3-115

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Belgische Senaat

Handelingen

DONDERDAG 2 JUNI 2005 - NAMIDDAGVERGADERING

(Vervolg)

Vraag om uitleg van mevrouw Clotilde Nyssens aan de vice-eerste minister en minister van Binnenlandse Zaken over «het gebruik van kinderen in het kader van het bedelen op de openbare weg» (nr. 3-842)

De voorzitter. - De heer Christian Dupont, minister van Ambtenarenzaken, Maatschappelijke Integratie, Grootstedenbeleid en Gelijke Kansen, antwoordt namens de heer Patrick Dewael, vice-eerste minister en minister van Binnenlandse Zaken.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Cette demande d'explications fait suite au débat que l'on a clos ce matin sur un projet de loi du ministre de la Justice, débat où l'on a refusé des amendements pour punir les parents qui mendieraient en rue avec leurs enfants.

Je me rends bien compte que la voie pénale n'était pas la bonne et je n'ai absolument pas appuyé l'amendement qui visait à pénaliser les parents. Pourtant, la problématique subsiste et je me demande si ce n'est pas par le biais des compétences du ministre de l'Intérieur qu'il faudrait l'appréhender.

En effet, le récent projet de loi en discussion au parlement, modifiant diverses dispositions en vue de renforcer la lutte contre la traite et le trafic des êtres humains et contre les pratiques des marchands de sommeil punit le fait de soumettre quelqu'un à la mendicité, de l'inciter à mendier ou de mettre une personne à disposition d'un mendiant afin qu'il s'en serve pour susciter la commisération publique. Le projet punit également l'exploitation de la mendicité d'autrui.

De manière générale, l'exploitation de la mendicité est incriminée plus spécifiquement dans le cadre de la traite des êtres humains, avec des circonstances aggravantes lorsque le mendiant est mineur ou lorsque l'auteur a une autorité sur le mendiant, par exemple le parent ou le tuteur.

Il semblerait que la mendicité des enfants - soit qu'ils mendient eux-mêmes, soit qu'ils accompagnent leur(s) parent(s) qui mendie(nt) - a toujours posé problème.

Le texte voté ne résout pas, me semble-t-il, les difficultés d'interprétation et de preuve : le parent qui mendie accompagné d'un ou de plusieurs enfants livre-t-il son(ses) enfant(s), indirectement, à la mendicité ? Exploite-t-il, d'une certaine manière, sa descendance ?

Actuellement, la question des enfants en situation de mendicité ne semble pas constituer une priorité pour les parquets et la police ne veut pas ou n'est pas en mesure de dresser procès-verbal.

Á une question parlementaire du 15 janvier 2004, relative à la mendicité sur la voie publique, vous avez répondu qu'il fallait opérer une distinction entre la mendicité exercée dans le cadre de la criminalité organisée, pour laquelle il existe un plan d'action de la police fédérale, et la mendicité occasionnelle, pour laquelle il incombe plutôt à la police locale d'intervenir et de jouer un rôle social en la matière.

Il semblerait cependant que la situation sur le terrain, en ce qui concerne les enfants mendiants, ne se soit pas améliorée. J'en veux pour preuve la presse de ce matin et l'intervention, dans les médias, du président des Roms qui s'inquiète de cette situation. Le Soir et La Libre en parlaient ce matin.

Existe-t-il un plan d'action au niveau de la police locale, destiné à prendre systématiquement en charge les familles et, particulièrement, les mineurs en situation de mendicité ?

Une collaboration systématique avec la police fédérale, le parquet, les services d'aide à la jeunesse, les CPAS, voire l'Office des étrangers est-elle prévue ? Comment s'organise, le cas échéant, cette collaboration ?

Enfin, de manière générale, quelles sont les mesures de police administrative - puisque nous sommes bloqués au niveau justice - que vous pouvez prendre pour lutter contre ce phénomène relevant bien souvent de la maltraitance d'enfants ?

M. Christian Dupont, ministre de la Fonction publique, de l'Intégration sociale, de la Politique des grandes villes et de l'Égalité des chances. - Depuis plusieurs années, le législateur a abrogé le caractère délictueux de la mendicité qui n'est donc plus interdite, pour autant qu'elle ne trouble pas l'ordre public.

Par contre, l'utilisation d'enfants dans le cadre de la mendicité constitue une transgression des dispositions de la loi sur la protection de la jeunesse et peut amener le juge de la jeunesse à prendre des mesures de protection à l'égard des mineurs concernés.

