2-177/1 (Sénat)
0284/001 (Chambre)

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Sénat et Chambre des Représentants de Belgique

SESSION DE 1999-2000

1er MARS 2000


La Conférence intergouver- nementale de 2000 sur la réforme institutionnelle de l'Union européenne : contexte, enjeu et perspectives


RAPPORT INTERIMAIRE

FAIT AU NOM DU COMITÉ D'AVIS FÉDÉRAL CHARGÉ DES QUESTIONS EUROPÉENNES (1)

PAR MMES LALOY (S), MOERMAN (Ch) ET
VAN LANCKER (PE)


SOMMAIRE


  1. La position du Gouvernement belge
  2. Le rapport du groupe d'experts à la Commission européenne sur les implications institutionnelles de l'élargissement
  3. Le Conseil européen d'Helsinki (les 10 et 11 décembre 1999)
  4. La table ronde sur la CIG au Parlement européen (le 1er février 2000)
    Annexes

AVANT-PROPOS

La dernière conférence intergouvernementale (CIG) qui commença en mars 1996, fut conclue en juin 1997 par la signature du traité d'Amsterdam. Dans son évaluation, le Comité d'avis a regretté que la conférence ait résulté en une amélioration trop timide des traités européens (1). En ce qui concerne les réformes institutionnelles notamment, le Comité d'avis a estimé que « le résultat de cette conférence ne prépare pas suffisamment l'Union à son prochain élargissement aux pays d'Europe centrale et orientale ». Le Comité d'avis avait dès lors soutenu l'attitude du gouvernement belge, qui, avec l'Italie et la France, avait fait insérer une Déclaration soulignant que « sur la base des résultats de la CIG, le traité ne répond pas à la nécessité, réaffirmée au Conseil européen de Madrid, de progrès substantiels dans la voie du renforcement des institutions ».

Conformément aux conclusions de la présidence des Conseils européens de Cologne et d'Helsinki, une conférence des représentants des gouvernements des États membres a été convoquée le 14 février 2000. Cette conférence doit résoudre les questions institutionnelles qui n'ont pas été réglées à Amsterdam et qui doivent l'être avant l'élargissement. Elle pourra aussi traiter d'autres modifications à apporter au traité, dans la mesure où elles concernent les institutions européennes dans le cadre de la tâche susmentionnée et où elles découlent de la mise en ouvre du traité d'Amsterdam. D'ici décembre 2000, la CIG devrait achever ces travaux.

Comme tout au long de la précédente CIG, le Comité d'avis suivra attentivement l'évolution des négociations. Lors de sa réunion du 4 octobre 1999 un premier échange de vues a eu lieu avec M. Louis Michel, ministre des Affaires étrangères, concernant la concertation Benelux en préparation de la conférence intergouvernementale. Le 9 novembre 1999, les membres ont eu un échange de vues avec M. Jean-Luc Dehaene, concernant son rapport à la Commission européenne sur les implications institutionnelles de l'élargissement. En outre, M. Guy Verhofstadt, premier ministre, a participé les 7 et 14 décembre 1999 à un échange de vues avec les membres du Comité d'avis sur les résultats du sommet du Benelux du 6 décembre et sur l'ordre du jour et les résultats du Conseil européen d'Helsinki (les 10 et 11 décembre 1999). Au moment où s'ouvre la Conférence intergouvernementale, nous avons voulu, dans un premier rapport, retracer les activités parlementaires relatives à la CIG qui se sont déroulées au sein du Comité d'avis. Le présent rapport intérimaire esquisse le contexte, l'enjeu et les perspectives de la réforme institutionnelle de l'Union européenne.

I. LA POSITION DU GOUVERNEMENT BELGE

1. Exposé de M. Louis Michel, vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères

Dans la perspective de la concertation Benelux sur la conférence intergouvernementale (CIG) et du prochain Conseil européen d'Helsinki, M. Michel tient à exposer au Parlement le point de vue du gouvernement belge en la matière (2).

Le Conseil européen d'Helsinki traitera de deux thèmes importants :

· la préparation de la CIG, qui devra procéder aux réformes institutionnelles nécessaires à un fonctionnement efficace de l'UE après l'élargissement;

· l'élargissement imminent de l'Union européenne.

Ces deux thèmes sont étroitement liés : l'élargissement ne pourra avoir lieu qu'après la réalisation de réformes institutionnelles.

Un protocole annexé au traité d'Amsterdam prévoit qu'après le prochain élargissement, chaque État membre ne pourra plus désigner qu'un seul membre de la Commission européenne. Il faudra simultanément adapter la pondération des voix au sein du Conseil (en faveur des grands États membres). Conjointement avec l'Italie et la France, la Belgique a fait inscrire dans ce protocole une déclaration qui souligne la nécessité de multiplier sensiblement les cas dans lesquels une décision doit être prise à la majorité qualifiée au sein du Conseil. Ces trois éléments (composition de la Commission, multiplication des votes à la majorité qualifiée, adaptation de la pondération des voix au sein du Conseil) constituent ce que l'on a appelé les reliquats (left-over) d'Amsterdam.

Conformément à l'accord de gouvernement du 7 juillet 1999, le gouvernement belge adoptera la position suivante :

· il se prononcera pour le maintien d'au moins un commissaire par État membre;

· en ce qui concerne la pondération des voix, deux formules sont envisageables. Adapter le nombre de voix par État membre en faveur des grands États, ou instituer un mode de scrutin à double majorité, qui ajoute au système de vote à la majorité qualifiée tel qu'il est pratiqué, un système de vote sur la base de la population des États membres. Il se prononcera pour la seconde formule qui traduit au mieux le caractère démocratique du processus décisionnel européen;

· l'extension du vote à la majorité qualifiée : le gouvernement estime que les matières constitutionnelles et quasi-constitutionnelles doivent rester soumises au vote à l'unanimité. Par contre, le gouvernement s'efforcera de faire en sorte qu'en matière de fonctionnement de l'Union, de l'UEM et du marché intérieur (politiques sociale, fiscale, de l'environnement), le vote à la majorité qualifiée soit introduit. Toutefois, la création d'une nouvelle forme d'impôt au niveau européen devrait être décidée à l'unanimité.

Cependant, la Belgique souhaite aller plus loin que les trois reliquats d'Amsterdam. Comme la prochaine CIG sera plus que probablement la dernière avant le premier élargissement, la Belgique plaide pour que cette CIG traite aussi de la responsabilité individuelle des commissaires et de la coopération renforcée (notamment l'assouplissement des conditionsde mise en oeuvre).

À propos de l'élargissement, le gouvernement belge estime qu'il ne faut prévoir aucune date limite d'adhésion pour ce qui est des six pays avec lesquels des négociations d'adhésion sont en cours (l'Estonie, la Pologne, la Tchéquie, la Hongrie, la Slovénie et Chypre). En ce qui concerne les autres pays candidats (la Lettonie, la Lituanie, la Slovaquie, la Bulgarie, la Roumanie et Malte), M. Michel estime souhaitable d'ouvrir des négociations d'adhésion en se basant sur le rapport régulier de la Commission évaluant les progrès accomplis par les pays candidats. Il convient d'offrir à la Turquie une perspective européenne qui l'incite à aller de l'avant sur la voie de la démocratisation et du respect des droits de l'homme et des droits des minorités.

2. Échange de vues

M. Mark Eyskens (Chambre) demande si l'on ne peut pas, sans pour autant basculer dans un système d'Europe à la carte, recourir à une formule d'adhésion partielle de ces nouveaux pays candidats étant donné qu'ils auront besoin, dans certains domaines politiques, d'une période transitoire considérable. Cette formule permettrait d'associer pleinement tous les pays au processus de prise de décisions politiques, étant entendu que, dans les domaines économique, financier et monétaire, ils participeraient, certes, à la préparation des décisions (decision shaping) mais non pas à la prise de décision proprement dite (decision making).

En matière de fiscalité, il est nécessaire d'instituer le vote à la majorité qualifiée si l'on veut aboutir à une harmonisation fiscale ou parafiscale.

L'intervenant ajoute que les commissaires européens ne représentent pas les États membres qui les ont désignés. Les grands États membres n'accepteront toutefois pas de ne pouvoir désigner qu'un seul commissaire comme les petits États membres. Ne pourrait-on pas envisager un système de « circonscription », dans lequel un groupe d'États membres désignerait un commissaire commun (cf. le FMI) ? Il convient néanmoins de tenir compte en l'espèce de toutes les institutions, de sorte que chaque État membre soit représenté au sein d'au moins une institution européenne.

En ce qui concerne la pondération des voix, l'intervenant trouve que le système de double majorité proposé est trop complexe et qu'il favorise les grands États membres. Et, que faire en ce qui concerne la Turquie, qui adhérera à terme et qui deviendrait du même coup un poids lourd politique ? Le représentant propose dès lors de ne pas toucher au système de pondération actuel et de se contenter de relever le seuil requis pour atteindre une majorité qualifiée (l'on pourrait prévoir des seuils différents suivant les matières), en vue de prévenir la marginalisation des grands États membres.

En ce qui concerne le problème institutionnel, M. Philippe Monfils (Sénat) soutient la position du gouvernement, à savoir un commissaire par État membre. Il est néanmoins d'avis que l'on pourrait constituer une sorte de cabinet restreint, composé de commissaires, et y ajouter des commissaires secrétaires d'État. Un problème supplémentaire se pose pour le Parlement européen. Suite à l'élargissement, les pays membres actuels auront moins de députés européens et l'on devra revoir la distribution des sièges belges à la proportionnelle. Il faut alors veiller à ce que notre pays ait assez de sièges pour éviter que certains partis ne puissent plus êtres représentés au Parlement européen.

Le sénateur fait remarquer que pour l'instant la politique intérieure et de sécurité commune confine au néant. Il faudrait que l'on avance dans ce domaine (par exemple rendre opérationnel Europol).

Enfin, M. Monfils estime que l'entrée dans l'Union européenne n'est pas une solution pour ces pays européens qui ont des problèmes internes. Il ne faut pas perdre de vue les critères de Copenhague. Certains envisagent la candidature de l'Ukraine; toutefois, il est nécessaire de préserver les équilibres géopolitiques et culturels de l'Europe. En ce qui concerne Chypre, le membre souligne que l'entrée de ce pays dans l'UE ne peut pas être liée aux avancées dans les négociations avec la Turquie.

Selon M. Erik Derycke (Chambre), la prochaine CIG aura un très grand impact sur le régime politique interne de la Belgique. Il se demande cependant si les grands États membres perçoivent les choses de la même manière. Apparemment, l'élargissement prime à leurs yeux. Ils ont une autre vision de l'évolution de l'Europe que nous, qui tendons vers un modèle d'intégration forte. Cette divergence de vues influencera également la concertation au sein du Benelux.

L'intervenant demande par ailleurs quel est le type d'intégration que l'on souhaite réaliser dans l'Union européenne. Un système équilibré autorisant une Europe à géométrie variable offrirait bien des possibilités.

Il se réjouit également que la présidence belge abordera la question de la fiscalité. Il rappelle, toutefois, que, pour le Parlement, la fiscalité relative à l'épargne, la fiscalité relative aux entreprises et la fiscalité relative à l'environnement forment un concept indivisible, alors que le gouvernement est partisan de la prise de décisions à la majorité qualifiée pour ce qui est de la fiscalité relative à l'épargne et aux entreprises et du maintien de la règle de l'unanimité pour ce qui est des décisions relatives à des impôts nouveaux, y compris dans le domaine environnemental.

Pour ce qui est de l'élargissement, l'intervenant est partisan du « modèle de l'orange » en ce qui concerne non seulement le rythme et le degré d'intégration au sein de l'Union, mais aussi l'élargissement.

Pour ce qui est de la candidature de la Turquie, M. Derycke souscrit au point de vue du ministre. La Belgique devrait aussi pouvoir prendre des initiatives concernant les centaines de millions qui sont bloqués dans le cadre de l'union douanière.

Selon M. Paul Galand (Sénat), Écolo a été déçu par le contenu du Traité d'Amsterdam, mais aussi par le processus lui-même, qui a laissé peu de place au débat parlementaire. Il souhaite que les parlements et les citoyens soient davantage impliqués dans les discussions lors de la prochaine CIG.

Le sénateur insiste aussi pour que l'on mette l'accent, dans les négociations relatives à l'élargissement, sur le respect des droits des minorités. Il se dit partisan d'une consultation a priori des parlements et du vote à la majorité qualifiée.

Mme Fientje Moerman (Chambre) estime que l'idée d'organiser une concertation au sein du Benelux est positive. Les Néerlandais se sont toutefois considéré souvent comme les plus petits des grands et non pas comme les plus grands des petits. Il faudra donc que la concertation au sein du Benelux soit à la fois étroite et constante. L'intervenante se réjouit que le gouvernement belge souhaite examiner d'autres questions que les reliquats d'Amsterdam (notamment l'inscription du principe de la responsabilité individuelle des commissaires dans les traités et de mesures en vue de renforcer la coopération). Il y a lieu d'aborder aussi d'urgence d'autres matières importantes comme :

· l'intégration du troisième pilier dans le premier pilier;

· l'élaboration d'une politique étrangère et de défense efficace;

· l'extension du contrôle démocratique à certaines institutions qui ont un grand pouvoir de décision et qui sont encore insuffisamment contrôlées (Europol, la BCE);

· la restitution de certaines compétences aux États membres, en application du principe de subsidiarité;

· les efforts à accomplir pour arriver à ce que les citoyens adoptent une attitude plus favorable à l'Europe et, plus précisément, les mesures en vue de conférer une clarté constitutionnelle aux textes des traités, la consultation de la population sur les résultats de la modification des traités, l'approbation de ladite modification par le Parlement européen et la simplification des procédures législatives.

Pour ce qui est de la réforme de la Commission, Mme Moerman estime qu'il faut respecter le principe selon lequel chaque pays fournit un commissaire.

Au sujet de la composition du Parlement européen, la question se pose de savoir si l'on va s'attaquer dès à présent au problème du nombre de membres ou si l'on va attendre la première vague d'adhésion pour le faire. Comment va-t-on compenser au niveau du Conseil, l'application plus stricte du principe de la proportionnalité au sein du Parlement, si l'on décide de l'imposer : va-t-on organiser la représentation de la population au sein de celui-là et donner plus de poids aux États au sein de celui-ci ?

Concernant le problème des langues, le membre estime que toutes les langues doivent être considérées comme des langues officielles. Le vrai problème est celui des langues de travail.

M. Philippe Mahoux (Sénat) a l'impression que l'attitude des autres États membres est comparable à une sinusoïde : à certains moments ils freinent, à d'autres, ils accélèrent. La Belgique, par contre, a adopté une attitude assez constante : elle considère qu'un approfondissement préalable est nécessaire.

Le membre fait observer que certains éléments de la CIG sont liés à l'élargissement, d'autres non. En d'autres termes, si la composition de la Commission a un rapport direct avec l'élargissement, la pondération des voix au Conseil, le recours à la majorité qualifiée et la nationalité des commissaires en sont indépendants.

Par ailleurs, le membre estime que l'harmonisation fiscale et sociale est un thème important qui risque d'être relégué au second plan si on ne le traite pas avant l'élargissement. Il faut un phasage entre les réformes institutionnelles et les réformes fiscales et sociales.

En ce qui concerne le nombre de commissaires, M. Mahoux plaide pour que notre pays ait une présence au sein de la Commission, quel que soit le nombre d'États dans l'Union. Pour ce qui du vote à la majorité qualifiée, il souhaite qu'on puisse y avoir recours sur le plan fiscal et social. Cependant, plus les domaines qui font l'objet de cette majorité sont nombreux, moins la voix de pays comme le nôtre sera entendue. Il faut donc faire avancer l'Union dans ces domaines tout en ne négligeant pas les intérêts des petits pays.

M. Francis Van den Eynde (Chambre) se réjouit que la Belgique défendra le principe suivant lequel toutes les langues de l'Union sont des langues officielles. Quant aux langues de travail, il estime que plus il y en aura, mieux cela vaudra.

L'intervenant pose une série de questions au sujet de la position du gouvernement belge vis-à-vis de la Turquie : la Turquie a-t-elle fait des progrès pour ce qui est du respect des droits de l'homme; la Turquie continuera-t-elle à adopter une attitude plus souple vis-à-vis de la Grèce ? Il rappelle par ailleurs que les Turcs continuent à nier le génocide des Arméniens et que leur attitude vis-à-vis des Kurdes est tout sauf conforme au principe du respect des droits de l'homme. Voilà toute une série de raisons qui justifient à elles seules un grand scepticisme en la matière. Il ajoute que la Turquie n'est pas une région européenne et souligne que l'on risquerait d'avoir à faire face à un afflux d'immigrants au cas où ce pays adhérerait à l'UE.

M. Mohamed Daïf (Sénat) déclare approuver le point de vue du ministre concernant l'harmonisation fiscale et sociale, surtout au regard du taux de chômage en Europe. Le membre souhaite en outre savoir si l'élargissement aura une influence sur les relations avec les pays qui ont des accords de coopération avec l'Union européenne, comme les pays du Maghreb ou Israël.

En ce qui concerne le nombre de commissaires, M. Karel Pinxten (Chambre) déclare que comme tout le monde reconnaît la grande importance de la Commission européenne, il conçoit difficilement que notre pays ne soit pas représenté en son sein.

En ce qui concerne la pondération des voix, il estime que l'on doit dégager un compromis sur le poids à donner à chaque État membre en cas de vote à la majorité qualifiée. À son avis, le recours au vote à la majorité qualifiée n'est même pas encore une chose qui va de soi aujourd'hui, puisque la plupart des décisions importantes sont à l'unanimité. Il serait d'ailleurs intéressant de savoir dans combien de cas les « quatre grands » se trouvent isolés. Cela leur arrive très rarement selon lui.

M. Pinxten estime en outre que l'on doit profiter de la pression que l'Union subit du dehors pour lier la question de l'amélioration du processus décisionnel à la question de l'élargissement de l'Union.

Réponses du ministre
des Affaires étrangères

M. Louis Michel est d'accord avec M. Eyskens quand celui-ci propose un partenariat partiel avec certains pays qui ne répondent pas encore aux critères de Copenhague, mais il souligne qu'il faut veiller à la cohérence de l'Union. L'on pourrait envisager pareille coopération en ce qui concerne la lutte contre la criminalité.

Pour ce qui est du nombre de commissaires, la Belgique a opté pour une position de principe consistant à réclamer un commissaire par pays. Le ministre a l'impression que ces dernières années, les grands pays ont tendance à prendre les décisions entre eux. Le problème pourrait être résolu par la création d'un Bureau. L'on évolue en tout cas vers un renforcement du pouvoir de la présidence.

À propos de la majorité qualifiée et de la pondération des voix au Conseil, le ministre estime que les propositions des membres font partie des solutions possibles.

En ce qui concerne la concertation au sein du Benelux, M. Michel constate qu'il y a des divergences de vues entre le premier ministre des Pays-Bas et son ministre des Affaires étrangères. Il faut tenter de dégager un point de vue commun avec nos partenaires, mais sans payer pour cela un prix trop élevé et en gardant une certaine marge de manoeuvre.

Le ministre a l'impression que les grands États membres considèrent que l'élargissement prime la réforme institutionnelle. L'élargissement est un concept à géométrie variable qu'ils utilisent au gré de leurs intérêts. Notre pays doit forcer la conjonction des deux débats. Il ne faudrait pas non plus, par ailleurs, que le débat sur l'élargissement occulte celui sur la nécessaire convergence sociale et fiscale au sein de l'Union.

M. Michel estime qu'il serait utile de coordonner les divers traités pour en améliorer la lisibilité, mais il faut éviter de parler de « Constitution » car ce mot pourrait effrayer certains pays. Les conseillers de M. Prodi vont d'ailleurs proposer une remise en ordre des textes.

En ce qui concerne les propositions des membres et les négociations elles-mêmes, le ministre estime que notre pays ne doit pas mettre la barre trop haut. Lancer une offensive ambitieuse sans avoir les moyens de la faire passer serait inutile. Le simple fait d'exiger que le débat sur l'élargissement soit lié au débat institutionnel est déjà très ambitieux.

Le ministre a procédé à des démarches bilatérales pour faire partager notre point de vue par les autres pays. À Helsinki, il va falloir se battre pour forcer le débat sur les réformes institutionnelles et pour déterminer un calendrier.

Quant au cas de la Turquie, M. Michel estime qu'il ne faut pas exagérer le statut de candidat de ce pays. Le problème est que l'on est pris entre le marteau et l'enclume : si l'on décide que la Turquie ne mérite pas le statut de candidat, l'on ferme toute perspective et l'on sanctionne dramatiquement toutes les forces qui, en Turquie, tentent de faire émerger l'État de droit, d'oeuvrer en faveur des droits de l'homme et de la démocratie. Le ministre des Affaires étrangères pense donc qu'il faut à la fois laisser la perspective d'adhésion ouverte et aider ce genre de pays à accélérer leur remise à niveau. Il approuverait la création de partenariats circonstanciels (une sorte de coopération renforcée extérieure) avec ces pays, afin de créer une culture de respect des droits de l'homme, notamment.

Au sujet des langues de travail, le ministre défendra l'emploi du néerlandais si l'on devait accepter l'allemand et l'espagnol comme nouvelles langues de travail. Par conséquent, soit l'on conserve les deux langues de travail actuelles, soit toutes les langues de l'Union deviennent des langues de travail.

Répliques des membres

M. Monfils souhaite rappeler au ministre des Affaires étrangères de ne pas oublier Chypre et lui signaler qu'il aura probablement un débat sur l'incidence financière de l'élargissement ainsi qu'une décision entre le Royaume-Uni et l'Allemagne sur leur contribution au financement de l'Union.

En ce qui concerne les langues de travail au sein de l'Union, M. Van den Eynde estime que rien ne peut justifier que l'on discrimine l'allemand ou l'espagnol par rapport au français ou à l'anglais étant donné qu'il y a davantage de germanophones que de francophones en Europe. Il ne voit pas pourquoi, au cas où lesdites langues deviendraient des langues de travail, le néerlandais ne pourrait pas devenir lui aussi une langue de travail. En ce qui concerne la Turquie, il lui semble que le raisonnement du ministre est applicable à tous les pays du monde. Selon la logique de celui-ci, le fait que l'on ne prenne plus de mesures contre des pays qui violent les droits de l'homme, s'explique par la crainte que l'on a d'affaiblir les forces démocratiques présentes dans ces pays.

Mme Moerman souhaite réitérer sa question relative à l'organisation éventuelle d'un référendum à propos des résultats des négociations.

Le ministre des Affaires étrangères répond qu'il n'est pas opposé à la tenue d'un référendum, mais qu'il connaît les risques de la chose.

II. RAPPORT DU GROUPE D'EXPERTS

1. Exposé de M. Jean-Luc Dehaene sur son rapport à la Commission européenne portant sur les implications institutionnelles de l'élargissement

M. Dehaene se réjouit de l'intérêt que suscite le rapport qu'il a rédigé conjointement avec M. Von Weizsäcker et Lord Simon. Il espère que ce rapport pourra servir de base aux débats qui seront menés au Parlement européen et dans les parlements nationaux au sujet des implications institutionnelles que l'élargissement aura pour l'Union européenne.

Pour ce qui est du contenu du rapport, l'intervenant renvoie au texte de celui-ci (3). Il souhaite toutefois mettre en lumière un certain nombre d'aspects du rapport, afin d'en préciser la portée.

Dès avant sa nomination officielle, le président de la Commission européenne, M. Prodi, avait déclaré qu'il était nécessaire, eu égard à l'ampleur du prochain élargissement, de procéder à une réforme des institutions européennes plus approfondie qu'on ne l'avait décidé lors du Conseil européen de Cologne (4). Afin de préparer l'avis de la Commission européenne concernant la réforme institutionnelle, M. Prodi avait chargé un groupe restreint de trois experts de rédiger un rapport avançant les arguments pour justifier cette approche plus large.

Dès le début, le groupe d'experts a procédé à deux choix fondamentaux : d'une part, les membres se limiteraient aux problèmes institutionnnels, d'autre part, ils souhaitaient, malgré leurs insistances sur l'élargissement de l'ordre du jour, maintenir le calendrier de la nouvelle conférence intergouvernementale, comme l'avait arrêté le Conseil européen de Cologne (à savoir, dépôt des conclusions fin 2000).

Pour entamer ses travaux, le groupe est parti de la constatation qu'au cours de la CIG précédente, qui a abouti au Traité d'Amsterdam, les membres du Conseil européen étaient conscients du fait que l'élargissement impliquait également des réformes au sein de l'Union même. Cette nécessité a été clairement soulignée dans le protocole sur les institutions dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne, et dans la déclaration en la matière de la Belgique, de la France et de l'Italie, lesquels ont été annexés au Traité d'Amsterdam. Le protocole prévoyait notamment une réforme en deux étapes. Le groupe estime toutefois que cette démarche n'est plus réaliste dans les circonstances actuelles. Il est en effet probable que déjà le premier train d'élargissement porte le nombre de membres de l'Union européenne à vingt ou davantage, ce qui aura pour conséquence que la première phase, prévue par le protocole, sera dépassée. Aussi le groupe estime-t-il qu'il vaudrait mieux s'occuper dès maintenant de l'ensemble des problèmes concernant la réforme institutionnelle (aussi bien les aspects qui nécessitent des modifications du traité que ceux qui ne les nécessitent pas).

Un des points délicats est le lien qui existe entre la réforme et l'élargissement. M. Dehaene peut se rallier, en soi, à l'affirmation selon laquelle la réforme institutionnelle doit avoir lieu avant l'élargissement. Il est toutefois illusoire de subordonner formellement l'élargissement à la réforme. Dès la conclusion des négociations d'adhésion menées avec un certain nombre de pays candidats, personne ne pourra plus empêcher ces pays d'adhérer effectivement à l'Union européenne. Il s'agit donc, pour l'Union européenne, d'avoir terminé le volet « réforme des institutions » avant la conclusion des premières négociations d'adhésion. Si cette réforme ne devait pas être prête en temps voulu, l'Union européenne courrait de grands risques.

L'intervenant signale incidemment qu'il faudra aussi adapter le cadre financier, tel qu'il est prévu dans l'Agenda 2000.

Le groupe d'experts a également fait un certain nombre de propositions en vue d'améliorer la transparence des traités.

On plaide, dans le rapport lui-même, pour une approche globale de la réforme institutionnelle. En effet, si on touche à un seul aspect de l'architecture institutionnelle, cela aura automatiquement des conséquences pour les autres aspects.

Le groupe d'experts souligne, pour l'ensemble des institutions, quatre éléments :

1. La Commission : un petit pays comme la Belgique a tout intérêt à préserver le rôle de la Commission. En termes d'efficacité, un nombre limité de commissaires est préférable. Cette position n'a toutefois pas été adoptée, parce qu'elle n'a aucune chance de réussir d'un point de vue politique. Le principe d'un seul commissaire par État membre continue donc à être défendu dans le rapport, à condition toutefois que les commissaires fonctionnent d'une manière véritablement autonome par rapport à leur pays d'origine et que le rôle et l'autorité du président de la Commission soient renforcés, afin de préserver la force de frappe de l'institution (M. Von Weizsäcker a même parler d'instaurer un régime présidentiel).

2. La prise de décision à la majorité devrait devenir la règle au sein du Conseil. Plus il y a d'États membres représentés au Conseil, plus il sera difficile d'arriver à une décision (unanime). La prise de décision à la majorité permet d'ailleurs d'arriver plus facilement à un consensus : comme chaque État membre sait qu'il ne peut pas bloquer une procédure en opposant son veto, les consultations se font d'une manière plus constructive.

3. En ce qui concerne les matières relevant du premier pilier (matières communautaires de nature socio-économique, comme l'UEM et les discussions commerciales en matière de biens, qui ont lieu au sein de l'OMC) l'Union européenne doit agir de façon unanime et uniforme à l'égard du monde extérieur.

4. À la lumière de l'élargissement, l'intégration nécessite davantage de flexibilité. Il est nécessaire d'appliquer plus souplement la coopération renforcée telle qu'elle est prévue par le Traité d'Amsterdam; à défaut d'application souple, les pays qui souhaitent malgré tout coopérer le feront en dehors du cadre de l'Union.

