Questions et Réponses

Sénat de Belgique


Bulletin 1-99

SESSION DE 1998-1999

Questions posées par les Sénateurs et réponses données par les Ministres

(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais


Secrétaire d'État à la Sécurité, adjoint au ministre de l'Intérieur, et secrétaire d'État à l'Intégration sociale et à l'Environnement, adjoint au ministre de la Santé publique (Sécurité)

Question nº 1640 de M. Verreycken du 12 mars 1999 (N.) :
Éthylotest. ­ Éthylomètre. ­ Procédure.

En matière d'ébriété sur la voie publique, on m'a signalé que la règle générale serait que lorsqu'on trouve un conducteur sous l'emprise de la boisson, on effectue tout d'abord un éthylotest et, dans la mesure du possible, on le soumet à l'éthylomètre, et dans certains cas, à une prise de sang. Des lacunes auraient été constatées au niveau de cette réglementation, qui entraveraient ou rendraient impossible l'exécution pratique de ces mesures.

On m'a ainsi fait savoir qu'un éthylotest et un éthylomètre peuvent uniquement être effectués, selon la loi, dans le cadre de la police sur la circulation routière et non sur la base de l'arrêté royal relatif à l'ivresse sur la voie publique. Ainsi, une personne qui ne conduit aucun véhicule ne peut pas être soumise à un éthylotest ni à un éthylomètre. Quelqu'un qui met de la sorte la vie des autres en danger, sans pour autant conduire de véhicule, ne peut donc être sanctionné du chef d'ébriété. Ce n'est qu'en cas d'accident, lorsqu'une personne en état d'ébrieté peut être considérée comme étant impliquée dans ledit accident, qu'elle peut être soumise à un éthylotest.

Ces remarques sont-elles exactes et dans l'affirmative, ne serait-il pas conseillé de procéder à quelques adaptations ?

Une seconde observation qui m'a été faite : un éthylotest peut être refusé sans que l'on en puisse trouver la moindre indication de procédure à cet effet, tandis qu'il en existe pour le cas du refus d'un test de l'éthylomètre.

Si trois mesures non valables ont été effectuées au moyen d'un éthylomètre, il faut se rapporter au résultat de l'éthylotest pour définir le nombre d'heures d'interdiction de conduire. Sans mesure valable de l'éthylomètre, cette interdiction de conduire ne peut manifestement pas être imposée, étant donné qu'aucun éthylotest n'avait été effectué. Cette situation suscite la même interrogation : les descriptions correspondent-elles aux faits et dans l'affirmative, ne serait-il pas conseillé de rectifier l'une ou l'autre chose ?

Troisième remarque : la loi prévoit un délai d'attente de 15 minutes, tant pour l'éthylotest que pour l'éthylomètre, et ce en raison du fait qu'une personne qui vient de consommer de l'alcool peut avoir un résultat positif au test. Après l'éthylotest, une analyse de l'haleine peut à nouveau être réalisée au moyen de l'éthylomètre. Précisons que l'intéressé peut à nouveau exiger un délai d'attente de 15 minutes. Lorsque le premier temps d'attente a déjà été octroyé lors du premier test, ce second délai peut être utilisé à mauvais escient par l'intéressé dans l'espoir d'une réaction négative à l'éthylomètre.

Ne serait-il pas mieux qu'une circulaire ou un arrêté royal stipule que le temps d'attente de 15 minutes ne peut être accordé qu'une seule fois ?

La remarque suivante qui m'a été adressée est la suivante : après une interdiction de prendre le volant de 3 heures, imposée après une mesure de plus de 0,5 pour mille, on peut à nouveau récupérer le permis de conduire sans aucun contrôle. Ceci est assez étonnant, car après une interdiction de prendre le volant de 6 heures, à savoir après une mesure de + 0,8 pour mille, l'intéressé doit à nouveau subir un éthylotest ou un contrôle de l'haleine par éthylomètre.

Ne serait-il pas judicieux d'imposer cette obligation aussi pour le taux d'alcoolémie inférieur ?

