2-553/1

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Sénat de Belgique

SESSION DE 2000-2001

15 MAI 2001


Évaluation de l'application de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé


RAPPORT

FAIT AU NOM DE LA COMMISSION DE L'INTÉRIEUR ET DES AFFAIRES ADMINISTRATIVES PAR MME VAN RIET ET M. DALLEMAGNE


I. INTRODUCTION

Le vote automatisé a déjà soulevé beaucoup de protestations depuis son introduction par la loi du 11 avril 1994.

Certains estiment qu'il est antidémocratique, et le rejettent en bloc, tandis que d'autres pensent qu'il est perfectible, et trouvent que ses inconvénients ne contrebalancent pas ses avantages (gain de temps et de personnel quasi volontaire).

Lors de la discussion de la loi du 12 août 2000, modifiant la loi du 11 avril 1994, certains ont continué à mettre en doute la fiabilité du système de vote automatisé, mais se sont finalement inclinés devant la nécessité de respecter l'échéance des opérations de vote pour les élections du 8 octobre 2000.

Toutes les possibilités restaient ouvertes en vue d'un nouveau débat de fond devant servir en même temps d'évaluation des divers systèmes disponibles.

Le rapport est le reflet de tous les points de vue et doit permettre une discussion en connaissance de cause des projets que le gouvernement s'apprête à présenter au Parlement.

II. AUDITIONS

1. Audition des opposants, tenue le 11 octobre 2000

1.1. Exposé de M. Nabil Antoun

M. Antoun trouve que les élections sont, dans notre système, le moment suprême de la démocratie, puisque c'est à ce moment-là que chacun peut exprimer sa voix. Il importe que ce vote soit fidèlement répercuté au niveau des résultats.

Il ne faut pas qu'une caste d'experts-informaticiens prenne ce vote en charge, puisque, sinon, une aliénation s'opère entre le votant et son vote, qu'il ne voit même plus matérialisé.

Seule une élite pourrait désormais comprendre le système et le contrôler. Les électeurs seraient réduits au stade d'illettrés. Ce qui est plus grave encore est le constat que le ministère de l'Intérieur refuse la transparence, et entretient ainsi lui-même le sentiment de suspicion.

Différents tribunaux se sont saisis de la question et tendent à donner raison aux plaignants. Faudra-t-il que la Cour européenne des droits de l'homme condamne la Belgique avant que celle-ci ne se rende compte du fait qu'elle ne respecte pas la loi fondamentale ni les traités ?

La Belgique ne peut pas se permettre d'utiliser un système non fiable, parce qu'elle sert de référence au monde en la matière. Il ne faudrait pas que des pays non démocratiques organisent des élections truquées par la voie électronique en se justifiant par la référence à notre système.

La Suisse a montré l'exemple en refusant le vote électronique, bien qu'ayant les moyens. Les experts ont estimé que la simple possibilité de fraude rend inapplicable le système électronique.

La conclusion est qu'il faut revenir en arrière et réintroduire partout le vote sur papier.

1.2. Exposé de M. Van Welde

M. Van Welde peut s'accomoder du système électronique en tant que tel, sous réserve d'y voir insérer les garanties minimales les suivantes :

1) délivrer un ticket après le vote à chaque électeur, pour que celui-ci puisse se rendre compte du résultat de son vote. Il déposera ce ticket dans une urne de secours;

2) un contrôle institué par la loi qui porte sur un échantillon de 3 % des bureaux, choisis de façon aléatoire et, en parallèle, un même contrôle d'un nombre restreint de bureaux à désigner par les partis politiques.

Il y a deux valeurs en jeu : le secret du vote et la fiabilité du dépouillement. Pour lui, un vote volé est plus grave que la violation du vote secret.

1.3. Exposé de maître Jansen, avocat au barreau de Bruxelles

Maître Jansen commence par un constat de fait : il y a eu, au cours des opérations de vote récentes deux systèmes différents mis en parallèle (le système papier et le système électronique), et ce à deux niveaux (le vote et le dépouillement). Ceci n'est pas tout à fait conforme au principe de l'égalité.

Par ailleurs, la loi qui confie le contrôle des opérations de vote au ministre de l'Intérieur a instauré depuis 1998 un système de contrôle effectué par des experts, eux-mêmes désignés par les assemblées législatives.

C'est surtout ce dernier constat qui a amené les clients de maître Jansen à contester la validité du système de vote électronique devant le juge des référés du tribunal de Bruxelles.

Le Pacte de New York relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, auquel la Belgique a adhéré par la loi du 15 mai 1981, impose dans son article 25 un processus d'élections « honnêtes », ce qui implique selon lui un contrôle indépendant de l'État. Le juge des référés l'a suivi en ce raisonnement.

Le contrôle actuel qui relève essentiellement du ministre de l'Intérieur est malsain.

En justice, dès qu'un juge connaît une des parties, il doit se récuser pour éviter même un soupçon de partialité.

Pour ce qui concerne les élections, le même principe moral devrait prévaloir. Il découle du devoir d'organiser les élections de façon honnête qu'impose le Pacte international de New York.

Il serait hypocrite de prétendre que le système belge est honnête au vu de cette convention. Même le moindre doute potentiel est à proscrire au niveau de l'organisation des élections. Si l'on rejette ce principe pour la Belgique, de quel argument dispose-t-on encore pour critiquer, le cas échéant, un pays comme la Birmanie qui organiserait des élections via le système de vote électronique sous la seule houlette de son propre ministre de l'Intérieur ?

Notre bon vieux système en vigueur depuis 1830 offre la garantie d'un vote des plus démocratiques.

Le mécanisme du vote sur papier présente un avantage unique, puisqu'il se constitue au moment des élections tout un organisme temporaire, complètement indépendant, du bureau de vote jusqu'au bureau principal.

Cet organisme est composé de juges, d'avocats, de notaires et d'une pléiade de gens respectés par leurs concitoyens.

En tant que tel, cet organisme emporte la confiance du pays depuis qu'il existe.

Il ne faut pas se défaire d'un mécanisme qui comporte tant d'avantages.

Maître de Selliers, avocat et associé de maître Jansen, tient à préciser que, selon lui, la question essentielle qui se pose n'est pas de savoir si les experts désignés sont indépendants ou non, mais bien si le système tel qu'il se présente est contrôlable ou non.

Or, le système belge ne l'est pas, selon les dires mêmes du juge des référés du tribunal civil de Bruxelles, qui l'a confronté aux prescrits du Pacte de New York.

Il se pose dès lors un problème de légalité du système électoral mis en place par la loi du 11 avril 1994.

1.4. Discussion

Le ministre de l'Intérieur souhaite dissiper quelques malentendus.

Les intervenants ont prétendu que les diverses lois relatives aux opérations électorales ont toujours été votées à la hâte juste avant telle ou telle élection, ce qui fait qu'on a apporté peu de soin à leur contenu.

Cela ne correspond pas à la réalité. La loi de 1994 a été précédée par un large débat parlementaire.

Les différentes modifications qui ont été apportées par la suite étaient inspirées par des débats de société pertinents, comme cela a été le cas pour la décision de communiquer le logiciel à tous les citoyens qui en font la demande. On envisage de le publier sur internet, sans les clés bien entendu.

Les observations formulées par les experts lors des dernières élections législatives ont elles aussi donné lieu à une série d'améliorations. Il s'ensuit que le nombre de remarques qui ont été formulées après les dernières élections a diminué de moitié.

Par conséquent, on peut considérer qu'il est raisonnable de faire confiance au système dans une très large mesure.

Le ministre ne peut pas admettre que les citoyens cherchent, par des critiques démagogiques, à saboter le système même.

On doit accepter que lorsque des problèmes sont signalés, on y apporte une solution.

Un membre regrette qu'il n'y ait que deux experts néerlandophones et que toute l'opposition émane de francophones.

Pourtant, on note, en Flandre également, une amplification des rumeurs selon lesquelles il y aurait possibilité de fraude.

Ces rumeurs ne pourront être combattues que par un contrôle efficace.

Le ministère affirme ainsi qu'il n'est pas possible de pénétrer le code en ligne. Toutefois, lorsqu'on entend le porte-parole de CIPAL déclarer qu'on utilise le réseau « C net » des communes, on ne peut que douter de cette affirmation. Il s'agit là en effet de l'intranet que Dexia a installé pour les communes et qui fonctionne en ligne.

Il avait été demandé dans le rapport des experts faisant suite aux précédentes élections que seul le ministère fournisse le programme ainsi que tous les logiciels de contrôle. Est-ce que cela a été fait ?

A-t-on programmé la machine de lecture dans les ordinateurs enregistrant les votes pour qu'elle puisse bel et bien uniquement lire et non écrire ?

Une autre membre se dit agacée par le ton anti-politicien des déclarations des personnes entendues, comme si les politiciens ne se sentaient pas préoccupés par la question. Il ne faut pas oublier que, lorsque le ministre est venu promouvoir le nouveau système au Parlement, il s'est chaque fois fait critiquer par les parlementaires, dont ceux de la commission de l'Intérieur du Sénat.

Elle rappelle que l'installation dans les bureaux de vote d'une imprimante a été demandée par amendement, pour que le citoyen puisse contrôler si son vote avait bien été enregistré sur sa carte.

Cet amendement a été finalement retiré comme suite aux explications du ministre qui portaient sur les raisons techniques empêchant l'introduction immédiate. Il a été décidé d'attendre le rapport des experts.

Dans la balance du pour et du contre, le coût a évidemment été également pris en compte.

On s'est également soucié de la possibilité d'effectuer les dépouillements par laser.

Un autre souci était le coût d'un renouvellement de tous les matériels à chaque élection.

Ainsi s'est dégagé une approche critique, certes, mais constructive : le but n'a jamais été de supprimer le système.

Encore un membre soutient totalement les dires de l'oratrice précédente. Il déplore toutefois la tardivité du présent débat, qui était prévu pour une date précédant les élections. La présidente de la commission en a été empêchée par le président du Sénat. Il déplore également qu'une proposition de loi de Mme Nyssens, ayant trait à cette matière, n'ait jamais été mise à l'ordre du jour, sous le prétexte qu'il fallait regrouper tout ce qui concernait le renouveau politique. Par ailleurs, la fraude est possible via l'intranet. Il voudrait connaître le point de vue du ministre à ce sujet.

Un commissaire pose deux questions :

­ Que pense le ministre de la possibilité d'associer les partis, par l'entremise de témoins qualifiés, à la confection du logiciel et d'également faire désigner par eux les experts lors du contrôle final ?

­ Que pense le ministre du système des tickets dans une urne de secours ?

Un sénateur dit croire au vote électronique, mais il en distingue les limites, qui sont inhérentes à la sous-traitance du système. Il constate que le ministre témoigne d'un sérieux revirement, en déclarant que le système a été conçu par des experts indépendants et ne doit pas être modifié.

Un commissaire rappelle que le ministre a promis d'organiser, lors des prochaines élections, un contrôle par impression du bulletin de vote dans environ 10 % des bureaux.

Une telle impression sera-t-elle organisée par une circulaire ou par la loi ?

Le ministre répond qu'il s'estime satisfait du système de vote automatisé (appelé aussi vote électronique) puisqu'il peut en constater la fiabilité sur le terrain.

Assez paradoxalement, l'incident du canton de Furnes en a apporté la preuve. Effectivement, c'était l'impression qui avait, certes, été faite fautivement à l'Intérieur, mais sur laquelle le président du bureau principal avait apposé son visa, qui était finalement visible sur les machines à voter. Les machines ont fait leur travail parfaitement. L'erreur humaine est tout aussi possible en cas de vote électronique qu'en cas de vote sur papier. Cette fois aussi, les bulletins de vote incorrects ont dû être réimprimés.

En ce qui concerne la transmission des données au ministère de l'Intérieur, il y avait un double circuit : les données étaient transmises, d'une part, par téléphone et par fax et, d'autre part, par le système Publilink, auquel CIPAL est affilié. Ensuite, les disquettes ont été remises au serveur central d'IBM.

Publilink est très fermé, mais ne constitue qu'un élément du système. Même en cas de piratage, il y avait encore un double circuit.

Le logiciel propre doit être compatible et comporter les paramètres permettant de visionner le système fermé. C'est pourquoi on a pris le même système qu'auparavant.

Le code source est consultable sur cédérom et sur l'internet et n'a pas été modifié jusqu'aux élections.

En soi, le piratage sur le réseau est actuellement favorisé par des compilateurs C qui sont disponibles dans le commerce.

Toutefois, aboutir à un ensemble opérationnel avec un compilateur fonctionnant au hasard reste une tâche difficile pour les pirates.

En ce qui concerne la délivrance d'un ticket après le vote à chaque électeur et les impressions, on n'a rien changé au système laser de l'urne, mais on envisage de répondre à la préoccupation du Parlement sur ce plan.

Quant à l'application de ces nouveautés, une loi est nécessaire.

S'agissant du coût du vote électronique, il convient de souligner qui celui-ci n'est pas exagéré, puisque les appareils et le logiciel sont toujours les mêmes que lors de l'instauration du système.

L'objectif en matière d'efficacité a été atteint, à savoir une publication plus rapide des résultats du scrutin, même s'il convient de tenir compte en l'espèce d'un accroissement de 30 % de la durée du vote en raison de la possibilité, pour l'électeur individuel, de contrôler le vote exprimé.

Globalement, aucune modification du matériel n'est donc nécessaire.

En ce qui concerne les propos du président du tribunal de Termonde, siégeant en référé, on procédera à une évaluation en fonction des opérations du 8 octobre 2000. Le président a entre-temps estimé que le risque de confusion n'est pas élevé au point d'être déterminant pour un mauvais comportement électoral.

Les colonnes se trouvent clairement à droite du nom. Lors de l'appréciation, on a tenu compte du comportement d'un électeur normalement attentif.

Il est ressorti d'interviews ultérieures que les électeurs tant jeunes qu'âgés étaient motivés et pouvaient bien faire la distinction.

Le ministre se tient à la disposition des parlementaires en vue de réfléchir avec eux à d'autres améliorations.

Ces modifications se feront par la loi pour l'essentiel et par circulaire pour l'exécution pratique. Cela n'empêche pas le législateur de se substituer au ministre s'il le désire.

La transparence a été améliorée et le ministre entend poursuivre cette tendance, sans toutefois en revenir à l'ancien système du vote sur papier.

1.5. Répliques

M. Antoun tient à rappeler la question de fond : est-ce que le système électronique peut valablement remplacer le contrôle populaire ? Tout le reste est subsidaire.

Bien sûr, y a-t-il moyen d'améliorer le système, en introduisant par exemple le ticketing, mais ceci a aussi des inconvénients. Ainsi, comme l'indique la Ligue des droits de l'homme, le ticketing pourrait amener l'électeur, en cas de contestation, à divulguer son vote au président du bureau.

Son principe général est que les électeurs doivent rester maître de leur vote jusqu'au dernier stade, c'est-à-dire le dépouillement. Il faut donc conserver le système papier avec ou sans lecture optique.

Les experts disposent d'un délai de quarante jours avant les élections pour contrôler les opérations. Mais que se passe-t-il avant ? Au moment de leur arrivée, la vraie disquette est déjà faite et envoyée sous scellé au président du bureau.

Lors du débat qui vient de se dérouler, le ministre s'est dit d'accord avec une réflexion. Mais que s'est-il passé lors des réformes successives ? À deux reprises déjà, l'on a débattu de la question dans la précipitation, juste avant les élections.

Le ministre a tout intérêt à relancer le débat maintenant, avant que la question ne soit tranchée par le tribunal, qui a fixé son débat à l'échéance du 11 janvier 2001.

Maître Jansen constate que tout le monde doit admettre que le système, bien que très protégé, est fraudable.

Il est toutefois satisfait des mesures de sécurité portant sur la production du software et du transport matériel par la firme Securitas; seul un gangster pourrait le dérober.

Le problème reste dans la duplication avec des disquettes interchangeables.

M. Van Welde, quant à lui, s'accommode du système électronique, mais à deux conditions :

1) qu'on lance le contrôle par le « ticketing » dans tous les bureaux; il s'agit de la copie individuelle sur papier du vote émis. Le document sera conservé dans une urne pour contrôle de congruence exacte avec le vote électronique;

2) qu'on procède à des contrôles des tickets par échantillons à raison de 3 % des bureaux et, par exemple, 10 bureaux désignés par parti.

Au niveau de la légitimité des votes, l'on connaît dans le monde deux systèmes de contrôle :

­ soit il se fait par une assemblée, comme en Belgique;

­ soit par une cour institutionnelle.

Vu les imperfections du système, et les critiques au vu du Pacte international de New York, il serait peut-être judicieux de confier en Belgique ce contrôle à une cour (par exemple : Conseil d'État, Cour d'arbitrage, Conseil supérieur de la Justice).

2. Audition des membres du Collège des experts, tenue le 24 octobre 2000

2.1. Exposé des experts

M. Van Damme renvoie au rapport du Collège des experts qui a été déposé, conformément à la loi du 11 avril 1999, aurpès du ministre de l'Intérieur et des présidents des Assemblées législatives fédérales.

Dans ses grandes lignes, la conclusion est positive : en effet, l'on n'a pas constaté d'erreurs techniques dans les opérations électorales automatisées, à part l'incident de Furnes.

Il est évident que le collège n'a pas pu passer outre à ce dernier problème; il a conclu qu'il s'agissait d'une erreur purement technique.

M. Willems déplore que le collège a dû travailler avec des effectifs réduits. Seuls six des neuf experts effectifs possibles ont été désignés par les Assemblées législatives. Cela a réduit les possibilités de contrôle des systèmes et du hardware.

Au niveau du ministère de l'Intérieur, la production des disquettes se fait dans un seul local, ce qui limite les possibilités de falsifications.

Le contrôle du vote électronique à proprement parler s'est fait au niveau des deux systèmes, c'est-à-dire le vote automatisé, et le dépouillement automatisé.

En mai, un test a été effectué à Chimay sur le dépouillement optique comme suite à l'incident de Zonnebeke aux élections précédentes.

Le contrôle des votes de préférences a été opéré par un comptage dans un bureau fictif reprenant les données parvenues au bureau à contrôler.

Ce test a été fait pour s'assurer que la transcription se faisait correctement.

Par ailleurs, des contrôles ont été opérés sur la base des urnes rentrées au ministère de l'Intérieur après les votes.

Ces tests ont été concluants : les urnes n'ont pas modifié les données des cartes magnétiques.

S'il y a une sorte de contrôle à souhaiter, c'est bien la visualisation du vote avant la confirmation par l'électeur, de sorte qu'il puisse encore se raviser avant de conclure son vote.

M. Van Damme précise les éléments rassemblés par les experts concernant l'incident de Furnes.

Tout a commencé quand on a constaté sur les écrans qu'il manquait une liste entière, à savoir celle du Vlaams Blok, pour l'élection du conseil provincial.

Le Collège des experts a suivi les principes fixés à l'article 17 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé.

Cet article prévoit :

­ que le président du bureau principal de district transmet les listes de candidats au fonctionnaire désigné par le ministre de l'Intérieur;

­ que ce fonctionnaire introduit ces listes dans le système et fournit l'impression faite à partir des écrans de visualisation au président du bureau principal de district, qui les valide, par analogie avec ce que l'on fait traditionnellement pour les épreuves des bulletins de vote;

­ que le fonctionnaire commence à confectionner les disquettes dès qu'elles ont été validées par le président du bureau principal de district.

Dans le cas de Furnes, il a été dérogé à ces principes : le président du bureau principal de district n'a pas fourni les listes au fonctionnaire désigné. L'on a toutefois fourni à tort au ministère une liste provisoire, qui contenait encore la liste du Vlaams Blok. Cette liste provisoire, qui circulait dans le cadre d'une autre procédure, mentionnait donc le Vlaams Blok.

Le responsable communal, pour sa part, (et non le président du bureau principal de district) a finalement transmis les listes définitives au ministère par la poste. Ces listes ont été jointes, au ministère, aux autres listes de Flandre occidentale et sont restées un certain temps sans surveillance sur la table destinée au fonctionnaire désigné par le ministre. Le fonctionnaire désigné affirme qu'il a introduit les données sur la base de ces documents et que la liste du Vlaams Blok n'y figurait pas. Par la suite, ces listes ont été introduites et imprimées, et renvoyées au président du bureau de canton au lieu du président du bureau principal de district, avec les originaux. Ce président, bien qu'incompétent, a signé les listes définitives contenant une erreur.

En réalité, la loi a prévu qu'il fallait la signature du président du bureau principal de district, parce qu'il est le seul à posséder les actes de présentation originaux.

Une fois cette validation erronée obtenue, l'on a commencé à confectionner les disquettes.

Les machines à voter ont reproduit parfaitement ces données, qui ne contenaient donc pas la liste du Vlaams Blok.

L'erreur est donc due à un concours de deux erreurs humaines :

1) le président du bureau principal de district a fourni les mauvaises listes au fonctionnaire désigné par le ministre;

2) le fonctionnaire désigné a accepté la validation des impressions à partir des écrans par le président du bureau de canton, qui n'était pas compétent.

La cause sous-jacente de ces erreurs est que des listes officieuses circulent manifestement, qui ont uniquement pour but de documenter les services avant le spectacle médiatique de la nuit des élections. C'est ce qui a favorisé la confusion entre les deux procédures.

Bien que la loi soit claire, il y a eu confusion, ce qui montre la nécessité de classification par la voie de directives.

L'incident montre par ailleurs que le système du vote automatisé n'est à mettre en cause sur aucun point.

Les recommandations qui ont été formulées globalement peuvent être classées en quatre catégories :

1) celles qui concernent les systèmes existants;

2) celles qui concernent l'organisation et les procédures;

3) celles qui concernent la désignation des experts par les assemblées;

4) celles qui concernent la possible introduction de la nouvelle génération de systèmes de vote.

Pour davantage de détails, l'on se référera au rapport nº 2-7/2, pp. 56-67.

Discussion

Un membre félicite les experts de leur rapport. Il trouve par ailleurs que les recommandations sont adressées principalement au gouvernement, qui devra se pencher sur ces suggestions à bref délai.

Le ministre déclare qu'il communiquera ses conclusions dès qu'il aura terminé l'étude du rapport des experts.

Une membre estime que cela devrait pouvoir se faire dans la quinzaine.

M. Willems estime que le système lui a semblé être globalement sûr. Cela n'empêche que, lorsqu'il y a mieux comme système ou comme machines, il ne faut pas s'en priver. Il s'agit surtout d'améliorer le contrôle par des tiers, c'est-à-dire les citoyens.

Un autre membre insiste pour que le ministre réagisse rapidement. C'est d'ailleurs nécessaire pour prévenir le chevauchement de deux systèmes à l'avenir, car on continue de voter de deux façons, électroniquement et sur papier. Il va de soi que l'aspect budgétaire n'est pas négligeable en l'espèce.

Le ministre doit également décider s'il laissera coexister deux systèmes partiels, à savoir la lecture optique des bulletins de vote et le vote purement électronique.

Il conviendrait en tout cas de prendre la convivialité comme fil conducteur. On pourrait ainsi envisager de colorier les cercles en rouge, comme lors du vote classique, ou encore de faire figurer les logos des partis en couleurs sur les bulletins électoraux, voire les photos des candidats.

Encore un membre insiste sur un débat au sujet de la lecture optique. Celui-ci n'a pas encore eu lieu.

Le système de la visualisation du vote n'a pas été un franc succès. Les électeurs ne l'ont pas utilisé massivement. Ceci est dû surtout au fait que lors de la visualisation, l'on ne pouvait de toute façon plus revenir sur son vote.

Les conclusions des experts sont utiles, surtout dans la mesure où elles prônent plus de transparence. Ceci est en effet nécessaire pour créer la confiance au système.

Le matériel peut être considéré comme dépassé. Les petits écrans ne permettent pas assez de visibilité des textes, surtout dans les grandes villes. Les dimensions sont trop réduites, vu le grand nombre de sièges à pourvoir.

La séparation entre colonnes doit être accentuée pour éviter la confusion entre listes.

À tous ces égards, il eût été préférable de réaliser des campagnes d'information dans les TV régionales et nationales.

À propos de l'incident de Furnes, le ministre renvoie aux instructions données concernant la préparation des listes électorales sur le plan informatique. Le point 130 de ces instructions (Moniteur belge du 27 juillet 2000, p. 25691 et suivantes) prévoit une procédure en trois parties. Le président du bureau principal de district y est clairement désigné comme responsable final de la présentation.

C'est la magistrature qui décide du contenu. Le fonctionnaire peut uniquement se charger du traitement des données dans le système automatique.

Le mode de visualisation avait déjà été annoncé au printemps. Lors de sa réalisation, on a bien entendu tenu compte du coût.

Un des intervenants dit que le coût budgétaire ne peut pas être un argument. Une campagne d'éducation civique ne coûte pas si cher. Un budget de cinq millions de francs devrait pouvoir suffire et n'est pas prohibitif.

Il faudrait un plan médiatique pour toucher les personnes non familiarisées.

Un sénateur estime qu'il se pose un problème de publicité de l'administration au ministère de l'Intérieur.

Une campagne publicitaire de cinq millions est une chose. Donner aux citoyens une éducation civique sur un élément aussi fondamental que les élections en est une autre.

C'est ainsi que de nombreux électeurs ne connaissent par exemple pas les règles du panachage.

À cet égard, l'intervenant est partisan d'un système de guichet électronique qui serait l'unique point de collecte des informations.

Le rapport des experts est tout à fait valable et réaliste, mais il traite les problèmes à court terme. L'intervenant apprécie la progression par étapes des propositions.

Une vision à long terme devrait toutefois aussi être développée, indépendamment du rapport des experts. Il y a par exemple la perspective du vote en ligne, qui résoudrait, entre autres, le problème des Belges à l'étranger.

Dans un autre domaine, il aurait aimé connaître la réaction des experts à la proposition de M. Van Welden, qui proposait un ticket reproduisant le vote au lieu de la visualisation du vote sur l'écran. Cela pourrait-il être utilisé pour un recomptage ?

Qu'en est-il des votes blancs et nuls ?

Il y a aussi la remarque relative aux pirates, qui pourraient s'introduire dans le réseau CIPAL.

Un membre se dit d'accord avec l'orateur précédent, là où il prétend que cinq millions de francs doivent suffire pour lancer une campagne sur la technique de vote.

Bien sûr, il y aura toujours des gens qui voteront de façon irréaliste.

Une membre se préoccupe de savoir :

1) si l'on contrôle les cartes magnétiques à l'arrivée au bureau de vote : sont-elles bien vierges;

2) si les experts ont eu écho de gens qui ne s'en sortent pas dans l'isoloir.

M. De Boelpaep souhaite réagir à la remarque qui a été faite au sujet de la présentation des listes à l'écran. Il va de soi que tout dépend du type d'écran utilisé. Les écrans qui sont utilisés aujourd'hui encore appartiennent à une génération qui date des années 90. Le prix d'achat de ces écrans représenta un coût d'investissement et, comme il fallait amortir celui-ci, il y avait lieu de prévoir une période d'amortissement.

La technologie actuelle permet d'intégrer des fonctions d'aide, y compris des fonctions de zoom pour les malvoyants.

Pour ce qui est du « ticketing », le rapport précédent avait mentionné cette forme de contrôle. Aujourd'hui, on peut faire un nouveau décompte des votes par le biais du système de visualisation.

Il n'est plus possible en fait d'émettre des votes nuls, à moins d'endommager la carte.

Les votes blancs sont encore possibles et ils représentent de 3 à 4 % de l'ensemble des suffrages dans les deux systèmes. Leur impact est donc négligeable, du moins selon une étude de la VUB à ce sujet.

Le réseau CIPAL n'existe pas. Il s'agit en fait du réseau Publilink-Dexia que CIPAL utilise pour transmettre les résultats. Cela n'a rien à voir avec le vote électronique. Les données sont également envoyées en parallèle, par disquette, au ministère de l'Intérieur. Officiellement, seul le PV imprimé dans le bureau de dépouillement a force probante.

M. Van Damme souligne que la technique de lecture optique des bulletins de vote est devenue une technique fiable.

Pour une bonne compréhension des choses, il faut rappeler qu'initialement, l'on voulait introduire le vote électronique en vue de réduire le personnel nécessaire dans les bureaux de dépouillement, parce qu'on avait du mal à le réunir.

La lecture optique ne résout pas le problème. En effet, il faut toujours beaucoup de personnel dans les bureaux de dépouillement, même si la lecture optique permet de le réduire. Il y a lieu de noter que la lecture optique requiert une sélection manuelle des bulletins nuls ou douteux, et ce, malgré les améliorations significatives que Fabricom a apportées aux techniques utilisées.

Tout dépend donc de l'objectif que l'on se fixe.

Si on souhaite rendre les choses visualisables sur papier, on doit choisir la lecture optique. Si l'on veut réduire le personnel nécessaire, on doit choisir le vote électronique. Le vote électronique a l'avantage supplémentaire d'être tout à fait égalitaire : les appréciations subjectives sont totalement exclues. On ne peut plus émettre de vote nul. On n'a plus que la faculté de voter blanc, du moins si la possibilité de le faire est prévue. Si elle ne l'est pas, on peut encore voter blanc en déposant immédiatement la carte dans l'urne, sans utiliser l'ordinateur de vote.

Le même membre s'interroge à propos du nombre de cartes disponibles. Qu'advient-il en cas de problème avec des cartes non valables ? Des cartes de réserve ont-elles été prévues ?

Par ailleurs, l'introduction du vote électronique donne lieu à de nombreuses demandes d'explications, principalement de personnes âgées, et, dans la plupart des cas, c'est le président du bureau de vote qui donne un coup de main. N'y a-t-il pas de ce fait un risque d'influence sur le vote de l'électeur ?

M. Tomicki explique que l'initialisation des cartes se fait dans le bureau de vote même. Elles sont vierges à l'entrée, et mêmes si elles sont remployées par erreur, les nouvelles inscriptions remplacent les anciennes.

M. Van Damme revient au problème des cartes : il ne risque pas d'y avoir trop peu de cartes. Demander une nouvelle carte n'est possible que si l'ancienne est endommagée.

Un sénateur revient sur le problème des écrans. Comme la technique du vote électronique impose à l'électeur des choix successifs, celui-ci n'a plus aucune vue d'emsemble. Elle crée donc de facto une discrimination par rapport aux personnes qui votent de la manière traditionnelle. Il serait peut-être judicieux de prévenir une telle discrimination en employant des logos ou des photos des candidats et ­ pourquoi pas ­ en prévoyant la possibilité de créer un lien avec les sites des partis.

Un membre indique qu'il faudrait aussi adapter la terminologie. Ainsi, le mot « confirmer » ne signifiet-il rien pour ceux qui ne sont pas familiarisés avec les applications informatiques.

D'autre part, il se peut que dans le système de visualisation prôné par Ecolo, l'imprimante tombe en panne. Le mieux est donc de conserver les deux systèmes en même temps : le contrôle par visualisation et par imprimante.

M. Willems trouve que l'on pourrait aussi laisser au président du bureau de vote le choix entre les deux systèmes.

M. Van Damme estime que, pour prévenir la fraude, on pourrait laisser aux communes le soin de choisir le logiciel.

Une membre constate que les experts suggèrent un recomptage en cas de doute; ainsi, toutes les cartes magnétiques seraient visualisées.

À son avis, ceci n'est que le contrôle de la pointe de l'iceberg. Elle redoute des fraudes dans le système même, lors de sa conception.

La lecture optique lui paraît plus fiable. Le PS y serait éventuellement favorable, si la facture n'est pas trop chère. Pour l'instant, le système coûte 35 francs par électeur.

Des aberrations sont déjà apparues lors de ces élections communales. Ainsi a-t-on constaté à Jurbise que chaque liste avait le même nombre de voix en case de tête. Cela est tout de même très suspect.

Afin de parer à de telles aberrations, les partis devraient pouvoir désigner leurs propres experts. Les partis devraient se doter d'une telle structure.

M. Van Damme souligne que la carte magnétique contient uniquement un vote.

Pour ce qui est du logiciel de totalisation, les experts ont seulement pu analyser le code d'accès et ils ne peuvent pas donner de garantie à 100 % à ce sujet.

Le problème est que l'ensemble du système est entre les mains d'un groupe restreint de personnes. Il plaide donc aussi en faveur d'un système de témoins des partis.

M. Willems comprend l'embarras des Bruxellois qui ne savent plus visualiser même une liste complète d'un seul parti, qui occuperait l'équivalent de deux pages A4.

Il est techniquement impossible de résoudre ce problème par de plus grands écrans. Le coût du remplacement des écrans serait d'ailleurs, à lui seul, exorbitant.

La même membre a encore relevé un autre problème. Lorsqu'une panne survient, les techniciens d'une firme privée interviennent et interrompent le système. Les présidents de bureau devraient disposer des instructions nécessaires à cet égard, surtout à l'occasion de la remise en marche.

M. Hick doute de l'existence de possibilités de fraude. Il y a un coffre-fort où le software de source est conservé. Il faut déjà être muni des mots de passe.

Les sources sont vérifiées par les experts avant la mise en place.

La fraude devrait donc se mettre en place avant l'arrêt des listes.

L'installation de boucles qui faussent les additions est également difficile à mettre en oeuvre, parce qu'il faut impliquer toute la filière.

M. Van Damme indique que, même dans ce cas-là, ces interventions laissent des traces, que l'on sait retrouver.

La même membre s'imagine que le concepteur du système saurait le faire.

M. De Boelpaep confirme qu'on ne peut plus rien modifier pendant le comptage. Par conséquent, l'erreur doit s'être glissée dans le programme avant le comptage. Une erreur de logique dans le programme est toujours possible. Il y en a déjà eu aux États-Unis et l'on a dû revoter.

Il est possible de recompter, mais c'est très long. Il y avait trois bureaux de vote par bureau de dépouillement jadis, alors que maintenant, il y a en dix. Cela signifie 10 × 800 voix. Il faut donc des raisons valables.

Une procédure menant à l'invalidation a d'ailleurs été prévue en raison de cela.

3. Audition du 9 janvier 2001 de M. L. Vanneste et de M. Capron, respectivement directeur général de la législation et des institutions nationales et conseiller au ministère de l'Intérieur

3.1. Exposé

M. Vanneste parle en termes fort positifs du déroulement des élections du 8 octobre 2000. D'une manière générale, les opérations se sont pratiquement toutes bien déroulées, en ce sens qu'il n'y a eu que quelques incidents mineurs comme celui de Rochefort, où l'on a distribué des bulletins inappropriés et celui de Furnes, où l'on a omis de mentionner la liste du Vlaams Blok sur les listes pour les élections provinciales.

Il y a également eu un incident à Jurbise, mais il en reparlera en détail.

Les opérations ultérieures se sont également bien déroulées.

C'est ainsi que la collecte des résultats dans la nuit des médias a été un succès. Grâce à cela, on a pu faire des prévisions très fiables, toutes les heures pour commencer, et toutes les demi-heures ensuite.

Pour l'administration, la prochaine échéance est fixée à 2003. La question cruciale qui se pose est de savoir s'il y a lieu de remplacer les machines de vote, dont certaines ont déjà vingt ans.

Parmi les solutions possibles, il y a en une qu'il ne veut pas exclure, celui de l'abandon pur et simple du vote automatisé.

Quoi qu'il en soit, la décision doit être prise à temps, car, si l'on décide de conserver le vote électronique, on devra organiser des marchés publics, soit en vue de mettre à jour les machines existantes, soit en vue de lancer un nouveau système.

Il songe en premier lieu, à cet égard, à la lecture optique. Après l'incident de Zonnebeke, qui s'est produit lors des dernières élections du 13 juin 1999, le système a été adapté et on peut affirmer qu'il est maintenant au point.

Si on souhaite généraliser ce système, il faudra tirer de tout cela les conclusions qui s'imposent.

L'on doit en tout cas savoir que le service électoral du ministère a pu se familiariser avec la technologie informatique grâce à la relation privilégiée qu'il entretient avec le Registre national. Or, la lecture optique est une technique très différente qui requiert une formation spécifique.

Dans l'hypothèse en question, on devra, en outre, introduire le système par étapes.

Cette application dépend aussi de la taille de la liste. À l'heure actuelle, la limite technique est fixée à vingt listes et trente-cinq candidats par liste.

De toute façon, un projet de texte est prêt pour prolonger la période d'essai au cas où le Parlement le souhaiterait.

Par la suite, il faudra adopter une loi définitive avec un système de financement adéquat, ce qui suppose également une marge budgétaire.

En ce qui concerne l'incident de Furnes, il souhaite émettre une critique à l'encontre des conclusions des experts. Certes, les instructions mêmes qui ont été données aux intéressés étaient critiquables. Mais il trouve dommage que les experts n'aient pas réagi plus tôt. En effet, les instructions en projet leur ont été soumises le 20 décembre 1999. Les présidents des bureaux de totalisation principaux de quelques grandes villes ont reçu également ces instructions en projet le 8 décembre 1999 et ils n'ont pas fait d'observations non plus.

À l'analyse, la confusion n'est pas venue tant de la qualité déficiente des instructions, que de la lecture erronée qu'en ont faite certains destinataires.

Ces instructions sont en effet subdivisées en différents chapitres, suivant qu'elles sont destinées aux présidents des bureaux de vote, des bureaux de dépouillement ou des bureaux de totalisation. Certains présidents ont suivi des instructions qui ne leur étaient pas destinées.

Afin d'éviter à l'avenir toute confusion au sujet des listes, les responsables provinciaux du ministère de l'Intérieur ont reçu pour instruction d'aller désormais chercher les listes en personne auprès des présidents avant qu'elles ne soient imprimées ou enregistrées dans le système et de les rapporter ensuite, en épreuve ou sous forme imprimée, à la même personne.

M. Capron pense qu'en outre, il faudra diviser les instructions, pour en faire des fascicules séparés, de sorte qu'on ne puisse plus confondre les différentes catégories de présidents auxquels elles sont destinées.

3.2. Discussion

Un membre demande si le ministère a effectué des sondages sur le vote électronique auprès des différents présidents des bureaux de vote.

Elle voudrait savoir en outre ce qu'a apporté la faculté offerte aux électeurs de confirmer leur vote (nouveauté de la loi du 12 août 2000).

Par comparaison à ce qui s'est passé aux États-Unis, elle voudrait savoir de quel matériau le ministère dispose en cas de contestation sérieuse d'une élection. Aux États-Unis, il y avait toujours un document papier.

Une autre membre demande si on a tenté de savoir ce que les électeurs pensent du vote électronique, en faisant par exemple un sondage à la sortie des urnes.

Elle désire également savoir si les orateurs ont ressenti la nécessité d'installer un système de ticketing qui permettrait aux électeurs d'imprimer leur vote.

A-t-on la garantie qu'en 2003, toutes les communes du pays pourront voter de la même manière et a-t-on prévu un budget suffisant pour cela ?

A-t-on arrêté un calendrier pour les élections de 2003 ? L'intervenante estime qu'un tel calendrier serait utile, d'autant plus qu'elle a l'impression que certaines communes bloquent l'introduction du vote électronique aussi longtemps qu'elles le peuvent.