Pour ce qui est de la méthode de travail, le groupe d'experts propose d'utiliser ce qu'on appelle la méthode communautaire : au début de la conférence intergouvernementale, la Commission, qui y a d'ailleurs droit, dépose une proposition de base globale, élaborée après consultation des autres institutions communautaires. Cette proposition pourrait ensuite servir de base aux discussions, afin que celles-ci puissent être menées efficacement.

Le groupe d'experts a également fait une autre proposition, dont les conséquences institutionnelles peuvent aller très loin, et dans laquelle on ferait une distinction, dans le traité, entre les dispositions fondamentales (dispositions « constitutionnelles »), d'une part, et les dispositions techniques, d'autre part. Cette distinction n'a pas été faite dans le passé, ce qui fait qu'un certain nombre de modalités de nature purement exécutive figurent également dans les traités. Toutefois, si on souhaite changer ces dispositions techniques, on doit passer par une procédure très lourde pour modifier les traités. Si on procède à la distinction proposée, seules les dispositions « constitutionnelles » devraient encore être modifiées par une révision des traités. Les dispositions plus techniques pourraient alors être adaptées par le biais des procédures communautaires plus souples.

En guise d'exemple, M. Dehaene cite l'insertion dans le traité UE, par le Traité d'Amsterdam, de l'emploi comme un des objectifs de l'Union. Au même moment, on a adopté le système des plans d'action pour l'emploi et les lignes directrices pour l'emploi, qui sont établis chaque année. On a constaté par la suite que ce système n'était ni assez souple ni assez efficace, et devait donc être changé. Ce changement n'est toutefois possible que par une modification des traités, ce qui n'est pas faisable en pratique.

La scission des traités est bien entendu une opération importante. À la demande du Parlement européen, l'Institut universitaire européen de Florence a déjà accompli un travail considérable en la matière. Les experts proposent donc que la Commission confie à cet institut la tâche d'élaborer une proposition de base. Il s'agirait d'une opération neutre, à caractère technique, ce qui signifie qu'on va simplement scinder les traités existants sans y ajouter d'éléments nouveaux. Le débat serait dès lors limité aux aspects techniques, ce qui, de l'avis du groupe, mettrait en exergue le sens et l'utilité de l'opération.

Le dernier point souligné par le groupe d'experts concerne la politique de défense. Bien que cette question ne fasse pas partie de leur mission, les trois membres du groupe soulignent les évolutions qui se sont fait jour récemment dans ce domaine (entre autres les décisions du Conseil européen de Cologne qui définissent les principes fondamentaux de la future politique de défense de l'UE). Les experts n'estiment pas nécessaire de modifier les traités pour mettre en oeuvre cette politique de défense. Cependant on pourrait profiter de la prochaine CIG pour aborder également la question de ladite politique.

La remise du rapport à M. Prodi, qui a eu lieu le 18 octobre 1999, a mis fin à la mission du groupe d'experts. Le 10 novembre, la Commission arrêtera sa position au sujet de la CIG. Le Conseil européen d'Helsinki sera la prochaine étape. On y décidera concrètement comment faire en sorte que la CIG produise des résultats avant la fin de l'an 2000.

2. Exposé de M. Guy Verhofstadt, premier ministre, sur la position du gouvernement belge

Le prochain Conseil européen d'Helsinki (10 et 11 décembre 1999) définira le cadre dans lequel auront lieu les discussions sur la conférence intergouvernementale qui sera organisée dans le courant de l'année 2000. Pour préparer ce sommet, les chefs de gouvernement du Bénélux se réuniront le 6 décembre prochain et tenteront d'élaborer un mémorandum commun sur la CIG.

En ce qui concerne la position belge, le premier ministre souligne les points suivants.

1. Le rapport rédigé par le groupe d'experts, à la demande de la Commission européenne, constitue une excellente base pour les négociations sur les réformes institutionnelles qui s'imposent. Le gouvernement souscrit au point de départ adopté par le groupe, à savoir qu'une réforme institutionnelle en deux temps n'a plus de sens.

2. Le gouvernement adhère également à l'opinion du groupe suivant laquelle une CIG large et globale est nécessaire avant de procéder effectivement à l'élargissement. La Commission européenne est d'ailleurs du même avis : comme elle prévoit que les premières adhésions auront lieu en l'an 2002 ou 2003, et comme la CIG sera clôturée à la fin de l'an 2000, il restera suffisamment de temps pour faire ratifier les résultats de la Conférence par les États membres.

3. Le gouvernement belge approuve également la suggestion qu'a émise le groupe d'experts et qui est de réaménager les textes des traités et de distinguer entre, d'une part, un traité de base et, d'autre part, un autre texte qui contiendrait les dispositions relatives aux domaines politiques spécifiques. Ce réaménagement pourrait aussi faciliter le débat sur le développement de la pratique du vote à la majorité qualifiée, en ce sens que l'on pourrait généraliser l'application de ce processus décisionnel dans le deuxième texte. On conserverait alors la règle de l'unanimité pour le traité de base.

4. Chaque État membre a droit à un membre au moins de la Commission européenne.

5. Pour ce qui est de la nouvelle pondération des voix au sein du Conseil, on avance deux possibilités : ou bien on applique une pondération favorable aux grands États membres, ou bien on instaure le vote à la double majorité (majorité qualifiée actuelle couplée à une majorité de la population de l'Union européenne). D'une manière générale, la première possibilité profiterait aux grands États membres, car les États membres plus modestes verraient leur poids relatif diminuer. C'est la raison pour laquelle la Belgique est favorable à la deuxième possibilité qui a l'avantage de conserver la pondération actuelle, tout en renforçant l'influence des grands États membres.

6. Il est souhaitable de généraliser le vote à la majorité qualifiée. Le premier ministre apporte toutefois un certain nombre de nuances. La règle de l'unanimité doit être conservée pour les matières constitutionnelles et certaines matières quasi-constitutionnelles (emploi des langues, siège des institutions). En tout cas, il faudrait instaurer la majorité qualifiée pour le marché interne, l'UEM, les questions sociales et fiscales et la politique en matière d'environnement.

7. Outre les reliquats d'Amsterdam (composition de la Commission, utilisation accrue de la majorité qualifiée au sein du Conseil, nouvelle pondération des voix au Conseil), le gouvernement souhaite que les éléments suivants soient également abordés par la CIG : renforcement du rôle du président de la Commission, révision du fonctionnement de la Commission, instauration de la responsabilité individuelle des commissaires, assouplissement des dispositions relatives à la coopération renforcée.

En ce qui concerne ce dernier point, il va de soi que plus l'Union compte de membres, plus l'importance de cette coopération renforcée croît. Si l'on veut mieux exploiter les possibilités de cette forme d'intégration, il faudra en assouplir les conditions d'application. M. Verhofstadt demande donc que l'on ouvre la possibilité d'une coopération renforcée lorsqu'une majorité des États membres y donnent leur assentiment et que huit États membres au moins y prennent effectivement part (au lieu d'exiger une majorité des États membres comme c'est le cas actuellement).

8. Pour conclure, M. Verhofstadt émet encore quelques observations au sujet de l'élargissement :

­ nécessité de procéder au préalable à une réforme institutionnelle;

­ pas de classement des États candidats en groupes;

­ ouverture de négociations relatives à l'adhésion avec les autres candidats;

­ adhésion effective dès qu'un candidat remplit toutes les conditions;

­ octroi du statut d'État candidat à la Turquie, mais les critères de Copenhague doivent être remplis avant d'entamer les négociations effectives.

3. Échange de vues

En ce qui concerne la réforme du mode de décision au sein du Conseil, M. Eyskens (Chambre) estime qu'outre les deux variantes citées par le premier ministre, une troisième variante mérite qu'on s'y arrête. Cette variante consisterait à ne pas toucher à la pondération des voix au sein du Conseil, mais à rehausser le seuil de la majorité qualifiée (en le faisant passer de 71 % à 75 % ou même à 80 %). L'on pourrait même utiliser des seuils variables en fonction de la matière traitée. Cette formule offre l'avantage de ne nécessiter qu'une intervention relativement simple, qui accroît légèrement l'influence des grands États membres tout en ne touchant pas à la pondération, ce qui permet d'éviter des négociations complexes et difficiles.

Le membre demande par ailleurs si les pays qui constituent le noyau de l'Union européenne, à savoir les États membres de l'UEM, ne doivent pas s'atteler à mettre en place un processus de décision réellement commun. M. Eyskens renvoie au système en vigueur au sein de l'Espace économique européen, dans lequel les États qui ne sont pas membres de l'UE participent à la préparation de la désicion (« decision-shaping »), tandis que seuls les 15 États membres de l'Union européenne participent à la prise de décision (« decision-making »). L'UEM doit être le moteur de l'intégration européenne, faute de quoi on risque d'assister à la dissolution de l'Union.

M. Van der Maelen (Chambre) craint que l'on ne parvienne qu'à une réforme minimale de l'Union. Il demande si l'on ne pourrait pas examiner comment atténuer les effets négatifs de l'élargissement que nous redoutons. L'inévitable élargissement pourrait alors avoir lieu, mais son incidence sur les institutions et la politique de l'UE serait limitée. Le membre estime par ailleurs que le renforcement de la coopération peut offrir une bonne planche de salut. Il faut cependant veiller à ne pas retomber dans la technique néfaste de la non-participation (opt-out), qui a déjà conduit par le passé à des distorsions de la concurrence. Ne pourrait-on pas créer des corbeilles, des ensembles de domaines politiques qui feraient l'objet d'une coopération renforcée ? On pourrait ainsi éviter de voir se développer une Europe à la carte. Il faudra cependant toujours veiller à ce que les États membres qui ne participent pas à la coopération renforcée puissent y adhérer dans une phase ultérieure, lorsqu'ils y seront prêts ou qu'ils le souhaiteront.

Mme Moerman (Chambre) croit pouvoir inférer de la note gouvernementale que le point de vue de la Belgique concernant l'élargissement ­ pas de dates prévues pour l'élargissement ­ ne correspond pas à la vision de la Commission, qui considère que l'Union européenne doit être prête dès 2002 à accueillir les premiers adhérents. Jusqu'où le gouvernement ira-t-il pour défendre son point de vue ? Le point de vue de la Commission n'hypothèque-t-il pas la prochaine CIG ?

L'intervenante se félicite du passage du rapport du groupe d'experts soulignant la nécessité de renouveler le contact avec le citoyen. Elle partage en outre l'opinion du groupe d'experts lorsque celui-ci affirme qu'il faut réfléchir sur ce que seront à terme les frontières géographiques de l'Union, mais elle déplore que cette réflexion soit remise aux calendes grecques. Le gouvernement ne pourrait-il pas entamer un vaste débat sur cette problématique, par exemple par voie de référendum ?

La proposition du groupe d'experts visant à diviser en deux parties les textes actuels des traités est qualifiée de très intéressante par Mme Moerman. La deuxième partie serait soumise au processus de décision communautaire normal (majorité qualifiée au Conseil et assentiment du Parlement européen). Mais quel est le rôle réservé au Parlement européen pour les textes relevant de la première partie ?

Mme Nagy (Sénat) salue l'approche positive dont témoignent les deux documents. Face à la volonté d'élargissement et à son caractère inéluctable, il s'impose d'adapter les structures et le fonctionnement des institutions de manière que l'élargissement puisse se faire dans les meilleurs conditions.

De plus, il ne faut pas oublier l'harmonisation fiscale et parafiscale si l'on veut faire de l'UEM un instrument efficace pour permettre à l'Union européenne notamment de faire face à la mondialisation.

Le membre apprécie la mention qui est faite de la nécessité de renforcer le lien entre le citoyen et les institutions européennes. Étant donné que le Parlement européen représente ces citoyens au niveau de l'Union, n'y aurait-il pas lieu de renforcer la fonction législative de cette institution (par l'extension de la procédure de codécision) ?

Enfin, Mme Nagy qualifie de très utile la mention, qui est faite dans le rapport du groupe d'experts de la convergence temporelle, entre les réformes nécessaires en matière de politique de défense et la CIG. Il est grand temps que l'Union européenne joue un rôle significatif dans le domaine de la politique étrangère et de la politique de défense afin d'éviter une répétition du scénario malheureux auquel on a assisté durant la crise récente du Kosovo.

Mme Kestelijn-Sierens (Sénat) se réjouit du plaidoyer du groupe d'experts en faveur d'une plus grande transparence et d'une plus grande clarté pour ce qui est des institutions européennes. Elle soutient également le principe d'un commissaire par État, mais demande si l'idée de nommer des secrétaires d'État européens est encore à l'ordre du jour.

Le Traité d'Amsterdam limite à 700 le nombre de membres du Parlement européen. Cela veut dire que l'élargissement fera perdre plusieurs sièges aux États membres actuels. La question de la redistribution du nombre de sièges par pays au Parlement européen doit être tranchée le plus rapidement possible.

De plus, le membre est favorable à ce que l'on intègre dans le texte des traités la charte des droits fondamentaux qui doit encore être élaborée. Elle demande que le gouvernement défende également ce point. Enfin, Mme Kestelijn-Sierens forme le voeu que le Parlement européen soit associé pleinement à la prochaine CIG.

M. Tastenhoye (Chambre) est d'avis que le débat sur l'avenir de l'intégration européenne est mené d'une manière surréaliste. À l'heure actuelle, la discussion porte surtout sur le nombre de membres que comptera la Commission et sur le nombre de voix auquel chaque État membre aura droit, alors que le débat de fond sur l'objectif final de l'Union européenne (fédération, confédération, Europe des Régions, États unis d'Europe, etc.) n'a pas lieu.

L'intervenant appuie la proposition d'une préopinante en faveur de la tenue d'une consultation populaire sur ce problème. D'après lui, cela pourrait résorber le déficit démocratique existant. Toutefois, la proposition visant à scinder les textes du traité ne ferait qu'aggraver la confusion parmi les citoyens. Par ailleurs, l'intervenant doute du caractère nécessaire et certain de l'élargissement. Celui-ci est possible, mais sous certaines conditions. C'est ainsi qu'il ne peut pas se réduire à une politique d'expansion de l'Europe occidentale vers l'est. Pour le reste, il convient de prévenir les risques de délocalisation d'entreprises vers de nouveaux États membres et l'apparition de flux migratoires d'est en ouest causés par les différences de salaires et de niveaux de bien-être. C'est pourquoi le représentant plaide pour une limitation de la libre circulation des personnes au sein de l'Union jusqu'à ce que les niveaux de bien-être soient devenus équivalents dans les futurs et actuels États membres. À cet effet, il convient d'élaborer un plan Marshall européen pour les États candidats à l'adhésion d'Europe de l'Est.

Enfin, l'intervenant s'oppose à l'octroi à la Turquie du statut d'État candidat à l'adhésion.

Répliques

En réponse aux questions et observations des membres, M. Dehaene affirme que le groupe d'experts est parti du principe que l'élargissement est un processus irréversible. Dès qu'un État candidat à l'adhésion remplit toutes les conditions et que les négociations sont clôturées, l'Union ne peut plus politiquement différer l'adhésion de ce pays, parce que l'Union européenne elle-même ne serait pas prête à le faire. Selon lui, ce serait une erreur de préconiser des dates d'adhésion. Ce qui doit être déterminant, ce sont les efforts que les candidats s'imposent pour atteindre un degré suffisant de préparation à l'adhésion.

L'intervenant ajoute que l'élargissement constitue la réponse adéquate pour mettre un terme aux différences de bien-être entre l'Union européenne et les candidats et ainsi prévenir des flux migratoires. Il faut pourtant être conscient de l'hétérogénéité croissante que l'élargissement entraînera sur le plan économique. Cela nécessite une plus grande flexibilité au sein de l'Union (cf. les formes de coopération renforcée). Par ailleurs, le sénateur considère que les nouveaux États membres n'adhéreront pas immédiatement à l'UEM. Parmi les conditions d'adhésion à l'union monétaire, il faudra introduire, en plus des critères de Maastricht, un critère supplémentaire de niveau de vie. À l'époque des négociations sur le traité de Maastricht, ce critère de niveau de vie existait implicitement. La réponse à cette condition implicite a été la mise de fonds de cohésion à la disposition des régions les moins prospères. Après le prochain élargissement, cette condition devra être remise sur le tapis d'une manière plus explicite.

L'élément essentiel de l'approfondissement est l'UEM. Celle-ci constitue un puissant moteur d'intégration et oblige les États membres à continuer d'aller de l'avant (y compris sur les plans social et fiscal, par exemple). D'où, aussi, la nécessité de procédures décisionnelles et d'institutions efficaces (cf. la réforme des institutions). L'UEM, qui est une forme de coopération renforcée, permet également l'élargissement.

Le groupe a éludé le débat sur la question de savoir si le Parlement européen doit être associé à une modification du traité, par le biais de la scission proposée des textes du traité. Dans la pratique, l'influence du Parlement européen s'en trouverait encore renforcée, étant donné que dans la deuxième partie, la généralisation du vote à la majorité qualifiée irait de pair avec la généralisation de la codécision par le Parlement européen. En outre, pour le traité de base, les parlements nationaux demeuraient seuls compétents par le biais de la procédure de ratification.

En ce qui concerne la charte des droits fondamentaux, l'approche proposée par le groupe est la même que pour la défense : si les négociations sur la charte sont conclues à la fin de l'an 2000, il pourra en être tenu compte à la fin de la CIG.

Pour ce qui est des institutions, il faut veiller à maintenir l'équilibre qui existe entre elles. La position de la Commission européenne, qui est la seule véritable institution communautaire, ne peut en tout cas pas être affaiblie.

Le problème des limites géographiques de l'Europe est déjà posé par la candidature de la Turquie. Le débat, qui, bien entendu, est délicat, ne peut toutefois pas se fonder uniquement sur des éléments purement géographiques (cf. le soutien au processus de démocratisation en Turquie). Il conviendra également de mettre sur pied une sorte de coopération renforcée, de construire des relations spéciales avec les futurs pays voisins de l'Union élargie.

M. Verhofstadt regrette qu'à l'heure où l'on commémore la chute du mur de Berlin, des voix s'élèvent encore pour que l'on érige de nouveaux murs à l'intérieur et autour de l'Europe. Il faut quand même se rendre compte que l'élargissement est non seulement nécessaire, mais même souhaitable. Et ce, pas seulement sur la base de considérations économiques. On doit être bien conscient de la solidarité culturelle et géopolitique qui unit tous les pays européens. L'élargissement peut aussi tisser des liens nouveaux entre les plus petits États membres. En outre, il tiendra lieu d'accélérateur pour amener la CIG à une conclusion positive.

Le premier ministre est plutôt hostile à la proposition d'un membre visant à instituer différents niveaux de majorité qualifiée. Chaque pays exigera, pour les matières qu'il juge importantes, un seuil aussi élevé que possible. Il est plus important d'assouplir les possibilités de coopération renforcée pour faire contrepoids à l'élargissement.

En ce qui concerne la Turquie, M. Verhofstadt répète que les négociations d'adhésion ne pourront s'ouvrir que lorsque ce pays satisfera aux critères de Copenhague.

Quant à la tenue d'un référendum, le premier ministre précise qu'elle doit être précédée de la création d'un cadre légal et qu'elle ne pourra se faire qu'à l'initiative de la population.

Le premier ministre conclut en disant que la présente note gouvernementale reflète exclusivement le point de vue du gouvernement fédéral. Il n'empêche qu'il y a une concertation permanente avec les autorités des communautés et des régions concernant des domaines politiques concrets et que le gouvernement fédéral est, lui aussi, attentif à la problématique du développement des régions en Europe.

III. LE CONSEIL EUROPÉEN D'HELSINKI

(10 et 11 décembre 1999)

A. PRÉBRIEFING CONCERNANT LES RÉSULTATS DU SOMMET DU BENELUX ET L'ORDRE DU JOUR DU CONSEIL EUROPÉEN D'HELSINKI

1. Exposé de M. Guy Verhofstadt, Premier ministre

a) Un mémorandum commun (5) a été rédigé lors du dernier sommet du Benelux, le 6 décembre 1999, en vue du prochain sommet européen d'Helsinki. Le premier ministre précise que ce document doit être lu conjointement avec le point de vue du gouvernement belge en la matière. En ce qui concerne le contenu du mémorandum, il renvoie au texte proprement dit. Il souhaite néanmoins donner quelques explications supplémentaires sur un certain nombre d'éléments.

Tous les partenaires du Benelux s'accordent sur le principe du maintien d'un commissaire par État membre.

La prochaine CIG doit avoir un ordre du jour à part entière et ne peut donc simplement se limiter à ce qu'on a appelé les « reliquats » d'Amsterdam (modification de la taille et de la composition de la Commission européenne, révision de la pondération des voix au sein du Conseil, extension du recours au vote à la majorité qualifiée du Conseil). Cela ne coule toutefois pas de source. La CIG devrait s'achever à la fin de l'an 2000, sous la présidence française. Toutefois, afin d'assurer un épilogue heureux de la conférence, la présidence française ne veut pas surcharger l'ordre du jour. Le gouvernement belge, au contraire, estime que si l'on veut faire de l'élargissement un succès, il faut réformer les institutions plus en profondeur. En termes de calendrier, cette stratégie présuppose ce qui suit : fin 2000, la CIG devrait se conclure par un nouveau traité; les procédures de ratification devraient aboutir au plus tard en 2002, de sorte que les premiers nouveaux États membres puissent être accueillis dès la fin de 2002.

Outre les « reliquats » d'Amsterdam, l'ordre du jour de la CIG devrait être complété par les éléments suivants :

­ le renforcement de l'autorité et du rôle du président de la Commission européenne, notamment quant à la responsabilité individuelle des commissaires;

­ des mesures visant à accroître l'efficacité de la Cour de justice, de la Cour des comptes et du Comité des régions;

­ l'extension de la codécision (pour laquelle il faut tenir compte du plafond de 700 membres du Parlement européen);

­ l'assouplissement des conditions relatives à la mise en oeuvre de la coopération renforcée;

­ les résultats des travaux relatifs à la dimension de défense européenne, pour autant que des modifications doivent être apportées au traité.

En outre, la CIG devrait se pencher sur la scission des traités en deux parties : une partie constitutionnelle regroupant les dispositions de base et une partie complémentaire (dans laquelle on ferait également la distinction entre les matières qui requièrent l'unanimité et celles pour lesquelles une majorité qualifiée suffirait).

Ce point est traité un peu séparément parce que le Premier ministre se rend compte que cette revendication ne bénéficie pas d'un large soutien et n'est pas essentielle à la réussite de l'élargissement.

Parmi cet éventail d'ajouts aux « reliquats » d'Amsterdam, il en est un sur lequel les pays du Benelux attirent particulièrement l'attention : la coopération renforcée. En effet, après l'élargissement de l'Union à 20 États membres ou plus, le besoin d'une collaboration plus étroite entre un nombre limité d'États membres au sujet de certaines matières se fera davantage sentir. Cette collaboration doit être rendue possible par un assouplissement des règles relatives à l'installation d'une coopération renforcée. D'une part, il convient d'empêcher qu'un État membre puisse à lui seul faire obstacle à la mise en oeuvre d'une telle procédure; d'autre part, une coopération renforcée doit être possible dès que huit États membres le décident, quel que soit le nombre total d'États membres (au lieu de la moitié requise du nombre total d'États membres, comme aujourd'hui).

La note Benelux expose par ailleurs le point de vue des trois États membres en ce qui concerne les « reliquats » proprement dits d'Amsterdam. Le premier ministre considère toutefois que ces points ne seront abordés intrinsèquement par la CIG qu'après la présidence portugaise. Ce qui importe actuellement, c'est qu'au sommet d'Helsinki ­ sommet qui n'abordera encore aucune négociation sur le fond ­ les revendications des pays du Benelux relatives aux conditions d'application de la coopération renforcée soient inscrites à l'ordre du jour de la CIG.

b) Avec la CIG, l'élargissement de l'Union européenne sera le deuxième dossier important à l'ordre du jour du Conseil européen. La position que la Commission européenne a défendue à ce propos au précédent Conseil européen de Tampere a été accueillie favorablement par la Belgique. La Commission y souligne en effet qu'il faut d'abord mener à bien la CIG, que tous les candidats à l'adhésion doivent être traités sur un pied d'égalité et qu'il faudra déterminer dans les deux ans, si tous les candidats remplissent bien les conditions d'adhésion, telles qu'elles ont été fixées par le Conseil européen de Copenhague.

Le premier ministre estime que seul le débat sur le statut de la Turquie peut poser des difficultés. À ce propos, il ne s'inquiète pas tellement de l'octroi à ce pays du statut de candidat à l'adhésion ni de la date d'ouverture des négociations pour l'adhésion : il faut pour cela que la Turquie remplisse d'abord les critères fixés à Copenhague (ce qui n'est pas le cas pour l'instant).

La discussion sera plutôt axée sur la question de savoir si l'on pourra accéder aux desiderata de la Grèce en la matière, à savoir :

­ la solution du problème de Chypre en vue de l'adhésion de l'île à l'Union européenne;

­ l'acceptation des jugements de la Cour internationale de Justice de la Haye au sujet de différends relatifs aux îles de la Mer Égée;

­ la constatation de progrès dans l'application par la Turquie des critères de Copenhague.

c) Le troisième sujet que le Conseil européen abordera est celui de la politique de sécurité et de défense de l'Union européenne. Le premier ministre espère fermement que le Conseil pourra trouver un accord sur un rapport contenant les trois éléments essentiels pour que l'Union européenne puisse avoir une politique de gestion des crises. Il s'agit de la définition d'une capacité militaire, de la création d'organes et de procédures pour la prise de décisions et de l'intensification des relations avec les pays tiers.

M. Verhofstadt souligne l'importance d'un accord sur la création, d'ici à 2002-2003, d'un corps d'armée européen, composé de 15 brigades (50 à 60 000 hommes). Ce corps d'intervention rapide doit être autonome en matière de commandement, de contrôle, de renseignements, d'appuis aérien et naval, et doit pouvoir être déployé dans les 60 jours et rester opérationnel pendant un an.

Au sommet d'Helsinki, le cadre permettant de réaliser tout cela doit être mis en place avec les trois organes suivants :

1. un comité politique et de sécurité (COPS), qui aurait son siège à Bruxelles et qui assurerait la gestion journalière de cette politique extérieure de l'Union européenne;

2. un comité militaire (COM), qui formulerait des recommandations à l'intention du premier organe;

3. un état-major militaire qui serait responsable de la planification des opérations sur le terrain.

Il convient en outre de développer une structure pour permettre le dialogue entre les instances de l'UE, les États membres de l'OTAN qui ne sont pas membres de l'Union européenne et les États membres de l'UE qui ne sont pas membres de l'UEO. L'intervenant rappelle que l'intention n'est pas de mettre l'OTAN hors jeu mais de donner à l'Europe des moyens d'agir hors de ses frontières, si l'OTAN estimait ne pas pouvoir le faire.

Le premier ministre estime que le dossier de la politique de sécurité et de défense de l'Union européenne est à ce point avancé que l'on peut prendre des décisions concrètes au sommet d'Helsinki en vue de mettre en place la structure précitée. Le premier objectif de cette politique est d'effectuer les missions dites de Petersberg (prévention des conflits, maîtrise des conflits, missions de maintien de la paix). La mise en place des structures prévues commencerait dès le 1er mars 2000. Il n'est pas nécessaire d'attendre pour cela que la conférence intergouvernementale décide de modifier le traité. Dans ce cadre, il convient de souligner l'importance de la nomination simultanée de M. Solana au poste de secrétaire général/haut représentant de la politique étrangère et de sécurité commune de l'Union européenne et à celui de secrétaire général de l'UEO.

d) Le quatrième sujet important qui sera abordé au Conseil européen sera le volet fiscal. Le Conseil Ecofin s'efforce depuis tout un temps déjà d'harmoniser les fiscalités de l'entreprise et de l'épargne au sein de l'Union européenne. M. Verhofstadt déclare qu'il importe pour la Belgique que cette opération soit menée globalement. Il est inconcevable que soient conclus sur certains aspects de la concurrence fiscale des accords partiels qui léseraient certains États, tandis que l'on ne toucherait pas à d'autres mesures fiscales « déloyales » en vigueur dans d'autres États. Il serait sage de renvoyer ce dossier, après consultation du Conseil européen, au Conseil Ecofin, en vue de la poursuite des négociations.

e) En plus de ces quatre grands thèmes, plusieurs autres questions seront abordées à l'occasion de réunions informelles, comme la situation en Tchétchénie.

