernent. Elle estime que l'on peut se demander à juste titre pourquoi des personnes qui vivent, habitent et travaillent chez nous ne souhaitent pas acquérir la nationalité belge, alors que le fait de l'acquérir ne porterait nullement atteinte aux droits dont elles jouissent dans leur pays d'origine.
M. Verreycken demande quelles seront les conséquences de l'octroi du droit de vote aux citoyens hors UE pour ce qui est de la position des Flamands à Bruxelles. Il n'existe aucun pronostic connu à ce sujet, ce qui constitue une grave lacune dans le débat. L'intervenant demande que le ministre compétent communique aux membres de la commission des chiffres significatifs à ce sujet avant que le débat ne soit entamé en séance plénière. Il fait référence à l'intervention d'un orateur précédent qui a déclaré qu'à Bruxelles, un candidat pouvait s'adresser aux électeurs dans diverses langues, mais qui n'a cité ni le néerlandais ni l'allemand qui sont pourtant deux langues officielles.
Article 8
Amendement nº 7
Mme Defraigne et consorts déposent un amendement (doc. Sénat, nº 3-13/2), tendant à supprimer l'article 8.
L'auteur principal souligne que l'on se trouve ici dans le même cas de figure qu'aux articles précédents, puisqu'il s'agit de supprimer l'éligibilité.
Amendement nº 52
M. Vanhecke et consorts déposent également un amendement (doc. Sénat, nº 3-13/2), tendant à supprimer l'article 8.
M. Ceder le justifie comme suit.
Dans la discussion sur la question de savoir qui peut et qui ne peut pas voter, qui peut participer directement ou non à la souveraineté du peuple, en particulier la question de savoir si les non-citoyens peuvent y prendre part, il convient de se référer à l'histoire, principalement à l'histoire de Europe, pour voir comment les notions de démocratie, de démocratie de masse et de citoyenneté, ainsi que le rapport entre ces notions, ont vu le jour. La notion de citoyenneté n'est absolument pas une idée évidente, ni une idée universelle; celles de la démocratie de masse et du droit de vote général individuel le sont encore moins.
Pourtant, à la fin de la guerre froide, on a pu croire, le temps d'un instant, que nos idées de droit de vote, de démocratie, de citoyenneté, d'État-nation et d'État de droit, auraient cours universellement.
Confrontés notamment aux ambitions de la Chine et au nouvel essor de l'islam en tant que facteur politique, des sceptiques comme Samuel Huntingdon ont fait la critique de cet optimisme. Abstraction faite de la Chine et de l'islam, le monde occidental est cependant ébranlé lui aussi par des évolutions profondes qui menacent la démocratie moderne. Il s'agit d'évolutions sur le plan tant intellectuel que politique. Il y a le multiculturalisme, qui porte atteinte, notamment, au principe de l'égalité devant la loi la proposition de favoriser les étrangers sur le marché du travail n'en est qu'un exemple , ainsi que les atteintes à la liberté de pensée et à la liberté d'expression, qui sont réprimées en ce qui concerne les défenseurs de l'État-nation.
Tout cela est très éloigné de la tradition occidentale. L'Occident a découvert le pluralisme religieux et politique après avoir souffert des dévastations et des désastres provoqués par la Réforme et la Contre-Réforme. Il s'en est suivi des États qui n'allaient intervenir dans l'opinion de leurs citoyens qu'avec beaucoup de retenue. Les démocraties constitutionnelles ultérieures ont considéré le droit à la liberté d'expression et le pluralisme politique comme des valeurs essentielles et ont pris toutes les mesures constitutionnelles possibles pour les préserver. Face à ce concept de « démocratie formelle », certains pays européens avancent une nouvelle idée, appelée d'une manière très euphémique « démocratie de fond ». Cette « démocratie de fond » implique ce qui suit :
1. qu'il ne suffit pas d'une égalité devant la loi, mais qu'il faut réaliser l'égalité dans la pratique, et que la loi est un instrument adéquat pour forcer le respect de cette égalité;
2. que ceux qui paraissent, par leurs actes politiques, empêcher la réalisation de cette égalité, doivent être déférés à la justice pénale.
Cette rupture radicale de la tradition occidentale se fonde sur la supposition qu'une démocratie n'est une démocratie véritable que dans la mesure où elle permet de réaliser une entière égalité entre ses citoyens. La pression qui s'exerce dans les cercles intellectuels et politiquement corrects pour octroyer le droit de vote aux étrangers s'explique dans ce contexte. D'aucuns considèrent en effet la discrimination supposée ou réelle comme le mal ultime et une atteinte à la démocratie. Cette supposition méconnaît la constatation évidente que la démocratie est une conséquence historique de la liberté plutôt que de l'égalité.
Les tentatives ultérieures d'organiser des sociétés sur la base de la notion d'égalité, entendue au-delà de celle de l'égalité devant la loi, notamment dans les États d'inspiration marxiste, ont montré quelles étaient les conséquences de cette erreur intellectuelle. Les États qui se sont organisés sur la base du principe de la liberté individuelle ont développé des démocraties sophistiquées qui ont malgré tout pu faire des concessions au principe d'égalité par le biais de mécanismes de solidarité organisés et institutionnalisés comme la sécurité sociale. Les États marxistes, en revanche, n'ont laissé aucune place à la liberté.
Liberté et égalité étaient deux des trois mots d'ordre de la Révolution française. Le troisième, fraternité, est un peu tombé dans l'oubli. On peut pourtant lui donner un sens très utile dans le cadre des démocraties modernes. Il s'est déjà avéré, dans le passé, que des oppositions politiques et sociales peuvent donner lieu à une instabilité interne et à des atteintes à la démocratie, ou même à sa faillite.
La démocratie ne peut survivre que s'il existe un consensus minimal parmi les acteurs qui y participent, comme l'a écrit très justement le penseur français Alain de Benoist. Les États multi-ethniques, comme l'Union soviétique et la Yougoslavie, se sont disloqués dès que la démocratie y a été introduite. Au Rwanda, l'introduction du multipartisme, en tant qu'élément d'une démocratie moderne, a eu des conséquences encore plus dramatiques. Les oppositions ethniques dans un État multiculturel signifient la fin de la démocratie. Il n'en a jamais été autrement.
Cette logique implacable s'imposera également dans l'Union européenne. La citoyenneté européenne se fonde sur une abstraction qui fait fi des identités historiques des diverses nationalités européennes. C'est une fiction dangereuse, et on le constate systématiquement quand on donne la parole aux citoyens des différentes nations lors d'une consultation populaire.
Il n'y a guère d'enthousiasme pour l'Union européenne, même au cours de ce qui devrait être l'état de grâce de la véritable union politique. Confrontées à l'apathie et au scepticisme, les élites politiques optent pour la fuite en avant : élargissement, introduction d'une véritable Constitution et remplacement de la règle de l'unanimité par celle de la majorité qualifiée.
Espère-t-on que les citoyens des nations européennes se considéreront tôt ou tard comme des citoyens européens ? Ce serait faire preuve d'une rare naïveté. Si une majorité de Flamands, soutenue par une minorité de Wallons, ne parvient même pas à faire appliquer, lors d'une course automobile en Wallonie, une vétille telle que l'interdiction de la publicité pour le tabac, quelle est la probabilité que les Anglais acceptent des mesures qui leur seraient imposées contre leur volonté par une coalition de Français et d'Allemands ? L'État européen est condamné à l'échec parce qu'il n'est pas un État-nation.
L'État-nation et la démocratie sont tous les deux des produits de la civilisation occidentale. Les deux phénomènes sont indissociablement liés. À partir du 17e siècle, les États se sont mis à refléter de plus en plus l'existence d'un certain peuple. Bien que ces États aient encore été gouvernés, à l'époque, par des souverains et des princes, pareille évolution a signifié la fin inexorable du pouvoir de ces monarques héréditaires. En effet, si l'État est l'émanation et la représentation d'un peuple déterminé, comment continuer à reconnaître le pouvoir divin et héréditaire des monarques ?
Dès le moment où l'on a défini l'État non plus sur la base des aspirations successorales des souverains, mais bien sur la base d'une Nation, le pouvoir de ces souverains était condamné. La Nation, le peuple, s'est imposé. L'idée de citoyenneté a également découlé de l'existence de l'État-nation. Le transfert de souveraineté des monarques et autres privilégiés au peuple a entraîné la nécessité de définir ce que l'on entendait par « peuple ». C'est ainsi que l'idée de la citoyenneté en faveur des membres de la Nation s'est imposée plus que jamais.
Mais elle n'avait jamais véritablement disparu. Les cités grecques connaissaient déjà l'idée de la citoyenneté. La citoyenneté était un principe encore plus important chez les Romains. Et même au moyen âge, il y a avait la bourgeoisie, une sorte de citoyenneté d'une certaine ville. Cette citoyenneté permettait de bénéficier d'une série de droits, mais aussi de devoirs, particuliers.
Ces droits étaient très développés, en tout cas dans les villes de Flandre. Il n'est dès lors pas exagéré d'affirmer, comme le font certains historiens, que nos idées modernes sur le droit de vote, la citoyenneté et la démocratie sont davantage influencées par les droits de la cité. Il est toutefois intéressant de constater que les nouveaux habitants de la cité pouvaient acquérir cette citoyenneté, mais qu'il ne pouvait pas y avoir de participation au processus politique sans la citoyenneté.
Le développement de la démocratie moderne découle de l'État-nation. Et, inversement, la démocratie a favorisé le nationalisme. C'est au sein des démocraties naissantes du 19e siècle que s'est développée l'idée du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, qui est également une idée typiquement occidentale. Car même si souvent, au cours de l'histoire, les peuples se sont révoltés contre leurs oppresseurs, l'idée que chaque peuple a droit à son propre État est relativement récente et assez originale.
Elle allait évidement de pair avec le développement de la démocratie dans laquelle le peuple, la Nation, détenaient la souveraineté ultime. Dans son livre « Triumph of the west », l'historien britannique J.M. Roberts considère le nationalisme comme l'idée politique la plus forte et la plus persistante des civilisations occidentales modernes. D'un point de vue intellectuel et conceptuel, le nationalisme a gagné la bataille, affirme-t-il. En témoignent la création de la Société des nations, ensuite la création des Nations unies et encore davantage la décolonisation. Les Nations occidentales subissaient la pression de leur propre concept, le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, lorsqu'ils ont accordé l'indépendance à leurs colonies.
L'Occident l'a fait plus ou moins volontairement, ce qui est unique dans l'histoire. Il y avait évidemment aussi la pression exercée par les colonisés eux-mêmes, mais leur révolte était due à l'influence d'idées importées de l'Occident. Ce n'est pas par hasard que le Mahatma Gandhi a été formé en Occident. On oublie d'ailleurs souvent qu'il se qualifiait lui-même de nationaliste et qu'il considérait le nationalisme comme une des plus grandes vertus. Ce n'est pas davantage un hasard si l'Inde, dont les élites formées à l'occidentale ou influencées par l'Occident ont conçu leur État indépendant comme un État-nation, est l'une des rares démocraties non occidentales. Un autre exemple est le Japon, qui a réussi à transposer une identité nationale forte et distinctive en une société démocratique.