Dernière remarque formulée : après trois mesures valables durant l'analyse de l'haleine à l'éthylomètre, une prise de sang peut être proposée par les verbalisants. L'intéressé est en droit de refuser cette prise de sang, mais à un médecin. Est-il vrai que les verbalisants sont tenus de convoquer un médecin dans le seul but de faire entendre à ce dernier que l'intéressé refuse la prise de sang ? Dans l'affirmative, ne faudrait-il pas adapter cette disposition ?

Réponse : 1. Dans la loi relative à la police de la circulation routière coordonnée par l'arrêté royal du 16 mars 1968, il est opéré pour la conduite sous l'influence de l'alcool une distinction entre deux délits punissables, à savoir : l'ivresse et l'imprégnation alcoolique d'au moins 0,22 milligramme par litre d'air alvéolaire expiré ou d'au moins 0,5 gramme par litre de sang.

L'« état d'ivresse (alcoolique) » (article 35) vise le conducteur d'un véhicule ou d'une monture, ou celui qui accompagne en vue de l'apprentissage. Il n'est pas soumis à l'administration de la preuve ou à un moyen particulier de preuve. L'administration de la preuve est dès lors libre et peut consister en toutes circonstances sur lesquelles le juge se fondera pour fixer sa conviction.

Le délit d'« imprégnation alcoolique » (article 34) par contre, dépend de la mise en oeuvre de moyens de preuve stricts, c'est-à-dire l'analyse de l'haleine ou le prélèvement sanguin et selon une procédure prescrite (articles 59, 60 et 61).

L'analyse de l'haleine est précédée généralement de l'imposition préalable du test de l'haleine.

Celui-ci concerne :

1) toute personne qui, dans un lieu public, conduit un véhicule ou une monture ou accompagne un conducteur en vue de l'apprentissage;

2) toute personne qui, dans un lieu public, s'apprête à conduire un véhicule ou une monture;

3) l'auteur présumé d'un accident de roulage ou toute personne qui a pu contribuer à le provoquer, même si elle en est la victime.

Dans ce 3e cas, il subsiste la possibilité qu'un usager qui n'est pas conducteur (ou qui ne s'apprête pas à conduire) soit sanctionné du délit d'imprégnation alcoolique en vertu de l'article 34 de la loi relative à la police de la circulation routière. Il doit y avoir une corrélation avec un accident de roulage.

D'autre part, il faut observer que l'« état d'ivresse » en général est punissable sur la base de l'arrêté loi du 14 novembre 1939 relatif à la répression de l'ivresse, pour autant que l'intéressé se trouve dans un lieu public.

L'« état d'ivresse » n'est pas défini dans l'arrêté loi. Il convient donc de donner à ces termes leur signification usuelle : est ivre, celui qui est sous l'influence de la boisson de telle sorte qu'il ne dispose plus du contrôle permanent de ses actes sans pour autant en avoir nécessairement perdu la conscience.

L'arrêté loi ne prescrit donc aucun moyen de preuve particulier. De plus, le caractère public du lieu (article 1er : « Celui qui sera trouvé en état d'ivresse dans un lieu public, sera puni ... ») sera considéré comme démontré par le constat lui-même, que le fait s'est déroulé sur la voie publique.

Il apparaît clairement qu'ici ­ contrairement à l'article 35 de la loi sur la police de la circulation routière ­ d'autres personnes que des conducteurs sont visés, par exemple : celui qui se trouve dans une voiture particulière sur la voie publique ou un piéton.

Bien que le procédé de dépistage et d'analyse ne soit pas connu dans l'arrêté loi, il est cependant possible de poursuivre des personnes en général qui se trouvent dans un état d'ivresse en public. La possibilité de poursuivre est indépendante du fait qu'il y a ou non implication dans un accident.

Il ne me paraît pas nécessaire de modifier la législation dans le sens proposé.

2. Le refus d'un test de l'haleine ou d'une analyse de l'haleine est sanctionné de la même manière, à savoir par une possibilité de retrait immédiat du permis de conduire, et condamnation à une amende de 200 francs à 2 000 francs, à une peine de prison de 15 jours à six mois ou une de ces peines seulement; il peut y avoir également une déchéance du droit de conduire. En outre, dans les deux cas, est d'application également une mesure de sécurité consistant en une interdiction temporaire de conduire de 6 heures.