2. Échange de vues

M. Philippe Philippe Mahoux (Sénat) attire l'attention sur la mise en oeuvre de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Le Comité d'avis fédéral chargé des questions européennes estime, d'une manière générale, que ces droits fondamentaux doivent être inscrits dans les traités. L'on ferait peut-être bien d'aborder déjà cette question au cours du prochain Conseil européen, pour éviter que la CIG à venir n'omette d'examiner le dossier et ne le renvoie aux calendes grecques.

Le premier ministre déclare que la mise en oeuvre de la Charte est un processus parallèle qui est indépendant des négociations proprement dites de la CIG. Formellement, la Charte ne fait donc pas partie desdites négociations, mais il serait utile de faire coïncider les travaux des deux enceintes. Cela permettrait de tenir compte également des propositions concernant la Charte à l'issue de la CIG.

M. Mark Eyskens (Chambre) se fait l'écho de l'inquiétude des membres de l'Assemblée de l'UEO qui se demandent si la création d'une force d'intervention rapide ne risque pas de retarder le développement d'une véritable politique étrangère et de défense commune. Il convient de réaffirmer l'objectif final d'une véritable PESC.

Pour ce qui est des futures relations entre l'Union européenne et l'OTAN, l'intervenant se réjouit de l'affirmation de M. Solana selon laquelle l'on a besoin, non pas tellement de moins d'Amérique, mais de plus d'Europe.

Pour ce qui est du développement d'une politique européenne de défense commune, il soulève la situation des problèmes des pays neutres. Le principal problème concerne l'article 5 du traité de l'UEO (et l'article correspondant du traité de l'OTAN) concernant l'aide et l'assistance réciproques. Il se pourrait en effet qu'à la suite de l'intégration de l'UEO au sein de l'Union européenne, les États-Unis et le Canada soient un jour contraints, de par une politique des dominos, de défendre militairement un pays neutre. L'adhésion à l'OTAN des pays qui souhaitent participer à la politique de défense européenne serait la seule solution. Le pilier européen de l'OTAN s'en trouverait également renforcé.

Pour finir, le député souligne qu'une politique de défense européenne pourrait aussi avoir des conséquences négatives au niveau des budgets de la défense des États membres de l'UE.

M. Erik Derycke (Chambre) se réjouit du travail de qualité qui a été fourni notamment par le gouvernement belge en ce qui concerne la définition de l'identité européenne en matière de Défense.

Pour ce qui est de la CIG, l'intervenant estime que le mémorandum du Benelux est un très bon document et il espère que la CIG reprendra effectivement les points de vue concernant la collaboration renforcée. Sinon, il y aurait lieu de ressusciter l'idée d'une Europe restreinte (cf. UEM).

En ce qui concerne la répartition des sièges au Parlement européen, l'intervenant demande si le Gouvernement belge accepte la limite de 700 sièges. Si oui, la Belgique devrait renoncer à un certain nombre de sièges après l'élargissement de l'Union européenne. M. Derycke s'interroge à propos de la question de la représentation démocratique suffisante des petits États membres au sein de l'ensemble des institutions européennes.

Pour ce qui est de la fiscalité, il faut veiller à ce que l'on ne démantèle pas seulement les régimes fiscaux des petits pays. Il faut maintenir le lien entre tous les dossiers fiscaux dont on a discuté.

M. Philippe Monfils (Sénat) formule quatre remarques concernant la prochaine CIG.

En ce qui concerne le nombre de membres de la Commission européenne, il faut garantir à chaque État membre un représentant au sein de la Commission. Toutefois, étant donné le nombre élevé de commissaires dans une Union élargie, il serait nécessaire de prévoir des mécanismes ou des procédures permettant de garantir l'efficacité du fonctionnement de la Commission. Ainsi, l'on pourrait renforcer les pouvoirs du président de la Commission, instaurer un système de kern ou cabinet restreint, nommer des commissaires adjoints,...

En ce qui concerne le nombre de sièges au Parlement européen, il est à craindre que certains partis membres du gouvernement belge actuel ne disposent plus de représentants au Parlement européen dont le nombre de sièges est bloqué à 700. Ce serait une situation à tout le moins paradoxale alors même que le Parlement européen voit ses pouvoirs considérablement renforcés par la codécision et l'augmentation de ses moyens de contrôle.

En ce qui concerne la coopération renforcée, il est plus que nécessaire de recourir à cette formule afin de faire sauter le verrou de l'unanimité et de maintenir la dynamique de l'intégration européenne.

En ce qui concerne la responsabilité individuelle des membres de la Commission, M. Monfils s'interroge sur la portée de la phrase figurant au point 6 du mémorandum Benelux concernant la CIG et les réformes institutionnelles : « il convient d'examiner les modalités de la démission collective et individuelle et comme corollaire la dissolution du Parlement européen dans le cadre de l'équilibre interinstitutionnel ». Dans cette hypothèse, il n'y aura jamais de renvoi de la Commission car il est peu probable que le Parlement européen ne fasse usage de cette possibilité (ce qui entraînerait automatiquement sa dissolution) en adoptant une motion de méfiance. Les atermoiements du Parlement européen début 1999, lorsqu'il s'est agit d'adopter une motion de méfiance à l'encontre de la Commission présidée par J. Santer, en témoignent.

M. Monfils souligne également la nécessité de mettre sur pied des organes de contrôle externe de toutes les institutions communautaires (Commission, Conseil des ministres, Parlement européen). Les institutions de contrôle actuelles sont totalement dominées par la Commission. Les actions de contrôle de la Commission ne peuvent être engagées que pour autant que la Commission l'accepte et indique également les conditions dans lesquelles les enquêtes peuvent être effectuées. Des dysfonctionnements graves dans l'utilisation des crédits de la Commission européenne ont été mis à jour. À l'heure actuelle, l'efficacité des moyens de contrôle externe, dominés par la Commission, est toute relative.

En ce qui concerne la candidature de la Turquie à l'Union européenne, l'intervenant souligne que ce pays ­ condamné depuis 25 ans pour l'occupation de la partie Nord de Chypre ­ se verra accorder un statut de pré-candidat ce qui lui permettra de demander des moyens financiers à l'Union européenne et de s'en prévaloir sans contrepartie. Le statut de candidat à l'Union ne doit être accordé à la Turquie que dans la mesure où elle fait preuve d'ouverture dans une série de secteurs. M. Monfils déplore que, malgré la situation positive de Chypre (le screening effectué par la Commission est positif), ce pays ne pourrait pas entrer dans l'Union européenne parce qu'il est divisé en deux parties. Une large majorité de parlementaires européens ont toujours défendu l'idée que si l'on n'aboutit pas à un accord avec la Turquie, il conviendra de permettre à Chypre d'entrer, tel quel, dans l'Union européenne.

Enfin, M. Monfils fait observer que certains pays candidats à l'adhésion, avec lesquels l'Union a déjà entamé des négociations d'adhésion ou le fera sous peu, ne remplissent pas encore toutes les conditions liées à l'adhésion (critères de Copenhague). L'élargissement ne doit pas être précipité. Les pays candidats doivent d'abord régler leurs débats internes.

En conclusion, l'intervenant rappelle que l'Union européenne s'élargit à l'Est et au Nord mais oublie quelque peu les pays du Sud de l'Europe. Or, certains pays du Maghreb se sont déjà déclarés candidats à l'adhésion à l'Union européenne. Il faut préserver l'équilibre de l'Union européenne non seulement à l'Est mais aussi au Sud.

M. Jacky Morael (Sénat) partage l'idée d'un fédéralisme renforcé en Europe et la nécessité d'approfondir les institutions avant de procéder à l'élargissement. Il se réjouit de la prise de position du Benelux relative à l'extension du vote à la majorité qualifiée mais souligne toutefois que si les convergences de vues entre les pays du Benelux sont assez fortes, elles ne sont pas systématiques. Les Pays-Bas occupent une place intermédiaire dans le concert des pays européens. Ce n'est pas un hasard si, au point 7 du mémorandum Benelux, il y a quelque ambiguité quand on parle de la pondération des votes au sein du Conseil des ministres. Il faut veiller à ce que des petits pays comme la Belgique ne soient pas lésés, voire marginalisés, dans la dynamique de prise de décision. M. Morael s'interroge aussi sur le conditionnement éventuel de l'élargissement à un accord préalable en matière d'harmonisation fiscale. Dans une Union à 25 membres, il sera beaucoup plus difficile d'entamer des négociations en matière d'harmonisation fiscale. Toute politique visant, comme c'est le cas en Belgique, à opérer, non pas une augmentation de la pression fiscale globale mais des glissements entre différents types de fiscalité (comme le travail ou l'énergie) deviendrait quasiment impossible sauf dans le cadre d'une procédure de coopération renforcée.

L'orateur se demande aussi si la mise en place, pour mars 2000, d'organes destinés à assurer la sécurité de l'Union européenne et à lui permettre de mener des opérations militaires, signifie également qu'il n'y aura plus d'opérations de l'OTAN sur le territoire pan-européen, sans accord explicite des organes mis en place par l'UE.

Enfin, l'intervenant se demande si la coopération au développement sera globalisée au niveau de l'Union européenne et si la Belgique a l'intention de s'aligner sur une ligne européenne en matière de politique africaine. Il faut garder à l'esprit que les intérêts de la Belgique ne sont pas nécessairement ceux d'autres États membres de l'Union (comme la France par exemple).

M. Georges Dallemagne (Sénat) s'interroge sur les éventuels contacts de la Belgique avec d'autres États membres afin de s'assurer de leur soutien quant aux prises de position du Benelux.

En ce qui concerne le maintien d'un Commissaire par État membre, M. Dallemagne fait observer que l'on peut garder l'idée d'un Commissaire par État membre mais que ce principe pourrait être étalé sur deux législatures. Il y a environ 12 ou 13 matières générales qui pourraient être gérées, sous l'autorité d'un Commissaire, dans le cadre d'une Commission compacte. Les intérêts des États membres doivent pouvoir être défendus dans d'autres enceintes que la Commission européenne comme le Conseil des ministres ou le Coreper. Il faut préserver un organe exécutif qui soit le plus opérationnel possible. Ce ne sera pas le cas si l'on multiplie le nombre de Commissaires européens.

Enfin, l'intervenant rappelle que le Conseil européen d'Helsinki se déroulera au moment où les troupes russes feront l'assaut de Grozny, la capitale tchétchène. Il est dès lors essentiel que l'Union adopte, à Helsinki, une position ferme par rapport à la Russie.

M. Josy Dubié (Sénat) se réjouit des premiers pas qui sont faits vers une défense et une sécurité communes en Europe mais déplore qu'il n'y ait pas encore d'institution au niveau européen visant à prévenir les conflits.

Dans un récent rapport, l'OSCE souligne que l'intervention militaire au Kosovo a aggravé le conflit et accéléré l'exode de la population. Rien n'a été véritablement résolu car une épuration ethnique a succédé à une autre. La leçon de la guerre au Kosovo est qu'il vaut mieux prévenir que guérir. Il faut donc accorder une attention toute particulière à la prévention des conflits en créant une unité de prévention des conflits. Le coût budgétaire est moindre que la mise au point d'armes sophistiquées par les États-Unis (35 milliards de dollars) dont certaines d'entre elles ont été utilisées pour la première fois lors de la guerre du Kosovo. À titre d'exemple, M. Dubié rappelle qu'il y a quelques années, M. Ibrahim Rugova, élu démocratiquement (en 1994) par la majorité des Kosovars albanophones, avait été reçu, lors d'une tournée en Europe, au Parlement belge afin d'expliquer la situation dans son pays. Si, à l'époque, dans le cadre de l'Union européenne, une unité de prévention avait été mise en place, elle aurait pu enquêter et informer les décideurs politiques de ce qui se préparait. L'intervenant fait également observer l'absence actuelle de L'Union européenne dans la recherche d'une solution au problème chypriote (les négociations ont lieu au sein de l'ONU). La Belgique doit soutenir la création au sein de l'Union européenne d'une institution chargée de la prévention des conflits. Il y a également d'autres foyers de tension dont personne ne s'occupe actuellement : en Transylvanie, entre la minorité hongroise et la majorité roumaine, et en Géorgie où les problèmes entre Azéris et Géorgiens ne sont en rien réglés.

Mme. Claudine Drion (Chambre) souhaite que le débat au sein du Parlement belge se poursuive après le Conseil européen d'Helsinki. Il faudra, le cas échéant, modifier la position belge afin qu'elle ne soit pas en deçà de ce qu'elle était au départ depuis qu'elle est devenue une position Benelux.

M. Stef Goris (Chambre) souscrit entièrement aux réserves qui ont été formulées à propos de l'acceptation éventuelle de la candidature de la Turquie par l'Union européenne. Il fait référence, en particulier à la situation qui règne dans ce pays, en ce qui concerne le respect des droits de l'homme, aux techniques policières que l'on y utilise, au maintien de la peine de mort et aux problèmes qui existent dans le cadre du droit privé international (p.ex. le droit de garde en cas de mariages mixtes).

En ce qui concerne la PESC, l'intervenant pose une série de questions concrètes que voici :

­ l'idée de demander un siège permanent pour l'Union européenne au sein du Conseil de sécurité des Nations Unies est-elle encore vivante ?

­ les 15 brigades de la force d'intervention rapide comportent-elles outre des forces terrestres, des forces navales et des forces aériennes ?

­ a-t-on quelque assurance en ce qui concerne le siège du futur comité politique et de sécurité (on cite Bruxelles mais aussi Rome) ?

­ en ce qui concerne le dialogue avec les pays « neutres », ceux-ci feront-ils partie du comité politique et de sécurité ? Dans la négative, ledit comité ne comptera-t-il que des représentants des 10 États membres de l'UEO ? Qui assurera le contrôle démocratique (PE, Assemblée de l'UEO, les parlements nationaux, ... ) ? Qu'adviendra-t-il, d'une part, des États européens qui sont membres de l'OTAN mais non pas de l'Union européenne et, d'autre part, des États membres qui sont associés de l'UEO ?

L'intervenant estime, en ce qui concerne les budgets consacrés à la Défense, qu'une défense européenne intégrée pourrait avoir un effet plutôt réducteur de l'ensemble des frais.

Mme Leen Laenens (Chambre) demande si la question de l'octroi de la personnalité juridique à l'Union européenne sera également à l'ordre du jour de la CIG. Elle se réjouit également de l'appui que les pays du Benelux ont donné aux propositions d'extension du pouvoir de codécision du Parlement européen, ce qui serait positif du point de vue du contrôle démocratique. Elle partage également le point de vue de M. Goris, selon lequel une adaptation sérieuse des moyens financiers disponibles pour la Défense ne doit pas entraîner une augmentation de l'ensemble du budget de la Défense. Pour ce qui est de la politique de la Défense, il y a lieu de conclure des accords précis sur les tâches à accomplir avec l'OTAN, avec l'OSCE et avec l'ONU. Pour terminer, l'intervenante souligne qu'il faut maintenir le régime linguistique existant au sein de l'Union européenne.

Répliques du premier ministre

En ce qui concerne la conférence intergouvernementale, le premier ministre affirme que la Commission européenne continuera de jouer un rôle important dans le processus d'intégration européenne, en particulier en ce qui concerne la préparation de la politique à suivre. Eu égard à cette position centrale, la Belgique souhaite le maintien d'un seul commissaire par État membre.

La Belgique n'aura pas trop de problèmes en ce qui concerne le Parlement européen : le nombre maximum de membres est certes fixé à 700, mais nous pourrons certainement maintenir notre position.

En revanche, la pondération des voix au Conseil pose davantage problème. Le mémorandum du Benelux a formulé deux options à ce sujet. Une seule question n'a pas été résolue entre les Pays-Bas et la Belgique, à savoir le « conflit » d'Amsterdam. Au cours des négociations qui ont eu lieu dans le cadre du sommet d'Amsterdam, les Pays-Bas ont en effet tenté d'obtenir davantage de voix. Le mémorandum du Benelux précise clairement qu'il convient de maintenir l'équilibre entre les Etats, en ce sens que les trois catégories d'États (grands, moyens et petits États) doivent avoir la même importance. Tous les autres points font l'objet d'un consensus au niveau du Benelux.

En ce qui concerne la possibilité de révocation collective ou individuelle des commissaires infligée en guise de sanction par le Parlement européen, il s'agit là d'une évolution tout à fait normale : dans un régime constitutionnel classique, il existe un équilibre entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif en vue de l'exercice d'un contrôle politique.

En ce qui concerne l'élargissement, M. Verhofstadt affirme que la candidature de la Turquie à l'adhésion sera admise si le pays satisfait aux conditions imposées à tous les autres candidats. Il s'agira plus particulièrement de satisfaire aux critères de Copenhague (respect de la démocratie et des droits de l'homme).

Subordonner l'élargissement à une harmonisation interne ne paraît pas être une approche appropriée. Les candidats à l'adhésion doivent réaliser l'acquis communautaire par eux-mêmes. L'ajout d'autres points à l'ordre du jour de la CIG risque de freiner l'élargissement. Certaines matières peuvent être harmonisées davantage par la technique de la « coopération renforcée ».

En ce qui concerne la politique de défense et de sécurité, le premier ministre précise que la prévention des conflits sera une des tâches qui seront dévolues au Comité politique de sécurité à créer. La Belgique insistera chaque fois sur le rôle de ce Comité avant de mettre en ouvre d'autres moyens (notamment militaires).

La politique européenne de défense constitue toujours une priorité. L'intervention en Bosnie, notamment, constitue un premier pas. Une intégration plus poussée n'est pas exclue et ne doit pas être plus onéreuse. On devrait pouvoir faire mieux au niveau européen avec les 200 milliards de dollars dont on dispose (la totalité du budget militaire des États membres de l'Union européenne, qui équivaut à 4/5e du budget militaire des États-Unis). L'intégration de la défense européenne se traduira par la spécialisation des États membres, alors qu'à l'heure actuelle, leurs armées disposent toutes du même équipement. Il convient donc de repenser le concept de défense aux niveaux national et européen.

La teneur des discussions sur les relations avec les États-Unis en matière de défense et de sécurité peut parfaitement se résumer de la manière suivante : pas moins d'États-Unis, mais plus d'Europe. En ce qui concerne le Corps d'intervention rapide, c'est d'ailleurs l'Union européenne qui décide d'intervenir si l'OTAN n'est pas déjà présente sur un terrain donné. L'Union européenne ne devra toutefois pas demander à l'OTAN l'autorisation d'intervenir éventuellement quelque part. D'ailleurs, les projets de décision règlent également les relations (quant à la participation ou non à des interventions de l'UE) entre les différents États membres qui font partie ou non de l'OTAN et de l'UEO. L'objectif est de créer une « capacité », à laquelle pourraient même participer des pays ne faisant pas partie de l'UE (par exemple, des pays candidats et la Russie au Kosovo). Même si la préparation est assurée par un comité militaire, c'est au politique qu'il appartient en définitive de décider d'une action (le Conseil des ministres des Affaires étrangères ou le Conseil européen).

M. Dirk Van der Maelen (Chambre) met en garde contre tout déficit démocratique dans cette matière. Il convient de garantir le contrôle parlementaire en l'espèce, contrôle qui est encore incertain, d'autant qu'il s'agit d'une matière intergouvernementale. Peut-être pourrait-on s'inspirer du système en vigueur aux États-Unis, où c'est le concept global de défense qui est examiné et approuvé par le parlement, ce qui laisse ensuite une marge de manoeuvre suffisante au gouvernement. Le premier ministre fait observer que toute modification des traités fait automatiquement l'objet de débats parlementaires. Il faut toutefois prendre garde que les États membres moins désireux de progresser en matière de défense n'exigent que l'on modifie les traités avant de pouvoir prendre des initiatives en matière de défense. Les initiatives envisagées aujourd'hui trouvent leur légitimation dans les décisions du sommet de Cologne. Qui plus est, dès lors que des initiatives seront prises en matière de défense, le PE développera aussi spontanément une dynamique propre en la matière.

B. LES RÉSULTATS DU CONSEIL EUROPÉEN D'HELSINKI

1. Exposé de M. Guy Verhofstadt, premier ministre

Pour l'ensemble des conclusions du Conseil européen d'Helsinki, le premier ministre renvoie aux conclusions de la présidence. Il souhaite cependant attirer l'attention sur plusieurs décisions importantes qui ont été prises durant ce sommet.

a. En ce qui concerne l'élargissement de l'Union européenne, il a été décidé que la Commission négocierait désormais avec 12 pays candidats à l'adhésion. Il s'agit là d'une décision historique qui rétablit l'unité de l'Europe. Le calendrier envisagé est le suivant : fin de la CIG vers la fin 2000, ensuite ratification du nouveau traité par les États membres pour la fin 2002, après quoi l'adhésion des nouveaux États membres pourra intervenir à partir de 2003 (on pourra accueillir au total 120 millions de nouveaux citoyens de l'Union). À cet égard, M. Verhofstadt souligne que l'élargissement ne sera pas automatique. Les candidats à l'adhésion devront remplir des critères politiques et économiques, tous les candidats étant traités sur un pied d'égalité. L'Union européenne ne pratiquera donc aucune différenciation entre les candidats. Durant ce sommet, les membres du Conseil européen ont organisé une réunion séparée avec les représentants des États candidats à l'adhésion, dont il est apparu que ces derniers montrent une volonté très affirmée de réaliser toutes les adaptations nécessaires afin d'être prêts à l'adhésion dès 2003.

La candidature de la Turquie a été examinée séparément. L'Union européenne a officiellement accordé à ce pays le statut de candidat à l'adhésion, notamment en vue d'éviter qu'il ne dérive davantage vers le fondamentalisme. Toutefois, les négociations ne pourront être entamées qu'une fois la Turquie remplira la condition qui vaut pour tous les candidats à l'adhésion, à savoir : satisfaire aux critères politiques de Copenhague (régime démocratique, droits de l'homme, protection des minorités). De plus, les litiges pendant entre la Turquie et les États membres (la Grèce en l'occurrence) devront être réglés. L'attitude de la Grèce à ce sujet a été très positive.

b. La plus grande partie du temps a été consacrée à la préparation de la conférence intergouvernementale (6), à propos de laquelle le premier ministre dit que « la partie reste ouverte ». Sur ce point, le Conseil européen était partagé entre deux tendances.

Un premier groupe de pays, comprenant notamment la France et la présidence finlandaise, proposait de limiter l'ordre du jour de la CIG aux « reliquats » d'Amsterdam. C'est ce que prônait notamment la France pour s'assurer que la présidence française serait couronnée par la signature du nouveau traité européen.

Un autre groupe de pays soutenait le mémorandum Benelux sur la CIG, qui plaide en faveur d'un ordre du jour ouvert permettant d'ajouter encore d'autres éléments tels que :

­ le statut du président de la Commission européenne;

­ la responsabilité individuelle des membres de la Commission;

­ le rôle du Parlement européen;

­ la position de la Cour des comptes européenne et de la Cour de Justice;

­ l'adaptation du mécanisme de coopération renforcée;

­ la scission des traités européens;

­ les modifications qu'il serait éventuellement nécessaire d'apporter aux traités concernant la PESC.

Le compromis qui a finalement été atteint prévoit que l'ordre du jour ne sera pas fermé. La conclusion nº 16 prévoit qu'outre les « reliquats » d'Amsterdam (taille et composition de la Commission européenne, pondération des voix au sein du Conseil, extension éventuelle du vote à la majorité qualifiée au sein du Conseil), on pourra aborder d'autres modifications qu'il faudra apporter aux traités à propos des institutions européennes, en liaison avec les questions précitées et dans le cadre de la mise en oeuvre du traité d'Amsterdam. Selon le premier ministre, cela veut dire que l'on pourra aborder notamment la question des coopérations renforcées, qui est liée à celle de la majorité qualifiée. De plus, la présidence portugaise pourra compléter l'ordre du jour.

Un accord a été atteint sur la question du calendrier. La CIG débutera officiellement début février 2000 pour se clôturer à la fin de la même année, sous la présidence française. Les négociations auront lieu à deux niveaux : au Conseil « Affaires générales » (ministres des Affaires étrangères) et entre les représentants des gouvernements, qui prépareront la conférence. Les décisions finales se prendront au Conseil européen de Nice (décembre 2000).

Le premier ministre souligne l'importance du mémorandum Benelux sans lequel les revendications du gouvernement belge concernant l'ordre du jour de la CIG n'auraient jamais été prises en compte. La communication de la Commission européenne à ce sujet n'a pas été examinée.

Il a été convenu avec plusieurs États membres (dont le Danemark et la Suède) de préparer plutôt un futur mémorandum Benelux et de le leur transmettre afin qu'ils puissent également y souscrire.

Par ailleurs, le Conseil européen a aussi approuvé un rapport spécial sur le fonctionnement efficient du Conseil (7). Cet élément est capital pour la Belgique étant donné que pour certaines matières, elle est représentée au Conseil par un ministre régional ou communautaire.

c. Le grand thème suivant abordé fut la politique étrangère et de sécurité commune (PESC). On a adopté, au sommet d'Helsinki, un texte très détaillé à ce sujet (8). On y a notamment décidé de créer une force d'intervention rapide de 60 000 hommes qui doit être opérationnelle dans les 60 jours et pouvoir rester active pendant une année.

L'encadrement structurel serait composé de trois organes à créer : un comité politique et de sécurité (chargé de prendre les décisions politiques), un comité militaire (chargé de rendre des avis à l'organe politique) et un état-major militaire (chargé de conduire les opérations sur le terrain). La force d'intervention remplira les missions dites de Petersberg (prévention et gestion des crises et misions de maintien de la paix).

La phase préparatoire de la mise en ouvre concrète de ces décisions débutera le 1er mars 2000. La force d'intervention devra pouvoir être déployée dès le début de 2003. La version définitive du texte traite aussi des relations avec l'OTAN (la force d'intervention européenne n'interviendra que si l'OTAN ne le fait pas) et précise les rapports avec les pays neutres (les États membres de l'OTAN qui ne sont pas membres de l'UE peuvent participer à des opérations UE avec des moyens OTAN; les États membres de l'UE qui ne sont pas membre de l'UEO pourront aussi s'associer à une action PESC; il n'est pas exclu que des pays tiers puissent y prendre part ­ on pense notamment à la Russie ou à l'Ukraine).

Des États membres eurosceptiques et traditionnellement neutres ont tenté d'empêcher que cette initiative ne débouche sur la création d'une véritable armée européenne. Sous l'impulsion de la France et de la Belgique, on s'est toutefois borné à constater dans les conclusions de la présidence que cette initiative n'impliquait pas la création d'une armée européenne, mais qu'elle ne l'excluait pas non plus. Le gouvernement belge n'a cependant pas laissé planer le moindre doute sur le fait qu'il s'agissait d'un premier pas sur la voie d'une défense européenne intégrée.

d. Outre ces trois grands dossiers, plusieurs autres dossiers ont aussi été examinés :

­ à la demande de la Belgique, on a ajouté un chapitre sur la santé publique et sur la sûreté alimentaire, créant ainsi une base politique en vue de l'approbation, au niveau européen, de mesures de soutien nationales en la matière.

­ On a aussi consacré un important chapitre à l'environnement et au développement durable, dans lequel la Commission est invitée à formuler des propositions en vue de l'application au niveau de l'Union des décisions de la Conférence de Rio et du Protocole de Kyoto.

­ À propos du paquet fiscal, on a constaté qu'il s'agissait d'un ensemble de mesures. Toutefois, ce dossier n'était pas encore suffisamment mûr pour pouvoir faire l'objet de décisions concrètes. Une série de principes généraux ont cependant été définis. On espère pouvoir boucler ce dossier au prochain Conseil européen (Porto, juin 2000).

­ On a évalué la situation en Tchétchénie. Pour la première fois, des sanctions sont annoncées, notamment l'application plus sévère des prescriptions commerciales, la levée éventuelle de certaines dispositions commerciales des accords de partenariat et de coopération conclus avec la Russie ainsi que la réorientation des crédits TACIS qui seraient affectés à des projets humanitaires plutôt qu'à des projets commerciaux. Cela signifie concrètement que l'UE a la possibilité de prendre trois types de sanctions.