Jusqu'à présent, les États-nations sont les seuls à être parvenus à générer la démocratie de masse et à la maintenir avec succès. Ces États se caractérisent par :
1. un niveau relativement élevé de paix intérieure;
2. une démocratie de masse performante;
3. une prospérité économique.
Ces conséquences ne sont pas le fruit du hasard. La communauté et l'homogénéité sont des fondements de la démocratie plus naturels que l'hétérogénéité et les dissensions.
L'écrivain suédois d'origine juive polonaise Göran Rösenberg a dit : « Parvenir à l'idéal de coexistence pacifique est plus facile à dire qu'à faire ... Il est plus aisé d'arriver à des solutions démocratiques lorsque le dème est réduit et le degré de consensus élevé. La démocratie en tant que système actuel de gouvernement n'a été possible que lorsque le dème a pu être cerné en termes de territorialité et de culture et lorsque des conflits existants ont pu être jugulés et minimisés par la transcendance d'une identité nationale commune.
Un « cocon » de loyautés et de liens humains a pu ainsi être étendu à des millions de personnes. Une communauté s'est créée où il n'y en avait jamais eu jusqu'alors. Le sentiment sous-jacent d'appartenance, ce cercle élargi de loyauté et d'équité, n'a pas seulement permis l'éclosion de la démocratie et de l'État de droit, mais aussi celle des institutions publiques de bien-être social, dont nous acceptons aujourd'hui qu'elles sont indissociables de notre structure démocratique. »
On peut en effet le redire clairement une fois encore à l'adresse des socialistes : c'est l'État-nation, au sein duquel les citoyens se sont unis en tant que nation, qui est la source de la sécurité sociale, un système qui, comme la démocratie, ne peut survivre et être accepté qu'en présence d'une solidarité interne suffisante. Et M. Rösenberg de poursuivre : « C'est ce sentiment d'appartenance qui a constitué une condition essentielle de la volonté d'équité. » D'où l'accent mis sur la difficulté d'acquérir la nationalité et le fait de lier le droit de vote à la nationalité.
L'État-nation est néanmoins nécessairement partagé entre l'atmosphère chaleureuse du sentiment d'appartenance, de l'identité commune telle qu'elle est vécue et de la loyauté, d'une part, et l'atmosphère plus austère de la citoyenneté, des institutions politiques et des loyautés constitutionnelles. Le droit de vote fait aussi partie de cette dernière.
D'aucuns argumentent que ce côté chaleureux de l'identité nationale et de l'appartenance est suranné et que l'homme moderne est suffisamment éclairé et large d'esprit pour ressentir l'attrait de valeurs abstraites telles que l'équité sans que soit requise la présence de loyautés émotionnelles liées à l'origine, à la culture ou à la langue. Le marxiste Jürgen Habermas de l'École de Francfort a écrit : « Derrière toute façade d'homogénéité culturelle se cache le maintien opprimant de la domination de la culture de la majorité. »
Les marxistes culturels de l'École de Francfort, disciples de Lucas et Gramsci, ont adopté comme fil conducteur, dans leur oeuvre, la critique de tout ce qui permettait aux démocraties occidentales de subsister. Leur frustration remontait jusqu'à la Première Guerre mondiale, à l'occasion de laquelle, contrairement à ce que supposaient les marxistes, les ouvriers et les prolétaires d'Europe occidentale optèrent pour la fidélité à la nation plutôt que pour la fraternité entre les ouvriers de tous les pays.
Habermas ne comprenait que trop bien que seule la suppression des cultures nationales pourrait rapprocher le marxisme de son but ultime. C'est pourquoi il a plaidé pour que les cultures abandonnent leurs prérogatives historiques au profit d'une culture politique généralisée à laquelle tout le monde pourrait participer, quels que soient son origine ou son mode de vie. Il est possible que la plus grande erreur de raisonnement du marxisme et des courants politiques apparentés ait été de croire en la malléabilité de l'homme, de croire qu'il peut abdiquer sa nature pour être transformé en un être parfait dans une société parfaite.
À l'instar des marxistes, qui croyaient à tort que l'on pourrait construire une société prospère et performante si la propriété privée pouvait être abolie et si l'on pouvait débarrasser l'homme de son désir de posséder et de sa cupidité, nombreux sont ceux qui pensent aujourd'hui que l'homme peut vivre sans liens émotionnels avec de grands ensembles.
Parler de la démocratie comme d'une plante de serre fragile est exagéré, surtout dans le contexte de la civilisation occidentale. Les démocraties font preuve d'une étonnante capacité de résistance à l'adversité et, comme l'historien américain Victor Davis Hanson l'a montré dans son ouvrage « Carnage and Culture », elles ont une résistance et une force militaires étonnantes, une force que ses adversaires ont généralement tendance à sous-estimer, ainsi qu'Hitler, l'empire japonais, Staline et, plus récemment, Saddam Hussein et Oussama Ben Laden en ont fait la triste expérience.
L'une des raisons de cette réussite militaire réside précisément dans l'engagement personnel des citoyens soldats, qui ne combattent pas pour un souverain lointain ou pour des prétentions dynastiques, mais, pour ainsi dire, pour leurs intérêts dans la SA État-nation. De la même manière que l'octroi du droit de vote (ius sufragi) aux non-ressortissants n'est pas une bonne idée, l'admission des étrangers dans l'armée (ius militari) n'est pas indiquée.
D'un autre côté, il s'avère que la « plante démocratique » ne pousse pas dans n'importe quel climat ni dans n'importe quel paysage. Dans « The Coming Anarchy » et plusieurs autres ouvrages, l'écrivain Robert Kaplan souligne les limites de la démocratie de masse moderne. Il y met en lumière plusieurs échecs d'implantation d'une démocratie dans les civilisations non occidentales. Dans certains cas, la tentative fut véritablement catastrophique, comme en Algérie, où l'islam et le fondamentalisme islamiste firent obstacle au fonctionnement d'une démocratie effective. L'auteur évoque également le Pakistan, où la démocratie n'a engendré qu'instabilité, corruption et récession économique.
Mais le cas le plus terrible fut celui du Rwanda, où le multipartisme instauré sous la pression de nations étrangères, en particulier la Belgique et la France, fut l'élément déclencheur d'une véritable vague de folie génocidaire. Kaplan dresse le constat suivant : (traduction) « La démocratie et le multipartisme renforcent et durcissent les oppositions religieuses et ethniques existantes ». C'est pourquoi il importe, d'une part, que les États-nations européens veillent à ce que la citoyenneté ne puisse pas être acquise trop facilement par des étrangers arrivés récemment dans un pays et non encore intégrés, et, d'autre part, que l'on évite que des oppositions ethniques ne se développent dans un pays et ne soient encore exacerbées par le processus démocratique.
Il ne fait aucun doute que les personnes d'origine étrangère se présentent souvent aux électeurs comme des représentants de minorités ethniques et s'occupent souvent, au Parlement, des problématiques de ces minorités ethniques, plutôt que de se profiler en tant que Belges parmi les Belges, semblables aux autres Belges ou en tant que Flamands parmi les Flamands et semblables aux autres Flamands. Le risque de balkanisation de la société est bien réel, surtout dans l'hypothèse où des partis politiques seraient créés pour disons les musulmans et récolteraient un certain succès.
Nous serions ainsi, en effet, très éloignés de l'idéal initial de la démocratie, comme le disait entre autres l'homme politique conservateur anglais Edmund Burke, qui, en 1774, s'adressait en ces termes aux électeurs de son district : « Le Parlement n'est pas une réunion d'ambassadeurs aux intérêts divergents et opposés, au sein de laquelle chacun devrait, en tant que représentant et avocat, défendre ses intérêts face à d'autres représentants et avocats; le Parlement est au contraire l'assemblée délibérante d'une seule Nation défendant un intérêt unique celui de l'ensemble où la loi n'est pas dictée par des objectifs ou des profits locaux, mais par le souci du bien-être général, qui résulte de la pensée générale de l'ensemble. »
Deuxièmement, les États-nations d'Europe doivent veiller à ce que la participation active au processus de décision démocratique reste évidemment liée à la citoyenneté. Cela semble évident pour quiconque ne vit pas reclus dans sa tour d'ivoire. Car, sans cela, que signifie encore la nationalité ? Plus grand-chose, mais n'est-ce pas là, précisément, ce que certains souhaitent ?
Le président souligne que l'amendement nº 7 a pour but de supprimer les modifications que la proposition de loi voulait apporter à l'article 71 de la nouvelle loi communale. Si cet amendement est adopté, l'article 8 de la proposition deviendra sans objet.
Amendement nº 166
Mme Leduc et consorts déposent, à cet article, un amendement (doc. Sénat, nº 3-13/3) visant à y prévoir le principe de la réciprocité. Il est renvoyé, pour la justification de cet amendement, à la justification de l'amendement nº 163.
L'amendement nº 7 est adopté par 14 voix contre 1 et 2 abstentions.
Par suite de l'adoption de l'amendement nº 7, l'article à l'examen devient sans objet, de même que l'amendement nº 167.
Article 9
Cet article est devenu sans objet à la suite de l'adoption de l'amendement nº 7 de Mme Defraigne et consorts.
Par conséquent, les amendements nºs 8, 53 et 168 n'ont plus non plus de raison d'être.
Article 10 (nouveau)
Amendement nº 174
Mme Defraigne et M. Roelants du Vivier déposent l'amendement nº 174 (doc. Sénat, nº 3-13/3) visant à insérer un article 10 (nouveau) dans la proposition de loi. Les auteurs proposent de préciser que la loi sera applicable pour la première fois lors des élections communales de 2006.
M. Coveliers ne comprend pas la ratio legis de cet amendement puisque, par hypothèse, la nouvelle loi ne pourra s'appliquer au plus tôt que lors des prochaines élections communales en 2006.
M. Moureaux fait remarquer que des élections partielles pourraient avoir lieu avant 2006, mais après l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. Il cite l'hypothèse d'un conseil communal qui démissionnerait dans sa totalité.
M. Coveliers déduit de cette explication que l'amendement, pourtant soutenu par les partisans du droit de vote des ressortissants étrangers, a pour effet de priver de leur droit de vote les habitants étrangers d'une commune dans laquelle des élections anticipées devraient être organisées.
Amendement nº 54
M. Vanhecke et consorts déposent l'amendement nº 54 (doc. Sénat, nº 3-13/3), qui vise à insérer un article 10 nouveau relatif à l'organisation d'une consultation populaire. L'entrée en vigueur de la loi sera ainsi fonction du résultat de la consultation populaire. Les dispositions proposées règlent l'organisation de cette consultation.
L'article 1er dispose que tous les citoyens régulièrement inscrits sur les listes électorales pour les élections législatives sont convoqués afin de répondre à la question de savoir si le droit de vote peut être accordé aux habitants qui ne possèdent pas la nationalité d'un des États membres de l'Union européenne.
L'article 2 dispose que le Roi peut fixer les modalités d'organisation.
L'article 3 concerne le contrôle des opérations de vote et du dépouillement.
L'article 4 habilite le Conseil d'État à se prononcer sur les réclamations déposées contre des irrégularités.