Encore un autre membre se demande si on envisage de mettre sur pied une campagne de formation pour les présidents de bureaux de vote. Ceci s'impose, selon lui, à en croire les plaintes formulées par certains de ces présidents à ce sujet lors des élections du 8 octobre 2000.

Au niveau des systèmes de vote, il penche personnellement vers la lecture optique, puisqu'il s'apparente le plus au système manuel en matière de possibilité de contrôle. Il apprend que les vérifications sur les causes des failles ont été opérées et que le système est au point. Rien ne doit plus empêcher sa mise en oeuvre.

Il suggère de laisser aux régions, aux provinces et aux communes le choix du système à appliquer afin de répondre le mieux aux susceptibilités locales.

Il rappelle que beaucoup de personnes se sont trouvées handicapées le 8 octobre 2000 face au vote électronique, et ont parfois mal voté à cause de ce système.

En ce qui concerne l'échéance des élections de 2003, il est encore trop tôt de prévoir un système définitif, des recours contre le système même étant encore en cours devant différentes instances judiciaires.

Un membre se réfère, quant à lui, au problème des recours, qui risquent d'empêcher l'introduction de certains systèmes, ce qui provoquerait une perte des investissements.

Mais même si l'on conserve le vote automatisé, l'intervalle entre différentes élections est tellement longue que les machines doivent toujours avoir un « upgrading », ce qui provoque un coût exorbitant. Rien qu'à cause de ce coût, il y a lieu d'envisager l'alternative du vote sur papier.

Une membre informe la commission du dépôt d'une proposition de loi du PS qui prévoit un moratoire sur le vote électronique. Sans critiquer l'administration des élections, ­ puisqu'elle ne fait qu'exécuter la loi ­ elle voudrait tout de même en savoir plus sur les incidents de Jurbise, qui ont laissé planer un doute de la fiabilité du système.

Si le critère temps est le seul déterminant pour l'option électronique, pourquoi alors ne pas préférer le système de lecteur optique, ce qui empêcherait des conflits comme ceux de Jurbise d'avoir lieu.

Que penser de la possibilité d'effraction du système par des tiers ?

M. Vanneste réplique au sujet de l'incident de Jurbise en se référant à la décision de validation que la députation permanente de la province du Hainaut a rendue comme suite à une plainte contre le résultat de l'élection. La suspicion des plaignants avait été éveillée par le fait que sur quatre listes, trois avaient le même nombre de votes en case de tête.

De fait, deux problèmes se superposaient : il y avait, d'une part, la coïncidence du même nombre de votes en case de tête, et, d'autre part, celui de la disquette « baladeuse ».

Pour bien comprendre la démarche suivie par la députation permanente pour aboutir à la validation, il faut savoir qu'elle a profité de l'existence d'une disquette « baladeuse » pour conforter sa thèse.

Il se fait qu'en cas de refus de totalisation par la machine, le président du bureau principal va récupérer dans le canton la disquette back-up.

Ce qui se passe le plus souvent en réalité, c'est qu'un employé communal va recueillir cette disquette, et en prend en fait une copie. C'est la fameuse disquette « baladeuse ».

La députation permanente a profité de cette circonstance pour confronter la totalisation des vraies disquettes à la totalisation des disquettes « baladeuses ». Il se fait que le total fut le même, de sorte qu'il ne restait plus qu'à considérer l'élection comme validée.

Les plaignants ont formé ensuite un recours devant le Conseil d'État, qui est toujours pendant.

Le ministre de l'Intérieur est devenu partie intervenante pour suivre de près les développements de cette affaire qui doivent le renseigner sur les mesures à prendre à l'avenir.

Il y a, à son sens, différentes manières pour recompter les voix :

­ soit l'on redépose les cartes sorties de l'urne scellée une à une dans la même urne électronique, en reconstituant un bureau fictif;

­ soit on visualise les votes carte par carte en prenant soin de les recopier à la main sur des bulletins de vote sur papier et on vérifie avec la machine.

Il est donc clair qu'on peut recompter via la visualisation. Ceci est un effet indirect de la possibilité de confirmation du vote insérée par la loi du 12 août 2000.

M. Capron esquisse ensuite la démarche qu'il a entreprise en tant qu'expert désigné par la députation permanente du Hainaut dans le recours contre les élections de Jurbise.

La députation permanente a consacré beaucoup de temps à l'affaire, en allant jusqu'à organiser deux séances techniques pour le débat sur l'expertise.

Pour le premier problème, c'est-à-dire celui de la disquette « baladeuse », c'est-à-dire celle que l'employé communal a copiée au bureau principal du canton, l'on l'a comparé aux deux disquettes originales de Lens, telles qu'elles apparaissaient dans le procès-verbal du bureau de vote. La comparaison a démontré qu'elles étaient toutes concordantes.

Quant au deuxième problème, c'est-à-dire celui du nombre équivalent des votes en tête de liste, la députation permanente a fait appel à un autre expert qui devait être capable de briser les clés de sécurité des programmes. Elle a choisi pour cela un informaticien du constructeur des appareils.

Par ce biais-là, il a été possible de faire un décompte par bureau, via une mémoire intermédiaire à ce niveau-là, qui n'est normalement pas accessible.

Ceci a permis de détecter qu'il n'y avait aucune logique vicieuse dans la totalisation, et qu'il s'agissait vraiment d'une coïncidence. Dans les différents bureaux en effet, les nombres de votes en tête de liste étaient tout à fait disparates.

Un membre constate qu'il y a donc des décomptes par bureau de vote. Y en a-t-il aussi par quartier ?

M. Vanneste déclare que cela n'existe pas.

Une autre membre constate qu'il a fallu un expert pour briser les codes. Cela signifie qu'un autre expert de la firme a dû prévoir cette mémoire intermédiaire.

De cette façon, l'on pourrait identifier, par exemple à Anvers, les parties de la ville qui ont voté pour tel ou tel parti, ce qui est inexcusable.

Encore une membre se demande si un système d'élections peut encore être considéré comme adéquat si son contrôle dépend uniquement de la foi obligée que le citoyen doit avoir dans les experts informatiques. Ce contrôle est devenu tellement compliqué qu'il en perd presque son caractère démocratique, puisque les citoyens ne savent plus l'exercer, comme c'était pourtant le cas pour toutes les élections non-électroniques.

M. Vanneste prétend que ce contrôle classique subsiste à son avis, mais sous une autre forme. Les urnes étant scellées, rien n'empêche en effet en brisant les scellés, de prendre les cartes une à une et de les visualiser, ce qui équivaut à un recomptage classique.

Comme cette technicité complique le contrôle, il voudrait savoir lui-même ce qu'en pense le Conseil d'État au niveau du caractère démocratique que doit revêtir ce contrôle. Le recours contre la décision de la députation permanente au sujet des élections de Jurbise lui en offre la possibilité, et c'est une des raisons pour lesquelles il a conseillé au ministre d'intervenir volontairement dans la procédure.

Globalement, M. Vanneste estime que l'avantage du maintien du vote électronique est toujours inspiré par les motifs qui ont incité les gouernements précédents à l'introduire et à l'étendre :

1. Lors du vote non-automatisé, on avait besoin de 50 000 à 60 000 personnes pour l'organiser. Depuis l'introduction du vote électronique, 2 000 personnes suffisent.

2. Les bulletins à Bruxelles-Hal-Vilvorde devenaient peu maniables : ils avaient des dimensions de 80 cm × 1 m. Avec le vote automatisé, il y a une plus-value ergonomique.

3. Tout compte fait, le nombre de recours est peu important par rapport au vote manuel. Il y en a eu huit lors des dernières élections, dont six étaient inspirés principalement par des motivations politiques et non techniques. Il se félicite de ce nombre peu élevé de contestations.

Les principales critiques sont du même ordre dans les deux systèmes : il s'agit surtout de contestations au niveau des votes valables.

Pour le vote automatisé, il s'agit de déterminer le nombre de cartes valables, aussi bien celles qui ont été utilisées, que celles qui ne l'ont pas été. Il s'agit d'un problème de pointage et non pas tellement de technique.

Pour ce qui est des coûts des investissements en matériel et en logiciel électroniques, il faut différencier entre les grandes villes et les autres. Si dans les petites communes, le matériel peut encore servir à d'autres services entre deux élections, ce n'est pas le cas dans les grandes villes où les services sont équipés de leurs propres pc, et où l'apport des pc des élections ne procure aucun avantage. Ces derniers sont alors stockés dans l'attente des prochaines élections.

Le matériel fourni avec les subsides de l'État est, quant à lui, satisfaisant en termes de qualité et d'upgrading. Lors des élections récentes, seuls 1 à 1,5 % de pannes ont été notées.

Quand on sait que même les nouveaux pc présentent la même proportion de pannes, on peut considérer que la maintenance des pc des élections est un succès.

En termes financiers, il est évident qu'aussi bien les investissements que la maintenance coûtent de l'argent. Il ne dispose pas pour l'instant du prix exact, mais il y a moyen d'en faire le compte.

La formation des présidents du bureau dépend du responsable cantonal. Ses moyens sont limités, puisqu'il n'a pas d'adjoints.

La seule solution serait de faire appel au privé (soit une firme de formation ou le fournisseur du matériel ou du logiciel). Mais le prix en serait élevé.

Le problème des formats empêche un dépouillement par lecture optique dans les grandes villes. Les seules listes entrant en ligne de compte sont celles qui ne dépassent pas deux fois le format A4. Si le papier est plus long, c'est techniquement impraticable.

Les « exit-polls » n'ont pas été réalisés, mais ils dépendent également des possibilités financières. L'on a bien réfléchi à la question en demandant une offre de prix à la VUB (Professeur Deschouwer) et à l'UCL. Aucune offre de prix n'a encore été communiquée.

Le système du ticketing est réalisable, mais demande un investissement supplémentaire de 40 %. Il faut aussi tenir compte des problèmes inhérents à ce système, c'est-à-dire un retard dans les opérations, et des complications au niveau de la coupe des talons.

Ce n'est donc pas impossible, mais ce ne serait certainement pas un progrès, et provoquerait en plus un encombrement organisationnel pur les communes (commander et tester les machines, et les stocker et entretenir ensuite).

Le collège d'experts ne mentionne plus de son côté cette alternative à cause du fait qu'entre-temps la visualisation a été introduite.

Un membre fait remarquer que la visualisation ne veut pas dire que le problème de la vérification matérielle soit résolu pour autant.

M. Vanneste répond qu'il faut faire confiance un minimum à la technique. On peut difficilement soupçonner les machines ou les gens qui les ont conçues d'avoir intégré un modèle trafiqué qui ne respecte pas ce qui figure sur les cartes.

Afin de parfaire le contrôle, il lui semble que l'on pourait institutionnaliser un système d'échantillonnage. Différentes communes seraient ainsi choisies au dernier moment pour faire l'objet d'un contrôle visuel. Ces communes seraient désignées par les assemblées.

Ce genre de mesures peut encore être décidé plus tard. Le choix fondamental du système doit toujours être fait au moins un an avant l'échéance, qui est donc en l'an 2002, et qui concernera 1 400 000 électeurs. Il faut se réaliser que le matériel actuel est assez vétuste, et qu'il doit être, soit remplacé, soit actualisé (par upgrading, qui ne coûte que 1/3 du prix), soit laissé aux choix des communes (par exemple préférence pour la lecture optique).

Une dernière possibilité est évidemment d'abandonner le sytème de vote automatisé.

Toute décision d'étendre le système à d'autres communes devra par ailleurs tenir compte des frais et des investissements supplémentaires.

Les chiffres qui suivent donnent une idée du coût :

­ un bureau de vote nécessite deux appareils;

­ un appareil de lecture optique coûte 300 000 francs;

­ un appareil de vote électronique coûte 350 000 francs.

Outre les biens d'investissement, il y a aussi le coût beaucoup plus important de la formation des personnes qui doivent faire fonctionner le système. Il faut encore y ajouter un coût modique pour l'assistance technique.

Les présidents de bureau de vote ont été interrogés sur leurs expériences à l'occasion des élections de 1999; cette fois-ci, aucun questionnement n'a été opéré.

Leurs réactions sur les élections de 1999 étaient plutôt positives.

Si l'on compare nos expériences à celles de l'État de Floride, on n'a qu'à se féliciter de notre système, surtout au niveau des procédures de contestation. En Belgique, la situation est très limpide : il y a deux instances : la députation permanente et le Conseil d'État. En Floride, la procédure n'était même pas fixée d'avance.

Les urnes sont bien conservées et protégées, après avoir été amenées au bureau principal par le président du bureau de vote ou de son assesseur.

Une autre membre revient sur l'expertise sur l'affaire de Jurbise. Si elle a bien compris, il est possible de découvrir les totaux des bureaux de vote, puisqu'ils sont stockés électroniquement grâce à la programmation. Qui a réussi à y avoir accès ?

M. Vanneste confirme l'existence de mémoires intermédiaires. Pour y avoir accès, la députation permanente du Hainaut a dû faire appel à un informaticien de la firme qui fournit le matériel au ministère de l'Intérieur. Les agents de ce dernier ministère n'ont pas la clé.

En règle générale, et hormis les quelques contestations dont il a été question, l'expérience du vote électronique a été concluante. Au niveau de l'exécutif, il y a actuellement un arrêt (stand still) de l'extension, en attendant une décision du législateur.

Mais il faut se rendre compte qu'en cas de vote d'une loi de généralisation du système de vote automatisé ou de lecture optique, cela n'implique pas que les moyens nécessaires soient d'emblée disponibles. Il faut lancer préalablement des marchés publics, ce qui demande un certain temps. C'est pourquoi il invite le législateur à décider le plus vite possible.

La même membre demande de connaître le coût d'une élection classique, avec des bulletins de vote en papier. S'il faut choisir entre vote électronique et classique, il faut pouvoir comparer les coûts.

Un membre se dit satisfait des explications entendues aujourd'hui. Le fait qu'il soit possible de procéder, apparemment sans risque d'erreur, à un recomptage a posteriori visualisant chaque carte magnétique, est un élément nouveau qui, selon lui, rend le système acceptable. La confiance dans la machine ne peut plus être ébranlée, maintenant qu'il s'avère que cette méthode permet de procéder à un recomptage manuel.

L'intervenant est nettement plus réticent au sujet du système de tickets qui risque en effet de compromettre le secret du scrutin, sauf si les tickets sont déposés dans une urne distincte afin qu'ils ne puissent plus être individualisés.

Un autre membre estime qu'il ne faut pas s'opposer à la modernité. Maintenant qu'il s'avère que l'informatique des constructeurs ou des concepteurs de logiciels ne leur permet pas d'accéder directement au système comme bon leur semble, on peut partir du principe qu'il n'y a aucun risque d'abus.

Encore un membre se permet d'insister sur le dépouillement des votes par un système à lecture optique.

Le résultat en serait que le software du vote automatisé est perdu. Cela n'empêche que le hardware subsiste et peut être réutilisé à d'autres fins.

En somme, le choix est clair : il s'agit de choisir entre la visibilité matérielle des résultats et leur célérité.

M. Vanneste répète que toutes les pistes restent ouvertes. Lui-même a toutefois développé un plan stratégique tenant compte des desiderata des grandes villes, qui ont tout axé sur l'informatique, dans laquelle ils ont beaucoup investi. Le plan sera prêt fin janvier 2001. Bien sûr, l'on pourrait toujours revenir en arrière, mais il faudra compter avec l'opposition de ces villes. En ce qui le concerne, il attend la loi.

Une membre prévient qu'il ne faut pas trop traîner au niveau de la législation, sous peine d'être mis devant le fait accompli comme lors des élections précédentes. Le calendrier et le compte à rebours sont en effet très stricts. Elle insiste donc pour que la commission n'attende pas l'initiative du gouvernement, au risque pour le Sénat de perdre l'initiative.

III. RECOMMANDATIONS

1. Le principe

La commission de l'Intérieur et des Affaires administratives demande au gouvernement d'instaurer un moratoire sur le vote automatisé.

2. Un contrôle démocratique transparent

Les auditions ont montré clairement qu'un système de contrôle transparent et indépendant, conformément au Pacte de New York, est indispensable. Il y va de la crédibilité du système électoral belge et international.

Une solution pourrait consister à remettre à chaque électeur un billet lui indiquant le vote qu'il a émis. L'électeur devrait ensuite déposer ce billet dans une urne de secours. À cet effet, une imprimante devrait être installée dans chaque bureau de vote.

La commission estime qu'il est nécessaire d'exploiter davantage le système de dépouillement par lecture optique. Ce système accélère le dépouillement tout en remédiant aux écueils du vote automatisé.

Il est nécessaire que la loi prévoie un contrôle qui soit effectué sur un échantillon de 3 % des bureaux choisis au hasard et qu'un même contrôle soit en outre effectué dans un nombre limité de bureaux désignés par les partis politiques.

3. Le coût

La commission estime qu'il est essentiel de connaître le coût précis du vote automatisé, du dépouillement par lecture optique et du vote papier. Elle demande au ministre de l'Intérieur de procéder à une telle estimation.

4. Le timing

La commission de l'Intérieur fait remarquer au gouvernement qu'il est important de prendre une décision assez rapidement sur le choix d'un système et ce, vu le rapprochement de la date des prochaines élections et en tenant compte du fait que l'installation d'un système de vote demande un certain temps.

5. Améliorations à apporter aux opérations de vote

Afin de familariser l'électeur avec le vote automatisé, des campagnes d'information doivent être organisées sur les chaînes de télévision tant régionales que nationales.

La terminologie utilisée dans le cadre du vote automatisé doit être adaptée. Le mot « confirmer » ne signifie rien aux yeux des personnes qui n'ont pas l'habitude des ordinateurs; le mot « valider » n'est pas plus clair. Il faut arrêter une terminologie adéquate.


IV. ANNEXES

1. Le cas « Jurbise ».

1.1. Réclamation.

RÉCLAMATION ÉLECTORALE

POUR :

Monsieur Mario Longo, domicilié à 7050 Masnuy-Saint-Jean, chemin de Mons, 37, candidat élu,

Monsieur Christian Vreux, domicilié à 7050 Jurbise, vieux chemin, 8, candidat non élu,

requérants,

ayant pour conseil Me Vincent Letellier, avocat à 1020 Bruxelles, avenue de l'Araucaria, 86,

À monsieur le président, messieurs les députés permanents composant la députation permanente de la province du Hainaut

Les réclamants ont l'honneur, par la présente requête, de solliciter l'annulation des élections communales qui se sont tenues le 8 octobre 2000 à Jurbise.

La réclamation est dirigée contre la procédure de préparation, d'organisation et de dépouillement des opérations de vote automatisé dans ladite commune.

I. Le vote à Jurbise : principes et incidents

Les élections communales du 8 octobre 2000 se sont déroulées, à Jurbise, selon la procédure de vote automatisé organisée par la loi du 11 avril 1994 (1) et dont les principes sont rappelés ci-après.

Il paraît utile de rappeler la procédure de vote automatisé (A) avant d'envisager les divers incidents qui ont émaillé le déroulement des opérations de vote (B).

A. Règles applicables au vote automatisé

A.1. Matériel utilisé

Un système de vote automatisé comprend, par bureau de vote (2) :

1º une urne électronique;

2º une ou plusieurs machines à voter équipées chacune d'un écran de visualisation, d'un lecteur-enregistreur de cartes magnétiques et d'un crayon otique.

Chaque bureau principal dispose d'un ou de plusieurs systèmes électroniques de totalisation des votes émis dans les bureaux de vote.

Les systèmes de vote et de comptabilisation sont la propriété de la commune. Ce matériel peut être utilisé par la commune, à d'autres fins, à condition de le rendre disponible et en ordre de fonctionnement pour l'élection, trois jours au moins avant la date de celle-ci (3).

En d'autres termes, la commune fournit ses ordinateurs, équipés d'un crayon optique aux différents bureaux électoraux.

Les logiciels électoraux, les codes de sécurité, les cartes magnétiques individuelles et les supports de mémoire (disquettes) sont fournis par le ministre de l'Intérieur ou son délégué, lors de chaque élection (4).

A.2. Procédure de vote

Avant de se rendre au compartiment-isoloir, l'électeur reçoit du président du bureau ou de l'assesseur désigné, une carte magnétique que le président a mis préalablement en état de fonctionnement au moyen de l'urne électronique.

Pour exprimer son vote, l'électeur introduit d'abord la carte magnétique dans la fente prévue à cet effet au lecteur-enregistreur de cartes de la machine à voter.

L'écran de visualisation affiche le numéro d'ordre et le sigle de toutes les listes de candidats.

L'électeur indique, au moyen du crayon optique, la liste de son choix. Il peut également indiquer par un vote blanc qu'il ne désire apporter son vote à aucune des listes présentées.

Après que l'électeur a choisi une liste, l'écran affiche, pour cette liste, les noms et prénoms des candidats.

L'électeur effectue son vote en plaçant le crayon optique dans la case placée en tête de liste ou dans les cases placées en regard d'un ou de plusieurs candidats de la même liste.

Après avoir effectué son choix, l'électeur est invité à le confirmer. Cette confirmation clôt le vote de l'électeur.

Dans le cas où il est procédé à plusieurs élections le même jour, l'électeur est invité, après avoir confirmé son choix pour la première élection, à voter selon la même procédure pour l'élection suivante.

Lorsque l'électeur a voté pour l'ensemble des élections, la carte magnétique est libérée de la machine à voter. L'électeur a alors la possibilité de visualiser les votes qu'il a émis en la réintroduisant dans le lecteur-enregistreur. Ensuite, l'électeur remet la carte au président du bureau ou à l'assesseur désigné, lequel vérifie que la carte ne porte aucune marque, inscription ou dégradation. Si tel est le cas, il invite l'électeur à introduire la carte dans l'urne électronique, où elle demeurera après l'enregistrement sur le support original de mémoire des informations qu'elle porte. La séquence de ces enregistrements est déterminée par une procédure aléatoire.

La carte magnétique est annulée par le président et l'électeur est invité à revoter dans les hypothèses suivantes (5) :

1º si une marque ou une inscription susceptible d'identifier l'électeur a été faite sur la carte (notons d'emblée qu'une telle invitation à revoter n'existe pas lors du vote sur bulletin papier, le président du bureau ne pouvant vérifier l'existence d'un tel marquage. L'invitation du président à revoter constitue en l'espèce une pression sur l'électeur, visant à le contraindre à voter de manière utile);

2º si par suite d'une mauvaise manipulation ou de toute manoeuvre involontaire, l'électeur a détérioré la carte qui lui a été remise;

3º si, pour une raison technique quelconque, l'enregistrement de la carte par l'urne électronique se révèle impossible.

Il est prévu que l'électeur qui éprouve des difficultés à exprimer son vote peut se faire assister par le président ou par un autre membre du bureau désigné par lui, à l'exclusion de témoins ou de toute autre personne (6).

A.3. Clôture des opérations de vote

À l'issue du scrutin, le président du bureau de vote rend l'urne inopérante pour des votes ultérieurs. Les informations enregistrées sur le support original de mémoire sont reproduites sur un autre support de mémoire (une seconde disquette), tenant lieu de copie.

En cas d'élections provinciales et communales simultanées, trois supports de mémoires (disquettes) sont établis, un original et une copie destinée au bureau principal de canton et une copie destinée au bureau principal communal.

La copie destinée au bureau principal de canton constitue également copie pour le bureau principal communal au cas où la lecture de la copie destinée au bureau principal communal susciterait des difficultés.

Chaque disquette est placée dans une enveloppe distincte scellée.

Le procès-verbal du bureau de vote est rédigé séance tenante. Il mentionne par élection le nombre de votes enregistrés, indiqué par l'urne à l'issue du scrutin, le nombre de cartes magnétiques annulées dont celles pour lesquelles le vote a été déclaré nul ainsi que le nombre de cartes non utilisées.

Doivent également être mentionnés au procès-verbal, le cas échéant, les difficultés et incidents survenus au cours des opérations de vote (7).

Les urnes scellées sont remises à un responsable désigné par le collège des bourgmestre et échevins de la commune.

Le procès-verbal et les enveloppes annexées ainsi que les disquettes sont remis sans délai par le président du bureau de vote, contre récépissé, au président du bureau principal de canton, sauf l'enveloppe contenant la copie de la disquette destinée au président du bureau principal communal, lors d'élections communales et provinciales simultanées, laquelle est remise, contre récépissé, au président de ce bureau par le président du bureau de vote ou par un assesseur désigné par lui.

A.4. Opérations de totalisation des votes

Le président du bureau principal de canton ou communal, selon le cas, procède, dès réception des disquettes provenant des bureaux de vote, à l'enregistrement de celles-ci sur un support de mémoire destiné à la totalisation des votes.

Si cette manipulation se révèle impossible, il utilise la copie de la disquette du bureau de vote.

Au cas où l'utilisation de la copie est également impossible, le président du bureau principal requiert de la commune concernée la fourniture de l'urne électronique correspondante; après l'avoir descellée, il procède à un enregistrement complet des cartes magnétiques qu'elle contient.

Lorsque les résultats de tous les bureaux de vote ont été enregistrés, le président du bureau principal procède à l'impression du procès-verbal et du tableau de recensement des votes.

Ces documents sont signés par le président, les autres membres et les témoins du bureau principal. Ils sont placés sous enveloppe scellée et communiqués, en ce qui concerne les élections communales, dans les 24 heures au gouverneur de la province.

L'ensemble des disquettes sont remises au ministère de l'Intérieur qui procède à leur effacement (8).

B. Incidents tels qu'ils apparaissent des procès-verbaux

B.1. À la lecture des procès verbaux des bureaux de vote, il apparaît que :

Bureau nº 7 : des problèmes électroniques ont été signalés par 6 électeurs (annulation et remplacement de carte); le procès-verbal n'est pas clôturé.

Bureau nº 9 : le nombre total de cartes magnétiques n'est pas renseigné.

Bureau nº 11 : un problème de matériel a perturbé la clôture (une machine en panne et une carte bloquée à l'intérieur); la clôture s'est effectuée sur deux disquettes « sauves » et une disquette « de couleur blanche ».

Par ailleurs, il y a eu une manipulation effectuée par un employé communal sur une machine, avec usage d'une disquette d'origine extérieure au bureau, non renseignée au procès-verbal. L'urne a été ouverte et scellée différemment.

Bureau nº 12 : à 10 h 15, un témoin a demandé que deux candidats postés à l'entrée du bureau de vote soient priés de partir. Le président du bureau a refusé.

Bureau nº 13 : le bureau a été fermé à 9 h 30, les 4 cartes de validation ayant été introduites dans l'urne électronique.

Bureau nº 14 : le bureau a été fermé de 11 h 30 à 11 h 45 car il a fallu changer un terminal de vote. Cette opération a été effectuée par un technicien de la firme Philips, d'après le procès-verbal, la machine rejetait certaines cartes.

B.2. Le procès-verbal du bureau de dépouillement mentionne :

« a) La disquette initiale a dû être réimprimée à Lens suite à un problème informatique. Après vérification, elle a inscrit les données chiffrées qui figuraient au support papier.

b) La disquette « copie » a dû être utilisée car l'écran indiquait « urne non clôturée » si utilisation de la disquette initiale ».

Un employé communal ­ les requérants rappellent que la commune est propriétaire des hardware utilisés ­ a quitté seul le bureau principal avec des disquettes. Il se serait rendu à Lens où des manipulations auraient été effectuées. À son retour il a été fait usage de disquettes « de secours » amenées par cet employé. Aucun contrôle n'a pu être exercé par les membres du bureau et les témoins quant aux manipulations effectuées et la provenance des disquettes utilisées.

Par ailleurs, la lecture du procès-verbal du bureau de dépouillement laisse apparaître que le nombre de votes en case de tête (bulletins de liste complets) pour les quatre listes candidates sont les suivants :

ECOLO : 255;

PS : 255;

Liste Bourgmestre : 255;

Nouvelle Commune : 55.

Compte tenu du nombre de votes valables (6 022) exprimés la probabilité que de tels suffrages soient exprimés, même si elle existe, est infime. Des informaticiens interrogés à ce sujet avancent l'hypothèse d'une explication informatique.

Ces chiffres interpellent à tout le moins.

II. GARANTIES CONSACRÉES DANS LE CADRE DES ÉLECTIONS

A. Principes

Des normes internationales relatives aux droits de l'homme contiennent un certain nombre de critères fondamentaux à satisfaire lors de la tenue des élections.

L'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, approuvé par la loi du 15 mai 1981 (9) énonce :

« Tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l'article 2 et sans restrictions déraisonnable :

a) de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis;

b) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs;

c) d'accéder, dans des conditions générales d'égalité, aux fonctions publiques de son pays. »

Cette disposition est directement applicable dans l'ordre juridique interne.

L'article 3 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, approuvé par la loi du 27 novembre 1996 énonce quant à lui :

« Les Hautes Parties contractantes s'engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans des conditions qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple sur le choix du corps législatif. »

L'expression « corps législatif » doit être interprétée en tenant compte des structures établies par les constitutions des États adhérents.

L'article 162 de la Constitution consacre le principe de l'élection directe des conseils communaux. Les articles 41 et 162 attribuent auxdits conseils le pouvoir d'édicter des règles générales et abstraites.

Il faut dès lors considérer que l'article 3 du Premier Protocole additionnel s'applique en matière d'élections communales.

Ainsi, les élections doivent-elles être libres, régulières et honnêtes.

A.1. Élections libres

La Déclaration universelle des droits de l'homme prévoit que toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis (article 21).

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels stipule que, en vertu de leur droit de disposer d'eux-mêmes, les peuples déterminent librement leur statut politique (article premier commun aux deux pactes).

Selon le Centre pour les droits de l'homme des Nations unies, « ce qui détermine en dernier ressort si une élection est libre, c'est la mesure dans laquelle elle facilite la pleine expression de la volonté politique du peuple concerné » (10).

Pour être véritablement libres, les procédures d'élection doivent, notamment, garantir le caractère absolument confidentiel du contenu du vote. Ce caractère absolument confidentiel est consacré par l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui énonce que les élections doivent avoir lieu « au scrutin secret assurant l'expression libre de la volonté des électeurs » et par l'article 3 du Premier Protocole additionnel qui vise des « élections libres au scrutin secret qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple ».

A.2. Élections régulières

Les élections doivent être régulières. Il faut s'assurer, d'une part, du bon accomplissement des formes, des procédures et des opérations qui accompagnent le scrutin et, d'autre part, de la validité des résultats.

Le contrôle de la validité des résultats « va droit au coeur de l'opération politique que représente l'élection » (11).

Un contrôle de régularité tant externe qu'interne de l'élection doit pouvoir être opéré.

Assurer la régularité des élections exige donc un certain nombre de mesures techniques et juridiques destinées à protéger efficacement le processus électoral contre le parti pris, la fraude ou la manipulation et permettre qu'un contrôle puisse être effectivement opéré.

Il s'agit notamment de garantir l'existence de structures administratives objectives et d'assurer la présence d'observateurs indépendants (12).

A.3. Élections honnêtes

La Déclaration universelle des droits de l'homme de même que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques disposent que les élections doivent être « honnêtes ».

L'article 25 du Pacte international énonce ainsi que « tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l'article 2 et sans restrictions déraisonnables (...) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs ».

Les travaux préparatoires du Pacte indiquent que cette condition comprend deux aspects principaux. Le premier a trait à la procédure, le second concerne les résultats (13).

B. Conséquences de ces principes

L'effectivité des principes garantis par l'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques implique que des garanties juridiques soient établies pour préserver l'objectivité, l'impartialité, l'indépendance et l'efficacité de l'administration électorale (14).

En outre, le processus électoral doit être mené en toute transparence.

Les dispositions légales organisant les opérations de vote doivent empêcher les pratiques frauduleuses, garantir la liberté de vote, assurer le respect du secret du vote et permettre qu'un contrôle tant externe qu'interne de la régularité des opérations puisse être effectué.

À cet égard, les Nations unies imposent le respect des exigences minimales suivantes (15) :

(i) la forme des bulletins doit tenir compte de la diversité des niveaux d'instruction dans le pays;

(ii) les procédures concernant le compte des voix, la vérification, la communication des résultats et la conservation des documents officiels doivent être sûres et équitables; des dispositions législatives doivent régir la présence d'observateurs, désignés par les parties intéressées, qui doivent pouvoir officiellement assister à l'ensemble des opérations électorales en ce compris le dépouillement des votes;

(iii) des procédures doivent être prévues pour un nouveau décompte, en cas de contestation des résultats.

Les requérants constatent sub. III qu'aucune de ces exigences n'a été respectée dans le cadre des élections qui se sont tenues à Jurbise selon la procédure de vote automatisé.

III. Élections communales de Jurbise ­ Griefs

A. Application des exigences d'élection libres et honnêtes à la procédure de vote telle qu'elle s'est déroulée à Jurbise

Les dispositions normatives commentées sous le titre II sont directement applicables dans l'ordre juridique interne.

Il ne s'agit donc pas pour la juridiction administrative saisie de la présente requête de prendre en considération des réflexions d'ordre politique, pas plus qu'il s'agit de comparer les mérites respectifs du système « papier » et du système, automatisé.

Il s'agit d'examiner si les élections, telles qu'elles se sont tenues à Jurbise le 8 octobre 2000 ont violé les droits consacrés par ces dispositions.

(i) la forme des bulletins doit tenir compte de la diversité des niveaux d'instruction dans le pays

Pour être libres et honnêtes, les élections doivent être organisées en utilisant un support de vote qui tient compte des différents niveaux d'instruction des citoyens appelés à s'exprimer.

À Jurbise, en exécution de la loi du 11 avril 1994, les bulletins de vote ont été remplacés par une carte magnétique, un écran de visualisation et un crayon optique.

Dans l'état actuel du degré de pénétration de l'informatique dans les ménages, il convient de constater que tous les citoyens ne sont pas familiarisés avec l'informatique. De nombreux électeurs ont été, pour la première fois de leur vie, confrontés à un ordinateur le jour du scrutin qui s'est déroulé le 8 octobre 2000.

Il convient de s'interroger si l'utilisation de l'informatique comme moyen d'expression du suffrage tient compte de la diversité des niveaux d'instruction des électeurs.

Les requérants constatent que le législateur a lui même considéré que bon nombre de citoyens ne sont pas familiarisés à l'usage d'ordinateurs.

Ainsi, on peut lire dans l'exposé des motifs du projet de loi modifiant la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé, projet qui a été promulgué le 12 août 2000, à propos de la visualisation par l'électeur de son vote :

« L'électeur ne peut cependant plus recommencer la procédure de vote parce que cette possibilité n'existe pas non plus en cas de vote au moyen d'un bulletin traditionnel. En outre, offrir une telle possibilité à l'électeur pourrait perturber le bon déroulement des opérations électorales et semer la confusion pour nombre d'électeurs qui ne sont pas familiarisés avec l'informatique (16).

Le législateur constate donc que des problèmes importants seront rencontrés par de nombreux électeurs. Ce faisant, il édicte une norme visant à empêcher que les erreurs qu'il present inévitables, ne puissent être corrigées « pour ne pas perturber le bon fonctionnement des opérations ».

En outre, à Jurbise, il est à remarquer qu'aucune séance d'information, voire de familiarisation avec le système informatique, n'a été organisée pour le scrutin du 8 octobre 2000.

L'organisation du scrutin sur support automatisé ne respecte pas, alors qu'elles sont constatées, les différences de niveau d'instruction ou de familiarisation avec l'informatique.

Par ailleurs, il est indéniable que le comportement électoral de l'électeur non aguerri à la technique informatique peut être modifié face à la machine à voter.

La procédure, de vote est particulière puisque l'électeur doit, avant d'accéder aux listes des candidats, activer le numéro ou le sigle de la liste sur laquelle le candidat préféré se présente. Ceci implique que l'électeur connaisse cette liste, ce qui est loin d'être toujours le cas, particulièrement dans le cadre d'élection de proximité où la personnalité du candidat prime souvent sur la liste sur laquelle il se présente.

En outre, les témoins de la liste composée par les requérants ont pu constater que de très nombreuses personnes ont été contraintes de recourir à l'assistance des membres du bureau de vote pour pouvoir émettre leur suffrage.

Dans le bureau de vote nº 11, ce sont plusieurs dizaines de personnes qui se sont fait assister, non en raison d'un handicap physique nécessitant une assistance, mais en raison de difficultés rencontrées face à la machine, sans que cela ne soit acté au procès-verbal.

Cette assistance, organisée par l'article 9 de la loi du 11 avril 1994, n'est pas exceptionnelle contrairement à l'assistance pour raison de handicap physique. L'assistance « technique » n'est pas liée à une exigence inhérente à l'électeur. Elle est généralisée et imposée par les modalités du vote organisé par le législateur.

Il y a, à une échelle importante, atteinte à la liberté de l'électeur, et en tout cas violation de la confidentialité du vote.

En effet la liberté de vote implique que, dans l'isoloir, l'électeur soit dans une disposition d'esprit telle qu'il puisse, en pleine conscience, déterminer son choix politique en toute indépendance (17).

Le Conseil d'État a eu l'occasion de dire de manière très claire que l'accompagnement d'une personne invalide dans l'isoloir « comporte inévitablement un risque d'influence du vote exprimé parla personne accompagnée et de non-observation du secret de ce vote » (C.E., él. Heverlee, nº 11.153 du 31 mars 1965).

Dans un autre arrêt, après avoir constaté que « l'accompagnement d'un électeur enferm(e) une menace pour la liberté de vote », la haute juridiction administrative dit, toujours à propos de l'assistance aux personnes souffrant d'un handicap, que « la loi entend éviter des abus, non seulement dans le souci de protéger la liberté de vote, mais surtout pour garantir l'expression de la volonté réelle du corps électoral » (C.E., él. Verzeke-Ruddeshove, nº 11.181 du 14 avril 1965).

En organisant un système de vote automatisé tout en sachant que cela allait perturber de nombreux électeurs qui devront recourir à une assistance technique organisée par ailleurs, le législateur a pris des dispositions qu'il savait violer le principe de liberté de vote et mettre à mai les garanties de l'expression réelle du corps électoral.

Dans l'état actuel de la pénétration de l'informatique dans les diverses couches de la population, l'adoption d'un système de vote automatisé est manifestement discriminatoire.

L'importance du nombre de personnes qui ont du recourir à une assistance a eu un effet sur les résultats du scrutin. Il faut en effet constater que le dernier siège se joue à quelques dizaines de voix.

(ii) les procédures concernant le compte des voix, la vérification, la communication des résultats et la conservation des documents officiels doivent être sûres et équitables; des dispositions législatives doivent régir la présence d'observateurs, désignés par les parties intéressées, qui doivent pouvoir officiellement assister à l'ensemble des opérations électorales en ce compris le dépouillement des votes

Le droit à des élections honnêtes implique un contrôle indépendant des opérations de vote et de dépouillement.

En adoptant la législation électorale, le législateur a pris conscience des risques que présentait une intervention trop directe des autorités publiques dans le processus électoral. Il a donc mis en place les bureaux électoraux, chargés de tâches précises dans l'organisation de l'élection.

Ces bureaux électoraux sont les organes du collège électoral.

