4-1485/1

4-1485/1

Sénat de Belgique

SESSION DE 2009-2010

29 OCTOBRE 2009


Proposition de résolution relative à la nécessité d'accorder une attention prioritaire aux soins de santé, y compris en matière de santé sexuelle et reproductive, durant la présidence belge de l'UE

(Déposée par Mme Marleen Temmerman et consorts)


DÉVELOPPEMENTS


Durant le second semestre de 2010, la Belgique présidera l'Union européenne. Pour notre pays, il s'agira d'une présidence d'un genre nouveau puisqu'elle sera exercée en trio, conjointement avec l'Espagne (premier semestre de 2010) et la Hongrie (premier semestre de 2011). À titre préparatoire, les trois pays ont élaboré un programme commun qu'ils ont présenté en juin dernier. Ainsi, en matière de coopération au développement, ils ont défini un certain nombre de thèmes prioritaires tels que l'efficacité de l'aide, les engagements relatifs à l'augmentation de l'APD et les objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), en prêtant une attention toute particulière, au renforcement des systèmes de santé et à la dimension du genre, entre autres.

Dans les mois qui viennent, la Belgique finalisera le programme opérationnel qu'elle compte mettre en œuvre durant sa présidence. Par la présente résolution, les auteurs souhaitent demander au gouvernement de faire en sorte qu'en matière de coopération au développement, la santé et, en particulier, la santé et les droits sexuels et reproductifs, figurent au rang des thèmes prioritaires.

La politique belge actuellement menée en la matière illustre clairement la grande importance de ces thèmes. La Belgique consacre en effet 9 à 10 % de son aide officielle au développement aux soins de santé et à la santé reproductive, et a déjà pris de nombreux engagements en ce qui concerne la santé dans le monde:

— la loi du 25 mai 1999 relative à la coopération internationale belge, en particulier son article 7, § 1er, 1º, qui prévoit que la coopération bilatérale directe se concentre, entre autres, sur les soins de santé de base, en ce compris la santé reproductive;

— la note stratégique « Égalité des droits et des chances entre les femmes et les hommes » (2002);

— la note politique « La contribution belge à la lutte internationale contre le VIH/SIDA » (2006);

— la note stratégique « Le respect des droits de l'enfant dans la coopération au développement » (2008);

— la note politique « La coopération belge au développement dans le domaine de la santé et des droits sexuels et reproductifs » (2007);

— « Femmes, Paix et Sécurité ». Plan d'action national belge pour la mise en œuvre de la résolution 1325 du Conseil de sécurité des Nations unies (2009);

— la note politique « Le droit à la santé et aux soins de santé » (2009).

L'Union européenne, elle aussi, s'est déjà exprimée clairement au sujet des soins de santé, y compris sur la santé et les droits sexuels et reproductifs. Malgré cela, l'action politique demeure limitée et la plupart des engagements énumérés ci-après restent donc lettre morte:

— la communication du 22 mars 2002 de la Commission au Conseil et au Parlement européen, intitulée « La santé et la lutte contre la pauvreté dans les pays en développement » [COM(2002) 129];

— la déclaration conjointe du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil, du Parlement européen et de la Commission, sur la politique de développement de l'Union européenne, intitulée « Le consensus européen sur le développement », signée le 20 décembre 2005, et le consensus européen sur l'aide humanitaire, adopté en décembre 2007;

— la communication du 8 mars 2007 de la Commission au Parlement européen et au Conseil, intitulée « L'égalité entre les hommes et les femmes et l'émancipation des femmes dans la coopération au développement » [COM(2007) 100];

— la communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen relative au programme d'action européen pour lutter contre le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose par les actions extérieures (2007-2011) [COM(2005) 179];

— la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, intitulée « L'UE partenaire global pour le développement. Accélérer les progrès vers les Objectifs du Millénaire pour le Développement » [COM(2008) 177];

— le partenariat stratégique UE-Afrique, adopté le 9 décembre 2007 (doc. 16344/07), notamment l'article 62 qui fait référence à la Conférence internationale sur la population et le développement, au plan d'action de Maputo et à la promotion de la santé et des droits en matière de sexualité et de procréation en vue d'atteindre l'objectif d'un accès universel aux services de santé en matière de reproduction d'ici à 2015.