­ Au cours du Conseil informel, il a aussi été question de la situation au Kosovo. Comme au Conseil européen de Tampere, on n'a une fois encore pu que constater l'incapacité de l'UE à prendre des mesures concrètes à propos de la question de la navigabilité du Danube, de la mise en oeuvre du pacte de stabilité et de l'élaboration d'une solution politique pour la région. Une série de mesures ont néanmoins été prises :

· M. Solana fera rapport de la situation politique et identifiera les possibilités;

· une conférence des pays donateurs sera organisée pour insuffler un nouvel élan au pacte de stabilité;

· le dossier sera dorénavant géré par un seul membre de la Commission;

· les membres du Conseil seront immédiatement informés des évolutions éventuelles.

L'objectif principal est de débloquer la situation en matière d'investissements et d'activité économique de manière à pouvoir poursuivre la reconstruction de la région.

2. Échange de vues

M. Mark Eyskens (Chambre) prévoit un élargissement considérable de l'Union européenne. Celui-ci pourrait avoir lieu beaucoup plus tôt que prévu, et ce, pour diverses raisons. Si, lors des prochaines élections parlementaires en Russie (19 décembre 1999), les « nationaux-communistes » viennent au pouvoir, on peut s'attendre à ce que, par crainte du « national communisme », une nouvelle vague de pays posent leur candidature à l'adhésion à l'Union européenne (notamment, l'Ukraine, la Moldavie, la Géorgie, etc.). En outre, l'attitude favorable de l'Union à l'égard de l'adhésion de la Turquie est irréversible. On arrivera donc, en tout état de cause, à une grande Union réunissant plus de 30 États. L'Union ne possède toutefois pas les structures nécessaires à une prise de décisions efficace.

Lors de la négociation du Traité d'Amsterdam, il n'a été question que de deux changements, à savoir la composition de la Commission et la pondération des voix au sein du Conseil. La généralisation du vote à la majorité qualifiée n'a été ajoutée à ces deux questions que par la Déclaration BIF (de la Belgique, de l'Italie et de la France, qui a été annexée au Traité et qui subordonne tout élargissement de l'Union à la condition d'une réforme institutionnelle).

Il ressort des décisions prises lors de la présidence finlandaise que la Commission est, par le rôle qui lui est assigné, traitée en parent pauvre. De plus, il semble que seule la Présidence du Conseil (et non les États-membres) puisse compléter l'ordre du jour de la prochaine CIG. Il ne faut dès lors plus s'attendre à ce que des réformes institutionnelles soient opérées avant l'élargissement. La seule approche réaliste consiste donc en des formes de collaboration renforcée (cf. le modèle Saturne constitué de cercles).

Enfin, le fait qu'il soit précisé explicitement dans les conclusions du sommet d'Helsinki que la force d' intervention rapide n'est pas l'amorce d'une politique de défense européenne (mais, au contraire, sa négation), est loin d'être rassurant.

En ce qui concerne le chapitre sur la fiscalité, il est évident que l'UEM ne peut subsister sans une réforme fiscale. Il faut négocier à 14 ou à 11. Les « opt outs » doivent être possible, comme par exemple dans le chapitre social.

Force est toutefois de constater, en guise de conclusion générale, qu'il y a une dilution de l'Europe.

M. Philippe Monfils (Sénat) fait observer qu'il s'agit d'un Conseil en demi teinte. Si en matière fiscale peu de progrès ont été enregistrés, dans d'autres domaines les résultats du sommet d'Helsinki sont de bonne augure pour l'avenir. Ainsi, après avoir désigné un haut représentant pour la PESC qui exerce en même temps les fonctions de secrétaire général du Conseil, l'Union européenne a désormais adopté une série de mesures afin de mettre sur pied une force de défense européenne. Le Conseil européen a également adopté une position courageuse vis-à-vis de la Tchéchénie.

En ce qui concerne l'élargissement, le Conseil européen d'Helsinki, en affirmant le caractère inclusif du processus d'adhésion qui regroupe maintenant 12 pays candidats dans un cadre unique, a corrigé l'erreur politique commise lors du Conseil européen de Luxembourg (répartition des pays candidats à l'adhésion en deux groupes distincts). Toutefois, souligne l'intervenant, une autre erreur n'a-t-elle pas été commise en négligeant de définir les critères précis qui fondent une Europe unie ? Des critères basés sur la proximité, l'économie, l'appartenance à une même civilisation, les mêmes valeurs philosophiques ne sont pas toujours pertinents. L'Albanie est, par exemple, plus proche du territoire de l'Union européenne que d'autres pays candidats, la Turquie est située pour 90 % en Asie, les économies des pays candidats sont fort disparates. Il est dès lors essentiel de fixer une série de critères géo-politiques précis auxquels de nouveaux pays candidats à l'adhésion devraient répondre si l'on ne veut pas voir l'Union s'élargir dans toutes les directions sans cohérence aucune (Albanie, Macédoine, Ukraine, etc...).

M. Monfils estime par ailleurs que les décisions du Conseil européen relatives à la Turquie sont acceptables. Toutefois, la question chypriote n'est en rien réglée. Les déclarations récentes de M. Rauf Denktash, le leader de la communauté chypriote turque, à New-York, ne sont pas porteuses d'espérance, ce dernier prônant pour Chypre une confédération et non pas une fédération bi-zonale et bi-communautaire.

En ce qui concerne la situation au Kosovo, il n'y a pas lieu de se réjouir car aucune solution politique n'est en vue pour l'instant. Se dirige-t-on vers l'autonomie ou l'indépendance du Kosovo ou bien vers un retour à une province serbe ? L'organisation d'un redémarrage administratif du Kosovo, où il n'y a plus d'administrations communales et où les services de l'état civil n'existent plus, paraît essentielle pour que le Kosovo puisse reprendre son destin en main.

Les observations précédentes valent également pour l'Albanie qui s'enfonce de plus en plus dans la négation de ce qu'est un État. Ce pays subit actuellement de plein fouet, dans sa partie nord, l'exode des réfugiés kosovars et se transforme en véritable plaque tournante de tous les trafics illicites.

Enfin, en ce qui concerne les résultats du Conseil européen dans le domaine institutionnel, M. Monfils partage les positions exprimées par le Benelux dans son mémorandum concernant la CIG et déplore que les grands États membres de l'Union ne partagent pas le point de vue du Benelux en la matière.

Mme Mimi Kestelijn-Sierens (Sénat) estime que le sommet d'Helsinki doit être considéré comme un succès, étant donné que les 12 pays candidats seront à présent traités sur un pied d'égalité. Elle se réjouit également que la candidature de la Turquie ait été acceptée.

Elle déplore en revanche que l'ordre du jour de la prochaine CIG soit limité et ne comprenne pas le rapport du groupe d'experts dirigé par J.-L. Dehaene sur les réformes institutionnelles.

En ce qui concerne les forces militaires européennes, il est question uniquement de collaboration avec l'OTAN. Mais qu'en est-il de la relation avec l'UEO ?

L'importance de la sécurité nucléaire ne peut pas non plus être perdue de vue lors des discussions sur l'élargissement. L'intervenante insiste pour que l'on ratifie d'urgence le Traité de Kyoto. En ce qui concerne la pondération des voix au sein du Conseil, les Pays-Bas semblent vouloir agir dans leur intérêt propre depuis les négociations sur le Traité, qui ont eu lieu à Amsterdam. Y a-t-il eu des concertations à ce sujet au sein du Benelux ?

Selon M. Erik Derycke (Chambre), il importe à présent de tenter d'assimiler les nouveaux venus dans l'UE. Le processus d'élargissement est en effet devenu irréversible. A cet égard, ce sommet se situait à la croisée des chemins. La perspective d'adhésion de 12 nouveaux États membres fait que la situation devient très diversifiée, aussi en ce qui concerne toutes les coalitions qui peuvent se mettre en place concernant l'attitude face à l'Europe. On ne peut affirmer que les grands pays sont plutôt partisans d'une grande zone de libre échange et que les petits pays sont plutôt favorables à une Europe intégrée. C'est la raison pour laquelle, lors de la prochaine CIG, un État membre doit prendre l'initiative de lancer la coopération renforcée. La Belgique, les Pays-Bas, le Luxembourg et l'Italie seraient les États membres tout indiqués à cet effet.

Le dossier « fiscalité » a une haute teneur de « non-dit ». Bon nombre de pays se retranchent derrière le Royaume-Uni pour ne rien devoir faire. Si l'on veut progresser dans ce domaine, il faut fixer un calendrier en vue d'harmoniser les différents types d'impôts. Le Royaume-Uni ne pourra être convaincu de participer à ces travaux que lorsqu'il sera membre de l'UEM. Il faut dès lors développer une stratégie positive à l'égard du Royaume-Uni (surtout en vue du référendum prévu) plutôt que de le négliger.

Que peut faire l'Europe en ce qui concerne la Tchétchénie ? Force est de constater que c'est l'échec total. On n'a rien fait pour protéger la quasi-indépendance de la région. La Russie craint que l'accès de la Tchétchénie à l'indépendance n'ait un effet de dominos en Asie centrale. La Russie ne pliera que si elle obtient des garanties sur le plan de la stratégie géopolitique (notamment en matière de transit du pétrole).

Enfin, il est manifeste que le IESD (Identité européenne de sécurité et de défense) est contrôlé par les États-Unis et qu'on ne peut dès lors parler d'une véritable défense européenne.

M. Guido Tastenoye (Chambre) se dit partisan de l'élargissement à l'est, mais estime qu'il faut être prudent. Des problèmes d'intégration peuvent se poser (cf. l'Allemagne de l'Est). Le problème de l'Europe, c'est de ne pas être consciente de ses frontières. L'élargissement à la Turquie est inacceptable. La Turquie n'est pas un État laïc et les droits de l'homme y sont foulés aux pieds. Dans les conclusions de la présidence finlandaise, il n'est pas fait état de la situation des Kurdes. Il est manifeste que, sous la pression des Etats-Unis, l'UE a plié dans ce dossier. L'UE a également abandonné son attitude ferme quant à l'indivisibilité de Chypre. La question est de savoir comment la Grèce s'est laissé convaincre si rapidement dans ce dossier.

M. Jacky Morael (Sénat) fait observer que les résultats du sommet sont en deçà du mémorandum Benelux concernant la CIG et les réformes institutionnelles. Les questions liées à l'élargissement de l'Union l'ont emporté sur l'approfondissement du fonctionnement des institutions européennes. Tout ce qui aurait dû être acquis pour faciliter l'élargissement est, soit gommé, soit évoqué en termes vagues. L'esprit intergouvernemental a dominé les débats au détriment de véritables avancées de nature fédérale.

Les résultats en matière fiscale sont également décevants. Certains États membres se cachent sans doute derrière le Royaume-Uni pour bloquer le processus d'harmonisation de la fiscalité au sein des 15.

Si les trois left overs d'Amsterdam devraient être réglés lors de la CIG, ne fait-on pas preuve d'un optimisme exagéré en ce qui concerne l'ajout éventuel d'autres questions institutionnelles à l'ordre du jour de la CIG ?

En matière de politique de défense et de sécurité, M. Morael se demande si l'on s'oriente vers un embryon d'armée européenne ou s'il s'agit davantage d'organiser une synergie entre les armées nationales des États membres ?

En ce qui concerne l'adhésion de la Turquie, l'intervenant relève que ce pays devra remplir les critères de Copenhague au même titre que les autres pays candidats.

En ce qui concerne le règlement de la question chypriote, les décisions du Conseil européen d'Helsinki figurant aux points 4, 9 et 12 des conclusions du sommet, contiennent une série de conditions générales qui s'appliquent à tous les États membres. Tous les pays candidats sont en effet appelés à régler leurs différends frontaliers ainsi que d'autres questions du même ordre.

Enfin, l'intervenant souhaite que la future présidence belge de l'Union prenne toutes les initiatives nécessaires afin de faire progresser les négociations en matière d'harmonisation fiscale avant la fin du processus d'adhésion des pays candidats.

M. Ferdy Willems (Chambre) aborde différents thèmes. Il réclame la tenue d'un débat distinct sur les armes nucléaires. La Belgique doit s'empresser de ratifier le nouveau concept stratégique conclu en la matière à Washington (avril 1999). L'intervenant dit sa vive inquiétude quant à l'intervention russe en Tchétchénie. Il est toutefois difficile de réagir de manière appropriée face à la Russie, eu égard aux difficultés de communication. Les deux pays ayant en commun la culture byzantine, la Grèce pourrait peut-être jouer un rôle de médiation dans les relations avec la Russie.

Le problème du Kosovo n'est effectivement pas réglé. La haine réciproque entre les Kosovars et les Serbes persiste. Si l'Europe avait mené une action préventive, on n'aurait pas été confronté aux importants investissements qui devront y être réalisés.

L'intervenant souligne le rôle géopolitique que joue Chypre pour la Grande-Bretagne et la Grèce. Chypre et la Turquie pourraient facilement régler la question chypriote entre eux. Il serait dans l'intérêt des Kurdes, mais aussi d'autres minorités, que la Turquie adhère à l'Union européenne. La Turquie serait en effet obligée, dans ce cas, de tenir compte des principes démocratiques et des régions.

Mme Fientje Moerman (Chambre) souligne la nécessité d'élaborer des critères afin de définir les frontières de l'Europe.Pourquoi écarterait-on l'Ukraine alors que l'on accepterait d'autres pays ? L'Ukraine pose un problème sur le plan nucléaire, et son adhésion ne serait pas sans importance pour la sécurité (nucléaire) de notre population. En revanche, l'adhésion de la Turquie serait acceptable parce qu'elle devrait permettre une évolution démocratique. Bien qu'il ait été augmenté lors du Sommet de Cologne (juin 1999), le budget de l'Union s'avère déjà insuffisant. Quand sera-t-il adapté ?

En matière de défense, il ne faut tout de même pas être trop pessimiste. Alors que la notion de défense européenne était encore un sujet tabou il y a dix ans, force est de constater aujourd'hui que les choses ont considérablement évolué.

En ce qui concerne l'ordre du jour de la CIG, l'intervenante estime que le compromis actuel est meilleur que le triangle restreint d'Amsterdam : des réformes approfondies ne sont toutefois pas possible. La seule perspective est donc une collaboration renforcée. Il importe également d'accorder une grande attention à l'association des parlements à la CIG. L'intervenante déplore la manière dont le Parlement européen sera associé à la CIG. Aucun progrès n'a été réalisé en la matière depuis la précédente CIG.

Mme Erika Thys (Sénat) fait allusion à une récente déclaration du ministre des Affaires étrangères, qui aurait aussi évoqué l'élargissement éventuel de l'UE aux pays du Maghreb.

M. Dirk Vander Maelen (Chambre) ne se fait pas d'illusions à propos d'une extension éventuelle de l'ordre du jour de la CIG (par exemple, pour la collaboration renforcée). La décision à cet effet doit être prise par l'ensemble des États membres. S'il n'y a pas eu d'accord à ce sujet lors du sommet d'Helsinki, pourquoi pourrait-il subitement y en avoir un l'année prochaine ? L'intervenant demande quel est l'objet de la lettre que le secrétaire général du Conseil a reçue des Etats-Unis à propos de la Turquie.

En ce qui concerne le développement de la défense européenne, l'intervenant s'inquiète d'un nouveau déficit démocratique. Comment cette matière peut-elle être soumise au contrôle parlementaire ? Il y a lieu de développer un concept d'association parlementaire. On pourrait s'inspirer à cet égard du système américain, où la relation entre le parlement et le gouvernement fait l'objet d'un protocole.

M. Philippe Mahoux (Sénat) souligne qu'il convient absolument de progresser dans le domaine de l'harmonisation fiscale avant l'élargissement. En ce qui concerne l'ordre du jour de la Conférence intergouvernementale, M. Mahoux fait observer que la future présidence française, soucieuse de voir la CIG conclure ses travaux dans les délais impartis, se réservera vraisemblablement le droit d'ajouter des points supplémentaires à l'ordre du jour pour autant qu'il y ait des chances de succès.

En ce qui concerne le troisième pilier (justice et affaires intérieures), le Conseil est invité à élaborer une stratégie européenne de prévention et de lutte contre la criminalité organisée et à mettre la stratégie antidrogue de l'Union européenne le plus rapidement en oeuvre. M. Mahoux observe à cet égard qu'aucun contrôle démocratique n'est prévu sur le plan européen (entre autres pour ce qui concerne l'établissement de listes ou de fichiers).

La mise en place de structures telles que celles qui existent dans notre pays (la commission pour la protection de la vie privée) n'est pas encore envisagée au niveau européen.

Répliques du premier ministre

En réponse aux observations de plusieurs intervenants, M. Verhofstadt souligne que l'ordre du jour de la prochaine CIG ne se limitera pas aux trois reliquats d'Amsterdam (taille et composition de la Commission européenne, pondération des voix au sein du Conseil, l'extension du vote à la majorité qualifiée au sein du Conseil). Dans le point 16 des Conclusions du Conseil européen d'Helsinki il est également précisé que la CIG examinera « les autres modifications qu'il faudra apporter aux traités à propos des institutions européennes, en liaison avec les questions précitées et dans le cadre de la mise en oeuvre du Traité d'Amsterdam ». Le premier ministre cite, à titre d'exemple, les modifications à apporter aux traités en ce qui concerne la mise en oeuvre d'une politique de sécurité commune, la refonte des traités en deux parties distinctes : les principes de base (de nature constitutionnelle) et les autres dispositions.

L'année 2000 sera cruciale pour le fonctionnement de l'Union européenne. La stratégie de la Belgique, notamment dans la perspective de la présidence belge de l'Union durant le second semestre de 2001, consistera dans les mois qui suivent à s'assurer le concours d'autres États membres (comme la Suède et le Danemark) afin de soutenir les positions mises en avant dans le mémorandum du Benelux. Le premier ministre multipliera les contacts bilatéraux afin de lever les réticences qui subsistent dans le chef d'un certain nombre de pays (comme le Royaume-Uni ou l'Espagne), sur certaines questions comme l'extension du champ d'application de la coopération renforcée. Celle-ci constitue, pour la Belgique, une priorité pour la poursuite de l'intégration européenne. L'effet « intégrateur » de la coopération renforcée n'est pas négligeable; celle-ci doit être étendue à d'autres domaines (social, fiscal, ...). Ce serait une erreur politique d'isoler le gouvernement britannique qui doit pouvoir démontrer à son opinion publique qu'il entretient de bons contacts bilatéraux avec les États membres de l'Union. Il ne faut pas hypothéquer le référendum sur la participation du Royaume-Uni à l'Union économique et monétaire qui se tiendra durant la seconde moitié de l'an 2001.

Vouloir étendre le vote à la majorité qualifiée à un nombre trop important de matières ne peut que susciter un veto de certains États membres. Il faut agir avec prudence et privilégier l'extension de la coopération renforcée. L'Allemagne a clairement fait savoir que les conclusions du sommet d'Helsinki autorisaient une extension de la coopération renforcée.

En ce qui concerne la Turquie, le Conseil européen n'a fait aucune distinction entre les 12 pays candidats et la Turquie. Il faut toutefois affirmer clairement que les négociations ne débuteront que lorsque la Turquie aura pleinement rempli les critères de Copenhague.

Enfin, M. Verhofstadt a rappelé que l'Union européenne avait conclu des accords d'association avec les pays du bassin méditerranéen et que la candidature du Maroc avait été refusée, en 1987, du fait que ce pays n'était pas géographiquement situé en Europe.

L'élargissement de l'Union aux pays du Maghreb n'est donc pas d'actualité.

IV. TABLE RONDE SUR LA CIG AU PARLEMENT EUROPEEN AVEC LA PARTICIPATION DE REPRESENTANTS DES PARLEMENTS DES ETATS MEMBRES

Mme Fientje Moerman (Chambre) a participé le mardi 1er février 2000 à une table ronde sur la CIG, organisée par la commission des Affaires constitutionnelles du Parlement européen en présence de représentants des commissions spécialisées en Affaires européennes des Parlements des États membres de l'UE.

Le président de la commission des Affaires constitutionnelles du Parlement européen, M. Napolitano a souligné le rôle essentiel que jouent le Parlement européen et les Parlements nationaux dans la construction européenne ­ au moment où s'ouvre la Conférence intergouvernementale ­ car ils représentent la souveraineté populaire et sont garants de la légitimité démocratique. L'ordre du jour de la CIG ne doit pas se limiter aux trois reliquats d'Amsterdam (« left-overs ») mais doit être étendu à d'autres questions. Il appartiendra à la présidence portugaise de l'Union de le compléter. M. Napolitano a également rappelé que le principe de subsidiarité devait toujours guider le développement de la construction européenne.

M. Barnier, membre de la Commission européenne chargé de la Conférence intergouvernementale, a fait observer que l'ampleur de l'élargissement de l'Union de même que les dates probables pour les premières adhésions constituaient des faits nouveaux depuis le Traité d'Amsterdam. L'on s'oriente désormais vers une Union composée de plus de 25 États membres. Il ne sera plus possible de faire à 25 ce qui s'avère déjà difficile à 15. L'élargissement de l'Union ne doit pas être retardé mais bien réussi afin que les pays candidats rejoignent une Union qui fonctionne correctement. La Commission, a souligné M. Barnier, est la gardienne des Traités mais non pas la conservatrice des Traités : des changements sont nécessaires car le cadre institutionnel actuel montre ses limites. L'Union doit maintenir sa capacité décisionnelle pour réussir l'élargissement. La Commission dans son « avis sur la réunion d'une Conférence des représentants des gouvernements des États membres en vue de modifier les Traités » (COM(2000)34) a dès lors proposé une série de modifications de certains articles des Traités. Les questions relatives à la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, à la politique européenne de sécurité et de défense ainsi qu'à la réorganisation des Traités (organisation des Traités en deux parties; d'une part les textes de base et d'autre part les textes d'application de nature moins fondamentale) ne sont pas développées dans ce document, a précisé M. Barnier.

En ce qui concerne la future composition de la Commission européenne, le commissaire européen a indiqué que la Commission avait proposé deux options : une Commission composée d'un nombre fixe de commissaires, inférieur au nombre futur d'États membres ou une Commission composée d'un commissaire par État membre auquel cas sa structure devrait être profondément réformée pour préserver son efficacité.

Lors de l'échange de vues avec les représentants des Parlements nationaux, Mme Fientje Moerman (Chambre) s'est réjouie de l'instauration d'un dialogue régulier entre le Parlement européen et les Parlements nationaux dans le cadre de la CIG. Elle a fait observer que dans une Union élargie à plus de 25 États membres, les risques de dilution étaient bien réels si des mesures appropriées n'étaient pas adoptées afin de maintenir la cohérence et l'efficacité de la construction européenne. S'adressant à M. Barnier, l'intervenante a rappelé que le gouvernement belge souhaitait le maintien d'un commissaire par État membre. Si les commissaires ne sont pas des représentants des gouvernements des États membres et exercent leurs fonctions en pleine indépendance dans l'intérêt général de la Communauté, il est toutefois à craindre que les États membres qui ne disposeraient plus d'un commissaire ne se trouvent néanmoins fragilisés par rapport aux États qui auraient conservé « leur » commissaire. Mme Moerman s'est interrogée sur les modalités concrètes du fonctionnement de la Commission au cas où la première option était retenue (un nombre fixe de commissaires, inférieur au nombre futur d'États membres).

La question de la composition de la Commission a suscité un grand nombre d'interventions de la part des représentants des Parlements nationaux. Selon certains, il serait politiquement dangereux pour un État membre de renoncer à son (ses) siège(s) de commissaire. D'autres intervenants ont par contre souligné que la Commission risquait de perdre sa crédibilité si le nombre de commissaires n'était pas limité.

Le rôle du président de la Commission, la constitution de listes européennes pour les élections du Parlement européen, l'extension du vote à la majorité qualifiée et de la procédure de co-décision, les formes de coopération renforcée, la repondération des voix des États membres et la question de la double majorité (majorité des États membres représentant une majorité de la population totale de l'Union) ont également fait l'objet de nombreuses interventions.

Le commissaire européen, M. Barnier, a fait observer que la réforme institutionnelle de l'Union n'aurait jamais lieu s'il fallait additionner les prudences et les réserves nationales au détriment d'une vision à long terme de la construction européenne. Si l'on devait aboutir, au Conseil européen de Nice, au « plus petit réformateur commun », le risque de voir l'Union se transformer en une vaste zone commerciale sans âme, essentiellement mue par des intérêts économiques et sans aucune vision politique de son avenir, se confirmerait graduellement.

En ce qui concerne la composition de la Commission, M. Barnier a fait observer que les deux options proposées par la Commission répondaient chacune à une logique profonde.

Si l'esprit collégial peut être maintenu au sein d'un collège de 20 commissaires qui participent de manière égale à la préparation des propositions et à la prise de décision, ce sera plus difficile avec 28 ou 30 commissaires. La Commission propose d'instaurer, dans cette perspective, un mécanisme de rotation, sur un pied d'égalité, entre chaque État membre ce qui permettrait à chaque État de garder un commissaire pendant 5 mandats sur 7 (soit 25 années sur 35).

En conclusion, M. Barnier a rappelé que la convocation d'une Conférence intergouvernementale était un processus lourd et de longue haleine : onze mois de négociations avec de nombreuses réunions. Il s'agit dès lors de profiter de la présente CIG afin de traiter d'autres sujets que les seuls « left-overs » d'Amsterdam.

Il s'est également montré favorable au renforcement de la nouvelle COSAC et à l'élection d'une cinquantaine de députés figurant sur des listes européennes.

Lors d'une seconde intervention, Mme Fientje Moermans (Chambre) a fait observer que si l'on se place dans une logique strictement européenne, il n'est pas nécessaire de conserver un commissaire par État membre. Le principe de rotation des commissaires, qui permettrait à chaque État membre de conserver un commissaire, est toutefois décrit de manière ambiguë dans le document de la Commission. Ce principe s'applique-t-il à tous les États membres (donc y compris les « grands ») ou bien n'est-il envisagé que pour les « petits » États membres. Si ce principe devait s'appliquer à tous les Etats membres, n'y a-t-il pas lieu de craindre une certaine réticence dans le chef des « grands » États ?

L'intervenante a également souligné que le gouvernement belge préconisait un recours plus fréquent aux coopérations renforcées afin de ne pas bloquer les États qui souhaitent aller de l'avant dans une série de domaines. L'instauration d'une coopération renforcée devrait être possible dès que huit États membres au minimum le souhaitent. Enfin, il convient de supprimer le droit de veto au Conseil des ministres et d'étendre le vote à la majorité qualifiée à tous les domaines, y compris la politique étrangère et de sécurité commune (PESC).

M. Giorgos Dimitrakopoulos, (PE) co-rapporteur de la Commission des Affaires constitutionnelles du Parlement européen sur la CIG (avec le député européen Jo Leinen) a également souligné que l'ordre du jour actuel de la Conférence intergouvernementale n'était pas suffisant et qu'il ne permettait pas à l'Union d'accueillir de nouveaux États membres. D'autres questions doivent être traitées avant l'élargissement.

M. Jo Leinen, (PE) a fait observer que l'Union européenne ne doit pas être qu'une simple zone de libre échange mais doit évoluer vers une Union politique. Elle doit donc être dotée d'organes lui permettant d'agir efficacement sur le plan politique. Il a également rappelé la nécessité de garantir la démocratie au niveau supranational et d'établir des relations plus approfondies et plus transparentes avec les citoyens européens.

D'autres intervenants ont évoqué la question de l'inclusion de la Charte européenne des droits fondamentaux de l'Union européenne dans les Traités, l'élaboration d'un catalogue de compétences au niveau européen, la réforme des mécanismes de révision des Traités, la prise en compte de toutes les institutions européennes ­ et non pas de la seule Commission ­ lors de la désignation des candidats proposés par chaque État membre ainsi que la participation des représentants des parlements nationaux à deux sessions (au printemps et en automne) du Parlement européen.

Mme Nicole Fontaine, présidente du Parlement européen, a plaidé pour une plus grande parlementarisation de la réforme institutionnelle entre autres par le biais d'une plus large participation du Parlement européen à la CIG. Elle souhaite une identification des domaines où le contrôle du Parlement européen et des Parlements nationaux se révèle insuffisant, le renforcement de la codécision du Parlement européen, une Union plus transparente ainsi que l'application stricte du principe de subsidiarité afin de garantir une prise de décision aussi proche que possible des citoyens.

Enfin, M. Dimitris Tsatsos (PE) a demandé l'appui des Parlements nationaux afin que le Parlement européen puisse peser davantage dans la prise de décision lors de la CIG.