L'article 5 porte sur la publication du résultat au Moniteur belge.
Cet amendement a déjà fait l'objet d'un commentaire approfondi au début de la discussion générale.
M. Jean-Marie Dedecker souligne que son groupe avait déjà déposé une proposition analogue concernant la consultation populaire.
Amendement nº 55
L'amendement nº 55 de M. Vanhecke et consorts (doc. Sénat, nº 3-13/3) propose que la loi entre en vigueur le 9 octobre 2006, soit après les prochaines élections communales.
M. Brotcorne estime que l'amendement relatif à l'entrée en vigueur de la loi proposée n'est pas nécessaire. La loi entre en vigueur dix jours après sa publication au Moniteur belge.
Amendement nº 174
Mme Defraigne se rallie à l'avis du préopinant et retire son amendement nº 174.
Amendements nºs 59 à 159
M. Delacroix dépose les amendements nºs 59 à 159 (doc. Sénat, nº 3-13/3) relatifs à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi. L'amendement principal nº 59 reporte l'entrée en vigueur au 31 décembre 3000; les amendements subsidiaires suivants rapprochent chacun l'entrée en vigueur proposée d'un an. L'intervenant renvoie à la justification écrite de ses amendements.
Amendement nº 54
L'amendement nº 54 est rejeté par 11 voix contre 5.
Amendement nº 55
L'amendement nº 55 est rejeté par 11 voix contre 2 et 4 abstentions.
Amendements nºs 59 à 159
Les amendements nºs 59 à 159 sont rejetés par 14 voix contre 2.
Mme Leduc demande que l'on reporte le vote final sur l'ensemble de la proposition de loi amendée. Elle souhaite que l'on étudie de manière approfondie et que l'on discute les statistiques demandées par les services.
M. Moureaux n'est pas d'accord sur cette demande. La commission a examiné de manière approfondie la proposition de loi et tous les amendements. Il ne voit pas pourquoi le vote final en commission ne pourrait pas avoir lieu. De toute manière, ce vote ne termine pas le débat. Il constitue en revanche un signal clair à l'adresse de la population comme quoi la majorité de la commission entend poursuivre dans ce dossier.
Mme Leduc estime que l'on a manifestement perdu tout bon sens. Des statistiques d'une importance essentielle pour la discussion ont été demandées au ministre de l'Intérieur et au ministre de la Justice. On sait combien de personnes entrent en ligne de compte pour le droit de vote en question, mais on ignore combien de personnes ont demandé la nationalité belge et combien de ces dossiers ont déjà été traités. Les chiffres fournis vont jusqu'à 2002. Combien y a-t-il encore de dossiers en traitement et pourquoi leur traitement prend-il davantage de temps ?
L'intervenante estime que l'on doit à l'électeur d'étudier de manière approfondie les chiffres transmis.
Mme Pehlivan fait remarquer que les statistiques communiquées concernent les personnes ayant introduit une demande de naturalisation. Elles ne concernent pas le droit de vote !
Pour Mme Pehlivan, le nombre de personnes ayant demandé la naturalisation n'est pas un élément pertinent. Pour elle, ce serait déjà un succès si ne serait-ce qu'un étranger pouvait bénéficier de la réglementation prévue dans la proposition de loi.
M. Verreycken déclare que les chiffres ont été distribués en cours de réunion de commission. Étant donné l'ampleur de ces statistiques, il est absurde d'affirmer que qui que ce soit ait déjà pu les étudier.
Selon l'intervenant, il est logique que l'on examine soigneusement s'il y a dans cette masse des chiffres que la commission devrait connaître et qui seraient susceptibles d'influencer sa décision. S'il en est ainsi, la demande de Mme Leduc tendant à reporter le vote final sur la proposition de loi est parfaitement justifiée. Il n'est pas possible de se prononcer immédiatement.
La proposition de Mme Leduc de reporter le vote final d'une semaine afin de permettre aux membres de la commission d'examiner les chiffres est rejetée par 10 voix contre 7.
M. Coveliers met en garde ses collègues car ils sont sur le point de voter une loi particulièrement mauvaise. Ce texte est imposé par une partie du pays à l'autre, avec, il est vrai, le concours du SP.A. Ceux qui voteront la proposition de loi porteront une lourde responsabilité. Les blessures qu'elle occasionnera seront particulièrement graves.
Selon l'intervenant, le SP.A devrait se demander s'il serait pensable que les autres partis flamands votent, avec le concours d'un parti francophone, une loi par laquelle les francophones exigeraient, par exemple, l'égalisation des dépenses de sécurité sociale en Flandre et en Wallonie. Le SP.A pourrait ainsi se rendre compte de ce que cela signifie d'obliger les autres partis flamands à accepter ce que la majorité de la population flamande, et peut-être aussi de la population francophone, n'accepte pas.
M. Coveliers pense que le vote de la proposition à l'examen va creuser considérablement le fossé qui sépare la politique de la population.
Deux questions fondamentales, à savoir, d'une part, celle des discriminations possibles et, d'autre part, celle de la réciprocité, ont été superbement ignorées.
M. Coveliers estime que les partisans de la proposition de loi à l'examen remporteront une victoire à la Pyrrhus. En particulier, les Flamands qui l'auront votée se verront très vite présenter l'addition.
Mme De Schamphelaere déclare que son groupe regrette ce débat ainsi que la manière dont il a été mené tant en commission que dans l'opinion publique. Les oppositions entre les visions politiques se sont une nouvelle fois faites jour et ont mis la population en émoi. Personne ne sort vainqueur de cette aventure, qui n'aura pas servi l'avenir de notre société. Le CD&V souhaite une société ouverte, mais aussi une société intégrée. Ce débat n'aura été bénéfique ni pour notre démocratie, ni pour la position des immigrés eux-mêmes.
Depuis vingt ans que la question du droit de vote des immigrés est posée, le CD&V a toujours défendu la même ligne politique. Selon celle-ci, la participation politique est possible au travers de l'acquisition de la nationalité. Cette piste a déjà été explorée et elle devrait l'être à nouveau. L'acquisition de la nationalité est en fin de compte la clef de l'intégration et de la volonté de s'intégrer.
Le CD&V déplore surtout l'absence de toute vision politique du côté de la majorité actuelle. Avec celui de l'emploi, l'intégration des étrangers est également l'un des défis les plus importants auxquels notre société est confrontée. Le VLD, surtout, a négligé d'inscrire également ce point à l'ordre du jour des négociations gouvernementales. Il porte dès lors une responsabilité importante dans cette affaire.
M. Verreycken résume la position de son groupe en neuf points :
Quiconque veut le droit de vote doit d'abord devenir Belge. La procédure accélérée de naturalisation permet de le devenir très rapidement;
L'octroi du droit de vote aux étrangers décourage l'intégration;
Les citoyens de l'Union européenne obtiennent le droit de vote au niveau communal, mais c'est sur la base de la réciprocité;
Les sondages montrent que la majorité des Flamands sont opposés à l'octroi du droit de vote aux étrangers. En tant que parti politique, le Vlaams Blok ne peut outrepasser cette volonté;
Il y a eu pas mal d'études et d'auditions, au cours de la précédente législature, qui ont montré que les immigrés auraient tendance à voter à gauche la première fois, ce qui explique la pression qu'exercent les partis de gauche pour faire passer ce dossier;
Comme la loi communale relève de la compétence des entités fédérées, le Vlaams Blok estime qu'il faudrait transférer ce dossier à ces entités. Cette proposition est une forme impropre de défédéralisation de la part d'un État qui craint de disparaître entre les communautés et l'Europe;
L'octroi du droit de vote aux étrangers est une forme de paternalisme : nous nous estimons moralement supérieurs en accordant le droit de vote à des groupes de population alors que nous ne bénéficions pas des mêmes droits dans leur pays d'origine;
Dans la plupart des pays européens, il n'est pas question d'accorder le droit de vote aux étrangers. Et dans les pays où ce droit a été octroyé, il n'a pas permis de réduire les tensions interraciales;
L'octroi du droit de vote aux étrangers est également une question qui ne préoccupe que les salons intellectuels. Ni la population, ni les organisations de défense des immigrés ne s'y intéressaient particulièrement. Il s'agit simplement d'un dossier symbolique qui et c'est important pourrait perturber gravement les rapports de force à Bruxelles au détriment des Flamands. C'est pourquoi toutes les remarques relatives à la communautarisation « scandaleuse » de ce dossier sont infondées. Il s'agit bel et bien en l'occurrence d'une proposition de loi dirigée contre les Flamands. Le fait qu'elle ait été déposée par les francophones de ce pays avec la « collaboration » d'un seul parti flamand, montre une fois de plus que la Belgique n'a jamais voulu être la patrie des Flamands et qu'elle ne voudra probablement jamais l'être à l'avenir.
M. Moureaux se dit réjoui de ce que les travaux se soient déroulés de manière sérieuse et sereine, comme il se doit dans un Parlement démocratique.
L'intervenant se félicite de l'issue de la première discussion. En sa qualité d'ancien ministre des gouvernements des premiers ministres Marc Eyskens et Jean-Luc Dehaene, il s'inscrit avec grand plaisir dans les opinions que ces personnes ont exprimées à propos de ce dossier.
Mais M. Moureaux se dit surtout heureux et fier d'être sur la même longueur d'onde que le SP.A-Spirit, qui a eu le courage de prendre position. L'appui du SP.A-Spirit a été déterminant d'un point de vue symbolique et démontre une certaine ouverture de notre société.
L'intervenant n'est pas de ceux qui croient qu'il y a des francophones ouverts et des néerlandophones fermés à l'avenir. Les derniers sondages démontrent d'ailleurs que les opinions publiques flamandes et francophones sont beaucoup plus proches qu'on le prétend en cette matière et qu'elles étaient des deux côtés majoritairement favorables au droit de vote des étrangers. Le vote de cette proposition de loi aujourd'hui même représente donc un signal d'ouverture et d'accueil que nous donnons à l'ensemble de nos concitoyens et en particulier à ceux qui vivent depuis longtemps sur notre territoire et qui souhaitent participer à la démocratie locale. Cette volonté de travailler avec eux permettra de construire un pays plus prospère.
Tous ceux qui vivent durablement dans nos communes auront dorénavant leur mot à dire dans des choses aussi simples que l'urbanisme, la propreté publique etc.
Notre commission fait aujourd'hui un pas important, même si ce n'est qu'un premier pas, et M. Moureaux remercie tous ceux qui y ont participé positivement.
Mme Leduc est déçue que l'on n'ait pas écouté la voix de l'électeur dans ce débat et que les Flamands aient dû encaisser le coup. Au demeurant, les Wallons et les Bruxellois ne sont pas davantage unanimes sur l'octroi du droit de vote aux étrangers. On peut interpréter les sondages d'opinion de nombreuses manières, mais le véritable sondage, ce sont les élections. Aujourd'hui, les deux partis socialistes, le flamand comme le francophone, infligent un camouflet aux Flamands, avec les autres partis francophones.