Le collège électoral constitue l'ensemble des électeurs d'un arrondissement dont les limites géographiques ont été préalablement déterminées. Il s'agit d'une autorité publique tout a fait particulière, qui n'existe que par une sorte de fiction, le jour de l'élection. Cette autorité publique est pourvue d'organes embryonnaires à savoir les bureaux électoraux (18).

Le bureau est investi de tâches organisationnelles, qu'il cumule avec des tâches spécifiques de contrôle. C'est une administration temporaire, constituée pour les besoins d'une élection. Elle doit être autonome. Le bureau est déchargé de tout lien d'allégeance hiérarchique vis-à-vis du ministre de l'Intérieur (19).

L'indépendance des bureaux électoraux est accentuée par le fait que la loi prescrit que les autorités judiciaires soient associées étroitement au processus électoral. La direction du bureau principal est assurée par un magistrat ou un électeur désigné par un magistrat. Les présidents des bureaux de vote sont désignés par le président du bureau principal.

Dans le cadre du système de vote automatisé le bureau de vote et le bureau de dépouillement sont dessaisis de toute possibilité d'effectuer un contrôle effectif de la régularité des opérations.

La loi du 4 avril 1994 organisant le vote automatisé consacre l'existence d'un « collège d'experts » dont les membres peuvent être désignés par la Chambre des représentants, le Sénat, les conseils régionaux et le Conseil de la communauté germanophone (20).

Ces experts contrôlent l'utilisation et le bon fonctionnement de l'ensemble des systèmes de vote et de dépouillement automatisés ainsi que les procédures concernant la confection, la distribution et l'utilisation des appareils, des logiciels et des supports d'information électroniques (21). Ils reçoivent du ministre de l'Intérieur le matériel ainsi que l'ensemble des données, renseignements et informations utiles pour exercer ce contrôle.

Ils peuvent notamment vérifier la fiabilité des logiciels et des machines à voter, la transcription exacte des votes émis sur la carte magnétique, la transcription exacte par l'urne électronique des suffrages exprimés ainsi que leur totalisation et la lecture optique des votes exprimés (22).

Ils remettent leur rapport au ministre de l'Intérieur et aux assemblées législatives fédérales, au plus tard dix jours après la clôture du scrutin communal.

La loi ne prévoit pas l'obligation de désigner ce collège d'experts. Les différentes assemblées législatives fédérales ou fédérées ont la faculté de désigner un ou deux experts, soit neuf au maximum pour l'ensemble du territoire.

Après avoir procédé à une analyse fouillée du système organisé, le président du tribunal de première instance de Bruxelles, siégeant en référé, a constaté que ces experts sont techniquement et humainement dans l'impossibilité de contrôler l'ensemble du système de manière à apporter dans les limites du raisonnable une garantie suffisante que le système soit fiable, n'entraîne pas d'erreurs, et ne sera pas fraudé, soit dans l'enregistrement des votes, soit dans le comptage de ceux-ci (tribunal de Bruxelles, référé, 15 septembre 2000, pièce 1).

En outre, dans la même ordonnance, le président du tribunal de première instance de Bruxelles constate :

« Au niveau des apparences de droit, il ne peut être considéré qu'un tel collège d'experts, élu par les majorités des assemblées, soit une instance indépendante du pouvoir en place.

Le défendeur (l'État belge, représenté par le ministre de l'Intérieur, note de la rédaction) argue que le système a été constamment amélioré par différentes lois et que les observations du collège d'experts qui a rendu son rapport suite aux élections du 13 juin 1999 ont été rencontrées par la loi du 12 août 2000.

Si l'on ne peut contester que le législateur a cherché à améliorer le système, il n'en reste pas moins que l'exigence fondamentale d'une possibilité de contrôle indépendant du pouvoir exécutif sur les opérations de vote et donc sur les logiciels utilisés au moment du vote et du dépouillement, et ce tant au point de vue de la fiabilité nécessaire pour éviter les erreurs, que de la fiabilité nécessaire pour éviter la fraude, n'est prima facie pas rencontrée.

C'est sans pertinence que le défendeur avance que le principe et le mode de désignation des experts ont été jugés conformes à la Constitution par arrêt du 21 juin 2000 par la Cour d'arbitrage. En effet, la Cour d'arbitrage n'a été saisie que du contrôle de conformité de ces dispositions au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, soit l'obligation de non-discrimination, mais nullement du contrôle de conformité de cette loi au regard de l'article 25b du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Il apparaît prima facie, que les droits garantis par l'article 25b du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont incompatibles avec un système où les erreurs et les fraudes ne pourraient être détectées que par le pouvoir en place au moment des élections et non pas par des instances ou personnes indépendantes. »

À Jurbise, le processus électoral a été émaillé de plusieurs incidents (voyez sub A) tant au cours du déroulement des opérations de vote que dans le cadre du dépouillement

Des interventions techniques ont été effectuées par des membres du personnel communal et par un technicien d'une société privée.

Des manipulations ont été effectuées sur des disquettes contenant les votes exprimés qui sont irrégulièrement sorties de certains bureaux à l'intervention d'une personne non habilitée à le faire alors que la procédure légale impose une relecture des cartes magnétiques en cas de problème de lecture d'une disquette issue d'un bureau de vote.

Les élections se sont déroulées en dehors de tout contrôle par un organe indépendant; les bureaux, organes auxquels reviennent en principe les prérogatives de contrôle, étaient privés de toute possibilité de comprendre et de garantir le bon fonctionnement des opérations.

Les membres de ces bureaux ont dû s'en remettre totalement à des employés communaux ou techniciens privés, qui ont pu opérer des manipulations incontrôlées sur le système.

Les élections communales de Jurbise ne se sont pas tenues de manière honnête et il convient partant de les annuler.

(iii) des procédures doivent être prévues pour un nouveau décompte, en cas de contestation des résultats

Le résultat des votes en case de tête pour chacune des listes, dans le contexte tel qu'il apparaît de la lecture des différents procès-verbaux, ainsi que les incidents intervenus au bureau de dépouillement inclinent à penser qu'un recomptage des votes eut été nécessaire.

Ce recomptage n'a pas eu lieu.

Compte tenu des circonstances et dans un souci de transparence et d'honnêteté, il convient de procéder à titre de mesure d'instruction, à la relecture des cartes magnétiques contenant les suffrages exprimés et de procéder ainsi à un nouveau dépouillement.

La transparence est une exigence fondamentale d'une élection libre et honnête.

Seul ce recomptage permettrait de légitimer, à l'égard des requérants mais surtout à l'égard de l'ensemble des électeurs, des résultats qui n'ont pu faire l'objet d'aucun contrôle démocratique.

B. Irrégularités particulières

Les requérants invoquent, outre les griefs invoqués ci-avant, deux irrégularités ayant influencé le résultat des élections.

B.1. Irrégularité de la liste des électeurs

La liste des électeurs, arrêtée au 1er août 2000, comprend 6 448 électeurs (pièce 2).

Interpellé à l'entrée du conseil communal du 17 octobre 2000, le secrétaire communal a indiqué qu'aucun recours n'a été introduit devant le collège, visant à obtenir une inscription sur la liste des électeurs arrêtée au 1er août 2000, voire une modification de celle-ci.

Or, les chiffres officiels du ministère de l'Intérieur, diffusés par le site internet de la RTBF, laissent apparaître qu'il y aurait eu 6 525 convocations. En effet, le ministère de l'Intérieur recense 5 722 votes valables exprimés et 803 abstentions (pièce 3).

En confrontant ces chiffres, on obtient une différence de 77 électeurs qui n'auraient pas été régulièrement inscrits sur la liste et dès lors régulièrement convoqués. Ils ont cependant pu prendre part au vote.

Dès lors que le dernier siège a été attribué sur base de quelques dizaines de voix, cette irrégularité a pu entacher le résultat des élections.

D'après des témoins, des convocations ont été rédigées et délivrées dans certains bureaux de vote. Tel est en tout cas le cas pour le bureau 11 de Herchies comme peut en attester Mme Queenie Halsbergh, témoin de parti dans ce bureau de vote.

Par ailleurs, plusieurs électeurs auraient signalé avoir reçu deux convocations.

B.2. Violation de l'article 18, alinéa 3, de la loi du 11 avril 1994

Les manipulations relatées au procès-verbal du bureau principal constituent une violation de l'article 18, alinéa 3, de la loi organisant le vote automatisé.

Un problème de lecture d'une disquette provenant d'un bureau de vote, et de sa copie a donné lieu à une intervention extérieure.

En vertu de l'article 18, alinéa 3, il aurait fallut procéder à une relecture des cartes magnétiques issues de l'urne du bureau en question.

Il y a eu violation de la procédure de dépouillement qui a pu affecter le résultat du vote puisqu'aucun contrôle n'a pu être réalisé quant aux manipulations effectuées.

Il convient de procéder à un recomptage des voix.

À CES CAUSES, PLAISE À VOTRE DÉPUTATION PERMANENTE,

D'annuler, pour cause d'irrégularités susceptibles d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes, l'élection communale qui a eu lieu le 8 octobre 2000 à Jurbise,

À titre subsidiaire, avant dire droit, procéder à une relecture de l'ensemble des cartes magnétiques contenues dans les urnes électroniques et procéder à un second dépouillement des suffrages exprimés.

Bruxelles, le 14 novembre 2000

Pour les requérants,

leur conseil,

Vincent LETELLIER.

INVENTAIRE

1. nombre d'électeurs selon la liste arrêtée au 1er août 2000;

2. résultats sur base des données du ministère de l'Intérieur;

3. ordonnance du président du tribunal de première instance de Bruxelles, siégeant en référés, 15 septembre 2000;

Vincent Letellier
Avocat
Date
Ref.

Élection communale de Jurbise du 8 octobre 2000

Dates Résumé succinct des pièces
1. 1.08.2000 Liste des électeurs
2. 10.10.2000 Chiffres officiels selon le ministère de l'Intérieur
3. 15.02.2000 Ordonnance du président du tribunal de première instance de Bruxelles

Nombre d'électeurs belges : 6 411

Nombre d'électeurs CEE : 37

Dressée ainsi par le collège des bourgmestre et échevins.

Le Secrétaire, Le Bourgmestre,

COMMUNE DE JURBISE

8 bureaux dépouilles sur 8

I. Détail des votes


2000 1994
Voix Sièges Diffusion Numéro Nom Voix Sièges
2 870 (50,15 %) 12 0 15 LB (Fr.) 0 0
691 (29,55 %) 7 1 (- 2,7 %) 5 PS (Fr.) 1 751 (32,25 %) 6
686 (10,24 %) 1 0 2 Ecolo (Fr.) 0 0
675 (10,04 %) 1 0 14 NC (Fr.) 0 0
Voix Sièges Diffusion Numéro Nom Voix Sièges
0 0 0 IC (Fr.) 2 680 (49,37 %) 10
0 0 0 RC (Fr.) 997 (18,36 %) 3

I. Taux de participation

2000 :

5 722 (87,6 %) + 803 (12,3 %) abstentions = 6 525

1994 :

5 428 (89,3 %) + 650 (10,6 %) abstentions

TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE DE BRUXELLES

Audience publique des référés du 15 septembre 2000

Nº 2000/1116/C du rôle des référés

Annexes : 1 citation. 3 conclusions.

3 copies.

en cause de

X/Y

Dans cette cause, il est conclu et plaidé en français à l'audience publique du 7 septembre 2000;

Après délibéré le président du tribunal de première instance rend l'ordonnance suivante :

Vu :

· la citation signifiée par exploit de Me J.-Cl. Callebaut, huissier de justice suppléant de Me W. Claes, huissier de justice, de résidence à 1180 Bruxelles, le 28 juillet 2000;

· les conclusions des parties demanderesses déposées au greffe le 31 août 2000;

· les conclusions et conclusions additionnelles de la partie défenderesse déposées au greffe les 21 août 2000 et 5 septembre 2000;

Entendu en leurs plaidoiries les conseils des parties;

ANTECÉDENTS

La loi du 11 avril 1994 (Moniteur belge du 20 avril 1994) a organisé le vote automatisé pour les élections législatives, provinciales et communales et pour le renouvellement des conseils de communauté et de région ainsi que du Parlement européen.

Habilité à ce faire par la loi susdite, le Roi a désigné par arrêté du 30 mars 1998 (Moniteur belge du 25 avril 1998), les cantons électoraux qui devront utiliser le système de vote automatisé. L'article 2 désigne les communes qui utiliseront ce système pour les élections communales.

Parmi celles-ci se trouvent les communes de Saint-Gilles et d'Ixelles, où sont domiciliés les demandeurs.

Le système de vote automatisé a fait l'objet de lois successives tendant à l'améliorer. Ainsi, la loi du 18 décembre 1998 (Moniteur belge du 31 décembre 1998) et la loi du 12 août 2000 (Moniteur belge du 25 août 2000), apportent des modifications à la loi du 11 avril 1994.

À la suite de la dernière modification, les demandeurs ont introduit la présente action sous le bénéfice de l'urgence, par citation du 28 juillet 2000, afin que des mesures provisoires soient prises pour les élections communales qui doivent se dérouler le 8 octobre prochain.

OBJET DE LA DEMANDE

La demande tend à entendre dire que la loi du 11 avril 1994 et l'arrêté royal du 30 mars 1998 portant désignation des cantons électoraux pour l'usage d'un système de vote automatisé, pris ensemble ou séparément, ne peuvent être appliqués en ce qui concerne les élections communales qui auront lieu le 8 octobre 2000 dans les communes de Saint-Gilles et d'Ixelles.

En conséquence, la demande tend à interdire à ... de fournir aux bureaux principaux, aux bureaux de vote et aux bureaux de dépouillement des communes de Saint-Gilles et d'Ixelles, les logiciels de vote et de systèmes de totalisation des votes émis, établis en application de la loi sur le vote automatisé, d'ordonner à ... de fournir à ces mêmes bureaux, le papier électoral sur lequel seront imprimées des formules de vote, l'ensemble sous peine d'une astreinte de 100 000 000 de francs belges.

Les demandeurs demandent que soit pris acte de leur engagement, en cas où l'astreinte serait due et payée par ..., à en redistribuer le montant à des organisations non-gouvernementales ou associations chargées de la protection des droits fondamentaux des citoyens.

Les demandeurs ajoutent que la décision à intervenir devra être signifiée, à l'initiative des demandeurs et aux frais de ... aux présidents des bureaux principaux de vote des communes de Saint-Gilles et Ixelles afin qu'ils soient informés de ce que les élections communales devront se dérouler selon le système prévu par la loi électorale communale, sans tenir compte de la loi du 11 avril 1994 et/ou de l'arrêté royal du 30 mars 1998.

DISCUSSION

Avant d'aborder le fond, le défendeur soulève des exceptions de défaut de juridiction, d'incompétence ou d'irrecevabilité.

1. Le défendeur estime tout d'abord que le juge des référés serait dépourvu de juridiction, voire incompétent, car l'action ne serait pas fondée sur un droit subjectif, civil ou politique, que les cours et tribunaux de l'ordre judiciaire ont mission de protéger (articles 144 et 145 de la Constitution).

Comme le relève très justement le défendeur, pour fonder la juridiction d'un tribunal de l'ordre judiciaire, il y a lieu d'examiner si l'objet véritable et direct du litige consiste en la méconnaissance, par l'autorité, de l'obligation d'accomplir un certain acte ou de s'abstenir d'accomplir un tel acte, auquel répond un droit subjectif dans le chef de l'administré (F. Tulkens et J. Sohier, « Les cours et tribunaux, Chronique de jurisprudence 1998-1999 », Revue belge de droit constitutionnel, 1999, p. 495).

Les demandeurs basent leur action sur la violation des droits fondamentaux qu'ils tirent du droit international et notamment de l'article 25 du Pacte international de New York relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966, approuvé par la loi du 15 mai 1981 (Moniteur belge du 6 juillet 1983).

Cet article dispose que « tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l'article 12 et sans restrictions déraisonnables :

a) de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis;

b) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs;

c) d'accéder, dans des conditions générales d'égalité, aux fonctions publiques de son pays ».

Les demandeurs invoquent la littera b de cet article comme fondement d'un droit subjectif.

L'objet véritable et direct du litige est d'empêcher que les élections communales du 8 octobre prochain dans les communes des demandeurs ne se fasse selon la loi organisant le vote automatisé du 11 avril 1994, modifiée en 1998 et 2000, car cela serait contraire à ce droit subjectif qu'ils revendiquent.

Le défendeur argue qu'il n'y aurait pas de droit subjectif car cet article du Pacte international n'aurait pas d'effet direct en droit interne.

La jurisprudence a reconnu, à de nombreuses reprises et de façon casuistique, un effet direct à diverses dispositions des traités internationaux et notamment du Pacte international relatif aux droits civils et politique. (Olivier De Schutter et Sébastien Van Drooghenbroeck, Droit international des droits de l'homme devant le juge national, 1999, Larcier, p. 49-52).

Il est admis que lorsqu'une disposition d'un traité international présente suffisamment de clarté et de précision pour qu'un juge soit en mesure de se prononcer dans le cas concret dont il doit connaître en recourant à ladite disposition du traité, elle peut être considérée comme ayant un effet direct en droit interne. Il y a lieu de vérifier si la disposition en question laisse à l'État souverain une marge de manoeuvre et une liberté d'action pour remplir son obligation (A. Alen et W. Pas, « L'effet direct de la Convention des Nations unies relative aux droits de l'enfant », JDJ, 1995, nº 174, pp. 164 et suivantes).

Cependant, même si une norme internationale laisse une liberté d'action et une marge de manoeuvre à l'État souverain, la disposition internationale a toujours l'effet direct en droit interne d'empêcher l'État d'outrepasser les limites de cette liberté d'action.

Comme on le concède en garantissant un droit à un scrutin secret, à une périodicité des élections, à l'égalité et la liberté du vote, au suffrage universel, l'article 25, littera b, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques consacre des obligations suffisamment claires et précises dans le chef de l'État pour pouvoir être invoquées avec effet direct comme des droits subjectifs par les citoyens devant un juge national.

Le défendeur soutient cependant que le concept d'élections « honnêtes » est un terme vague et général qui ne consacre pas une obligation déterminée, ce qui en exclurait l'effet direct.

Le concept d'élections « honnêtes », qui forme également un élément du droit garanti par l'article 25, littera b, n'est, à l'évidence, pas aussi clair et précis, que les autres points de la disposition. Il peut être complété par la notion « d'élections assurant l'expression libre de la volonté de l'électeur » (article 25, littera B, in fine).

Comme le précise le défendeur, ce concept laisse à l'État toute la marge d'appréciation nécessaire sur le mode de scrutin à appliquer (majoritaire, proportionnel ou autre) ou sur le système utilisé pour récolter les votes (bulletin papier ou vote informatisé). Ces choix relèvent du pouvoir discrétionnaire de l'État.

Il apparaît cependant comme une évidence, au risque de vider de sa substance le droit de vote reconnu par le Pacte international, que des élections honnêtes doivent nécessairement être organisées de telle manière que les opérations de vote et de dépouillement soient réalisées par des personnes totalement indépendantes du pouvoir en place, de manière à donner l'assurance aux électeurs qu'elles reflètent « l'expression libre de leur volonté ».

Cette nécessité est reprise dans les commentaires généraux de la Commission des droits de l'homme des Nations unies concernant l'article 25, produits par les demandeurs (§ 20). Si ces commentaires n'ont pas de force contraignante et ne sont, comme le relève le défendeur, que des suggestions à l'adresse des États, ils n'en sont pas moins pertinents pour confirmer l'interprétation minimale à donner à cet article.

En effet, l'on ne verrait pas l'intérêt de garantir un vote secret, libre et égal pour tous, si le citoyen n'avait pas la garantie que le résultat des votes ne peut être manipulé par le pouvoir existant.

Si le caractère honnête des élections ne comprend pas nécessairement que le risque d'erreur ou de fraude soit totalement nul, et, sur cette question, le degré de certitude à donner aux citoyens relève nécessairement de l'appréciation de l'État, dans une marge raisonnable, il n'en apparaît pas moins comme une évidence que des élections « honnêtes » nécessitent au moins la garantie que des erreurs, qu'elles soient involontaires ou provoquées, puissent être découvertes par des instances indépendantes de l'État. Il s'agit bien là d'un contenu minimal à donner au concept « d'élections honnêtes » et dès lors d'une limite au pouvoir d'appréciation de l'État sur l'organisation d'élections honnêtes.

L'honnêteté des élections, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs, recouvrant à l'évidence l'existence d'une autorité électorale indépendante du pouvoir en place, doit donc être considérée comme portant un effet direct en droit interne.

En l'espèce, sans préjuger du fond, il est clair que, contrairement à ce que prétend le plaignant, les demandeurs ne revendiquent pas un droit comme tel de voter sur un support de papier, et ne s'opposent pas au vote automatisé dans son principe, (ils ne peuvent en effet pas faire valoir de droit concernant l'un ou l'autre mode technique de vote) mais ils estiment que leur droit à participer à des élections honnêtes (qui suppose donc une autorité électorale indépendante) et leur droit au scrutin secret n'est pas respecté par le système automatisé qui, en vertu de la loi du 11 avril 1994, malgré les modifications ultérieures, et l'arrêté royal du 30 mars 1998 sera applicable dans leur commune lors des élections du 8 octobre prochain.

Ils invoquent dès lors bien un droit subjectif existant, de sorte que le juge de l'ordre judiciaire dispose de la juridiction et est compétent pour prendre connaissance de leur demande, en vertu des articles 144 et 145 de la Constitution.

2. Le défendeur fait valoir ensuite que le juge ne peut statuer sur la validité d'une loi au regard de la Constitution. Le contrôle de la constitutionnalité des lois a été confié partiellement à la Cour d'arbitrage et la Cour de cassation a rappelé que les cours et tribunaux n'ont pas le pouvoir de contrôler la conformité des lois à la Constitution (Cass., 9 juin 1999, Arr. Cass., 1999, p. 818, nº 339).

Les demandeurs relèvent à juste titre que, si un tribunal ne peut vérifier la conformité de la loi avec la Constitution, il peut en vérifier la conformité avec les normes de droit international, ayant des effets directs en droit juridique interne, ce qui lui est demandé en l'espèce (J. Velu, Droit public, Bruylant, 1986, p. 102).

Aucune norme, aucun principe ne permettrait de dire que ce contrôle ne pourrait pas être effectué par le juge des référés, lorsqu'il lui est demandé de prendre des mesures provisoires pour sauvegarder des droits subjectifs. Le fait de prendre une mesure provisoire ayant pour effet d'écarter ou d'empêcher dans un cas d'espèce, l'application d'une loi qui se révélerait contraire à une norme internationale, après avoir pratiqué une balance des intérêts en présence et sans prononcer de jugement déclaratif de droit, n'est pas incompatible avec le référé.

3. Le défendeur argumente ensuite que le juge des référés ne pourrait faire droit à la mesure demandée car celle-ci serait incompatible avec l'article 584 du Code judiciaire qui dispose que le juge des référés statue « au provisoire ».

Le défendeur soutient que « les mesures sollicitées excèdent le caractère provisoire » puisqu'il conteste hautement l'interprétation des règles de droits invoquées et qu'il n'y aurait pas d'apparences de droit. Ce raisonnement est pour le moins spécieux. L'examen des droits apparents et l'interprétation des règles de droits relèvent du fond de l'affaire, qui sera traité ci-dessous.

Le défendeur soutient ensuite que si les mesures demandées étaient ordonnées, elles préjudicieraient au fond puisqu'elles auraient un caractère irréversible.

Le caractère provisoire de l'ordonnance de référé s'attache aux effets de celle-ci et plus précisément à l'absence d'autorité de chose jugée dont elle est revêtue à l'égard du juge du fond qui serait éventuellement saisi de la cause ultérieurement. C'est très justement qu'un éminent auteur énonce à ce propos que « l'ordonnance est provisoire parce qu'elle ne lie pas le juge au principal. En d'autres termes la règle qu'édicte l'article 1039 du Code judiciaire limite non la compétence du juge des référés mais l'autorité de son ordonnance ». (P. Marchal, « Les référés », Rep. Not., T. XIII, livre VII, nº 28, p. 61).

Ni la défense de statuer autrement qu'au provisoire, ni la défense faite aux ordonnances de référé de porter préjudice au principal n'interdisent au juge des référés d'examiner la situation juridique des parties à l'effet d'ordonner les mesures conservatoires que justifient les apparences de droit suffisantes. Dès lors que le dispositif n'est ni déclaratif, ni constitutif de droit, le président peut ordonner toutes mesures appropriées en fonction des apparences juridiques.

Le fait que les mesures provisoires ordonnées pourraient avoir des effets irréversibles n'enlève rien à la compétence du juge des référés d'examiner les droits des parties et, en cas d'apparences de droit, d'ordonner ces mesures. Celles-ci ne lieraient pas le juge du fond qui aurait à connaître de l'étendue et de la portée exacte des droits des parties.

En l'espèce, les mesures demandées portent sur les élections du 8 octobre prochain sur base de droits apparents et manifestes mais ne préjudicient en rien l'examen par un juge du fond d'une demande relative à l'application dans les communes des demandeurs de la loi sur le vote automatisé au regard de sa conformité avec l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Après le 8 octobre 2000, la question du fond gardera toute sa raison d'être et pourra être tranchée en toute liberté par un juge du fond pour que les droits des parties puissent être fixées définitivement.

4. Le défendeur soulève enfin, avant d'aborder le fond, l'absence d'urgence, excluant dès lors la compétence du juge des référés.

Il soutient que les demandeurs savent depuis plus de deux ans que le Roi a désigné leur commune respective pour l'application du système de vote automatisé (arrêté royal du 30 mars 1998).

Selon lui, les demandeurs auraient pu agir au fond pour contester cette décision, depuis longtemps de sorte que l'urgence invoquée et résultant de l'imminence des élections communales du 8 octobre prochain, serait la conséquence de leur propre inertie.

Le juge des référés peut certes dénier l'urgence lorsque celle-ci est la conséquence des actes, licites ou non, du demandeur (Cass., 17 mars 1995, Pas., 1995, I, p. 330). Ainsi l'inertie procédurale du demandeur peut être invoquée lorsqu'en saisissant le juge normalement compétent au fond en temps ovulu, le demandeur aurait pu faire valoir ses droits de façon utile et efficace.

Cependant des motifs légitimes peuvent justifier le retard pris par le demandeur pour saisir la justice.

Ainsi les demandeurs font valoir qu'ils ont agi avec rapidité dès que les dispositions légales qui seraient applicables aux prochaines élections ont été connues, soit, dès le vote définitif le 20 juillet 2000 du texte qui est devenu la loi du 12 août 2000.

À la lecture des travaux préparatoires des lois modificatives de la loi du 11 avril 1994, soit la loi du 18 décembre 1998 et la loi du 12 août 2000, l'on peut conclure que le législateur a été constamment motivé par une amélioration du système au regard des objections formulées par les électeurs et leurs représentants. Ces objections rejoignent celles formulées par les demandeurs dans la présente action.

Les demandeurs ont donc raisonnablement pu considérer que le législateur veillerait à rencontrer ces objections par les lois modificatives qu'il préparait. Le défendeur ne peut nier que le débat politique sur la question du vote automatisé n'a jamais été clôturé.

Il semble d'ailleurs que ces améliorations faisaient partie de l'accord du gouvernement au lendemain des élections fédérales du 13 juin 1999 (l'exposé introductif du ministre de l'Intérieur au projet de loi modifiant la loi du 11 avril 1994, fait le 10 juillet 2000 avant l'adoption de la loi du 12 août 2000 commençait en ces termes : « L'accord du gouvernement prévoit que le gouvernement évaluera le vote automatisé et développera un système plus simple, plus accessible et plus transparent pour le citoyen »).

L'on ne peut donc reprocher aux demandeurs d'avoir laissé au législateur le bénéfice de terminer le travail législatif annoncé avant de prendre position sur l'état des droits subjectifs dont ils se prévalent.

Dès que le texte de loi modifiant la loi sur le vote automatisé a été adopté par la Chambre des représentants le 20 juillet 2000, et avant même la promulgation, ils ont saisi la juridiction des référés sans tarder.

L'urgence est dès lors établie à suffisance.

Quant au fond

Au stade de l'examen des droits des parties au provisoire, en vue de déterminer la nécessité de prendre des mesures provisoires en référé, le juge doit se limiter à l'examen des apparences de droit.

Les demandeurs invoquent leur droit au vote secret et leur droit au vote honnête, impliquant, prima facie, comme développé ci-dessus, un contrôle indépendant des opérations de vote et de dépouillement, afin de garantir que le résultat des votes reflète la volonté des électeurs.

Il ne s'agit pas pour le juge des référés de prendre en considération des réflexions d'opportunité politique. Il ne s'agit pas non plus de comparer les mérites respectifs du système « papier » et du système automatisé.

Il s'agit d'examiner si, prima facie, sur le plan des apparences, les élections telles qu'elles sont prévues le 8 octobre prochain à Ixelles et Saint-Gilles, en application de la loi du 11 avril 1994 telle que modifiée en 1998 et en 2000, risquent manifestement de violer les droits susdits des demandeurs.

La loi du 11 avril 1994, modifiée par la loi du 18 décembre 1998 et celle du 12 août 2000, prévoit que le vote automatisé se déroule selon les étapes suivantes :

· l'électeur reçoit une carte magnétique qui est mise en état de fonctionnement au moyen de l'urne électronique;

· pour exprimer son vote, l'électeur introduit sa carte dans le « lecteur-enregistreur » de la machine à voter;

· après avoir voté et libéré sa carte de la machine, l'électeur a la possibilité de visualiser son vote sur l'écran de la machine en la réintroduisant;

· ensuite, l'électeur introduit sa carte magnétique dans l'urne électronique, où elle demeurera après l'enregistrement des informations du vote sur une mémoire;

Les arguments des demandeurs peuvent se résumer dans les points suivants :

· le logiciel informatique utilisé pour le vote automatisé est fourni et contrôlé par le ministère de l'Intérieur;

· ce logiciel n'est pas rendu public car le ministre estime que la divulgation des programmes du vote automatisé pourrait conduire à des tentatives de fraudes électorales qui auraient pour effet de détériorer le matériel ou le logiciel douteuse;

· la fiabilité du matériel serait douteuse;

· le décompte des votes ne se fait pas en présence des candidats ou de leurs représentants mais est réalisé par le ministère de la Justice, quii a élaboré le logiciel du vote et celui du dépouilement;

· le collège d'experts désigné pour contrôler les opértions ne donne pas la garantie d'indépendance et n'a aucune autorité dans le cadre du déroulement du vote et du dépouillement. Ils ne sont en outre pas en mesure d'exercer un contrôle efficace réel;

se défend en considérant que le collège d'expert chargé de contrôler l'ensemble des systèmes de vote et de dépouillement, donnent aux citoyens la garantie suffisante que le résultat des élections reflétera correctement l'expression libre des votes des électeurs.

La loi du 12 août 2000 qui a modifié la loi du 11 avril 1994 a élargi les compétences du collège d'experts qui a été institué par la loi du 18 décembre 1998.

Ils ont pour mission de contrôler « l'utilisation et le bon fonctionnement de l'ensemble des systèmes de vote et de dépouillement automatisé ainsi que les procédures concernant la confection, la distribution et l'utilisation des appareils, des logiciels et des supports d'information électroniques. Les experts reçoivent du ministère de l'Intérieur le matériel ainsi que l'ensemble des données, renseignements et informations utiles pour exercer un contrôle sur les systèmes de vote et de dépouillement automatisés.

Ils peuvent notamment vérifier la fiabilité des logiciels des machines à voter, la transcription exacte par l'urne électronique des suffrages exprimés, ainsi que leur totalisation et la lecture optique des votes exprimés.

Ils effectuent ce contrôle à partir du 40e jour précédant l'élection, le jour de l'élection et après celle-ci, jusqu'au dépôt du rapport visé au § 3 » (article 5bis de la loi du 11 avril 1994 tel que modifié par la loi du 12 août 2000).

La loi pévoit encore qu'au plus tard dix jours après la clôture des scrutins et en tout état de cause avant la validation des élections, les experts remettront un rapport au ministre de l'Intérieur et aux assemblées législatives fédérales.

Ce collège d'experts serait nommé par les différentes assemblées fédérales et régionales ou communautaire.

Une première constatation est que la loi ne prévoit l'obligation pour les assemblées susdites, de désigner des experts.

Le terme utilisé à l'article 5bis de la loi vise uniquement une possibilité.

Une deuxième constatation et que la loi prévoit que les experts peuvent exercer leur contrôle à partir du 40e jour précédent les élections mais que les élections du 8 octobre auront lieu moins de 40 jours après l'entrée en vigueur de la loi.

Troisièmement, ce délai est encore empiété par le temps qu'il faudra aux assemblées pour désigner les experts. En effet, contrairement au régime antérieur (suite à la loi du 18 décembre 1998) qui prévoyait que les experts désignés en dernier lieu lors des dernières élections fédérales, étaient chargées du contrôle des élections communales (article 5bis, § 3, alinéa 2 ancien de la loi du 11 avril 1994), le nouvel article 5bis, § 1er de la loi du 11 avril 1994 dispose que la désignation des experts par les différentes assemblées fédérales, régionales et communautaires aura lieu à chaque élection communale.

Ayant ces trois constatations en mémoire, il y a lieu de répondre prima facie à la question de savoir si :

1. ces experts sont techniquement et humainement, en mesure de contrôler l'ensemble du système de manière à apporter dans les limites du raisonnable une garantie suffisante aux demandeurs que le système est fiable, n'entraînera pas d'erreurs, et ne sera pas fraudé (soit dans l'enregistrement de leur vote et de celui de leurs concitoyens, soit dans le comptage de ceux-ci);

2. ces experts sont une instance indépendante du pouvoir en place;

Sur la première question, la lecture du rapport du collège d'experts rendu à la suite des élections fédérales du 13 juin 1999, fait apparaître les très grandes difficultés dans lesquelles les experts se sont trouvés pour remplir leur mission.

Si le temps prévu pour leur mission est augmenté par la dernière modification législative, ce délai est sérieusement empiété dans le cas des élections du 8 octobre 2000 comme il est dit ci-dessus. Le fait que le collège ne peut être composé que de 9 personnes, ne permet un contrôle que par sondages particulièrement limités.

Ces apparences sont troublantes au regard de l'exigence d'élections « honnêtes » qui donnent l'assurance de refléter l'expression libre de la volonté de l'électeur, même s'il n'existe pas de droit subjectif à ce que le risque d'erreur ou de fraude soit totalement inexistant.

Sur la deuxième question, plus fondamentale en ce qui concerne le présent litige, il semble, tout d'abord, prima facie, que la formulation de la loi ne garantit même pas l'existence de ce collège d'experts puisqu'il n'est qu'une possibilité pour les assemblées.

En outre au niveau des apparences de droit, il ne peut être considéré qu'un tel collège d'experts, élu par les majorités des assemblées, soit une instance indépendante du pouvoir en place.

Le défendeur argue que le système a été constamment amélioré par différentes lois et que les observations du collège d'experts qui a rendu son rapport suite aux élections du 13 juin 1999 ont été rencontrées par la loi du 12 août 2000.

Si l'on ne peut contester que le législateur a cherché à améliorer le système, il n'en reste pas moins que l'exigence fondamentale d'une possibilité de contrôle indépendant du pouvoir exécutif sur les opérations de vote et donc sur les logiciels utilisés au moment du vote et du dépouillement, et ce tant du point de vue de la fiabilité nécessaire pour éviter des erreurs, que de la fiabilité nécessaire pour éviter la fraude, n'est prima facie pas rencontrée.

C'est sans pertinence que le défendeur avance que le principe et le mode de désignation des experts ont été jugés conformes à la Constitution par arrêt du 21 juin 2000 par la Cour d'arbitrage. En effet, la Cour d'arbitrage n'a été saisie que du contrôle de conformité de ces dispositions au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, soit l'obligation de non-discrimination, mais nullement du contrôle de conformité de cette loi au regard de l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Il apparaît évident, prima facie, que les droits garantis par l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont incompatibles avec un système où les erreurs et les fraudes ne pourraient être détectées que par le pouvoir en place au moment des élections et non pas par des instances ou personnes indépendantes.

En conclusion, il y a lieu de considérer que les arguments des demandeurs à l'appui de leur demande, sont fondés.

Étant donné ce qui précède, il n'y a pas lieu d'examiner les arguments tirés des articles 10 et 11 de la Constitution.

Quant à la mesure demandée :

Cependant, la mesure provisoire demandée est légalement impraticable, non pas, comme le soutenait le défendeur, parce qu'elle violerait le principe du provisoire en référé, mais bien en raison du principe de la relativité de l'autorité de la chose jugée.

La décision du juge ne lie que les parties au jugement. Même si l'ordonnance est notifiée à des tiers, comme il est prévu dans le dispositif des demandeurs, elle ne s'impose pas à ceux-ci.

Les élections communales du 8 octobre 2000 dans les deux communes visées ne concernent pourtant pas les seules parties à la présente cause. Tous les citoyens de ces communes, de même que les communes elles-mêmes lors de l'organisation de ces élections sont soumis aux normes générales que constituent la loi du 11 avril 1994 et l'arrêté royal du 30 mars 1998. Le juge des référés n'a bien évidemment pas le pouvoir d'annuler ces normes « erga omnes ».

L'on ne voit pas en l'espèce, par quelle mesure provisoire le juge des référés pourrait prévenir la violation du droit subjectif des demandeurs, sans empiéter sur l'application de normes législatives et réglementaires qui s'imposent à tous.

Faire droit à la demande entraînerait une situation inextricable et une impossibilité légale d'organiser les élections communales, ce qui n'est manifestement pas le but des demandeurs.

Il y a donc lieu de déclarer la demande non fondée.

PAR CES MOTIFS,

Nous, madame M. de Hemptinne, juge, désignée pour remplacer le président du tribunal de première instance de Bruxelles;

assistée de H. Vanderschelde, greffier;

Vu la loi du 15 juin 1935 sur l'emploi des langues en matière judiciaire;

Statuant au provisoire, contradictoirement;

Rejetant toutes conclusions autres plus amples ou contraires;

Déclarons la demande recevable mais non fondée;

En déboutons les parties demanderesses;

Condamnons les parties demanderesses aux dépens, liquidés pour elles-mêmes à la somme de 6 633 francs + 4 300 francs et pour la partie défenderesse à 4 300 francs;

Ainsi jugé et prononcé à l'audience publique des référés du 15 septembre 2000.