Les rapporteuses,
Marie-José LALOY (S)
Fientje MOERMAN (Ch)
Le président,
Philippe MAHOUX (S)

Anne VAN LANCKER (PE)

De rapporteurs, De voorzitter,
Marie-José LALOY (S)


ANNEXES

1. Conseil européen de Cologne ­ Conclusions de la présidence

2. Position du gouvernement belge

3. Rapport du groupe des sages

4. Mémorandum Benelux

5. Conseil européen d'Helsinki :

5.1. Conclusions de la présidence

5.2. Lignes directrices pour une réforme du Conseil

5.3. Renforcement de la PESC

6. Résolution du Parlement européen

ANNEXE 1


CONCLUSIONS DE LA PRESIDENCE
CONSEIL EUROPÉEN DE COLOGNE
3 ET 4 JUIN 1999

Conférence intergouvernementale
sur les questions institutionnelles

52. Afin de garantir l'efficacité des travaux des institutions de l'Union européenne également après l'élargissement, le Conseil européen confirme qu'il entend convoquer, pour le début de l'an 2000, une conférence des représentants des gouvernements des États membres afin de résoudre les questions institutionnelles qui n'ont pas été réglées à Amsterdam et qui doivent l'être avant l'élargissement. La clôture de la conférence et l'accord sur les modifications à apporter au traité devraient intervenir à la fin de l'an 2000.

53. Conformément au « protocole sur les institutions dans la perspective de l'élargissement de l'Union européenne », annexé au traité d'Amsterdam, ainsi qu'aux déclarations faites à ce sujet, le mandat de la conférence intergouvernementale portera sur les points suivants :

­ taille et composition de la Commission européenne;

­ pondération des voix au sein du Conseil (nouvelle pondération, introduction d'une double majorité; seuil pour les décisions à la majorité qualifiée);

­ extension éventuelle du vote à la majorité qualifiée au sein du Conseil.

La conférence pourrait traiter aussi d'autres modifications à apporter au traité, dans la mesure où elles concernent les institutions européennes dans le cadre des points susmentionnés et où elles découlent de la mise en oeuvre du traité d'Amsterdam.

54. Le Conseil européen invite la future présidence à établir, sous sa propre responsabilité, un rapport complet recensant et expliquant les possibilités qui s'offrent pour résoudre les questions en suspens, qu'elle soumettra au Conseil européen d'Helsinki. Ce faisant, la présidence tiendra compte des propositions présentées par les États membres, la Commission européenne et le Parlement européen. La présidence pourra examiner en outre la question d'une consultation supplémentaire. Il est demandé au Conseil d'arrêter les modalités de l'association du Parlement européen à ces travaux. Un échange de vues approprié aura lieu avec les candidats à l'adhésion dans le cadre des enceintes existantes.

ANNEXE 2


NOTE AU CONSEIL DES MINISTRES

Objet : Position du gouvernement belge par rapport aux réformes institutionnelles et à l'élargissement de l'Union européenne

1. Le Sommet européen de Helsinki se penchera sur deux thèmes capitaux pour l'avenir de l'Union européenne. Il y a tout d'abord la préparation de la Conférence Intergouvernementale, qui doit mener les réformes nécessaires afin de maintenir intactes l'efficacité et la combativité de l'Union, y compris après son élargissement, qui entraînera dans les dix prochaines années une augmentation sensible du nombre d'États membres. Pour le Gouvernement belge, les deux thèmes sont intimement liés, en ce sens que l'élargissement de l'Union à de nouveaux membres ne peut être réalisé qu'après que les réformes institutionnelles nécessaires à cet effet soient acquises.

Le gouvernement belge tient dès à présent à affirmer des principes qui lui paraissent essentiels sur ces deux thèmes. Cette position est une première étape d'un processus évolutif de réflexion sur ces thèmes entamé au niveau belge et européen dans la perspective du Conseil Européen d'Helsinki. En particulier, la position du gouvernement devra régulièrement être adaptée en fonction des positions du Parlement et des entités fédérées ainsi que celles des institutions européennes. À cet égard, le gouvernement tiendra notamment compte de deux rapports récents concernant ces sujets : d'une part le rapport « Implications institutionnelles de l'élargissement » du comité des sages présidé par l'ancien premier ministre Jean-Luc Dehaene; d'autre part, le rapport intérimaire de la Commission Européenne relatif à l'élargissement.

La CIG et les réformes institutionnelles

2. Dans le Protocole joint au Traité d'Amsterdam, il est stipulé qu'à l'occasion du prochain élargissement, seul un citoyen de chaque État membre siégera à la Commission. Étant donné que les 5 plus grands États membres renoncent ainsi à leur second commissaire, ce même Protocole indique que la pondération des voix au sein du Conseil sera modifiée (comprenez, au bénéfice des plus grands pays). La Belgique, la France et l'Italie ont joint au Protocole une Déclaration qui précise « qu'un élargissement clair des cas dans le cadre desquels il est voté à la majorité qualifiée, constitue un des principaux éléments dont il convient de tenir compte » lors du renforcement des institutions, tel qu'envisagé dans le Protocole. On aboutit ainsi aux trois éléments de base pour la prochaine CIG ­ lesdits « left-overs » de Amsterdam : la composition de la Commission, la pondération au sein du Conseil et l'élargissement du champ d'application des votes à la majorité qualifiée.

3. Le gouvernement belge considère que le rapport « Implications institutionnelles de l'élargissement » du comité des sages présidé par l'ancien premier ministre Jean-Luc Dehaene, constitue une excellente base pour les négociations concernant les réformes institutionnelles nécessaires. Le rapport Dehaene est suffisamment ambitieux afin de préserver le fonctionnement efficace de l'Union européenne après l'élargissement à 20 ou plus États membres (par exemple le renforcement du rôle du président de la Commission, l'extension du vote à la majorité qualifiée, le souci de rendre plus opérationnelle la coopération renforcée).

En même temps, le rapport Dehaene prend suffisamment en compte l'équilibre des intérêts de tous les États membres, et particulièrement de la Belgique (entre autres le maintien d'un commissaire par État membre, la définition de règles objectives concernant la répartition par État membre des sièges du Parlement Européen).

En plus, le gouvernement belge partage l'opinion du comité des sages quant à la nécessité d'une CIG globale qui, avant le premier élargissement, prendrait des décisions sur un large éventail de réformes institutionnelles. Le gouvernement belge incite la Commission européenne à proposer un projet de traité au début des négociations.

Finalement, le gouvernement belge est prêt à prendre à coeur la suggestion du comité des sages relative à la réorganisation des textes des traités. De cette façon serait opérée une distinction entre un traité de base d'une part (entre autres objectifs, principes et orientations générales, cadre institutionnel ainsi que la charte des droits fondamentaux des citoyens,) et un texte séparé, d'autre part, contenant les autres dispositions. Il faudra, toutefois accorder une attention particulière à la sélection des dispositions relevant du traité de base.

4. L'accord de gouvernement du 7 juillet 1999 précise que la Belgique plaidera « pour le maintien du principe selon lequel chaque État membre a droit à au moins un commissaire ». Comme indiqué ci-dessus, ce principe est confirmé dans le Protocole au Traité d'Amsterdam. La Belgique veillera à ce que ce principe ne soit pas modifié.

5. Pour ce qui est de la pondération des voies au sein du Conseil, il est fait mention dans le Protocole en question de deux formules : soit une nouvelle pondération des voix en faveur des grands États membres, soit une double majorité dans le cadre de laquelle, à la demande d'un État membre, la majorité qualifiée existante est liée à une majorité de la population de l'Union. Le gouvernement belge opte pour la seconde formule car elle met en valeur de la manière la plus visible le contenu démocratique de la prise de décision européenne.

6. « La généralisation du vote à la majorite qualifiée » est un principe retenu également dans l'accord de gouvernement. Cela concerne un principe en faveur duquel le gouvernement s'engagera durant la prochaine CIG. En effet, il est clair que la règle de l'unanimité paralysera une Union élargie, qui comptera, à terme, plus de 25 membres. Sans passage de l'unanimité à la majorite qualifiée, le bon fonctionnement du marché interne et de l'Union monétaire européenne (UEM) risque de s'enliser totalement. Il est clair que l'extension des décisions à la majorité qualifiée aura comme conséquence une extension parallèle de la co-décision du Parlement Européen.

7. Le gouvernement belge entend toutefois marquer les nuances adéquates dans ce débat. Tout d'abord, il doit être clair que les dispositions relatives à l'architecture institutionnelle de l'Union et l'équilibre entre les institutions doivent rester intactes et par conséquent réglées par la règle de l'unanimité. Cela s'applique par exemple à la règle stipulant que le Conseil ne peut déroger à une proposition de la Commission que moyennant unanimité des voix. Outre ces dispositions constitutionnelles, il y a des prescriptions quasi-constitutionnelles qui, aux termes du gouvernement belge, n'entrent pas davantage en compte pour la majorité qualifiée. On pense plus particulièrement aux dispositions en matière de siège des institutions et d'utilisation de toutes les langues des États membres en tant que langues officielles de l'Union.

8. Par contre, le gouvernement belge veillera à ce que dans les domaines de politique qui concernent directement le développement et le fonctionnement du marché unique et de l'UEM, le passage de l'unanimité à la majorité qualifiée puisse être concrétisé. Dans ce cadre, le gouvernement belge pense plus particulièrement aux dispositions du Traité relatives à la politique sociale, fiscale et en matière d'environnement. Notamment, en ce qui concerne la convergence de la pression fiscale et parafiscale dans les États membres, le gouvernement belge plaide en faveur d'une prise de décision à la majorité qualifiée. Le gouvernement belge veillera toutefois à ce que la création d'instruments européens de fiscalité ne mènera pas à l'augmentation de la pression globale fiscale et parafiscale en Belgique.

9. Voilà pour ce qui est de la position de la Belgique en ce qui concerne les trois dits « left-overs » d'Amsterdam mais le gouvernement belge souhaite, durant la prochaine CIG, aller plus loin que les points à l'ordre du jour. À cet effet, il invoque à nouveau le Protocole mentionné ci-dessus qui précise, cette fois dans son second article, que les institutions de l'Union doivent être revues « intégralement » ­ et cela signifie plus que les trois « left-overs » ­ avant que l'Union ne compte « plus de 20 membres ». Indépendamment de la question de savoir si la première vague d'élargissement nous mènera ou non à dépasser la barre des 20 membres, le gouvernement belge est conscient que la prochaine CIG sera la dernière conférence intergouvernementale avant le premier élargissement. Posons que ce premier élargissement fasse passer le nombre de membres à 20, il est totalement invraissemblable qu'une seconde CIG soit organisée qui concrétiserait alors le révision « intégrale » des institutions. C'est pour cette raison que la Belgique plaide pour que la prochaine CIG programmée réfléchisse notamment au renforcement du rôle du président de la Commission, à l'opérationnalité de la Commission, à la responsabilité individuelle des Commissaires et à la coopération renforcée.

10. Le gouvernement belge plaide pour que le principe et les modalités de la responsabilité individuelle des Commissaires soient réglées par traité. Les équilibres institutionnels, notamment entre le Parlement et la Commission, doivent en effet être préservés. Et il est dangereux de faire dépendre cet équilibre des rapports de force aléatoires entre les institutions en fonction de la conjoncture politique du moment. C'est pour cette raison que la Belgique aspire à ce que le principe de responsabilité individuelle des Commissaires soit fixé dans le traité.

11. Les dispositions du Traité relative à ladite coopération renforcée sont, comme déjà formulé, inopérante de fait parce que trop de conditions ­ difficiles à remplir ­ y sont liées. Il est évident qu'à mesure que l'Union s'élargira, la possibilité de continuer avec un groupe d'États membres via la coopération renforcée, ne cessera de gagner en intérêt. Pour cette raison, le gouvernement belge plaide résolument pour que les conditions d'application d'une coopération renforcée soient assouplies. La Belgique demande notamment que la condition précisant qu'une collaboration plus étroite n'est possible que si une majorité des États membres y collabore, soit assouplie. Le gouvernement belge estime également qu'après l'élargissement, une possible coopération renforcée doit pouvoir être maintenue avec au moins 8 États membres.

L'élargissement de l'Union

12. Le deuxième point important inscrit à l'ordre du jour du Conseil européen d'Helsinki, se rapporte à l'élargissement de l'Union. En ce qui concerne les six pays avec lesquels des négociations d'élargissement sont actuellement en cours (l'Estonie, la Pologne, la République tchèque, la Hongrie, la Slovénie et Chypre), la question est tout d'abord de savoir s'il est nécessaire de fixer, à l'occasion du Conseil européen d'Helsinki, des dates butoirs pour lesquelles les pays précités seraient autorisés à adhérer à l'Union comme États membres. Le Gouvernement belge est convaincu que cela n'est pas souhaitable pour plusieurs raisons. Il n'appartient pas à l'Union d'anticiper sur la date lorsqu'un interlocuteur s'avère en ligne de compte pour une adhésion. Il est d'ailleurs possible que les dates butoirs fixées par l'Union, outre le caractère artificiel que ces dates revêtent, mènent au niveau politique à des différenciations pénibles entre les interlocuteurs. Le gouvernement belge attire d'ailleurs l'attention sur le fait qu'un certain nombre d'interlocuteurs ne demandent pas de fixer pareilles échéances.

13. Ensuite, reste également à savoir s'il est possible d'engager des négociations d'élargissement avec les six autres pays candidats (la Lettonie, la Lituanie, la République slovaque, la Bulgarie, la Roumanie et Malte). Sous réserve des rapports d'avancement qui seront bientôt libérés par la Commission à ce propos, le Gouvernement belge considère qu'il est souhaitable d'engager des négociations avec chacun des pays précités qui se porte candidat à une adhésion. Toute différenciation parmi les pays candidats risque en effet d'émettre des signaux politiques contraires : il serait d'ailleurs préférable d'abandonner la distinction entre les « ins » et les « pré-ins ». Il est évident que le Gouvernement belge se rend pleinement compte que chacun des six candidats n'est pas aussi bien préparé à une adhésion. Cette constatation résultera toutefois des négociations et il est préférable d'éviter de la formuler au niveau de l'extérieur et a priori. En effet, les propres mérites de chaque État membre qui se porte candidat seront appréciés.

14. La question est enfin de savoir si le statut de pays candidat pourrait être accordé à la Turquie. Cette reconnaissance peut constituer pour la Turquie un élément d'incitation qui l'encourage à poursuivre la voie dans laquelle elle s'est engagée et qui devrait mener à une démocratisation poussée et un meilleur respect des droits de l'homme et des droit des minorités. Dans le sens inverse, l'octroi à la Turquie du statut de candidat permet à l'Union de respecter les critères dits de Copenhague qui sont de nature tant politique qu'économique. Ce n'est qu'au moment ou tous ces critères sont remplis et après avoir entièrement satisfait à ces critères qu'un engagement des négociations d'élargissement pourrait être envisagé. L'octroi du statut de candidat n'anticipe en aucun cas sur cet engagement mais soulignera la nécessité que la Turquie puisse se voir ouvrir des perspectives au niveau européen.

Guy VERHOFSTADT

Louis MICHEL

ANNEXE 3


IMPLICATIONS INSTITUTIONNELLES
DE L'ÉLARGISSEMENT

Rapport à la Commission européenne

Bruxelles, le 18 octobre 1999

Richard von WEIZSÄCKER

Jean-Luc DEHAENE

David SIMON

Le premier septembre 1999, le President désigné de la Commission européenne, M. Romano Prodi, a invité M. Jean-Luc Dehaene, ancien premier ministre de la Belgique, M. Richard von Weizsäcker, ancien président de la république fédérale d'Allemagne, et Lord Simon of Highbury, ancien président de British Petroleum et ancien ministre, à donner leur avis en toute indépendance, pour la mi-octobre, sur les implications institutionnelles de l'élargissement, en vue de la prochaine conférence intergouvernementale.

Le groupe avait pour mandat de recenser les problèmes institutionnels à résoudre et d'indiquer, arguments à l'appui, les raisons pour lesquelles ils devaient être examinés lors de la CIG. Il ne lui a pas été demande de formuler des propositions précises, puisqu'il incombera aux États membres et aux institutions de s'acquitter de cette tâche, avant et pendant la CIG.

Le groupe s'est réuni plusieurs fois en septembre et en octobre, sous la présidence de M. Dehaene.

Il a remis son rapport le 18 octobre.

1. Remarques liminaires : le défi à relever

1.1. Urgence des réformes

La structure institutionnelle de l'Union européenne a été conçue dans les années cinquante pour une Communauté de six États membres. Il s'agissait alors d'une construction très originale, qui a bien servi l'Europe. C'est en grande partie grâce à ces institutions que les relations politiques, sociales et économiques entre les États et les sociétés de l'Europe occidentale se sont fondamentalement transformées d'une manière pacifique et équilibrée. Les éléments de base de cette structure doivent à l'évidence être conservés.

Aujourd'hui, cependant, il apparaît clairement que ce système ne fonctionne plus comme il le devrait dans une Union à quinze. La question qui se pose automatiquement est de savoir si les institutions, telles qu'elles ont été conçues à l'origine, pourront servir efficacement les intérêts d'une Union qui pourrait, dans un avenir proche, compter 25 à 30 membres, voire davantage. Depuis les années cinquante, les traités successifs ont certes adapté le cadre institutionnel, mais aucune tentative n'a été faite pour procéder à une réforme complète. Or, il nous faudra, tôt ou tard, relever ce défi.

Les États membres sont d'accord sur ce point. Lors de la signature du Traité d'Amsterdam, ils ont reconnu la nécessité d'engager en temps utile une réforme institutionnelle complète, qui permette à une Communauté élargie de fonctionner efficacement. Cet accord est matérialisé par un protocole qui a été annexé, à Amsterdam, aux traités européens.

Ce protocole envisageait une démarche en deux temps : une réforme limitée avant le premier élargissement, suivie d'une réforme complète avant que le nombre d'États membres ne dépasse vingt.

L'évolution positive du processus d'adhésion depuis Amsterdam a rendu cette distinction plus floue. Les négociations se poursuivent avec six pays candidats, et il est probable que le Conseil européen d'Helsinki engagera aussi des pourparlers avec un nouveau groupe. Cela signifie que le prochain élargissement pourrait déjà porter le nombre des États membres de l'Union à plus de vingt, et que le laps de temps entre ce premier élargissement et le deuxième sera, en tout état de cause, plus bref que prévu. Devant cette évolution, qui pourrait bien s'accélérer au cours des prochains mois, le groupe a conclu que l'esprit même du protocole d'Amsterdam, les besoins du systeme institutionnel de l'Union et les difficultes inhérentes à un ordre du jour restreint imposaient de s'atteler immédiatement à une entreprise de réforme complète. Une telle occasion ne se représentera peut-être plus.

1.2. L'élargissement : un impératif

Les États membres s'accordent aussi à voir dans l'élargissement un objectif dont l'importance politique et historique est telle, pour l'Union comme pour les pays candidats, qu'il ne saurait être retardé ou repoussé pour cause de réforme institutionnelle incomplète. Pour la génération actuelle de dirigeants européens, consiste à atteindre l'objectif fondamental de l'élargissement tout en résolvant, dans le même temps, l'un des problèmes qu'il pose, à savoir la nécessité de procéder à une réforme qui permette à une Union élargie de bien fonctionner.

Le Conseil européen de Cologne a estimé que pour ne pas retarder l'élargissement, la prochaine CIG devait se conclure avant la fin de l'an 2000. Le groupe considère cette échéance comme impérative.

1.3. Le défi à relever

Le défi consiste donc, avant la fin de l'an 2000, à identifier les mesures de réforme nécessaires et à préciser les moyens à mettre en oeuvre.

Sur le premier point, c'est-à-dire sur les mesures de réforme nécessaires, le groupe a constaté que les trois thèmes définis à Cologne avaient des implications ou des conséquences qui allaient bien au-delà de l'apparente simplicité de leur formulation. Il préconise d'élargir l'ordre du jour en y incluant le remaniement des textes des traités, afin d'éviter des révisions incessantes.

Sur le second point, à savoir les moyens de procéder à la réforme, il suggère de tirer les enseignements d'Amsterdam et d'accélérer la procédure de négociation de la CIG; cette accélération pourrait permettre, si la volonté politique est suffisante, d'aboutir à un programme de réforme plus substantiel dans le délai prescrit.

1.4. Se rapprocher du citoyen

Au cours de ses travaux, le groupe a débattu de la nécessité d'une plus grande simplicité et d'une plus grande clarté dans la gestion des affaires européennes, et d'introduire plus de transparence, de flexibilité et de responsabilisation dans le fonctionnement des institutions. Le fait que la plupart des Européens ne comprennent pas la manière dont nos institutions fonctionnent est de toute évidence un problème sur lequel les gouvernements doivent se pencher. Ce problème n'est pas directement lié à l'élargissement, mais il est clair que les citoyens des nouveaux États membres seront plus déconcertés encore que ceux des pays ayant derrière eux un demi-siècle d'intégration européenne. Nous devons trouver les moyens de nous rapprocher des citoyens ou de renouer le contact avec eux : une démythification s'impose en ce qui concerne le pourquoi et le comment du fonctionnement des institutions, et ceux auxquels elles doivent rendre compte de leurs actes.

La transparence repose sur la clarté et sur la compréhension par le public des intentions et des objectifs poursuivis. La déclaration du millénaire (« Millennium Declaration ») que prépare la présidence finlandaise pour le Conseil européen d'Helsinki prendra tout son sens dans ce contexte. Elle pourrait être réutilisée dans le préambule du futur traité.

De même, l'adoption d'une Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, réclamée par le Conseil européen de Cologne dans ses conclusions, renforcerait la légitimité et la pertinence des institutions aux yeux de l'opinion. Comme l'indique le Conseil européen, il faudra examiner si la charte peut être intégrée dans les traités, et, le cas échéant, de quelle manière.

Le remaniement des traités proposé dans le présent rapport contribuerait aussi, par voie de conséquence, à cette simplicité et à cette clarté qui sont indispensables à une meilleure compréhension d'ensemble. Des efforts analogues devraient être faits pour clarifier l'élaboration du droit dérivé et du budget. En tout état de cause, les négociateurs devraient toujours garder à l'esprit, lors du processus de réforme institutionnelle, les objectifs primordiaux que sont la clarté, la simplicité et la transparence.

Cette clarté et cette meilleure compréhension par le public impliquent aussi, à longue échéance, que les États membres prennent position sur ce que seront à terme les frontières géographiques de l'Union. Le groupe ne suggère pas de s'atteler dès maintenant à cette tâche, mais le problème ne doit pas être perdu de vue.

2. Efficacité des institutions

2.1. Arguments en faveur du changement

C'est un fait que la structure institutionnelle de l'Union présente depuis quelques années des signes de tension. Chacun reconnaît que le fonctionnement du Conseil laisse à désirer : la prise de décision est lente, les débats trop longs, les différents Conseils, trop nombreux, sont insuffisamment coordonnés, les chefs de gouvernement se trouvent saisis de maints problèmes opérationnels et législatifs qui les empêchent de se concentrer sur les décisions stratégiques.

De toute évidence, l'efficacité du processus institutionnel a également pâti du fonctionnement insatisfaisant de la Commission. Celle-ci a reconnu certains défauts de gestion, qui ont été analysés dans un rapport controversé émanant d'experts indépendants.

Le Parlement européen lui-même a vu ses pouvoirs renforcés par les traités successifs, mais il n'exerce pas sur l'opinion publique une influence correspondante, comme il le devrait en sa qualité d'assemblée élue.

L'équilibre entre institutions, qui est un élément essentiel de stabilité et d'efficacité du système, est également compromis.

Un accroissement sensible du nombre de membres ne peut qu'exacerber les problèmes existants en matière de prise de décision et de gestion. Les divergences d'intérêts se creusent, les débats sont plus lents, les décisions plus difficiles à prendre, la gestion plus complexe. Or, les institutions européennes connaissent des problèmes de fonctionnement qui sont déjà évidents aujourd'hui et qui affectent le fonctionnement du triangle institutionnel : Commission, Conseil et Parlement. Ces problèmes ne peuvent que s'aggraver. Leur solution passe nécessairement par une réforme institutionnelle.

La nécessite d'une réforme, reconnue par le Traité d'Amsterdam, a conduit le Conseil européen de Cologne à indiquer trois thèmes sur lesquels il est à l'évidence indispensable de réfléchir : la taille et la composition de la Commission, la pondération des voix au sein du Conseil (nouvelle pondération, introduction d'une double majorité, seuil pour les décisions à la majorité qualifiée), et l'extension du vote à la majorité qualifiée. Le groupe considère que ces trois thèmes ne peuvent être débattus isolément. Premièrement, parce que les questions qu'ils soulèvent sont plus nombreuses qu'il n'y paraît à première vue. L'extension de la codecision avec le Parlement, par exemple, est généralement considérée comme une conséquence démocratique de l'extension du vote à la majorité. Deuxièmement, parce que les arguments qui ont décide du choix de ces thèmes sont aussi valables dans d'autres cas. Par exemple, la Commission n'est manifestement pas la seule institution dont le nombre de membres pose problème.

Les thèmes définis par le Conseil européen sont à l'évidence extrêmement importants, mais ils doivent être envisagés dans le cadre d'une réforme institutionnelle plus vaste.

Dans une Union plus large et plus diversifiée, il sera encore plus important qu'aujourd'hui de disposer d'une certaine flexibilité à l'intérieur du cadre institutionnel. L'élargissement se traduira par une plus grande diversité. Cela ne signifie pas qu'il faille permettre aux États membres de se désengager à leur gré de telle ou telle politique : l'Union européenne ne survivrait pas si chaque État pouvait choisir entre les différentes obligations qu'elle impose. En revanche, il est clair que dans un ensemble plus hétérogène, certains États membres voudront aller plus loin ou avancer plus vite que d'autres. Désireux de tirer parti des politiques communes et des objectifs et réalisations de l'Union, ils souhaiteront coopérer plus étroitement les uns avec les autres. Cela semble légitime et indispensable.

Faute d'avoir cette possibilité, les États membres auront tendance à nouer des liens de coopération en dehors de l'Union (Schengen) ou de ses institutions (Euro 11). Ces solutions ne sont pas sans affecter l'équilibre institutionnel de l'Union et privent les États membres, ainsi que leurs citoyens, des garanties démocratiques et judiciaires qu'offre un cadre institutionnel.

La flexibilité n'est aucunement dirigée contre les pays candidats, et elle n'entravera pas leur adhésion. Les négociations d'adhésion pourraient au contraire être accélérées s'il devenait effectivement possible de coopérer plus étroitement sur certaines questions plus ardues. Le principe selon lequel la flexibilité est accessible à tous les États membres remplissant les conditions nécessaires a toujours été la règle dans l'Union européenne. Au besoin, il devra être réaffirmé.

L'efficacité de la représentation des institutions européennes dans les relations extérieures demande à être réexaminée et renforcée. L'aptitude à jouer un rôle de premier plan sur la scène mondiale est l'un des moteurs de l'intégration européenne depuis plusieurs décennies. La dynamique de mondialisation vient renforcer cette aspiration. Une Union européenne élargie sera encore plus apte et, on peut l'espérer, encore plus déterminée qu'aujourd'hui à jouer un rôle d'une telle envergure dans une économie mondialisée. De fait, ce devrait être l'un de ses principaux objectifs.

2.2. Propositions

2.2.1. Commission

Depuis la conclusion des négociations relatives au Traité d'Amsterdam, il est implicitement convenu que le nombre des membres de la Commission européenne augmentera au fil des élargissements successifs. Pour des raisons compréhensibles, la plupart des États membres refusent d'envisager une Commission dans laquelle leur pays ne soit pas représenté. Mais la Commission n'est pas et ne doit pas devenir une assemblée de représentants nationaux. C'est une institution européenne originale, qui a un rôle crucial à jouer, aussi bien dans la prise de décision qu'en matière de gestion. Elle doit donc rester efficace et opérationnelle, et être pleinement respectée. Le groupe considère que, pour préserver ces caractéristiques dans une structure plus large, il est essentiel de renforcer l'autorité du Président et de délimiter clairement la responsabilité individuelle des commissaires. Ces deux points devraient être examinés dans le cadre de la CIG, en même temps que la question de la taille et de la composition de la Commission, qui est mentionnée dans les conclusions du Conseil européen.

