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Question écrite n° 5-9114

de Bert Anciaux (sp.a) du 24 mai 2013

au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et des Affaires européennes

La loi anti-homosexuels en Russie

Conseil des droits de l'homme ONU
Russie
discrimination fondée sur l'orientation sexuelle
droits de l'homme

Chronologie

24/5/2013Envoi question
10/10/2013Réponse

Requalification de : demande d'explications 5-3029

Question n° 5-9114 du 24 mai 2013 : (Question posée en néerlandais)

Le parlement russe a adopté de manière quasi anonyme une loi punissant toute « propagande de l'homosexualité auprès des mineurs ». On risque pour ce « crime » une amende de 500.000 roubles.

La loi constitue clairement une atteinte à la liberté d'expression et va à l'encontre des obligations internationales de la Russie visant à protéger les homosexuels, transgenres et bissexuels contre la discrimination. On peut craindre que la loi ne contienne aucune définition précise de la « propagande de l'homosexualité » avec, par conséquent, une interprétation très vague et le risque que les gens soient punis pour ce qu'ils sont.

Par ailleurs, on peut également craindre que les activistes et organisations nationales et internationales qui se sont investis pour promouvoir les droits de l'homme et la santé reproductive soient maintenant en danger. Ces organisations sont déjà sérieusement réprimées depuis que le législateur russe a annoncé, au début de cette année, qu'ils devaient se faire enregistrer comme « agents étrangers » et qu'ils devaient se soumettre à toutes sortes de restrictions.

Que pense le ministre de l'adoption, par la Douma, de cette proposition de loi homophobe ? Le ministre partage-t-il le point de vue selon lequel cette proposition de loi est contraire à la réglementation en matière de droits de l'homme, discrimine les homosexuels, transgenres et bisexuels (LBGT) et constitue une violation flagrante de la liberté d'expression ?

De quelle manière le ministre, au nom du gouvernement, fera-t-il part aux autorités russes de l'inquiétude de notre pays ? A-t-il déjà débattu de cette question avec l'ambassadeur russe ? Si non, pourquoi pas ? Envisage-t-il de le faire ? Quelles autres démarches estime-t-il opportunes ? Quand seront-elles entreprises et peut-il nous expliquer sa manière d'aborder cette question ?

Dans ce contexte, le gouvernement prendra-t-il des initiatives aux niveaux européen et international ? Le ministre reconnaît-il que ce dossier requiert un signal politique fort ? Le gouvernement belge recherche-t-il activement des États membres partageant le même point de vue ?

Réponse reçue le 10 octobre 2013 :

Le vote par la Douma le 25 janvier dernier d’une loi qui pénalise la « propagande homosexuelle vis-à-vis des mineurs » est effectivement une évolution inquiétante à laquelle je suis attentive. Cette loi prévoit des amendes pour des personnes et des organisations qui se rendent coupables d’exercer cette activité mal définie.  

La haute représentante Catherine Ashton a diffusé un communiqué peu de temps après l’approbation de la loi afin d’exprimer son inquiétude face à cette évolution. Elle estime que l’application de la loi pourrait renforcer la discrimination envers les personnes LGBT et les personnes qui les soutiennent, en particulier par la limitation de leur liberté d’association et de manifestation. La haute représentante appelle la Russie à respecter ses engagements nationaux et internationaux- en particulier dans le cadre du Conseil de l’Europe, comme la Convention européenne des Droits de l’Homme- et de protéger la jouissance de ces droits par toutes les personnes.  

Je me joins aux déclarations de madame Ashton. J’ai également abordé la situation des droits de l’Homme en Russie avec mon collègue russe Lavrov lors de ma visite en Russie le 28 janvier.  

En mars 2012, notre pays est intervenu au sein du Conseil des droits de l’Homme de l’Organisation des Nations unies (ONU) pour demander d’être attentif à la problématique de la criminalisation et la discrimination des personnes LGBT. D’ailleurs, la Belgique est membre du core-group LGBT à Genève.  

La Belgique est également intervenue au sujet de la problématique des droits LGBT en Russie dans le cadre de la Revue Périodique Universelle de la Russie le 29 avril dernier au sein du Conseil des droits de l’Homme. La délégation belge a, entre autres, fait des recommandations visant à la suppression des lois et règlements concernés.   

La protection des droits des personnes LGBT est une de mes priorités en matière de droits de l’Homme, encore plus parce que notre pays, qui était le deuxième à adopter le mariage homosexuel, jouit d’une crédibilité en la matière. Ceci se joue à plusieurs niveaux : dans le cadre de l’ONU, par le soutien d’ONG, dans des déclarations publiques et en abordant la thématique lors de discussions bilatérales. Les ambassadeurs belges sont au courant de cette priorité. Évidemment, cette question est abordée avec des pays semblables, surtout au niveau européen.  

La défense des droits LGBT est également une des priorités de l’Union européenne (UE). L’UE a une « boîte à outils » LGBT dans laquelle les différents agissements qui peuvent être utilisés par les délégations de l’UE et des États membres représentés sur place, sont énumérés. Il s’agit entre autres de déclarations publiques, de démarches, de soutien à la société civile, la présence lors des procès, etc. Les ambassades de l’UE à Moscou suivent de près cette affaire et elles sont en contact avec les organisations concernées.

Pour l’efficacité de nos réactions, je préfère les démarches dans un cadre UE et Organisation des Nations unies (ONU) au lieu d’une action nationale non concertée. Ce qui compte est le résultat. C’est comme cela que fonctionne et que doit fonctionner la diplomatie.