Selon l'intervenante, le droit de vote doit être le privilège de ceux qui adoptent la nationalité belge et on ne peut nier que l'acquisition de celle-ci ait été facilitée. Cette thèse relève du bon sens. Pourtant, aujourd'hui, elle est niée, méprisée et ridiculisée. C'est regrettable, pour les nombreux Flamands qui ne comprennent pas ce qui se passe, mais aussi pour les Wallons qui ont affirmé, dans de nombreux sondages, que le droit de vote devait être réservé aux Belges, et enfin également pour les Bruxellois, qui n'ont pas été entendus. Comment réagiront-ils à cette proposition de loi ?
Il est absolument inadmissible que les élus wallons, entraînant dans leur foulée des socialistes flamands dociles, imposent de force aux Flamands ce droit de vote des immigrés.
De plus, le droit de vote ne résout pas non plus les problèmes de société; toutes les études scientifiques réalisées en la matière l'on prouvé à suffisance. En d'autres termes, même les allochtones, qui croient que l'octroi de ce droit résoudra leurs problèmes, sont induits en erreur, car rien n'est moins vrai : ils se rendront compte que rien n'aura changé. Le droit de vote est une solution de dupes. Les allochtones n'auront pas plus qu'avant accès au marché du travail, car ce sont eux qui doivent prendre en main le levier qui y mènera, par la formation et l'enseignement.
On ne fait aucun cas aujourd'hui de l'opinion de l'électeur. On croit que l'électeur l'ignore; même la presse le croit. La presse croit même avoir contribué à la façon dont s'est déroulé ce débat. Ce n'est pas à la presse qu'il incombe d'apprendre aux citoyens ce qu'ils doivent penser : nous vivons dans un pays libre. Mme Leduc a plutôt l'impression de vivre sous un régime communiste. Elle a pu observer l'attitude servile des partisans du droit de vote des immigrés qui suivent le diktat de leurs présidents de partis et imposent ce droit à la population, contre son gré. L'avenir nous dira quels fruits ils récolteront.
M. Guilbert souligne que le gouvernement a laissé carte blanche au Parlement dans ce dossier et que le Sénat a pris ses responsabilités en la matière.
Écolo a, d'emblée, soutenu les propositions relatives au droit de vote des immigrés. La proposition de loi n'est sans doute pas parfaite et son champ d'action pourrait être étendu, mais on franchit aujourd'hui un premier pas important.
Personne n'est dupé; au contraire, on offre des possibilités d'intégration à ceux qui vivent chez nous.
Ce n'est pas non plus un dossier communautaire, c'est uniquement un dossier politique. En votant cette proposition de loi, la Belgique rejoint la majorité des pays de l'Union européenne qui prônent une société multiculturelle. La société multiculturelle est une richesse : elle offre à tous les citoyens la possibilité d'exercer leurs droits à l'échelon communal.
Mme Pehlivan déplore que l'on n'ait abordé le débat sur le fond en commission que dans la phase finale.
L'argument de la réciprocité invoqué par un des intervenants précédents lui paraît singulier. Si certains principes n'existent pas dans un autre pays, ce n'est pas un argument pour renoncer à nos propres principes.
En tant qu'État démocratique, la Belgique doit être conséquente et éviter de prendre exemple sur des États non démocratiques.
Le débat sur l'octroi du droit de vote aux citoyens non-ressortissants de l'Union européenne doit toutefois être étendu à la question de l'intégration des allochtones dans notre société. À cet égard, les immigrés doivent également prendre leurs responsabilités. Un effort doit être fait des deux côtés.
Mme Vanlerberghe déclare que le groupe SP.A/Spirit votera en faveur de la proposition de loi à l'examen. La raison principale qui le motive ne réside pas dans l'espoir que l'octroi du droit de vote aux élections communales permettra de résoudre tous les problèmes, car un tel espoir serait vain. On peut d'ailleurs dire la même chose en ce qui concerne l'acquisition de la nationalité belge. En effet, cela permettrait simplement de résoudre le problème sur le papier. L'intervenante estime que la solution consisterait à donner un signal attestant du fait que la société belge respecte les allochtones. Celui qui manifeste du respect en bénéficie en retour. C'est pourquoi l'adoption de la proposition de loi à l'examen serait une bonne chose, selon elle.
M. Brotcorne déclare avoir vécu lors des débats une expérience intéressante et importante. La discussion a été très intense, à cause de la valeur symbolique du dossier. L'adoption du texte s'inscrit dans une politique d'intégration et ne sera jamais plus qu'un élément parmi d'autres. Le droit de vote ne changera rien de fondamental au paysage politique communal en 2006.
L'intervenant est d'avis qu'il ne s'agit pas d'un dossier communautaire. La démocratie étant quelque part l'addition des voix et une question d'arithmétique, M. Brotcorne constate que la matière discutée est une matière fédérale et que l'accord de gouvernement précisait que l'initiative reviendrait au Parlement. La majorité qui s'est dégagée est spéciale, mais elle est composée de francophones et de néerlandophones. Notre pays a connu des situations semblables au cours de son histoire.
Le cdH aurait préféré que les droits soient accordés intégralement et non pas par saucissonnage. Parfois il faut pouvoir s'accorder sur un minimum minimorum. C'est le cas aujourd'hui.
Mme Defraigne déclare qu'un pas important a été franchi. L'intervenante aurait préféré que les débats soient moins dramatisés. Le groupe MR se réjouit que le texte adopté concrétise exactement l'engagement du parti.
M. Jean-Marie Dedecker conclut que tout le débat concernait en fait la politique d'intégration. Les accords politiques qui ont été conclus ne laissent aucun doute sur l'issue de la discussion relative à l'octroi du droit de vote. L'intervenant invite les personnes présentes à participer dans cinq ans à un débat visant à examiner dans quelle mesure celui d'aujourd'hui aura contribué à l'intégration. Ne constitue-t-il pas une énième main tendue, un trente-sixième signal adressé aux autres communautés ? N'est-il pas, après l'octroi du bénéfice de bien des aides sociales, la mise en oeuvre d'une politique de discrimination positive et le vote de la loi de naturalisation accélérée, un énième faux-fuyant occultant l'absence de toute politique d'intégration ?
L'intervenant a l'impression que l'on a trouvé ici une énième solution à la belge pour un problème communautaire bruxellois. Le résultat, c'est que les Flamands, pour la énième fois depuis 1830, se sont fait gruger, avec l'aide du groupe SP.A. L'intervenant estime que cela créera un fossé encore plus grand entre les communautés, entre le citoyen et la politique, entre les Flamands et la politique, entre les autochtones et les immigrés.
L'ensemble de la proposition de loi, telle qu'elle a été amendée, a été adoptée par 10 voix contre 7.
L'intitulé sera adapté au texte voté par la commission.
Par suite de l'adoption de la proposition de loi visant à octroyer le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales et provinciales aux ressortissants étrangers (de M. Philippe Mahoux et consorts); (doc. Sénat, nº 3-13/1), les propositions de loi ci-après deviennent sans objet :
Proposition de loi relative à l'extension du droit de vote et d'éligibilité aux élections communales aux ressortissants non européens résidant en Belgique (de Mme Jacinta De Roeck) (doc. Sénat, nº 3-65/1);
Proposition de loi modifiant la loi électorale communale et la nouvelle loi communale, en ce qui concerne le droit de vote et d'éligibilité des non-Belges aux élections communales et provinciales (de Mme Fatma Pehlivan et M. Lionel Vandenberghe) (doc. Sénat, nº 3-86/1);
Proposition de loi visant à instituer une consultation populaire sur le droit de vote des étrangers (de M. Frank Vanhecke et consorts) (doc. Sénat, nº 3-245/1);
Proposition de loi relative à l'extension du droit de vote et d'éligibilité aux élections communales et intracommunales aux ressortissants non européens résidant en Belgique (de Mmes Jacinta De Roeck et Isabelle Durant) (doc. Sénat, nº 3-262/1);
Proposition de loi modifiant la loi électorale communale et la nouvelle loi communale, en ce qui concerne le droit de vote et d'éligibilité aux élections communales des ressortissants des États membres de l'Union européenne et des autres ressortissants de nationalité étrangère résidant en Belgique depuis plus de cinq ans (de M. Christain Brotcorne et consorts) (doc. Sénat, nº 3-274/1);
Proposition de loi modifiant la loi électorale communale, coordonnée le 4 août 1932, en vue d'octroyer le droit de vote aux étrangers non-ressortissants de l'Union européenne aux élections communales (de Mmes Christine Defraigne et Amina Derbaki Sbaï) (doc. Sénat, nº 3-275/1);
Proposition de loi portant organisation d'une consultation populaire sur l'octroi du droit de vote au niveau communal aux résidents en Belgique qui ne sont pas des ressortissants d'un État membre de l'Union européenne (de MM. Jean-Marie Dedecker et Hugo Coveliers) (doc. Sénat, nº 3-291/1).
Le présent rapport a été approuvé à l'unanimité des 17 membres présents.
Les rapporteurs, | Le président, |
Philippe MOUREAUX. Paul WILLE. |
Ludwig VANDENHOVE. |
Aperçu statistique du nombre d'étrangers non européens pouvant participer aux élections communales de 2006.
Il s'agit des étrangers non européens qui :
auront atteint l'âge de 18 ans au plus tard le deuxième dimanche d'octobre 2006.
résident dans notre pays de manière ininterrompue depuis le 1er août 2001.
Les étrangers issus de pays qui accéderont à l'Union européenne au cours des prochaines années n'ont pas été pris en compte.
L'aperçu donne les chiffres par commune, par province et par région.
Le nombre total d'étrangers concernés s'élève à 154 094.