Malgré ces engagements, le combat n'est pas encore terminé. Chaque année, 536 000 femmes meurent encore dans le monde des suites de complications liées à la grossesse ou à l'accouchement (OMD 5). Dans les pays les moins développés et en Afrique subsaharienne en particulier, on n'enregistre guère de progrès dans la lutte contre la mortalité maternelle. Ainsi, en Afrique subsaharienne, la mortalité maternelle n'a baissé que de 0,1 % en moyenne entre 1990 et 2005. Pour 100 000 naissances, on dénombre 1 800 décès maternels au Niger contre 8 en Belgique, ce qui signifie que dans ce pays d'Afrique, 1 femme sur 7 risque de mourir des suites de complications liées à la grossesse ou à l'accouchement, contre 1 femme sur 7 800 en Belgique.

Les chiffres relatifs à l'accès universel à la santé reproductive (OMD 5b) ne sont guère plus réjouissants. À l'échelle mondiale, on évalue à plus de 200 millions le nombre de femmes qui souhaitent retarder ou éviter une grossesse mais n'ont pas accès aux méthodes contraceptives modernes. On estime qu'il y aurait chaque année plus de 50 millions de grossesses non planifiées et 19 millions d'avortements pratiqués dans des conditions précaires. En outre, le nombre de grossesses adolescentes dans les pays les moins développés est très élevé; en République démocratique du Congo, il est de 222 pour 1 000 naissances contre 7 pour 1 000 en Belgique. La demande de méthodes contraceptives modernes continuera à augmenter au cours des prochaines décennies. La moitié de la population mondiale a moins de 25 ans. Pas moins de 1,5 milliard de jeunes deviendront sexuellement actifs au cours des quinze prochaines années. D'après les prévisions des Nations unies, les besoins non satisfaits en matière de planification familiale augmenteront de 40 % durant cette période. En dépit de la demande croissante de moyens contraceptifs, l'aide au développement en matière de planification familiale diminue.

Dans la lutte contre le VIH/SIDA aussi, il reste beaucoup à faire. On estime que 33 millions de personnes dans le monde vivent avec le virus. En 2007, le nombre de nouvelles contaminations par le VIH était d'environ 2,7 millions et le nombre de décès dus au sida s'élevait à 2 millions. Dans plusieurs régions, on assiste à une féminisation de la maladie. C'est ainsi qu'en Afrique subsaharienne, 60 % environ des adultes séropositifs sont des femmes. Selon les estimations, trois quarts de l'ensemble des femmes séropositives vivent en Afrique subsaharienne.

Le nombre d'enfants séropositifs de moins de 15 ans est passé de 1,6 million en 2001 à 2 millions en 2007. 90 % d'entre eux vivent en Afrique subsaharienne. Chaque jour, plus de 1 000 enfants de moins de 15 ans sont infectés par le VIH, ce qui représente pas moins de 370 000 enfants sur base annuelle.

À l'heure actuelle, un enfant qui naît dans un pays en développement court toujours 13 fois plus de risques de mourir durant les cinq premières années de sa vie qu'un enfant né dans un pays industrialisé. On estime qu'en 2008, 8,8 millions d'enfants sont décédés avant l'âge de cinq ans, le plus souvent de maladies faciles à prévenir ou à guérir. 37 % de ces décès interviennent au cours du premier mois de vie. L'amélioration des soins de santé reproductive permettrait donc d'épargner bien des vies d'enfants.

Durant la présidence en trio, plusieurs conférences internationales de premier plan seront également organisées sur des thèmes touchant de près ou de loin à la santé, y compris à la santé et aux droits sexuels et reproductifs. À cet égard, la Belgique pourrait jouer un rôle de pionnier au niveau européen.

Ainsi, durant la présidence belge de l'UE, les objectifs du Millénaire seront évalués lors du sommet « OMD + 10 ». En 2010, en effet, il y aura dix ans que les chefs de gouvernement de 189 pays ont signé la Déclaration du millénaire des Nations unies. Au cours de ce sommet, l'OMD 4 (réduction de la mortalité infantile), l'OMD 5 (réduction de la mortalité maternelle) et l'OMD 6 (lutte contre le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose) feront l'objet d'une attention toute particulière étant donné qu'ils n'ont pas encore été atteints et que, dans certains pays, les chiffres de la mortalité sont en hausse.

En outre, la plate-forme d'action de Pékin, qui a été adoptée lors de la quatrième conférence mondiale sur les femmes (Pékin 1995), fera elle aussi l'objet d'une évaluation. Il ressort des premiers projets de textes que les objectifs et les actions stratégiques en matière de santé définis dans le programme d'action sont repris en partie ou recadrés dans l'ensemble des objectifs non atteints du programme d'action de la conférence internationale sur la population et le développement (Le Caire, 1994).