H. VANDERSCHELDE. M. de HEMPTINNE.

1.2. Arrêté de la députation permanente du Hainaut du 15 décembre 2000.

ÉLECTIONS

Réf. ECO/2000/VAL/R16-067

Jacques Hanocq

Jean-Marc Bargibant

OBJET : ÉLECTIONS COMMUNALES DU 8 OCTOBRE 2000. ­ COMMUNE DE JURBISE. ­ RÉCLAMATION. ­ VALIDATION

LA DÉPUTATION PERMANENTE DU CONSEIL PROVINCIAL DU HAINAUT

Vu la loi électorale communale;

Vu le procès-verbal des élections qui ont eu lieu le 8 octobre 2000 à Jurbise pour le renouvellement intégral du conseil communal;

Vu les pièces y annexées;

Vu la réclamation du 14 novembre 2000, introduite par M. Vincent Letellier, au nom de ses clients, MM. Mario Longo et Christian Vreux, candidats sur la liste nº 5 PS, demandant l'annulation desdites élections et, à titre subsidiaire, avant de dire droit, une relecture de l'ensemble des cartes magnétiques contenues dans les urnes électroniques et, dès lors, un second dépouillement des suffrages exprimés;

Pour ce qui concerne la réclamation de MM. Longo et Vreux

Considérant que les requérants motivent leurs demandes, principale et subsidiaire, par un ensemble d'incidents qui ont émaillé les opérations de vote et de dépouillement au sein des bureaux constitués à l'occasion du scrutin communal de Jurbise du 8 octobre 2000; qu'à ces incidents, ils ajoutent certains problèmes relatifs à la convocation des électeurs jurbisiens;

Considérant qu'ils voient dans la conjonction de ces incidents et de ces problèmes une preuve de ce que les élections communales de Jurbise du 8 octobre 2000 ne se sont pas déroulées dans le respect des normes internationales édictées pour garantir des élections libres, régulières et honnêtes, et ce, d'autant plus que le recensement général des votes, établi par le bureau principal communal, laisse apparaître un nombre identique de bulletins de liste complets (255) pour trois des quatre listes en présence lors de ce scrutin, qui les interpelle au vu de la faible probabilité d'obtenir pareilles similitudes pour un nombre de votes valables comme celui exprimé à Jurbise (6022);

Considérant que cette réclamation a été remise à monsieur le greffier provincial, contre récépissé, en date du 15 novembre 2000; qu'introduite dans les formes et délai requis par l'article 74 de la loi électorale communale, elle est donc recevable;

Considérant que l'article 74bis, § 1er, de la loi électorale communale, qui définit la compétence de la députation permanente en matière de contentieux électoral communal et qui est de stricte interprétation, précise que les élections communales ne peuvent être annulées, tant par le collège provincial que par le Conseil d'État, que pour cause d'irrégularités susceptibles d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes ayant participé au scrutin;

Considérant que les réclamants fondent donc leur requête sur quelques problèmes concernant la convocation des électeurs; que c'est ainsi qu'ils dénoncent des irrégularités de la liste des électeurs de Jurbise pour le scrutin local du 8 octobre 2000;

Considérant qu'à ce propos, ils soulèvent une différence de 77 électeurs entre les chiffres de ladite liste, arrêtée au 1er août 2000 par le collège échevinal (qui renseignent 6 448 électeurs), et les chiffres du ministère de l'Intérieur diffusés sur le site internet de la RTBF (5 722 votes valables + 803 abstentions = 6 525 électeurs);

Considérant qu'à l'examen de la liste des électeurs arrêtée dans le cadre des élections communales de Jurbise du 8 octobre 2000, 6 448 électeurs ont été invités à voter (6 411 belges et 37 ressortissants de l'Union européenne); que, selon les procès-verbaux des différents bureaux de vote, il apparaît que 6 022 électeurs ont voté (5 985 belges et 37 ressortissants UE); qu'à l'examen des listes électorales utilisées par les membres des bureaux de vote pour dénombrer le nombre d'électeurs ayant participé au scrutin, il ressort que 6 007 électeurs auraient reçu une carte magnétique (5 970 belges et 37 ressortissants UE);

Considérant que, de la comparaison de ces deux dernières séries de chiffres, il résulte une différence de 15, qui pourrait laisser présumer que 15 cartes magnétiques ont été introduites dans les urnes électroniques par une manoeuvre frauduleuse hypothétique;

Considérant que semblable manipulation ­ que n'évoquent d'ailleurs pas les réclamants ­ n'est absolument pas confirmée par les procès-verbaux des bureaux de vote, signés, sans remarque ni observation à ce propos, par les membres desdits bureaux et les témoins de liste; que, dès lors, elle est censée n'avoir pas été commise et la différence dénoncée ci-avant provient plus vraisemblablement d'erreurs commises par les assesseurs desdits bureaux appelés à dénombrer les votants par l'usage des listes électorales;

Considérant que, par ailleurs, même à prendre en compte les effets d'une éventuelle manipulation ­ mais il a été démontré plus haut qu'elle n'existait pas ­ le retrait des 15 voix incriminées à chacune des listes concurrentes de la liste nº 5 PS ne modifierait, dans aucune des hypothèses, la répartition des sièges entre les quatre listes en présence lors du scrutin du 8 octobre 2000;

Considérant que ce sont donc entre 726 et 741 électeurs qui se sont abstenus lors du scrutin communal de Jurbise le 8 octobre 2000 (entre 426 et 441 électeurs qui ne se sont/seraient pas présentés dans les bureaux de vote + 300 qui ont remis un bulletin blanc), et non 803 comme indiqué sur le site internet de la RTBF;

Considérant, d'autre part, que les renseignements figurant dans le document officiel, que constitue la liste des électeurs, arrêtée par le collège échevinal de Jurbise en application de l'article 3, § 1er, de la loi électorale communale et certifiée exacte par le gouverneur de province en exécution de l'article 93, premier alinéa, du Code électoral, et qui fixe le nombre total des électeurs invités à voter à 6 448, ne peuvent être mis en doute par des chiffres incontrôlables figurant sur un site internet, même s'ils sont présentés comme étant les chiffres officiels du ministère de l'Intérieur, d'autant qu'aucune réclamation n'a été déposée par des électeurs qui n'auraient pas été convoqués et que la différence susvisée résulte essentiellement du nombre d'abstentions, les chiffres donnés par le ministère de l'Intérieur étant exacts par ailleurs, tant pour ce qui concerne le nombre total de votes valables que le nombre de suffrages exprimés valablement pour chacune des listes en présence;

Considérant qu'un autre problème de chiffre est relevé par les réclamants; que, selon eux, le procès-verbal du bureau de vote nº 9 ne renseigne pas le nombre total de cartes magnétiques remises au bureau;

Considérant que ce grief s'avère exact;

Considérant que la liste des électeurs de Jurbise renseigne que 675 électeurs ont été invités à voter (669 belges et 6 ressortissants de l'Union européenne); que 644 (638 belges et 6 ressortissants UE) ont voté selon le procès-verbal; que l'examen de la liste électorale utilisée par le membre du bureau de vote pour dénombrer le nombre d'électeurs, donne un résultat de 642 (636 belges + 6 ressortissants UE), ce qui donne une différence, comme celle évoquée plus haut, de 2 cartes magnétiques glissées dans l'urne par une manoeuvre frauduleuse hypothétique;

Considérant que les conclusions qui valaient plus haut pour l'ensemble des bureaux de vote ouverts à l'occasion du scrutin communal de Jurbise et la différence de 15, valent évidemment pour ce seul bureau nº 9, dont le procès-verbal est signé, sans remarque, ni observation à ce propos, par tous les membres du bureau et les témoins de liste, y compris celui de la nº 5 PS;

Considérant que, dans ces conditions, il y a lieu de constater que les opérations de vote se sont déroulées dans ce bureau de manière régulière;

Considérant que pareille présomption de régularité ne saurait être énervée par l'absence d'un chiffre sans incidence sur le nombre des votants dans ledit bureau;

Considérant que l'affirmation des réclamants, selon laquelle, d'après des témoins, des convocations auraient été rédigées et délivrées dans certains bureaux de vote, apparaît purement gratuite dès lors que les procès-verbaux desdits bureaux, auprès desquels siégeait chaque fois un témoin de leur liste, ne renseignent pas semblable opération qui, dès lors, est censée n'avoir pas existé;

Considérant que ce qui est vrai pour tous les bureaux de vote l'est a fortiori pour le bureau nº 11, où la présence de Mme Queenie Halsberg, présentée par les réclamants comme témoin de parti, n'est nullement renseignée (en fait, elle était témoin de liste au bureau nº 12);

Considérant que, pour ce qui est de la déclaration, selon laquelle plusieurs électeurs auraient reçu deux convocations, elle apparaît purement gratuite par l'usage qu'elle fait du conditionnel et l'absence de précision qu'elle apporte sur l'identité et le nombre des électeurs concernés;

Considérant qu'à l'appui de leur réclamation, MM. Longo et Vreux énumèrent un certain nombre d'incidents qui ont émaillé les opérations de vote et de dépouillement lors des élections communales de Jurbise;

Considérant que certains de ces incidents sont liés à l'utilisation lors de ces élections du vote automatisé; qu'un autre dénonce un comportement qui peut être tenu à l'occasion d'élections, quel que soit le système de vote employé;

Considérant que c'est sous ce dernier titre que les réclamants déclarent qu'au bureau de vote nº 12, un témoin de liste, à 10 h 15 y a demandé que deux candidats postés à l'entrée du bureau de vote soient priés de partir; que le président du bureau aurait refusé d'obtempérer à leur demande;

Considérant que le procès-verbal dudit bureau relate en effet cet incident, tout en précisant que les deux candidats incriminés se trouvaient dans la cour devant le bureau de vote;

Considérant que, dès lors que lesdits candidats se trouvaient dans la cour devant le bureau de vote, c'est à raison que le président du bureau a refusé d'accéder à la demande du témoin de liste;

Considérant en effet qu'il ressort clairement de la jurisprudence du Conseil d'État que, d'une part, ni la loi, ni le règlement ne prescrivent à quel moment la campagne électorale commence ou se termine (23), que d'autre part, il n'est pas interdit de faire de la propagande électorale jusqu'à l'entrée du bureau de vote (24);

Considérant que certains dysfonctionnements informatiques, quant à eux, sont relatés au procès-verbal du bureau de vote ou du bureau principal communal où ils sont intervenus; que d'autres ne le sont pas;

Considérant que, parmi ceux-ci, les requérants signalent, en précisant eux-mêmes que cette information n'est pas renseignée au procès-verbal, qu'au bureau de vote nº 11, il y aurait eu une manipulation effectuée par un employé communal sur une machine, avec usage d'une disquette d'origine extérieure au bureau; qu'ils ajoutent que l'urne aurait été ouverte et scellée différemment;

Considérant que le procès-verbal dudit bureau a été signé par les membres du bureau et deux témoins, dont celui de la liste nº 5 PS, et qu'il ne mentionne aucune manipulation effectuée par un employé communal, ni une ouverture et une fermeture irrégulières de l'urne;

Considérant que, dès lors, ce procès-verbal emporte une présomption de régularité des opérations dudit bureau, où les agissements dénoncés par les requérants sont censés n'avoir pas existé; que cette présomption de régularité ne peut être renversée que par des preuves ou des allégations concordantes (25), ce que ne sont assurément pas les affirmations de MM. Longo et Vreux, qui apparaissent davantage comme une manière tardive de couvrir la défaillance du témoin de leur liste qui n'a déposé aucune plainte, en temps opportun, auprès du bureau où il siégeait (26);

Considérant que, de manière plus générale, les requérants précisent que les témoins de leur liste ont pu constater que de très nombreuses personnes ont été contraintes de recourir à l'assistance des membres des bureaux de vote pour pouvoir émettre leur suffrage;

Considérant qu'ainsi, dans le bureau de vote nº 11, ce sont, selon eux, plusieurs dizaines de personnes qui se sont fait assister, non en raison d'un handicap physique nécessitant une assistance, mais en raison de difficultés rencontrées face à la machine, sans que cela ne soit acté au procès-verbal;

Considérant qu'à cet égard, comme le disent d'ailleurs les réclamants, les procès-verbaux des 8 bureaux de vote en activité pour les élections communales de Jurbise ne contiennent aucune remarque sur pareille assistance qu'ils sont tous signés, sans observation à ce propos, par les membres du bureau et les témoins de liste; que, de ce fait, ils emportent une présomption de régularité, qui ne peut pas être renversée ­ comme il est dit ci-avant ­ par une affirmation aussi gratuite que celle des requérants (25), à qui la jurisprudence du Conseil d'État dénie, en outre, le droit, ici aussi, de couvrir, par une réclamation déposée alors que les résultats électoraux sont connus, l'éventuelle défaillance de leur témoin de liste n'ayant pas déposé en temps utile une contestation auprès du bureau de vote où il siégeait (26);

Considérant que, pour ce qui est du bureau de vote nº 11, son procès-verbal ne contient lui non plus aucune remarque; qu'il est signé par tous les membres du bureau et deux témoins de liste, dont celui de la liste nº 5 PS; que, dans ces conditions, les mêmes conclusions que celles exprimées ci-avant sont valables à son propos;

Considérant qu'enfin, aucun des procès-verbaux des 8 bureaux de vote de Jurbise, et donc aussi celui du bureau nº 11, ne donne d'indications qui puissent faire croire à des pressions sur les électeurs, dont aucun n'a d'ailleurs introduit de réclamation à ce sujet (27);

Considérant qu'au surplus, une explication donnée par un membre du bureau sur le fonctionnement de l'ordinateur n'est pas, par elle-même, constitutive d'une pression pouvant influencer le vote (27);

Considérant que les dysfonctionnements informatiques actés au procès-verbal des bureaux de vote, où ils se sont produits, sont au nombre de quatre;

Considérant que, pour le bureau de vote nº 7, les réclamants déclarent que des problèmes électroniques ont été signalés par six électeurs (annulation et remplacement de carte) et que le procès-verbal dudit bureau n'est pas clôturé;

Considérant que le remplacement des cartes magnétiques pour 6 électeurs obéit à la procédure légale applicable en cas de dysfonctionnement, pour quelque raison que ce soit, desdites cartes (instructions administratives du 24 juillet 2000 aux présidents des bureaux de vote utilisant le vote automatisé, nºs 13 et 20, pp. 25880 et 25882 du Moniteur belge du 27 juillet 2000);

Considérant d'autre part que l'examen dudit procès-verbal montre qu'il a bien été clôturé, puisqu'il est signé, sans remarque, par les membres dit bureau et deux témoins de liste dont, semble-t-il, celui de la liste nº 5 PS; que la seule mention qui y figure, à savoir « la disquette machine à voter copie n'a pas fonctionné », est sans incidence sur le bon déroulement des opérations de ce bureau de vote, puisque la procédure de totalisation des résultats ne nécessite aucun recours à cette disquette;

Considérant qu'il s'ensuit donc, comme expliqué auparavant pour les mêmes cas d'espèce, une présomption de régularité des opérations de vote dans ce bureau;

Considérant qu'au bureau nº 11, MM. Longo et Vreux signalent qu'un problème de matériel a perturbé la clôture (une machine en panne et une carte bloquée à l'intérieur) et que cette clôture s'est effectuée sur deux disquettes « sauves » et une disquette « de couleur blanche »;

Considérant qu'en fait, la clôture dudit bureau a été réalisée par une procédure normale en cas de machine en panne;

Considérant d'autre part que le procès-verbal, qui relate cette manière de faire, a été signé par les membres du bureau et deux témoins, dont celui de la liste nº 5 PS;

Considérant dès lors, comme il est dit ci-avant en pareil cas, que ce procès-verbal emporte à nouveau une présomption de régularité des opérations dudit bureau, l'intervention desdits réclamants apparaissant une nouvelle fois comme une manière tardive de couvrir la défaillance du témoin de leur liste qui n'a déposé aucune plainte, en temps opportun, auprès du bureau où il siégeait;

Considérant que, selon les réclamants, le bureau de vote nº 13 a été fermé à 9 h 30 pour récupérer les 4 cartes magnétiques de référence, introduites à tort dans l'urne électronique;

Considérant que cette procédure, qui est détaillée dans le procès-verbal, est la procédure normale de récupération des 4 cartes magnétiques de référence, numérotées en l'occurrence de 1 à 4, dès lors qu'elles avaient été insérées par erreur dans l'urne électronique; qu'elle s'est déroulée en présence de tous les membres du bureau et des témoins de liste, dont celui de la liste nº 5 PS, qui n'ont fait aucune observation de nature à laisser supposer qu'une manipulation irrégulière ou frauduleuse ait été effectuée à cette occasion;

Considérant enfin que le bureau nº 14 a bien été fermé, comme le disent les requérants, de 11 h 30 à 11 h 45 pour changer un terminal de vote, qui rejetait certaines cartes; que cette opération a été effectuée par un technicien de la firme STESUD (Philips).

Considérant que, comme pour le bureau précédent, cette opération, normale dans le cas d'espèce, s'est déroulée en présence des membres dudit bureau et des témoins de liste, qui n'ont fait aucune observation à ce sujet;

Considérant que, comme, par ailleurs, les dysfonctionnements du système informatique utilisé, comme à Jurbise, lors des élections communales, ne sont pas susceptibles par eux-mêmes de mettre en cause les résultats des élections communales dès lors qu'aucune plainte d'électeur, qui aurait été empêché ou gêné par ces incidents, n'a été déposée (28), le moyen, tiré des incidents qui se sont déroulés dans les différents bureaux de vote de Jurbise, n'est pas fondé;

Concernant que le dernier grief de MM. Longo et Vreux concernant un dysfonctionnement du système informatique, utilisé pour le scrutin communal de Jurbise du 8 octobre 2000, et en particulier la procédure qui a été mise en oeuvre pour pallier le problème résultant de ce dysfonctionnement, concerne la démarche adoptée par le président du bureau principal communal lorsqu'il s'est trouvé confronté à la défectuosité de la disquette qui était en sa possession pour le bureau de vote nº 11;

Considérant que les réclamants reprochent à ce président d'avoir violé les dispositions de l'article 18, alinéa 3, de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé en faisant, comme indiqué au procès-verbal de ce bureau, « réimprimer » à Lens la disquette initiale en sa possession, qui se révélait déficiente;

Considérant que l'article 18 en question stipule que le président du bureau principal communal procède, dès réception des supports de mémoire provenant du bureau de vote, à l'enregistrement du support original sur le support de mémoire destiné à la totalisation des votes; que si l'enregistrement au moyen du support de mémoire original se révèle impossible, le président du bureau principal recommence l'opération d'enregistrement au moyen de la copie de ce support;

Considérant que pareille opération est impossible pour ce président, puisqu'il n'est en possession que d'une copie du support de mémoire original, dénommée « copie 2 » (disquette grise), comme le précisent les instructions susvisées (nº 22, p. 25883);

Considérant dès lors qu'il lui appartient, lorsqu'il est confronté au problème décrit ci-dessus, de suivre les directives administratives qui lui ont été communiquées par le ministère de l'Intérieur, à savoir de ­­­­­­ prendre contact avec le président du bureau principal de canton qui a reçu, dans le cadre des élections provinciales, le support original de mémoire (disquette rouge) et la disquette « copie 1 » (blanche), identiques à la disquette « copie 2 » (grise) en sa possession mais non utilisable, et de lui demander de lui céder la disquette « copie 1 » (blanche), pour qu'il puisse obtenir les résultats dudit bureau de vote pour les élections communales (directives administratives destinées aux présidents des bureaux principaux de canton pour le vote automatisé et aux présidents des bureaux principaux communaux pour le vote automatisé le jour des élections, nº III.4);

Considérant que ce n'est que si cette démarche ne donne pas de résultat satisfaisant, qu'il doit recourir au 3e alinéa de l'article 18 de la loi du 11 avril 1994, qu'invoquent les requérants, et demander à la commune concernée de lui fournir l'urne électronique correspondante afin de procéder à l'enregistrement complet des cartes magnétiques qu'elle contient;

Considérant que c'est cette procédure que devait utiliser le président du bureau principal communal lorsqu'il a été confronté à la défectuosité de la disquette « copie 2 » (grise) du bureau de vote nº 11 mis en place pour les élections communales de Jurbise;

Considérant qu'au lieu d'effectuer cette démarche, il a envoyé, comme indiqué au procès-verbal de son bureau, la disquette déficiente au bureau de canton de Lens pour la « réimprimer », adoptant une procédure qui ne respecte pas l'esprit de la loi et qui, dès lors, peut engendrer, comme c'est le cas dans le chef des réclamants, des doutes quant aux résultats délivrés par la disquette « réimprimée »; et ce, d'autant plus que le proces-verbal du bureau principal communal laisse apparaître, pour 3 des 4 listes en présence lors du scrutin communal, un même total de bulletins de liste complets (255 suffrages valables), coïncidence qui, comme le disent les requérants, « interpelle à tout le moins »;

Considérant que, de ce qui précède, il ressort clairement que ce sont les résultats donnés par la disquette « réimprimée » du bureau de vote nº 11 qui posent problème au niveau du bureau principal communal; qu'en effet, les disquettes concernant les 7 autres bureaux n'appellent aucun commentaire, ni à l'examen du dossier de réclamation, ni à l'examen du procès-verbal du bureau principal communal, signé sans réserve à leur égard par tous les membres du bureau et les témoins, y compris celui de la liste nº 5 PS;

Considérant que cette conclusion vaut également pour le bureau de vote nº 9, pour lequel, selon le recensement général des votes, c'est une disquette « copie » qui a dû être utilisée, dès lors que l'écran indiquait « urne non clôturée » si l'on se servait de la disquette initiale, puisqu'à la lecture dudit procès-verbal, cette opération s'est déroulée sans qu'un doute ne s'insinue dans les esprits, dont celui du témoin de la liste nº 5 PS, quant aux résultats apportés par cette copie;

Considérant qu'il appartenait dès lors à notre collège de se substituer au président du bureau principal communal et de recueillir, comme ce dernier aurait dû le faire le 8 octobre 2000, auprès du président du bureau principal de canton à Lens, le support original de mémoire (disquette rouge) et la disquette « copie 2 » (blanche), afin de confronter les résultats donnés par l'un de ces deux supports avec ceux obtenus par le biais de la disquette « réimprimée » (29), utilisée dans le cadre de la totalisation de tous les résultats inhérents au scrutin communal de Jurbise;

Considérant que notre députation a décidé cette mesure d'instruction en séance du 7 décembre 2000;

Considérant qu'elle a été exécutée en date du 12 décembre 2000, comme il ressort du procès-verbal annexé au présent arrêté, signé par toutes les personnes qui ont assisté à la démonstration informatique qui a été réalisée à cette occasion et qui, par deux fois, a comparé les résultats donnés, pour le bureau de vote nº 11, par la disquette « réimprimée » incriminée et deux autres supports de mémoire, transmis par le président du bureau principal du canton de Lens, l'un sur « disquette noire » (d'abord), l'autre sur « disquette blanche » (ensuite);

Considérant qu'aux termes du procès-verbal de cette réunion, il résulte que les résultats donnés par les trois disquettes qui ont été confrontées sont les mêmes, le programme de comparaison mis en place par l'informaticien de la firme STESUD annonçant que les données reprises dans les trois disquettes sont identiques;

Considérant que, toutefois, une mention figurant sur la disquette « blanche » interpelle les requérants : elle porte une date et une heure, qui apparaissent inadéquates; que l'informaticien de STESUD leur répond que le programme ne comportant pas d'horloge interne, ces mentions sont totalement aléatoires;

Considérant que MM. Longo et Vreux, bien qu'ils ne soient pas satisfaits par pareille réponse, ne peuvent lui opposer aucun démenti, pas plus que l'informaticienne désignée par le collège provincial pour participer à cette séance d'instruction;

Considérant que, même si la députation permanente peut regretter qu'un système aussi sophistiqué que celui mis en place pour assurer le vote automatisé ne permette pas de déterminer avec précision le moment où s'effectuent toutes les interventions sur les supports de mémoire, du moins celles se déroulant après la clôture des opérations de vote, afin de lever toute ambiguïté à ce propos, elle ne peut, faute de preuve contraire à elle apportée, qu'acter ce fait;

Considérant qu'à l'issue de cette comparaison de résultats, les requérants signalent qu'il n'a été procédé qu'à la confrontation de disquettes « copies »;

Considérant que, s'il est exact qu'il en a été ainsi, il convient cependant de constater que la disquette « copie I » (blanche) a davantage de valeur que les autres disquettes « copie noire » et « réimprimée »;

Considérant qu'en effet, d'après le prescrit légal et les instructions données aux présidents des bureaux de vote soumis au système informatisé, il n'est pas contestable que cette disquette « copie I » (blanche) ait été enregistrée immédiatement après le support original de mémoire (disquette rouge), comme le précisent l'article 10, § 2, de la loi du 11 avril 1994, les instructions susvisées aux présidents des bureaux de vote (nº 23, p. 25883), ainsi que les instructions du ministère de l'Intérieur concernant le système JITES (nº 4, pp. 35 et 36);

Considérant que, dans ces conditions, les résultats qu'elle contient ne peuvent être qu'identiques à ceux repris sur le support original de mémoire;

Considérant que, comme les données inscrites sur la disquette « réimprimée », mise en cause par les réclamants, sont identiques aux siennes, les résultats proclamés par le bureau principal communal pour l'ensemble des élections communales de Jurbise doivent être confirmés et ce, malgré le total des bulletins de liste complets, trois fois identique (255), qui y apparaît et qui ne peut être considéré que comme une coïncidence;

Considérant que la seconde objection présentée par les réclamants, à savoir la déclaration du président du bureau principal communal devant la commission chargée de la mesure d'instruction décidée par notre collège, selon laquelle la disquette déficiente a été emmenée à Lens par un employé communal sans accompagnement d'un membre du bureau de dépouillement et que la « réimpression » de la disquette s'est faite en l'absence de tout témoin du bureau électoral, est désormais irrelevante, dès lors qu'il est attesté que les données de cette disquette sont les mêmes que celles de la disquette « copie 1 » (blanche) en possession du président du bureau principal du canton de Lens qui n'a fait, elle, l'objet d'aucune manipulation et qu'en conséquence, la totalisation de l'ensemble des résultats du scrutin communal de Jurbise s'est faite sur base de données incontestables, non seulement pour les bureaux de vote dont les disquettes « copie 2 » (grises) n'ont pas posé problème, comme il est dit ci-avant, mais aussi pour le bureau de vote nº 11;

Considérant qu'il ressort clairement de ce qui précède que les moyens particuliers, que les réclamants déposent à l'appui de leur demande d'annulation des élections communales de Jurbise du 8 octobre 2000, y voyant la preuve de ce que ce scrutin communal ne s'est pas déroulé dans le respect des normes internationales édictées pour garantir des élections libres, régulières et honnêtes, doivent tous être déclarés non fondés;

Considérant, dès lors, que ne subsiste plus à l'appui de leur thèse qu'une contestation contre le principe même du vote automatisé organisé par la loi du 11 avril 1994; que les pages de leur requête, où ne sont pas envisagés les griefs particuliers adressés au scrutin communal de Jurbise tel qu'il s'est déroulé le 8 octobre 2000, sont très révélatrices à ce propos;

Considérant qu'ainsi, dans un premier temps, ils détaillent la procédure qui est mise en oeuvre lors du vote automatisé, particulièrement le matériel utilisé, la procédure de vote, la clôture des opérations de vote et les opérations de totalisation des votes (pp. 1 à 5 de leur recours); que, dans un second temps, ils citent les normes internationales édictées pour garantir des élections libres, régulières et honnêtes, ainsi que les conséquences de ces principes sur des élections particulières (pp. 6 à 9); et qu'en conclusion, ils présentent, à l'appui de leur contestation, l'arrêt rendu le 15 septembre 2000 par le président du tribunal de première instance de Bruxelles (pp. 9 à 15);

Considérant que, de leur part, demander au collège provincial de statuer sur la validité du système de vote automatisé en tant que tel, c'est oublier que les élections communales organisées en Belgique sont régies par la loi électorale communale (30) et, pour ce qui concerne ledit vote automatisé, par la loi du 11 avril 1994; et que ces différentes lois doivent être appliquées telles qu'elles ont été votées par le pouvoir législatif;

Considérant que, comme il est dit en début de cet arrêté, l'article 74bis, § 1, de la loi électorale communale, qui définit la compétence de la députation permanente en matière de contentieux électoral communal et qui est de stricte interprétation, est clair à ce propos : les élections communales ne peuvent être annulées, tant par le collège provincial que par le Conseil d'État, que pour cause d'irrégularités susceptibles d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes ayant participé au scrutin;

Considérant que, dès lors, il n'est donc pas du ressort de la députation permanente de modifier une disposition arrêtée par le pouvoir législatif à l'occasion de l'exercice du contentieux électoral communal;

Considérant que, dans ces conditions, notre collège est incompétent pour invalider des élections communales, comme celles de Jurbise, suite à une contestation portant sur le principe même du vote ­­­­­­ automatisé et que, par conséquent, ce moyen présenté par MM. Longo et Vreux doit être déclaré irrecevable, dès lors que les moyens tirés des circonstances particulières au scrutin communal de Jurbise du 8 octobre 2000 n'ont pas été retenus, comme dit plus haut,

Considérant que, de ce qui précède, il ressort que tous les moyens que déploient MM. Longo et Vreux à l'appui de leurs demandes, principale d'annulation des élections communales de Jurbise, subsidiaire de relecture des cartes magnétiques contenues dans les urnes électroniques utilisées lors de ces élections, sont tous déclarés non fondés; que notre collège a cependant et notamment procédé à un recensement général des votes, ce 15 décembre 2000, au départ des Eproms des 8 bureaux de vote et que les résultats sont exactement identiques à ceux du procès-verbal du recensement général des votes dressé le 8 octobre par le bureau principal;

Pour ce qui concerne la validation des élections

Considérant que le procès-verbal des élections communales de Jurbise ne contient aucune réclamation, ni observation autre que celles envisagées ci-avant; qu'au surplus, aucune irrégularité susceptible d'influencer les résultats du scrutin n'a été constatée dans les opérations;

Vu les considérations qui précèdent et vu le contenu des procès-verbaux des réunions techniques décidées par notre collège et tenues en date des 12 et 15 décembre 2000,

Entendu le rapport présenté en séance publique par MM. les députés permanents J-P. De Clercq et R. Willame;

Vu l'article 75 de la loi électorale communale;

ARRÊTE :

Article 1. La réclamation susvisée, introduite par M. Mario Longo et Christian Vreux, est rejetée.

Article 2. Les élections qui ont eu lieu à Jurbise le 8 octobre 2000, ainsi que les pouvoirs des candidats proclamés élus respectivement conseillers communaux titulaires et suppléants, sont validés.

Article 3. Une expédition conforme du présent arrêté, auquel sera annexée une copie conforme des procès-verbaux des réunions techniques décidées par notre collège et tenues en date des 12 et 15 décembre 2000, sera communiquée par pli recommandé :

1) pour exécution, au conseil communal de Jurbise, par l'intermédiaire du bourgmestre;

2) à MM. Mario Longo et Christian Vreux;

3) à Maître Vincent Lettellier, conseil de MM. Longo et Vreux.

Ainsi prononcé en séance publique à Mons, le 15 décembre 2000.

Présents : MM. Michel Tromont, président;

C. Durieux, B. Alluin, J.-P. De Clercq, R. Willame, G. Moortgat, membres; Ch. Simon, greffier provincial.

Rapporteurs : MM. J.-P. De Clercq et R. Willame.

Le greffier principal, Le président,
(s) Charles SIMON (s) Michel TROMONT

Les rapporteurs,

(s) J.-P. DE CLERCQ. (s) R. WILLAME.

Pour expédition conforme :

Le greffier principal.


GOUVERNEMENT PROVINCIAL DU HAINAUT

SERVICES FÉDÉRAUX

SERVICE DES ÉLECTIONS

Agent traitant : M. Cantinieaux, conseiller faisant fonction.

Mons, le 12 décembre 2000

ÉLECTIONS COMMUNALES DE JURBISE ­ RÉCLAMATION

PROCÈS-VERBAL DE VÉRIFICATION DES DISQUETTES

La présente réunion a lieu suite à la décision du Collège provincial prise en séance du 7 décembre 2000 dans le cadre de l'instruction du dossier de réclamation introduite par messieurs Mario Longo et Christian Vreux contre les élections communales qui se sont tenues à Jurbise le 8 octobre 2000.

De manière à permettre de lever toute ambiguïté en ce qui concerne les résultats obtenus au bureau de vote nº 11 et décodés à partir d'une disquette qui a été réimprimée, l'objectif de la réunion est d'établir une comparaison entre les résultats donnés par la disquette en question et ceux figurant sur la disquette qui constitue le support original.

Sont présents :

Monsieur le député permanent J.-P. De Clercq,

Monsieur le député permanent G. Moortgat,

Monsieur Charles Simon, greffier provincial,

Monsieur Mario Longo, réclamant,

Monsieur Christian Vreux, réclamant,

Maître Vincent Letellier, conseil des réclamants,

Madame Annie Dubois, représentante de la liste nº 2 ÉCOLO,

Madame Queenie Halsberg, représentante de la liste nº 5 PS,

Monsieur Victor Fievez, représentant de la liste nº 14 NC,

Madame Christine Janssens, témoin de la liste nº 14 au bureau principal communal,

Monsieur Jean-Pierre Egels, représentant de la liste nº 15 LB,

Madame Christine Cavoy, informaticienne (services provinciaux),

Monsieur Philippe Evrard, directeur de développement de la société momentanée « Philips-Stesud »;

Monsieur Jacques Hanocq, conseiller adjoint (services fédéraux),

Monsieur Jean-Marc Bargibant, conseiller adjoint (services fédéraux),

Madame Maryse Cantinieaux, conseiller faisant fonction (services fédéraux).

Monsieur le greffier provincial invite madame Cantinieaux à rappeler l'objectif de la réunion conformément à la décision arrêtée par la députation permanente le 7 décembre 2000.

Les personnes suivantes vont retirer, du coffre-fort où elles ont été entreposées, les enveloppes dûment scellées dans lesquelles se trouvent les disquettes et le mot de passe nécessaires à la vérification à opérer :

­ Madame Queenie Halsberg, représentante de la liste nº 5 PS,

­ Monsieur Jacques Hanocq,

­ Madame Maryse Cantinieaux.

Monsieur Evrard donne quelques explications techniques : chaque urne est équipée d'un système (« boîte noire ») à partir duquel 3 disquettes sont établies, soit une rouge et une blanche pour le bureau principal de canton et une grise pour le bureau principal communal; ces trois disquettes sont identiques. En outre, en cas de problème avec une disquette, on suit la procédure « Sauve » (une disquette nouvelle est créée à partir de la « boîte noire »).

Monsieur Evrard copie sur le disque dur de son portable la disquette de couleur noire émanant du bureau principal communal, transmise par monsieur Malice.

Monsieur Evrard copie ensuite sur le disque dur la deuxième disquette de couleur noire émanant cette fois du président du bureau principal de canton, monsieur Verplaetse.

Il lance alors la procédure de comparaison entre les disquettes susvisées. Le programme déclare qu'aucune différence n'existe entre les deux disquettes en question.

Suite à la contestation, par les réclamants, à propos du caractère originel des deux disquettes précédentes (eu égard à leur couleur noire), à la demande de l'assemblée, le bureau principal de canton adresse, via la police de Jurbise, la disquette blanche en possession dudit bureau.

Monsieur Evrard procède de nouveau à une comparaison entre disquettes selon la procédure décrite ci-dessus.

La comparaison apporte le même résultat que précédemment soit une identité hormis en ce qui concerne une différence d'heure.

Les réclamants relèvent cependant que la comparaison a été faite sur base de copies de disquettes qui, le 8 octobre 2000, ont permis l'élaboration du procès-verbal.

Monsieur Evrard justifie cette différence par des motifs relevant de la technique informatique (absence d'horloge interne). Il n'y voit pas une différence pertinente.

Les réclamants estiment quant à eux qu'il s'agit en l'espèce d'un nouvel élément impossible à vérifier d'autant qu'une différence de date apparaît également.

Ils rappellent leur souhait de voir recompter un à un les votes exprimés lors des élections communales de Jurbise, leur réclamation étant fondée sur des arguments qui dépassent la problématique du bureau nº 11 (voir pages 5 et 6 de leur requête).

Il est à noter que monsieur Malice, président du bureau de dépouillement, est venu en cours de séance apporter l'ensemble des disquettes grises du bureau de dépouillement ainsi que la disquette de tabulation, dont il a demandé décharge.

À cette occasion, monsieur Malice a affirmé que la disquette du bureau nº 11 qui posait problème a été transportée par un employé communal non accompagné par un membre du bureau de dépouillement.

Le présent procès-verbal limite son objet à la mesure d'instruction arrêtée par le Collège provincial en sa séance du 7 décembre 2000.

La séance est clôturée à 19 heures 07, le 12 décembre 2000.

GOUVERNEMENT PROVINCIAL DU HAINAUT

SERVICES FÉDÉRAUX

SERVICE DES ÉLECTIONS

Agent traitant : M. Cantinieaux, conseiller faisant fonction.

Mons, le 15 décembre 2000

ÉLECTIONS COMMUNALES DE JURBISE ­ RÉCLAMATION

PROCÈS-VERBAL DE VÉRIFICATION DES VOTES

La présente réunion a lieu suite à la décision du Collège provincial prise en séance du 14 décembre 2000 dans le cadre de l'instruction du dossier de réclamation introduite par messieurs Mario Longo et Christian Vreux contre les élections communales qui se sont tenues à Jurbise le 8 octobre 2000.

Sont présents :

Monsieur le député permanent J.-P. De Clercq,

Monsieur le député permanent G. Moortgat,

Monsieur Charles Simon, greffier provincial,

Monsieur Mario Longo, réclamant,

Maître Vincent Letellier, conseil des réclamants,

Madame Annie Dubois, représentante de la liste nº 2 Écolo,

Madame Queenie Halsberg, représentante de la liste nº 5 PS,

Monsieur Victor Fievez, représentant de la liste nº 14 NC,

Madame Christine Janssens, témoin de la liste nº 14 au bureau principal communal,

Mademoiselle Jacqueline Galant, représentante de la liste nº 15 LB,

Monsieur Jacques Galant, représentant de la liste nº 15 LB,

Madame Christine Cavoy, informaticienne (services provinciaux),

Monsieur Patrick Sdao, technicien au Centre informatique provincial,

Monsieur Bernard Capron, conseiller faisant fonction au ministère de l'Intérieur,

Monsieur Pedoux, informaticien-directeur au ministère de l'Intérieur,

Monsieur Philippe Evrard, directeur de développement de la société momentanée « Philips-Stesud »;

Monsieur Jacques Hanocq, conseiller adjoint (services fédéraux),

Monsieur Jean-Marc Bargibant, conseiller adjoint (services fédéraux),

Madame Maryse Cantinieaux, conseiller faisant fonction (services fédéraux).

Objet de la présente réunion

précisé par M. le député permanent De Clercq : « refaire le dépouillement Eprom par Eprom »

Matériel disponible

­ 8 caisses contenant les urnes, apportées par la police de Jurbise;

­ matériel informatique;

­ supports informatiques et mots de passe provenant du ministère de l'Intérieur, en annexe 1;

­ disquettes, mots de passe et machine de totalisation provenant de la commune de Jurbise.

Interventions diverses

­ M. Evrard : pour prendre connaissance du contenu de l'Eprom, on doit créer une disquette « sauve » vierge pour réaliser une sauvegarde.