Province Provincie |
Nombre Aantal |
||
Hommes Mannen |
Femmes Vrouwen |
Total Totaal |
|
Anvers. Antwerpen | 12 822 | 11 642 | 24 464 |
Arrondissement de Bruxelles-Capitale Arrondissement Brussel-Hoofdstad | 33 523 | 30 583 | 64 106 |
Brabant flamand. Vlaams-Brabant | 4 324 | 4 481 | 8 805 |
Brabant wallon. Waals-Brabant | 1 849 | 1 874 | 3 723 |
Flandre occidentale. West-Vlaanderen | 1 918 | 2 047 | 3 965 |
Flandre orientale. Oost-Vlaanderen | 5 749 | 6 052 | 11 801 |
Hainaut. Henegouwen | 7 057 | 6 554 | 13 611 |
Liège. Luik | 6 655 | 6 213 | 12 868 |
Limbourg. Limburg | 3 313 | 4 187 | 7 500 |
Luxembourg. Luxemburg | 397 | 491 | 888 |
Namur. Namen | 1 192 | 1 171 | 2 363 |
Total. Totaal | 78 799 | 75 295 | 154 094 |
Région Gewest |
Nombre Aantal |
||
Hommes Mannen |
Femmes Vrouwen |
Total Totaal |
|
Région flamande. Vlaams gewest | 28 126 | 28 409 | 56 535 |
Région wallonne. Waals gewest | 17 150 | 16 303 | 33 453 |
Région de Bruxelles-Capitale. Brussels gewest | 33 523 | 30 583 | 64 106 |
Total. Totaal | 78 799 | 75 295 | 154 094 |
Code INS Niskode | Commune Gemeente | Nombre Aantal | ||
Hommes Mannen | Femmes Vrouwen | Total Totaal | ||
11001 | Aartselaar | 30 | 44 | 74 |
11002 | Antwerpen | 9 521 | 8 045 | 17 566 |
11004 | Boechout | 16 | 17 | 33 |
11005 | Boom | 157 | 171 | 328 |
11007 | Borsbeek | 38 | 34 | 72 |
11008 | Brasschaat | 105 | 125 | 230 |
11009 | Brecht | 19 | 27 | 46 |
11013 | Edegem | 51 | 74 | 125 |
11016 | Essen | 15 | 26 | 41 |
11018 | Hemiksem | 23 | 21 | 44 |
11021 | Hove | 12 | 15 | 27 |
11022 | Kalmthout | 17 | 23 | 40 |
11023 | Kapellen | 48 | 56 | 104 |
11024 | Kontich | 62 | 69 | 131 |
11025 | Lint | 5 | 6 | 11 |
11029 | Mortsel | 70 | 65 | 135 |
11030 | Niel | 28 | 26 | 54 |
11035 | Ranst | 19 | 20 | 39 |
11037 | Rumst | 22 | 24 | 46 |
11038 | Schelle | 14 | 16 | 30 |
11039 | Schilde | 41 | 59 | 100 |
11040 | Schoten | 101 | 105 | 206 |
11044 | Stabroek | 21 | 26 | 46 |
11050 | Wijnegem | 13 | 13 | 26 |
11052 | Wommelgem | 31 | 28 | 59 |
11053 | Wuustwezel | 17 | 28 | 45 |
11054 | Zandhoven | 10 | 18 | 28 |
11055 | Zoersel | 16 | 14 | 30 |
11056 | Zwijndrecht | 40 | 60 | 100 |
11057 | Malle | 6 | 10 | 16 |
12002 | Berlaar | 11 | 12 | 23 |
12005 | Bonheiden | 4 | 15 | 19 |
12007 | Bornem | 25 | 41 | 66 |
12009 | Duffel | 19 | 21 | 40 |
12014 | Heist-op-den-Berg | 29 | 37 | 66 |
12021 | Lier | 174 | 218 | 392 |
12025 | Mechelen | 1 069 | 1 011 | 2 080 |
12026 | Nijlen | 14 | 18 | 32 |
12029 | Putte | 22 | 20 | 42 |
12030 | Puurs | 19 | 13 | 32 |
12034 | Sint-Amands | 23 | 23 | 46 |
12035 | Sint-Katelijne-Waver | 15 | 25 | 40 |
12040 | Willebroek | 188 | 164 | 352 |
13001 | Arendonk | 5 | 10 | 15 |
13002 | Baarle-Hertog | 1 | 3 | 4 |
13003 | Balen | 10 | 21 | 31 |
13004 | Beerse | 22 | 28 | 50 |
13006 | Dessel | 13 | 13 | 26 |
13008 | Geel | 98 | 78 | 176 |
13010 | Grobbendonk | 10 | 8 | 18 |
13011 | Herentals | 54 | 67 | 121 |
13012 | Herenthout | 4 | 9 | 13 |
13013 | Herselt | 11 | 21 | 32 |
13014 | Hoogstraten | 16 | 25 | 41 |
13016 | Hulshout | 2 | 14 | 16 |
13017 | Kasterlee | 7 | 20 | 27 |
13019 | Lille | 12 | 15 | 27 |
13021 | Meerhout | 3 | 1 | 4 |
13023 | Merksplas | 15 | 5 | 20 |
13025 | Mol | 79 | 129 | 208 |
13029 | Olen | 10 | 19 | 29 |
13031 | Oud-Turnhout | 5 | 15 | 20 |
13035 | Ravels | 1 | 14 | 15 |
13036 | Retie | 0 | 4 | 4 |
13037 | Rijkevorsel | 11 | 4 | 15 |
13040 | Turnhout | 219 | 177 | 396 |
13044 | Vorselaar | 3 | 13 | 16 |
13046 | Vosselaar | 7 | 7 | 14 |
13049 | Westerlo | 12 | 26 | 38 |
13053 | Laakdal | 12 | 14 | 26 |
21001 | Anderlecht | 3 172 | 2 767 | 5 939 |
21002 | Auderghem Oudergem | 383 | 393 | 776 |
21003 | Berchem-Sainte-Agathe | 283 | 312 | 595 |
21004 | Bruxelles Brussel | 5 981 | 5 403 | 11 384 |
21005 | Etterbeek | 1 094 | 1 069 | 2 163 |
21006 | Evere | 631 | 664 | 1 295 |
21007 | Forest Vorst | 1 358 | 1 232 | 2 590 |
21008 | Ganshoren | 237 | 252 | 489 |
21009 | Ixelles Elsene | 2 936 | 2 415 | 5 351 |
21010 | Jette Jet | 821 | 794 | 1 615 |
21011 | Koekelberg | 572 | 527 | 1 099 |
21012 | Molenbeek-Saint-Jean | 4 139 | 3 619 | 7 758 |
21013 | Saint-Gilles Sint-Gillis | 1 828 | 1 540 | 3 368 |
21014 | Saint-Josse-ten-Noode | 1 646 | 1 478 | 3 124 |
21015 | Schaerbeek Schaarbeek | 5 891 | 5 339 | 11 230 |
21016 | Uccle Ukkel | 1 123 | 1 288 | 2 411 |
21017 | Watermael-Boitsfort | 254 | 283 | 537 |
21018 | Woluwe-Saint-Lambert | 703 | 690 | 1 393 |
21019 | Woluwe-Saint-Pierre | 471 | 518 | 989 |
23002 | Asse | 142 | 173 | 315 |
23003 | Beersel | 60 | 62 | 122 |
23009 | Bever | 0 | 2 | 2 |
23016 | Dilbeek | 110 | 148 | 258 |
23023 | Galmaarden | 1 | 4 | 5 |
23024 | Gooik | 2 | 6 | 8 |
23025 | Grimbergen | 158 | 192 | 350 |
23027 | Halle | 137 | 159 | 296 |
23032 | Herne | 5 | 8 | 13 |
23033 | Hoeilaart | 71 | 71 | 142 |
23038 | Kampenhout | 24 | 25 | 49 |
23039 | Kapelle-op-den-Bos | 8 | 9 | 17 |
23044 | Liedekerke | 9 | 20 | 29 |
23045 | Londerzeel | 10 | 16 | 26 |
23047 | Machelen | 95 | 124 | 219 |
23050 | Meise | 49 | 42 | 91 |
23052 | Merchtem | 26 | 29 | 55 |
23060 | Opwijk | 9 | 15 | 24 |
23062 | Overijse | 172 | 185 | 357 |
23064 | Pepingen | 1 | 2 | 3 |
23077 | Sint-Pieters-Leeuw | 154 | 141 | 295 |
23081 | Steenokkerzeel | 20 | 22 | 42 |
23086 | Ternat | 16 | 21 | 37 |
23088 | Vilvoorde | 446 | 451 | 897 |
23094 | Zaventem | 259 | 297 | 556 |
23096 | Zemst | 17 | 30 | 47 |
23097 | Roosdaal | 12 | 14 | 26 |
23098 | Drogenbos | 31 | 41 | 72 |
23099 | Kraainem | 100 | 148 | 248 |
23100 | Linkebeek | 17 | 13 | 30 |
23101 | Sint-Genesius-Rode | 167 | 153 | 320 |
23102 | Wemmel | 85 | 70 | 155 |
23103 | Wezembeek-Oppem | 85 | 91 | 176 |
23104 | Lennik | 4 | 9 | 13 |
23105 | Affligem | 6 | 14 | 20 |
24001 | Aarscho | 16 | 27 | 43 |
24007 | Begijnendijk | 3 | 5 | 8 |
24008 | Bekkevoort | 2 | 5 | 7 |
24009 | Bertem | 23 | 22 | 45 |
24011 | Bierbeek | 10 | 10 | 20 |
24014 | Boortmeerbeek | 10 | 19 | 29 |
24016 | Boutersem | 15 | 14 | 29 |
24020 | Diest | 115 | 146 | 261 |
24028 | Geetbets | 4 | 9 | 13 |
24033 | Haacht | 16 | 15 | 31 |
24038 | Herent | 21 | 42 | 63 |
24041 | Hoegaarden | 3 | 1 | 4 |
24043 | Holsbeek | 7 | 7 | 14 |
24045 | Huldenberg | 18 | 19 | 37 |
24048 | Keerbergen | 25 | 29 | 54 |
24054 | Kortenaken | 1 | 6 | 7 |
24055 | Kortenberg | 79 | 77 | 156 |
24059 | Landen | 10 | 16 | 26 |
24062 | Louvain Leuven | 1 134 | 836 | 1 970 |
24066 | Lubbeek | 4 | 11 | 15 |
24086 | Oud-Heverlee | 13 | 19 | 32 |
24094 | Rotselaar | 16 | 27 | 43 |
24104 | Tervuren | 139 | 148 | 287 |
24107 | Tirlemont Tienen | 75 | 85 | 160 |
24109 | Tremelo | 24 | 31 | 55 |
24130 | Zoutleeuw | 10 | 7 | 17 |
24133 | Linter | 3 | 6 | 9 |
24134 | Scherpenheuvel-Zichem | 14 | 24 | 38 |
24135 | Tielt-Winge | 5 | 10 | 15 |
24137 | Glabbeek | 1 | 1 | 2 |
25005 | Beauvechain | 13 | 12 | 25 |
25014 | Braine-l'Alleud | 149 | 153 | 302 |
25015 | Braine-le-Château | 19 | 21 | 40 |
25018 | Chaumont-Gistoux | 36 | 34 | 70 |
25023 | Court-Saint-Étienne | 53 | 45 | 98 |
25031 | Genappe | 41 | 51 | 92 |
25037 | Grez-Doiceau | 40 | 45 | 85 |
25043 | Incourt | 7 | 4 | 11 |
25044 | Ittre | 7 | 6 | 13 |
25048 | Jodoigne | 27 | 21 | 48 |
25050 | La Hulpe | 23 | 42 | 65 |
25068 | Mont-Saint-Guibert | 17 | 22 | 39 |
25072 | Nivelles | 93 | 92 | 185 |