Le Traité d'Amsterdam a renforcé les pouvoirs du Président de la Commission. Selon le groupe, il serait souhaitable, pour permettre au Président de travailler efficacement avec un nombre accru de membres, d'aller plus loin dans cette direction. Le Président devrait pouvoir influer davantage sur la nomination et le choix des commissaires. Il devrait disposer de pouvoirs clairement définis pour organiser, coordonner et guider le travail de l'institution.

Les événements récents posent la question de la responsabilité individuelle des commissaires et de son articulation par rapport à la responsabilité collective de la Commission. Le Président Prodi a résolu ce problème de façon informelle, en demandant à l'avance à chaque commissaire de s'engager à démissionner s'il le lui demandait. Le groupe considère que cette solution informelle devrait être formalisée dans le cadre du traité, de manière à confirmer l'autorité du Président tout en respectant comme il se doit le caractère collégial de la Commission. Cette mesure permettrait aussi de clarifier les pouvoirs respectifs du Parlement et du Président en ce qui concerne les résultats des commissaires et leur mandat.

2.2.2. Majorité qualifiée

Il va de soi que dans une Union élargie, le vote à la majorité qualifiée doit être la règle si l'on veut que le processus de décision continue de bien fonctionner. Lorsque l'unanimité est requise, le risque de blocage augmente proportionnellement au nombre et à la diversité des membres. Par ailleurs, l'experience de la Communaute elle-même montre que le vote à la majorité qualifiée est un processus décisionnel dynamique et propice au consensus, même si peu de questions sont effectivement mises aux voix.

L'extension du vote à la majorité qualifiée devrait évidemment s'appliquer aux affaires communautaires (premier pilier), mais elle est également importante pour les deuxième et troisième piliers.

Les trois thèmes indiqués dans les conclusions du Conseil européen (extension, repondération et seuil) sont liés. La solution retenue devra être équilibrée et conçue de manière à renforcer la capacité décisionnelle de l'Union.

Le groupe estime que le Parlement devrait disposer d'un pouvoir de codecision dans tous les cas où le vote à la majorité qualifiée s'applique à des questions législatives relevant du premier pilier. L'extension du vote à la majorité qualifiée dans ce domaine devrait donc s'accompagner, en parallèle, d'une extension de la procédure codécision. Il s'agit là d'une exigence démocratique, qui prend tout son sens dans une Union élargie, c'est-à-dire potentiellement plus éloignée du citoyen. Cette mesure contribuerait aussi, comme cela est souhaitable, à rendre les procédures de décision plus simples et plus transparentes.

2.2.3. Repondération des voix

Le groupe admet que l'élargissement de l'Union, dans un proche avenir, à un grand nombre de pays qui sont pour la plupart de petits pays ou des pays de taille moyenne, nécessite de réévaluer le poids relatif des États membres dans le processus de prise de décision. Cette question revêt une grande importance, tant sur le plan politique que sur celui des symboles, mais le groupe estime que son mandat ne l'autorise pas à formuler des propositions sur ce point.

2.2.4. Conseil

Le Conseil joue un rôle central dans le processus de prise de décision de l'Union. La quasi-totalité des gouvernements et des observateurs extérieurs reconnaissent que son fonctionnement laisse à désirer et que, si rien ne change, l'arrivée de nouveaux États membres reduira encore son efficacité. De nombreuses propositions de reforme existent, dont l'une, importante, est l'oeuvre du secrétariat général du Conseil (rapport Trumpf-Piris). La plupart de ces propositions, comme la réduction significative du nombre des formations du Conseil ou la mise en place d'un mécanisme efficace de coordination des différentes formations, n'exigent aucune modification des traités et le groupe croit fermement qu'il convient d'approfondir ces propositions parallèlement à la CIG. Certaines modifications des traités pourraient toutefois se révéler nécessaires ultérieurement, afin de réorganiser le rôle de la présidence, par exemple, ou pour distinguer plus clairement entre les rôles exécutif et législatif du Conseil. De telles modifications renforceraient sans doute l'efficacité de l'institution et aiderait le grand public à mieux comprendre son fonctionnement. Il importe donc de laisser ouverte la possibilité de les adopter.

2.2.5. Parlement

L'article 189 du Traité instituant la Communaute européenne limite à 700 le nombre de membres du Parlement européen. Cette disposition protège efficacement l'institution contre une inflation du nombre des députés après l'élargissement. Il serait cependant utile, avant que le problème ne devienne aigu, de définir les modalités de répartition des sièges entre les États membres, une fois atteinte la limite précitée.

Certaines des propositions du présent rapport impliquent un renforcement du rôle législatif du Parlement par une extension de la procédure de codecision.

Il convient aussi que le Parlement, tout comme les autres institutions, réexamine ses méthodes de travail, de manière à les rendre aussi claires et transparentes que possible.

2.2.6. Autres institutions

Un accroissement du nombre des États membres cause des problèmes de taille, d'organisation et d'efficacité dans plusieurs institutions. C'est notamment le cas pour la Cour de justice, la Cour des comptes et le Comité des régions. Le groupe ne souhaite pas examiner séparément chacune de ces institutions, mais considère que les États membres devraient prendre dûment en considération les suggestions formulées par les institutions elles-mêmes (par exemple la Cour de justice) ou par des comités indépendants (comme le Comité d'experts indépendants qui, dans son rapport sur la réforme de la Commission, a proposé la désignation d'un procureur européen indépendant).

2.2.7. Relations extérieures

Le cadre juridique actuel ne garantit une représentation unitaire des intérêts européens, lors de négociations menées au niveau mondial, que si les débats portent sur les échanges de marchandises (comme le cycle de l'Uruguay). Il convient de conférer à la Communauté la capacité juridique de parler d'une seule voix sur la scène internationale lorsque sont abordées d'autres questions économiques et financières. Il s'agit de la conséquence logique de l'intégration économique et financière.

Il importe par conséquent d'examiner, lors de la CIG, la question de la représentation extérieure de l'Union, dans les négociations concernant par exemple le commerce des services ou les affaires monétaires internationales. Il faudra aussi, dans ce contexte, se pencher sur la question de la personnalité juridique de l'Union.

2.2.8. Flexibilité

Le Traité d'Amsterdam a inscrit dans le droit communautaire la notion de coopération renforcée. Le groupe n'ignore pas que le temps et les occasions ont manqué jusqu'à présent pour la traduire dans les faits et reconnaît qu'il est peut-être trop tôt pour se prononcer sur ces dispositions du traité. Le groupe relève cependant que nombre d'observateurs, tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des institutions, les considèrent comme inapplicables, en raison de leur complexité et des conditions et critères qui y sont liés. Compte tenu de l'importance croissante que revêtira la flexibilité institutionnelle dans une Union élargie et étant donné que ces dispositions peuvent effectivement faciliter l'élargissement, le groupe considère qu'il faut revoir ces dispositions.

Il devrait être possible de mettre cette coopération en oeuvre en recourant à la majorité qualifiée, ou à une majorité superqualifiée, sans qu'aucun État membre ne dispose d'un droit de veto, mais en respectant comme il convient les intérêts des États non participants. La coopération renforcée devrait englober la politique étrangère et de sécurité commune. Il importe que l'accès à ce type de coopération reste ouvert à tous les États membres qui réunissent les conditions nécessaires. Le principe doit rester que la flexibilité est un moyen de développer et de renforcer les réalisations de l'Union et non de distendre les liens qui unissent les États membres.

2.3. Mise en oeuvre

Vu les contraintes de temps, il importe que l'Union tire les leçons de ses expériences passées et fasse un sérieux effort pour accélérer le processus de négociation. La dernière CIG a été lancée le 29 mars 1996 par le Conseil européen de Turin, le premier projet de proposition de modification des traités a été dépose sur la table des négociations neuf mois plus tard, c'est-a-dire le 5 décembre 1996, et, six mois après cette date, la rédaction du nouveau traité était achevée (17 juin 1997).

Le groupe estime que, dès le début de ses travaux, la CIG doit pouvoir s'appuyer sur un projet de traité. Les expériences antérieures démontrent que cela pourrait réduire de moitié la durée de la conférence. Les questions mentionnées dans la présente section ont presque toutes été abordées par les négociateurs du Traité d'Amsterdam et ont été, depuis lors, abondamment discutées dans les milieux universitaires. La Commission, en sa qualité de représentant de l'intérêt commun de l'Union, a toujours eu le droit de présenter des propositions aux conférences intergouvernementales. Elle a généralement, dans le passé, exercé ce droit avec prudence. Cependant, compte tenu de l'urgence et de la portée des réformes ainsi que de l'ampleur des discussions déjà menées sur le sujet, il convient, selon le groupe, que la Commission dépose, des le début de la conférence, des propositions concrètes et détaillées, sous la forme d'un projet de traité. Dans les circonstances actuelles, la Commission se doit d'exercer pleinement son droit de présenter des propositions à la Conférence intergouvernementale. Il appartiendra bien entendu à la Commission de coopérer étroitement avec les autres institutions de l'Union avant de formuler ces propositions.

Comme le rapport l'indique plus haut, le groupe est conscient que nombre des problèmes que rencontrent les institutions peuvent être réglés sans modification des traités. Ce n'est toutefois pas le cas pour d'autres questions et, compte tenu de son mandat, le groupe se concentre ici sur ces dernières. L'adaptation de l'Union à l'élargissement doit cependant se concevoir comme une opération unique, revêtant une importance fondamentale, qu'elle nécessite ou non de modifier les traités. Tant le Conseil que la Commission ont engagé des processus de réforme interne, largement motivés par la perspective de l'élargissement. Le groupe estime qu'il convient de mener ces deux démarches (la CIG et les réformes sans modification des traités) de manière parallèle, dans le même élan, et suivant le même calendrier. Le groupe observe que de nombreux changements vont à l'encontre de pratiques et d'intérêts bien établis. Au vu de ces difficultés, le Conseil européen devrait donner un mandat précis exigeant qu'une série de réformes significatives n'entraînant aucune modification des traités fasse l'objet d'un accord pour la fin de l'année prochaine, au moment de la conclusion de la CIG, de façon à rendre possible une réforme générale.

3. Réorganisation des textes des traités

3.1. Arguments en faveur du changement

Le groupe estime qu'il convient de revoir en profondeur les modalités suivant lesquelles on pourra modifier à l'avenir les textes légaux qui se présentent aujourd'hui sous la forme de traités. Il faudra s'appuyer, à cet égard, sur une distinction relative à la nature des dispositions des traités actuels.

Durant ces dix ou quinze dernières années, l'Union n'a cessé de modifier ses traités. Nous étions perpétuellement en train de préparer, de négocier ou de ratifier des modifications. La situation actuelle est caractéristique : le Traité d'Amsterdam est entré en vigueur le 1er mai et, le 4 juin, le Conseil européen de Cologne a appelé à l'organisation d'une nouvelle Conférence intergouvernementale.

La révision constante des traités constitue, dans plusieurs États membres de l'Union actuelle, une source de difficultés politiques. Elle alimente un sentiment d'insécurité juridique ainsi que la crainte d'interventions incessantes et d'une centralisation progressive, qui existe, à tort ou à raison, au sein de franges importantes de l'opinion publique. Il est exclu de poursuivre dans cette voie au sein d'une Union élargie, lorsque chaque modification des traités devra être approuvée par 25 parlements différents, voire plus, avec ce que cela comportera sans doute de retards, de frustrations et de risques de paralysie complète.

3.2. Propositions

Le groupe propose que les textes actuels des traités soient divisés en deux parties :

· Le traité de base comprendrait uniquement les objectifs, les principes et orientations générales, les droits des citoyens et le cadre institutionnel. La modification de ces dispositions, comme c'est le cas aujourd'hui, s'effectuerait exclusivement à l'unanimité et impliquerait l'organisation d'une CIG ainsi que la ratification du nouveau texte par chaque État nembre. On peut supposer que de telles modifications seraient peu fréquentes.

· Un texte séparé (éventuellement plusieurs) contiendrait les autres dispositions des traités actuels, y compris celles qui concernent les politiques particulières. Ce texte pourrait être modifié par une décision du Conseil (à prendre sur la base d'une nouvelle majorité superqualifiée ou à l'unanimité, en fonction des sujets) et par un avis conforme du Parlement européen (éventuellement adopté à la majorité spéciale).

Cette nouveauté présenterait les avantages suivants :

· Elle réduirait considérablement la nécessité, existant actuellement, de modifier constamment les traités européens.

· La structure institutionnelle de base deviendrait, pour le grand public, plus lisible, mieux compréhensible et plus accessible.

· Elle introduirait une procédure de modification fondée, au moins en partie, sur une forme de vote à la majorité et prévoyant une intervention du Parlement européen.

3.3. Mise en oeuvre

D'importants travaux préparatoires ont déjà été réalisés sur ce sujet, en particulier par l'Institut universitaire européen de Florence. Des projets existent, qui indiquent comment pourrait s'opérer la division des textes. La méthode préconisée dans le présent rapport n'entraînerait donc pas de retard excessif. La Commission devrait demander à l'Institut européen de finaliser ses travaux, en coopération avec les services juridiques du Conseil, de la Commission et du Parlement. Cela contribuerait à clarifier le débat et démontrerait la faisabilité et l'intérêt d'une réorganisation des textes des traités. La CIG, une fois convoquée, disposerait d'une proposition concrète pouvant servir de base aux négociations si, comme le groupe le suggère, elle décidait de s'atteler à cette tâche.

4. Défense

Son mandat étant manifestement axé sur la réforme institutionnelle, le groupe s'est abstenu de formuler des propositions d'une autre nature. Il n'en reste pas moins que la future CIG ne se déroulera pas indépendamment de tout contexte politique.

La déclaration adoptée par le Conseil européen de Cologne au sujet du renforcement de la politique européenne commune en matière de sécurité et de défense appelle de nouveaux progrès importants. Elle entend que le Conseil puisse prendre des décisions ayant trait à l'ensemble des activités de prévention des conflits et de gestion des crises. Cela suppose la mise en place d'une capacité d'action autonome soutenue par des forces militaires crédibles. Le Conseil européen souhaite aussi l'inclusion dans l'Union europeenne de certaines fonctions de l'UEO, laquelle, en tant qu'organisation, deviendrait alors superflue. Il s'agit de nouvelles initiatives majeures, qui témoignent d'un niveau élevé d'ambition au sein du Conseil européen et qui présentent également un degré élevé de visibilité pour l'opinion publique.

La date fixée pour la mise en oeuvre intégrale de cette déclaration est la même que celle qui est prévue pour la CIG, à savoir la fin de l'an 2000.

Étant donné la coïncidence des échéances ainsi que le caractère pressant et l'importance fondamentale de la question de la politique européenne de défense, le groupe estime que la prochaine CIG ne peut l'ignorer. Cette question est tout à fait essentielle pour l'avenir de l'Europe et l'évolution de l'Union europeenne. Il faudra élaborer de nouvelles dispositions institutionnelles qui devraient s'insérer dans le cadre institutionnel unique de l'Union européenne, sans mener à la création d'un quatrième pilier. L'article 17 du Traité sur l'Union européenne offre certaines possibilités d'intégrer l'UEO à l'Union européenne sans modifier les traités. Il sera néanmoins peut-être nécessaire de procéder à des modifications, dont la CIG devrait se charger.

Conclusions

La prochaine conférence devrait viser une approche globale de la réforme institutionnelle incluant aussi la réorganisation des traités actuels. La première raison en est que la méthode en deux étapes envisagée dans le protocole annexé au Traité d'Amsterdam s'est trouvée depassée par l'extension et l'accélération du processus d'adhésion. La deuxième est que les questions abordées dans les conclusions de Cologne ont des implications qui vont bien au-delà des sujets traités. La troisième raison, enfin, est que l'on ne distingue pas, dans un avenir prévisible, de moment plus opportun pour réaliser le type de réforme institutionnelle que nécessite manifestement une Union élargie.

Cette réforme peut, et doit, se négocier au cours de l'année prochaine, pour aboutir, sous la présidence française, à un train de réformes global et substantiel. Cet objectif peut sembler constituer un formidable défi. Le groupe estime toutefois qu'il est possible de le relever si l'on adapte le processus de négociation compte tenu des expériences passées, en particulier celle de la négociation du Traite d'Amsterdam.

Comme l'indique le rapport, le groupe considère qu'un projet de proposition portant modification des traités pourrait être mis sur la table dès le debut des négociations. Ce projet devrait s'inspirer des discussions qui ont eu lieu au cours des négociations d'Amsterdam et des réflexions menées depuis lors, tant au sein des institutions que dans les milieux universitaires. Il devrait combiner ambition et réalisme. Sur cette base, une négociation engagée au début de l'an 2000 et poursuivie avec une ferme détermination politique pourrait très bien aboutir à l'adoption d'un ensemble substantiel de réformes pour la fin de l'année.

Ils'agit sans aucun doute d'un objectif ambitieux, mais l'élargissement constitue un défi historique d'une importance fondamentale et d'une grande difficulté, aussi bien pour l'Union que pour les pays candidats. À ce moment crucial de son évolution, l'Union européenne ne saurait revoir ses ambitions à la baisse. Elle doit relever le défi et se donner des objectifs à la hauteur de celui-ci.

ANNEXE 4

MEMORANDUM BENELUX

CONCERNANT LA CIG ET
LES REFORMES INSTITUTIONNELLES

1. À la veille du Conseil Européen de Helsinki (10 et 11 décembre 1999), les pays Benelux souhaitent émettre leur point de vue au sujet de la Conférence intergouvernementale (CIG) qui doit mettre en place les réformes institutionnelles indispensables pour qu'après l'élargissement, l'efficacité, le dynamisme, la démocratie et la transparence de l'Union restent intacts. Le couple élargissement-approfondissement est plus que jamais d'actualité.

2. La prochaine CIG sera sûrement la dernière conférence intergouvernementale avant les premières adhésions de nouveaux membres. La distinction établie en son temps par le Protocole du Traité d'Amsterdam entre des réformes limitées et des réformes plus importantes nous semble à présent en grande partie dépassée par la dynamique du processus d'élargissement. Les pays de Benelux sont dès lors en faveur d'une seule CIG portant sur les deux articles du protocole institutionnel. La tenue de deux CIG successives risquerait de retarder le processus d'élargissement tout en rendant plus incertain, et cela pendant une période bien trop longue, la partie précise de l'approfondissement nécessaire. C'est pour cela que les pays Benelux plaident pour que la prochaine CIG se penche sur d'autres questions que les seuls « left overs » d'Amsterdam. Les nouveaux points à l'ordre du jour devront porter exclusivement sur les institutions de l'Union et cela dans la perspective de l'élargissement. La CIG, qui doit se terminer fin 2000, doit préserver l'équilibre politique entre les institutions et maintenir la répartition actuelle des compétences.

3. Outre les « left-overs » d'Amsterdam (taille et composition de la Commission, répondération des votes au Conseil, extension du recours au vote à la majorité qualifiée), la CIG devrait donc être saisie des dossiers suivants :

­ le renforcement du rôle et de l'autorité du président de la Commission, notamment quant à la responsabilité individuelle des membres de la Commission, mais aussi sur le plan du fonctionnement interne de la Commission;

­ les mesures qui sont nécessaires pour assurer, après l'élargissement, l'éfficacité de la Cour de Justice, de la Cour des comptes et du Comité des Régions;

­ l'extension de la codécision; l'attribution futur des sièges au Parlement européen compte tenu du plafond de 700 députés inscrit dans le Traité;

­ les conditions qui doivent régir les coopérations renforcées;

­ les résultats des travaux relatifs à la dimension de défense européenne pour autant qu'il se révèle nécessaire de les incorporer dans les traités.

La CIG devra en outre s'occuper de l'examen des propositions visant à scinder les traités en deux parties.

4. Les pays de Benelux plaident pour un assouplissement des conditions de mise en oeuvre de la coopération renforcée existante, et pour un élargissement de son champ d'application au deuxième pilier. Le but ne saurait être de permettre à un groupe de pays de se désolidariser de l'activité communautaire mise sur pied dans le cadre de l'Union, mais de leur donner la possibilité de jouer un rôle de pionniers en faisant, dans un premier temps, progresser la construction communautaire en maintenant sa dynamique. Les pays du Benelux sont des lors d'avis qu'il faut renoncer à la possibilité donnée à un seul pays membre d'opposer son veto, car les intérêts des États membres non participants à une coopération renforcée sont garantis, entre autres par le rôle clé de la Commission. Les pays du Benelux estiment aussi qu'une coopération renforcée dans une Europe élargie doit rester possible avec le même nombre d'États membres qu'aujourd'hui.

5. Les pays du Benelux considèrent que la date limite convenue au Conseil Européen de Cologne pour la conclusion de la CIG, à savoir la fin 2000, devra être scrupuleusement respectée afin que l'Union soit en mesure d'honorer son engagement d'être prête pour accueillir des nouveaux membres. Les pays de Benelux soutiennent la Commission quand elle affirme que les réformes institutionnelles doivent entrer en vigueur en 2002, afin de mettre l'Union en mesure de décider en temps utile sur l'adhésion des pays candidats qui rempliront tous les critères nécessaires.

6. Les pays du Benelux adhèrent au principe que l'Union, même élargie, doit compter un commissaire pour chaque État membre. Afin de garantir l'efficacité du fonctionnement d'une Commission plus nombreuse, il est indiqué de renforcer l'autorité du président et de consolider l'autonomie de cette institution. Ainsi, le président de la Commission devrait être investi des pouvoirs additionnels relatifs à l'organisation interne et au fonctionnement de la Commission. II y aura lieu en outre d'inscrire dans les traités que le président de la Commission a le droit de révoquer un membre de la Commission et qu'il exerce cette compétence avec une large autonomie. Il convient également d'examiner les modalités de la démission collective et individuelle et comme corrolaire la dissolution du Parlement européen dans le cadre de l'équilibre interinstitutionnel.

7. En ce qui concerne la pondération des votes au Conseil, les pays du Benelux se déclarent ouverts à toute discussion portant sur les deux formules qui avaient été retenues dans le Protocole au Traité d'Amsterdam : repondération des voix ou majorité double (ou encore une combinaison des deux). Quelle que soit la formule choisie, les pays du Benelux estiment que toute repondération du poids relatif des pays, doit prendre en compte l'équilibre global entre grands et petits États membres qu'il s'agit de préserver dans la perspective de l'élargissement, l'application, le plus souvent possible, de différenciation de façon égale à toute situation semblable, ainsi que la représentativité des décisions.

8. Dans une Union élargie, l'application la plus large possible du système de prise de décision à la majorité qualifiée sera nécessaire. Les pays du Benelux sont d'avis que le passage de l'unanimité à la majorité qualifiée contribuera au développement futur et au bon fonctionnement du marché intérieur et de l'Union économique et monétaire. La délimitation des politiques du premier pilier qui entrent en ligne de compte pour la procédure de décision à la majorité qualifiée doit dès lors être evaluée à la lumière de ce critère. Par ailleurs, les dispositions de base (portant notamment sur les objectifs, les principes, les lignes de politique générale et le cadre institutionnel de l'Union ainsi que sur les droits des citoyens) doivent rester à ce stade soumises à la règle de l'unanimité. De plus, les pays du Benelux estiment qu'il est indiqué de réfléchir tant au sens de l'unanimité dans les articles relatifs aux nominations, qu'au recours accéléré aux « passerelles » du Traité d'Amsterdam. En complément de l'application étendue des décisions à la majorité qualifiée, il importe aussi de se pencher sur l'extension du pouvoir de codécision du Parlement européen.

9. Les pays du Benelux estiment que la prochaine CIG doit également permettre d'examiner les répercussions de l'élargissement sur l'efficacité de la Cour de Justice, de la Cour des Comptes et du Comité des Régions. Dans ce contexte, les propositions de réforme émanant notamment des institutions concernées elles-mêmes pourront recevoir toute l'attention nécessaire.

10. Bien que ceci soit indépendant de l'élargissement de l'Union, les pays du Benelux sont d'avis que la CIG pourrait être mise à profit pour modifier ou compléter les traités si cela s'averait nécessaire à la lumière des activités en cours relatives à la mise en oeuvre d'une politique européenne commune en matière de sécurite et de défense.

ANNEXE 5.1


CONCLUSIONS DE LA PRÉSIDENCE
CONSEIL EUROPÉEN D'HELSINKI
10 ET 11 DÉCEMBRE 1999

La conférence intergouvernementale sur la réforme institutionnelle

14. Le Conseil européen salue le rapport que la présidence a établi sur les principales questions relatives à cette conférence intergouvernementale et qui expose les principales formules possibles que la conférence sera appelée examiner.

15. Des mesures appropriées seront prises afin que la Conférence intergouvernementale puisse être officiellement convoquée au début du mois de février. La conférence devrait achever ses travaux et arrêter les modifications à apporter aux traités d'ici décembre 2000.

16. Donnant suite aux conclusions de Cologne et à la lumière du rapport de la présidence, la conférence examinera la taille et la composition de la Commission européenne, la pondération des voix au sein du Conseil, l'extension éventuelle du vote à la majorité qualifiée au sein du Conseil, ainsi que d'autres modifications qu'il faudra apporter aux traités propos des institutions européennes, en liaison avec les questions précitées et dans le cadre de la mise en oeuvre du traité d'Amsterdam. La prochaine présidence fera rapport au Conseil européen sur les progrès réalisés par la conférence et pourra proposer l'inscription d'autres points à son ordre du jour.

17. La responsabilité politique générale de la conférence sera confiée aux ministres siégeant dans le Conseil « Affaires générales ». Les travaux préparatoires seront effectués par un groupe de représentants des gouvernements des États membres, à raison d'un représentant par État membre. Le représentant de la Commission participera aux travaux aux niveaux politique et préparatoire. Le secrétariat général du Conseil assurera le secrétariat de la conférence.

18. Le Parlement européen sera associé étroitement et concrètement aux travaux de la conférence. Deux observateurs du Parlement européen pourront assister aux réunions du groupe préparatoire. Chaque session de la CIG au niveau ministériel sera précédée d'un échange de vues avec le président du Parlement européen, assisté de deux représentants de cette institution. Les réunions au niveau des chefs d'État ou de gouvernement traitant de la CIG seront précédées par un échange de vues avec le président du Parlement européen.

19. La présidence veillera à ce que les pays candidats soient régulièrement informés, dans les enceintes existantes, de l'évolution des discussions et qu'ils aient la possibilité d'exprimer leur point de vue sur les questions débattues. Des informations seront également fournies à l'Espace économique européen.

ANNEXE 5.2

UN CONSEIL EFFICACE
POUR UNE UNION ÉLARGIE


LIGNES DIRECTRICES POUR UNE RÉFORME ET
RECOMMANDATIONS OPÉRATIONNELLES

Lignes directrices pour une réforme

La réforme du fonctionnement du conseil est un élément important du processus plus large de la réforme institutionnelle dans la perspective de l'élargissement de l'Union. L'ampleur des élargissements à venir alliée à l'extension du champ d'action de l'Union risquent d'alourdir voire, à terme, de paralyser le fonctionnement du conseil. Ce risque, déjà perceptible aujourd'hui, représente une menace pour la bonne marche de l'Union, en raison du rôle central que joue le conseil dans le processus de prise de décision de l'Union. Il convient par conséquent de réexaminer l'ensemble des méthodes de travail du conseil, comme le souligne le rapport soumis par le secrétaire général en mars 1999 (1).

Le conseil doit avoir une vue d'ensemble des politiques de l'Union. Il est essentiel, à cette fin, de disposer, au coeur du système, d'une filière unique de coordination capable d'orienter l'action de l'Union conformément à la volonté de ses responsables politiques. Cet axe privilégié commence au niveau des États membres, avec un dispositif de coordination et d'arbitrage efficace au niveau interministériel, et se prolonge, au niveau de l'Union, par le Coreper, le Conseil « Affaires générales » et le Conseil européen. Il est essentiel de renforcer l'efficacité de cette filière ­ sorte de colonne vertébrale du système ­ pour permettre au conseil de faire face aux nouveaux défis qui l'attendent. Des mesures doivent donc être prises à tous les niveaux pour préserver la capacité d'agir du conseil.

Le Conseil européen doit rester une enceinte où s'exerce le leadership politique, qui donne à l'Union les impulsions nécessaires à son développement et définit des orientations politiques générales. Il convient de maintenir la souplesse de préparation actuelle et le format restreint des réunions et de préserver l'impact pratique des conclusions de la présidence.