­ M. Fievez signale que M. Evrard est juge et partie et demande l'intervention de Mme Cavoy et de M. Sdao.

­ M. Longo demande la provenance du matériel. Il lui est répondu qu'il provient de M. Evrard.

­ M. Evrard dit que 4 « back-up » ont été fournis par le ministère de l'Intérieur avant les élections.

­ Mme Cavoy formate une disquette selon la procédure de base (procédure « DOS ») tout à fait classique.

­ M. Evrard signale que le formatage se fait via un programme proposé par le ministère de l'Intérieur.

­ Mme Cavoy fait ensuite une « directory » (trace de ce qui est sur la disquette), qui prouve que la disquette est vierge et apparaît tout à fait normale.

­ Mme Cavoy descend sur la disquette le fichier qui permet de sauver le contenu de l'Eprom.

­ Mme Cavoy et M. Sdao formatent et descendent sur 7 autres disquettes les fichiers qui permettent de sauver le contenu de l'Eprom de chaque urne (cf. fiche « sauve » distribuée le 12 décembre 2000).

­ M. Longo remarque que l'Eprom est accessible de l'extérieur avec un tournevis et qu'il n'est pas prévu qu'elle soit scellée ni avant, ni après le vote.

­ Mme Cavoy demande comment on réinitialise l'Eprom.

­ M. Evrard : par une disquette particulière (il faut redémarrer le bureau de vote avec la disquette rouge, qui était pour le bureau de vote nº 11 défectueuse).

­ M. Moortgat : ce qui est fait, correspond à la procédure décrite sur la fiche reçue le 12 décembre 2000; on refait donc une disquette « sauve » de l'Eprom.

­ Les mots de passe transmis par le ministère de l'Intérieur sont utilisés pour lancer le programme sur chaque urne.

Ouverture de la 1re caisse

Elle contient l'urne du bureau de vote nº 11, scellée d'un côté et non de l'autre (scellé cassé), ce qui permet d'en basculer le couvercle.

Résultats :

électeurs nationaux : 776;

électeurs CEE : 9;

total : 785.

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote.

Constats :

on peut accéder à l'Eprom sans desceller l'urne;

cette urne contient des cartes magnétiques;

le mot de passe initial est 16342 et 43819 est le mot de passe « après régénération », selon les documents du ministère de l'Intérieur.

M. Longo fait remarquer que, lors de la réunion technique du mardi 12 décembre 2000, le mot de passe pris en compte pour la disquette « sauve », qui a été utilisée, était 16342.

M. Evrard : c'est un mot de passe de cryptage, et non d'accès aux informations.

Ouverture de la 2e caisse

Elle contient l'urne du bureau de vote nº 9 (avec date 8 octobre 2000), scellée des deux côtés.

On entre le mot de passe 39325.

Résultats :

électeurs nationaux : 638;

électeurs CEE : 6;

total : 644.

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote.

Ouverture de la 3e caisse (bureau de vote nº 13 ­ Masnuy)

Résultats :

électeurs nationaux : 784

électeurs CEE : 2

total : 786

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote

Observations :

rectification du nº de la disquette, numérotée 12 par erreur dans un premier temps; il a été trouvé un autre scellé dans la caisse de l'urne

Ouverture de la 4e caisse (bureau de vote nº 12 ­ Herchies ­ mot de passe : 24647)

Résultats :

électeurs nationaux : 801

électeurs CEE : 4

total : 805

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote

Ouverture de la 5e caisse (bureau de vote nº 14 ­ mot de passe : 40312)

Résultats :

électeurs nationaux : 776

électeurs CEE : 7

total : 783

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote

Ouverture de la 6e caisse (bureau de vote nº 10 ­ Jurbise ­ mot de passe : 25108)

Résultats :

électeurs nationaux : 617

électeurs CEE : 1

total : 618

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote

Ouverture de la 7e caisse (bureau de vote nº 7 ­ mot de passe : 31011)

Constat : elle n'est scellée que d'un côté, ce qui permet d'en basculer le couvercle.

Résultats :

électeurs nationaux : 781

électeurs CEE : 6

total : 787

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote

Ouverture de la 8e caisse (bureau de vote nº 8 ­ mot de passe : 57434)

Résultats :

électeurs nationaux : 812

électeurs CEE : 2

total : 814

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote

Opérations ultérieures

On protège les disquettes.

On les totalise.

Procédure :

­ initialiser un PC avec les disquettes de couleur orange du bureau principal de Jurbise, soit celui utilisé à Jurbise le jour des élections, soit celui de M. Evrard déjà installé. Le choix se porte sur le second;

­ Mme Cavoy installe le programme de totalisation (une disquette orange et son « back-up » + 2 mots de passe provenant de la commune, dont 1 pour entrer dans le programme = 60155 et 1 pour l'impression);

­ Mme Cavoy remplace la date inscrite par 15 décembre 2000;

­ le programme affiche le nº des 8 bureaux;

­ on lui donne les disquettes à lire;

­ les résultats obtenus (cf. annexe) figurent, après inscription des mots de passe, correspondent à ceux déjà observés à la lecture des urnes et des procès-verbaux;

­ insertion du mot de passe pour l'impression.

La séance est clôturée à ... heures ...


ANNEXE 1


Je soussigné, monsieur Hanocq Jacques, certifie avoir reçu de monsieur Ronald Rasneur, assistant administratif au ministère de l'Intérieur (délégation du Registre national de Mons) :

1. les supports informatiques (disquettes) intitulés :

· « Cantons de Lens, Élections du 08/10/2000, Backup, Date : 22/09/2000, Heure : 15:10, Disk 1/4 »;

· « Cantons de Lens, Élections du 08/10/2000, Backup, Date : 22/09/2000, Heure : 15:10, Disk 2/4 »;

· « Cantons de Lens, Élections du 08/10/2000, Backup, Date : 22/09/2000, Heure : 15:10, Disk 3/4 »;

· « Cantons de Lens, Élections du 08/10/2000, Backup, Date : 22/09/2000, Heure : 15:10, Disk 4/4 »;

2. les mots de passe « président » des différents bureaux de vote du canton de Lens (mots de passe avant et après régénération pour le bureau 11).

3. les mots de passe spécifiques à M. Malice Philippe (1 mot de passe) et à M. Verplaetse André-Marie (2 mots de passe).

4. le code d'accès au programme contenu dans la machine de préparation (code ministère de l'Intérieur).

Fait à Mons, le 15 décembre 2000 (2 exemplaires).

Ronald RASNEUR. Jacques HANOCQ.
Assistant administratif Conseiller adjoint
ministère de l'Intérieur ministère de l'Intérieur (gouvernement provincial du Hainaut)

ANNEXE 2


ACCUSÉ DE RÉCEPTION

Je soussigné, Hanocq Jacques, déclare avoir reçu le 15 décembre 2000 à 13 h 55 :

­ 8 urnes;

­ 2 disquettes oranges (original + copie);

­ mots de passe;

­ machine de totalisation;

­ disquette de Backup de totalisation.

Le 15 décembre 2000.


ANNEXE 3


Commune : Jurbise

Bureau principal

Date : 15/12/2000

Heure : 16:17:14

ÉLECTIONS COMMUNALES DU 08/10/2000

TABLEAU DE RECENSEMENT DES VOTES ­ CHIFFRES ÉLECTORAUX

(art. 55 LEC)

Liste 02 ECOLO

A. VOTES DE LISTE (votes de liste complets).

Uniquement dans la case de tête TOTAL : 255

B. VOTES NOMINATIFS POUR LES CANDIDATS (votes de liste incomplets).

1. DUBOIS Annie 174
2. MARIN Colette 57
3. SERVAIS Jean-Marie 59
4. DEPAUW Anne 38
5. MERELLA Salvatorica 23
6. MOREAU Philippe 34
7. FOURNEAU Miriam 24
8. CLUDTS Eddy 20
9. WALECKX Colette 19
10. LOMBART Michel 36
TOTAL (1) : 331
Chiffre électoral (2) : 586

(1) Total des cartes magnétiques avec un ou plusieurs votes nominatifs pour les candidats.

(2) Le chiffre électoral d'une liste est le total des cartes magnétiques pour une liste avec un vote valable marqué en tête de liste ou avec un vote valable marqué en faveur d'un ou de plusieurs candidats d'une même liste.

Liste 05 PS

A. VOTES DE LISTE (votes de liste complets).

Uniquement dans la case de tête TOTAL : 255

B. VOTES NOMINATIFS POUR LES CANDIDATS (votes de liste incomplets).

1. LONGO Mario 812
2. THEATE Bernard 181
3. HALSBERGHE Queenie 156
4. URBAIN Christian 103
5. BREUSE Eddy 163
6. GAUTHOT Claude 245
7. HOYOIS Francis 97
8. CARLIER Luc 86
9. HALLOT Jean-Pierre 182
10. DUMOULIN Marie-Ange 246
11. MESCHAIN Stéphanie 100
12. ROUSSEAU Jean-Yves 89
13. CHEVALIER Michel 110
14. SENECAUT Manuella 121
15. VREUX Christian 99
16. MOULIN Sophie 100
17. CORDIER Monique 89
18. SEMPOS Olivier 144
19. MALHERBE Nadine 63
20. FRICQ Françoise 67
21. VANBOTERDAL-BIEFNOT Annie 134
TOTAL (1) : 1 436
Chiffre électoral (2) : 1 691

Liste 14 NC

A. VOTES DE LISTE (votes de liste complets).

Uniquement dans la case de tête TOTAL : 55

B. VOTES NOMINATIFS POUR LES CANDIDATS (votes de liste incomplets).

1. FIEVEZ Victor 304
2. JANSSENS Christine 122
3. LIENARD Daniel 55
4. AMAURY Didier 160
5. MISONNE-MALFESON Françoise 85
6. Muller Laurent 103
7. FLAMECOURT André 60
8. MAIRESSE Anne 96
9. BRUYELLE Jean-Michel 65
10. DELCROIX Virginie 87
11. DUPONT Xavier 86
12. LESCEU-LIENARD Eliane 69
13. DEBRUE Alfred 99
14. MICHEZ Gabriel 117
TOTAL (1) : 520
Chiffre électoral (2): 575

(1) Total des cartes magnétiques avec un ou plusieurs votes nominatifs pour les candidats.

(2) Le chiffre électoral d'une liste est le total des cartes magnétiques pour une liste avec un vote valable marqué en tête de liste ou avec un vote valable marqué en faveur d'un ou de plusieurs candidats d'une même liste.

Liste 15 LB

A. VOTES DE LISTE (votes de liste complets).

Uniquement dans la case de tête TOTAL : 255

B. VOTES NOMINATIFS POUR LES CANDIDATS (votes de liste incomplets).

1. GALANT Jacques 1 591
2. DURIEUX Jacques 426
3. CARION-MICHEL Dominique 199
4. QUERTINMONT Jean-Marie 635
5. QUINTIN Yvon 317
6. PIGEON Michel 427
7. DESMET-CULQUIN Brigitte 314
8. HACHEZ Maryse 165
9. BAVAY Jean-François 197
10. DECAMPS Philippe 246
11. DEROUX Céline 224
12. EGELS Jean-Pierre 405
13. POTTIEZ Pierre 315
14. BUGGENHOUT Natacha 88
15. DUBOIS Guy 223
16. DENIMAL Carl 117
17. CAUDRON-VREUX Carine 122
18. DRUART André 90
19. GHYSELEN Armeld 95
20. LESPAGNOL Christian 271
21. GALANT Jacqueline 1 263
TOTAL (1) : 2 615
Chiffre électoral (2): 2 870

(1) Total des cartes magnétiques avec un ou plusieurs votes nominatifs pour les candidats.

(2) Le chiffre électoral d'une liste est le total des cartes magnétiques pour une liste avec un vote valable marqué en tête de liste ou avec un vote valable marqué en faveur d'un ou de plusieurs candidats d'une même liste.

TABLEAU RÉCAPITULATIF

­ Votes enregistrés pour des :

­ électeurs belges : 5 985
­ électeurs de l'Union européenne : 37
Total : 6 022
­ Cartes avec votes valables 5 722
­ Cartes avec votes blancs 300

­ Cartes avec des votes déclarés nuls pour des :

­ électeurs belges : 0
­ électeurs de l'Union européenne : 0
Total : 0

La liste 02 Écolo obtient :

Nombre de cartes avec votes de liste (A) : 255
Nombre de cartes avec votes en faveur d'un ou plusieurs candidats (B) : 331
Chiffre électoral : 586

La liste 05 PS obtient :

Nombre de cartes avec votes de liste (A) : 255
Nombre de cartes avec votes en faveur d'un ou plusieurs candidats (B) : 1 436
Chiffre électoral : 1 691

La liste 14 NC obtient :

Nombre de cartes avec votes de liste (A) : 55
Nombre de cartes avec votes en faveur d'un ou plusieurs candidats (B) : 520
Chiffre électoral : 575

La liste 15 LB obtient :

Nombre de cartes avec votes de liste (A) : 255
Nombre de cartes avec votes en faveur d'un ou plusieurs candidats (B) : 2 615
Chiffre électoral : 2 870
Total général : 5 722
(= cartes avec des votes valables)

N.B. : Chiffre électoral = A + B

Le bureau principal constate que le total général des chiffres électoraux donne un nombre égal à celui des votes valables lequel s'élève à 5 722 (6 022 cartes trouvées dans les urnes, moins 300 cartes avec des votes blancs).

Fait à ................., le ........... 20.....

Le secrétaire, Les assesseurs, Les témoins, Le président,

II. Réception des supports de mémoire et totalisation des voix

Le bureau a reçu successivement

Nº du bureau
de vote
Heure à laquelle la (les) disquette(s)
des bureaux de vote
a (ont) été enregistrée(s)
Nombre
des votes
Observations (1)
7 15:57:41 787
8 16:01:31 814
9 16:02:58 644
10 16:04:10 618
11 16:06:28 785
12 16:07:58 805
13 16:10:19 786
14 16:14:37 783

(1) Mentionner si, suite à une défectuosité de la disquette, le président du bureau principal a dû procéder à un nouvel enregistrement complet d'un bureau de vote. En outre, mentionner les enveloppes faisant défaut etc.

Le bureau a constaté que les disquettes provenant des bureaux de vote étaient régulièrement scellées avant leur réception et avant leur enregistrement, tout comme les enveloppes qui les accompagnaient; sous réserve des observations mentionnées ci-dessous :

OBSERVATIONS :

Le bureau procède ensuite à la totalisation des votes (1)

Lorsque les résultats de tous les bureaux de vote ont été enregistrés, le président du bureau principal procède à l'impression du procès-verbal et du tableau de recensement des votes (tableau 1 de la présente formule). Le chiffre électoral de chaque liste est également ajouté (2).

Puis le bureau procède à la répartition des sièges entre les listes et à la désignation des candidats et des suppléants élus (voir Partie B ­ les tableaux II à V).

Fait à ...................., le .................... 20..

Le secrétaire, Les assesseurs, Les témoins, Le président,


(1) La proclamation par le président du bureau principal de résultats partiels obtenus par les listes peut intervenir après l'enregistrement d'au moins 10 bureaux et par la suite de 10 bureaux de vote supplémentaires et ainsi de suite jusqu'à enregistrement de tous les bureaux de vote. (Voir annexe)

Si une commune compte plus de trente bureaux de vote, le bureau principal peut disposer d'un système informatique par tranche de 30 bureaux de vote au moins. Les dispositions de l'alinéa 1er s'appliquent par système informatique. Chaque bureau de vote est assigné, pour les opérations de totalisation, à un système informatique déterminé. À l'issue de l'enregistrement des résultats des bureaux de vote par les systèmes informatiques, un des systèmes est affecté à la totalisation de l'ensemble des votes de la commune.

(2) Le chiffre électoral de chaque liste est constitué par l'addition des cartes magnétiques contenant un vote valable en tête de liste ou en faveur d'un ou de plusieurs candidats de cette liste.

1.3. Requête au Conseil d'État du 3 janvier 2001.

RECOURS EN MATIÈRE ÉLECTORALE

Pour : M. Mario Longo, domicilié à 7050 Masnuy-Saint-Jean, chemin de Mons, 37, candidat élu,

réquérant,

ayant pour conseil Me Vincent Letellier, avocat à 1020 Bruxelles, avenue de l'Araucaria, 86, au cabinet duquel il est fait élection de domicile.

À M. le premier président, mesdames et messieurs les présidents et conseillers qui composent le Conseil d'État,

Le requérant a l'honneur, par la présente requête, de solliciter l'annulation des élections communales qui se sont tenues le 8 octobre 2000 à Jurbise.

La présente requête est dirigée contre la procédure de préparation, d'organisation et de dépouillement des opérations de vote automatisé dans ladite commune.

1. Les règles applicables au vote informatique

Les élections communales du 8 octobre 2000 se sont déroulées, à Jurbise, selon la procédure de vote automatisé organisée par la loi du 11 avril 1994 (31) et dont les principes sont rappelés ci-après.

a) Matériel utilisé

Un système de vote automatisé comprend, par bureau de vote (32) :

1º une urne électronique;

2º une ou plusieurs machines à voter équipées chacune d'un écran de visualisation, d'un lecteur-enregistreur de cartes magnétiques et d'un crayon otique.

Chaque bureau principal dispose d'un ou de plusieurs systèmes électroniques de totalisation des votes émis dans les bureaux de vote.

Les systèmes de vote et de comptabilisation sont la propriété de la commune. Ce matériel peut être utilisé par la commune, à d'autres fins, à condition de le rendre disponible et en ordre de fonctionnement pour l'élection, trois jours au moins avant la date de celle-ci (33). À Jurbise, le matériel est uniquement affecté aux élections. Notamment, la commune a acquis du matériel auprès de l'association momentanée « Philips-Stesud » suite à une décision du Collège du 16 août 2000.

En d'autres termes, la commune fournit ses ordinateurs, équipés d'un crayon optique, aux différents bureaux électoraux.

Les logiciels électoraux, les codes de sécurité, les cartes magnétiques individuelles et les supports de mémoire (disquettes) sont fournis par le ministre de l'Intérieur ou son délégué, lors de chaque élection (34).

b) Procédure de vote

Avant de se rendre au compartiment-isoloir, l'électeur reçoit du président du bureau ou de l'assesseur désigné, une carte magnétique que le président a mis préalablement en état de fonctionnement au moyen de l'urne électronique.

Pour exprimer son vote, l'électeur introduit d'abord la carte magnétique dans la fente prévue à cet effet au lecteur-enregistreur de cartes de la machine à voter.

L'écran de visualisation affiche le numéro d'ordre et le sigle de toutes les listes de candidats.

L'électeur indique, au moyen du crayon optique, la liste de son choix. Il peut également indiquer par un vote blanc qu'il ne désire apporter son vote à aucune des listes présentées.

Après que l'électeur ait choisi une liste, l'écran affiche, pour cette liste, les noms et prénoms des candidats.

L'électeur effectue son vote en plaçant le crayon optique dans la case placée en tête de liste ou dans les cases placées en regard d'un ou de plusieurs candidats de la seule liste affichée à l'écran.

Après avoir effectué son choix, l'électeur est invité à le confirmer. Cette confirmation clôt le vote de l'électeur.

Dans le cas où il est procédé à plusieurs élections le même jour, l'électeur est invité, après avoir confirmé son choix pour la première élection, à voter selon la même procédure pour l'élection suivante.

Lorsque l'électeur a voté pour l'ensemble des élections, la carte magnétique est libérée de la machine à voter. L'électeur a alors la possibilité de visualiser les votes qu'il a émis en la réintroduisant dans le lecteur-enregistreur. Ensuite, l'électeur remet la carte au président du bureau ou à l'assesseur désigné, lequel vérifie que la carte ne porte aucune marque, inscription ou dégradation. Si tel est le cas, il invite l'électeur à introduire la carte dans l'urne électronique, où elle demeurera après l'enregistrement sur le support original de mémoire des informations qu'elle porte. La séquence de ces enregistrements est déterminée par une procédure aléatoire.

La carte magnétique est annulée par le président, et l'électeur est invité à revoter dans les hypothèses suivantes (28) :

1º si une marque ou une inscription susceptible d'identifier l'électeur a été faite sur la carte (notons d'emblée qu'une telle invitation à revoter n'existe pas lors du vote sur bulletin papier, le président du bureau ne pouvant vérifier l'existence d'un tel marquage. L'invitation du président à revoter constitue en l'espèce une pression sur l'électeur, visant à le contraindre à voter de manière utile);

2º si par suite d'une mauvaise manipulation ou de toute manoeuvre involontaire, l'électeur a détérioré la carte qui lui a été remise;

3º si, pour une raison technique quelconque, l'enregistrement de la carte par l'urne électronique se révèle impossible.

Il est prévu que l'électeur qui éprouve des difficultés à exprimer son vote peut se faire assister par le président ou par un autre membre du bureau désigné par lui, à l'exclusion de témoins ou de toute autre personne (35).

c) Clôture des opérations de vote

À l'issue du scrutin, le président du bureau de vote rend l'urne inopérante pour des votes ultérieurs. Les informations enregistrées sur le support original de mémoire sont reproduites sur un autre support de mémoire, tenant lieu de copie.

En cas d'élections provinciales et communales simultanées, trois supports de mémoires (disquettes) sont établis, un original et une copie destinée au bureau principal de canton et une copie destinée au bureau principal communal.

La copie destinée au bureau principal de canton constitue également copie pour le bureau principal communal au cas où la lecture de la copie destinée au bureau principal communal susciterait des difficultés.

Chaque disquette est placée dans une enveloppe distincte scellée.

Le procès-verbal du bureau de vote est rédigé séance tenante. Il mentionne par élection le nombre de votes enregistrés, indiqué par l'urne à l'issue du scrutin, le nombre de cartes magnétiques annulées dont celles pour lesquelles le vote a été déclaré nul ainsi que le nombre de cartes non utilisées.

Doivent également être mentionnés au procès-verbal, le cas échéant, les difficultés et incidents survenus au cours des opérations de vote (36).

Les urnes scellées sont remises à un responsable désigné par le collège des bourgmestre et échevins de la commune.

Le procès-verbal et les enveloppes annexées ainsi que les disquettes sont remis sans délai par le président du bureau de vote, contre récépissé, au président du bureau principal de canton, sauf l'enveloppe contenant la copie de la disquette destinée au président du bureau principal communal, lors d'élections communales et provinciales simultanées, laquelle est remise, contre récépissé, au président de ce bureau par le président du bureau de vote ou par un assesseur désigné par lui.

d) Opérations de totalisation des votes

Le président du bureau principal de canton ou communal, selon le cas, procède, dès réception des disquettes provenant des bureaux de vote, à l'enregistrement de celles-ci sur un support de mémoire destiné à la totalisation des votes.

Si cette manipulation se révèle impossible, il utilise la copie de la disquette du bureau de vote.

Au cas où l'utilisation de la copie est également impossible, le président du bureau principal requiert de la commune concernée la fourniture de l'urne électronique correspondante; après l'avoir descellée, il procède à un enregistrement complet des cartes magnétiques qu'elle contient (37).

Lorsque les résultats de tous les bureaux de vote ont été enregistrés, le président du bureau principal procède à l'impression du procès-verbal et du tableau de recensement des votes.

Ces documents sont signés par le président, les autres membres et les témoins du bureau principal. Ils sont placés sous enveloppe scellée et communiqués, en ce qui concerne les élections communales, dans les 24 heures au gouverneur de la province.

Les supports de mémoire provenant des bureaux de vote ainsi que ceux utilisés par le bureau principal pour la totalisation des votes, à l'exclusion de ceux utilisés par le bureau principal communal, sont conservés au greffe du tribunal de première instance ou de la justice de paix aussi longtemps que l'élection n'est pas définitivement validée ou annulée (38).

Les supports de mémoire utilisés par le bureau principal communal sont conservés dans les locaux de l'administration communale, aussi longtemps que l'élection n'est pas définitivement validée ou annulée (39).

Dès que l'élection est définitivement validée ou annulée, l'ensemble des disquettes est remis au ministère de l'Intérieur qui procède à leur effacement (40).

II. Faits et rétroactes

1. Le procès-verbal du bureau de vote nº 11 mentionne qu'un problème de matériel a perturbé la clôture (une machine en panne et une carte bloquée à l'intérieur) et que la clôture s'est effectuée sur deux disquettes « sauves » et une disquette « de couleur blanche ».

Par ailleurs, selon des témoins, il y a eu une manipulation effectuée par un employé communal sur une machine, avec usage d'une disquette d'origine extérieure au bureau, non renseignée au procès-verbal, et l'urne a été ouverte et scellée différemment. Ces problèmes n'ont toutefois pas été relatés au procès-verbal.

2. Le procès-verbal du bureau de dépouillement mentionne, à propos de l'enregistrement des votes du bureau de vote nº 11 :

« La disquette initiale a dû être réimprimée à Lens suite à un problème informatique. Après vérification, elle a inscrit les données chiffrées qui figuraient au support papier. »

Un employé communal ­ le requérant rappelle que la commune est propriétaire des hardware utilisés ­ a quitté seul le bureau principal avec des disquettes. Il se serait rendu à Lens où des manipulations, dont on ignore la teneur, auraient été effectuées. À son retour il a été fait usage de disquettes « de secours » amenées par cet employé. Aucun contrôle n'a pu être exercé par les membres du bureau et les témoins quant aux manipulations effectuées et la provenance des disquettes utilisées.

Ces faits sont confirmés par le président du bureau principal communal qui a déclaré lors de la réunion technique organisée le 12 décembre 2000 « que la disquette du bureau nº 11 qui posait problème a été transportée par un employé communal non accompagné par un membre du bureau de dépouillement ».

Le procès-verbal du bureau de dépouillement mentionne en outre, à propos de la comptabilisation des suffrages du bureau 9 :

« La disquette « copie » a dû être utilisée car l'écran indiquait « urne non clôturée » si utilisation de la disquette initiale. »

3. La lecture du procès-verbal du bureau de dépouillement laisse apparaître que le nombre de votes en case de tête (bulletins de liste complets) pour les quatre listes candidates sont les suivants :

Écolo : 255

PS : 255

Liste Bourgmestre : 255

Nouvelle Commune : 55

Compte tenu du nombre de votes valables (6 022) exprimés, la probabilité que de tels suffrages soient exprimés, même si elle existe, est infime. Des informaticiens interrogés à ce sujet avancent l'hypothèse d'une explication informatique. Ces chiffres interpellent à tout le moins.

4. Le 15 novembre 2000, MM. Longo et Vreux saisissent la députation permanente du Hainaut d'une réclamation électorale dirigée contre les élections communales de Jurbise. À l'appui de leur réclamation ils invoquent des irrégularités spécifiques mais également le fait que la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé violerait les articles 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 3 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme (pièce 1).

5. Réuni en séance du 7 décembre 2000, le Collège provincial décide, dans le cadre de l'instruction de cette réclamation, de procéder à une mesure d'instruction, « [d]e manière à permettre de lever toute ambiguïté en ce qui concerne les résultats obtenus au bureau de vote nº 11 et décodés à partir d'une disquette qui a été réimprimée ».

Cette mesure d'instruction s'est tenue le 12 décembre 2000 et les manipulations techniques ont été effectuées par monsieur Philippe Evrard, directeur de développement de l'association momentanée « Philips-Stesud », développeur du logiciel utilisé pour les élections de Jurbise.

Les éléments suivants ressortent du procès-verbal de la réunion :

« Monsieur Evrard donne quelques explications techniques : chaque urne est équipée d'un système (« boîte noire ») à partir duquel 3 disquettes sont établies, soit une rouge et une blanche pour le bureau principal de canton et une grise pour le bureau principal communal; ces trois disquettes sont identiques. En outre, en cas de problème avec une disquette, on suit la procédure « Sauve » (une disquette nouvelle est créée à partir de la « boîte noire »).

Monsieur Evrard copie sur le disque dur de son portable la disquette de couleur noire émanant du bureau principal communal, transmise par monsieur Malice (41).

Monsieur Evrard copie ensuite sur le disque dur la deuxième disquette de couleur noire émanant cette fois du président du bureau principal de canton, monsieur Verplaetse.

Il lance alors la procédure de comparaison entre les disquettes susvisées. Le programme déclare qu'aucune différence n'existe entre les deux disquettes en question.

Suite à la contestation, par les réclamants, à propos du caractère originel des deux disquettes précédentes (eu égard à leur couleur noire), à la demande de l'assemblée, le bureau principal de canton adresse, via la police de Jurbise, la disquette blanche en possession dudit bureau.

Monsieur Evrard procède de nouveau à une comparaison entre disquettes selon la procédure décrite ci-dessus.

La comparaison apporte le même résultat que précédemment soit une identité hormis en ce qui concerne une différence d'heure.

Les réclamants relèvent cependant que la comparaison a été faite sur base de copies de disquettes qui, le 8 octobre 2000, ont permis l'élaboration du procès-verbal.

Monsieur Evrard justifie cette différence par des motifs relevant de la technique informatique (absence d'horloge interne). Il ne voit pas une différence pertinente.

Les réclamants estiment quant à eux qu'il s'agit en l'espèce d'un nouvel élément impossible à vérifier d'autant qu'une différence de date apparaît également.

Ils rappèlent leur souhait de voir recompter un à un les votes exprimés lors des élections communales de Jurbise, leur réclamation étant fondée sur des arguments qui dépassent la problématique du bureau nº 11 (voir pages 5 et 6 de leur requête).

Il est à noter que monsieur Malice, président du bureau de dépouillement, est venu en cours de séance apporter l'ensemble des disquettes grises du bureau de dépouillement ainsi que la disquette de tabulation, dont il a demandé décharge.

À cette occasion, monsieur Malice a affirmé que la disquette du bureau nº 11 qui posait problème a été transportée par un employé communal non accompagné par un membre du bureau de dépouillement » (pièce 2).

6. À l'issue de cette réunion technique, le Collège provincial se réunit à huis clos et décide de faire procéder à une seconde mesure d'instruction. Celle-ci a lieu le 15 décembre 2000.

L'objet de cette mesure d'instruction est de « refaire le dépouillement EPROM par EPROM », l'EPROM étant un support mémoire, placé dans chaque urne électronique, qui enregistre l'ensemble des votes contenus sur les cartes magnétiques que l'urne contient. Il s'agit de la « boîte noire » dont il a été fait référence lors de la réunion du 12 décembre 2000.

À cette fin, monsieur Jacques Hanocq, conseiller adjoint au ministère de l'Intérieur (gouvernement provincial du Hainaut), se fait remettre des mains d'un assistant administratif du ministère de l'Intérieur (annexe 1 au procès-verbal du 15 décembre 2000, pièce 3) :

« 1. les supports informatiques (disquettes) intitulés :

· « Canton de Lens, Elections du 8 octobre 2000, Backup, Date : 22 septembre 2000, Heure : 15 h 10, Disk 1/4 »;

· « Canton de Lens, Elections du 8 octobre 2000, Backup, Date : 22 septembre 2000, Heure : 15 h 10, Disk 2/4 »;

· « Canton de Lens, Elections du 8 octobre 2000, Backup, Date : 22 septembre 2000, Heure : 15 h 10, Disk 3/4 »;

· « Canton de Lens, Elections du 8 octobre 2000, Backup, Date : 22 septembre 2000, Heure : 15 h 10, Disk 4/4 »;

2. les mots de passe « président » des différents bureaux de vote du canton de Lens (mots de passe avant et après régénération pour le bureau 11).

3. les mots de passe spécifiques à monsieur Malice Philippe (1 mot de passe) et à monsieur Verplaetse André-Marie (2 mots de passe).

4. le code d'accès au programme contenu dans la machine de préparation (code ministère de l'Intérieur). »

Un agent de la police de Jurbise remet en outre à monsieur Hanocq :

« ­ 8 urnes;

­ 2 disquettes oranges (original + copie);

­ mot de passe;

­ machine de totalisation;

­ disquette de Back up de totalisation » (annexe 2 au procès-verbal du 15 décembre 2000, pièce 3).

Ce matériel provient de la commune de Jurbise.

7. Les éléments suivants ressortent du procès-verbal de la réunion du 15 décembre 2000 :

« Interventions diverses

­ M. Evrard : Pour prendre connaissance du contenu de l'EPROM, on doit créer une disquette « sauve » vierge pour réaliser une sauvegarde.

­ M. Fievez signale que M. Evrard est juge et partie et demande l'intervention de Mme Cavoy et de M. Sdao (42).

­ M. Longo demande la provenance du matériel, Il lui est répondu qu'il provient de M. Evrard.

­ M. Evrard dit que 4 « back up » ont été fournis par le ministère de l'Intérieur avant les élections.

­ Mme Cavoy formate une disquette selon la procédure de base (procédure « DOS ») tout à fait classique.

­ M. Evrard signale que le formatage se fait via un programme proposé par le ministère de l'Intérieur.

­ Mme Cavoy fait ensuite une « directory » (trace de ce qui est sur la disquette), qui prouve que la disquette est vierge et apparaît tout à fait normale.

­ Mme Cavoy descend sur la disquette le fichier qui permet de sauver le contenu de l'EPROM.

­ Mme Cavoy et M. Sdao formatent et descendent sur 7 autres disquettes les fichiers qui permettent de sauver le contenu de l'EPROPM de chaque urne (cf. Fiche « sauve » distribuée le 12 décembre 2000).

­ M. Longo remarque que l'EPROM est accessible de l'extérieur avec un tournevis et qu'il n'est pas prévu qu'elle soit scellée ni avant, ni après le vote.

­ Mme Cavoy demande comment on réinitialise l'EPROM.

­ M. Evrard : par une disquette particulière (il faut redémarrer le bureau de vote avec la disquette rouge, qui était pour le bureau de vote nº 11 défectueuse).

­ M. Moortgat : ce qui est fait, correspond à la procédure décrite sur la fiche reçue le 12 décembre 2000; on refait donc une disquette « sauve » de l'EPROM.

­ Les mots de passe transmis par le ministère de l'Intérieur sont utilisés pour lancer le programme sur chaque urne.

Ouverture de la 1re caisse

Elle contient l'urne du bureau de vote nº 11, scellée d'un côté et non de l'autre (scellé cassé), ce qui permet d'en basculer le couvercle.

Résultats :

électeurs nationaux : 776

électeurs CEE : 9

total : 785

Conclusion : mêmes chiffres au procès-verbal du bureau de vote

Constats :

on peut accéder à l'EPROM sans desceller l'urne;

cette urne contient des cartes magnétiques;

le mot de passe initial est 16342 et 43819 est le mot dépasse « après régénération », selon les documents du ministère de l'Intérieur.

M. Longo fait remarquer que, lors de la réunion technique du mardi 12 décembre 2000, le mot de passe pris en compte pour la disquette « sauve », qui a été utilisée, était 16342.

M. Evrard : c'est le mot de passe de cryptage, et non d'accès aux informations.

(...)

Opérations ultérieures

On protège les disquettes.

On les totalise.

Procédure

­ initialiser un PC avec les disquettes de couleur orange du bureau principal de Jurbise, soit celui utilisé à Jurbise le jour des élections, soit celui de M. Evrard déjà installé. Le choix se porte sur le second;

­ Mme Cavoy installe le programme de totalisation (une disquette orange et son « back up » + 2 mots de passe provenant de la commune, dont 1 pour entrer dans le programme = 60155 et 1 pour l'impression);

­ Mme Cavoy remplace la date inscrite par 15 décembre 2000;

­ Le programme affiche le nº des 8 bureaux;

­ On lui donne les disquettes à lire;

­ Les résultats obtenus (cf. Annexe) figurent, après inscription des mots de passe, correspondent à ceux déjà observés à la lecture des urnes et des procès-verbaux;

­ Insertion du mot de passe pour l'impression. » (pièce 3).

8. À l'issue de cette réunion technique, la Députation permanente s'est réunie afin de délibérer et a rendu un arrêté rejetant la réclamation introduite par messieurs Longo et Vreux (pièce 4).

Cette décision considère qu'aucune des irrégularités vantées par les réclamants n'est fondée et que le moyen pris de la violation des articles 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 3 du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme est irrecevable.

Cependant, la Députation permanente a considéré « qu'à l'examen de la liste des électeurs arrêtée dans le cadre des élections communales de Jurbise du 8 octobre 2000, 6 448 électeurs ont été invités à voter (6 411 belges et 37 ressortissants de l'Union européenne); que, selon les procès-verbaux des différents bureaux de vote, il apparaît que 6 022 électeurs ont voté (5 985 belges et 37 ressortissants UE); qu'à l'examen des listes électorales utilisées par les membres des bureaux de vote pour dénombrer le nombre d'électeurs ayant participé au scrutin, il ressort que 6 007 électeurs auraient reçu une carte magnétique (5 970 belges et 37 ressortissants UE); (...) que, de la comparaison de ces deux dernières séries de chiffres, il résulte une différence de 15, qui pourrait laisser présumer que 15 cartes magnétiques ont été introduites dans les urnes électroniques par une manoeuvre frauduleuse hypothétique ».

III. DISCUSSION

Moyen pris de la violation de l'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et de l'article 3 du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondametales

A. Recevabilité du moyen

1. Le requérant estime que le vote automatisé tel qu'il a été organisé pour les élections communales de Jurbise du 8 octobre 2000 méconnaît les garanties consacrées par les articles 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, approuvé par la loi du 15 mai 1981, et 3 du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, approuvé par la loi du 27 novembre 1996.

Dans son arrêté du 15 décembre 2000, la Députation permanente du Hainaut considère que « demander au collège provincial de statuer sur la validité du système de vote automatisé en tant que tel, c'est oublier que les élections communales organisées en Belgique sont régies par la loi électorale communale et, pour ce qui concerne ledit vote automatisé, par la loi du 11 avril 1994; et que ces différentes lois doivent être appliquées telles qu'elles ont été votées par le pouvoir législatif ».

Plus précisément, la Députation permanente croit pouvoir fonder sa décision d'irrecevabilité du moyen par référence à « l'article 74bis, § 1er, de la loi électorale communale, qui définit la compétence de la Députation permanente en matière de contentieux électoral communal et qui est de stricte interprétation (...) : les élections communales ne peuvent être annulées, tant par le Collège provincial que par le Conseil d'État, que pour cause d'irrégularités susceptibles d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes ayant participé au scrutin ».

La Députation permanente a considéré en conséquence que « Notre collège est incompétent pour invalider des élections communales, comme celles de Jurbise, suite à une contestation portant sur le principe même du vote automatisé. »

Le raisonnement de la Députation permanente ne peut être suivi.

2. Les dispositions normatives dont la violation fonde le moyen sont directement applicables dans l'ordre juridique interne.

Il ne s'agit donc pas pour votre conseil de prendre en considération des réflexions d'ordre politique, pas plus qu'il ne s'agit de comparer les mérites respectifs du système « papier » et du système automatisé.

Il s'agit d'examiner si les droits consacrés par les dispositions invoquées par le requérant ont été respectés dans le cadre de la procédure électorale, telle qu'elle a été organisée à Jurbise le 8 octobre 2000.