25084 | Perwez | 15 | 17 | 32 |
25091 | Rixensart | 90 | 117 | 207 |
25105 | Tubize | 98 | 105 | 203 |
25107 | Villers-la-Ville | 25 | 26 | 51 |
25110 | Waterloo | 327 | 324 | 651 |
25112 | Wavre | 153 | 171 | 324 |
25117 | Chastre | 28 | 28 | 56 |
25118 | Hélécine | 2 | 5 | 7 |
25119 | Lasne | 83 | 84 | 167 |
25120 | Orp-Jauche | 5 | 11 | 16 |
25121 | Ottignies-Louvain-La-Neuve | 471 | 416 | 887 |
25122 | Ramillies | 8 | 6 | 14 |
25123 | Rebecq | 11 | 12 | 23 |
25124 | Walhain | 8 | 4 | 12 |
31003 | Beernem | 2 | 6 | 8 |
31004 | Blankenberge | 38 | 46 | 84 |
31005 | Bruges Brugge | 241 | 262 | 503 |
31066 | Damme | 7 | 5 | 12 |
31012 | Jabbeke | 9 | 13 | 22 |
31022 | Oostkamp | 14 | 19 | 33 |
31033 | Torhout | 13 | 12 | 25 |
31040 | Zedelgem | 12 | 17 | 29 |
31042 | Zuienkerke | 3 | 3 | 6 |
31043 | Knokke-Heist | 75 | 95 | 170 |
32003 | Diksmuide | 6 | 9 | 15 |
32006 | Houthulst | 3 | 1 | 4 |
32010 | Koekelare | 2 | 5 | 7 |
32011 | Kortemark | 0 | 6 | 6 |
32030 | Lo-Reninge | 2 | 0 | 2 |
33011 | Ieper | 33 | 44 | 77 |
33016 | Mesen | 2 | 3 | 5 |
33021 | Poperinge | 15 | 22 | 37 |
33029 | Wervik | 5 | 12 | 17 |
33037 | Zonnebeke | 1 | 11 | 12 |
33039 | Heuvelland | 9 | 4 | 13 |
33040 | Langemark-Poelkapelle | 0 | 1 | 1 |
33041 | Vleteren | 0 | 1 | 1 |
34002 | Anzegem | 3 | 7 | 10 |
34003 | Avelgem | 7 | 15 | 22 |
34009 | Deerlijk | 12 | 15 | 27 |
34013 | Harelbeke | 53 | 53 | 106 |
34022 | Kortriijk | 428 | 392 | 820 |
34023 | Kuurne | 29 | 23 | 52 |
34025 | Lendelede | 1 | 4 | 5 |
34027 | Menen | 72 | 63 | 135 |
34040 | Waregem | 95 | 115 | 210 |
34041 | Wevelgem | 27 | 42 | 69 |
34042 | Zwevegem | 12 | 16 | 28 |
34043 | Spiere-Helkijn | 3 | 1 | 4 |
35002 | Bredene | 12 | 28 | 40 |
35005 | Gistel | 8 | 6 | 14 |
35006 | Ichtegem | 1 | 8 | 9 |
35011 | Middelkerke | 25 | 26 | 51 |
35013 | Oostende | 269 | 248 | 517 |
35014 | Oudenburg | 3 | 8 | 11 |
35029 | De Haan | 10 | 12 | 22 |
36006 | Hooglede | 5 | 4 | 9 |
36007 | Ingelmunster | 17 | 14 | 31 |
36008 | Izegem | 30 | 24 | 54 |
36010 | Ledegem | 4 | 10 | 14 |
36011 | Lichtervelde | 2 | 9 | 11 |
36012 | Moorslede | 5 | 3 | 8 |
36015 | Roeselare | 115 | 97 | 212 |
36019 | Staden | 2 | 3 | 5 |
37002 | Dentergem | 12 | 14 | 26 |
37007 | Meulebeke | 15 | 15 | 30 |
37010 | Oostrozebeke | 9 | 9 | 18 |
37011 | Pittem | 1 | 5 | 6 |
37012 | Ruiselede | 3 | 4 | 7 |
37015 | Tielt | 39 | 34 | 73 |
37017 | Wielsbeke | 19 | 25 | 44 |
37018 | Wingene | 5 | 10 | 15 |
37020 | Ardooie | 5 | 11 | 16 |
38002 | Alveringem | 1 | 0 | 1 |
38008 | De Panne | 23 | 23 | 46 |
38014 | Koksijde | 21 | 33 | 54 |
38016 | Nieuwpoort | 17 | 14 | 31 |
38025 | Veurne | 6 | 7 | 13 |
41002 | Aalst | 230 | 287 | 517 |
41011 | Denderleeuw | 26 | 30 | 56 |
41018 | Geraardsbergen | 44 | 50 | 94 |
41024 | Haaltert | 6 | 23 | 29 |
41027 | Herzele | 7 | 6 | 13 |
41034 | Lede | 3 | 11 | 14 |
41048 | Ninove | 77 | 97 | 174 |
41063 | Sint-Lievens-Houtem | 6 | 2 | 8 |
41081 | Zottegem | 10 | 17 | 27 |
41082 | Erpe-Mere | 11 | 21 | 32 |
42003 | Berlare | 7 | 12 | 19 |
42004 | Buggenhout | 10 | 17 | 27 |
42006 | Dendermonde | 112 | 145 | 257 |
42008 | Hamme | 62 | 84 | 146 |
42010 | Laarne | 1 | 8 | 9 |
42011 | Lebbeke | 20 | 27 | 47 |
42023 | Waasmunster | 27 | 23 | 50 |
42025 | Wetteren | 49 | 67 | 116 |
42026 | Wichelen | 8 | 12 | 20 |
42028 | Zele | 163 | 189 | 352 |
43002 | Assenede | 5 | 5 | 10 |
43005 | Eeklo | 37 | 40 | 77 |
43007 | Kaprijke | 1 | 2 | 3 |
43010 | Maldegem | 8 | 9 | 17 |
43014 | Sint-Laureins | 2 | 1 | 3 |
43018 | Zelzate | 27 | 33 | 60 |
44001 | Aalter | 9 | 9 | 18 |
44011 | Deinze | 51 | 43 | 94 |
44012 | De Pinte | 5 | 10 | 15 |
44013 | Destelbergen | 24 | 18 | 42 |
44019 | Evergem | 16 | 37 | 53 |
44020 | Gavere | 7 | 8 | 15 |
44021 | Gent | 3 153 | 3 057 | 6 210 |
44029 | Knesselare | 4 | 7 | 12 |
44034 | Lochristi | 20 | 17 | 37 |
44036 | Lovendegem | 7 | 16 | 23 |
44040 | Melle | 14 | 19 | 33 |
44043 | Merelbeke | 17 | 25 | 42 |
44045 | Moerbeke | 6 | 4 | 10 |
44048 | Nazareth | 6 | 9 | 15 |
44049 | Nevele | 3 | 4 | 7 |
44052 | Oosterzele | 10 | 9 | 19 |
44064 | Sint-Martens-Latem | 10 | 12 | 22 |
44072 | Waarschoot | 8 | 9 | 17 |
44073 | Wachtebeke | 12 | 8 | 20 |
44080 | Zomergem | 0 | 4 | 4 |
44081 | Zulte | 22 | 24 | 46 |
45017 | Kruishoutem | 4 | 8 | 12 |
45035 | Oudenaarde | 42 | 44 | 86 |
45041 | Ronse | 144 | 150 | 294 |
45057 | Zingem | 4 | 3 | 7 |
45059 | Brakel | 7 | 11 | 18 |
45060 | Kluisbergen | 6 | 11 | 17 |
45061 | Wortegem-Petegem | 3 | 2 | 5 |
45062 | Horebeke | 0 | 1 | 1 |
45063 | Lierde | 5 | 6 | 11 |
45064 | Maarkedal | 3 | 2 | 5 |
56065 | Zwalm | 2 | 6 | 8 |
46003 | Beveren | 49 | 78 | 127 |
46013 | Kruibeke | 27 | 37 | 61 |
46014 | Lokeren | 478 | 476 | 954 |
46020 | Sint-Gillis-Waas | 23 | 31 | 54 |
46021 | Sint-Niklaas | 428 | 419 | 847 |
46024 | Stekene | 11 | 21 | 32 |
46025 | Temse | 150 | 182 | 332 |
51004 | Ath | 49 | 29 | 78 |
51008 | Beloeil | 20 | 16 | 36 |
51009 | Bernissart | 49 | 33 | 82 |
51012 | Brugelette | 13 | 21 | 34 |
51014 | Chièvres | 19 | 18 | 37 |
51017 | Ellezelles | 3 | 5 | 8 |
51019 | Flobecq | 3 | 2 | 5 |
51035 | Frasnes-lez-Anvaing | 4 | 3 | 7 |
52010 | Chapelle-lez-Herlaimont | 52 | 47 | 99 |
52011 | Charleroi | 2 596 | 2 96 | 4 792 |
52012 | Châtelet | 331 | 325 | 656 |
52015 | Courcelles | 171 | 171 | 342 |
52018 | Farciennes | 265 | 295 | 560 |
52021 | Fleurus | 104 | 113 | 217 |
52022 | Fontaine-l'Évêque | 91 | 87 | 178 |
52025 | Gerpinnes | 8 | 8 | 16 |
52043 | Manage | 112 | 116 | 228 |
52043 | Montigny-le-Tilleul | 16 | 19 | 35 |
52055 | Pont-à-Celles | 21 | 34 | 55 |
52063 | Seneffe | 55 | 56 | 111 |
52074 | Aiseau-Presles | 144 | 164 | 308 |
52075 | Les Bons Villers | 27 | 20 | 47 |
53014 | Boussu | 75 | 93 | 168 |
53020 | Dour | 37 | 31 | 68 |
53028 | Frameries | 57 | 66 | 123 |
53039 | Hensies | 73 | 87 | 160 |
53044 | Jurbise | 66 | 102 | 168 |
53046 | Lens | 20 | 39 | 59 |
53053 | Mons Bergen | 856 | 778 | 1 634 |
53065 | Quaregnon | 153 | 158 | 311 |
53068 | Quiévrain | 21 | 33 | 54 |
53070 | Saint-Ghislain | 72 | 67 | 139 |
53082 | Colfontaine | 100 | 108 | 208 |
53083 | Honnelles | 2 | 1 | 3 |
53084 | Quévy | 5 | 9 | 14 |
54007 | Mouscron | 107 | 110 | 217 |
54010 | Comines-Warneton | 14 | 12 | 26 |
55004 | Braine-le-Comte | 64 | 50 | 114 |
55010 | Enghien | 22 | 27 | 49 |
55022 | La Louvière | 425 | 371 | 796 |
55023 | Lessines | 23 | 33 | 56 |
55035 | Le Roeulx | 17 | 15 | 32 |
55039 | Silly | 8 | 13 | 21 |
55040 | Soignies | 92 | 89 | 181 |
55050 | Ecaussinnes | 10 | 16 | 26 |
56001 | Anderlues | 89 | 65 | 154 |
56005 | Beaumont | 3 | 1 | 4 |
56011 | Binche | 112 | 96 | 208 |
56016 | Chimay | 16 | 14 | 30 |
56022 | Erquelinnes | 9 | 5 | 14 |
56029 | Froidchapelle | 2 | 4 | 6 |
56044 | Lobbes | 5 | 8 | 13 |
56049 | Merbes-le-Château | 1 | 3 | 4 |
56051 | Momignies | 1 | 1 | 2 |
56078 | Thuin | 15 | 15 | 30 |
56085 | Estinnes | 13 | 5 | 18 |
56086 | Ham-sur-Heure-Nalinnes | 10 | 13 | 23 |
56087 | Morlanwelz | 77 | 74 | 151 |
56088 | Sivry-Rance | 2 | 2 | 4 |
57003 | Antoing | 10 | 7 | 17 |
57018 | Celles (lez-Tournai) | 3 | 0 | 3 |
57027 | Estaimpuis | 4 | 4 | 8 |
57062 | Pecq | 3 | 7 | 10 |
57064 | Péruwelz | 34 | 18 | 52 |
57072 | Rumes | 2 | 1 | 3 |
57093 | Brunehaut | 3 | 12 | 15 |
