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Question écrite n° 5-8131

de Bert Anciaux (sp.a) du 14 février 2013

à la ministre de la Justice

Utilisation du nom de famille du père - Procédure européenne à l'encontre de la Belgique

nom de famille
recours contentieux (UE)
Cour de justice de l'Union européenne
procédure d'infraction (UE)
mariage mixte

Chronologie

14/2/2013Envoi question
18/6/2013Réponse

Question n° 5-8131 du 14 février 2013 : (Question posée en néerlandais)

La Belgique doit se justifier devant la Cour de Justice européenne au sujet de la loi qui prévoit que les enfants dont au moins un des parents est belge doivent être enregistrés sous le nom de famille du père. Ayant reçu diverses plaintes émanant de parents, la Commission a décidé d'assigner la Belgique devant la Cour européenne de justice. Elle soutient que cette loi n'est conforme ni à la libre circulation ni à la jurisprudence européenne.

Le problème porte sur les enfants nés en Belgique de parents dont l'un est belge et l'autre originaire d'un autre État membre de l'Union européenne. Les communes refusent d'enregistrer ces enfants sous un autre nom que celui de leur père, même s'ils sont déjà enregistrés au consulat de l'autre État membre sous un double nom. Une demande de modification en vue de faire enregistrer le nom de famille complet ne peut se faire qu'au prix d'une procédure juridique.

Cela a pour conséquence que tous les documents officiels tels que les actes d'état civil, les attestations, les certificats et diplômes qui sont remis en Belgique à ces enfants au cours de leur vie sont libellés sous un autre nom que ceux qu'ils ont reçus dans l'État de leur parent non belge.

Mes questions sont les suivantes.

1. Que pense la ministre de l'assignation de la Belgique devant la Cour européenne de justice par la Commission européenne au sujet de cette problématique ? Partage-t-elle le point de vue de la Commission qui considère que l'enregistrement sous le nom de famille du père est la source de paperasseries inutiles et éventuellement aussi de problèmes en raison des doutes et de la confusion qu'il engendre quant à l'identité des personnes concernées et à l'authenticité de leurs documents officiels ? Dans l'affirmative, envisage-t-elle de modifier la réglementation que ce soit ou non avant l'arrêt de la Cour européenne ? Dans la négative, comment justifie-t-elle ce choix négatif ?

2. La ministre partage-t-elle mon point de vue, à savoir que la législation belge en cette matière est vieillie parce qu'elle se fonde sur une conception de la famille qui est patriarcale et rétrograde ? A-t-elle eu connaissance du sondage du « Juristenkrant » de décembre 2010 montrant que l'obligation d'attribuer à un enfant le nom de son père est considérée comme l'article de loi le plus critiquable de la législation fédérale ? Envisage-t-elle de revoir l'ensemble de la législation relative au nom de famille ? Est-elle éventuellement disposée à soutenir la proposition de loi (n° 5-998) que Guy Swennen et moi-même avons déposée en cette matière ? Dans la négative, quelles autres pistes voit-elle pour améliorer cette législation et la rendre plus équitable ?

Réponse reçue le 18 juin 2013 :

  1. Il est vrai que la Commission européenne a pris, le 27 septembre 2012, la décision de saisir la Cour de Justice de l’Union européenne dans une affaire de ce type, mais la requête n’a pas encore été déposée officiellement. Il me paraît dès lors prématuré de commenter cette affaire sans connaître exactement les arguments qui seront avancés par la Commission dans sa requête.

    Sans préjuger des arguments qui seront avancés par la Commission et des arguments du Gouvernement dans ce dossier particulier, il y a lieu de rappeler que le nom relève de la loi nationale de l'intéressé et ce, conformément à l'article 37 du Code de droit international privé.

    Des divergences de noms d'un pays à l'autre peuvent survenir lorsque l'enfant intéressé dispose de plusieurs nationalités, dont la nationalité belge. Le Code de droit international privé prévoit une solution pour résoudre ces difficultés. En effet, l'article 3 de ce Code dispose que, si tel est le cas, la personne sera considérée comme Belge et, par conséquent, la législation belge sur l'attribution du nom lui sera applicable.

    Dès lors, conformément à l'article 335 du Code civil, il portera le nom du père si les filiations paternelle et maternelle sont établies simultanément ou si seule la filiation paternelle est établie à l'égard d'un enfant. En outre, dans le cas où la filiation paternelle est établie après la filiation maternelle, il est loisible aux parents de faire, dans l'année où les déclarants ont eu connaissance de la filiation paternelle, une déclaration conjointe devant l'officier de l'état civil selon laquelle l'enfant portera le nom du père. En l'absence de pareille déclaration ou si seule la filiation maternelle est établie à l'égard d'un enfant, celui-ci portera le nom de sa mère.

    Le nom échappe au libre choix des parents, l'état des personnes étant indisponible. La législation belge reconnaît toutefois aux parents qui ont un enfant binational - dont la nationalité belge - et qui porte des noms différents dans les Etats dont il a la nationalité, d'introduire une demande en changement de nom auprès du ministre de la Justice, sur base de la loi du 15 mai 1987 relative aux noms et prénoms, afin que le nom de l'enfant soit identique d'un État à l'autre. Ce changement leur est en principe toujours octroyé.

  2. Je partage le point de vue selon lequel la législation relative au nom doit être modifiée, comme je l’ai souligné à la Chambre dans ma note de politique générale du 27 décembre 2012 (Doc. parl., Ch., Sess. ord. 2012-2013, n° 53-2586/027, p. 18).

    Un avant-projet de loi réformant le droit matériel du nom a d’ailleurs été préparé par mon administration. Ce projet fera ensuite l'objet de discussions au sein du Gouvernement. Il conviendrait que le système retenu vise à faire refléter l’égalité entre hommes et femmes dans l’attribution du nom.