3. Notamment, le requérant invoque l'absence de transparence et de contrôle, de l'ensemble du processus électoral, par une autorité indépendante. Cette absence de transparence et de contrôle a été confirmée de manière inquiétante au cours des mesures d'instruction ordonnées par la Députation permanente du Hainaut (voy. sub. nº 13 et suivants).

Dès lors que la procédure électorale, telle qu'elle est organisée par la loi du 11 avril 1994, prive les membres des différents bureaux ainsi que les témoins de toute possibilité d'exercer un contrôle effectif sur la régularité de la procédure électorale, les candidats se voient privés de la possibilité de déceler une quelconque irrégularité qui serait susceptible de modifier la répartition des sièges et partant d'introduire tout recours.

4. Le requérant précise que les deux textes à portée internationale dont la violation est invoquée consacrent le droit à un recours effectif ou utile.

L'article 2.3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques se lit comme suit :

« Les États parties au présent pacte s'engagent :

a) Garantir que toute personne dont les droits et libertés reconnus dans le présent pacte auront été violés disposera d'un recours utile, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles;

b) Garantir que l'autorité compétente, judiciaire, administrative ou législative ou toute autre autorité compétente selon la législation de l'État, statuera sur les droits de la personne qui forme le recours et à développer les possibilités de recours juridictionnel;

c) Garantir la bonne suite donnée par les autorités compétentes à tout recours qui aura été reconnu justifié. »

L'article 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales énonce quant à lui :

« Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles. »

5. L'arrêté motivé par référence à l'article 74bis de la loi électorale communale méconnaît donc la hiérarchie des normes. Agissant en tant que juridiction, la députation permanente devait vérifier la conformité de la loi nationale avec les normes de droit international ayant effet direct dans l'ordre juridique interne (J. Velu, Droit public, Bruylant, 1986, p. 102).

L'article 74bis de la loi électorale communale doit être interprété de manière extensive de manière à ce que soit consacrée l'existence d'un recours effectif ou utile. Cette disposition n'est pas de stricte interprétation comme l'a considéré la députation permanente (p. 12 de l'arrêté).

Il convient à cet égard de relever que l'article 74bis de la loi électorale communale n'impose pas que le requérant démontre que les irrégularités vantées aient effectivement influencé le résultat du scrutin mais que la simple possibilité qu'il y ait une influence suffit pour que la juridiction du contentieux électoral puisse annuler l'élection.

Votre conseil est partant compétent pour procéder à l'examen de compatibilité du système organisé par la loi du 11 avril 1994 avec l'article 25 du Pacte international et l'article 3 de la CESDH.

Toute interprétation contraire porterait atteinte au droit au recours effectif ou utile qui prime sur l'article 74bis de la loi électorale communale.

Le moyen est recevable.

B. Fondement du moyen

B.1. Rappel des principes consacrés par les dispositions visées au moyen

6. L'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, approuvé par la loi du 15 mai 1981 (43), énonce :

« Tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l'article 2 et sans restrictions déraisonnable :

a) de prendre part à la direction des affaires publiques, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis;

b) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs;

c) d'accéder, dans des conditions générales d'égalité, aux fonctions publiques de son pays. »

Cette disposition est directement applicable dans l'ordre juridique interne.

L'article 3 du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, approuvé par la loi du 27 novembre 1996, énonce quant à lui :

« Les hautes parties contractantes s'engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans des conditions qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple sur le choix du corps législatif. »

L'expression « corps législatif » doit être interprétée en tenant compte des structures établies par les constitutions des États adhérents.

L'article 162 de la Constitution consacre le principe de l'élection directe des conseils communaux. Les articles 41 et 162 attribuent auxdits conseils le pouvoir d'édicter des règles générales et abstraites.

Il faut dès lors considérer que l'article 3 du premier protocole additionnel s'applique en matière d'élections communales.

Ainsi, les élections communales doivent-elles être libres (i), régulières (ii) et honnêtes (iii).

(i) Élections libres

7. La Déclaration universelle des droits de l'homme prévoit que toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays, soit directement, soit par l'intermédiaire de représentants librement choisis (article 21).

Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels stipule que, en vertu de leur droit de disposer d'eux-mêmes, les peuples déterminent librement leur statut politique (article premier commun aux deux pactes).

Selon le Centre pour les droits de l'homme des Nations unies, « ce qui détermine en dernier ressort si une élection est libre, c'est la mesure dans laquelle elle facilite la pleine expression de la volonté politique du peuple concerné » (44).

Pour être véritablement libres, les procédures d'élection doivent, notamment, garantir le caractère absolument confidentiel du contenu du vote. Ce caractère absolument confidentiel est consacré par l'article 25, b) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui énonce que les élections doivent avoir lieu « au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs » et par l'article 3 du premier protocole additionnel qui vise des « élections libres au scrutin secret qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple ».

(ii) Élections régulières

8. Les élections doivent être régulières. Il faut s'assurer, d'une part, du bon accomplissement des formes, des procédures et des opérations qui accompagnent le scrutin et, d'autre part, de la validité des résultats.

Le contrôle de la validité des résultats « va droit au coeur de l'opération politique que représente l'élection » (45).

Un contrôle de régularité tant externe qu'interne de l'élection doit pouvoir être opéré.

Assurer la régularité des élections exige donc un certain nombre de mesures techniques et juridiques destinées à protéger efficacement le processus électoral contre le parti pris, la fraude ou la manipulation et permettre qu'un contrôle puisse être effectivement opéré.

Il s'agit notamment de garantir l'existence de structures administratives objectives et d'assurer la présence d'observateurs indépendants (46).

(iii) Élections honnêtes

9. La Déclaration universelle des droits de l'homme de même que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques disposent que les élections doivent être « honnêtes ».

L'article 25 du Pacte international énonce ainsi que « tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l'article 2 et sans restrictions déraisonnables (...) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs ».

Les travaux préparatoires du pacte indiquent que cette condition comprend deux aspects principaux. Le premier a trait à la procédure, le second concerne les résultats (47).

10. L'effectivité des principes garantis par l'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques implique que des garanties juridiques soient établies pour préserver l'objectivité, l'impartialité, l'indépendance et l'efficacité de l'administration électorale (48).

En outre, le processus électoral doit être mené en toute transparence.

Les dispositions légales organisant les opérations de vote doivent empêcher les pratiques frauduleuses, garantir la liberté de vote, assurer le respect du secret du vote et permettre qu'un contrôle tant externe qu'interne de la régularité des opérations puisse être effectué.

À cet égard, les Nations unies imposent le respect des exigences minimales suivantes (49) :

(i) la forme des bulletins doit tenir compte de la diversité des niveaux d'instruction dans le pays;

(ii) les procédures concernant le compte des voix, la vérification, la communication des résultats et la conservation des documents officiels doivent être sûres et équitables;

des dispositions législatives doivent régir la présence d'observateurs, désignés par les parties intéressées, qui doivent pouvoir officiellement assister à l'ensemble des opérations électorales en ce compris le dépouillement des votes;

(iii) des procédures doivent être prévues pour un nouveau décompte, en cas de contestation des résultats.

Le requérant constate qu'aucune de ces exigences n'a été respectée dans le cadre des élections qui se sont tenues à Jurbise selon la procédure de vote automatisé. Chacune des violations de ces exigences fonde le moyen qui se décompose en trois branches.

B.2. Examen des branches du moyen

Première branche : violation du principe selon lequel la forme des bulletins doit tenir compte de la diversité des niveaux d'instruction dans le pays, du principe selon lequel la procédure électorale doit faciliter la pleine expression de la volonté de l'électeur et violation du principe selon lequel l'élection doit avoir lieu au scrutin secret.

11. Pour être libres et honnêtes, les élections doivent être organisées en utilisant un support de vote qui tient compte des différents niveaux d'instruction des citoyens appelés à s'exprimer. Il s'agit de faciliter la pleine expression de la volonté de l'électeur. Eu égard à cet objectif, cette obligation doit être envisagée comme une obligation de résultat.

À Jurbise, en exécution de la loi du 11 avril 1994, les bulletins de vote ont été remplacés par une carte magnétique, un écran de visualisation et un crayon optique.

Dans l'état actuel du degré de pénétration de l'informatique dans les ménages, il convient de constater que tous les citoyens ne sont pas familiarisés avec le fonctionnement d'un ordinateur. De nombreux électeurs ont été, pour la première fois de leur vie, confrontés à un ordinateur le jour du scrutin qui s'est déroulé le 8 octobre 2000.

Il convient de s'interroger si l'utilisation de l'informatique comme moyen d'expression du suffrage tient compte de la diversité des niveaux d'instruction des électeurs comme l'imposent les Nations unies.

Le requérant constate que le législateur a lui-même considéré que bon nombre de citoyens ne sont pas familiarisés à l'usage d'ordinateurs.

Ainsi, on peut lire dans l'exposé des motifs du projet de loi modifiant la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé, projet qui a été promulgué le 12 août 2000, à propos de la visualisation par l'électeur de son vote :

« L'électeur ne peut cependant plus recommencer la procédure de vote parce que cette possibilité n'existe pas non plus en cas de vote au moyen d'un bulletin traditionnel. En outre, offrir une telle possibilité à l'électeur pourrait perturber le bon déroulement des opérations électorales et semer la confusion pour nombre d'électeurs qui ne sont pas familiarisés avec l'informatique (50). »

Le législateur constate donc que des problèmes importants seront rencontrés par de nombreux électeurs. Ce faisant, il édicte une norme visant à empêcher que les erreurs qu'il perçoit comme inévitables, ne puissent être corrigées « pour ne pas perturber le bon fonctionnement des opérations ».

En outre, à Jurbise, il est à remarquer qu'aucune séance d'information ou de familiarisation avec le système informatique n'a été organisée pour le scrutin du 8 octobre 2000.

L'organisation du scrutin sur support automatisé ne respecte pas, alors qu'elles sont constatées, les différences de niveau d'instruction ou de familiarisation avec l'informatique.

Par ailleurs, il est indéniable que le comportement électoral de l'électeur, aguerri ou non à la technique informatique, est modifié face à la machine à voter.

La procédure de vote est particulière puisque l'électeur doit, avant d'accéder aux listes des candidats, activer le numéro ou le sigle de la liste sur laquelle le candidat préféré se présente. Ceci implique que l'électeur connaisse cette liste, ce qui est loin d'être toujours le cas, particulièrement dans le cadre d'élection de proximité où la personnalité du candidat prime souvent sur la liste sur laquelle il se présente.

La procédure électorale consacrée par la loi du 11 avril 1994 ne garantit pas « l'expression libre de la volonté des électeurs ». Il y a violation de l'article 24, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

12. En outre, des élections libres, au sens de l'article 25 du pacte et de l'article 3 du premier protocole, impliquent que le secret du suffrage soit garanti.

Le 8 octobre 2000, de nombreuses personnes (plusieurs dizaines par bureau selon des témoins) ont été contraintes de recourir à l'assistance des membres du bureau de vote pour pouvoir émettre leur suffrage, non en raison d'un handicap physique nécessitant une assistance mais en raison de difficultés rencontrées face à la machine, sans que cela ne soit acté au procès-verbal.

Il est à noter, à cet égard, que si l'article 37, alinéa 4, de la loi électorale communale précise que l'identité de la personne qui, justifiant d'un handicap, s'est fait assister dans l'isoloir et celle de la personne l'ayant accompagnée doivent être actées au procès-verbal, tel n'est pas le cas pour l'assistance « technique ». En outre, selon les termes de l'alinéa 5 de cette disposition, la réalité ou l'importance de la seule infirmité physique peut être contestée par les témoins ce qui n'est pas le cas dans l'hypothèse d'un handicap « informatique ».

Dès lors la référence faite par la députation permanente à la jurisprudence selon laquelle votre conseil « dénie, (...), le droit (...), de couvrir, par une réclamation déposée alors que les résultats électoraux sont connus, l'éventuelle défaillance de leur témoin de liste n'ayant pas déposé en temps utile une contestation auprès du bureau de vote où il siégeait » (arrêté, p. 6, 1er paragraphe) n'est pas pertinente.

L'assistance « technique », organisée par l'article 9 de la loi du 11 avril 1994, n'est pas exceptionnelle contrairement à l'assistance pour raison de handicap physique. Elle n'est pas liée à une exigence inhérente à l'électeur. Elle est généralisée et imposée par les modalités du vote organisé par le législateur.

Il y a, à une échelle importante, atteinte à la liberté de l'électeur, et en tout cas violation de la confidentialité du vote.

En effet, la liberté de vote implique que, dans l'isoloir, l'électeur soit dans une disposition d'esprit telle qu'il puisse, en pleine conscience, déterminer son choix politique en toute indépendance (51).

Le Conseil d'État a eu l'occasion de dire de manière très claire que l'accompagnement d'une personne invalide dans l'isoloir « comporte inévitablement un risque d'influence du vote exprimé par la personne accompagnée et de non-observation du secret de ce vote » (CE, él. Heverlee, nº 11.153 du 31 mars 1965).

Dans un autre arrêt, après avoir constaté que « l'accompagnement d'un électeur enferm[e] une menace pour la liberté de vote », la haute juridiction administrative dit, toujours à propos de l'assistance aux personnes souffrant d'un handicap, que « la loi entend éviter des abus, non seulement dans le souci de protéger la liberté de vote, mais surtout pour garantir l'expression de la volonté réelle du corps électoral » (CE, él. Verzeke-Ruddeshove, nº 11.181 du 14 avril 1965).

En organisant un système de vote automatisé tout en sachant que cela allait perturber de nombreux électeurs qui devront recourir à une assistance technique organisée par ailleurs, le législateur a pris des dispositions qu'il savait violer le principe de liberté de vote et mettre à mal les garanties de l'expression réelle du corps électoral.

Dans l'état actuel de la pénétration de l'informatique dans les diverses couches de la population, l'adoption d'un système de vote automatisé ne garantit pas le secret du scrutin, particulièrement dans une commune rurale comme c'est le cas à Jurbise où tout le monde se connaît.

Sur ce point également, la première branche du moyen est fondée.

Deuxième branche : les procédures concernant le compte des voix, la vérification, la communication des résultats et la conservation des documents officiels doivent être sûres et équitables; des dispositions législatives doivent régir la présence d'observateurs, désignés par les parties intéressées, qui doivent pouvoir officiellement assister à l'ensemble des opérations électorales en ce compris le dépouillement des votes.

13. Le droit à des élections honnêtes implique un contrôle indépendant des opérations de vote et de dépouillement.

En adoptant la législation électorale, le législateur a pris conscience des risques que présentait une intervention trop directe des autorités publiques dans le processus électoral. Il a donc mis en place les bureaux électoraux, chargés de tâches précises dans l'organisation de l'élection.

Ces bureaux électoraux sont les organes du Collège électoral.

Le collège électoral constitue l'ensemble des électeurs d'un arrondissement dont les limites géographiques ont été préalablement déterminées. Il s'agit d'une autorité publique tout a fait particulière, qui n'existe que par une sorte de fiction, le jour de l'élection. Cette autorité publique est pourvue d'organes embryonnaires à savoir les bureaux électoraux (52).

Le bureau est investi de tâches organisationnelles, qu'il cumule avec des tâches spécifiques de contrôle. C'est une administration temporaire, constituée pour les besoins d'une élection. Elle doit être autonome. Le bureau est déchargé de tout lien d'allégeance hiérarchique vis-à-vis du ministre de l'Intérieur (53).

L'indépendance des bureaux électoraux est accentuée par le fait que la loi prescrit que les autorités judiciaires soient associées étroitement au processus électoral. La direction du bureau principal est assurée par un magistrat ou un électeur désigné par un magistrat. Les présidents des bureaux de vote sont désignés par le président du bureau principal.

14. Dans le cadre du système de vote automatisé le bureau de vote et le bureau de dépouillement sont dessaisis de toute possibilité d'exercer un contrôle effectif de la régularité des opérations. Il n'y a d'ailleurs plus de dépouillement puisque toutes les opérations sont effectuées par une machine.

La loi du 4 avril 1994 organisant le vote automatisé consacre l'existence d'un « collège d'experts » dont les membres peuvent être désignés par la Chambre des représentants, le Sénat, les Conseils régionaux et le Conseil de la communauté germanophone (54).

Ces experts contrôlent l'utilisation et le bon fonctionnement de l'ensemble des systèmes de vote et de dépouillement automatisés ainsi que les procédures concernant la confection, la distribution et l'utilisation des appareils, des logiciels et des supports d'information électroniques (55). Ils reçoivent du ministre de l'Intérieur le matériel ainsi que l'ensemble des données, renseignements et informations utiles pour exercer ce contrôle.

Ils peuvent notamment vérifier la fiabilité des logiciels et des machines à voter, la transcription exacte des votes émis sur la carte magnétique, la transcription exacte par l'urne électronique des suffrages exprimés ainsi que leur totalisation et la lecture optique des votes exprimés (56).

Ils remettent leur rapport au ministre de l'Intérieur et aux assemblées législatives fédérales, au plus tard dix jours après la clôture du scrutin communal.

La loi ne prévoit pas l'obligation de désigner ce collège d'experts. Les différentes assemblées législatives fédérales ou fédérées ont la faculté de désigner un ou deux experts, soit neuf au maximum pour l'ensemble du territoire.

Après avoir procédé à une analyse fouillée du système organisé, le Président du tribunal de première instance de Bruxelles, siégeant en référé, a constaté que ces experts sont techniquement et humainement dans l'impossibilité de contrôler l'ensemble du système de manière à apporter dans les limites du raisonnable une garantie suffisante que le système soit fiable, n'entraîne pas d'erreurs, et ne sera pas fraudé, soit dans l'enregistrement des votes, soit dans le comptage de ceux-ci (tribunal de Bruxelles, référé, 15 septembre 2000, pièce 5).

En outre, dans la même ordonnance, le président du tribunal de première instance de Bruxelles constate :

« au niveau des apparences de droit, il ne peut être considéré qu'un tel collège d'experts, élu par les majorités des assemblées, soit une instance indépendante du pouvoir en place.

Le défendeur (l'État belge, représenté par le ministre de l'Intérieur, ndlr) argue que le système a été constamment amélioré par différentes lois et que les observations du collège d'experts qui a rendu son rapport suite aux élections du 13 juin 1999 ont été rencontrées par la loi du 12 août 2000.

Si l'on ne peut contester que le législateur a cherché à améliorer le système, il n'en reste pas moins que l'exigence fondamentale d'une possibilité de contrôle indépendant du pouvoir exécutif sur les opérations de vote et donc sur les logiciels utilisés au moment du vote et du dépouillement, et ce tant au point de vue de la fiabilité nécessaire pour éviter les erreurs, que de la fiabilité nécessaire pour éviter la fraude, n'est prima facie pas rencontrée.

C'est sans pertinence que le défendeur avance que le principe et le mode de désignation des experts ont été jugés conformes à la Constitution par arrêt du 21 juin 2000 par la Cour d'arbitrage. En effet, la Cour d'arbitrage n'a été saisie que du contrôle de conformité de ces dispositions au regard des articles 10 et 11 de la Constitution, soit l'obligation de non-discrimination, mais nullement du contrôle de conformité de cette loi au regard de l'article 25 b du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Il apparaît prima facie, que les droits garantis par l'article 25 b du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont incompatibles avec un système où les erreurs et les fraudes ne pourraient être détectées que par le pouvoir en place au moment des élections et non pas par des instances ou personnes indépendantes. »

15. À Jurbise, le processus électoral a été émaillé de plusieurs incidents tant au cours du déroulement des opérations de vote que dans le cadre du dépouillement.

Des interventions techniques ont été effectuées par des membres du personnel communal et par un technicien d'une société privée.

Il est à noter qu'un membre du personnel communal a été désigné par le Collège (majorité absolue) pour effectuer toutes les interventions techniques avant, pendant et après les élections, tant au niveau des bureaux de vote que du bureau de dépouillement. Cette désignation ne garantit pas l'indépendance exigée par les dispositions qui fondent le moyen.

Des manipulations ont été effectuées sur des disquettes contenant les votes exprimés qui sont irrégulièrement sorties de certains bureaux à l'intervention d'une personne non habilitée à le faire alors que la procédure légale impose une relecture des cartes magnétiques en cas de problème de lecture d'une disquette issue d'un bureau de vote. Cet incident a été confirmé par le président du bureau de dépouillement lors de la première réunion technique qui s'est tenue le 12 décembre 2000.

Les élections se sont déroulées en dehors de tout contrôle par un organe indépendant; les bureaux, organes auxquels reviennent en principe les prérogatives de contrôle, étaient privés de toute possibilité de comprendre et de garantir le bon fonctionnement des opérations.

Les membres de ces bureaux ont dû s'en remettre totalement à des employés communaux ou techniciens privés, qui ont pu opérer des manipulations incontrôlées sur le système.

Dans le cadre de l'instruction de la réclamation du requérant, la Députation permanente du Hainaut a fait procéder à deux vérifications. D'une part, les copies de disquettes du bureau de vote nº 11, qui, le 8 octobre 2000, ont permis l'élaboration du procès-verbal, ont été comparées; d'autre part, il a été procédé à la retranscription des données conservées dans les EPROM de chaque urne et à un recomptage électronique de ces résultats.

Force est de constater que ces mesures d'instruction n'ont été possibles qu'à l'intervention du directeur de développement de l'association momentanée « Philips-Stesud ». C'est d'ailleurs cette personne qui a réalisé toutes les opérations effectuées le 12 décembre 2000.

Les manipulations effectuées le 15 décembre 2000 l'ont été par des agents de la Province mais sous les instructions du directeur de développement de « Philips-Stesud » et avec son matériel.

Il est à noter que l'informaticienne de la province est en réalité psycho-pédagogue de formation, bien qu'elle exerce les fonctions d'informaticienne. Il ne s'agit manifestement pas d'une personne experte en programmation, qualité nécessaire au contrôle critique des manipulations effectuées.

Il ressort de la procédure devant la Députation permanente qu'aucun contrôle des résultats des élections ne pourrait être opéré sans que les opérations ne soient dirigées par un technicien de la firme qui a conçu le logiciel ou par un informaticien du ministère de l'Intérieur.

L'on peut aisément imaginer qu'une firme privée n'ait pas intérêt, dès lors qu'elle est en concurrence avec d'autres sociétés, à ce que des erreurs soient mises en évidence dans le cadre d'une procédure de contrôle des résultats des élections. Le personnel d'une telle société ne présente dès lors pas les garanties d'indépendance exigées par l'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Il est à noter que lors de la mesure d'instruction effectuée le 15 décembre 2000, le délégué de la société informatique a exposé avoir préparé un logiciel créé pour la circonstance permettant de vérifier les résultats de chaque liste, notamment le nombre de vote en case de tête, et ce, pour chaque bureau de vote.

La procédure électorale telle qu'organisée par la loi du 11 avril 1994 ne permet pas de garantir la tenue d'élections honnêtes et régulières au sens de l'article 25 du Pacte international et l'article 3 du premier protocole additionnel à la CESDH et il convient partant d'annuler les élections qui se sont tenues le 8 octobre 2000 à Jurbise.

Troisième branche : des procédures doivent être prévues pour un nouveau décompte, en cas de contestation des résultats

16. Le résultat des votes en case de tête pour chacune des listes, dans le contexte tel qu'il apparaît de la lecture des différents procès-verbaux, ainsi que les incidents intervenus au bureau de dépouillement inclinent à penser qu'un recomptage des votes eût été nécessaire.

Ce recomptage n'a pas eu lieu.

Compte tenu des circonstances et dans un souci de transparence et d'honnêteté, le requérant a sollicité, à titre de mesure d'instruction, la relecture des cartes magnétiques contenant les suffrages exprimés et qu'il soit ainsi procédé à un nouveau dépouillement.

La transparence est une exigence fondamentale d'une élection libre et honnête.

Seul ce recomptage permettrait de légitimer, à l'égard du requérant mais surtout à l'égard de l'ensemble des électeurs, des résultats qui n'ont pu faire l'objet d'aucun contrôle démocratique.

La députation permanente du Hainaut n'a pas fait droit à cette demande mais a toutefois fait procéder à deux mesures d'instruction.

Ces deux mesures d'instructions ne paraissent pas pertinentes aux yeux du requérant.

Ces mesures ont en réalité été effectuées, en présence de représentants de la députation permanente, d'agents fédéraux et provinciaux et de représentants des listes candidates à l'élection, par la firme privée qui a créé le logiciel électoral (le 12 décembre 2000) ou à tout le moins sous la direction du représentant de cette firme (le 15 décembre 2000).

Les vérifications qui ont été effectuées n'ont aucune valeur légale dès lors que les procédures consacrées par la loi du 11 avril 2000 n'ont pas été respectées. En vertu de la loi, en cas de problème lors du dépouillement des votes, tel qu'il s'est produit à Jurbise, seule un recomptage des cartes magnétiques devait être envisagé.

En effet, les EPROM dont le contenu a été recomptabilisé le 15 décembre 2000 n'ont aucune valeur légale, leur existence n'étant pas consacrée dans la loi. Il est d'ailleurs piquant de constater que ceux-ci sont accessibles sans être protégés par les scellées des urnes ...

Le requérant retient des déclarations de l'informaticien créateur du logiciel que les EPROM peuvent être réinitialisées en utilisant « la disquette rouge qui était pour le bureau nº 11 défectueuse » (pièce 3).

En outre, il a été constaté aux procès-verbaux des réunions techniques que les formatages des disquettes ont été effectués en utilisant un programme spécifique délivré par le ministère de l'Intérieur.

Toutes les opérations ont été effectuées sur du matériel dont l'origine ne paraît pas fiable compte tenu des critères d'indépendance consacrés par les textes internationaux.

Force est de constater que la loi du 11 avril 1994 ne prévoit aucune procédure de contrôle des résultats en cas de contestation. Les modalités d'un nouveau décompte ne sont pas organisées.

Partant, la troisième branche du moyen est fondée.

Moyen pris de la violation de l'article 18 de la loi du 11 avril 1924

17. L'article 18 de la loi du 11 avril 1994 se lit comme suit :

« Le président du bureau principal de canton ou communal selon le cas, procède, dès réception des supports de mémoire provenant du bureau de vote, à l'enregistrement du support original sur le support de mémoire destiné à la totalisation des votes.

Si l'enregistrement au moyen du support de mémoire original se révèle impossible, le président du bureau principal recommence l'opération d'enregistrement au moyen de la copie de ce support.

Si cette opération se révèle également impossible, le président du bureau principal requiert de la commune concernée la fourniture de l'urne électronique correspondante; après l'avoir descellée, il procède à un enregistrement complet des cartes magnétiques qu'elle contient.

L'enregistrement du bureau de vote terminé, le président scelle à nouveau l'urne et la retourne à la commune. Il procède ensuite à l'enregistrement du nouveau support de mémoire ainsi constitué. »

Le soir des élections du 8 octobre 2000, le président du bureau principal communal de Jurbise n'a pas pu lire la disquette contenant les résultat du bureau de vote nº 11.

Il est établi par le procès-verbal du bureau de dépouillement et par les déclarations du président de ce bureau qu'un tiers, désigné par le collège sortant (majorité absolue reconduite), a quitté le bureau muni de la disquette litigieuse afin d'effectuer on ne sait quelle manipulation au bureau principal de canton. À son retour, une autre disquette aurait fonctionné.

Le procès-verbal du bureau de dépouillement indique que la disquette défectueuse aurait été « réimprimée » à Lens. Le requérant s'interroge sur le sens qu'il convient de donner à ce terme dès lors que l'opération de dépouillement consiste en réalité à transférer les données contenues dans les disquettes des bureau de vote sur un support de mémoire de comptabilisation. Au niveau du bureau de dépouillement aucune impression ne doit avoir lieu si ce n'est celle du procès-verbal de clôture des élections, soit après que les opérations de dépouillement aient été terminées.

L'intervention, quelle qu'en soit la nature, d'un tiers enfreint la procédure arrêtée par l'article 18 de la loi du 11 avril 1994 et engendre, comme le relève judicieusement la députation permanente, des doutes quant aux résultats délivrés par la disquette « réimprimée ».

En vertu de l'article 18, le président du bureau de dépouillement aurait dû se faire remettre une copie de la disquette du bureau de vote en possession du président du bureau principal de canton.

Il est à noter que le président du bureau de dépouillement s'est fait adresser la copie de la disquette d'un autre bureau (nº 9) suite à un problème de lecture de la disquette émanant de ce bureau de vote puisque le procès-verbal du bureau de dépouillement indique, à ce propos :

« La disquette `copie' a dû être utilisée car l'écran indiquait `urne non clôturée' si utilisation de la disquette initiale ».

En ce qui concerne le bureau nº 11, une procédure différente a été appliquée, sans que le requérant n'ait pu obtenir une explication.

18. Dans leur réclamation électorale portée devant la députation permanente, le requérant sollicitait, à titre subsidiaire et avant dire droit, un recomptage des cartes contenues dans l'urne du bureau de vote nº 11.

La députation permanente, tout en constatant que la procédure de dépouillement n'avait pas été respectée n'a pas fait droit à cette demande. Cependant, elle a fait procéder à une comparaison de disquettes en date du 12 décembre 2000 et à la relecture des EPROM en date du 15 décembre 2000.

Comme le requérant l'a indiqué ci-avant, ces mesures d'instructions ne paraissent pas pertinentes.

Plus précisément, en ce qui concerne la première mesure d'instruction :

19. Il a été procédé à la comparaison du contenu de la disquette provenant du bureau de dépouillement avec les deux disquettes en possession du président du bureau principal du canton.

Force est de constater que des manipulations ont été effectuées sur ces trois disquettes par le tiers qui s'est rendu à Lens. En effet, dès lors que de retour du bureau principal de canton il a pu présenter une disquette ne présentant aucun problème de lecture, il paraît évident qu'une intervention incontrôlée a été effectuée audit bureau. En conséquence, la comparaison a été faite entre des disquettes ayant été manipulées et ayant conduit à la comptabilisation des résultats contestés.

Il est apparu en outre que les fichiers contenus sur ces disquettes portaient des dates et des heures différentes. Il a été répondu par le représentant de la firme « Philips-Stesud » que le programme ne comprend pas d'horloge interne. Il est de ce fait impossible, comme le constate la députation permanente, « de déterminer avec précision le moment où s'effectuent toutes les interventions sur les supports de mémoire, du moins celles se déroulant après la clôture des opérations de vote, afin de lever toute ambiguïté à ce propos » (arrêté, p. 10).

Le requérant constate cependant que la mention des heures est indiquée dans les procès-verbaux des différents bureaux. L'explication donnée par l'informaticien ne convainc pas.

Le requérant relève enfin que les disquettes qui ont été apportées à la députation permanente n'avaient pas été transmises à qui de droit à la clôture des opérations électorales. Il n'appartenait pas aux présidents des bureaux de les conserver.

En ce qui concerne la seconde mesure d'instruction

20. Il a été procédé à une lecture des EPROM de chaque urne électronique. Il a pu être constaté que ces supports de mémoire étaient accessibles, n'étant pas protégés par les scellés de l'urne.

Le responsable de la firme « Philips-Stesud » a été interrogé sur la possibilité de modifier le contenu d'une EPROM. Il a répondu : « il faut démarrer le bureau de vote avec la disquette rouge, qui était pour le bureau de vote nº 11 défectueuse » (annexe 2, pièce 3).

Le requérant rappele, à cet égard, qu'il indiquait dans sa réclamation portée devant la Députation permanente, qu'à sa connaissance, il y a eu une « manipulation effectuée par un employé communal sur une machine, avec usage d'une disquette d'origine extérieure au bureau, non renseignée au procès-verbal (pièce 1, p. 5). Cette information doit être prise en considération, même en l'absence d'indication dans le procès-verbal, dès lors que le requérant fait valoir des éléments sérieux permettant de mettre en doute la régularité de l'ensemble des opérations à partir du bureau nº 11. Les allégations du requérant sont concordantes et inclinent à penser qu'elles sont fondées.

La procédure suivie au bureau de dépouillement n'est pas consacrée par la loi du 11 avril 1994 qui ne prévoit que l'utilisation de la disquette copie ou la relecture des cartes magnétiques.

Dès lors que la comparaison des disquettes du bureau nº 11 n'apparaît pas pertinente, ce qu'a jugé la Députation permanente en ordonnant une seconde mesure d'instruction, il convenait, avant dire droit de procéder à un recomptage des cartes.

Une telle mesure paraît aujourd'hui totalement inopérante puisqu'il a été constaté que deux urnes ont été descellées, dont celle du bureau 11.

À défaut de pouvoir effectuer un contrôle des résultats, et suite à l'irrégularité commise au bureau de dépouillement, irrégularité susceptible d'avoir influencé la répartition des sièges, il convient de faire droit à la demande et d'annuler les élections de Jurbise.

Moyen pris de l'irrégularité du nombre de votes enregistrés

21. Dans sa réclamation électorale, le requérant invoquait une irrégularité de la liste des électeurs. Celle-ci, arrêtée le 1er août 2000, comprend 6 448 électeurs.

Interpellé à cet égard, le secrétaire communal a indiqué qu'aucun recours visant à obtenir une inscription n'a été introduit après cette date.

Les chiffres officiels du ministère de l'Intérieur, diffusés par le site internet de la RTBF, laissent apparaître qu'il y aurait eu 6 525 convocations. En effet, le ministère de l'Intérieur recense 5 722 votes valables exprimés et 803 abstentions (dont 300 blancs).

En confrontant ces chiffres, on obtient une différence de 77 électeurs qui n'auraient pas été régulièrement inscrits sur la liste et dès lors régulièrement convoqués. Ils ont cependant pu prendre part au vote.

Le requérant constatait que, dès lors que le dernier siège a été attribué sur base de quelques dizaines de voix, cette irrégularité a pu entacher le résultat des élections.

Dans sa réclamation, le requérant indiquait que des témoins pouvaient attester que des convocations ont été rédigées et délivrées dans certains bureaux de vote.

Dans son arrêté prononcé le 15 décembre 2000, la Députation permanente rejette cet argument tout en ayant dû constater que 15 votes ont été enregistrés suit à une manoeuvre frauduleuse hypothétique, dès lors que le nombre de votes valables enregistrés est supérieur au nombre d'électeurs qui se sont présentés dans les isoloirs.

Le requérant conteste la pertinence de la démonstration contenue dans l'arrêté. La Députation permanente s'est en effet limitée à contrôler le nombre de personnes qui se sont présentées dans les bureaux de vote.

Le requérant considère que, pour pouvoir vérifier combien de convocations auraient été adressées sur base d'une liste complétée après le 1er août 2000, il convient de comptabiliser les personnes qui se sont abstenues d'aller voter et de vérifier si le chiffre obtenu correspond ou non à ce qui est présenté par le ministère de l'Intérieur.

Dès lors qu'il apparaîtrait des listes à disposition des présidents de bureau de vote, que se sont bien 503 personnes qui se sont abstenues de voter (803 présentés comme abstentions - 300 blancs), il conviendrait de constater que 77 personnes ont été irrégulièrement convoquées.

Le requérant sollicite, avant dire droit, qu'il soit procédé à une mesure d'instruction, permettant de vérifier le nombre d'abstention tel qu'il ressort des listes à disposition des présidents des bureaux de vote.

Seule cette vérification permet de vérifier la fiabilité des chiffres officiels du ministère de la Justice.

À ces causes

Le requérant vous prient, monsieur le premier président, mesdames, messieurs les présidents et conseillers qui composent le Conseil d'État, d'annuler les élections communales qui se sont tenues le 8 octobre 2000 à Jurbise.

À titre subsidiaire, avant dire droit, procéder à une mesure d'instruction permettant de contrôler l'exactitude du taux d'abstention retenu par le ministère de l'Intérieur, cette mesure étant destinée à contrôler la régularité du nombre de convocations.

Bruxelles, le 29 décembre 2000.

Pour copie conforme

Pour le requérant,

son conseil,

Vincent LETELLIER.

INVENTAIRE

1. réclamation électorale;

2. procès-verbal de la réunion technique du 12 décembre 2000;

3. procès-verbal de la réunion technique du 15 décembre 2000;

4. arrêté de la Députation permanente du Hainaut du 15 décembre 2000;

5. ordonnance du président du tribunal de première instance de Bruxelles du 15 septembre 2000.

1.4. Mémoire en intervention volontaire du ministre de l'Intérieur du 16 janvier 2001.

MÉMOIRE

Pour : Monsieur le ministre de l'Intérieur, dont les bureaux sont établis à 1000 Bruxelles, 66, rue Royale

­ Partie intervenante

Avocat : Maître Michel Mahieu, avocat à la Cour de cassation, dont le cabinet est établi à 1050 Bruxelles, 523, avenue Louis, où il est fait élection de domicile

Contre : Monsieur Mario Longo, candidat élu, domicilié à 7050 Masnuy-Saint-Jean, 37, Chemin de Mons

­ Partie requérante

Avocat : Maître Vincent Letellier, avocat à 1020 Bruxelles, 86, avenue de l'Araucauria


Vu la requête sollicitant l'annulation des élections communales de Jurbise,

Vu l'affichage de l'avis relatif au recours précité effectué le 8 janvier 2001,

En application des articles 5 et 6 de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'État en cas de recours prévu par l'article 76bis de la loi électorale communale, le ministre de l'Intérieur a l'honneur de vous adresser le présent mémoire.

I. Objet du recours

Selon le dispositif du recours, la partie requérante demande « d'annuler les élections communales qui se sont tenues le 8 octobre 2000 à Jurbise; à titre subsidiaire, avant dire droit de procéder à une mesure d'instruction permettant de contrôler l'exactitude du taux d'abstention retenu par le ministère de l'Intérieur, cette mesure étant destinée à contrôler la régularité du nombre de convocations ».

II. Quant à l'intervention du ministre de l'Intérieur

En vertu des articles 5 et 6 de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 précité, toute personne pouvant justifier d'un intérêt a le droit d'envoyer un mémoire en réponse au Conseil d'État.

Le ministre de l'Intérieur considère qu'il a un intérêt fonctionnel à intervenir à la procédure, dès lors que la réclamation de la partie requérante met en cause les dispositions de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé.

Pour justifier son intervention devant votre Conseil, le ministre de l'Intérieur estime qu'il faut avoir égard aux éléments suivants :

­ la réclamation constitue explicitement en un procès fait à la réglementation sur le vote automatisé,

­ plusieurs dispositions de la loi du 11 avril 1994 chargent le ministre de l'Intérieur d'assurer l'exécution de cette loi. Le ministre de l'Intérieur a donc un intérêt fonctionnel à contester les griefs dirigés à l'encontre de la loi.

Le ministre est donc une « personne pouvant justifier d'un intérêt », ayant le droit d'envoyer un mémoire en réponse au Conseil d'État, au sens de l'article 6, alinéa premier, de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 déterminant la procédure devant votre conseil en cas de recours prévu par l'article 76bis de la loi électorale communale.