57094 | Leuze-en-Hainaut | 15 | 8 | 23 |
57095 | Mont-de-l'Enclus | 1 | 4 | 5 |
61003 | Amay | 15 | 26 | 41 |
61010 | Burdinne | 7 | 5 | 12 |
61012 | Clavier | 6 | 4 | 10 |
61019 | Ferrières | 1 | 8 | 9 |
61024 | Hamoir | 2 | 5 | 7 |
61028 | Héron | 8 | 2 | 10 |
61031 | Huy | 100 | 97 | 197 |
61039 | Marchin | 2 | 5 | 7 |
61041 | Modave | 0 | 6 | 6 |
61043 | Nandrin | 5 | 5 | 10 |
61048 | Ouffet | 1 | 1 | 2 |
61063 | Verlaine | 1 | 2 | 3 |
61068 | Villers-le-Bouillet | 6 | 3 | 9 |
61072 | Wanze | 12 | 10 | 22 |
61079 | Anthisnes | 2 | 7 | 9 |
61080 | Engis | 10 | 14 | 24 |
61081 | Tinlot | 0 | 0 | 0 |
62003 | Ans | 123 | 155 | 278 |
62006 | Awans | 4 | 12 | 16 |
62009 | Aywaille | 15 | 18 | 33 |
62011 | Bassenge | 14 | 13 | 27 |
62015 | Beyne-Heusay | 63 | 70 | 133 |
62022 | Chaudfontaine | 32 | 52 | 84 |
62026 | Comblain-au-Pont | 3 | 6 | 9 |
62027 | Dalhem | 8 | 8 | 16 |
62032 | Esneux | 16 | 17 | 33 |
62038 | Fléron | 75 | 98 | 173 |
62051 | Herstal | 272 | 286 | 558 |
62060 | Juprelle | 16 | 15 | 31 |
62063 | Liège | 3 542 | 2 742 | 6 284 |
62079 | Oupeye | 51 | 64 | 115 |
62093 | Saint-Nicolas | 173 | 213 | 386 |
62096 | Seraing | 354 | 357 | 711 |
62099 | Soumagne | 21 | 44 | 65 |
62100 | Sprimont | 8 | 10 | 18 |
62108 | Visé | 160 | 166 | 326 |
62118 | Grâce-Hollogne | 75 | 78 | 153 |
62119 | Blégny | 23 | 36 | 59 |
62120 | Flémalle | 59 | 52 | 111 |
62121 | Neupré | 12 | 16 | 28 |
62122 | Trooz | 23 | 17 | 40 |
63001 | Amel | 0 | 4 | 4 |
63003 | Aubel | 2 | 2 | 4 |
63004 | Baelen | 5 | 7 | 12 |
63012 | Büllingen | 2 | 5 | 7 |
63013 | Bütgenbach | 0 | 3 | 3 |
63020 | Dison | 137 | 152 | 289 |
63023 | Eupen | 73 | 86 | 159 |
63035 | Herve | 23 | 23 | 46 |
63038 | Jalhay | 5 | 10 | 15 |
63040 | Kelmis | 24 | 25 | 49 |
63045 | Lierneux | 5 | 6 | 11 |
63046 | Limbourg | 11 | 16 | 27 |
63048 | Lontzen | 11 | 10 | 21 |
63049 | Malmedy | 49 | 59 | 108 |
63057 | Olne | 2 | 4 | 6 |
63058 | Pepinster | 4 | 24 | 28 |
63061 | Raeren | 10 | 21 | 31 |
63067 | Sankt Vith | 12 | 18 | 30 |
63072 | Spa | 23 | 43 | 66 |
63073 | Stavelot | 10 | 9 | 19 |
63075 | Stoumont | 2 | 3 | 5 |
63076 | Theux | 7 | 16 | 23 |
63079 | Verviers | 787 | 768 | 1 555 |
63080 | Waimes | 2 | 14 | 16 |
63084 | Welkenraedt | 14 | 15 | 29 |
63086 | Trois-Ponts | 2 | 1 | 3 |
63087 | Burg-Reuland | 1 | 0 | 1 |
63088 | Plombières | 13 | 18 | 31 |
63089 | Thimister-Clermont | 5 | 1 | 6 |
64008 | Berloz | 2 | 2 | 4 |
64015 | Braives | 5 | 6 | 11 |
64021 | Crisnée | 1 | 3 | 4 |
64023 | Donceel | 1 | 1 | 2 |
64025 | Fexhe-le-Haut-Clocher | 2 | 5 | 7 |
64029 | Geer | 1 | 3 | 4 |
64034 | Hannut | 17 | 25 | 42 |
64047 | Lincent | 7 | 3 | 10 |
64056 | Oreye | 7 | 5 | 12 |
64063 | Remicourt | 2 | 5 | 7 |
64065 | Saint-Georges-sur-Meuse | 12 | 8 | 20 |
64074 | Waremme | 26 | 33 | 59 |
64075 | Wasseiges | 5 | 3 | 8 |
64076 | Faimes | 6 | 3 | 9 |
71002 | As | 8 | 16 | 24 |
71004 | Beringen | 339 | 421 | 760 |
71011 | Diepenbeek | 17 | 18 | 35 |
71016 | Genk | 788 | 1 082 | 1 870 |
71017 | Gingelom | 13 | 11 | 24 |
71020 | Halen | 13 | 16 | 29 |
71022 | Hasselt | 295 | 289 | 584 |
71024 | Herk-de-Stad | 19 | 18 | 37 |
71034 | Leopoldsburg | 97 | 105 | 202 |
71037 | Lummen | 21 | 24 | 45 |
71045 | Nieuwerkerken | 12 | 5 | 17 |
71047 | Opglabbeek | 13 | 19 | 32 |
71053 | Sint-Truiden | 145 | 123 | 268 |
71057 | Tessenderlo | 32 | 41 | 73 |
71066 | Zonhoven | 24 | 49 | 73 |
71067 | Zutendaal | 7 | 12 | 19 |
71069 | Ham | 31 | 33 | 64 |
71070 | Heusden-Zolder | 347 | 450 | 797 |
72003 | Bocholt | 5 | 16 | 21 |
72004 | Bree | 25 | 26 | 51 |
72018 | Kinrooi | 8 | 15 | 23 |
72020 | Lommel | 64 | 88 | 152 |
72021 | Maaseik | 53 | 59 | 112 |
72025 | Neerpelt | 23 | 29 | 52 |
72029 | Overpelt | 18 | 26 | 44 |
72030 | Peer | 16 | 31 | 47 |
72037 | Hamont-Achel | 21 | 23 | 44 |
72038 | Hechtel-Eksel | 17 | 20 | 37 |
72039 | Houthalen-Helchteren | 292 | 347 | 639 |
72040 | Meeuwen-Gruitrode | 7 | 14 | 21 |
72041 | Dilsen-Stokkem | 55 | 86 | 144 |
73001 | Alken | 15 | 19 | 34 |
73006 | Bilzen | 55 | 86 | 141 |
73009 | Borgloon | 20 | 21 | 41 |
73022 | Heers | 3 | 2 | 5 |
73028 | Herstappe | 0 | 0 | 0 |
73032 | Hoeselt | 1 | 8 | 9 |
73040 | Kortegem | 4 | 14 | 18 |
73042 | Lanaken | 32 | 24 | 56 |
73066 | Riemst | 8 | 21 | 29 |
73083 | Tongres Tongeren | 55 | 40 | 95 |
73098 | Wellen | 6 | 7 | 13 |
73107 | Maasmechelen | 285 | 425 | 710 |
73109 | Voeren | 4 | 5 | 9 |
81001 | Arlon Aarlen | 83 | 68 | 151 |
81003 | Attert | 2 | 6 | 8 |
81004 | Aubange | 23 | 34 | 57 |
81013 | Martelange | 1 | 5 | 6 |
81015 | Messancy | 4 | 7 | 11 |
82003 | Bastogne Bastenaken | 47 | 60 | 107 |
82005 | Bertogne | 1 | 0 | 1 |
82009 | Fauvillers | 2 | 3 | 5 |
82014 | Houffalize | 3 | 6 | 9 |
82032 | Vielsam | 7 | 14 | 21 |
82036 | Vaux-sur-Sûre | 2 | 2 | 4 |
82037 | Gouvy | 4 | 6 | 10 |
82038 | Sainte-Ode | 0 | 1 | 1 |
83012 | Durbuy | 15 | 14 | 29 |
83013 | Erezée | 2 | 5 | 7 |
83028 | Hotton | 3 | 3 | 6 |
83031 | La Roche-en-Ardenne | 8 | 11 | 19 |
83034 | Marche-en-Famenne | 50 | 58 | 108 |
83040 | Nassogne | 3 | 2 | 5 |
83044 | Rendeux | 2 | 4 | 6 |
83049 | Tenneville | 2 | 1 | 3 |
83055 | Manhay | 2 | 2 | 4 |
84009 | Bertrix | 13 | 17 | 30 |
84010 | Bouillon | 8 | 11 | 19 |
84016 | Daverdisse | 2 | 1 | 3 |
84029 | Herbeumont | 2 | 5 | 7 |
84033 | Léglise | 3 | 3 | 6 |
84035 | Libin | 1 | 3 | 4 |
84043 | Neufchâteau | 7 | 14 | 21 |
84050 | Paliseul | 5 | 3 | 8 |
84059 | Saint-Hubert | 9 | 11 | 20 |
84068 | Tellin | 0 | 2 | 2 |
84075 | Wellin | 1 | 5 | 6 |
84077 | Libramont-Chevigny | 15 | 16 | 31 |
85007 | Ciny | 6 | 9 | 15 |
85009 | Etalle | 5 | 4 | 9 |
85011 | Florenville | 9 | 8 | 17 |
85024 | Meix-devant-Virton | 4 | 6 | 10 |
85026 | Musson | 3 | 6 | 9 |
85034 | Saint-Léger | 2 | 4 | 6 |
85039 | Tintigny | 2 | 4 | 6 |
85045 | Virton | 29 | 34 | 63 |
85046 | Habay | 5 | 10 | 15 |
85047 | Rouvroy | 0 | 3 | 3 |
91005 | Anhée | 8 | 10 | 18 |
91013 | Beauraing | 2 | 11 | 13 |
91015 | Bièvre | 0 | 3 | 3 |
91030 | Ciney | 26 | 25 | 51 |
91034 | Dinant | 26 | 29 | 55 |
91054 | Gedinne | 0 | 2 | 2 |
91059 | Hamois | 2 | 6 | 8 |
91064 | Havelange | 7 | 5 | 12 |
91072 | Houyet | 3 | 4 | 7 |
91103 | Onhaye | 0 | 2 | 2 |
91114 | Rochefort | 19 | 16 | 35 |
91120 | Somme-Leuze | 3 | 4 | 7 |
91141 | Yvoir | 6 | 8 | 14 |
91142 | Hastière | 12 | 9 | 21 |
91143 | Vresse-sur-Semois | 9 | 9 | 18 |
92003 | Andenne | 51 | 63 | 114 |
92006 | Assesse | 4 | 4 | 8 |
92035 | Eghezée | 12 | 20 | 32 |
92045 | Floreffe | 5 | 8 | 13 |
92048 | Fosses-la-Ville | 7 | 6 | 13 |
92054 | Gesves | 5 | 6 | 11 |
92087 | Mettet | 4 | 8 | 12 |
92094 | Namur Namen | 704 | 661 | 1 365 |
92097 | Ohey | 4 | 4 | 8 |
92101 | Profondeville | 5 | 14 | 19 |
92114 | Sombreffe | 9 | 7 | 16 |
92137 | Sambreville | 78 | 77 | 155 |
92138 | Fernelmont | 6 | 6 | 12 |
92140 | Jemette-sur-Sambre | 13 | 17 | 30 |
92141 | La Bruyère | 5 | 7 | 12 |
92142 | Gembloux | 86 | 63 | 149 |
93010 | Cerfontaine | 4 | 3 | 7 |
93014 | Couvin | 19 | 19 | 38 |
93018 | Doische | 0 | 1 | 1 |
93022 | Florennes | 20 | 14 | 34 |
93056 | Philippeville | 7 | 8 | 15 |
93088 | Walcourt | 16 | 7 | 23 |
93090 | Viroinval | 5 | 5 | 10 |
(1) La commission a demandé à disposer de ces chiffres et les a fait figurer a l'annexe I au présent rapport.