Dans la pratique, il s'avère que les enfants mineurs d'âge ne s'adonnent pour ainsi dire jamais seuls à la mendicité. La plupart du temps, il s'agit d'adultes qui sont accompagnés d'un enfant mineur d'âge pour susciter la pitié des passants.

Des plans d'actions spécifiques en la matière au sein des zones de police locale peuvent être mis en place lorsque le problème de la mendicité est identifié comme étant une priorité dans le cadre du plan zonal de sécurité qui relève effectivement des zones de police.

Par ailleurs, je voudrais insister sur le fait que chaque corps de police dispose d'un service spécialisé « jeunesse et famille », qui traite en particulier cette problématique, en étroite collaboration avec d'autres services tels les bureaux d'aide aux victimes et les services d'aide à la jeunesse.

En outre, je rappelle que la mendicité avec des enfants mineurs d'âge constitue une infraction. Dès lors que les service de police interviennent, le parquet est avisé et il prend la décision finale en la matière. Parallèlement, les services spécialisés de la police locale mettront en oeuvre le volet social de prise en charge avec les différents partenaires sociaux.

La lutte contre le trafic et la traite des êtres humains est inscrite parmi les priorités dans le plan national de sécurité et inclut, bien entendu, la mendicité organisée avec des enfants mineurs d'âge. Des plans d'action en la matière sont ponctuellement mis en oeuvre là où le phénomène est identifié de façon récurrente.

Une collaboration systématique est alors également mise en oeuvre avec les autres acteurs concernés, soit le parquet, les service d'aide à la jeunesse et, le cas échéant, l'Office des étrangers.

En matière de police administrative, je tiens à préciser que le ministre de l'Intérieur ne peut prendre aucune mesure générale interdisant la mendicité car ce serait contraire aux dispositions légales en la matière. À partir du moment où la mendicité constitue un trouble de l'ordre public, il appartient à l'officier de police administrative concerné de prendre les mesures qui s'imposent pour mettre un terme à cette situation.

Par ailleurs, s'il s'agit de faits de mendicité avec des enfants mineurs d'âge, l'intervention acquiert un caractère judiciaire et relève, dès lors, de la compétence des autorités judiciaires.

Dans les cas avérés de mendicité organisée avec des mineurs d'âge ou de maltraitance d'enfants, un dossier judiciaire sera établi à l'attention du parquet de la Jeunesse concerné.

Jusqu'à présent, les faits de mendicité avec des enfants mineurs d'âge ne peuvent faire l'objet que d'un dossier « jeunesse et famille » donnant lieu, le cas échéant, à des mesures de protection de la jeunesse.

Le projet de loi proposé récemment par la ministre de la Justice, et voté aujourd'hui, va plus loin en prévoyant la pénalisation de l'exploitation de la mendicité.

Mme Clotilde Nyssens (CDH). - Je remercie le ministre de sa réponse.

Cependant, certains éléments m'étonnent. En commission, à l'occasion de l'examen du projet de lutte contre la traite des êtres humains, j'ai fait allusion à la loi sur la protection de la jeunesse. Il m'a été répondu qu'il y avait, non plus des dispositions en matière de protection de la jeunesse, mais bien en matière d'aide à la jeunesse, le texte de la loi de 1965 ayant été abrogé.

Je m'étonne également de l'intervention des parquets et des magistrats : ceux-ci, en particulier à Bruxelles, se sentent bloqués par l'absence d'instruments juridiques.

Je vais étudier le projet de loi relatif à la protection de la jeunesse, qui est pendant à la chambre, afin d'examiner s'il existe une nouvelle disposition en ce sens.

En effet, en commission de la Justice du Sénat, on a constaté qu'il n'y en avait pas, d'où l'amendement proposé aujourd'hui par Mme de T' Serclaes. Il me semble y avoir un vide juridique en la matière et, selon moi, votre réponse ne reflète pas les propos de la ministre de la Justice. Je vais donc vérifier ce qu'il en est.

M. Christian Dupont, ministre de la Fonction publique, de l'Intégration sociale, de la Politique des grandes villes et de l'Égalité des chances. - Selon moi, l'aide à la jeunesse peut évidemment intervenir dans ces cas-là, de même que les services locaux « jeunesse et famille » de la police.

Ceux-ci peuvent saisir le juge de la jeunesse qui est libre de prendre les mesures qui s'imposent. Des mesures de protection sociale sont aussi prévues. Qu'elles soient utilisées ou non est une autre question. Une filière existe pour protéger ou aider les jeunes en difficulté.