Marleen TEMMERMAN.
Sabine de BETHUNE.
Philippe FONTAINE.
Paul WILLE.
Olga ZRIHEN.
Benoit HELLINGS.
Els SCHELFHOUT.


PROPOSITION DE RÉSOLUTION


Le Sénat,

A. renvoyant à la loi du 25 mai 1999 relative à la coopération internationale belge, en particulier l'article 7, § 1er, 1º;

B. vu la note stratégique « Égalité des droits et des chances entre les femmes et les hommes » (2002);

C. renvoyant à la communication du 22 mars 2002 de la Commission au Conseil et au Parlement européen, intitulée « La santé et la lutte contre la pauvreté dans les pays en développement » [COM(2002) 129];

D. considérant la déclaration conjointe du Conseil et des représentants des gouvernements des États membres réunis au sein du Conseil, du Parlement européen et de la Commission, sur la politique de développement de l'Union européenne, signée le 20 décembre 2005;

E. vu la note politique « La contribution belge à la lutte internationale contre le VIH/SIDA » (2006);

F. renvoyant à la note politique « La coopération belge au développement dans le domaine de la santé et des droits sexuels et reproductifs » (2007);

G. vu la communication du 8 mars 2007 de la Commission au Parlement européen et au Conseil, intitulée « L'égalité entre les hommes et les femmes et l'émancipation des femmes dans la coopération au développement » [COM(2007) 100];

H. considérant le consensus européen sur l'aide humanitaire, adopté en décembre 2007;

I. renvoyant au partenariat stratégique UE-Afrique, adopté le 9 décembre 2007 (doc. 16344/07);

J. vu le programme d'action européen pour lutter contre le VIH/SIDA, le paludisme et la tuberculose par les actions extérieures (2007-2011) [COM(2005) 179];

K. vu la note stratégique « Le respect des droits de l'enfant dans la coopération au développement » (2008);

L. considérant la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, intitulée « L'UE partenaire global pour le développement. Accélérer les progrès vers les Objectifs du Millénaire pour le Développement » [COM(2008) 177];

M. vu la résolution relative aux grossesses adolescentes dans les pays en développement, adoptée par le Sénat le 31 janvier 2008;

N. renvoyant à la résolution relative à la mortalité maternelle, adoptée par le Sénat le 14 juillet 2008;

O. vu le Plan d'action national belge pour la mise en œuvre de la résolution 1325 « Femmes, Paix et Sécurité » du Conseil de sécurité des Nations unies (2009);

P. vu la note politique « Le droit à la santé et aux soins de santé » (2009);

Q. renvoyant aux conclusions du séminaire « Survie des enfants », organisé par la commission des Relations extérieures et de la Défense du Sénat le 31 mars 2009;

R. vu la résolution relative à la promotion d'une protection sociale universelle de la santé, adoptée par le Sénat le 14 mai 2009;

S. vu la « résolution visant à lutter contre les mutilations génitales féminines », adoptée par le Sénat le 14 mai 2009 »;

T. renvoyant aux conclusions du colloque organisé sur le thème de la lutte contre le sida par la commission des Affaires sociales et la commission des Relations extérieures et de la Défense du Sénat, en présence de M. Peter Piot, le 18 mai 2009;

U. vu la résolution relative à la survie des enfants dans les pays en développement, adoptée par le Sénat le 9 juillet 2009;

DEMANDE AU GOUVERNEMENT:

dans le cadre de la présidence belge de l'UE:

1. de faire en sorte que les soins de santé, y compris en matière de santé sexuelle et reproductive, occupent une place prioritaire à l'agenda;

2. d'insister sur l'importance de mettre en place des systèmes de santé performants et de réaliser les objectifs du Millénaire en matière de santé et, par extension, les objectifs relatifs à la lutte contre la pauvreté et au développement durable;

3. d'attirer l'attention sur les responsabilités et les engagements des donateurs et des gouvernements dans les pays du Sud en ce qui concerne la santé à l'échelon international ainsi que la santé et les droits sexuels et reproductifs;

4. de prendre des initiatives afin de consulter les divers acteurs opérant dans ce domaine, tels que les scientifiques et les organisations de la société civile, dans le cadre de la fixation des priorités de la présidence;

5. de promouvoir au niveau européen la finction d'un ambassadeur OMD5.

5 octobre 2009.

Marleen TEMMERMAN.
Sabine de BETHUNE.
Philippe FONTAINE.
Paul WILLE.
Olga ZRIHEN.
Benoit HELLINGS.
Els SCHELFHOUT.