(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais
Dans une monarchie constitutionnelle, les dispositions relatives à la famille royale régnante sont souvent précisées de manière circonstanciée dans la Constitution. Chez nous également, la Constitution prévoit un certain nombre de solutions aux problèmes qui pourraient surgir (par exemple la régence ou l'inoccupation du trône). Néanmoins, il subsiste un certain nombre d'imprécisions qui ne poseront peut-être problème que dans des cas exceptionnels, mais qui méritent cependant qu'on les examine de manière préalable et que l'on y apporte, le cas échéant, une solution. C'est pourquoi je souhaiterais que l'honorable ministre communique son point de vue sur les questions suivantes :
1. L'article 98 de la Constitution prévoit qu'aucun membre de la famille royale ne peut devenir ministre. Il s'agit bien sûr d'une situation exceptionnelle, mais le constituant a introduit ici (involontairement ?) la notion de « famille royale ». Quelles sont les personnes qui font partie de la famille royale ?
2. Alors qu'aux Pays-Bas, la loi définit avec précision qui fait partie de la famille royale, il n'existe rien de tel en Belgique. L'honorable ministre voit-il la nécessité dans notre pays que cette question soit également précisée par la loi, étant donné que d'autres lois et arrêtés utilisent cette notion pour l'octroi de certains privilèges ?
3. Étant donné que jusqu'il y a peu, seuls les hommes étaient autorisés à succéder, il était de tradition de donner à l'épouse du souverain le titre de « Reine ». Il n'est pas improbable que dans une des générations suivantes, notre chef d'État soit une femme. Son époux recevra-t-il alors le titre de « Roi » ? Ou celui de « Prince consort » ? Ne créerait-on pas ainsi une discrimination ? Quelles en sont les conséquences pour la terminologie à utiliser dans les lois et les arrêtés ?
4. Seuls les « enfants du Roi » peuvent devenir sénateur de droit à partir de l'âge de 18 ans (avec droit de vote à partir de 21 ans). Il ressort des travaux parlementaires relatifs à l'article 72 de la Constitution que d'aucuns estimaient que cette disposition devait être interprétée en ce sens qu'elle vise également les petits-enfants du Roi. La question pourrait se poser dès 2004, date à laquelle un petit-fils du Roi atteindra l'âge de la majorité. Qui, dans ce cas, pourra trancher la question de savoir si le prince en question est autorisé à siéger au Sénat ? Le gouvernement prendra-t-il une initiative législative à ce propos pour préciser la situation ou sera-ce le Sénat lui-même qui, par analogie avec la vérification des pouvoirs, sera amené à prendre une décision ?
5. Pour la première fois depuis la naissance de la Belgique, nous nous trouvons dans une situation où nous avons plus d'un sénateur de droit. Qu'advient-il des autres sénateurs de droit lorsque le successeur du Roi accédera au trône ? Seront-ils réputés avoir démissionné d'office ou resteront-ils en fonction ? De quelles autres modalités faut-il tenir compte ?
6. L'honorable ministre ne trouve-t-il pas nécessaire, au vu de ces questions, de réfléchir sérieusement au rôle de la Maison royale dans notre régime constitutionnel ?
Réponse : 1. L'article 98 de la Constitution (l'ancien article 87 de la Constitution du 7 février 1831) n'a jamais été modifié jusqu'à ce jour. Cet article fut inscrit dans la Constitution de 1831, le Roi Guillaume Ier ayant nommé ses deux fils ministre (respectivement de la Guerre et des Colonies), nomination considérée par l'« opinion publique » de cette époque comme un abus de pouvoir.
La notion de « famille royale » utilisée par le constituant de 1831 dans l'article 98 (actuel) de la Constitution doit à mon avis être lue dans l'esprit de l'époque et, eu égard au rôle de la femme dans la première moitié du XIXe siècle (où il était impensable qu'une femme devienne ministre), il y a lieu d'entendre par cette notion, la « parenté masculine » (fère, fils, petit-fils) du Roi.
La notion de « famille royale » a bien sûr évolué depuis 1831. Font actuellement partie de la Famille royale :
S.M. le Roi Albert;
S.M. la Reine Paola;
LL.AA.RR. le Prince Philippe et la Princesse Mathilde;
S.A.R. la Reine Fabiola;
S.A.R. la Princesse Astrid, son époux et ses enfants;
S.A.R. le Prince Laurent.
2. Non.
3. Il est effectivement possible que le Chef de l'État soit une femme à l'avenir. Tant que ce n'est pas le cas, la discussion est menée à un niveau sémantique.
De toute façon, la notion de « Roi » doit être considérée au niveau du contenu comme « Chef de l'État », qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme.
4. L'article 72 de la Constitution vise clairement et exclusivement les « enfants du Roi ». Par conséquent, aucune initiative législative ne s'impose afin d'apporter des précisions sur une matière déjà réglée par la Constitution.
5. Même réponse que sous le point 4.
6. Le rôle de la monarchie dans le cadre de notre système constitutionnel relève par excellence de la coutume constitutionnelle, qui est par définition « évolutive ».
À travers notre histoire, nos institutions y compris la monarchie ont également évolué dans le cadre des grands changements sociaux, tout en veillant à garantir la continuité de notre système politique.
Le fonctionnement de la monarchie et la définition de la fonction royale ont fait l'objet depuis 1830 d'une énorme évolution et, sans me vanter de vouloir ou de pouvoir prédire l'avenir, je suis convaincu qu'à l'avenir la monarchie évoluera également en fonction des besoins de la société.