Le cas ou les trois mesures ne sont pas valables est différent du cas du refus de l'analyse de l'haleine.

Il s'agit ici du cas où, à la demande de l'intéressé (seulement dans les cas d'un conducteur au accompagnateur et de l'auteur présumé, co-auteur ou victime d'un accident de la route), il est procédé à une deuxième analyse de l'haleine qui fait apparaître que la différence entre ces deux résultats est supérieure aux prescriptions en matière de précision qui sont prévues.

Dans ce cas, il est donc procédé à une troisième analyse. Si la différence éventuelle entre deux de ces résultats est supérieure aux prescriptions en matière de précision, il est considéré que l'analyse de l'haleine n'a pu être réalisée (article 59, § 3).

On impose alors une interdiction de conduire de 3 ou 6 heures suivant le résultat du test de l'haleine.

S'il n'y a pas eu de test de l'haleine, la mesure suivante s'applique :

­ 6 heures d'interdiction de conduire :

­ si l'intéressé se trouve apparemment dans la situation visée à l'article 34, § 2, de la loi (une concentration d'au moins 0,35 milligramme par litre d'air alvéolaire expiré)

­ ou lorsqu'il se trouve en état d'ivresse (article 35), ce qui sera plus que probablement le cas de figure le plus souvent retenu.

De plus, un prélèvement sanguin doit être imposé dont le résultat sera déterminant pour les autres sanctions.

Dans tous les cas, il y a donc bien une interdiction temporaire de conduire.

3. La possibilité de demander d'attendre un quart d'heure est prévue tant dans l'arrêté relatif aux appareils d'analyse de l'haleine que dans l'arrêté royal relatif aux appareils de test de l'haleine (tous deux datés du 18 février 1991).

Il est tenu compte ici du fait que l'analyse de l'haleine n'est pas toujours précédée d'un test de l'haleine (celui-ci d'ailleurs légalement ne doit pas être réalisé au préalable). Les agents compétents peuvent donc procéder directement a une analyse de l'haleine.

Le but du temps d'attente est de neutraliser la présence d'alcool dans la bouche lorsqu'il a été pris peu de temps avant l'épreuve, ce qui a pour effet le relevé d'un résultat supérieur.

Il est donc logique que le temps d'attente a été prévu pour les deux épreuves, mais lorsque l'analyse de l'haleine est réalisée après qu'il a été procédé déjà à un test de l'haleine, le temps d'attente est en effet un surcroît de procédure qui n'a pas d'utilité.

Cet aspect pourrait donc à nouveau être considéré.

4. Il est admis en général que l'alcool dans le sang disparaît à concurrence de 0,15 g/l par heure. Si le niveau d'alcoolémie constaté a atteint 0,8 g par litre de sang, on peut en déduire que suivant une élimination moyenne de 0,15 g/l, après trois heures l'alcool dans le sang passera au-dessous de 0,5 g par litre (en dessous de 0,22 mg par litre d'air expiré).

0,5 g est considéré comme la valeur de référence à partir de laquelle le risque d'accident devient important.

En tenant compte de ce qui précède, il est logique qu'après une interdiction temporaire de conduire de 6 heures consécutive à une concentration d'alcool d'au moins 0,8 g par litre de sang (0,35 mg par litre d'air alvéolaire expiré), l'intéressé soit à nouveau testé jusqu'à ce qu'il ne soit plus dans la zone dangereuse.

5. Le prélèvement sanguin peut être demandé à titre de contre-expertise par l'intéressé, et pas par les agents de l'autorité compétents (article 63, § 3). Ces derniers sont alors obligés de requérir un médecin pour procéder à une prise de sang de la personne si l'analyse de l'haleine obtenue après une deuxième et éventuellement une troisième analyse avec un résultat non cohérent, a abouti à une mesure de concentration d'alcool d'au moins 0,35 mg/l d'air alvéolaire expiré.

Normalement, l'intéressé ne refusera pas la prise de sang au médecin, étant donné que c'est lui-même qui a dû en faire la demande.