3-173

3-173

Sénat de Belgique

Annales

JEUDI 29 JUIN 2006 - SÉANCE DE L'APRÈS-MIDI

(Suite)

Questions orales

Question orale de M. Pierre Galand au premier ministre et au vice-premier ministre et ministre des Finances sur «le nouveau cadre fiscal pour le secteur du diamant à Anvers et le risque de blanchiment des "diamants du sang"» (nº 3-1182)

M. Pierre Galand (PS). - Fin mai, le premier ministre a rencontré les représentants du secteur du diamant en vue d'un accord global permettant un fonctionnement plus transparent de ce secteur.

À cette occasion, le porte-parole du HRD (Hoge Raad voor Diamant - Conseil Supérieur du Diamant) a avancé différentes pistes de réflexion actuellement examinées par un groupe de travail composé de représentants du gouvernement et du secteur de diamant.

Ce porte-parole a avancé notamment la possibilité pour les diamantaires de réévaluer leurs stocks avec un niveau plus en phase avec les conditions actuelles du marché, une régularisation dont le taux est estimé à 3%. Une autre mesure devrait permettre de rapatrier des bénéfices opérationnels en Belgique pour les entreprises qui disposent de filiales à l'étranger et tout cela, dans un environnement fiscal favorable, c'est-à-dire sans s'acquitter de taxes supplémentaires.

D'après le porte-parole, les entreprises diamantaires pourraient importer des diamants bruts dans un cadre fiscal plus favorable, c'est-à-dire sans payer la cotisation sociale de 0,3% acquittée actuellement. Enfin, il est envisagé de créer un « port franc » à Zaventem en vue de faciliter les exportations de diamants au départ de la Belgique.

Compte tenu de l'action engagée par le secrétaire d'État à la lutte contre la fraude fiscale, des travaux de la commission Mondialisation du Sénat et de la Chambre sur le statut des paradis fiscaux et des efforts menés à l'échelon international pour lutter contre les « diamants du sang », les engagements qui seront pris par notre gouvernement méritent toute notre attention.

Dans le secteur du diamant, certaines de ces mesures s'apparentent à une sorte de DLU pour diamantaires. Je pense, notamment, à la mesure sur la réévaluation des stocks ou à la mesure sur le rapatriement des bénéfices opérationnels.

Quelle est l'évolution de la négociation - si négociation il y a ? Quelle est la position du gouvernement ? Quel serait l'impact financier de telles mesures ?

Enfin, monsieur le vice-premier ministre, la mise en oeuvre d'un tel cadre fiscal ne risque-t-elle pas d'avoir un impact négatif sur les mesures existantes en matière de traçabilité des diamants ?

M. Didier Reynders, vice-premier ministre et ministre des Finances. - Je peux vous rassurer : nous allons poursuivre évidemment dans la même voie en ce qui concerne la lutte contre la fraude fiscale, y compris dans le secteur diamantaire, et l'application stricte de la législation relative au « diamant de la guerre ». Vous y avez fait allusion, notamment au volet de la traçabilité.

Sur ce point, il n'y a donc aucun doute à avoir : la volonté est très claire de poursuivre dans la même voie. Vous avez d'ailleurs rappelé le travail réalisé par le secrétaire d'État en charge de la lutte contre la fraude fiscale.

À côté de cela, concernant la concurrence entre centres commerciaux, notamment entre les centres émergents et le centre anversois, il est essentiel de pouvoir renforcer la transparence mais aussi la compétitivité en matière économique et fiscale du centre diamantaire anversois afin qu'il puisse disposer des atouts nécessaires pour être en mesure de faire face à la concurrence et de poursuivre son développement.

L'objectif des possibilités que vous avez citées et qui figurent effectivement dans les textes examinés par le gouvernement et le secteur est de promouvoir l'emploi en faisant d'Anvers un centre mondial de distribution diamantaire. Cette démarche comporte également un volet social. Le financement du plan social nécessaire fait actuellement l'objet d'âpres négociations. La note relative aux points sensibles concerne donc différents aspects.

Je tiens à vous rassurer : nous n'avons pas oublié les principes qui ont toujours été défendus à propos de la traçabilité et la lutte contre la fraude. Le but est simplement de pouvoir garantir à la fois cette traçabilité et un meilleur contrôle de la fraude, en particulier de la fraude fiscale, mais également de donner des atouts suffisants pour qu'Anvers puisse se développer comme centre dynamique et compétitif dans un monde qui, y compris dans ces matières, est de plus en plus globalisé.

Je reviendrai volontiers présenter l'adaptation, en mesures concrètes, des intentions évoquées avec le secteur.

Il serait intéressant de vous présenter, à la fois, les mesures fiscales qui peuvent permettre un essor de la place anversoise, les mesures sociales, si les négociations aboutissent, mais aussi, bien entendu, l'ensemble des mécanismes qui continueront à garantir la traçabilité et la lutte efficace contre la fraude.

M. Pierre Galand (PS). - Le ministre a raison de dire qu'il faut maintenir la capacité concurrentielle d'Anvers.

Cependant, la complexité du mécanisme de réévaluation des stocks m'inquiète. Si la transparence n'est pas absolue, le risque existe, vu les facilités fiscales accordées, de voir des diamantaires déclarer beaucoup plus que la valeur réelle de leur stock.

On aboutirait ainsi dans les années à venir à une autre forme de fraude. Il faut donc être extrêmement attentif à la manière de procéder.