Certes, en règle, les personnes susceptibles d'intervenir sont plutôt les réclamants devant la Députation permanente ou le collège juridictionnel, les signataires d'un acte de présentation, ainsi que les élus ou suppléants constatant que la validation de leurs pouvoirs est contestée. La doctrine a cependant constaté que « par rapport au contentieux de l'annulation, les règles particulières relatives aux parties démontrent la volonté de limiter le nombre de celles-ci, dont on peut se demander si elle n'est pas quelque peu excessive » (en ce sens R. Andersen, B. Lombaert et S. Depré « Les contentieux méconnus » dans B. Blero (dir.), Le Conseil d'État de Belgique. Cinquante ans après sa création (1946-1996), Bruylant, Bruxelles, 1999, p. 298; M. Verdussen, « Le Conseil d'État et le droit à des élections honnêtes », note sous CE, El. Ham-sur-Heure nº 53.390, 19 mai 1995, APT, 1996, p. 56).

L'intervention du ministre de l'Intérieur est donc recevable.

III. En droit

III.1. Irrecevabilité du recours pour absence d'intérêt

Le recours est introduit par un candidat élu.

Le recours est dès lors irrecevable à défaut d'intérêt.

Si l'article 74 ne permet qu'aux candidats d'exercer une réclamation, il suppose dans leur chef l'existence d'un intérêt, c'est-à-dire la démonstration que l'irrégularité dénoncée a affecté défavorablement leur situation et que sans cette irrégularité, le résultat des élections eût pu être différent (sur cette exigence d'intérêt, voir J. Dujardin, W. Somers, L. Van Summeren et J. Debyser, Praktisch Handboek voor Gemeenterecht, Die Keure, 2000, sixième édition, p. 22-23).

M. Longo ayant été déclaré élu, il n'a pas d'intérêt à introduire une réclamation et celle-ci est dès lors irrecevable.

III.2. À titre subsidiaire : quant aux moyens d'annulation

Préalablement à la réfutation des trois moyens d'annulation, on rappellera que la députation permanente du Hainaut a, en présence de fonctionnaires du ministère de l'Intérieur, de fonctionnaires provinciaux et du réclamant, procédé à une analyse fouillée du système de vote automatisé et de sa fiabilité.

Deux séances techniques de vérification ont été organisées les 12 décembre et 15 décembre 2000. Elles étaient justifiées, d'une part, par des chiffres « extraordinairement » similaires (255 votes en case de tête pour 3 partis se présentant à Jurbise) et d'autre part, en raison du fait que les instructions prévues pour remédier à l'impossibilité de lecture de la disquette de résultats du bureau de vote nº 11 n'avaient pas été parfaitement respectées.

Le résultat de ces investigations a permis à la députation permanente de constater que le chiffre de 255 n'était pas arbitraire ou inexplicable mais confirmé après vérifications approfondies. Par ailleurs, l'examen des disquettes a abouti à un constat d'identité parfaite entre elles, nonobstant la méconnaissance purement formelle de la procédure réglementaire.

C'est à la lumière de ce qui précède que, tant en fait qu'en droit, les trois moyens d'annulation peuvent être rejetés.

A. ­ Quant au premier moyen

A.1. Rappel du moyen

Le moyen est pris de la violation de l'article 25 b) du Pacte international de New York relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 et de l'article 3 du premier protocole additionnel à la Convention européenne de Sauvegarde des droits de l'homme et des Libertés fondamentales,

en ce que, première branche, la liberté et le secret de vote ont été méconnus compte tenu de la diversité du niveau d'instruction des électeurs par rapport à l'utilisation de l'informatique; pour le réclamant, à défaut de séances d'information ou de familiarisation avec le vote automatisé, de nombreux électeurs ont dû avoir recours à une assistance « technique » pour exercer leur vote, au mépris des dispositions visées au moyen,

et en ce que, deuxième branche, les procédures concernant le décompte des voix, la vérification de la communication des résultats et la conservation des documents officiels doivent être effectuées par une autorité indépendante; se fondant sur une ordonnance prononcée le 15 septembre 2000 par le tribunal de première instance de Bruxelles siégeant en référé, le réclamant considère que cette indépendance n'a pas été garantie, ni de manière générale, ni en particulier à Jurbise; plus précisément, les interventions techniques ont été effectuées par des membres du personnel communal et par un technicien d'une société privée; les mesures techniques ordonnées par la députation permanente du Hainaut ont également été faites par les mêmes personnes, qui ne satisfaisaient pas soit aux critères de compétence, soit aux critères d'indépendance légalement requis,

et en ce que, troisième branche, en raison de la contestation des résultats, une procédure de recomptage des votes doit être ordonnée; pour le requérant, les mesures d'instruction ordonnée par la députation permanente n'ont pas apporté de résultats fiables compte tenu des critères d'indépendance à respecter en matière électorale.

A.2. Réfutation

A.2.a) Irrecevabilité du moyen

Pour le ministre de l'Intérieur, tel qu'il est formulé, le moyen est irrecevable au regard de la mission légale confiée à votre Conseil.

Pour rappel, en vertu de l'article 74bis de la loi électorale communale, « les élections ne peuvent être annulées, que pour cause d'irrégularités susceptibles d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes ». Il est incontestable que le réclamant ne fournit aucun élément de fait précis visant une ou plusieurs irrégularités susceptibles d'avoir influencé la répartition des sièges entre les listes à Jurbise.

Sa critique est d'ordre général, mélangeant des éléments d'opportunité et de droit.

Votre Conseil contrôle d'abord si l'irrégularité soulevée est réelle, ensuite si elle a exercé une influence sur le comportement des électeurs et enfin, si elle a effectivement influencé la répartition des sièges entre les listes (sur les trois étapes de ce contrôle, voir R. Andersen, B. Lombart et S. Depré, « Les contentieux méconnus », dans B. Bléro (dir.), Le Conseil d'État de Belgique. Cinquante ans après sa création (1946-1996), Bruylant, Bruxelles, 1999, p. 292-293). La critique dirigée contre la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé doit dès lors être déclarée irrecevable à défaut de préciser concrètement en quoi l'application qui en a été faite aurait engendré des irrégularités susceptibles d'affecter le comportement des électeurs, et en outre, la répartition des sièges entre les listes.

A.2.b) Absence de fondement du moyen

À titre très subsidiaire, le ministre de l'Intérieur considère que le moyen est non fondé.

· Quant à la première branche

La critique relative à l'inadéquation du système de vote informatisé par rapport au niveau de connaissance générale de la population en matière informatique est de pure opportunité. Elle revient à mettre en cause le principe même du vote informatisé, décidé par le législateur depuis la loi du 11 avril 1994.

Par ailleurs, l'appréciation subjective du requérant est contredite par le rapport déposé par le collège d'experts chargés du contrôle des systèmes de vote et de dépouillement automatisés (doc. Chambre, nº 923-01, 2000/2001 et doc. Sénat, nº 2-7/2, 2000/2001). Ce rapport ne considère aucunement que le système de vote informatisé serait inadéquat. Au contraire, il met en exergue les améliorations apportées par les différentes lois qui, en 1998 et en 2000, ont modifié le système instauré par la loi de 1994 pour aboutir à un bon fonctionnement et à l'atteinte de l'objectif visé, à savoir émettre les votes, les enregistrer, les visualiser, les compter, selon les dispositions légales.

Enfin, le requérant ne fournit aucun élément de fait établissant l'impossibilité pour certains électeurs de voter ou un trop grand recours à une assistance extérieure éventuellement requise pour cause d'absence de familiarisation avec le système informatisé.

Le moyen, en sa première branche, doit être rejeté.

· Quant à la deuxième branche

La critique sur l'absence d'autorité de contrôle indépendante ne peut être admise.

Tout d'abord, il n'y a pas lieu de se référer à l'ordonnance prononcée le 15 septembre 2000 par le président du tribunal de première instance de Bruxelles siégeant en référé, pour les deux motifs qui suivent.

En premier lieu, cette décision est entachée d'une erreur évidente d'appréciation en ce qu'elle considère que les experts étaient désignés par le pouvoir exécutif, alors qu'ils le sont par les diverses branches du pouvoir législatif, à savoir des membres élus démocratiquement qui composent les assemblées fédérales et fédérées.

Ensuite, la décision de référé apparaît contestable au regard de la fonction de juger. En effet, « la mission de pacification représente le fondement mais aussi la limite de l'intervention du juge. Son oeuvre ne peut aller au-delà de ce que requiert le règlement de l'espèce dont il est saisi » (M. Verdussen et S. Depré, « Les élections communales du 9 octobre 1994 : examen critique de jurisprudence », Droit Communal, 1996/3, p. 145). Or, il est assez singulier que le juge des référés ait développé une longue argumentation, éminemment contestable, pour débouter en réalité les demandeurs qui l'avaient saisi en raison du caractère légalement impraticable de la mesure sollicitée, motif pris du caractère relatif de l'autorité de chose jugée qui s'attache aux ordonnances de référé. Le juge aurait pu et donc dû se contenter de constater ce caractère légalement impraticable et s'abstenir de toute autre considération sur l'absence d'indépendance des experts. Les éléments de fait survenus depuis lors (en l'espèce, la satisfaction générale inspirée par le système, la convivialité, l'absence de difficultés réelles constatées par les experts, etc.) permettent de formuler une opinion nettement plus nuancée, de refuser le doute systématique, et de faire confiance au choix arrêté par le législateur en 1994, choix confirmé en 1998 et en 2000, sous réserve des améliorations recommandées par les experts.

Par ailleurs, pour le ministre de l'Intérieur, si l'article 25 b) du Pacte international de New York relatif aux droits civils et politiques garantit le droit de vote et d'être élu au cours d'élections périodiques, au suffrage universel et secret, le caractère « honnête » des élections inscrit dans la même disposition consiste en une obligation pesant sur les États signataires du Pacte mais ne confère pas pour autant un droit subjectif aux citoyens, puisque ce caractère « honnête » n'est pas assuré par une seule technique de vote, ni par une seule technique de contrôle. Autrement dit, dès lors que les États ont, dans une certaine mesure, la liberté de déterminer eux-mêmes les systèmes de vote qu'ils utilisent, on ne peut déduire de l'article 25 b) du PIDCP un quelconque effet direct. En particulier, quant aux modalités de contrôle des opérations de vote, les États peuvent librement choisir le système qu'ils estiment le plus adéquat (témoins, experts, combinaison des deux, etc.). (En ce sens, M. Verdussen, op. cit., spéc. pp. 55-56).

En l'espèce, le législateur a explicitement choisi d'installer un collège d'experts nommés par les différentes assemblées fédérales ou fédérées. La mission du collège a été précisée par l'article 4 de la loi du 12 août 2000 modifiant la loi du 11 avril 1994 et remplaçant l'article 5bis de ladite loi. Cet article 5 prévoit notamment que :

­ les experts contrôlent lors des élections l'utilisation du bon fonctionnement de l'ensemble de systèmes de vote et de dépouillement automatisés ainsi que les procédures concernant la confection, la distribution et l'utilisation des appareils, des logiciels et des supports d'information électroniques;

­ les experts reçoivent du ministère de l'Intérieur le matériel ainsi que l'ensemble des données, renseignements et informations utiles pour exercer un contrôle sur les systèmes de vote et de dépouillement automatisés;

­ ils peuvent notamment vérifier la fiabilité des logiciels, des machines à voter, la transcription exacte par l'urne électronique des suffrages exprimés ainsi que leur totalisation et la lecture optique des votes exprimés (article 5bis, § 2).

On doit relever que ce nouvel article 5bis a eu pour but de rencontrer les demandes formulées préalablement par les experts en vue d'étendre leurs possibilités de contrôle (sur ces améliorations, voir le rapport des experts, op. cit., p. 8).

Dans leur rapport, les experts ont eux-mêmes constaté :

­ « Le collège dispose maintenant d'un pouvoir de contrôle sur les procédures utilisées lors de la création, de la distribution et de l'utilisation du matériel, des programmes er des supports magnétiques. Hors le système en soi (le hardware et le software), ces procédures constituent un élément important de la sécurité et de la fiabilité du vote automatisé. » (idem)

­ « La loi ne spécifie plus que le collège des experts doit contrôler la fiabilité des machines à voter avec un logiciel mis à leur disposition par le ministère de l'Intérieur. Le collège a toujours mis en question l'utilité de la mise à disposition des moyens de contrôle par le contrôlé. En supprimant ce passage de la loi, le législateur a confirmé l'indépendance du collège. »

­ « Il a été prévu que les assemblées peuvent désigner en plus des membres effectifs, des membres suppléants. » (idem p. 8).

En définitive, le réclamant considère à tort que, par nature, les résultats sont inexacts, alors que la jurisprudence se fonde sur le principe inverse : le résultat des élections est a priori exact, sauf si une ou plusieurs irrégularités sont démontrées, et sont susceptibles d'avoir influencé la répartition des sièges entre les listes.

Plus particulièrement, les vérifications techniques ordonnées par la députation permanente du Hainaut ont confirmé le bien-fondé de la présomption qui précède. C'est en vain que le réclamant entretient gratuitement un doute sur la fiabilité de ces vérifications.

En effet, même si c'est un employé d'une firme privée qui est intervenue lors de la vérification, celle-ci s'est effectuée en présence de responsables du ministère de l'Intérieur, de responsables de la Province, de membres de la députation permanente, du réclamant, etc. Autrement dit, une vérification publique et contradictoire a eu lieu, qui a confirmé la validité des premiers résultats obtenus. Seul le requérant refuse de le comprendre pour des motifs artificiels ou procédant d'une interprétation erronée des opérations de vérification qui ont été effectuées.

Le moyen, en sa deuxième branche, doit être rejeté.

· Quant à la troisième branche

La troisième branche se confond avec la deuxième.

Le ministre de l'Intérieur se réfère dès lors à la réfutation qui précède.

Pour le surplus, il est vain d'invoquer la circonstance que les procédures de vérification ne sont pas prévues par la loi. Ces procédures ont été mises en place sur la demande expresse de la députation permanente qui a souhaité procéder à toutes les investigations qu'elle estimait nécessaires. En effet, outre la vérification des totalisations obtenues par rapport aux procès-verbaux, la députation permanente a voulu aller plus loin nonobstant le recomptage identique qui avait déjà été effectué. En effet, la Députation permanente a ordonné la consultation du fichier contenant les résultats de totalisation de chaque bureau. L'examen de ce fichier contenant notamment les cases de tête a permis de vérifier le nombre de votes en case de tête émis pour chaque liste dans chaque bureau de vote. Cet examen a montré que le chiffre de 255 pour 3 listes était obtenu pour chaque liste par la somme des votes obtenus dans les différents bureaux de vote et non de manière arbitraire ou inexplicable.

À titre très subsidiaire, si un doute devait persister, le ministre de l'Intérieur ne s'oppose pas à un recomptage des cartes magnétiques.

Le moyen, en sa troisième branche, doit être rejeté.

B. ­ Quant au deuxième moyen

B.1. Rappel du moyen

Le moyen est pris de la violation de l'article 18 de la loi du 11 avril 1994, en ce que, constatant que la disquette contenant les résultats du bureau de vote nº 11 était défectueuse, un employé communal a réimprimé celle-ci à Lens, sans être accompagné, alors que la procédure légale prévue dans cette hypothèse était différente.

La circonstance que la Députation permanente a ordonné deux mesures d'instruction de vérification est, selon le requérant, insuffisante, en raison du caractère non convaincant des explications données sur la procédure de vérification utilisée.

B.2. Réfutation

Le deuxième moyen se confond avec les deuxième et troisième branches du premier moyen.

Pour le ministre de l'Intérieur, le requérant persiste à ne pas vouloir comprendre la portée des vérifications techniques opérées, sur la demande de la Députation permanente, les 12 et 15 décembre 2000.

Certes, il n'est pas contesté que la procédure à suivre en cas d'impossibilité de lire une disquette contenant les résultats n'a pas été respectée. En effet, lors de la clôture d'un bureau de vote, trois disquettes comportant les résultats sont établies : une rouge, destinée au bureau principal (en l'espèce, celui du canton de Lens), une blanche (back up destiné au même bureau) et une grise destinée au bureau principal de la commune concernée, en l'espèce Jurbise. C'est la lecture de cette dernière disquette qui s'est avérée impossible. Le président du bureau principal aurait alors dû se mettre en rapport avec le président du bureau de canton pour lui demander la disquette blanche (back up) placée sous enveloppe scellée.

Au lieu de procéder ainsi, un employé communal a été envoyé au bureau de canton pour réimprimer la disquette déficiente.

Cet élément de fait ne suffit pas en soi à annuler les élections. La Députation permanente a néanmoins, à juste titre, ordonné de comparer la disquette originale (rouge) avec la disquette blanche (back up) ainsi que la disquette grise litigieuse « réimprimée ».

Cet examen n'a cependant pas pu avoir lieu tel quel : ont été comparées les disquettes blanche et grise ainsi qu'une quatrième disquette, noire, remise par le président du bureau principal (cf. décision de la députation permanente, p. 9, avant-dernier alinéa).

Il a été vu également ci-avant que, le 15 décembre 2000, la Députation permanente a ordonné une autre comparaison et a abouti au même résultat.

C'est donc en vain que le réclamant affirme et de manière non motivée, que « l'explication donnée par l'informaticien [à propos de la mention des dates et des heures différentes dans les procès-verbaux des différents bureaux] ne convainc pas ».

Pour le ministre de l'Intérieur, l'accusation implicite mais certaine de « manipulation » de toutes les disquettes, « manipulation » qui aurait empêché une vérification adéquate est inacceptable.

Ceci étant, à titre très subsidiaire, si un doute devait persister, le ministre de l'Intérieur ne s'oppose pas à un recomptage des cartes magnétiques relatives aux résultats du bureau de vote nº 11 qui a enregistré les votes de Jurbise.

Le moyen doit dès lors être rejeté.

C. ­ Quant au troisième moyen

C.1. Rappel du moyen

Le moyen est pris de l'irrégularité du nombre de votes enregistrés.

En ce que la liste des électeurs arrêtée au 1er août 2000, comprend pour Jurbise 6 448 électeurs, et que 6 525 convocations auraient été adressées, soit 77 convocations en surnombre.

Par ailleurs, 6 022 votes auraient été enregistrés alors que 6 007 électeurs auraient reçu une carte magnétique, ce qui impliquerait que 15 cartes magnétiques « en trop » ont été enregistrées et ne correspondent pas à des électeurs.

Pour le requérant, 77, ou subsidiairement 15 personnes ont donc irrégulièrement pris part au vote.

C.2. Réfutation

Le moyen manque en fait.

Tout d'abord, le nombre de 6 500 convocations est un chiffre erroné, contrairement au nombre de 6 448 qui est le nombre officiel d'électeurs belges et européens. Le nombre de 6 525 provient d'une erreur de retranscription des chiffres officiels fournis à l'opérateur informatique qui était chargé d'assurer la couverture des élections pour la RTBF. C'est ainsi que ce chiffre s'est retrouvé sur le site internet de la RTBF. Il convient donc de s'en tenir à la liste arrêtée par le collège échevinal le 1er août 2000 qui renseigne 6 448 électeurs. Il n'y a donc pas eu 77 électeurs irréguliers.

Par ailleurs, les 6 022 votes enregistrés excèdent, il est vrai, les 6 007 électeurs pointés sur les listes. Cette différence de 15 votes ne permet pas de présumer une fraude éventuelle. Tout d'abord, comme l'a relevé la Députation permanente, cette fraude n'est pas confirmée par les procès-verbaux des bureaux de vote qui ont été signés sans remarque, ni observation. En réalité, la différence provient plus vraisemblablement d'erreurs commises par les assesseurs des bureaux de vote appelés à tenir les listes de pointage. En effet, diverses erreurs humaines sont susceptibles d'être commises à cette occasion.

Enfin, les 15 voix litigieuses ne modifieraient, dans aucune hypothèse, la répartition des sièges entre les 4 listes en présence lors du scrutin du 8 octobre 2000.

Le troisième moyen doit dès lors être rejeté.

Par ces motifs,

Plaise au Conseil d'État,

Déclarer recevable l'intervention du ministre de l'Intérieur,

Rejeter le recours,

En conséquence, confirmer la décision de la Députation permanente de la Province du Hainaut du 15 décembre 2000 et valider les élections communales tenues en la commune de Jurbise le 8 octobre 2000.

Copie certifiée conforme.

Bruxelles, le 16 janvier 2001.

Pour le ministre de l'Intérieur,

Son avocat,

Michel Mahieu.

ANNEXES

1. Rapport du collège d'experts chargés du contrôle des systèmes de vote et de dépouillement automatisés.

2. Rapport établi le 18 décembre 2000 par le ministère de l'Intérieur.

3. Note du 18 décembre 2000 à M. le ministre de l'Intérieur.

1.5. Avis de l'Auditoriat du Conseil d'État du 15 février 2001.

RAPPORT

ÉLECTION COMMUNALE DU 8 OCTOBRE 2000 À JURBISE

(article 8 de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'État en cas de recours prévu par l'article 76bis de la loi électorale communale)

Requérant : Mario Longo,

ayant pour conseil Maître Vincent Letellier, avocat dont le cabinet est établi à (1020) Bruxelles, avenue de l'Araucaria, 86, où il est fait élection de domicile,

En présence de : le ministre de l'Intérieur,

ayant pour conseil Maître Michel Mahieu, avocat dont le cabinet est établi à (1050) Bruxelles, avenue Louise, 523, où il est fait élection de domicile.

I. Objet du recours ­ État de la procédure

Par une requête (57) recommandée le 29 décembre 2000, le requérant interjette appel de la décision de la députation permanente du conseil provincial du Hainaut du 15 décembre 2000 rejetant sa réclamation et postule l'annulation de l'élection communale du 8 octobre 2000 à Jurbise.

Le Moniteur belge du 10 janvier 2001, 2e édition, a publié la mention relative à l'introduction du présent recours. Du 10 au 17 janvier 2001, la commune de Jurbise a procédé à l'affichage visé à l'article 5 de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'État en cas de recours prévu par l'article 76bis de la loi électorale communale. Le gouverneur de la province du Hainaut a transmis le dossier de l'élection au Conseil d'État.

Le ministre de l'Intérieur a déposé un mémoire en réponse.

II. Expose des faits

Le requérant s'est porté candidat à l'élection communale du 8 octobre 2000 à Jurbise, sur la liste nº 5 du Parti socialiste. Il était conseiller sortant et a présenté sa liste. Il a été élu conseiller communal.

Le procès-verbal du bureau principal relatif au dépouillement et au recensement général des votes pour un système de vote automatisé (partie A) comprend l'observation suivante à propos du support de mémoire provenant du bureau de vote nº 11 :

« La disquette initiale a dû être réimprimée à Lens suite à un problème informatique. Après vérification, elle a inscrit les données chiffrées qui figuraient au support papier (P.V.). »

Le 15 novembre 2000, le requérant et Christian Vreux ont introduit une réclamation auprès de la députation permanente du conseil provincial du Hainaut afin d'obtenir l'annulation de l'élection communale du 8 octobre 2000 à Jurbise et, avant dire droit et à titre subsidiaire, une relecture de l'ensemble des cartes magnétiques et, partant, un second dépouillement des suffrages.

Les 12 et 15 décembre 2000, la députation permanente a procédé à des mesures d'instruction visant, d'une part, à comparer la disquette originale du bureau de vote nº 11 avec les disquettes de sauvegarde du même bureau et, d'autre part, à vérifier la totalisation des votes.

Le 15 décembre 2000, la députation permanente du conseil provincial du Hainaut a rejeté la réclamation du requérant et de Christian Vreux, et a validé l'élection communale du 8 octobre 2000 à Jurbise.

III. Recevabilité du mémoire en réponse

L'article 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'État en cas de recours prévu par l'article 76bis de la loi électorale communale , permet à toute personne pouvant justifier d'un intérêt d'envoyer un mémoire en réponse au Conseil d'État.

La jurisprudence est fixée en ce sens que la commune n'est pas une personne intéressée qui peut déposer un mémoire au sens de l'article 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 (58). De même, les organes et autorités qui ont participé à la préparation et à l'organisation de l'élection ne sont pas des parties intéressées aux résultats de cette élection (59).

Le ministre de l'Intérieur, qui est impliqué dans le déroulement de l'élection communale selon le système automatisé, doit faire preuve d'impartialité à l'égard de cette élection et rester « au dessus de la mêlée ». Il ne peut donc être considéré comme une personne intéressée au maintien des résultats d'une élection communale particulière. La circonstance que la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé est mise en cause par les requérants ne suffit pas à justifier l'intérêt du ministre de l'Intérieur au sens de 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 15 juillet 1956.

Le mémoire en réponse déposé par le ministre de l'Intérieur doit donc être écarté des débats. Partant, le ministre doit être mis hors de cause.

IV. Recevabilité de la requête

La requête, qui a été introduite dans les huit jours à dater de la notification au requérant de la décision de la députation permanente dont appel, est recevable ratione temporis.

Le requérant était candidat à l'élection communale et a introduit une réclamation à la députation permanente. Il était conseiller sortant et a présenté sa liste. Il a donc qualité et intérêt pour introduire le présent recours, dans la mesure. où il invoque des irrégularités qui, à les supposer fondées, sont susceptibles d'avoir causé grief à sa liste (60).

La requête est recevable.

V. Moyens

A. EXPOSÉ DU REQUÉRANT

Le premier moyen est pris de la violation de l'article 25, b), du Pacte international de New-York du 19 décembre 1966 relatif aux droits civils et politiques et de l'article 3 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

Le requérant rappelle les termes des dispositions visées au moyen ainsi que les exigences d'honnêteté, de régularité et de liberté de vote que ces dispositions impliquent. Il divise ensuite son moyen en trois branches.

Dans la première branche, le requérant expose que le système de vote automatisé qui a été utilisé à Jurbise le 8 octobre 2000 ne tient pas compte de la diversité des niveaux d'instruction des citoyens appelés à s'exprimer et que ce système, « compte tenu de l'état actuel du degré de pénétration de l'informatique dans les ménages », ne permet pas d'assurer la pleine et libre expression des électeurs. II précise que de nombreux électeurs ne sont pas familiarisés à l'informatique, que le comportement de l'électeur est modifié face à la machine et que le système automatisé oblige l'électeur à suivre une procédure qui l'oblige à connaître la liste du candidat pour lequel il veut voter, ce qui n'est pas évident dans le cadre d'élections de proximité où la personnalité des candidats prime souvent sur les listes.

Le requérant ajoute que le vote automatisé ne garantit pas le secret du scrutin puisque de nombreuses personnes peu familiarisées à l'informatique doivent se faire accompagner dans l'isoloir afin de palier leur « handicap informatique » . Il précise que la loi ne prévoit pas les mêmes garanties pour l'assistance technique que pour l'assistance en cas de handicap physique (le procès-verbal doit acter l'identité de la personne qui a accompagné l'électeur infirme dans l'isoloir, les témoins peuvent contester la réalité ou l'importance du handicap physique). II écrit que, dans une petite commune comme Jurbise, tout le monde se connaît.

Le requérant conclut que le système de vote automatisé, compte tenu du degré d'éducation de la population, ne permet pas de garantir un vote libre et secret.

Dans la deuxième branche du moyen, le requérant soutient que le système de vote automatisé ne permet pas un contrôle indépendant des opérations de vote et de dépouillement. Sur le plan des principes, il expose que :

­ le bureau de vote et le bureau de dépouillement sont dessaisis de toute possibilité d'exercer un contrôle effectif de la régularité des opérations; il n'y a d'ailleurs plus de dépouillement puisque les opérations sont effectuées par une machine;

­ le collège d'experts établi par l'article 5bis de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé ne doit pas obligatoirement être mis en place pour chaque élection;

­ dans une ordonnance du 15 septembre 2000, le président du tribunal de première instance de Bruxelles statuant en référé a mis en exergue l'absence de contrôle indépendant et effectif du processus électoral selon le système automatisé.

Le requérant explique ensuite qu'à Jurbise, le processus électoral a été émaillé de plusieurs incidents :

­ « un membre du personnel communal a été désigné par le collège (majorité absolue) pour effectuer toutes les interventions techniques avant, pendant et après les élections, tant au niveau des bureaux de vote que du bureau de dépouillement; cette désignation ne garantit pas l'indépendance exigée par les dispositions qui fondent le moyen »;

­ « des manipulations ont été effectuées sur des disquettes contenant les votes exprimés qui sont irrégulièrement sorties de certains bureaux à l'intervention d'une personne non habilitée à le faire alors que la procédure légale impose une relecture des cartes magnétiques en cas de problème de lecture d'une disquette issue du bureau de vote; cet incident a été confirmé par le président du bureau de dépouillement lors de la première réunion technique qui s'est tenue le 12 décembre 2000 »;

­ les bureaux, organes indépendants normalement chargés du contrôle de l'élection; ont été privés de toute possibilité de comprendre et de garantir le bon fonctionnement des opérations; les membres de ces bureaux ont dû s'en remettre entièrement à des employés communaux ou des techniciens privés « qui ont pu opérer des manipulations incontrôlées sur le système »;

­ les mesures d'instruction menées par la députation permanente n'ont été possibles qu'à l'intervention du directeur de développement de l'association momentanée « Philips-Stesud » qui a fourni le matériel informatique à la commune de Jurbise; l'informaticienne de la province a, en réalité, une formation de psycho pédagogue et n'a pas la qualité nécessaire pour contrôler de manière critique les rnanipulations qui ont effectuées; aucun contrôle des résultats ne peut être opéré sans que les opérations soient dirigées par un technicien de la firme qui a conçu le logiciel ou par un informaticien du ministère de l'Intérieur; ces personnes ne peuvent être considérées comme indépendantes.

Le requérant conclut que la procédure électorale n'a pas été honnête au sens des dispositions visées au moyen.

Enfin, dans la troisième branche du moyen, le requérant expose que seul un recomptage des cartes magnétiques aurait permis d'assurer la transparence et l'honnêteté du processus électoral et ainsi de légitimer l'élection. Il précise que les mesures d'instruction auxquelles la députation permanente a procédé n'étaient pas pertinentes dès lors qu'elles ont été menées sous la direction de personnes qui ne sont pas indépendantes sur du matériel dont l'origine ne paraît pas fiable et que les procédures de la loi du 11 avril 1994 n'ont pas été respectées. Il ajoute que les EPROM n'ont aucune valeur légale, que ceux-ci sont accessibles sans être protégés par les scellés des urnes, qu'ils peuvent être réinitialisés en utilisant la disquette rouge qui était pour le bureau nº 11 défectueuse et que le formatage des disquettes a été effectué en utilisant un programme spécifique délivré par le ministère de l'Intérieur. Le requérant observe encore que la loi du 11 avril 1994 ne prévoit aucune procédure de contrôle des résultats en cas de contestation et que les modalités d'un nouveau décompte ne sont pas organisées.

Le deuxième moyen est pris de la violation de l'article 18 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé.

Après avoir cité la disposition visée au moyen, le requérant expose que le bureau principal n'a pas suivi la procédure établie par celle-ci, qu'un employé communal est parti avec la disquette du bureau de vote nº 11 au bureau de canton à Lens pour effectuer des manipulations et qu'au retour de cet employé, une autre disquette aurait fonctionné.

Le requérant rappelle qu'il a demandé à la députation permanente de procéder au comptage des cartes magnétiques contenues dans l'urne du bureau de vote nº 11 et que cette mesure d'instruction lui a été refusée. Il répète que les deux mesures d'instruction que la députation permanente a menées n'étaient pas pertinentes.

À propos de la première mesure d'instruction, le requérant observe que :

­ des manipulations ont été effectuées par le membre du personnel envoyé à Lens sur les trois disquettes examinées;

­ les fichiers contenus sur ces disquettes portaient des dates et des heures différentes alors que la mention des heures est indiquée dans les procès-verbaux des bureaux; il est donc impossible de déterminer le moment où s'effectuent toutes les interventions sur les supports de mémoire, du moins celles se déroulant après la clôture des opérations de vote;

­ les disquettes qui ont été apportées à la députation permanente n'avaient pas été transmises à qui de droit à la clôture des opérations électorales; il n'appartenait pas aux présidents des bureaux de les conserver.

En ce qui concerne la seconde mesure d'instruction opérée par la députation permanente, le requérant écrit que :

­ les supports de mémoire EPROM étaient accessibles, n'étant pas protégés par les scellés de l'urne;

­ interrogé sur la possibilité de modifier le contenu d'une EPROM, le responsable de la firme « Philips-Stesud » a répondu : « il faut démarrer le bureau de vote avec la disquette rouge, qui était pour le bureau de vote nº 11, défectueuse »;

­ il a indiqué dans sa réclamation à la députation permanente qu'à sa connaissance, « il y a eu une manipulation effectuée par un employé communal sur une machine avec usage d'une disquette d'origine extérieure au bureau, non renseignée au procès-verbal »; même en l'absence d'indication au procès-verbal, cette information doit être prise en considération, dès lors qu'il fait valoir des éléments sérieux et concordants permettant de mettre en doute la régularité de l'ensemble des opérations à partir du bureau nº 11.

Le requérant conclut que la députation permanente devait procéder à un comptage des cartes magnétiques mais il estime que cette mesure est aujourd'hui inopérante puisque l'urne du bureau nº 11 a été descellée.

Le troisième moyen est pris de « l'irrégularité du nombre de votes enregistrés ».

Le requérant expose que, suivant les chiffres du ministère de l'Intérieur diffusés par le site internet de la RTBF, il y a eu 6 525 convocations (5 722 votes valables et 803 abstentions) alors que la liste des électeurs de Jurbise clôturée le 1er août 2000 comprenait seulement 6 448 électeurs. Il en déduit que 77 électeurs n'ont pas été régulièrement inscrits sur la liste des électeurs et ont cependant pu prendre part au vote. Il constate que, dès lors que le dernier siège a été attribué sur la base de quelques dizaines de voix, cette irrégularité a pu entacher le résultat de l'élection. Il ajoute que « des témoins peuvent attester que des convocations ont été rédigées et délivrées dans certains bureaux de vote ».

Le requérant conteste le raisonnement tenu par la députation permanente et considère que « pour pouvoir vérifier combien de convocations auraient dû être adressées sur base d'une liste complétée après le 1er août 2000, il convient de comptabiliser les personnes qui se sont abstenues de voter et de vérifier si le chiffre obtenu correspond ou non à ce qui est présenté par le ministère de l'Intérieur ». Il écrit que « dès lors qu'il apparaîtrait des listes à disposition des présidents de bureau de vote que ce sont bien 503 personnes qui se sont abstenues de voter (803 présentés comme abstentions ­ 300 blancs), il conviendrait de constater que 77 personnes ont été irrégulièrement convoquées ».

Le requérant sollicite qu'il soit procédé à une mesure d'instruction permettant de vérifier le nombre d'abstentions tel qu'il ressort des listes à disposition des présidents des bureaux de vote. Il estime que seule cette vérification permet de vérifier la fiabilité des chiffres officiels du ministère de l'Intérieur.

B. EXAMEN

Premier et deuxième mots : élection libre et honnête, et violation de l'article 18 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé.

1. L'article 3 du Premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme se lit :

« Les Hautes Parties Contractantes s'engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans des conditions qui assurent la libre expression du peuple sur le choix du corps législatif. »

Cette disposition ne s'applique qu'aux élections relatives au choix du corps législatif. La commission européenne des droits de l'homme a précisé qu'elle ne s'applique pas aux élections communales en Belgique (61). Le Conseil d'État a adopté la même manière de voir (62).

En tant qu'il est pris de la violation de l'article 3 du premier protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, le moyen ne peut être retenu.

2. L'article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, approuvé par la loi du 15 mai 1981 publiée au Moniteur belge du 6 juillet 1983, dispose que :

« Tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l'article 2 et sans restrictions déraisonnables : (..)

b) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs. »

Si cette disposition garantit des droits aux citoyens qui peuvent les faire valoir devant les tribunaux étatiques, elle ne commande aucun système électoral particulier (63). En particulier, elle ne proscrit pas l'organisation d'un système de vote automatisé tel que celui mis en place par la loi du 11 avril 1994 à la condition que les garanties qui entourent ce système permettent d'assurer le respect du Pacte.

Dans un arrêt élection communale de la ville de Bruxelles, nº 92.957, du 2 février 2001 (64), le Conseil d'État a jugé que la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé n'est pas, en principe et en l'absence d'irrégularité concrète susceptible de remettre en cause le résultat de l'élection, contraire à l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Il peut être renvoyé à cet arrêt en ce qui concerne les critiques de principe faites contre le système de vote automatisé.

3. Le présent recours présente toutefois une particularité importante par rapport au recours relatif à l'élection de la ville de Bruxelles. En effet, le requérant ne se contente pas, en l'espèce, de mettre en cause la loi du 11 avril 1994 dans son principe. Il invoque une irrégularité précise et concrète qui est susceptible de modifier radicalement le résultat de l'élection. Cette irrégularité réside dans la manière dont a été totalisé le résultat relatif au bureau de vote nº 11.

4. L'article 18 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé, figurant sous le chapitre V de cette loi intitulé « des opérations de totalisation des votes », dispose que :

« Le président du bureau principal de canton ou communal, selon le cas, procède, dès réception des supports de mémoire provenant du bureau de vote, à l'enregistrement du support original sur le support de mémoire destiné à la totalisation des votes.

Si l'enregistrement au moyen du support de mémoire original se révèle impossible, le président du bureau principal recommence l'opération d'enregistrement au moyen de la copie de ce support.

Si cette opération se révèle également impossible, le président du bureau principal requiert de la commune concernée la fourniture de l'urne électronique correspondante; après l'avoir descellée, il procède à un enregistrement complet des cartes magnétiques qu'elle contient. L'enregistrement du bureau de vote terminé, le président scelle à nouveau l'urne et la retourne à la commune. Il procède ensuite à l'enregistrement du nouveau support de mémoire ainsi constitué. »

En l'espèce, il ressort du dossier que la disquette originale du bureau nº 11 n'a pu être lue par le bureau principal de dépouillement et de recensement. Au lieu de demander la disquette de sauvegarde officielle au bureau du canton, le bureau principal a envoyé un employé communal non accompagné opérer des manipulations indéterminée sur la disquette originale. C'est sur la base d'une copie faite par cet employé sur une nouvelle disquette que la totalisation a été opérée.

Une telle manière de procéder est manifestement inconciliable avec la procédure instaurée par l'article 18 précité de la loi du 11 avril 1994.

5. Il reste à examiner si cette irrégularité est de nature à avoir une influence sur la répartition des sièges entre les listes.

L'auditeur rapporteur a procédé à une instruction en vue de vérifier le résultat du bureau nº 11 totalisé irrégulièrement et il est ressorti de cette mesure d'instruction (65) que :

­ l'urne du bureau de vote nº 11 était descellée lors de la séance de vérification de la totalisation des votes organisée par la députation permanente le 15 décembre 2000 (66); les cartes magnétiques de vote étaient apparentes et pouvaient être manipulées sans protection;

­ en vue de la séance de vérification et de comparaison des disquettes organisée par la députation permanente le 12 décembre 2000, le ministère de l'Intérieur a renvoyé la députation permanente à la firme « Philips-Stesud » en présentant cette firme comme étant la seule personne capable de procéder à la vérification, puisqu'elle est la conceptrice du logiciel; l'opération de vérification des disquettes opérée le 12 décembre 2000 a été menée par Philippe Evrard, directeur de développement de la société momentanée « Philips-Stesud », à l'aide son ordinateur portable équipé du logiciel permettant la lecture et la comparaison des disquettes des bureaux de vote (67);

­ il n'existe aucune impression sur papier des résultats du bureau de vote nº 11; seuls les résultats totaux ­ pour tous les bureaux de vote ­ ont été imprimés;

­ les disquettes des bureaux de vote ne sont pas lisibles (68) et la totalisation n'est pas possible sans le logiciel de la firme « Philips-Stesud ».

