Questions et Réponses

Sénat de Belgique


Bulletin 2-20

SESSION DE 1999-2000

Questions posées par les Sénateurs et réponses données par les Ministres

(Fr.): Question posée en français - (N.): Question posée en néerlandais


Ministre de l'Intérieur

Question nº 582 de M. de Clippele du 12 avril 2000 (Fr.) :
« Car-jacking ». ­ Recrudescence. ­ Mesures politiques.

Il me revient de nombreux témoignages selon lesquels les attaques par des délinquants de conducteurs de voitures seraient d'une fréquence en croissance exponentielle, en tout cas dans la Région de Bruxelles-Capitale.

Ces agressions, dont le but est le vol de la voiture de la victime et/ou de ses effets de valeur (bijoux, argent liquide, chèques vierges, cartes de crédit) seraient de plus en plus violentes, s'accompagnant régulièrement de menaces de mort « gratuites » à l'encontre de la victime, dont le choc psychologique s'en trouve aggravé.

Le comportement des agresseurs donne à penser qu'ils ne craignent ni d'être identifiés, ni d'être arrêtés, ni d'être sévèrement punis.

Je demande dès lors à l'honorable ministre quelles mesures il compte prendre pour lutter contre ce fléau, mesures vis-à-vis des forces de l'ordre, d'une part, et vis-à-vis de la population qui attend des dispositions plus sécurisantes, d'autre part.

Réponse : J'ai l'honneur de communiquer à l'honorable membre ce qui suit :

Si, actuellement, on assiste à une augmentation des faits de car-jacking à l'intérieur de nos frontières, le car-jacking ne constitue toutefois pas, statistiquement, un phénomène d'une grande ampleur puisqu'il représente approximativement 5 % du nombre total des voitures volées annuellement.

Même si le car-jacking reste un phénomène assez marginal dans notre pays, le fait que les médias y portent un intérêt grandissant a pour conséquence d'engendrer un sentiment d'insécurité plus subjectif qu'objectif au sein de la population et, pour effet pervers, de créer des « car-jackers par imitation ».

Le car-jacking (vol d'un véhicule avec violence ou menace à l'encontre du conducteur et/ou des passagers) est un délit de circonstance, c'est-à-dire que l'auteur commettra l'infraction si des opportunités intéressantes s'offrent à lui.

En ce qui concerne la prévention du car-jacking, vu la nature de ce délit, seule la prévention situationnelle peut jouer un rôle. Celle-ci vise à modifier les situations concrètes préjugées génératrices de délits. Elle comprend donc notamment des mesures de techno-prévention.

Raison pour laquelle, en matière de sensibilisation de la population à cette problématique, les services de police diffusent régulièrement des conseils préventifs.

Par ailleurs, au niveau fédéral, le groupe technique de la Plate-forme nationale de lutte contre la criminalité relative aux voitures, créée en 1997 à l'initiative des ministères de la Justice et de l'Intérieur, a proposé l'élaboration d'un cahier des charges technique relatif aux systèmes de prévention du car-jacking et aux systèmes « après-vol ». Ce cahier des charges CJ1 (systèmes d'immobilisation du véhicule) a été élaboré par un groupe de travail spécialisé composé d'assureurs, de représentants du secteur de l'automobile, de fabricants de systèmes « après-vol » et de l'Association nationale pour la protection contre l'incendie et l'intrusion (ANPI) et est entré en vigueur le 1er janvier 2000.

CJ1 se réfère aux systèmes qui, à distance, font ralentir ou immobilisent progressivement une voiture volée ou qui empêchent le redémarrage après un arrêt. Une liste de systèmes agréés paraîtra dès que les premiers systèmes auront passé les tests nécessaires. Outre le cahier des charges CJ1, un autre cahier des charges est en cours d'élaboration. Celui-ci reprend des systèmes de localisation et de retraçage. Ces systèmes doivent faciliter la récupération d'un véhicule volé. Les systèmes repris dans le cahier des charges CJ1 ont pour but d'assurer une garantie minimale en ce qui concerne la sécurité du conducteur et la sécurité des tiers.

Enfin, le Secrétariat permanent à la politique de prévention (SPP), mène des actions de prévention sur les parkings avec les services de police et organise avec ceux-ci la gravure des véhicules permettant d'identifier les propriétaires des véhicules contrôlés.

Sur le plan répressif, il ne peut être actuellement question d'une politique nationale de lutte contre le car-jacking, étant donné la disparité géographique dans la concentration et la fréquence du phénomène. Cette problématique est donc traitée au niveau local par les services policiers en fonction des données statistiques dont ils disposent. Dès lors, un renforcement des patrouilles aux endroits sensibles, un travail d'identification des bandes organisées de car-jackers, etc. sont réalisés.

Afin d'aider les personnes qui ont subi une tentative ou un fait de car-jacking, les forces de l'ordre les orientent vers leur bureau d'assistance aux victimes. Cette démarche a montré son utilité.

Le danger d'une utilisation massive et exclusive de mesures techniques de sécurisation des véhicules est l'escalade dans la violence. Les États-Unis font d'ailleurs actuellement l'expérience de cette escalade. En effet, le killjacking a fait son apparition aux côtés du car-jacking et du home-jacking.

La politique du ministère de l'Intérieur en matière de prévention est donc d'encourager la divulgation de conseils de prévention (afin d'éviter le vol et d'agir de manière adéquate lors d'une tentative de vol) et la proposition d'actions que pourraient prendre les citoyens.

En matière répressive, les forces de l'ordre ont mis en oeuvre des actions susceptibles d'enrayer le car-jacking. Toutefois, ce phénomène étant assez récent, il n'est pas actuellement possible de mesurer l'efficacité de leurs actions.