En raison de sa compétence générale pour les questions horizontales, y compris la coordination globale des politiques, le Conseil « Affaires générales » doit gérer un ordre du jour extérieur et intérieur de plus en plus complexe et traiter les grands dossiers multidisciplinaires et inter-piliers. Si l'on veut que le Conseil « Affaires générales » continue à jouer son rôle, qui est d'assurer une coordination globale, de garantir la cohérence des politiques et de préparer les réunions du Conseil européen, il est essentiel qu'il puisse prendre en charge efficacement tous les aspects de son travail grâce à une meilleure gestion de son ordre du jour et à une représentation adéquate des États membres.

Vu la diversification de l'action de l'Union et l'élargissement des domaines couverts par les traités, il importe d'empêcher la fragmentation des activités de l'Union et du processus décisionnel en limitant le nombre de formations spécialisées du conseil et en évitant d'encombrer les ordres du jour avec des activités artificielles. Cela contribuera à focaliser l'action de l'Union et à améliorer la coordination et la cohérence de l'ensemble des politiques au sein des instances préparatoires du conseil.

Les pratiques législatives doivent être efficaces. Il faut pour cela recourir aux instruments législatifs adéquats et veiller à la qualité rédactionnelle des textes et à ce qu'ils soient juridiquement inattaquables; il faut aussi faire en sorte que la procédure de codécision, de plus en plus utilisée, se déroule sans heurt et efficacement et que le travail législatif du conseil soit plus transparent et plus ouvert à l'examen du public.

Si les mécanismes de coordination interne dans les États membres relèvent et doivent continuer à relever de la compétence exclusive de chaque État membre, il n'en reste pas moins que l'efficacité de ces mécanismes a une incidence directe sur le fonctionnement du conseil et sur la cohérence de ses travaux. Tous les États membres ont donc un intérêt réel et commun à ce que leur organisation interne permette au conseil de délibérer plus efficacement.

L'efficacité de la procédure de prise de décision au sein du conseil exige que les travaux préparatoires soient menés d'une manière aussi rationnelle et rentable que possible tout en préservant la cohérence globale des politiques. Cela implique une planification de toutes les activités programmables, une définition claire du rôle du Coreper et des groupes de travail du conseil et une amélioration des méthodes de travail visant à garantir une exploitation optimale des infrastructures et des ressources. Il faut dès maintenant, et a fortiori dans une Union élargie, utiliser le mieux possible la durée limitée des réunions. Sans une préparation adéquate en amont et une plus grande discipline en séance plénière à tous les niveaux, les discussions risquent de devenir totalement stériles. Au cours des réunions, les délégations devraient être en mesure de réagir et de négocier sur des options clairement définies et sur des projets de solutions visant à résoudre des difficultés connues ou des problèmes bien identifiés. Il importe dès lors que les participants disposent de documents clairs et bien structurés. La présidence, dans le cadre des responsabilités spécifiques qui lui incombent en matière de gestion et de conduite des débats, devrait avoir les moyens de veiller à ce que les méthodes de travail soient efficaces.

La présidence doit garder la responsabilité politique globale de la gestion des activités du conseil. Au fil des années, la charge de travail qui lui incombe s'est accrue de manière substantielle et elle ne fera que croître au fur et à mesure des élargissements. Il faut donc faire un usage optimal des différentes formes d'appui disponibles, comme le soutien de la présidence suivante, de la troïka et du secrétariat général, afin de décharger la présidence. Le nombre croissant de membres du conseil et l'alourdissement des charges incombant à la présidence exigera aussi une assistance accrue du secrétariat général à la présidence et au conseil.

Enfin, les aspects pratiques comme la configuration des salles, la traduction, l'interprétation et la production de documents, jouent un rôle décisif pour le bon fonctionnement du conseil. Si l'on veut maintenir l'efficacité de cette institution, de nouvelles solutions empreintes d'imagination et de pragmatisme sont nécessaires pour résoudre ces problèmes, dans le respect des principes de base.

Les recommandations opérationnelles ci-après pourront pour la plupart être mises en oeuvre dès que possible. Certaines d'entre elles devront être examinées plus en détail avant d'être mises en oeuvre à moyen terme dans le cadre de l'élargissement. Ces recommandations répondent à la demande formulée par le Conseil européen de Cologne qui souhaitait l'élaboration de propositions spécifiques visant à améliorer le fonctionnement du conseil dans la perspective de l'élargissement. Il est impératif que ces recommandations soient mises en oeuvre par des dispositions d'application efficaces inscrites dans le règlement intérieur (2) du conseil et viennent compléter les mesures concrètes déjà appliquées par la présidence et le secrétariat général, qui devront encore être consolidées au cours des années à venir. Les effets combinés de ces mesures devraient permettre au conseil d'être prêt pour accueillir les nouveaux membres dans un avenir proche avec un minimum de perturbation.

Recommandations opérationnelles

A. Le Conseil européen et le Conseil « Affaires générales »

1. La tâche prioritaire du Conseil européen doit être de continuer à donner à l'Union les impulsions nécessaires à son développement et d'en définir les orientations politiques générales. L'un des moyens qui lui permettront de mieux remplir cette tâche sera de réduire la longueur des conclusions de la présidence (15 pages au maximum) (3) et de les axer davantage sur les décisions politiques prises par le conseil sur les questions effectivement débattues en séance.

2. Le Conseil « Affaires générales » doit être en mesure de traiter efficacement des questions horizontales internes à l'Union, et notamment d'assurer la coordination globale des politiques. L'ordre du jour du Conseil « Affaires générales » doit par conséquent être divisé en deux parties distinctes. Les États membres doivent faire en sorte qu'ils soient représentés de manière adéquate au niveau ministériel aux deux parties de ces sessions.

3. Le Conseil « Affaires générales » est responsable de la coordination générale des travaux préparatoires en vue du Conseil européen.

B. Relations extérieures (4)

Rôle du secrétaire général/haut représentant

4. Sous réserve de l'article 3 du TUE qui impose au conseil et à la commission d'assurer la cohérence de l'action extérieure de l'Union, et dans le respect des responsabilités que les traités leur confère, la présidence, le secrétaire général/haut représentant et le membre de la Commission chargé des relations extérieures coopéreront étroitement afin de garantir la continuité et la cohérence globales de l'action de la communauté dans le domaine des relations extérieures.

5. Le secrétaire général/haut représentant doit, conformément aux traités :

i) assister la présidence dans la coordination des travaux du conseil afin de garantir la cohérence des différents aspects des relations extérieures de l'Union;

ii) contribuer à la préparation des décisions politiques et à la formulation d'options à l'attention du conseil sur des questions de politique étrangère et de sécurité afin que le conseil puisse en permanence se concentrer sur les questions politiques majeures requérant des décisions opérationnelles ou des orientations politiques;

iii) contribuer à la mise en oeuvre des décisions de politique étrangère et de sécurité en étroite coordination avec la commission, les États membres et d'autres autorités responsables de la mise en oeuvre sur le terrain.

6. Le secrétaire général/haut représentant peut se voir confier des mandats particuliers par le conseil.

Réunions régulières/contacts avec les pays tiers

7. Vu la charge administrative croissante que représente l'organisation de réunions au niveau ministériel avec des pays tiers, en particulier au titre d'accords de coopération et d'association, ces réunions pourront être gérées plus efficacement grâce aux mesures suivantes :

i) prévoir une programmation systématique des réunions au niveau ministériel avec des pays tiers, couvrant la présidence en cours et les deux présidences suivantes, qui sera ajustée au fur et à mesure pour permettre de répartir la charge administrative et de préparer correctement les réunions;

ii) obtenir le consentement des pays tiers pour inclure dans les accords de coopération et d'association existants et futurs des dispositions qui :

· pour ce qui est des calendriers des réunions, ne fixent aucune périodicité mais permettent de tenir des réunions ministérielles lorsque l'ordre du jour le justifie et après une préparation adéquate;

· et, pour ce qui est du niveau de représentation, prévoient que le conseil sera en règle générale représenté au niveau ministériel par la présidence, assistée du secrétaire général/haut représentant, et la présidence suivante. Les autres membres du conseil peuvent désigner des représentants au niveau des fonctionnaires;

iii) faire en sorte, pour ce qui est des réunions du dialogue politique, que la présidence et le haut représentant fassent l'usage le plus efficace possible des deux possibilités que leur offre le traité pour conduire ces réunions (à savoir, la présidence assistée du secrétaire général/haut représentant ou le haut représentant agissant à la demande de la présidence au nom du conseil) afin de coordonner les dispositions prises par l'Union dans le cadre du dialogue politique, en pleine association avec la commission.

Utilisation optimale des réseaux diplomatiques

8. Le secrétaire général/haut représentant est invité à élaborer, à l'attention du conseil, un rapport sur l'utilisation des réseaux des ambassades des États membres et des délégations de la commission à travers le monde afin de renforcer la mise en oeuvre de l'action de l'Union et de l'aider à accomplir ses tâches.

C. Les formations du conseil

9. Afin d'améliorer la cohérence des travaux du conseil, le nombre de formations du conseil est réduit à quinze au maximum. Le Conseil « Affaires générales » prend les mesures nécessaires pour atteindre cet objectif dès que possible en fusionnant certaines formations du conseil, en traitant certaines matières dans d'autres formations appropriées du conseil et en ayant recours le plus possible à l'organisation « en chaîne » des sessions lorsqu'il s'agit de formations du Conseil couvrant des domaines étroitement liés entre eux;

10. Lors de la convocation de sessions du conseil, une attention particulière est accordée à la gestion et à l'organisation de l'ordre du jour afin de permettre aux États membres d'être représentés au sein de chaque formation du conseil comme ils le jugent approprié en fonction de leur propre organisation interne. La présidence s'efforcera de veiller en règle générale à ce que chaque formation du conseil ait un seul président.

11. Sans préjudice de l'article 1er, paragraphe 1, du règlement intérieur du conseil, les sessions et formations du conseil sont convoquées uniquement lorsqu'il y a suffisamment de points à inscrire à l'ordre du jour (par exemple, lorsqu'il s'agit de prendre des décisions politiques ou de définir des orientations politiques) ou lorsque des délais impératifs doivent être respectés. Si ces conditions ne sont pas remplies, la formation ou session du conseil en question ne se réunit pas.

12. Toute convocation d'une nouvelle formation du conseil exige une décision du Conseil « Affaires générales ».

13. Des sessions conjointes de différentes formations du conseil ne devraient être convoquées que dans des circonstances exceptionnelles.

14. Chaque État membre procédera régulièrement au réexamen de ses modalités de coordination interne des questions relevant de l'UE et les ajustera de manière à assurer un fonctionnement optimal des rouages du conseil. Sur la base des contributions transmises par les États membres décrivant leurs procédures de coordination interne pour les questions concernant l'Union européenne, un résumé des systèmes de coordination des différents États membres sera établi d'ici au mois de décembre 2000.

D. Le rôle législatif du conseil

Respect des bonnes pratiques législatives et amélioration de la qualité rédactionnelle des textes

15. Les délégations doivent veiller à la qualité rédactionnelle des propositions de modification soumises, notamment au stade de la première lecture d'un texte au sein d'un groupe de travail.

16. Le conseil doit s'abstenir d'adopter des résolutions, déclarations ou autres actes atypiques lorsqu'il traite de questions législatives.

Amélioration des procédures de codification

17. Afin d'accélérer les travaux de codification et d'accroître le nombre de textes législatifs disponibles sous une forme codifiée et plus lisible :

i) un délai strict de 30 jours sera imposé aux délégations dans le cadre des travaux du conseil pour formuler des observations sur les propositions. Il faudrait déterminer avec le Parlement européen les délais nécessaires sur le plan de la procédure pour qu'il puisse rendre son avis sur des propositions de codification;

ii) le conseil fera en sorte qu'un nouvel accord interinstitutionnel soit conclu avec le Parlement européen et la commission le plus rapidement possible concernant la mise en place d'une filière rapide pour le recours à la technique de « refonte » (c'est-à-dire : procéder à la codification d'un acte à l'occasion d'une modification apportée au texte de base) sous réserve du respect des principes et de l'esprit de la technique de codification (c'est-à-dire codification des textes tels qu'ils ont été publiés, sans modification de fond).

Améliorer l'efficacité de la procédure de co-décision

18. La présidence doit tenir dûment compte, dans sa programmation, de la nécessité de définir des calendriers pour les conciliations et les réunions préparatoires en respectant également les délais prévus pour la procédure de codécision. Des contacts doivent être pris avec le Parlement européen aux stades de la première et de la deuxième lecture afin que la procédure aboutisse le plus rapidement possible.

19. La présidence et le secrétariat général sont invités à proposer d'ici la fin de l'année 2000 d'autres modifications à apporter aux méthodes de travail du Conseil dans le cadre de la procédure de codécision, compte tenu de l'expérience acquise lors de la mise en oeuvre de la déclaration commune du 4 mai 1999.

E. Réunions informelles de ministres

20. Les réunions informelles de ministres visent à permettre un échange de vues aussi libre que possible sur des questions de portée générale. Ces réunions ne sont pas des sessions du conseil et elles ne remplacent pas les activités normales du conseil. Elles sont soumises aux règles suivantes :

i) le nombre de réunions informelles de ministres est limité à 5 par présidence;

ii) il n'y a pas d'ordre du jour officiel;

iii) la présence d'assistants est limitée à deux par ministre;

iv) toute production de documents du conseil, que ce soit avant ou après la réunion, est exclue;

v) ces réunions ne peuvent pas donner lieu à des conclusions ou décisions formelles; les éventuelles communications à la presse doivent le signaler clairement;

F. Coreper

21. C'est au Coreper qu'il appartient en dernier ressort de préparer et de présenter au conseil tous les points inscrits à l'ordre du jour (5); il est donc responsable du travail d'assemblage des travaux préparatoires menés par différents organes de caractère vertical dans le cadre de dossiers tant multidisciplinaires qu'inter-piliers. À cet effet :

i) la présidence, assistée par le secrétariat général, établit le programme prévisionnel des travaux à mener sur tous les dossiers multidisciplinaires et inter-piliers;

ii) toutes les évaluations, analyses ou contributions d'autres organes doivent être à la disposition du Coreper lors de la réunion préparatoire précédant le conseil qui statuera sur la question (6);

iii) en règle générale, un seul document de la présidence ou du secrétariat englobant toutes les contributions et couvrant tous les aspects du dossier est élaboré à l'attention du conseil;

iv) le groupe « Antici », le groupe « Mertens » ou le groupe des Amis de la présidence peuvent être appelés à assister le Coreper dans cette tâche.

22. Les travaux préparatoires du Coreper en vue du traitement d'un point législatif de l'ordre du jour du conseil doivent être achevés à la fin de la semaine antérieure à celle qui précède le conseil. Si cette règle n'est pas respectée, le point correspondant sera, en règle générale, automatiquement retiré de l'ordre du jour du conseil sauf si l'urgence commande d'agir autrement.

23. Pour tout dossier dont la matière est traitée dans d'autres enceintes, le Coreper doit en tout état de cause être en mesure de s'assurer du respect des principes et règles suivants :

i) principe de légalité au regard du droit communautaire, y compris les principes de subsidiarité, de proportionnalité et de la motivation des actes;

ii) attributions des institutions de l'Union;

iii) dispositions budgétaires;

iv) règles de procédure, de transparence et de qualité rédactionnelle de la législation;

v) cohérence avec les autres politiques et actions de l'Union.

24. La présidence peut convoquer des réunions ad hoc du Coreper à bref délai afin d'examiner des questions urgentes particulières.

G. La présidence du conseil

25. La présidence à venir assiste la présidence, cette dernière conservant toutes ses compétences et continuant à exercer sa responsabilité politique générale pour ce qui est de la gestion des activités du conseil conformément aux traités et au règlement intérieur du conseil. La présidence à venir, agissant sur les instructions de la présidence, remplacera celle-ci en tant que de besoin, la déchargera, s'il y a lieu, de certaines tâches administratives et assurera la continuité des travaux du conseil. La présidence et la présidence à venir prendront toutes les mesures nécessaires pour garantir une transition sans heurt d'une présidence à l'autre.

H. Transparence

Accès aux documents

26. Les procédures d'accès du public aux documents du conseil devraient être rationalisées et automatisées dans toute la mesure du possible en recourant aux technologies modernes, y compris Internet, sans préjudice des principes généraux régissant le droit d'accès aux documents à définir conformément à l'article 255 du traité.

Améliorer la transparence des travaux législatifs du conseil

27. Le Conseil « Affaires générales » et le Conseil « Ecofin » devront tenir tous les six mois un débat public sur le programme de travail de la présidence.

28. Le conseil devrait organiser au moins un débat public sur les propositions législatives importantes. Le Coreper statue à la majorité qualifiée sur la tenue de débats publics.

29. Pour que les débats publics soient plus intéressants, ils seront organisés comme suit :

i) les délégations sont invitées à temps, avant la tenue de la session du conseil, à communiquer à la présidence et au secrétariat leurs points de vues sur la proposition ou sur le point dont il sera débattu publiquement;

ii) la présidence, sur la base des déclarations écrites, établit une note d'une page contenant un questionnaire succinct;

iii) cette note est diffusée aux délégations avant le début de la réunion et sert de base au débat.

I. Politique de l'information

30. Il est instamment demandé au Parlement européen, au conseil et à la commission de prendre des mesures visant à unir dans toute la mesure du possible les efforts déployés pour diffuser des informations générales coordonnées sur l'Union, en particulier en optimisant l'utilisation des ressources existantes; à cet égard, il pourrait être utile d'étudier la faisabilité de la création à Bruxelles d'un centre commun d'information entre le Parlement européen, le conseil et la commission qui accueillerait les visiteurs et coordonnerait la publication des informations destinées au grand public.

31. La commission est invitée à étudier d'une manière plus générale la question de la politique de l'information de l'UE, en examinant notamment comment améliorer la coordination avec ses bureaux d'information dans les États membres et les liens avec les bureaux d'information nationaux.

J. Organisation et conduite des réunions

Programmation des travaux du conseil

32. Chaque présidence, en coopération avec la commission, le secrétariat général et la présidence suivante, établit le programme de toutes les activités législatives et de tous les autres aspects du travail du conseil qui ne dépendent pas de l'évolution de la situation politique.

33. Chaque présidence fait connaître sept mois avant sa prise de fonction les dates envisagées pour toutes les sessions que le conseil doit manifestement tenir pour effectuer des travaux législatifs ou prendre des décisions sur des mesures opérationnelles. Le programme définitif de la présidence peut prévoir des sessions supplémentaires si cela se justifie d'un point de vue opérationnel. Si la tenue d'une session prévue ne se justifie plus, cette session est annulée.

34. Le programme de la présidence, sous la forme d'ordres du jour provisoires des sessions du conseil mentionnant à titre indicatif les décisions opérationnelles et les travaux législatifs, est adopté au plus tard une semaine avant le début de la présidence.

Groupes de travail

35. Si elle le juge utile, la présidence peut inviter les délégations à fournir par écrit et dans un délai qu'elle précise des observations et prises de position préliminaires avant que le groupe de travail n'entame ses travaux sur une proposition. Sur la base des contributions écrites, elle élabore un document de travail qui résume d'une manière ordonnée les principales questions soulevées et qui permettra d'orienter et de structurer le premier débat au sein du groupe.

36. Une liste des instances préparatoires (7) est mise à jour régulièrement par le secrétariat général, à la suite des décisions prises par le Coreper ou le conseil qui portent création de ces instances.

37. Le conseil et le Coreper s'abstiennent de créer de nouveaux groupes à haut niveau.

38. Les groupes de travail qui préparent un dossier législatif à l'intention du Coreper doivent avoir achevé leurs travaux au moins cinq jours ouvrables avant la réunion correspondante du Coreper. Si cette condition n'est pas remplie, le point sera, en règle générale, automatiquement reporté à la réunion suivante, sauf si l'urgence commande d'agir autrement.

Ordres du jour et documents

39. Sans préjudice de l'article 2 du règlement intérieur du conseil, la présidence et le secrétariat veillent à ce que les projets d'ordre du jour du conseil ne comportent que des points à propos desquels le conseil doit statuer ou définir des orientations politiques.

40. Le conseil délibère sur la base d'orientations, d'options ou de propositions de solutions claires, soumises par le Coreper sur des questions clés.

Conduite des réunions

41. Le conseil et le Coreper axent leurs discussions sur les options ou solutions présentées dans un document de la présidence ou du secrétariat. Les arguments ou positions notoires devraient être développés dans des déclarations écrites.

42. Les tours de table complets doivent en principe être exclus et n'avoir lieu que dans des circonstances exceptionnelles et sur des questions spécifiques, la présidence fixant alors un temps de parole.

43. Si l'on constate qu'il y a de bonnes chances qu'une proposition de compromis puisse être soumise au cours de la même journée, la présidence convoque un groupe de travail en marge du Coreper ou du conseil. Si un compromis se dégage au cours des travaux du conseil ou du Coreper, la solution ainsi agréée est mise en forme parallèlement à la réunion.

44. Les décisions ne peuvent être prises que dans le cadre des sessions formelles du conseil. Le secrétariat général vérifie que le quorum est atteint lorsqu'une décision doit être prise. La présidence prévoit un nombre accru de sessions « restreintes » et « super-restreintes » au cours des sessions formelles (y compris les conclaves) afin de discuter de questions sensibles ou confidentielles au lieu d'aborder ces questions pendant le déjeuner.

45. La présidence peut, notamment :

i) fixer à l'avance le temps consacré à certains points de l'ordre du jour au sein du Coreper et du conseil lorsqu'il n'est pas objectivement nécessaire de parvenir à une décision;

ii) aménager le temps consacré à un point particulier;

iii) fixer le nombre de personnes par délégation présentes dans la salle de réunion (c'est-à-dire décider de tenir des réunions restreintes ou super-restreintes);

iv) avoir recours à des motions d'ordre chaque fois que cela est nécessaire pour assurer le respect des conditions fixées pour la conduite du débat.

K. Le secrétariat général et le cadre matériel

Rôle du secrétariat général

46. Le rôle d'appui du secrétariat général en tant que conseiller du conseil et de la présidence doit être renforcé par une association permanente et étroite à l'organisation, à la coordination et au contrôle de la cohérence des travaux du conseil. Il convient en particulier de l'encourager à jouer un rôle plus actif, sous la responsabilité et la direction de la présidence, dans les missions de bons offices et de recherche de compromis confiées à cette dernière.

47. Les documents produits par le secrétariat général et utilisés comme bases de négociation au sein du conseil et de ses instances préparatoires doivent être concis et indiquer clairement les questions à trancher, en exposant le cas échéant les options possibles ou des pistes de compromis. Il convient de renoncer aux longs comptes rendus reflétant les positions des délégations.

48. Le secrétaire général/haut représentant est pleinement responsable de la gestion du budget du conseil.

Organisation du secrétariat général

49. Le secrétaire général/haut représentant est invité à prendre les mesures nécessaires pour adapter rapidement le secrétariat général aux besoins changeants du conseil; ces mesures consisteront notamment à :

i) adapter les structures aux besoins opérationnels du conseil, notamment en réorganisant le travail dans les grandes unités administratives;

ii) renforcer les audits internes afin d'assurer la meilleure adéquation possible entre les besoins du conseil et les moyens humains et matériels mis à la disposition du secrétariat général;

iii) mettre en place une politique du personnel souple et dynamique, propre à mieux motiver le personnel. Cela implique une formation professionnelle adéquate du personnel permettant au secrétariat de remplir efficacement son rôle accru d'appui. Dans le cadre de la formation, il convient d'envisager la possibilité d'échanges avec des administrations nationales.

50. Il est instamment demandé au secrétaire général/haut représentant de réexaminer les méthodes de travail du conseil et du secrétariat général afin d'en améliorer l'efficacité en exploitant mieux la technologie moderne, y compris les moyens informatiques et électroniques, en adaptant les procédures et le circuit de production et de transmission des documents et en ciblant la formation du personnel sur les besoins de la modernisation.

Aspects matériels du travail du conseil

51. Le secrétaire général/haut représentant est invité à entreprendre un examen détaillé des moyens techniques et méthodologiques disponibles pour accroître la capacité de traduction et d'interprétation dont dispose le Conseil.

52. À la lumière de cet examen, il faudra déterminer de quelle manière il est possible, au niveau des travaux préparatoires, de garantir l'efficacité que l'on exige du conseil tout en respectant les dispositions relatives aux principes d'égalité et de non-discrimination pour ce qui est des langues officielles de l'Union (8).

Besoins immobiliers et aménagement des salles de réunion

53. Tout en informant dûment le conseil, il incombe au secrétaire général/haut représentant d'évaluer les besoins immobiliers d'un conseil substantiellement élargi et la manière dont ces besoins peuvent être satisfaits, de telle sorte que des propositions détaillées puissent être soumises au conseil en temps voulu à la lumière de cette évaluation.

54. Si l'on veut que les délibérations et négociations se déroulent de manière efficace après l'élargissement, il sera primordial de réduire le nombre de personnes présentes dans les salles de réunion et à la table principale. Pour les réunions du Conseil européen, chaque délégation ne disposera que de deux places à cette table. Lors des réunions des instances préparatoires du conseil (comités, groupes de travail), chaque délégation disposera d'une place à la table principale, sauf disposition contraire. Le secrétaire général/haut représentant est aussi invité à étudier la configuration adéquate des salles de réunion des sessions du conseil et à faire des propositions appropriées. Cette étude tient compte des différentes contraintes de travail auxquelles sont soumises les différentes formations du conseil.

L. Réexamen

55. Le secrétaire général/haut représentant évalue la mise en oeuvre des présentes recommandations et, le cas échéant, formule, d'ici juillet 2001, d'autres suggestions d'ordre pratique pour améliorer les méthodes de travail du conseil.

ANNEXE 5.3


RAPPORTS DE LA PRÉSIDENCE POUR LE CONSEIL EUROPÉEN D'HELSINKI CONCERNANT « LE RENFORCEMENT DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE COMMUNE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ET DE DÉFENSE » ET « LA GESTION NON MILITAIRE DES CRISES PAR L'UNION EUROPÉENNE »

En réponse au mandat que le Conseil européen de Cologne lui a confié, la présidence s'est fixé pour objectif premier de renforcer la politique européenne commune en matière de sécurité et de défense en faisant avancer les travaux concernant les aspects militaires et non militaires de la gestion des crises. Pour ce faire, elle s'est fondée sur les dispositions du Traité sur l'Union européenne ainsi que sur les principes directeurs arrêtés à Cologne, que les États membres ont réaffirmés.

Ces travaux ont donné lieu à deux rapports distincts sur l'état d'avancement des travaux, destinés au Conseil européen. Ces rapports, conçus pour être complémentaires, proposent des mesures concrètes et donnent des orientations pour les travaux futurs afin que les décisions nécessaires soient prises avant la fin de l'an 2000 en vue d'atteindre les objectifs fixés à Cologne. Durant la présidence portugaise, la question de savoir si une modification du traité est nécessaire ou non sera examinée.

Afin d'assumer leurs responsabilités face à l'ensemble des activités de prévention des conflits et des missions de gestion des crises définies dans le traité sur l'Union européenne, les missions dites de Petersberg, les États membres ont décidé, à cette fin, de développer des capacités militaires plus efficaces et d'établir de nouvelles structures politiques et militaires. À cet égard, il s'agit pour l'Union d'avoir la capacité autonome de décider et, là où l'OTAN en tant que telle n'est pas engagée, de lancer puis de conduire des opérations militaires sous sa direction face à des crises internationales.

Afin également d'assumer ces responsabilités, l'Union entend améliorer et utiliser plus efficacement les moyens à sa disposition pour la gestion civile des crises, pour laquelle l'Union et les États membres ont d'ores et déjà une expérience considérable. Une large place sera accordée à la capacité de réagir rapidement.

Toutes ces mesures seront prises à l'appui de la politique étrangère et de sécurité commune; elles renforceront et étendront le rôle global de l'Union sur la scène internationale. L'Union européenne sera en mesure, grâce au renforcement et à la coordination des instruments militaires et civils de réponse aux crises, de recourir à l'ensemble des instruments qui vont des activités diplomatiques aux opérations civiles de maintien de l'ordre et aux opérations militaires de gestion des crises, en passant par l'aide humanitaire et les mesures économiques.

