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Question écrite n° 4-5395

de Paul Wille (Open Vld) du 7 décembre 2009

au vice-premier ministre et ministre des Affaires étrangères et des Réformes institutionnelles

Afghanistan - Irak - Central Intelligence Agency (CIA) - Techniques de torture

Afghanistan
Iraq
guerre
prisonnier de guerre
États-Unis
terrorisme
torture
service secret
Tribunal pénal international

Chronologie

7/12/2009Envoi question (Fin du délai de réponse: 8/1/2010)
21/1/2010Réponse

Réintroduction de : question écrite 4-4248

Question n° 4-5395 du 7 décembre 2009 : (Question posée en néerlandais)

Les États-Unis ont informé la Croix-Rouge de l'identité de prisonniers qu'ils détenaient en secret jusqu'à présent en Afghanistan et en Irak. Cela a été confirmé par des porte-paroles officiels du Pentagone.

C'est un revirement assez radical de la position du ministère américain de la Défense.

La Croix-Rouge a essayé en vain pendant l'administration Bush d'obtenir des informations sur les personnes qui étaient détenues en secret. Les Américains ont refusé de donner ces informations parce que s'ils le faisaient cela mettrait en péril des missions antiterroristes.

Il faut aussi remarquer que de nombreux détails ont aussi été publiés sur les prétendues techniques d'interrogatoire, disons plutôt les techniques de torture. Menace avec des foreuses en action ou des armes, exécutions bidons et la tristement célèbre technique de la baignoire en sont quelques exemples. Franchement navrantes sont les fausses exécutions où pendant l'interrogatoire on met en scène, dans une pièce voisine, l'exécution d'un autre prisonnier, terminée par un tir d'arme à feu. Une pareille terreur mentale engendre une telle peur chez le suspect qu'il « parle » à coup sûr. Notez que menacer un prisonnier d'une «  mort imminente » est interdit par la loi aux États-Unis.

Newsweek, qui a publié des articles sur ce sujet, se base sur un rapport qui a été rendu public à la fin du mois d'août par la Central Intelligence Agency. Ce volumineux rapport, rédigé en 2004, fait état selon Newsweek de nombreuses fausses exécutions. Le document n'avait pas été rendu public en son temps sous la pression de hauts fonctionnaires militaires et politiques de l'administration Bush.

Vu ce qui précède, voici mes questions.

1. Comment réagissez-vous à cette information ?

2. Y a-t-il eu des contacts avec le ministère des Affaires étrangères des États-Unis ou avec le Pentagone sur la possibilité que des prisonniers secrets possédant la nationalité belge aient été soumis à ces tortures ? Ou que des prisonniers possédant une double nationalité dont la belge aient été soumis à ces tortures ? Si cela s'avère, de combien de personnes s'agit-il ? Si non, la ministre a-t-il effectué des vérifications de manière proactive ? Ou non ? Dans cette dernière hypothèse , le ministre a-t-il l'intention d'effectuer ces vérifications ?

3. Le ministre pourra-t-il me communiquer ce document sitôt que sa cellule stratégique en disposera ? S'il ne le peut, pour quelle raison ?

4. Le ministre a-t-il durant ces dernières semaines discuté avec ses homologues des Affaires étrangères de ces pratiques de la CIA ? Quelles conclusions furent-elles tirées ? Si ces discussions n'ont pas eu lieu, le ministre estime-t-il opportun d'arriver à un point de vue européen commun sur de pareilles pratiques ?

5. Le ministre est-il disposé à faire pression avec ses homologues européens et non européens, au sein du Conseil de sécurité ou d'autres organes des Nations unies pour que les États-Unis souscrivent aux statuts de la Cour pénale internationale ?

6. Le ministre est-il disposé à donner avec ses collègues européens un signal commun visant à faire pression sur les États-Unis pour qu'ils souscrivent aux statuts de la Cour pénale internationale ? Si non, pourquoi ? Si oui, le ministre peut-il nous informer clairement de la teneur des discussions éventuelles à ce sujet ?

7. L'administration Obama a-t-elle donné des garanties sur le fait que ces pratiques ont entre-temps été arrêtées?

Réponse reçue le 21 janvier 2010 :

1. Il va de soi que comme membre de gouvernement d’un pays démocratique attaché aux valeurs fondamentales de tout état de droit, je suis contre les pratiques décrites par le Magazine Newsweek. La lutte contre le terrorisme implique en toutes circonstances que les Droits de l’Homme soient respectés.

2. Je n’ai pas connaissance de l’existence éventuelle de détenus belges secrets ou jouissants de la double nationalité.

3. Comme il le signale monsieur Wille lui-même, le rapport de la CIA auquel il se réfère a été publié par le Magazine Newsweek le 26 août 2009. Ce rapport, qui date de 2004, a été déclassifié avant sa publication. J’en ai donc pris connaissance comme lui, dans la forme où il a été publié.

4. L’Union européenne a une position de principe claire concernant le respect des Droits de l’Homme. L’administration américaine actuelle semble déterminée à enquêter sur ces pratiques du passé. Il existe d’ailleurs une enceinte de dialogue appropriée entre les États-Unis d’Amérique et l’Union européenne, où les principes juridiques applicables à la lutte contre le terrorisme peuvent être discutés (COJUR-COTER). De plus, les experts de droit international public des États membres ont exprimé leur préoccupation au Conseil de l’Europe (CAHDI), concernant les centres de détention secrets, et ont critiqué certaines méthodes d’interrogation des détenus.

5. La politique des États-Unis concernant la ratification des statuts de la Cour Pénale Internationale est pour le moment en cours de révision (« review process »). Pendant sa campagne électorale, le candidat Obama avait annoncé qu’il attacherait de l’importance aux prestations factuelles de la Cour.