6. Il en résulte que le Conseil d'État est dans l'impossibilité d'opérer le moindre contrôle des résultats de l'élection en ce qui concerne le bureau de vote nº 11.

Pour rappel, la disquette originale du bureau de vote nº 11 a fait l'objet de manipulations de nature indéterminée par un employé communal, sans que cet employé soit accompagné de témoins. La totalisation des votes a été faite sur la base d'une disquette de copie faite irrégulièrement par cet employé communal.

En outre, toute vérification objective et indépendante de la conformité des résultats du bureau nº 11 au regard des disquettes de sauvegarde est exclue.

D'une part, les disquettes ne peuvent être lues et comparées que par un technicien de la firme qui a commercialisé le système de vote automatisé auprès de la commune de Jurbise, à l'aide du logiciel élaboré par cette firme et détenu par elle seule. Une telle vérification étant opérée par une personne qui n'est ni indépendante, ni impartiale par rapport au processus électoral, elle ne peut être prise en compte par le juge de l'élection.

D'autre part, une telle vérification a été opérée à la demande de la députation permanente de sorte que les disquettes du bureau nº 11 ont été manipulées par le technicien de la firme « Philips-Stesud » à l'aide de son logiciel. De telles manipulations, faites sans contrôle effectif possible, par une personne qui ne présente pas les moindres qualités d'impartialité et d'objectivité par rapport à l'élection, sont de nature à exclure toute confiance dans le contenu des disquettes. Par ailleurs, la vérification ainsi opérée a révélé des discordances entre les disquettes en ce qui concerne les dates et heures d'enregistrement des résultats, ce qui jette un doute supplémentaire sur la fiabilité des informations enregistrées sur ces disquettes.

Enfin, tout contrôle manuel des résultats du bureau nº 11 s'avère impossible en l'espèce et ce pour deux raisons.

La première est que les résultats du bureau de vote nº 11 n'ont jamais fait l'objet d'une totalisation et d'une impression isolées, de sorte que les résultats partiels de ce bureau de vote ne sont pas connus.

La seconde est que l'urne du bureau nº 11 a été descellée entre le 8 octobre et le 15 décembre 2000 et qu'on ne peut exclure que des manipulations des cartes magnétiques aient été effectuées entre ces deux dates.

Le contrôle manuel organisé par l'article 18 de la loi du 11 avril 1994 en dernier ressort ne peut donc être utilement opéré en l'espèce.

7. Compte tenu de toutes ces circonstances, le Conseil d'État se trouve dans l'impossibilité d'effectuer le moindre contrôle effectif et indépendant sur l'ensemble des résultats du bureau de vote nº 11. Par conséquent, le Conseil d'État ne peut qu'annuler l'élection.

Troisième moyen : liste des électeurs.

Les informations officieuses reprises sur un site internet ne peuvent prévaloir sur celles résultant de la liste officielle des électeurs arrêtée par le collège des bourgmestre et échevins. Au surplus, le requérant n'avance aucun commencement de preuve de ce que la liste des électeurs serait inexacte.

Le moyen ne peut être accueilli.

VI. Conclusion :

­ il y a lieu de réformer la décision de la députation permanente du Hainaut du 15 décembre 2000 et d'annuler l'élection communale du 8 octobre 2000 à Jurbise.

B. LOMBAERT,

auditeur.

ANNEXE À L'AVIS DE L'AUDITEUR

Conseil d'État, section d'administration

ARRÊT

nº 92.957 du 2 février 2001

A.98.167/VIII-1995

Élections communales de la ville de Bruxelles

LE CONSEIL D'ÉTAT, VIIIe CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 7 décembre 2000 par Carine Focquet, qui demande l'annulation des élections communales qui ont eu lieu à Bruxelles le 8 octobre 2000;

Vu le dossier administratif déposé par le Collège juridictionnel de la Région de Bruxelles-Capitale;

Vu l'avis prévu par l'article 5 de l'arrêté royal du 15 juillet 1956, modifié par l'arrêté royal du 16 septembre 1982, publié au Moniteur belge du 13 décembre 2000;

Vu le rapport de Mme Dagnelie, premier auditeur, chef de section au Conseil d'État;

Vu l'ordonnance du 16 janvier 2001 fixant l'affaire à l'audience du 24 janvier 2001;

Vu la notification de l'ordonnance de fixation et du rapport aux parties;

Entendu, en son rapport, M. Geus, président de la chambre;

Entendu, en ses observations, Maître Luc Cambier, avocat, comparaissant pour la requérante;

Entendu, en son avis conforme, Mme Dagnelie, premier auditeur, chef de section;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que la requérante, conseiller communal sortant, s'est présentée aux élections communales du 8 octobre 2000 sur la liste PSC-CVP où elle figurait en quatrième place; qu'à la suite du scrutin, certains quotidiens l'ont créditée de 533 voix de préférence, ce qui aurait permis son élection; que selon le procès-verbal des opérations de dépouillement et le recensement général des votes établi par le bureau principal, elle n'a obtenu que 291 suffrages nominatifs, alors que Chantal Noël en a totalisé 533; qu'en conséquence, celle-ci a été élue alors que la requérante ne l'a pas été; que le 2 novembre 2000, la requérante a introduit une réclamation auprès du collège juridictionnel de la Région de Bruxelles-Capitale qui l'a rejetée en date du 28 novembre 2000;

Considérant que la requérante prend un premier moyen de la violation de l'article 149 de la Constitution, des articles 75, 76 et 76bis de la loi électorale communale, et des principes généraux du droit, notamment du principe de la légitime confiance des administrés; qu'elle expose que le site internet de la Région de Bruxelles-Capitale reprenait une liste PSC composée de quatre candidats, alors qu'une telle liste n'existait pas, et une liste PSC-CVP conforme à celle sur laquelle la requérante s'est présentée; qu'elle estime que « l'erreur de présentation et l'insertion d'une liste inexistante aux couleurs du PSC reprenant quatre candidats, par ailleurs non repris sur la liste PSC-CVP, a nécessairement induit en erreur l'ensemble des personnes ayant pu consulter ledit site »; qu'elle fait valoir que le collège juridictionnel a déclaré ce grief non fondé au motif qu'il s'agissait d'une présentation non officielle des listes qui ne peut se substituer à celle qui a été arrêtée par le bureau principal, alors que l'erreur ainsi commise n'émane pas d'un organe de presse mais bien des pouvoirs publics et plus particulièrement du gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale; qu'elle déduit du caractère nécessairement officiel de la présentation des listes par cette autorité que « l'erreur de présentation commise spécialement par rapport à la liste sur laquelle la requérante s'est présentée vicie le déroulement du vote puisqu'il a pu induire en erreur l'électeur »;

Considérant que le document http ://www.elections.irisnet.be/news02_fr.cfm ?axxcommune=71 qui comporte l'erreur dénoncée par la requérante porte, sur sa première page, la mention « Informations officieuses et partielles »; qu'ainsi les personnes ayant consulté ce site ont été mises en garde quant à la fiabilité toute relative des renseignements donnés; qu'à supposer qu'un électeur se soit laissé abuser par l'information erronée, celui-ci n'aurait pu que constater dans l'isoloir qu'il n'existait pas de liste PSC mais une liste PSC-CVP, étant ainsi dans l'impossibilité de porter son suffrage sur une liste inexistante; que, dans ces conditions, l'allégation selon laquelle le déroulement du vote a été faussé manque de tout fondement; qu'au demeurant, la requérante ne précise pas à quelles dates l'information erronée a été diffusée, si bien qu'il est impossible d'évaluer l'impact qu'aurait pu avoir cette erreur sur une partie indéterminable du corps électoral; que d'ailleurs, la requérante a admis à l'audience qu'elle n'avait pas consulté le site précité alors même qu'elle faisait partie de ceux qui, étant candidats, étaient tout particulièrement intéressés par la composition des listes rivales; que le moyen n'est pas fondé;

Considérant que la requérante prend un deuxième moyen de la violation des articles 75, 76 et 76bis de la loi électorale communale, et de l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966; qu'elle observe que « le collège juridictionnel a rejeté le grief émis par la requérante quant à l'absence de contrôle effectif et de fiabilité par rapport au vote électronique au motif que ce mode de scrutin qui a été instauré par le législateur (loi du 11 avril 1994) fait l'objet de contrôles par des experts désignés par le pouvoir législatif »; que la requérante s'exprime en ces termes :

« (...) le contrôle allégué par les experts informaticiens ne permet aucune vérification ni par le Collège juridictionnel ni par le Conseil d'État et ce en violation avec les dispositions de la loi électorale communale qui précisent que, dans le cadre des réclamations, les juridictions administratives concernées doivent être à même de pouvoir procéder à une vérification des bulletins le cas échéant en présence des témoins désignés en vertu de l'article 23 de la même loi électorale communale;

Que le mode de désignation des experts informaticiens ne permet nullement de garantir ni la fiabilité des opérations de vote ni du dépouillement ainsi que des différentes instances l'ont déjà souligné (décision du tribunal de première instance de Bruxelles siégeant en référé du 15 septembre 2000; Unesco-Extrait de la brochure de l'Unesco, annexe 5; le Conseil d'État du canton de Genève ­ document N1162 ­ A, annexe 6).

Que la circonstance que les experts soient nommés par le pouvoir législatif. ne contribue nullement à garantir une quelconque fiabilité du système de vote informatisé;

a) Lesdits informaticiens ne peuvent, le cas échéant, apprécier que les éléments constitutifs du logiciel mais non garantir son fonctionnement lors des opérations de recueillement des suffrages et de recensement des résultats.

b) L'indépendance par rapport au pouvoir exécutif n'est qu'apparente. En effet, l'article 2, § 2, de la loi du 11 avril 1994 stipule que les systèmes électroniques de totalisation des votes et des logiciels électoraux ne peuvent être utilisés que s'ils sont conformes aux conditions générales d'agrément déterminées par le Roi. Du reste et dans le cadre de l'exercice,de leur mission, lesdits informaticiens sont liés par l'ensemble des données, renseignements et informations utiles qui leur sont donnés par le ministère de l'Intérieur.

Enfin et ainsi que la requérante a eu l'occasion de le souligner, le dossier administratif qu'elle a été amenée à consulter auprès du Collège juridictionnel ne comprenait aucun rapport d'expertise, de quelque nature que ce soit qui émanerait dudit collège d'experts.

Si, d'aventure, ladite pièce venait à être versée aux débats, la requérante se réserve bien entendu le droit de compléter son argumentation à ce sujet »;

que la requérante ajoute que le respect des garanties prévues par l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, qui est directement applicable en droit interne et a primauté sur la loi nationale, « implique le retour à un vote manuel, seul susceptible de permettre un contrôle effectif notamment par les instances de recours »; qu'à titre subsidiaire, la requérante demande que la question préjudicielle suivante soit posée à la Cour d'arbitrage :

« La loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé ne viole-t-elle pas les articles 10 et 11 de la Constitution combinés avec l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques en tant qu'elle institue un système de vote et de dépouillement automatisé qui ne garantit pas la fiabilité des opérations de vote et de dépouillement eu égard au caractère confidentiel du contenu des logiciels et de leur utilisation, rendant par là même impossible toute vérification de leur régularité, en ce compris la vérification des bulletins de vote pourtant prévue par la loi électorale elle-même devant les juridictions administratives chargées du contentieux électoral (article 75, alinéa 3, de la loi électorale communale du 4 août 1932) »;

Considérant qu'il ressort des développements du moyen que celui-ci n'a aucun rapport avec les articles 75, 76 et 76bis de la loi électorale communale; qu'en tant qu'il est pris de la violation de ces dispositions, le moyen ne peut être retenu; que l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, fait à New York le 19 décembre 1966 et approuvé par la loi du 15 mai 1981, dispose comme suit :

« Tout citoyen a le droit et la possibilité, sans aucune des discriminations visées à l'article 2 et sans restrictions déraisonnables :

(...)

b) de voter et d'être élu, au cours d'élections périodiques, honnêtes, au suffrage universel et égal et au scrutin secret, assurant l'expression libre de la volonté des électeurs;

(...) »;

Considérant qu'en vertu de l'article 74bis de la loi électorale communale, « les élections ne peuvent être » annulées que pour cause d'irrégularités susceptibles d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes »; qu'en l'espèce, la requérante n'avance pas le moindre élément concret propre à établir que les élections communales de Bruxelles-Ville auraient été entachées d'une quelconque irrégularité et moins encore d'une irrégularité susceptible d'influencer la répartition des sièges entre les listes; qu'au regard de l'article 74bis précité, le moyen est irrecevable;

Considérant, au demeurant, que les critiques générales et abstraites formulées par la requérante ne peuvent se rattacher à l'article 25, b), précité que dans la mesure où elle allègue que, faute de possibilité de contrôle des résultats des élections pour lesquelles le vote automatisé a été d'application, le caractère « honnête » des élections ne serait pas garanti; qu'il y a lieu d'examiner à cet égard la pertinence des documents produits par la requérante à l'appui de son recours; que le rapport au Conseil d'État du canton de Genève est relatif au vote par le biais d'internet et est, par conséquent, étranger au moyen soulevé; que la brochure édictée sous l'égide de l'Unesco ne porte pas sur la loi belge mais énonce, de manière tout à fait générale, que « les procédures concernant le compte des voix, la vérification, la communication des résultats et la conservation des documents officiels doivent être sûres et équitables »; qu'il sera vérifié ci-après si ces voeux ont été exaucés par le législateur belge en ce qui concerne les élections communales du 8 octobre 2000; que l'ordonnance du 15 septembre 2000, prononcée par le juge désigné pour remplacer le président du tribunal de première instance de Bruxelles, n'est revêtue que d'une autorité relative de chose jugée; qu'elle ne peut en rien lier le Conseil d'État; que celui-ci ne peut se rallier aux motifs exprimés, qui, au demeurant, ne constituent pas le soutènement du dispositif de l'ordonnance citée; que selon cette ordonnance « au niveau des apparences de droit, il ne peut être considéré qu'un tel collège d'experts, élu par les majorités des assemblées, soit une instance indépendante du pouvoir en place », ce dont il est déduit qu'« il apparaît évident, prima facie, que les droits garantis par l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sont incompatibles avec un système où les erreurs et les fraudes ne pourraient être détectées que par le pouvoir en place au moment des élections et non par des instances ou personnes indépendantes »; que l'indépendance des membres du collège d'experts, visé à l'article 5bis de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé, élus en l'espèce par la Chambre des représentants, le Sénat, le Conseil flamand, le Conseil régional wallon et le Conseil de la Communauté germanophone, soit des assemblées législatives démocratiquement élues, est ainsi péremptoirement mise en cause; qu'à suivre ce raisonnement il faudrait nécessairement nier l'indépendance et l'impartialité de tous les magistrats de Belgique, nommés par le Roi sur la proposition du ministre compétent, et donc du « pouvoir en place », ce qui ne se peut; qu'aucun élément concret de nature à démontrer le manque d'indépendance du collège d'experts n'est avancé; qu'en revanche celui-ci, dans son rapport sur les élections du 13 juin 1999 (doc. Sénat, nº 2-7/1 et doc. Chambre, nº 50-1/2), avait émis un certain nombre d'observations critiques; que l'une d'elles a conduit à la modification de l'article 5bis de la loi du 11 avril 1994 par la loi du 12 août 2000; qu'à cet égard, le rapport du collège concernant les élections du 8 octobre 2000 expose ce qui suit :

« Le collège constate avec satisfaction que la loi ne l'oblige plus à utiliser de logiciels de contrôle mis à sa disposition par le ministère de l'Intérieur. Seule reste l'obligation du ministère de mettre à la disposition des experts toutes les données, le matériel, les explications et les informations nécessaires à la bonne exécution de leur tâche. La formulation actuelle de la loi met ainsi en évidence le fait que le collège peut choisir ses méthodes de travail et exécuter sa mission de contrôle en toute indépendance. Cette indépendance se voit encore renforcée par le fait que tous les experts, sans exception, sont désignés avec l'accord de tous les groupes politiques représentés dans les assemblées respectives » (doc. Chambre, nº 0923/001 et doc. Sénat, nº 2-7/2, p. 10);

qu'en ses pages 37 à 41, le même rapport énumère les différentes améliorations qui ont été apportées au système de vote automatisé, quant aux procédures et au matériel utilisé; que, parmi ces améliorations, il y a particulièrement lieu de relever la possibilité pour l'électeur de vérifier lui-même le vote qu'il a émis;

Considérant qu'avant les élections du 8 octobre 2000, le collège d'experts a procédé à des tests consistant à émettre des votes, à les visualiser et à comparer le résultat avec les votes émis; qu'il a été constaté que les machines à voter affichent le contenu de la carte magnétique et non une information contenue dans la mémoire de l'ordinateur; que, le jour des élections, des contrôles ont été effectués dans différents bureaux de vote, dont le bureau nº 52 de la ville de Bruxelles et dans des bureaux de totalisation, dont celui de Bruxelles; que le collège a analysé les logiciels de vote et constaté ce qui suit :

« Des copies du logiciel de vote ont été prises dans tous les bureaux. Ces copies ont été emportées pour analyse. Il en ressort que les exécutables utilisés le jour des élections sont strictement identiques à ceux générés lors de la compilation de référence le 3 octobre et dont le code source a été analysé par les experts.

De plus, un ou plusieurs votes de référence ont été émis dans chaque bureau de vote. Ces votes ont été visualisés sur des PCs différents de ceux utilisés pour l'émission des votes. Tous les votes de références ont été visualisés correctement » (rapport, p. 50);

que, de la même façon, les copies du logiciel de totalisation ont été prises dans tous les bureaux de totalisation et il a été constaté que les « exécutables » de ces logiciels étaient strictement identiques à ceux qui avaient été créés lors de la compilation de référence le 3 octobre; qu'après les élections, le collège a encore effectué d'autres contrôles qui ont permis de constater que le lecteur de cartes magnétiques ne modifie pas le contenu des cartes qui sont dans l'urne; qu'enfin, il résulte du rapport (p. 60) qu'« il est possible de procéder à un recomptage indépendant en visualisant une par une toutes les cartes des urnes d'une commune, et de compter les votes manuellement »; que le collège des experts a conclu qu'il « n'a pas constaté d'erreur au niveau technique dans les systèmes de vote et de dépouillement automatisés susceptible de remettre en cause leur utilisation et leur bon fonctionnement lors des élections communales et provinciales du 8 octobre 2000. L'ensemble des contrôles effectués permet de s'assurer du bon fonctionnement du déroulement du vote électronique » et que « grâce aux améliorations apportées depuis les élections précédentes, le dépouillement électronique par lecture optique est devenu fiable et mûr » (rapport, pp. 67 et 68); qu'il s'ensuit que le vote automatisé est conforme à l'article 25, b), du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, lequel ne proscrit aucun système de vote particulier;

Considérant, en ce qui concerne la question préjudicielle que la requérante souhaite voir posée, que, devant le collège juridictionnel, celle-ci n'a pas invoqué la violation des articles 10 et 11 de la Constitution; qu'en outre le libellé de sa question ne fait pas apparaître que des électeurs de Bruxelles-Ville auraient été traités de manière différente; qu'il n'y a pas lieu de poser la question préjudicielle,

1.6. Arrêt du Conseil d'État du 2 mars 2001.

CONSEIL D'ÉTAT, SECTION D'ADMINISTRATION

ARRÊT

nº 93.716 du 2 mars 2001

A.98.896/VIII-2037

Élections communales de la commune de Jurbise

LE CONSEIL D'ÉTAT, VIIIe CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 29 décembre 2000 par Mario Longo qui demande l'annulation des élections communales qui ont eu lieu à Jurbise le 8 octobre 2000;

Vu le dossier administratif déposé par le gouverneur de la province du Hainaut;

Vu l'avis prévu par l'article 5 de l'arrêté royal du 15 juillet 1956, modifié par l'arrêté royal du 16 septembre 1982, publié au Moniteur belge du 10 janvier 2001;

Vu le mémoire en réponse déposé par le ministre de l'Intérieur;

Vu le rapport de M. Lombaert, auditeur au Conseil d'État;

Vu l'ordonnance du 20 février 2001 fixant l'affaire à l'audience du 28 février 2001;

Vu la notification de l'ordonnance de fixation et du rapport aux parties;

Entendu, en son rapport, Mme Gehlen, conseiller d'État;

Entendu, en leurs observations, Maître Letellier, avocat, comparaissant pour le requérant, et Maître Tulkens, loco Maître Mahieu, avocat, comparaissant pour le ministre de l'Intérieur;

Entendu, en son avis conforme, M. Lombaert, auditeur;

Vu le titre VI, chapitre II, des lois sur le Conseil d'État, coordonnées le 12 janvier 1973;

Considérant que les éléments utiles à l'examen du recours sont les suivants :

1. Le requérant s'est porté candidat aux élections communales du 8 octobre 2000 à Jurbise, sur la liste nº 5 du parti socialiste. Il était conseiller sortant et a présenté sa liste. Il a été élu conseiller communal.

Les résultats proclamés le 8 octobre 2000 sont les suivants :

­ liste nº 2 (Ecolo) : 1 siège (chiffre électoral : 586),

­ liste nº 5 (PS) : 7 sièges (chiffre électoral 1 691),

­ liste nº 14 (NC) : 1 siège (chiffre électoral : 575),

­ liste nº 15 (LB) : 12 sièges (chiffre électoral 2 870).

Cette répartition résulte des quotients 293,00000 pour la liste nº 2, 211,37500 pour la liste nº 5, 287,50000 pour la liste nº 14 et 220,76923 pour la liste nº 15; les quotients qui permettraient à chacune de ces listes d'obtenir un siège supplémentaire sont, respectivement et dans l'ordre : 195,33333; 187,88888; 191,66666; 205,00000.

2. Le 15 novembre 2000, le requérant et Christian Vreux ont introduit une réclamation auprès de la députation permanente du conseil provincial du Hainaut, demandant, selon son dispositif, « D'annuler, pour causes d'irrégularités susceptibles d'influencer la répartition des sièges entre les différentes listes, l'élection communale qui a eu lieu le 8 octobre 2000 à Jurbise.

À titre subsidiaire, avant dire droit, procéder à une relecture des cartes magnétiques contenues dans les urnes électroniques et procéder à un second dépouillement des suffrages exprimés. »

3. Les 12 et 15 décembre 2000, la députation permanente a procédé à des mesures d'instruction.

L'objectif de la première mesure est défini comme suit dans le procès-verbal qui la relate : « De manière à permettre de lever toute ambiguïté en ce qui concerne les résultats obtenus au bureau de vote nº 11 et décodés à partir d'une disquette qui a été réimprimée, l'objectif de la réunion est d'établir une comparaison entre les résultats donnés par la disquette en question et ceux figurant sur la disquette qui constitue le support « original ». Quant à la seconde mesure, elle avait pour objectif de « refaire le dépouillement EPROM par EPROM », c'est-à-dire vérifier la totalisation des votes.

4. Le 15 décembre 2000, la députation permanente a rejeté la réclamation et validé les élections qui ont eu lieu à Jurbise, ainsi que les pouvoirs des candidats proclamés élus respectivement conseillers communaux titulaires et suppléants;

Considérant que l'article 6, alinéa 1er, de l'arrêté royal du 15 juillet 1956 déterminant la procédure devant la section d'administration du Conseil d'État en cas de recours prévu par l'article 76bis de la loi électorale communale, permet à toute personne justifiant d'un intérêt d'envoyer un mémoire au Conseil d'État; que le ministre de l'Intérieur a envoyé un mémoire et invoque un intérêt fonctionnel en relation avec la mise en cause de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé;

Considérant qu'il a déjà été jugé qu'un intérêt de cette nature ne constitue pas l'intérêt spécifique requis au sens de la disposition précitée; que le mémoire en réponse déposé par le ministre de l'Intérieur n'est pas recevable; qu'en revanche, les pièces déposées peuvent être prises en considération en vertu des pouvoirs d'instruction dont dispose le Conseil d'État en la matière;

Considérant qu'un moyen, le deuxième de la requête, est pris de la violation de l'article 18 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé; qu'après avoir rappelé le texte de la disposition visée, le requérant expose qu'au soir du 8 octobre 2000, le président du bureau principal communal n'a pas pu lire la disquette contenant les résultats du bureau de vote nº 11, qu'un tiers, désigné par le collège sortant, a emporté cette disquette au bureau principal cantonal où, selon le procès-verbal du bureau de dépouillement, elle aurait été « réimprimée » et qu'au retour de ce tiers, la disquette ramenée par lui aurait fonctionné; que le requérant soutient qu'en application de la disposition visée au moyen, le président du bureau de dépouillement devait, comme il l'a fait pour la disquette du bureau de vote nº 9, se faire remettre une copie de la disquette du bureau de vote en possession du président du bureau principal de canton; qu'il rappelle que, dans sa réclamation à la députation permanenté, il a sollicité, à titre subsidiaire et avant dire droit, un recomptage des cartes contenues dans l'urne du bureau de vote nº 11 mais qu'au lieu de la mesure demandée, la députation permanente a procédé à des mesures d'instruction dépourvues de pertinence; qu'à propos de la comparaison de la disquette provenant du bureau de dépouillement avec celles en possession du président du bureau principal de canton, le requérant soutient que cette comparaison « a été faite entre les disquettes ayant été manipulées et ayant conduit à la comptabilisation des résultats contestés »; qu'il relève aussi « que les fichiers contenus sur ces disquettes portaient des dates et heures différentes » alors que les procès-verbaux des différents bureaux mentionnent les heures et que « les disquettes qui ont été apportées à la députation permanente n'avaient pas été transmises à qui de droit à la clôture des opérations électorales »; qu'à propos de la seconde mesure d'instruction, il reproche à la députation permanente de n'avoir pas tenu compte de l'information selon laquelle « il y a eu une manipulation effectuée par un employé communal sur une machine avec usage d'une disquette d'origine extérieure au bureau, non renseignée au procès-verbal »; qu'il conclut qu'en présence d'indices sérieux et concordants permettant, même en l'absence d'observation au procès-verbal, de mettre en doute la régularité de l'ensemble des opérations à partir du bureau de vote nº 11, il incombait à la députation permanente de procéder à un comptage des cartes magnétiques mais que cette mesure est devenue inopérante, puisque l'urne de ce bureau a été descellée;

Considérant qu'à l'issue du scrutin, le support original de mémoire et la ou les copies de ce support sont placés dans des enveloppes distinctes et remis, contre récépissé, au président du bureau principal cantonal ou communal; que l'article 18 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé porte que :

« Le président du bureau principal de canton ou communal, selon le cas, procède, dès réception des supports de mémoire provenant du bureau de vote, à l'enregistrement du support original sur le support de mémoire destiné à la totalisation des votes.

Si l'enregistrement au moyen du support de mémoire original se révèle impossible, le président du bureau principal recommence l'opération au moyen de la copie de ce support.

Si cette opération se révèle également impossible, le président du bureau principal requiert de la commune concernée la fourniture de l'urne électronique correspondante; après l'avoir descellée, il procède à un enregistrement complet des cartes magnétiques qu'elle contient. L'enregistrement du bureau de vote terminé, le président scelle à nouveau l'urne et la retourne à la commune. Il procède ensuite à l'enregistrement du nouveau support de mémoire ainsi constitué »;

Considérant qu'il ressort du procès-verbal du bureau de dépouillement et de recensement que, pour le bureau de vote nº 11 :

« La disquette initiale a dû être réimprimée suite à un problème informatique.

Après vérification, elle a inscrit les données chiffrées qui figuraient au support papier »;

que la députation permanente admet, dans la décision dont appel, que le président du bureau principal communal n'a pas respecté le prescrit de l'article 18 précité lorsqu'il a été confronté à la défectuosité d'une copie du support de mémoire provenant du bureau de vote nº 11; que la députation permanente a procédé à deux mesures d'instruction; qu'elle constate que la première, consistant en une comparaison des informations fournies par la disquette « réimprimée » avec celles fournies par les disquettes « copies », révèle des résultats identiques; qu'elle en déduit que « la totalisation de l'ensemble des résultats du scrutin communal de Jurbise s'est faite sur base de données incontestables », en ce compris pour le bureau de vote nº 11; qu'à l'occasion de la seconde mesure d'instruction visant à vérifier la totalisation des votes, il a été constaté que l'urne du bureau de vote nº 11 était descellée; que la décision dont appel ne fait aucune mention de cet élément mais constate seulement que le recensement général des votes opéré au départ des « EPROM » des huit bureaux de vote a fourni des résultats « exactement identiques à ceux du recensement général des votes dressé le 8 octobre par le bureau principal »;

Considérant que la circonstance que l'urne provenant du bureau de vote nº 11 a été descellée à une date indéterminée se situant entre le 8 octobre et le 15 décembre 2000 ne permet pas d'exclure la possibilité de manipulation des cartes magnétiques qui s'y trouvaient ou leur remplacement par des cartes autres que celles effectivement utilisées par les électeurs; que l'opération de vérification des disquettes a été menée par le représentant d'une firme privée, à l'aide de son propre ordinateur portable équipé du logiciel permettant la lecture et la comparaison des disquettes des bureaux de vote; qu'il n'existe aucune impression sur papier des résultats du bureau de vote nº 11; que les disquettes des bureaux de vote ne sont pas lisibles et qu'une vérification de la totalisation n'est pas possible sans le logiciel d'une firme privée; qu'enfin, il est troublant de constater que c'est une disquette en provenance du bureau de vote nº 11, « réimprimée » selon des modalités qui restent obscures, qui a été la source de difficultés alors que le requérant dénonce ­ certes sans pouvoir s'appuyer sur les constatations d'un procès-verbal ­ le fait qu'une disquette de ce bureau a été pendant un temps indéterminé en possession d'une personne qui ne faisait pas partie dudit bureau;

Considérant qu'il est établi que l'article 18 de la loi du 11 avril 1994 organisant le vote automatisé n'a pas été respecté; qu'en raison des circonstances décrites ci-dessus, il n'est pas possible au Conseil d'État, statuant comme juge d'appel et en pleine juridiction, d'opérer un contrôle sur les résultats de l'élection en ce qui concerne le bureau nº 11; que le nombre d'électeurs y ayant voté est largement supérieur au nombre de voix qui permettrait de modifier la répartition des sièges entre les listes; que le moyen est fondé,

DÉCIDE :

Article unique.

Le recours est accueilli. La décision de la députation permanente du conseil provincial du Hainaut du 15 décembre 2000 est infirmée. Les élections qui ont eu lieu à Jurbise le 8 octobre 2000 sont annulées.

Ainsi prononcé à Bruxelles, en audience publique, le deux mars deux mille un par :

M. Geus, président de chambre,

Mme Daurmont, conseiller d'État,

Mme Gehlen, conseiller d'État,

Mme Hondermarcq, greffier.

Le Greffier, Le Président,
M.-Cl. Hondermarcq. J.-Cl. Geus.

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(1) Moniteur belge du 20 avril 1994; modifiée par les lois du 18 décembre 1998 (Moniteur belge du 31 décembre 1998) et du 12 août 2000 (Moniteur belge du 25 août 2000).

(2) Article 2, § 1er, de la loi du 11 avril 1994.

(3) Article 4.

(4) Article 3, § 4, alinéa 1er.

(5) Article 8, alinéas 2 et 3.

(6) Article 9.

(7) Article 12, deuxième alinéa.

(8) Article 21, § 2.

(9) Moniteur belge du 6 juillet 1983.

(10) Droits de l'homme et élections, guide des élections : aspects juridiques, techniques et relatifs aux droits de l'homme, Nations unies, New York et Genève, 1994, p. 11.

(11) F. Delpérée, Le contentieux électoral, Paris, PUF, collection Que sais-je ?, 1998, p. 3.

(12) Idem, p. 12.

(13) Documents officiels de l'Assemblée générale des Nations unies, 16e session, 3e commission, 1096e séance.

(14) Centre pour les droits de l'homme, op. cit., p. 16.

(15) Centre pour les droits de l'homme, op. cit., p. 17.

(16) Chambre, Doc. parl., session 1999-2000, 775/001, commentaires de l'article 5 du projet.

(17) M. Verdussen, Le droit des élections communales, Éd. Nemesis, 1988, p. 109.

(18) F. Delpérée, op. cit, p. 24.

(19) Ibidem.

(20) Article 5bis.

(21) Article 5, § 2, alinéa 1er.

(22) Article 5, § 2, alinéa 2.

(23) Arrêt nº 23 117 du 1er avril 1983, élections Heuvelland.

(24) Arrêts nº 14 906 du 21 septembre 1971, élections Opoeteren; nº 22 967 du 22 février 1983, élections Wezembeek-Oppem.

(25) Arrêts du Conseil dÉtat nº 22 908 du 3 février 1983, élections Alost; nº 22 910 du 3 février 1983, élections Geel; nº 22 981 du 24 février 1983, élections Tielt; nº 23 015 du 9 mars 1983, élections Rebecq; nº 51 389 du 27 janvier 1995, élections Bernissart (présomption de régularité); nº 23 007 du 7 mars 1983, élections Glabbeek; nº 23 016 du 10 mars 1983, élections Ichtegem; nº 23 063 du 24 mars 1983, élections Oudenburg (renversement de la présomption de régularité).

(26) Arrêt du Conseil d'État nº 22 919 du 9 février 1983, élections Mont-de-L'Enclus.

(27) Arrêt du Conseil d'État nº 51 933 du 1er mars 1995, élections Saint-Gilles.

(28) Article 8, alinéas 2 et 3.

(29) L'un ou l'autre de ces supports de mémoire n'a posé aucun problème lors de la comptabilisation des résultats donnés par le même bureau principal de canton de Lens à l'occasion des élections provinciales, ainsi qu'il en résulte du procès-verbal dudit bureau.

(30) Les dispositions de la loi du 12 septembre 1895 sur les élections communales, modifiées par les lois du 30 avril 1910 et du 15 avril 1920 ont été codfiées avec les dispositions de la loi du 19 février 1921 par arrêté royal du 21 février 1921; les lois ainsi codifiées, modifiées par les lois du 29 juin 1921 et 11 août 1928, la loi de classification des communes du 22 juillet 1932 et la loi du 30 juillet 1932 ont été codifiées par arrêté royal du 4 août 1932 sous le titre de « Loi électorale communale » avec les dispositions de la loi déjà citée du 15 avril 1920, modifiée par la loi, déjà également citée, du 11 août 1928 concernant la liste des électeurs communaux.

(31) Moniteur belge du 20 avril 1994; modifiée par les lois du 18 décembre 1998 (Moniteur belge du 31 décembre 1998) et du 12 août 2000 (Moniteur belge du 25 août 2000).

(32) Article 2, § 1er, de la loi du 11 avril 1994.

(33) Article 4.

(34) Article 3, § 4, alinéa 1er.

(35) Article 9.

(36) Article 12, alinéa 2.

(37) Article 18.

(38) Article 3, § 4.

(39) Idem.

(40) Article 21, § 2.

(41) Président du bureau principal communal.

(42) Madame Cavoy, psycho-pédagogue de formation, travaille comme informaticienne à la province du Hainaut; monsieur Sdao est technicien au centre informatique provincial.

(43) Moniteur belge du 6 juillet 1983.

(44) Droits de l'homme et élections, guide des élections : aspects juridiques, techniques et relatifs aux droits de l'homme, Nations unies, New York et Genève, 1994, p. 11.

(45) F. Delpérée, Le contentieux électoral, Paris, PUF, coll. Que sais-je ?, 1998, p. 3.

(46) Idem, p. 12.

(47) Documents officiels de l'Assemblée générale des Nations unies, 16e session, troisième commission, 1096e séance.

(48) Centre pour les droits de l'homme, op. cit., p. 16.

(49) Centre pour les droits de l'homme, op. cit., p. 17.

(50) Doc. Chambre, nº 775/001, 1999/2000, commentaires de l'article 5 du projet.

(51) M. Verdussen, Le droit des élections communales, Éd. Nemesis, 1988, p. 109.

(52) F. Delpéree, op. cit., p. 24.

(53) Ibidem.

(54) Article 5bis.

(55) Article 5, § 2, alinéa 1er.

(56) Article 5, § 2, alinéa 2.

(57) À laquelle est joint un dossier de pièces.

(58) Voir Conseil d'État, arrêts élections Rhode-Saint-Genèse, nº 23.190, du 3 mai 1983 (« on ne peut affirmer qu'une commune a intérêt en tant que telle à intenter une action pour ou contre l'approbation des élections communales; le conseil communal n'a pas à prendre parti à cet égard »); élections Saint-Josse-ten-Noode, nº 51.863, du 1er mars 1995.

(59) À propos des membres des bureaux de vote et de dépouillement et des membres des bureaux principaux, voir Conseil d'État, arrêts élections Nukerke, nº 7014, du 14 avril 1959; élections Orgeo, nº 11.008, du 5 février 1965; élections Bunsbeeck, nº 14.907, du 21 septembre 1971; élections Evere, nº 23.058, du 23 mars 1983.

(60) Voir Conseil d'État, arrêt élections Farciennes, nº 91.922, du 28 décembre 2000.

(61) Commission européenne des droits de l'homme, décision 17 mai 1985, Clerfayt, Legros et autres contre la Belgique, réquisitoire nº 10650, DR 42, p. 212, commentée par M. Kaiser, « Le droit à des élections libres ... L'application timide d'une disposition ambitieuse », in Les droits de l'homme au seuil du troisième millénaire. Mélanges en hommage à Pierre Lambert, Bruxelles, Bruylant, 2000, pp. 435 et suivantes, spécifiquement p. 440.

(62) Conseil d'État, arrêt Lecoq et Taquin, nº 32.026, du 17 février 1989, JT, 1989, p. 254.

(63) Voir J. Velu et R. Ergec, « La Convention européenne des droits de l'homme », in RPDB, tome VII, Bruxelles, Bruylant, 1990, p. 663.

(64) Cet arrêt étant très récent, il est joint au présent rapport.

(65) Voir la lettre du 9 février 2001 du conseiller adjoint Jean-Marc Bargibant, fonctionnaire des services fédéraux du gouvernement provincial du Hainaut qui a préparé le dossier pour la députation permanente, en réponse à la lettre de l'auditeur rapporteur du 7 février 2001, ainsi que les annexes à cette lettre. Ces documents et disquettes sont joints au dossier de l'élection.

(66) Voir aussi le procès-verbal de cette séance de vérification de la totalisation des votes (pièce nº 7 du dossier de l'élection).

(67) Voir aussi le procès-verbal de cette séance de vérification des disquettes (pièce nº 7 du dossier de l'élection).

(68) Ni l'auditeur rapporteur, ni le service informatique du Conseil d'État n'ont pu lire les disquettes litigieuses.