(2) Voir l'annexe I.
(3) Doc. Chambre, 1970-1971, nº 936/1, p. 1.
(4) Ibidem p. 2.
(5) Ibidem p. 2.
(6) Doc. Chambre, 1971-1972, nº 182/1, p. 1.
(7) D. Jacobs, « Nieuwkomers in de politiek. Het parlementair debat omtrent kiesrecht voor vreemdelingen in Nederland en België (1970-1977) », Gand : Academia Press, 1998, , p. 156.
(8) Doc. Chambre, SE 1974, nº 65/1, p. 2.
(9) Doc. Chambre, 1975-1976, nº 842/3.
(10) Doc. Chambre, 1975-1976, nº 842/1, p. 36.
(11) Il convient de noter que M. Levaux, qui était un des coauteurs de l'amendement et avait demandé qu'il soit mis aux votes, s'est lui aussi abstenu.
(12) D. Jacobs, o.c., p. 158.
(13) Doc Sénat, 1987-1988, nº 647/2, p. 7.
(14) Annales Sénat, 1987-1988, p. 138.
(15) D. Jacobs, o.c., p. 173.
(16) D. Jacobs, o.c., p. 174.
(17) D. Jacobs, o.c., p. 178.
(18) D. Jacobs, o.c., p. 183.
(19) Markant, 16 décembre 1993, cité par D. Jacobs, o.c., p. 185.
(20) Doc. Sénat, 1993-1994, nº 866/1, p. 5.
(21) D. Jacobs, o.c., p. 194.
(22) Annales Chambre, 1996-1997, p. 2241.
(23) Annales Chambre, 1996-1997, o.c., 277,9.
(24) D. Jacobs, o.c., p. 196.
(25) D. Jacobs, o.c., p. 197.
(26) Doc. Parlement flamand, 1996-1997, 575/1,2.
(27) Le membre du VLD André Deneys déclara, lui aussi, que la parlementaire d'Agalev avait commis l'erreur de « lier cette motion à la tragédie qui avait frappé la famille Benaïssa, ce qui est perçu comme une manoeuvre artificielle et constitue en fait un usage abusif de motions justifiées » (soulignage par le Vlaams Blok) (Compte rendu analytique, Parlement flamand, 1996-1997, nº 33, 19).
(28) Doc. Parlement flamand, 1996-1997, 576/1,2.
(29) D. Jacobs, o.c., p. 199.
(30) D. Jacobs, o.c., p. 201.
(31) Le Soir, 14 mars 1998, cité par D. Jacobs, o.c., p. 203.
(32) Le Soir, 21 mars 1998, cité par D. Jacobs, o.c., p. 240.
(33) Doc. Chambre, 1995-1996, 354/14, p. 1.
(34) W. Somers (Groupe VB de la Chambre), « Standpunten politieke partijen over het migrantenstemrecht », 30 novembre 2001.
(35) M. Deweerdt « Overzicht van het Belgisch politiek gebeuren in 1999 », Res Publica, 2000, (167-246), p. 206.
(36) « Om de integratie van vreemdelingen te bevorderen, zou de nationaliteitswetgeving versoepeld worden. De asielprocedure zou vereenvoudigd en ingekort worden. Uitgeprocedeerde asielzoekers en andere illegale vreemdelingen zouden onder bepaalde voorwaarden hun verblijf kunnen regulariseren », dans : M. Deweerdt, op. cit., p. 192.
(37) M. Deweerdt, op. cit., p. 207.
(38) M. Deweerdt, « Overzicht van het Belgische politiek gebeuren in 2000 », « Res Publica », 2001, (215-315), p. 234.
(39) Doc. Chambre, 2000-2001, nº 917/1.
(40) Doc. Chambre, 2000-2001, nº 548/2, 1.
(41) L'obligation selon laquelle il doit s'agir d'une période de résidence légale n'apparaît cependant qu'une seule fois dans les développements de la proposition de loi Decroly-Talhaoui, et non dans le texte proprement dit de la modification légale proposée [S. Bouckaert, « Het parlementaire denkwerk over het nieuwe nationaliteitsrecht », in : M.-C. Foblets, R. Foqué et M. Verwilghen, « Naar de Belgische nationaliteit/Devenir belge », Bruxelles : Bruylant, 2002, (187-242), p. 229].
(42) Doc. Chambre, 2000-2001, nº 916/1.
(43) Doc. Chambre, 2000-2001, nº 587/2.
(44) M.-C. Foblets, « Een nieuw nationaliteitsrecht ? Enkele besluiten », in : M.-C. Foblets, R. Foqué en M. Verwilghen, o.c., (531-578), p. 575.
(45) Doc. Sénat, 2000-2001, 880/2.
(46) De Crem rejette l'idée que celui qui paie des impôts en Belgique a le droit de voter : « Payer l'impôt signifie engager une relation de service : on reçoit gratuitement un certain nombre de services dans le pays. Cela n'a rien à voir avec le vote. » Il affirme que les Flamands ne sont pas favorables au droit de vote des étrangers (« De Standaard Online », 29 décembre 2001).
(47) Dewael cité dans « De Morgen », 18 octobre 2001.
(48) M. Deweerdt, l.c., p. 182.
(49) »De Morgen », 19 novembre 2001.
(50) « Gazet van Antwerpen », 22 novembre 2001.
(51) « Het Nieuwsblad », 15 décembre 2001.
(52) « De Morgen », 28 novembre 2001.
(53) http ://www. Vlaamsblokvlaamsparlement.org/heetvande naald121.html
(54) Parlement flamand, Compte rendu analytique, nº 20, 20 décembre 2001, pp. 7-8.
(55) Cité dans « De Morgen », 29 août 2003.
(56) « Het Volk », 14 mars 2002.
(57) « Le droit de vote reste en tout cas lié à la nationalité », dans « Contract met de burger », approuvé par le congrès du VLD le 29 mars 2003, et plus particulièrement les pp. 19 à 21 (IV. Société, intégration et bonne administration). Au cours de la compétition électorale, Patrick Dewael déclara que le droit de vote des étrangers ne passerait jamais si le VLD était au gouvernement (« Het Nieuwsblad » du 30 août 2003).
(58) Ce passage figure au chapitre « Une administration de meilleure qualité » de l'accord de gouvernement intitulé « Une Belgique créative et solidaire. Du souffle pour le pays », 10 juillet 2003.
(59) Elle part du principe que les étrangers qui résident depuis trois ans au moins sur le territoire belge peuvent voter et être élus « Financieel-Economische Tijd », du 30 août 2003).
(60) Ce texte mentionne un délai de cinq ans (« De Morgen », du 29 août 2003). Dans les deux propositions du SP.A, il est prévu que tous les étrangers qui ont le droit de vote sont appelés à s'inscrire au registre de la population, ce qui leur permet d'exercer leur droit de vote. L'inscription se fait sur une base volontaire.
(61) Luc Van der Kelen, rédacteur en chef du « Laatste Nieuws », voit un lien entre cette condition et la vague de chaleur qui frappe le pays : « C'est ridicule, dit le ministre VLD Vanhengel. Il a raison. Ne doivent-ils peut-être pas respecter les lois maintenant, sous prétexte qu'ils n'ont pas le droit de vote ? Apparemment, la chaleur n'est pas favorable à la faculté de penser. » (traduction) (« Het Laatste Nieuws » du 30 août 2003). Joëlle Milquet aussi se pose des questions quant à cette condition : « Quant à la condition de s'engager à respecter la Constitution et les lois belges, cela paraît pour le moins superflu. Les droits et les devoirs sont les mêmes pour tout le monde, Belges comme résidants étrangers » (La Libre Belgique du 30 août 2003).
(62) La Libre Belgique, 30 août 2003.
(63) « De Standaard », 29 août 2003 ainsi que Het Nieuwsblad, 29 août 2003.
(64) D. Jacobs, « Stemrecht, nationale identiteit en diversiteit », dans : « Samenleving en politiek », mars 2001, (31-38), pp. 37-38.
(65) « Gazet van Antwerpen », 30 août 2003.
(66) Interview de Karel De Gucht dans « Het Laatste Nieuws », (11 septembre 2003).
(67) « De Nieuwe Gazet » du 19 septembre 2003.
(68) « De Morgen » du 19 septembre 2003.
(69) « Gazet van Antwerpen » du 22 septembre 2003.
(70) Interview dans « De Standaard » du 22 septembre 2003.
(71) « De Morgen » du 27 septembre 2003.
(72) « De Morgen » du 29 septembre 2003.
(73) « Het Nieuwblad » du 29 septembre 2003.
(74) « De Standaard » du 29 septembre 2003.
(75) « De Morgen » du 6 octobre 2003.
(76) « De Standaard », du 6 octobre 2003.
(77) M.-C. Floblets, « Een nieuw nationaliteitsrecht ? De wet van 1 maart 2000 tot wijziging van een aantal bepalingen betreffende de Belgische nationaliteit », « Rechtskundig Weekblad », 31 mars 2001, (1145-1161), p. 1153.
(78) Il suffit de faire référence à la loi relative à la procédure accélérée de naturalisation du VLD qui permet à des centaines de milliers d'étrangers de participer aux élections à tous les niveaux sans que ces derniers ne doivent faire preuve de la moindre volonté d'intégration.
(79) Le N-VA évite lui aussi les déclarations sur l'octroi du droit de vote aux étrangers. Le parti affirme uniquement que les immigrés qui s'intègrent dans un délai raisonnable peuvent acquérir un droit de résidence durable et éventuellement la nationalité.
(80) Comme l'affirme M. De Gucht dans l'interview qu'il a accordée au « Het Laatste Nieuws » (11 septembre 2003).