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Question écrite n° 5-92

de Bart Tommelein (Open Vld) du 30 aôut 2010

au ministre de la Coopération au développement

Union européenne (UE) - Paiement de droits de pêche dans les pays en développement - Effet sur l'autonomie

réglementation de la pêche
gestion des pêches
droit de pêche
pays en développement
Afrique
pêche durable

Chronologie

30/8/2010Envoi question
22/10/2010Réponse

Aussi posée à : question écrite 5-91

Question n° 5-92 du 30 aôut 2010 : (Question posée en néerlandais)

Selon diverses sources d'information, l'Union européenne (UE) paie des droits de pêche dans des eaux non européennes pour des armateurs occidentaux avec l'argent des contribuables européens. Ainsi, les pays africains concernés reçoivent chaque année des dizaines de millions d'euros mais les conventions constitueraient un obstacle à l'autonomie des pays en développement. Ce système aurait un effet néfaste à terme pour la gestion durable des réserves de poissons ainsi que pour les nombreux habitants de ces pays qui dépendent de la pêche pour survivre.

Les pêcheurs locaux des pays africains doivent toujours s'éloigner davantage de leur propre côte pour pêcher ou se retrouvent sans travail en raison de la pêche internationale à grande échelle.

Mes questions sont dès lors les suivantes :

1) Comment le ministre réagit-il à l'information selon laquelle l'Europe assure elle-même le financement de droits de pêche dans des eaux non européennes, plus particulièrement pour des pays en développement ? Peut-il développer sa réponse ?

2) Peut-il également indiquer de quels montants il s'agit, et cela par pays concerné ? Peut-il indiquer si les coûts de ces droits de pêche sont intégralement portés en compte aux armateurs en question ?

3) Pense-t-il comme moi que l'achat systématique de droits de pêche de pays africains peut à long terme entraver leur autonomie ? Peut-il développer sa réponse en ce qui concerne les garanties relatives à la pêche durable ?

4) Est-il favorable à l'achat à grande échelle de droits de pêche de pays en développement dans une perspective de coopération au développement ?

Réponse reçue le 22 octobre 2010 :

1. La conclusion d’accords internationaux octroyant aux États membres des possibilités de pêche dans les eaux de pays tiers est une compétence exclusive de l’Union européenne (UE). À ce titre, de nombreux accords bilatéraux de pêche ont été conclus depuis 1980 avec des pays en voie de développement d’Afrique et du Pacifique. Ces accords, qui revêtaient au départ un caractère exclusivement commercial, ont été remplacés progressivement par de véritables accords de partenariat dans le domaine de la pêche (APP), suite à la réforme de la politique commune de la pêche (PCP) de 2002.

La Belgique ne dispose pas d’une flotte de pêche lointaine et n’est pas directement concernée par ces accords.

Les APP visent à encourager le développement d’une pêche responsable sur une base durable, rationnelle et équitable dans les eaux des pays partenaires. Ils comportent une contrepartie financière à charge du budget de l’UE et le versement de redevances par les armateurs pour la délivrance de licences de pêche.

La contrepartie financière est un élément central des APP et sa détermination doit correspondre à l’intérêt mutuel de l’UE et du pays partenaire. Pour ce faire, et à la suite des conclusions du Conseil du 19 juillet 2004 sur les Accords de partenariat dans le domaine de la pêche conclus avec des pays tiers (doc. 11485/1/04), la contrepartie financière est déterminée en prenant principalement en considération :

Le niveau des redevances payables par les armateurs européens doit, selon les Conclusions du Conseil, être juste, équilibré et non discriminatoire.

2. Selon la Commission européenne, il existe actuellement quinze APP en vigueur avec des pays d’Afrique et du Pacifique. Ils consistent en accords multi-espèces (trois) et en accords thoniers (douze). Ils s’appliquent pour une période de trois à six ans selon le pays partenaire. Les contreparties financières à charge de l’UE et les estimations des redevances à payer intégralement par les armateurs pour les niveaux de captures autorisés se présentent comme suit :

3. Les APP sont le fruit de la réforme de la politique commune de la pêche de 2002 axée sur la conservation et l’exploitation durable des ressources halieutiques et du Sommet mondial sur le développement durable (Johannesburg, 2002). Ces accords n’octroient des licences de pêche que pour l’exploitation du surplus des ressources halieutiques des pays partenaires, veillent à éviter toute surexploitation des stocks présentant un intérêt pour les populations locales et contribuent à lutter efficacement contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (pêche INN). Pendant toute la durée de l’accord, l’UE et les autorités du pays partenaire coopèrent, selon des modalités prévues par l’accord, en vue de suivre l’évolution de l’état des ressources halieutiques, ce qui peut aboutir à une augmentation ou à une réduction des possibilités de pêche.

Au vu de ce qui précède, il apparaît que les APP renforcent la cohérence entre la politique commune de pêche et la politique de l’environnement. L’octroi de droits de pêche aux navires européens dans le cadre de ces accords ne devrait pas porter préjudice aux populations locales en mettant en danger l’état des ressources halieutiques des pays partenaires.

4. Bien que les APP fassent partie du volet externe de la politique commune de la pêche et que les dépenses liées à ces accords soient imputées à la rubrique 2 « Conservation et gestion des ressources naturelles » du budget de l’UE, ils contribuent aussi à la politique de coopération au développement.

En général, 50 à 100% de la contribution financière de l’UE est consacrée au développement de la politique sectorielle de la pêche du pays partenaire. La gestion des fonds disponibles par l’État bénéficiaire est fondée sur l’identification conjointe par cet État et la Commission européenne des objectifs à réaliser et de la programmation annuelle et pluriannuelle qui s’y rapporte. Pour la mise en œuvre de l’accord, une commission mixte se réunit au moins une fois par an pour évaluer l’évolution des pêcheries et du développement du secteur, notamment sur la base d’indicateurs préalablement convenus entre les parties, et procéder, si nécessaire, aux adaptations requises.

Parmi les actions possibles dans le cadre d’un APP, on peut citer: la modernisation de la flotte côtière et des infrastructures portuaires, le développement de micro-entreprises, la formation des pêcheurs et le soutien à la recherche scientifique. En outre, les APP favorisent, de manière mutuellement profitable, l’intégration des opérateurs de l’UE dans le secteur des pêches du pays partenaire.

L’appui du secteur manufacturier et la recherche de synergies entre les entreprises et les entreprises du Nord et du Sud peut apporter une contribution importante à la croissance économique et réduction de la pauvreté. Toutefois, il convient de mentionner pour être complet que la conclusion des Accords de Partenariat relatifs à la pêche est loin d'être le seul instrument européen ou de la Coopération belge en Afrique ou dans le Pacifique Sud. Au niveau européen il existe, par exemple, le Fonds européen de développement et de la thématique et géographique « Development Cooperation Instrument » (ICD), auquel la Belgique contribue au travers de sa coopération multilatérale. Au niveau belge, nous nous concentrons via la coopération bilatérale directe et indirecte sur les dix-huit pays partenaires de notre coopération au développement. Parmi les pays où l'UE a conclu un accord de partenariat pêche, figure notamment, au sein de ces dix-huit pays partenaires, le Maroc et le Mozambique.