L'OTAN demeure le fondement de la défense collective de ses membres et continuera à jouer un rôle important dans la gestion des crises.

Le développement de la politique européenne commune en matière de sécurité et de défense se fera sans préjudice des engagements pris au titre de l'article 5 du traité de Washington et de l'article V du traité de Bruxelles, qui seront préservés pour les États membres parties à ces traités. De même, ce développement n'affectera pas la spécificité de la politique de sécurité et de défense de certains États membres.

De nouvelles mesures seront prises pour assurer une concertation, une coopération et une transparence pleines et mutuelles entre l'UE et l'OTAN.

L'Union contribuera à la paix et à la sécurité internationales conformément aux principes de la Charte des Nations unies. L'Union reconnaît la responsabilité première du Conseil de sécurité des Nations unies en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales. Elle coopérera, dans le respect des principes et des objectifs de la Charte de l'OSCE pour la sécurité européenne, avec les Nations unies, l'OSCE, le Conseil de l'Europe et d'autres organisations internationales, dans un esprit de synergie, à la promotion de la stabilité, l'alerte rapide, la prévention des conflits, la gestion des crises ainsi qu'aux efforts de reconstruction après-conflits.

ANNEXE 5.3.1


RAPPORT SUR L'ÉTAT DES TRAVAUX ÉTABLI PAR LA PRÉSIDENCE POUR LE CONSEIL EUROPÉEN D'HELSINKI CONCERNANT LE RENFORCEMENT DE LA POLITIQUE EUROPÉENNE COMMUNE EN MATIÈRE DE SÉCURITÉ ET DE DÉFENSE

Introduction

Rappelant les principes directeurs arrêtés à Cologne, l'Union européenne devrait être en mesure d'assumer ses responsabilités face à l'ensemble des activités de prévention des conflits et des missions de gestion des crises définies dans le traité sur l'Union européenne, les missions dites de Petersberg.

L'Union européenne devrait disposer, à l'appui de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC), de la capacité autonome de décider et, là où l'OTAN en tant que telle n'est pas engagée, de lancer puis de conduire des opérations militaires en réponse à des crises internationales. L'action de l'Union sera menée conformément aux principes de la Charte des Nations unies et aux principes et objectifs de la Charte de l'OSCE pour la sécurité européenne. L'Union reconnaît la responsabilité première du Conseil de sécurité des Nations unies en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales.

À cette fin, un accord est intervenu sur ce qui suit :

Un grand objectif commun européen sera adopté de sorte que des moyens militaires prêts à être déployés et des objectifs collectifs de capacités en matière de commandement et de contrôle, de renseignement et de capacité de projection seront mis au point rapidement, et ce grâce à la coordination volontaire des efforts nationaux et multinationaux, afin de mener à bien l'ensemble des missions dites de Petersberg.

De nouveaux organes politiques et militaires seront établis au sein du conseil pour permettre à l'Union européenne de prendre les décisions sur les opérations de Petersberg qu'elle dirige et pour assurer, sous l'autorité du conseil, le contrôle politique et la direction stratégique nécessaires de ces opérations.

Des principes de coopération seront agréés avec des États européens membres de l'OTAN qui n'appartiennent pas à l'UE et avec d'autres partenaires européens, pour la gestion militaire de crise dirigée par l'UE, sans préjudice de l'autonomie de décision de l'Union.

La volonté de mener à bien les missions de Petersberg requerra des États membres d'améliorer leurs moyens militaires nationaux et multinationaux, ce qui, parallèlement, renforcera, lorsqu'il y a lieu, les capacités de l'OTAN et augmentera l'efficacité de l'action du Partenariat pour la paix (PpP) en faveur de la sécurité européenne.

Lors de la présentation du présent rapport, la présidence a pris note de ce que le Danemark renvoyait au Protocole nº 5 du Traité d'Amsterdam sur la position du Danemark.

Capacités militaires pour accomplir les missions de Petersberg

Les États membres rappellent les engagements qu'ils ont pris à Cologne et leur détermination à donner à l'UE les capacités appropriées qui lui permettront, sans duplication inutile, d'entreprendre l'ensemble des missions définies à Petersberg à l'appui de la PESC. Ces capacités leur permettront de conduire efficacement des opérations dirigées par l'UE et, pour ceux qui sont concernés, de jouer pleinement leur rôle dans le cadre d'opérations de l'OTAN et dirigées par l'OTAN. Des capacités européennes plus efficaces seront développées sur la base de capacités nationales, binationales et multinationales existantes, qui seront réunies pour des opérations de gestion de crise menées par l'UE avec ou sans l'appui des moyens et des capacités de l'OTAN. Une attention toute particulière sera accordée aux moyens nécessaires pour assurer une gestion efficace des crises : capacité de projection, viabilité, interopérabilité, flexibilité, mobilité, capacité de survivre et capacité de commandement et de contrôle, en tenant compte des résultats de l'audit de l'UEO sur les capacités et les moyens disponibles et leurs implications pour les opérations dirigées par l'UE.

Afin de développer les capacités européennes, les États membres se sont fixé comme objectif global d'être en mesure d'ici l'an 2003, en coopérant volontairement, de déployer rapidement puis de soutenir des forces capables de mener à bien l'ensemble des missions de Petersberg définies dans le Traité d'Amsterdam, y compris les plus exigeantes d'entre elles, dans des opérations pouvant aller jusqu'au niveau d'un corps d'armée (jusqu'à 15 brigades, soit 50 000 à 60 000 hommes). Ces forces devraient être militairement autosuffisantes et dotées des capacités nécessaires de commandement, de contrôle et de renseignement, de la logistique et d'autres unités d'appui aux combats ainsi que, en cas de besoin, d'éléments aériens et navals. Les États membres devraient être en mesure de déployer de telles forces dans leur intégralité dans un délai de 60 jours et, dans ce cadre, de fournir des éléments plus réduits de réaction rapide disposant d'un très haut degré de disponibilité. Ils devront en outre être en mesure de soutenir un tel déploiement de forces pendant au moins une année. Cela nécessitera de disposer d'unités déployables additionnelles (et de moyens de soutien) à un degré de disponibilité moindre pour fournir les relèves des forces initialement déployées.

Les États membres ont également décidé de déterminer rapidement des objectifs collectifs de capacité en matière de commandement et de contrôle, de renseignement et de transport stratégique, domaines également identifiés par l'audit de l'UEO. Ils se félicitent à cet égard des décisions allant en ce sens déjà annoncées par certains États membres :

­ développer et coordonner des moyens militaires de surveillance et d'alerte rapide;

­ ouvrir les états-majors nationaux interarmées existants à des officiers provenant d'autres États membres;

­ renforcer les capacités de réaction rapide des forces multinationales européennes existantes;

­ préparer l'établissement d'un commandement européen du transport aérien;

­ accroître le nombre des troupes prêtes à être déployées;

­ renforcer les capacités de transport maritime stratégiques.

Le Conseil « Affaires générales », avec la participation des ministres de la Défense, élaborera l'objectif global et les objectifs de capacité. Il élaborera une méthode de consultation grâce à laquelle il sera possible d'atteindre et de tenir ces objectifs et par laquelle chaque État membre pourra définir sa contribution nationale, reflétant ainsi la volonté politique et la détermination des États membres d'atteindre ces objectifs. Cela comportera aussi un examen régulier des progrès réalisés. Les États membres utiliseront en outre les procédures de planification existantes en matière de défense, y compris, si cela est approprié, celles de l'OTAN et du processus de planification et de révision (PARP) du Partenariat pour la paix (PpP). Ces objectifs et ceux découlant, pour les pays concernés, de l'initiative de l'OTAN sur les capacités de défense (ICD) se renforceront mutuellement.

Les États européens membres de l'OTAN qui ne sont pas membres de l'UE, ainsi que d'autres pays qui sont candidats à l'adhésion à l'Union européenne, seront invités à contribuer à cette amélioration des capacités militaires européennes. Cela renforcera l'efficacité des opérations militaires dirigées par l'UE et contribuera directement, pour les pays concernés, à l'efficacité et à la vitalité du pilier européen de l'OTAN.

Les États membres se félicitent des progrès réalisés récemment en vue de la restructuration des industries européennes de défense, ce qui constitue un pas important en avant. Ces efforts contribuent à renforcer la base technologique et industrielle de la défense européenne. Une telle évolution appelle à un renforcement des efforts pour chercher à améliorer encore l'harmonisation des besoins militaires ainsi que la programmation et la fourniture d'armements, dans la mesure où les États membres l'estiment approprié.

Prise de décisions

Le conseil arrête la politique concernant la participation de l'Union à toutes les phases et dans tous les aspects de la gestion des crises, et prend notamment la décision de mener les missions de Petersberg conformément à l'article 23 du traité UE. Les décisions prises à l'intérieur du cadre institutionnel unique respecteront les compétences de la Communauté européenne et garantiront la cohérence interpiliers, conformément à l'article 3 du traité UE.

Tous les États membres sont habilités à participer pleinement et sur un pied d'égalité à toutes les décisions et délibérations du conseil et des organes du conseil portant sur les opérations dirigées par l'UE. L'engagement par les États membres de moyens nationaux dans de telles opérations relèvera de leur décision souveraine. Les États membres participeront au comité ad hoc des contributeurs conformément aux dispositions prévues au paragraphe 24.

Les ministres de la Défense seront impliqués dans la politique européenne commune en matière de sécurité et de défense (PECSD); ainsi, lorsque le Conseil « Affaires générales » examinera des questions liées à cette dernière, les ministres de la Défense y participeront, s'il y a lieu, afin de donner des orientations en matière de défense.

Au sein du conseil, seront créés les nouveaux organes politiques et militaires permanents suivants :

a) Un comité politique et de sécurité (COPS) permanent, siégeant à Bruxelles, sera composé de représentants nationaux au niveau de représentants de haut niveau/ambassadeurs. Il traitera de tous les aspects de la PESC, y compris la PECSD, conformément aux dispositions du TUE et sans préjudice de la compétence communautaire. Dans le cas d'une opération militaire de gestion de crises, le COPS exercera, sous l'autorité du conseil, le contrôle politique et la direction stratégique de l'opération. À cette fin, des procédures appropriées seront adoptées afin de prendre des décisions efficaces et urgentes. Le COPS adressera également des directives au comité militaire.

b) Le Comité militaire (CM) sera composé des chefs d'état-major des armées, représentés par leurs délégués militaires. Le CM se réunira au niveau des chefs d'état-major des armées en tant que de besoin. Ce comité donnera des avis militaires et formulera des recommandations destinées au COPS et fournira des directives militaires à l'état-major. Le président du CM assistera aux sessions du conseil lorsque celui-ci aura à prendre des décisions ayant des implications dans le domaine de la défense.

c) L'état-major (EM), au sein des structures du conseil, mettra ses compétences militaires au service de la PECSD, notamment de la conduite des opérations militaires de gestion des crises menées par l'UE. L'état-major sera chargé de l'alerte rapide, de l'évaluation des situations et de la planification stratégique pour les missions dites de Petersberg, y compris l'identification des forces européennes nationales et multinationales.

À titre provisoire, les instances ci-après seront mises en place au sein du conseil à compter du 1er mars 2000 :

a) Dans le strict respect des dispositions du traité, le conseil créera un Comité politique et de sécurité permanent intérimaire au niveau des hauts fonctionnaires/ambassadeurs. Cet organe sera chargé, d'une part, d'assurer, sous la supervision du Comité politique, le suivi du Conseil européen d'Helsinki, en élaborant des recommandations sur le fonctionnement futur de la PECSD et, d'autre part, de traiter de la gestion courante des questions PESC, en relation étroite avec le SG/HR.

b) Un organe intérimaire composé de représentants militaires des chefs d'état-major des armées des États membres est institué afin de donner au Comité politique et de sécurité intérimaire, en tant que de besoin, des avis militaires.

c) Le secrétariat du conseil sera renforcé par des experts militaires détachés par les États membres afin de contribuer aux travaux relatifs à la PECSD et de constituer le noyau du futur état-major.

Le secrétaire général/haut représentant (SG/HR), en assistant le conseil, a une contribution essentielle à apporter à l'efficacité et à la cohérence de la PESC et à la mise au point de la politique commune en matière de sécurité et de défense. Conformément au TUE, le SG/HR contribuera à la formulation, à l'élaboration et à la mise en oeuvre des décisions de politique.

Au cours de la période intérimaire, le SG/HR, secrétaire général de l'UEO, devra exploiter pleinement les capacités de l'UEO afin de conseiller le conseil conformément à l'article 17 du TUE.

Consultation et coopération avec des pays non membres de l'UE et avec l'OTAN

L'Union assurera le dialogue, la consultation et la coopération nécessaires avec l'OTAN et ses membres ne faisant pas partie de l'UE, avec d'autres pays qui sont candidats à l'adhésion à l'UE, ainsi qu'avec d'autres éventuels partenaires dans la gestion des crises dirigée par l'UE, en respectant pleinement l'autonomie de décision de l'UE et le cadre institutionnel unique de l'Union.

Des structures appropriées seront mises en place afin de permettre dialogue et échanges d'informations avec les membres européens de l'OTAN non membres de l'UE et d'autres pays qui sont candidats à l'adhésion à l'UE sur des questions liées à la politique de sécurité et de défense et à la gestion des crises. En cas de crise, ces structures permettront la tenue de consultations pendant la période précédant une décision du conseil.

En cas de décision prise par le conseil de lancer une opération, les membres européens de l'OTAN non membres de l'UE participeront à celle-ci, s'ils le souhaitent, s'il s'agit d'une opération nécessitant un recours aux moyens et capacités de l'OTAN. Ils seront invités, sur décision du conseil, à participer à des opérations pour lesquelles l'UE n'a pas recours aux moyens de l'OTAN.

D'autres pays qui sont candidats à l'adhésion à l'UE pourront aussi être invités par le conseil à participer à des opérations dirigées par l'UE, une fois que le conseil aura décidé de lancer de telles opérations.

La Russie, l'Ukraine et d'autres États européens participant à un dialogue politique avec l'Union et d'autres États intéressés pourront être invités à participer aux opérations dirigées par l'UE.

Tous les États ayant confirmé leur participation à une opération dirigée par l'UE par le déploiement de forces militaires significatives auront les mêmes droits et obligations que les États membres participants de l'UE, quant à la conduite au jour le jour de cette opération.

Dans le cas d'une opération dirigée par l'UE, un comité ad hoc de contributeurs sera créé afin d'assurer la conduite au jour le jour de l'opération. Tous les États membres de l'UE ont le droit de participer à ce comité ad hoc, qu'ils prennent ou non part à l'opération, mais seuls les États contributeurs participeront à la conduite au jour le jour de cette opération.

Le conseil, après la tenue de consultations entre les États participants au sein du Comité des contributeurs, prend la décision de mettre fin à une opération.

Des modalités visant à assurer une consultation, une coopération et une transparence pleines entre l'UE et l'OTAN seront mises en oeuvre. Dans un premier temps, les relations seront informelles et se concrétiseront par des contacts entre le SG/HR pour la PESC et le secrétaire général de l'OTAN.

Mesures de suivi confiées à la présidence portugaise

La présidence portugaise est invitée, avec le secrétaire général/haut représentant, à poursuivre les travaux, au sein du Conseil « Affaires générales », sur le renforcement de la politique européenne commune en matière de sécurité et de défense. La présidence portugaise est invitée, en outre, à faire rapport au Conseil européen de Feira sur les progrès accomplis, notamment par :

a) des recommandations sur le développement institutionnel au sein de l'UE des nouveaux organes politiques et militaires permanents liés à la PECSD, qui tiennent compte du document concernant les « organes militaires dans l'Union européenne, la planification et la conduite des opérations menées par l'UE » ainsi que d'autres contributions;

b) des propositions relatives aux arrangements appropriés devant être conclus par le conseil en ce qui concerne des modalités de consultation et/ou de participation permettant aux États tiers concernés de contribuer aux opérations militaires de gestion des crises dirigées par l'UE;

c) des propositions sur des principes de consultation avec l'OTAN sur les questions militaires et des recommandations sur le développement de modalités applicables aux relations entre l'UE et l'OTAN, afin de permettre une coopération sur la réponse militaire appropriée à apporter en cas de crise, conformément à ce qui a été arrêté à Washington et à Cologne.

d) une indication si une modification du traité est ou non jugée nécessaire.

ANNEXE 5.3.2


RAPPORT DE LA PRÉSIDENCE SUR LA GESTION NON MILITAIRE DES CRISES PAR L'UNION EUROPÉENNE

La présidence a été chargée par le Conseil européen de Cologne de poursuivre les travaux sur tous les aspects de la sécurité, y compris le renforcement et une meilleure coordination des instruments non militaires de réponse aux crises dont disposent l'Union et les États membres. Les événements qui ont eu lieu au Kosovo notamment ont mis en évidence l'importance de cette tâche. Des discussions approfondies ont eu lieu à ce propos au sein des instances du conseil.

Des travaux de recensement de toutes les ressources dont disposent les États membres et l'Union ont été entrepris et ont abouti à l'établissement d'inventaires des outils existant dans l'Union et dans les États membres, inventaires que l'on trouvera respectivement dans les documents 11044/99 REV 1 pour ce qui est de l'Union et 12323/99 pour ce qui est des États membres.

Les inventaires qui ont été dressés montrent clairement que les États membres et l'Union disposent, séparément ou collectivement, d'une expérience ou de ressources considérables dans un certain nombre de domaines, tels que la police civile, l'aide humanitaire, la remise en place de structures administratives et juridiques, les activités de recherche et de sauvetage, la surveillance des élections et du respect des droits de l'homme, etc. Cet inventaire devrait être complété et mis à jour régulièrement afin de mieux déterminer les lacunes et les points forts.

Pour pouvoir répondre plus rapidement et plus efficacement à des crises naissantes, l'Union doit renforcer les capacités de réaction et l'efficacité de ses ressources et de ses outils, ainsi que leur synergie.

Il convient donc d'élaborer un plan d'action qui indiquerait la voie à suivre et les mesures que doit prendre l'Union afin de mettre au point un dispositif de réaction rapide dans le domaine de la gestion des crises au moyen d'instruments non militaires.

Plan d'action

A. L'Union devrait se fixer comme objectif :

­ de renforcer la synergie et la capacité de réaction des moyens existant sur le plan national, collectif et des ONG, afin d'éviter toute duplication et d'améliorer les résultats, tout en laissant à chaque participant sa liberté de décision en matière de déploiement de ses moyens et capacités dans une crise donnée ou par un canal particulier;

­ de renforcer et de faciliter, d'une part, les contributions de l'UE à d'autres organisations, telles que l'ONU et l'OSCE, et ses activités au sein de celles-ci, lorsque l'une d'elles est chef de file dans une crise donnée, et, d'autre part, les actions autonomes de l'UE;

­ d'assurer la cohérence interpiliers.

B. À cette fin :

Les États membres et l'Union devraient développer une capacité de réaction rapide en définissant un cadre et des modalités, ainsi qu'en désignant à l'avance les moyens humains, matériels et financiers qui pourraient être utilisés en réponse à une demande présentée par une organisation chef de file telle que l'ONU ou l'OSCE ou, le cas échéant, pour des actions autonomes de l'UE.

Un inventaire des moyens nationaux et collectifs devrait être établi, afin d'avoir un aperçu des moyens qui pourraient être rassemblés dans le cadre d'un tel dispositif de réaction rapide. À cette occasion, les États membres et les institutions de l'UE pourraient, s'ils le souhaitent, mettre en évidence les secteurs dans lesquels ils estiment qu'ils ont des compétences reconnues.

Une base de données devrait être créée afin de conserver et de partager des informations sur les moyens, les capacités et les compétences désignés à l'avance dans tous les domaines liés à la gestion non militaire des crises. Il conviendrait de définir clairement la disponibilité et la qualité de ces moyens.

Une étude devrait être menée, tenant compte de l'expérience acquise, afin de définir des objectifs concrets s'agissant de la réponse non militaire collective qu'apportent les États membres de l'UE aux crises internationales (par exemple, la capacité de déployer rapidement et de soutenir pendant une période donnée une force de police civile d'un volume déterminé dans le cadre de la participation à des missions de police civile; la capacité de déployer une force combinée de recherche et de sauvetage pouvant atteindre 200 personnes dans un délai de 24 heures). Ces travaux devraient être poursuivis par la présidence portugaise en collaboration avec le SG/HR.

L'inventaire, le projet de base de données et l'étude devraient permettre d'identifier les points forts et les faiblesses et pourraient favoriser l'amélioration des normes de formation, le partage des expériences et les meilleures pratiques ainsi que la mise en place de projets bilatéraux ou multilatéraux entre États membres (par exemple, l'envoi d'une équipe médicale spécialisée d'un État membre dans un hélicoptère appartenant à un autre État membre).

Un dispositif de coordination, fonctionnant en étroite interaction avec les services de la Commission, devrait être mis en place au secrétariat du conseil. Il serait chargé du projet de base de données et des diverses initiatives en matière de capacités. Lors de certaines crises, et en fonction du rôle joué par l'UE, il pourrait instituer un centre ad hoc chargé de coordonner les contributions des États membres de l'UE afin d'ajouter à leur efficacité. Cette structure devrait être d'ampleur limitée, efficace et non bureaucratique et elle devrait permettre une interaction étroite avec la Commission (notamment avec ECHO).

Il conviendra, dans le cadre de la mise en place de la capacité de réaction rapide, d'examiner de façon urgente le développement des capacités en matière de police civile.

Des mécanismes de financement rapide, par exemple la création par la Commission d'un Fonds de réaction rapide, devraient être institués afin de permettre un financement accéléré des activités de l'UE, de contribuer aux opérations conduites par d'autres organisations internationales et de financer les activités des ONG, le cas échéant.

Prise de décisions et mise en oeuvre

L'Union devrait adopter une approche globale en vue de rassembler tous les instruments non militaires nationaux et collectifs dans les délais requis par la situation sur le terrain.

Un mécanisme de coordination pour la gestion civile des crises sera institué en vue de la coordination des outils de gestion civile des crises. Ce mécanisme, qui sera de caractère interpiliers, fournira des avis techniques en matière de gestion des crises. Les décisions liées aux outils de gestion non militaire des crises et la mise en oeuvre de ceux-ci dans le cadre du premier pilier continueront de relever des institutions et procédures visées dans le traité CE.

À titre intérimaire, il pourra être fait appel à des experts des États membres pour la mise au point de ce mécanisme de coordination pour la gestion civile des crises.

Le cas échéant, l'Union élaborera des orientations générales garantissant une cohérence interpiliers et décrivant les moyens nécessaires. Les mécanismes de financement rapide permettant d'apporter une réponse urgente en cas de crise pourraient être définis dans ce contexte.

ANNEXE 6


A5-0018/2000

RÉSOLUTION DU PARLEMENT EUROPÉEN SUR LA CONVOCATION DE LA CONFÉRENCE INTERGOUVERNEMENTALE (14094/1999 ­ C5-0341/1999 ­ 1999/0825 (CNS))

Le Parlement européen,

­ consulté par le Conseil conformément à l'article 48, paragraphe 2, du traité sur l'Union européenne, sur la convocation d'une Conférence intergouvernementale (CIG) pour examiner les modifications à apporter aux traités sur lesquels est fondée l'Union européenne (C5-0341/1999),

­ vu le rapport de la Commission « Adapter les institutions pour réussir l'élargissement » du 2 décembre 1999,

­ vu l'avis de la Commission « Adapter les institutions pour réussir l'élargissement » du 26 janvier 2000 (COM(2000) 34),

­ vu les conclusions des Conseils européens de Cologne (3 juin 1999), de Tampere (15 octobre 1999) et d'Helsinki (10 décembre 1999),

­ vu ses résolutions du 19 novembre 1997 sur le traité d'Amsterdam (9), du 6 mai 1999 sur la méthode et le calendrier de la prochaine réforme institutionnelle (10) et du 18 novembre 1999 sur la préparation de la réforme des traités et la prochaine Conférence intergouvernementale,

­ vu le rapport de la commission des affaires constitutionnelles (A5-0018/2000),

A. considérant une impulsion donnée au processus d'élargissement par les chefs d'État et de gouvernement à Helsinki et l'ampleur d'un tel processus qui regroupe dorénavant treize pays candidats dans un cadre unique,

B. considérant que le nouveau rythme dans le processus d'élargissement décidé à Helsinki exige une réforme des traités capable de garantir la stabilité institutionnelle, de créer des méthodes démocratiques de révision constitutionnelle, de préserver et d'approfondir l'efficacité dans la prise de décision et de renforcer la démocratie pour continuer de progresser dans la construction européenne,

C. considérant que la perspective d'une Union élargie impose le lancement d'un processus constitutionnel,

D. considérant que la mondialisation accélérée des économies et l'introduction de l'euro exigent, de la même façon, une amélioration ­ à travers les dispositions du traité ­ des mécanismes décisionnels de l'Union en matière de politique économique, de manière que lesdits mécanismes soient plus transparents, plus efficaces et plus démocratiques,

E. considérant la responsabilité particulière qui lui incombe quant à la prise d'une décision définitive sur l'adhésion de nouveaux membres, en vertu de l'article 49 du traité sur l'Union européenne, qui dispose que l'avis conforme du Parlement est une condition préalable indispensable à de telles adhésions,

F. considérant que les conclusions du Conseil européen d'Helsinki n'ont pas répondu aux propositions contenues dans sa résolution précitée du 18 novembre 1999 et dans le rapport de la Commission,

G. considérant que l'avis présenté par la Commission le 26 janvier 2000, plaide clairement pour un élargissement de l'ordre du jour de la Conférence intergouvernementale,

H. rappelant sa décision de se prononcer sur les conclusions de la CIG à la lumière de ses résultats par rapport aux nécessités de l'élargissement;

1. estime que l'ordre du jour de la CIG, qui doit commencer en février 2000, arrêté en décembre 1999 à Helsinki par les chefs d'État et de gouvernement ne respecte pas le Protocole nº 7 d'Amsterdam en vue d'une révision globale des dispositions des traités relatives aux institutions par rapport aux défis de l'élargissement et ne répond pas aux exigences de plus grande efficacité et légitimité démocratique de l'Union;

2. salue l'engagement de la présidence portugaise en faveur de l'élargissement de l'ordre du jour de la CIG;

3. se félicite de l'ouverture des travaux d'élaboration de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et souligne sa revendication de la voir intégrée aux traités;

4. demande à la présidence portugaise de tenir son engagement de proposer au Conseil européen de Lisbonne des thèmes à insérer dans l'ordre du jour de la CIG en considérant avec la plus grande attention les propositions de sa résolution précitée du 18 novembre 1999 ainsi que celles de la Commission et des États membres afin de permettre une réforme ambitieuse du traité;

5. précisera ses priorités à la CIG dans un rapport ultérieur sur la base de sa résolution précitée du 18 novembre 1999 et présentera ses propositions concrètes au travers de sa Présidente et de ses représentants, lesquels devront participer pleinement à tous les niveaux de la conférence;

6. estime que la décision finale des États membres devra etre soumise au Parlement européen au travers de la procédure d'avis conforme;

7. souligne qu'il est nécessaire pour la CIG d'adopter des méthodes de travail transparentes, de manière que les citoyens de l'Union soient informés du déroulement des travaux et des grandes décisions prises par la Conference;

8. estime qu'une Conférence intergouvernementale est indispensable; conteste l'ordre du jour trop limité arrêté à Helsinki qui risque de remettre en question le processus d'intégration, et demande une attitude ouverte du Conseil envers les propositions de la présidence portugaise pour l'élargissement de l'ordre du jour de la Conférence;

9. charge sa Présidente de transmettre la présente résolution aux Chefs d'État et de gouvernement, au Conseil, à la Commission et aux parlements des États membres.


(1) Voir doc. Sénat, nºs 1-702/1 et 2, Chambre nº 49-1120/3 et doc. Sénat, nºs 1-1001/1 et 2, Chambre nºs 49-1573/1 en 2.

(2) Voir annexe 2.

(3) Voir annexe 3.

(4) Voir annexe 1.

(5) Voir annexe 4.

(6) Voir annexe 5.1.

(7) Voir annexe 5.2.

(8) Voir annexe 5.3.

(9) JO C 371 du 8 décembre 1997, p. 99.

(10) JO C 279 du 1er octobre 1999, p. 416.